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Des obligations positives de l'état congolais face à  la protection du droit à  la vie de 2007-2009

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par Philémon MASUDI KANDOLO
Université officielle de Bukavu - Mémoire de licence 2009
  

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§3. Tentative de théorie sur la réparation

De par la définition de la responsabilité telle que donnée précédemment, il ressort que pour qu'il y ait responsabilité, en général en droit, il faut réunir certaines conditions : un fait générateur ou une faute, un préjudice ou dommage et l'imputabilité ou lien causal entre le préjudice et la faute (168(*)). 

I. Le préjudice ou dommage

Egalement pour qu'il existe une créance en indemnité, il faut qu'il y ait un dommage, un préjudice à réparer. Le préjudice est le dommage subi par la victime de la faute (169(*)). Le langage commun utilise de façon indifférente le terme dommage et préjudice. Une nuance existe entre les deux.

Le dommage est une atteinte à l'intégrité d'une personne, d'une chose ou à la situation normale d'un fait ; il est donc un fait constatable. Le préjudice recouvre l'ensemble des conséquences du dommage. Ce qui permet de tenir compte des éventuelles aggravations au-delà du simple dommage. Pour être réparé, le préjudice doit être réel, certain, direct et personnel. Par le caractère réel, le juge écarte les plaintes fondées sur les actes qui n'ont pas eu d'incidence nuisible. Le caractère certain signifie que le préjudice résulte d'une mesure devenue définitive.

Ce qui permet d'écarter les actions fondées sur simple crainte. De ce point de vue, il faut distinguer entre préjudice futur et préjudice éventuel. Un préjudice peut être futur lorsque les faits subis causeront un éventuel dommage. Un préjudice éventuel reste marqué par l'alea. Le préjudice direct est celui qui est la conséquence immédiate de l'acte de l'agissement du pouvoir public. Le préjudice personnel est celui qui affecte directement le requérant, ce qui permet d'écarter les actions sans intérêt (170(*)). En plus de ce caractère, le préjudice peut être matériel ou moral.

Le préjudice moral renvoie à la souffrance subie lorsque les événements malheureux affectent les proches. La preuve de l'existence et l'étendue du préjudice incombent au requérant lequel doit aussi proposer une évaluation de son préjudice. Le préjudice moral difficile à préciser, la jurisprudence estime qu'il appartient au juge d'apprécier l'évaluation.

II. Caractères du dommage

Pour requérir une réparation, tout dommage revêt quatre caractères.

A cette condition le dommage présent né et actuel, et le dommage futur, lorsque sa réalisation apparaît inévitable. Le dommage éventuel est écarté. Pour être indemnisée la victime doit prouver l'existence du dommage qu'elle a subi. Il doit être certain au moment où le juge va statuer de façon que son évaluation soit efficace. En bref le préjudice doit être certain et actuel. Cette notion de certitude mérite d'être précisée (171(*)). Il n'est pas nécessaire, pour être réparé que le préjudice soit actuel au jour du jugement.

La condition spéciale d'un dommage, c'est - à - dire que la victime doit subir le préjudice et non l'ensemble des membres de la collectivité. Il ne faut pas confondre spécialité et fréquence du dommage par ce qu'un préjudice ne cesse pas d'être spécial du fait qu'il se produit fréquemment. La présence d'une situation juridiquement protégée sur laquelle le dommage doit porter, ce n'est pas un intérêt quelconque qui est protégé.

La doctrine et la jurisprudence parlent d'intérêt légitime. Il s'agit comme le dira WELL, d'un intérêt digne d'être pris en considération par la loi, d'un intérêt qui n'est pas contraire aux lois, qui cependant sont protégé par la loi. Il sied de noter parmi les dommages susceptibles d'être réparés on peut citer : dommages matériels, les dommages corporels et les dommages moraux.

