III- JUSTIFICATION DU SUJET.
Le paradoxe entre le combat féministe en vigueur dans
l'Afrique actuelle et la réalité anthropologique africaine,
l'instauration de la journée du 08 mars pour soutenir un mouvement qui
combat la culture africaine et qui prône l'égalité des
genres dans un environnement qui promeut la complémentarité,
le
19- Yvette Balana, Ibid., p. 2.
20- Yvette Balana, Ibid, p. 2.
21- Ainsi est désigné ce qu'on appelle
vulgairement l'« Afrique » dans tous les articles que comporte le
premier numéro de la revue La Parole africaine. Cette
appellation nous semble mieux appropriée pour désigner le «
continent africain » qui a besoin d'unité pour son
re-décollage. Ainsi, de temps en temps, nous l'utiliserons. Mais nous
pourrons aussi employer le vocable « Pays » tout simplement
comme c'est le cas dans la même revue. Soulignons également que
« Batu » est la terminologie qui désigne le peuple
noir africain dans la même revue.
diktat occidental faisant croire que l'Afrique est le
cimetière des valeurs féminines, sont autant de motivations qui
ont laissé mûrir ce sujet. L'histoire de l'Afrique démontre
le rayonnement fabuleux que les femmes noires ont connu dans ce continent
à travers les civilisations qui se sont succédé depuis
l'Egypte pharaonique jusqu'à l'invasion d'une part du mouvement
almoravide au Xe siècle, et du mouvement colonialiste à partir du
XVe siècle d'autre part. Nul n'ignore par exemple la
prégnance de l'Africaine dans le devenir de l'enfant, voire de
l'humanité. C'est elle qui confère des pouvoirs
héréditaires :
« On ne pourra être sorcier,
c'est-à-dire doué de toutes les qualités [...],
c'est-à-dire sorcier-total, que si l'on est issu d'une mère
sorcière au même degré ; peu importe ce qu'est le
père. Si la mère n'est douée d'aucun pouvoir et si le
père est sorcier-total (demm en valaf) l'enfant n'est qu'à
moitié sorcier : il est nohor ; il ne possède aucune
qualité positive du sorcier, il n'en a que les aspects passifs. [...] On
voit donc ici que la participation du père dans la conception de
l'enfant n'est pas mise en doute, n'est pas ignorée, et qu'elle est
secondaire et moins opérante que celle de la mère
»22.
Et même, n'a-t-on pas entendu parler du dynamisme et du
pouvoir imposant des reines à l'instar de Hatshepsout ou de Nicotris en
Egypte, Candace et toutes les reines qui porteront son nom au Soudan dans le
puissant royaume de Koush ? Que dire des grandes guerrières telles que
la princesse Yennenga, fille de Moro Naba au niveau du Burkina Faso, la reine
Dzinga d'Angola ou encore la reine Pokou des Baoulé ? Pourquoi ignorer
les fabuleuses amazones du roi Béhanzin qui tinrent farouchement
tête à la pénétration française dans le
royaume de Dahomey alors que les hommes s'étaient déclarés
vaincus ? Des exemples ne manquent pas pour justifier la puissance cardinale de
la femme dans la tradition africaine. Nous nous donnons pour objectif de le
démontrer en nous appuyant sur l'oeuvre qui sert de corpus.
22- Cheikh Anta Diop, L'Unité culturelle de
l'Afrique noire, Op.cit., p.37.
|