FACULTÉ DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE
L'ÉDUCATION
INSTITUT DE FORMATION EN SCIENCES DE L'ÉDUCATION POUR
ADULTES - FOPA
Le décrochage scolaire: du contrôle social
aux logiques de solidarité entre les différents
intervenants
PROMOTEUR : Vincent DUPRIEZ
ACCOMPAGNATEURS : Luc ALBARELLO
Laurence GERARD
|
Louvain-la-Neuve (Janvier 2010)
|
MÉMOIRE PRÉSENTÉ EN VUE DE L'OBTENTION DU
GRADE DE MASTER EN SCIENCE L'ÉDUCATION
PAR
Antonio Rizzo
|
« Il m'a semblé qu'en ces temps
d'incertitudes, lorsque le passé se dérobe et que l'avenir est
indéterminé, il fallait mobiliser notre mémoire pour
essayer de comprendre le présent. » (Robert Castel, 1975).
« Vous n'imaginez qu'à peine ce que cela
réclame comme efforts et de temps que de mettre sur pied la
méthode, les classifications, la terminologie rigoureuse et
appropriée. » (E. Kant, 1773).
Je tiens à remercier l'Université Catholique
de Louvain-la-Neuve, et plus particulièrement la FOPA, qui m'ont permis
de me former tout au long de ces trois années d'études et m'ont
apporté un nouveau regard sur ma pratique professionnelle et des
nouvelles perspectives d'avenir.
Je remercie également mon promoteur, Vincent
Dupriez, pour sa patience et ses commentaires judicieux tout au long de la
construction de ce mémoire, ainsi que mon accompagnateur Luc Albarello,
pour son soutien et ses conseils méthodologiques. Aussi, un grand merci
pour l'aide et le soutien de mes lectrices externes, Laurence Gérard et
Nathalie Soggia.
Une montagne de mercis à mon épouse, Vanessa
Aiera, et à ma fille, Norah Rizzo, qui ont été un moteur
hors du commun durant ces trois années. Enfin, une pensée
particulière pour mon défunt père, Stefano Rizzo, ainsi
que pour ma mère, Michèle Cristino, auxquels je dédie ce
travail.
Le décrochage scolaire: du contrôle social
aux logiques de solidarité
entre les différents intervenants 1
Introduction générale 5
Première partie : Construction de l'objet de recherche
8
Chapitre 1 : Le décrochage scolaire ou la fabrication d'un
nouveau problème social ? 8
1 Introduction 8
2 Le décrochage scolaire : sujet politique,
économique et social 8
3 Le décrochage scolaire : sujet de contrôle et
d'insécurité 14
4 Critique sur le décrochage scolaire 17
5 Conclusion 19 Chapitre 2 : Le décrochage scolaire ou
l'émergence de nouveaux dispositifs en Communauté
française de Belgique 20
1 Introduction 20
2 Les décrets et normes étatiques qui balisent les
opérateurs sociaux traitant le décrochage
scolaire en Communauté française 21
2.1 Loi du 29 juin 1983 concernant l'obligation scolaire, art.
1er, § 1er, al.1er 21
2.2 Le décret du 4 mars 1991 21
2.3 Le décret du 30 juin 1998 22
2.4 Décret du 13 mars 2008 portant diverses mesures de
lutte contre le décrochage scolaire,
l'exclusion et la violence à l'école 22
2.5 La Circulaire 1972 pour l'année scolaire 2007-2008
23
2.6 La Circulaire ministérielle du 7 juillet 2006 <PLP
41> 23
3 Les acteurs du champ de l'accrochage scolaire sur le territoire
louvièrois 24
3.1 Les acteurs scolaires 25
3.2 Les acteurs issus du milieu associatif 27
3.3 Les acteurs judiciaires 28
3.4 Les acteurs communaux 29
4 Présentation de la Ville de La Louvière 30
5 Le décrochage scolaire dans la tanière des loups
31
6 De la concertation entre les différents
opérateurs au projet « Pass scolaire » 34
7 Conclusion 37
Chapitre 3 : Le décrochage scolaire, une question de
solidarité 38
1 Introduction 38
2 L'idéal type comme outil conceptuel 39
3 Les quatre types idéaux fondamentaux de Max Weber 40
3.1 L'action rationnelle en finalité 40
3.2 L'action rationnelle en valeur 40
3.3 L'action traditionnelle 40
3.4 L'action affective 40
4 Les quatre logiques de solidarité de Guy Bajoit 42
4.1 La solidarité conditionnelle 42
4.2 La solidarité contractuelle 42
4.3 La solidarité fusionnelle 43
4.4 La solidarité affective 43
5 Conclusion 45
Deuxième partie : recherche empirique 46
Chapitre 4 : Méthodologie 46
1 Problématique 46
2 Objectifs de recherche 47
3 Hypothèse 47
3.1 Les variables dépendantes (V.D) et
indépendantes (V.IND) 48
3.1.1 V.D 48
3.1.2 V.IND 48
4 Échantillon 48
4.1 Critères pour interviewer les acteurs 49
4.2 Les acteurs communaux 50
4.3 Les acteurs scolaires 50
4.4 Les acteurs issus du milieu associatif 50
4.5 Les acteurs judiciaires 50
5 Outils et matériau pour la collecte des données
51
5.1 Le guide d'entretien 51
5.2 La représentation de la gestion du décrochage
scolaire au sein de l'organisation 51
5.3 La représentation des services qui traitent le
décrochage scolaire et des collaborations
éventuelles 52
5.4 La représentation de la Commission Accrochage
Scolaire et des collaborations
éventuelles 52
5.5 Le guide d'entretien organisé autour des trois
thématiques : 53
Représentation de la gestion du décrochage scolaire
53 La représentation des services qui traitent le décrochage
scolaire et des collaborations
éventuelles 53
Représentation de la Commission Accrochage Scolaire et des
collaborations éventuelles 53
5.6 Le traitement des données 54
5.7 Matrice pour la catégorisation 54
5.8 Construction de notre matrice 55
6 Conclusion 55 Chapitre 5 : Traitements des données
relatives aux logiques de solidarité des différents
opérateurs
traitant le décrochage scolaire sur le territoire
louvièrois 56
1 Introduction 56
2 Perceptions des différents acteurs relatives à la
gestion du décrochage scolaire 57
2.1 Les missions 57
2.1.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS 57
2.1.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO 59
2.1.3 L'acteur judiciaire, le Service Jeunesse et Famille (SJF)
60
2.1.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP 61
2.2 Limites des acteurs face au décrochage scolaire 63
2.2.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS 63