A. Dommages matériels

Il s'agit de toute atteinte aux droits et intérêts d'ordre patrimonial et économiques de la victime. La jurisprudence estime que le dommage matériel comporte les frais de l'expertise contradictoire, mais non, à défaut du lien de causalité, les frais de défense.

B. Dommages corporels

C'est une catégorie particulière des dommages. Cette catégorie vise essentiellement, les atteintes à l'intégrité physique de l'homme : blessures, coups, passage à tabac, le fouet, meurtre, assassinat. La protection de ce droit est contenue dans la constitution de la R.D.Congo à son article 16. De même dans le droit positif congolais, aucune disposition n'autorise de porter atteinte pour quelque motif que ce soit à la vie et l'intégrité physique d'autrui.

Il est intéressant d'insister sur le caractère absolu de cette prohibition. Il découle de cette prohibition que toute violation entraîne la responsabilité pénale de son auteur et la responsabilité civile de l'Etat lorsque l'auteur n'est pas poursuivi.

Signalons que, le juge administratif limitait l'obligation de réparer aux seuls dommages matériels, en entendant par là ceux qui ont des conséquences d'ordre patrimonial, soit par les dépenses qu'ils entraînent, soit par les pertes qu'ils provoquent, par exemple la perte d'un organe du corps (atteintes aux biens ou à l'intégrité de la personne physique notamment). Il écartait les atteintes à des valeurs abstraites, réputation, affection, il en donnait pour raison que des tels dommages ne sont pas évaluables en argent, et ne comportent pas, dès lors de réparation adéquate.

C. Dommages moraux

Les atteintes à certaines valeurs non matérielles ont été progressivement prises en considération. L'évolution s'est trouvée faciliter par les possibles répercutions patrimoniales de certains de ces dommages moraux : ainsi de l'atteinte à la réputation artistique d'un acteur, d'un sculpteur ; ainsi du préjudice esthétique provoqué par une blessure au visage pouvant gêner la vie de la victime.

Mais, l'obligation de réparer s'étend à des dommages dépourvus de toute conséquence pécuniaire : souffrance physique exceptionnelle atteinte à la dignité personnelle.

Ils s'étendent aussi aux souffrances morales que subissent les membres de la famille de la personne décédée et éventuellement aussi assistance dont ils bénéficiaient de sa part.

a. Imputabilité

La faute du pouvoir public est généralement commise par les personnes physiques. Ce qui peut soulever les difficultés pour identifier à qui la faute doit être imputé. Dans la jurisprudence de la CEDH, il ne s'agit de savoir qui est responsable lorsqu'une personne ait été assassinée alors que l'organe de l'Etat chargé de poursuivre l'infraction reste indifférent, le premier responsable c'est l'Etat.

Il n'y a pas lieu de distinguer la faute personnelle à la faute de service. La faute personnelle c'est la faute qui se détache complètement du service. Elle est étrangère à la fonction normale du service, dans les cas sous examen l'Etat doit garantir la sécurité de toute la population se trouvant sous sa juridiction et, en cas de violation de ce droit, il doit mettre en oeuvre son appareil judiciaire en vue d'en punir les auteurs.

En R.D.Congo, la faute personnelle correspond à la faute de l'agent préposé et la faute de service; c'est la faute de l'agent organe. Surgit la question de savoir quand est- ce que un agent est préposé ou un agent est organe. Pendant longtemps était considéré comme organe les agents en situation réglementaire tandis que les contractuels étaient des préposés.172(*) Ainsi, pour DEBURLET sont organes des personnes publiques et engageant directement la responsabilité de l'Etat, les agents titulaires d'une nomination ou une investigation régulière qui exercent les fonctions d'autorité. De même pour Marcellin RAE est préposé de l'Etat l'agent qui n'exerce pas un pouvoir administratif mais, qui remplit le fait matériel peu importe qu'il soit dans une situation réglementaire ou contractuelle.

III. Droit à réparation

Le droit à réparation une fois né au profit de la victime, il importe de designer un responsable. La faute remplit déjà cette fonction lorsqu'elle est à l'origine du dommage causé par le fait d'une personne. La faute est en même temps source du droit à réparation et fondement de la désignation du responsable. Mais la faute génératrice de responsabilité personnelle de son auteur, elle fait naître également une responsabilité d'autrui. C'est par exemple le cas du préposé qui agit pour le compte d'autrui s'il commet un préjudice, il oblige son commettant à répondre des dommages qu'il cause (173(*)).

La faute n'engendre plus seulement la responsabilité personnelle de son auteur, elle fait naître également une responsabilité à l'égard d'un tiers qu'il faut designer indépendamment de toute faute (174(*)). Il en est de même pour les responsabilités engagées à la suite de dommages accidentels ou causés par des choses en l'absence de toute faute : un responsable doit être trouvé. Les fondements de la désignation du responsable dans ces responsabilités indirectes sont variés. Tous s'articulent autour de la notion de risque, que l'on retrouve ici. Le responsable est celui qui prend ses risques, il doit en assumer les conséquences.

Plusieurs idées justifient l'attribution d'une responsabilité sans faute à une personne plutôt qu'à une autre. La première est celle qui voit dans la responsabilité la contrepartie du profit qu'une personne tire d'une activité que le commettant soit déclaré responsable du fait de ses préposés, car il profite de leur activité. Une autre justification s'appuie sur le fait qu'il parait naturel d'imputer la responsabilité à celui qui est à l'origine des risques. En s'inspirant largement quand à ce paragraphe de l'ouvrage « droit administratif, de Jean RIVERO et WALINE, disons que tout dommage n'entraîne pas nécessairement, pour son auteur l'obligation de réparer. C'est l'exemple des dommages indirects, dus à la force majeure, l'obligation de réparer n'existe qu'autant que l'acte qui a causé le dommage présente certains caractères, qui fondent la responsabilité. En droit privé le fait fautif engage son auteur ; exceptionnellement, la responsabilité peut s'attacher à la création d'un risque qui s'est réalisé.

IV. L'inexécution des décisions judiciaires condamnant l'Etat

La mise en oeuvre du mécanisme judicaire contre l'Etat sur le plan national se heurte à plusieurs limites qui se résument en «politiquement » dans un contexte donné. Les collaborateurs de l'appareil judiciaire sur le plan national y participe souvent en tant qu'auteurs. C'est un fait qui d'emblée s'impose à notre observation, que les infractions commises au nom et pour le compte de l'Etat par les agents de l'autorité publique dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leur fonction, bien que prévues dans le code dans sa répression des « abus d'autorité », ne font que rarement l'objet de condamnation qui n'aboutit pas à une exécution.

Une confrontation des textes légaux et la pratique nous permettent de conclure à une large immunité de l'activité judiciaire dommageable de l'Etat. L'impuissance des juges nationaux, qui tiennent du pouvoir politique lui-même, en est le facteur déterminant. En effet, il ne reste plus en dernière analyse que le recours devant les juridictions internationales. Mais ce recours est subordonné, en vertu du principe de subsidiarité, à la condition d'épuisement des voies de recours internes en ce qui les individus (175(*)) d'une part, et de l'autre la précarité des mécanismes africains de protection des droits de l'homme où le recours individuel est quasi inexistant et partant inefficace.

Il sied de signaler aussi que depuis la nuit de temps plusieurs décisions ont été rendues condamnant l'Etat mais qui, dans la plupart reste sans être exécutées alors que l'intérêt d'une décision judiciaire réside dans son exécution car, c'est par celle-ci que le bénéficiaire de cette décision est rétabli dans ses droits (176(*)).

En effet, l'exécution forcée ne peut se faire que sous le contrôle de la justice, bien évidemment avec le concours d'un huissier et en cas de résistance, requiert la force de l'ordre public (police et armée). Or le principe de l'insaisissabilité (177(*)) des biens de l'Etat constitue par ailleurs le plus grand verrou à l'exécution forcée contre l'Etat car ce dernier est présumé être solvable. Quand bien même condamné l'Etat congolais ne paie presque jamais ses dettes vis-à-vis de ses citoyens. Il y a même lieu de croire à son insolvabilité.