2.2.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO 64
2.2.3 L'acteur judiciaire, le SJF 64
2.2.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP 65
3 Les logiques de solidarité des acteurs 66
3.1 Logique de solidarité conditionnelle 66
3.1.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS 66
3.1.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO 66
3.1.3 L'acteur judiciaire, le SJF 67
3.1.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP 67
3.2 Logique de solidarité contractuelle 67
3.2.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS 67
3.2.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO 69
3.2.3 L'acteur judiciaire, le SJF 71
3.2.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP 73
3.3 La solidarité fusionnelle 74
3.3.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS 74
3.3.2 L'acteur issu du milieu associatif, L'AMO 75
3.3.3 L'acteur judiciaire, le SJF 75
3.3.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP 75
3.4 Logique de solidarité affective 76
3.4.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS 76
3.4.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO 76
3.4.3 L'acteur judiciaire, le SJF 76
3.4.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP 76
4 Influence de la Commission Accrochage Scolaire sur les
différents acteurs 77
4.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS 77
4.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO 78
4.3 L'acteur judiciaire, le SJF 78
4.4 L'acteur communal, l'AAS 79
Chapitre 6 : Discussion sur le contenu de la méthode 80
1 Introduction 80
2 Résultats et interprétation des
différentes perceptions de la gestion du décrochage scolaire
des acteurs au sein de leur organisation 81
3 Résultats et interprétation des
différentes logiques de solidarité des différents acteurs
84
4 Résultats et interprétation de la participation
des différents acteurs à la Commission
Accrochage Scolaire 89
5 Retour à nos objectifs de recherche 91
6 Critique sur la méthode 93
7 Retour aux cadres théoriques 93
8 Perspective 96
Conclusion générale 97
Bibliographie 99
Ouvrages et revues 99
Documents 101
Documents internet 102
Glossaire : 103
Introduction générale
Dans une société de plus en plus
compétitive et exigeante, la qualification et le diplôme que
confère l'école apparaissent plus que jamais comme le meilleur
rempart contre le chômage et la marginalisation ainsi que la condition
minimale pour prétendre à l'obtention d'un emploi. Ceux qui ne
s'inscrivent pas dans cette logique sont aujourd'hui au centre de dispositifs
multiples et complexes ambitionnant de les rendre à la fois autonomes,
socialement et professionnellement « insérables » et ce, dans
une logique de contrôle social.
En qualité de travailleur social impliqué depuis
sept ans dans une structure ayant pour mission l'accompagnement des jeunes en
décrochage scolaire, nous nous trouvons au coeur de ce projet ciblant
ceux qualifiés désormais de « groupe à
problèmes».
Le décrochage scolaire est un «abandon
scolaire» défini par le législateur comme une situation
oüun élève soumis à l'obligation scolaire
soit n'est inscrit dans aucun établissement ni instruit à
domicile, soit est inscrit mais totalise, sans motif valable,
plus de vingt demi-jours d'absence. Opérant sur le territoire de La
Louvière, région à forte densité de population
scolaire et particulièrement touchée par le
phénomène du décrochage, la structure - l'Antenne
Accrochage Scolaire (AAS) du Plan Stratégique de Sécurité
et de Prévention (PSSP) - est un service communal financé par le
Fédéral. Son objectif numéro un est de promouvoir une
approche intégrée et globale de lutte contre le décrochage
scolaire.
Ceci posé, nous constatons que les problèmes
rencontrés par les jeunes louvièrois sont de plus en plus
complexes et demandent des réponses adaptées. Bien que, comme
nous venons de l'évoquer, le réseau social et scolaire
développe différents services à l'intention de ces jeunes
en difficulté, l'efficacité de ces structures pose question. En
effet, d'une part, il est compliqué, pour les
bénéficiaires, de s'orienter dans cette « jungle »
institutionnelle ; d'autre part, les intervenants sociaux sont limités
dans leur stratégie et ont besoin de travailler en partenariat avec leur
environnement et, plus spécifiquement, avec les réseaux qui les
entourent.
Les alternatives face à cette problématique ne
peuvent exister qu'au travers d'un partenariat qui demande davantage de
coopération et de confiance.
De fait, l'Antenne Accrochage Scolaire collabore avec
différents acteurs locaux (scolaires, communaux, judiciaires et issus du
milieu associatif) concernés par cette problématique et, pour
certains, à l'instar l'Antenne Accrochage Scolaire, créés
expressément pour y répondre. Ce réseau d'aide est
régi, dans ses formes et missions, par un important appareil
légal émanant à la fois de l'Etat fédéral,
de la Communauté française et de la Région wallonne.
L'Antenne Accrochage Scolaire initie et coordonne des
rencontres pluridisciplinaires invitant les différents partenaires dans
le cadre de la Commission Accrochage Scolaire (CAS) également
encadrée par le Plan Stratégique de Sécurité et de
Prévention. La Commission Accrochage Scolaire est un lieu d'information
(notamment sur l'évolution du cadre légal) et de concertation
dont l'objectif est d'établir des pistes d'actions cohérentes
pouvant répondre aux difficultés tant des partenaires sociaux que
des familles et des adolescents. Cette Commission constitue donc un lieu
stratégique pour les différents participants ; c'est le point de
rencontre et de concertation, autour de cette préoccupation commune, de
partenaires fonctionnant par ailleurs selon des logiques et cultures
singulières.
En tant qu'animatrice-coordinatrice de la CAS, l'Antenne
Accrochage Scolaire permet de porter un « regard panoramique » sur
ces différents partenaires. Nous constatons que, pour atteindre leur
principal objectif, ceux-ci s'appuient les uns sur les autres, s'identifient
comme relais.
En d'autres termes, nous pouvons considérer que le
décrochage scolaire est, pour les acteurs en présence, une
question de solidarité. Encore nous faut-il cerner quels motifs
précis font s'entraider les différents partenaires ?
Pour ce faire, nous nous référerons à la
typologie du sociologue Guy Bajoit, elle-même inspirée en partie
de la typologie des formes de l'action selon Max Weber.
Partant, nous posons l'hypothèse suivante : les
perceptions de la gestion du décrochage scolaire et les logiques de
solidarité des acteurs scolaire, communal, judiciaire et issu du milieu
associatif sont influencées par l'organisation à laquelle ils
appartiennent.
Pour vérifier cette double hypothèse, nous avons
opté pour une analyse qualitative portant d'une part, sur divers
documents (comptes rendus de la CAS, textes légaux et circulaires) et
d'autre part, sur des entretiens semi-directifs menés avec un
échantillon d'acteurs participant à la CAS.
Aussi, à titre exploratoire, nous tenterons d'apporter
des éléments de réponses relatives à deux questions
que nous souhaitons soulever : Comment la CAS traite la diversité des
organisations qui y participent et comment influence-t-elle leur logique de
solidarité et leur perception du décrochage scolaire ?
Dans le cadre de notre recherche, notre angle disciplinaire se
situera aux niveaux organisationnel et institutionnel. La grille d'analyse
d'Ardoino (1980) peut nous aider à mesurer l'influence des
différents niveaux qui s'interpénètrent et agissent les
uns sur les autres.
L'organisationnel
Le groupe
Le relationnel L'individu/l'acteur
L'institutionnel
Sch6ma 1 : représentation
simplifiée de la grille d'Ardoino
La première partie de notre étude va s'attacher
à situer le phénomène du décrochage scolaire sur
les plans politique, économique et social. Nous passerons en revue les
différentes applications de l'appareil légal à la prise en
charge et aux acteurs du décrochage scolaire que nous prendrons le soin
de décrire. Enfin, nous présenterons notre outil heuristique
relatif aux différentes logiques de solidarité de Guy Bajoit pour
répondre à notre hypothèse de départ.
Dans la seconde partie de la présente recherche,
après l'exposé de la méthodologie retenue1,
nous nous attacherons à dégager les perceptions du
décrochage scolaire de chacun des intervenants interrogés
(traitant le décrochage scolaire sur le territoire de La
Louvière.de la Commission
Accrochage Scolaire) en nous fondant à la fois sur les missions et
limites d'interventions qu'ils nous auront explicitées. De façon
tout aussi systématique, nous dégagerons ensuite les logiques de
solidarité des différents acteurs. Nous aurons alors une vue
d'ensemble pour prendre la mesure de l'influence de l'organisation des acteurs
interviewés sur leurs perceptions de la gestion du décrochage
scolaire et sur leurs logiques de solidarité.
1Tout au long de ce travail, nous allons, à
travers une méthodologie scientifique, respecter les différentes
phases de la procédure relative aux consignes du cours d'Albarello, L.,
(2008-2009). Séminaire de recherche. FOPM 2007, UCL : FOPA.
Première partie : Construction de l'objet de
recherche
Chapitre 1 : Le décrochage scolaire ou la
fabrication d'un nouveau problème social ?
1 Introduction
C'est au niveau macro social que notre analyse se situe dans
notre premier chapitre. Nous tenterons, à partir de plusieurs questions,
de construire notre vision sociopolitique de la «fabrication» d'un
nouveau problème public : le décrochage scolaire. Cela implique
les questions suivantes : (1) par quel référentiel politique les
travailleurs sociaux sont-ils déterminés ? (2) Comment le
décrochage scolaire s'est-il construit ? (3) Aujourd'hui, comment est
considéré le décrochage scolaire ? (4) Quelles critiques
et conclusions en tirer ? L'objectif de ce chapitre est de permettre au lecteur
d'avoir une vision macro-sociale relative à la problématique du
décrochage scolaire.
2 Le décrochage scolaire : sujet politique,
économique et social
« La notion d'État social actif sous-tend les
réorientations récentes de la politique sociale belge et
européenne. Elle est fille de la crise de l'État providence et du
défi de la globalisation financière2i Depuis
quelques années, le concept de l'État providence fait place
à celui de l'État social actif. Le social d'aujourd'hui
consisterait à amener le citoyen « passif - allocataire
» (celui qui profite du système social) vers un statut de citoyen
« actif » Selon Abraham Franssen (2002), les ressources des
financements traditionnels de la sécurité sociale sont
alimentées par les cotisations des actifs et ne cessent de se
réduire. L'augmentation du « taux » de
dépendance entre actifs et inactifs est due pour moitié au
chômage et l'autre à la pension. En effet, nous sommes
passés en 1970 de deux actifs pour un allocataire à un actif pour
un allocataire en 2000, et cela, à cause du chômage et du
vieillissement de la population. À l'époque de l'État
providence et des « trente glorieuses », la
2Cassiers, I. (novembre 2005). De l'Etat Providence
à l'Etat social actif : Quelles mutations sous jacentes ? (p. 1)
Regards économiques, IRES, n°36.