Le dommage du fait du fonctionnement défectueux de la justice qu'un justiciable peut subir résulte de plusieurs sources. Il peut découler de la mauvaise application des lois, de l'inexécution ou de la mauvaise exécution des décisions, du fait des agents judiciaires, etc.

En marge du succès remporté par l'institution de la justice de proximité qui tant soit peu réussit à rétablir la paix, l'harmonie entre les gens, elle est limitée tant dans la force qu'en compétence des personnes « magistrat » qui la tiennent.

Quelque soit le fait de personnes bien intentionnées, moralement équilibrées, de bon sens, cultivant un esprit de droiture, cette justice se trouve fondamentalement limitée par son caractère volontariste et l'absence de contrainte pour rendre ses décisions exécutoires lorsqu'elles condamnent l'Etat et imposer leur application.

C'est ce qui explique la prise de position de certaines personnes qui considère cette institution comme un recul par rapport au droit moderne .Pour les uns, cette institution étant inefficace, constitue une perte de temps et surtout si on est opposé à l'Etat congolais et pour d'autre, cette institution les embrouille.

L'impunité se définit par l'absence, en fait ou en droit, de la mise en cause de la responsabilité pénale des auteurs de violation des droits humains, ainsi que de leur responsabilité civile, administrative ou disciplinaire. L'impunité consiste en ce que les atteintes graves portées aux droits de l'homme par ou sous l'autorité, des agents de pouvoir ou de service publics de fait ou de droit, ne donnent presque jamais lieu à l'ouverture d'une enquête pour établir les faits et situer les responsables (178(*)). Quand bien même une décision judiciaire peut être prononcé condamnant l'Etat comme civilement responsable, si elle n'est pas exécutée contre ce dernier, tel est le cas pour l'Etat congolais, elle n'a d'intérêt.

Le combat contre l'impunité sera gagné par l'avènement d'un Etat de droit que les congolais se sont d'ailleurs résolus et engagés d'instaurer. Mais dans la marche actuelle vers cet Etat de droit, des efforts considérables doivent encore être déployés pour rendre indépendant l'appareil judiciaire et rendre la justice équitable à tous.

Le dysfonctionnement de la justice dans un pays pour quelle raison que ce soit est constitutif d'une violation et favorise les violations des droits de l'homme.

* 168 K. NTABALA, Droit administratif, UNIKIN, Tome I, 1997, p. 191

* 169 Y. V. CHARTIER, La réparation du préjudice, Paris, Dalloz, 1996, p. 157.

* 170 S. GUINCHARD, L'ambition d'une justice rénovée, Paris, Dalloz, 1999, p.66.

* 171 J. RIVERO, Droit administratif, Paris, Dalloz, 2002, p.236.

* 172J.M. WOEHRLING, « L'administration et le contrôle juridictionnel en Europe » Construction progressive

d'un modèle, in OECD, SIGMA, EU. p.6

* 173BESSON, Responsabilité et assurance de la responsabilité, 6e éd ., Paris, Dalloz, 1989.

* 174M.FONTAINE, Droit civil : les obligations, Louvain, UCL, 1990, p. 249.

* 175F. SUDRE, Op. Cit., p.233

* 176 R. CHAPUS, Responsabilité publique et responsabilité privée, LGDG, 1957,p.541.

* 177 HAURIOU, Précis de droit administratif et de droit public, LGDG, Paris, 1939, p.369.

* 178Voir les principes du colloque de Bruxelles contre et pour la justice internationale adoptés par « Groupe de

Bruxelles pour la justice internationale » à la suite du colloque portant «  lutte contre l'impunité : Enjeux et

perspectives » (Bruxelles, 11- 13 mars 2003).

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