légitimité de ce référentiel
était « basée sur la réalisation tangible pour
ses citoyens d'une forme de lien social reposant sur des garanties de
conditions de vie économiques et sociales décentes, dont
l'efficacité était à mesurer en termes de degré de
réalisation de ces conditions3.» L'absence
de chômage ainsi que les gains de productivité sont des
éléments qui ont favorisé la paix sociale. En outre, c'est
dans ce contexte que l'État providence fut apprécié
à la quasi-unanimité. Par la suite, tous les projets
opérants commencèrent à s'épuiser et on en est
arrivé à se demander ce qu'on allait faire de l'intervention
publique. Les politiques économiques et sociales de l'Occident ont connu
des limites. En effet, la crise (choc pétrolier) des années 70
s'installait partout en Europe et générait un chômage de
masse auquel l'État était dans l'incapacité de
répondre. Ce bouleversement socio-économique remit en question la
légitimité de l'État providence. On peut dire que la crise
se situait à trois niveaux : (1) le financement, (2) l'efficacité
et (3) la légitimité de l'action publique où on retrouve
« l'impuissance de l'État social traditionnel à assurer
aux allocataires sociaux une réelle protection. Les modes classiques
d'intervention de l'État social, intervenant ex post et par une
compensation financière, se révèlent insuffisants - voire
producteurs d'effets pervers - pour faire face à " l'apparition
structurelle de nouveaux facteurs de risques" que constitue principalement le
faible niveau de qualification des personnes4.» Par
conséquent, la proposition de l'État social traditionnel se
limite à une allocation sans proposer une réelle alternative.
C'est dans ce contexte que l'État social actif va asseoir sa
légitimité. Ainsi, en 1999, le Ministre Vandenbroucke partait
d'un constat « d'asphyxie » des états sociaux et proposait de
stopper la poursuite d'un « État providence appelé à
mourir5.» Par ailleurs, celuici souligne que : «
l'État social actif est proactif, il investit dans les personnes, il
travaille sur mesure et il donne davantage de responsabilités à
tous les acteurs. Par conséquent, l'État social actif est un
État de personnes actives qui se fixe pour objectif la participation
active de tous et la protection sociale6.» Au Conseil
Européen de Lisbonne (2000), « la mise en place d'un
État social actif et dynamique » est présentée
comme « une transformation nécessaire pour devenir
l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus
dynamique du monde7.» Compte tenu de la
persistance du chômage et du vieillissement de la population, la
3Hubert, H.O. & Schaut, C. (1999). L'Etat face
à l'insécurité : Dérives politiques des
années 90 (p. 155). Bruxelles : Labor.
4Franssen, A. (mars 2002). Thèse de doctorat,
Université Catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve. La fabrique du
sujet : Transformations normatives, crises identitaires et attentes de
reconnaissance (p. 15).
5Extraits des actes du colloque, «
Deuxième congrès international des formateurs en travail social
et des professionnels de l'intervention sociale, Namur, Belgique, 03 au 7
juillet 2007.
6Franssen, A. (mars 2002). Thèse de doctorat,
Université Catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve. La fabrique du
sujet : Transformations normatives, crises identitaires et attentes de
reconnaissance (p. 1).
7Cassiers, I. (novembre 2005). De l'Etat Providence
à l'Etat social actif : Quelles mutations sous jacentes ? (p. 1)
promotion de l'emploi doit devenir l'objectif principal de la
politique sociale. La conversion de l'État providence résiderait
dans des mesures permettant d'atteindre l'objectif d'un taux d'emploi de 70% de
la population en âge de travailler à l'horizon de 2010. La
stratégie européenne pour l'emploi prône trois
priorités d'action: attirer et retenir davantage de personnes sur le
marché de l'emploi; améliorer la capacité d'adaptation des
travailleurs et des entreprises; accroître l'investissement dans le
capital humain sous la forme d'une éducation et de compétences
améliorées. « Chômeurs, délinquants,
élèves en décrochage scolaire et autres font
désormais l'objet de processus d'insertion dont l'apparente
diversité présente cependant des traits communs: un projet
individualisé concrétisé dans un contrat dont l'objectif
est l'autonomisation des personnes8.»
Janosz et Le Blanc (1996) soulignent que « le
décrochage scolaire, phénomène devenu aujourd'hui un
problème social, inquiète de plus en plus l'opinion publique, les
parents, les éducateurs et tous ceux qui sont préoccupés
par le sort de la jeunesse.» Cependant, Glasman (2000) relève
que le phénomène de décrochage scolaire n'est pas nouveau
(200 000 abandons par an dans les années 70). Auparavant, l'abandon des
études était vécu comme moins grave car l'école
n'était pas perçue comme une nécessité pour
l'insertion professionnelle. Aujourd'hui, le nombre de sorties sans
diplômes a diminué (80 000 par an) mais inclut des
décrocheurs. Le Conseil de l'Éducation et de la Formation (2008)
met en évidence, en Communauté française de Belgique, la
problématique du décrochage scolaire tant sur un plan individuel
que collectif : « En plus d'être souvent perçu comme un
échec personnel synonyme d'incapacité à remplir les
exigences sociales fondamentales, le décrochage scolaire a aussi
d'énormes conséquences sur le plan économique. En effet,
ce phénomène se traduit par la multiplication de jeunes sans
qualification ayant un accès difficile au marché de l'emploi.
Ceci entraîne non seulement des augmentations des prestations de
chômage et des frais qui y sont reliés, mais aussi une
incapacité pour les entreprises de recruter de la main-d'oeuvre
qualifiée. En outre, les décrocheurs se retrouvent souvent avec
des emplois précaires et souspayés. (...) Les pays
européens ont pris conscience que ses répercussions
dépassent largement le seul domaine de l'éducation. Les
conséquences du décrochage scolaire sont en effet très
nombreuses et elles affectent autant le jeune sur le plan individuel, que la
collectivité dans son ensemble.»
Autrefois, au temps de l'État providence, le
décrochage scolaire n'était pas considéré comme
Regards économiques, IRES, n°36.
8Franssen, A. (mars 2002). Thèse de doctorat,
Université Catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve. La fabrique du
sujet : Transformations normatives, crises identitaires et attentes de
reconnaissance (p. 10).
un problème public. En effet, « le
décrocheur » n'était pas pointé du doigt comme
aujourd'hui. Nous avons tous en mémoire un membre de notre entourage
qui, pour des raisons personnelles, « décrochait » du
système scolaire pour intégrer le marché du travail :
« sans vouloir faire de provocation, on peut considérer
l'abandon de scolarité dans ce contexte non comme un problème,
mais comme une solution pour préserver une forme scolaire. Celle-ci est
fondée sur la primauté d'un savoir abstrait et académique,
une conception du travail scolaire comme disposition allant de soi, une
représentation élitiste de l'épreuve scolaire, impliquant
une élimination progressive de ceux qui ne font pas partie de
l'élite9.»
Dans ce contexte, l'épreuve scolaire implique, d'une
part, une « élimination » progressive de ceux qui ne font pas
partie de l'élite et de l'autre, une intégration, dans le
marché du travail le plus dévalorisé, des non
diplômés, considérés comme une main-d'oeuvre peu
qualifiée ; ceci tout en permettant au monde scolaire de reproduire son
fonctionnement. Dans la même période, de nombreux étudiants
quittent le système éducatif sans qualification. Le
système ségrégatif et sélectif de l'école en
est la cause. « Ainsi, il est évident que dans une
société où les résultats scolaires pèsent
lourds sur l'avenir, le droit à l'instruction et à la
réussite de tous soient des revendications politiques majeures et
légitimes. Cependant, le mythe de l'égalité des chances
allait se heurter violemment à la division sociale du travail de notre
société pour commencer à produire
l'inégalité : le système scolaire institue des
filières de relégation, trie à l'inscription,
sélectionne dans la constitution des groupes classes, oriente et
désoriente, exclut et marginalise10.»
L'élimination de près de la moitié d'une classe
d'âge du cursus scolaire sans diplôme n'est pas un problème
public. S'il en est un, c'est en termes d'inégalité et
d'injustice pour les enfants issus des classes populaires. « La
sociologie critique dénonce au cours des années 1970 la
reproduction par l'école des inégalités sociales
préexistantes, mais plus encore le fait qu'elle légitime les
inégalités en traitant de manière égale des enfants
a priori inégaux11.» De plus, «
la scolarité obligatoire a été prolongée jusque 18
ans (loi du 29 juin 1983) dans un contexte de crise économique
où la scolarisation apparaissait comme une solution face au
chômage des jeunes et aux besoins technologiques de l'économie
mondialisée.» « Parallèlement, la formule de la
formation en alternance combinant formation scolaire et en entreprise se
développe et s'institutionnalise au cours des années
199012.» Aujourd'hui, notre société a
évolué et, au vu des statistiques concernant le
9Bernard, J.Y. (2007). La construction du
décrochage scolaire comme problème public (p. 3).
Colloque international, Atelier 2/ politiques publiques, institutions, acteurs,
Nantes-13, 14 et 15 juin.
10L'observatoire, (2000). Numéro 28, p.13.
11Draelants, H. & Dupriez, V. & Maroy, C.
(2003). Le système scolaire (p. 48). Dossiers du CRISP
59. 12Op. cit., p. 28.
taux de chômage, l'actuel constat est clair : la grande
majorité des non diplômés du secondaire et des
diplômés du professionnel éprouve de grandes
difficultés à trouver un emploi. Ainsi, « la tendance
à l'allongement de la scolarité, qui s'est manifestée bien
avant que la loi ait rendu l'enseignement obligatoire jusqu'à 18 ans, a
eu pour effet de gonfler les effectifs de l'école secondaire. La forme
d'enseignement qui a le plus profité de cette évolution est le
professionnel qui, de 1976 à 1986, a vu sa popularité
croître de 44 %. On doit malheureusement constater que la proportion des
diplômés du professionnel n'a fait que croître dans les
statistiques du chômage. En d'autres termes, les groupes socialement les
plus fragiles qui ont supporté un investissement culturel et scolaire
important n'ont pas gagné pour autant l'accès à l'emploi.
Les pertes massives de postes de travail manuel expliquent pour une large part
l'affaiblissement de la position relative des détenteurs d'un titre
professionnel13. » De plus, d'après un rapport de
l'OCDE (2007) : « en Belgique, les jeunes qui sortent aujourd'hui de
l'école sont moins nombreux dans la population d'âge actif qu'au
début des années 70. Le taux de chômage
des jeunes reste élevé et a eu tendance à augmenter ces
dernières années. Il est passé de 15% en 2000 à 20%
en 2005, la moyenne de l'OCDE étant de 13% en 2005. En outre, 12% des
jeunes de 15-24 ans sont à la fois sans emploi et en dehors du
système éducatif. » Une des recommandations de l'OCDE
pour l'emploi est de rechercher un équilibre entre
sécurité et flexibilité. Nous retrouvons dans le Pacte de
solidarité entre les générations le renforcement des aides
en ciblant les jeunes qui courent le plus de risque d'exclusion sociale :
« la disparité marquée par les taux de chômage des
jeunes diplômés et non diplômés justifie d'orienter
les dispositifs publics d'aide vers des actions ciblées sur les jeunes
qui cumulent des désavantages plutôt que de mettre en oeuvre des
mesures « tout public» en deçà d'un âge
arbitraire14. »
« Au vu de la spécificité que
constituent les jeunes sans qualification, l'urgence de l'insertion sociale est
souvent retenue comme une priorité, et la tendance dans les États
membres est alors de privilégier les formations centrées
immédiatement sur un emploi. Certaines mesures offrent aux jeunes et aux
adultes sans qualification une seconde chance d'obtenir des qualifications.
D'autres mettent l'accent sur la prévention dans le cadre de la
scolarité afin d'éviter un maximum les décrochages
scolaires avant qu'ils ne se produisent, plutôt que de développer
des solutions de rattrapage15i Il existe des stratégies
et des dispositifs de
13Charlier, J.E. (Octobre 1991).
Deuxième congrès La Wallonie au Futur
1991 - Le Défi de l'Education.Institut Destrée -
En ligne
http://www.institut-destree.eu.Coordonnées
- Statistiques, consulté en mars 2008.
14Des emplois pour les jeunes -Belgique,
février 2007, résumé et principales recommandations, p.
7.
15Joly, S. (2005). Dossier documentaire: Ruptures
chez les jeunes (p. 14). En ligne
http://poleressources95.org,
consulté en janvier 2009.
remédiation face à la déscolarisation et
à l'absence de qualification des jeunes qui ne répondent pas aux
normes de l'État (réussir et rentrer dans un dispositif
d'insertion) : « la Communauté française de Belgique et
les Royaume-Uni insistent également dans leurs réponses sur la
prépondérance des structures de prévention dans
l'enseignement obligatoire. Dans le primaire, il s'agit surtout de
prévenir, de soutenir les élèves en difficulté,
d'améliorer le lien entre l'école et la famille et
d'aménager la transition primaire-secondaire. Dans le secondaire, il
s'agit d'orienter les élèves en difficulté vers des
filières de prise en charge spécifique. Des filières dont
le contenu est distinct des filières `'normales» et dont la
polarité formation professionnelle est forte ou encore des
filières dans lesquelles la pédagogie est
différente16. » Si nous nous référons
aux dispositifs de remédiation dans l'Union européenne :
« les résultats de l'étude « Poursuivre sa
formation» financée par le programme européen Socrates en
2001-2003, font apparaître que ce qui est majoritairement proposé
aux élèves en situation de décrochage scolaire est un
parcours d'insertion théorique et linéaire (décrit
cidessous dans le schéma)17i Dans les faits, ce parcours
n'est pas nécessairement mis en oeuvre :
Reconstruire la volonté
d'apprendre
Retourner dans le système scolaire
Obtenir des diplômes légaux
Mettre à niveau les connaissances
Acquérir une formation socio - professionnelle
Accéder au monde du travail
Insertion socio-éducative
|
|
Insertion socio-professionnelle
|
Parcours d'insertion
|
|
|
|
|
|
|
|
Par l'insertion des jeunes dans le marché de l'emploi,
la réussite scolaire est devenue un enjeu social important et, par
conséquent, le décrochage non seulement une préoccupation
pédagogique mais également un enjeu politique : « les
libéraux progressistes voyaient dans l'obligation scolaire un instrument
d'émancipation économique, sociale et politique pour les classes
populaires, ainsi qu'un moyen d'intégrer ces travailleurs dans la
société18i
16Joly, S. (2005). Dossier documentaire: Ruptures
chez les jeunes (p. 15). En ligne
http://poleressources95.org,
consulté en janvier 2009.
17Op. cit., p. 15.
18Draelants, H. & Dupriez, V. & Maroy, C.
(2003). Le système scolaire (p. 27). Dossiers du CRISP
59.
3 Le décrochage scolaire : sujet de contrôle et
d'insécurité
« Le niveau de diplôme requis pour occuper un
emploi s'est aujourd'hui élevé, et les perspectives
socioprofessionnelles des élèves qui quittent le système
scolaire sans diplôme se sont considérablement réduites.
Par ailleurs, la déscolarisation est considérée quasiment
comme un problème relevant de l'ordre, sinon de la
sécurité publique : sans encadrement, que deviennent les jeunes
hors école ? Sont-ils en risque de délinquance, exposés
à des trafics divers, errant dans la rue sans protection ? Et leurs
parents seraient-ils complices et donc punissables de l'inassiduité ou
du retrait scolaire de leurs enfants ? Ainsi la scène de la
déscolarisation se déplace de l'école vers la cité,
les jeunes absentéistes et déscolarisés faisant partie des
«classes dangereuses», appelant un contrôle
accru19.»
Carla Nagels (Criminologue) et Andrea Rea (Sociologue) ont
soulevé, dans leur ouvrage «Jeunes à
perpètes»20, un phénomène qu'on pourrait
qualifier d'inquiétant. En effet, autrefois étiquetée de
«groupe ayant du potentiel dans lequel il faut investir», la jeunesse
d'aujourd'hui, est selon les auteurs, désignée comme un
«groupe à problèmes».
Dans leur recherche et dans un premier temps, les auteurs
considèrent la jeunesse comme un groupe social dans ses rapports avec
les autres groupes sociaux et s'intéressent aux institutions dans
lesquelles la jeunesse évolue : l'école et les institutions de
protection de la jeunesse. Dans un second temps, ils démontrent
l'existence des différences de classes au sein de ce groupe social. On
trouve en grande partie dans l'ouvrage, le discours politique autour de cette
jeunesse. En outre, celui-ci tourne autour de binômes comme
intégration et exclusion, droits et devoirs ou encore prévention
et répression. À partir des années 90, « la
jeunesse n'est plus perçue comme un groupe social à part
entière. Elle devient un ensemble d'individus qui sont porteurs de
droits et devoirs. Mais surtout, les jeunes sont sujets à risques
(risque de non-intégration, de décrochage scolaire, de
chômage, de délinquance) et font donc l'objet de politiques
publiques de plus en plus ciblées21i « Le travail social
s'inscrit aujourd'hui dans un cadre balisé par des politiques qui
s'inspirent des diverses logiques dont le point de convergence est de
déplacer la précarité sous surveillance, en faisant
remplir aux intervenants sociaux un rôle de contrôle de moins en
moins déguisés, et en multipliant les
19Esterle, M. (septembre 2004). La
déscolarisation, une nouvelle forme de déviance juvénile
? Questions Pénales, Centre de Recherches Sociologiques sur le Droit
et les Institutions Pénales, CNRS, bulletin d'information, XVII.4.
20Nagels, C. & Rea, A. (2007). Jeunes à
perpète. Génération à problèmes ou
problème de génération ? Bruxelles : Ed.
Académia Bruyland.
21Nagels, C. (2003). Op cit., p. 6.
confusions de genres - entre approches répressive
et préventive22.» Ces politiques publiques en
matière de jeunesse reposent sur l'égalité des chances
(décret 91) qui prend en considération la problématique du
bénéficiaire de manière personnalisée.
L'idée est de donner une chance aux enfants socialement moins
avantagés et moins bien dotés afin qu'ils
bénéficient des mêmes opportunités que les enfants
avantagés et cela justifie qu'on leur consacre davantage de moyens.
« L'image de la jeunesse délinquante et violente, qu'il faut
responsabiliser davantage, cohabite ainsi avec l'image d'une jeunesse
victimisée, qu'il s'agit de protéger23.»
Ainsi, le décret de 1991 relatif à l'Aide à la jeunesse
constitue une extension du contrôle social vers un glissement de la
notion de mineurs dangereux à celle de mineurs en danger. On constate
également que la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de
la jeunesse développe des mesures protectionnelles à
l'égard du mineur délinquant plutôt que des mesures
répressives. La loi se traduit par la prise en charge des mineurs ayant
commis un fait qualifié infraction et, d'autre part, la
réparation du dommage causé par ce fait.
Aussi, Carla Nagels & Andrea Rea (2007) abordent
l'émergence d'un nouveau contrat socialsécuritaire où
notre société reste empreinte de l'État Social
orienté vers le sécuritaire. Le thème fait partie du
programme politique et permet une visibilité maximale. Les auteurs
décrivent que les politiques publiques liées à ces
matières sont critiquées et se résument, dans les faits,
à «des fabriques de l'immobilité». « En 1993,
le ministère de l'Intérieur, en collaboration avec les
régions Wallonne et Bruxelloise, a superposé à ce
réseau existant un système de «prévention»
sociale de la délinquance dont la gestion et le contrôle sont
dévolus aux autorités politiques locales (les communes
liées par contrat/financement à ces deux instances). Les communes
développent donc sur leur territoire des actions dites sociales
impliquant dans leur volonté de centralisation, une unicité de
points de vue et de logique au sein de chaque entité. Ce
phénomène entraîne, à l'échelle locale, un
véritable déficit de pluralisme. Les grandes finalités
avancées pour les Contrats de Sécurité sont de garantir la
sécurité des citoyens (par rapport à des groupes
désignés potentiellement dangereux) et de rétablir la
confiance de la population (la masse des électeurs) dans les
autorités. Même si les travailleurs de terrain aménagent
ces finalités en fonction de leurs intentions éducatives, ils
sont cependant tenus de se cantonner dans les limites autorisées par
l'employeur communal omnipotent. Tant en fonction de leurs finalités que
de leur rattachement structurel, les CS apparaissent plus comme un facteur de
contrôle et de normativité sociale que de
22Agence Alter (mai 2004). Lutte contre le
sentiment d'insécurité à la lutte du sentiment
d'impunité (p. 19). Alter Echos, Alter Educ.
23Ibid.
démocratisation de la société et
d'épanouissement de l'individu24i En effet, les
dispositifs des CS s'inscrivent dans une logique contractuelle et de
financement par projet à durée déterminée. Les
opérateurs doivent répondre aux exigences du Service Public
Fédéral de l'Intérieur en fonction du plan
stratégique qui définit une dizaine de phénomènes.
Les travailleurs sociaux doivent pour ce faire construire de manière
empirique leurs actions tout en respectant le « réseau » de
partenaires sociaux. Les projets et leurs actions peuvent changer du jour au
lendemain et ce, en fonction des desideratas du sommet stratégique.
Chaque changement nécessite une période d'adaptation, de
restructuration. Ce dernier modifie ainsi, les objectifs et les
priorités demandées au travail social25. Si on
additionne à ce constat un turnover important du personnel (contrats
précaires : plan Rosetta, contractuelle..), alors, que doit-on penser de
l'efficacité sur le terrain d'un point de vue préventif ? Quelle
crédibilité le dispositif du Contrat de Sécurité
a-t-il aux yeux des partenaires sociaux et des bénéficiaires ?
Tant d'efforts et d'investissements financiers et personnels pour, in
fine, se réorienter en fonction des intérêts à
la fois du ministère de l'Intérieur et du gestionnaire local (le
bourgmestre de la ville). H.O. Hubert (1999)26, soulève que :
« sans doute l'enjeu actuel est-il d'imaginer des formes d'action
publique proches du citoyen et adaptées aux réalités
locales, mais pas au détriment d'une stabilité offerte et
garantie aux travailleurs sociaux. Soutenir les précaires lorsque
soi-même, on se heurte à la fois à la
précarité du public, à sa propre précarité,
ainsi qu'une précarité institutionnelle, cela ne ressemble-t-il
plus à de l'acrobatie sans filet qu'à du travail social ? »
De plus, Y. Cartuyvels (1994) relève l'inquiétude des
travailleurs de l'Aide à la jeunesse relative à
l'émergence d'une autre politique de la jeunesse concernée par
les Contrats de Sécurité dont la philosophie est axée sur
le court terme et le spectaculaire, la technique et le « management
», l'intégration du social-judiciaire-policier. Selon l'auteur,
« la mutation actuelle de l'État social se traduit par une
redistribution horizontale des compétences de l'État social vers
une politique axée sur le partenariat local entre acteurs privés
et publics27.» Dans ce
contexte, il faut être attentif à ne pas tomber dans des discours
pro- sécuritaires en stigmatisant les jeunes en décrochage
scolaire comme des délinquants et, de ce fait, les désigner comme
dangereux.
241res Assises de l'Aide à la jeunesse. Vous avez
dit : « Aider la jeunesse » : Propositions perspectives (p. 92).
Communauté française de Belgique, ministère de la Culture
et des Affaires sociales de la C.F Direction d'administration de l'Aide
à la jeunesse. Bruxelles.
25Hubert, H.-O. (1999). L'Etat face à
l'insécurité : Dérives politiques des années 90
(p. 170). Bruxelles : Labor. 26Ibid.
27Cartuyvels, Y. (1994). Convention portant sur la
réalisation d'un projet pilote : Evaluation d'un contrat de
sécurité dans une commune type ( Scharbeeck) avec examen sur
l'impact sur le secteur de l'Aide à la jeunesse, Rapport
d'activité, Facultés Universitaires Saint-Louis, p. 8.
4 Critique sur le décrochage scolaire
Nous avons tenté de comprendre l'émergence de la
problématique du décrochage scolaire ou la construction d'une
solution comme problème public. Si nous considérons la mise en
oeuvre d'une politique publique comme la construction d'un cadre normatif et
cognitif, au sens où les institutions construisent des
représentations et orientent les pratiques des travailleurs sociaux, il
est important de relativiser le décrochage scolaire. En effet, dans la
façon dont le problème est posé, le jeune est
pointé du doigt comme responsable tout en étant contraint d'avoir
un projet personnel dans un contexte où le choix de ses perspectives est
réduit. En effet, « plus on a des difficultés scolaires
et moins on a de choix de filières et plus on est contraint
d'énoncer un projet personnel. Les études risquent alors
très fortement de se vider de sens. Certes, on ne peut pas
réduire l'orientation seulement à une forme de sélection
sournoise à travers l'intériorisation et l'acceptation
progressive de l'échec scolaire, bien que les taux d'accès aux
différentes filières continuent de s'ordonner selon la
hiérarchie de l'origine sociale28i Dans le cadre d'un
colloque international sur la construction du décrochage scolaire comme
problème public, P.-Y. Bernard (2007) mobilise dans son analyse deux
critiques s'inspirant de plusieurs auteurs traitant le sujet. La
première, selon Geay et Meunier (2003) : d'une part, le
décrochage scolaire permet de délimiter la sphère d'action
des champs professionnels en compétition dans le domaine éducatif
; d'autre part, le décrochage scolaire est une construction
administrative justifiant un travail de contrôle de populations
considérées comme dangereuses. La seconde critique, selon Millet
et Thin (2005) : « le décrochage scolaire est
considéré comme un avatar de la question de l'échec
scolaire. Le décrochage scolaire réduirait la
problématique de l'échec scolaire aux situations d'abandons
scolaires et occulterait les conditions sociales de cet échec scolaire
(précarité, pauvreté), dédouanerait le
système éducatif de sa responsabilité dans la production
de cet échec scolaire et stigmatiserait une catégorie d'individus
au fond peu différents de ceux qui, quoique assidus dans les
établissements scolaires, sont en grande difficulté
d'apprentissagei
Pour résumer les critiques relatives au
décrochage scolaire, (1) les auteurs mettent en évidence la
gestion locale du décrochage scolaire en balisant les professionnels qui
traitent la problématique. (2) Celle-ci est une construction
administrative qui a pour objectif le contrôle des décrocheurs
considérés comme une population à risque. (3) Le
décrochage scolaire met en évidence les « lacunes » de
l'individu et non la responsabilité du système éducatif
lui-même
28Dubet, F., & Martuccelli D., (1996). À
l'Ecole. Sociologie de l'expérience scolaire (p. 281). Paris : Ed du
Seuil.
« producteur » d'abandon scolaire. (4)
L'échec scolaire renvoie davantage à la question des
apprentissages, tandis que le décrochage scolaire pose la question plus
large du rapport de l'individu à l'institution scolaire et de ses
conséquences en dehors du monde scolaire.
Francis Godart (2003) soulève une analyse
intéressante en ce qui concerne la jeunesse et la scolarité :
« pour toute une partie de la société, le noyau central,
la socialisation s'organise autour de l'axe vertical : « haut /
bas». Pour ce noyau, l'enjeu de la socialisation se structure autour du
diplôme : il faut aller plus haut et plus vite que les autres. Pour
l'autre partie, la socialisation s'organise autour de l'axe ; « dedans /
dehors. Il s'agit de rester dans l'école, dans les dispositifs
d'insertion, dans la loi29i Pour cet axe, l'exclu (le jeune
stigmatisé) se retrouve devant des alternatives « socialisatrices
» qui émanent des différents dispositifs de l'accrochage
scolaire et tout ça, afin de pas être « hors-la-loi ».
Dans ce contexte, le «décrocheur» se retrouvent face à
deux choix : être ou ne pas être hors-la-loi face à
l'obligation scolaire ? Dans les faits, dans quelle mesure l'ESA ne se
déresponsabilise-t-il pas en «stigmatisant» les
«décrocheurs» sous la coupole de la méritocratie, de
l'échec et de l'exclusion ? Il faut mériter son diplôme et
s'adapter aux règles du jeu des écoles qui (1) favorisent
certains élèves et (2) se régulent dans l'acceptation de
produire l'échec et l'exclusion ; comme si l'orientation par
l'échec et la réussite était une exigence pour
intégrer des postes bien spécifiques dans le marché du
travail. « A quelles conditions l'école peut-être
à la fois efficace et plus équitable ?... l'école est
méritocratique, et, même si la compétition est parfois
faussée, cette attente scolaire devient vite destructrice pour ceux qui
échouent et n'ont d'autres possibilités que de s'identifier aux
catégories de leur échec. C'est sans doute là une des
façons les plus cruelles d'entrer dans la vie, car non seulement les
élèves n'obtiennent rien de bien tangible, mais ils perdent
l'estime de soi. Cette épreuve est d'autant plus vive que le
système scolaire ne s'accroche pas à un véritable projet
éducatif, « moral » aurait-on dit autrefois, visant
l'expression et la formation de qualités personnelles. Tout ce qui n'est
pas strictement scolaire y reste résiduel, militant, alors même,
que chacun déplore la perte d'utilité des diplômes et la
faiblesse éducative de masse. Aucun de ces travers n'appartient
strictement à l'école, elle ne les engendre pas directement mais
elle les cristallise dans son organisation même. Doit-elle les subir
comme une fatalité, ou peut-elle résister efficacement,
c'est-à-dire se modifier elle-même, plutôt que de prolonger
un cycle infernal fait d'appel aux principes «sacrés», de
remédiations indéfinies et d'adaptation discontinues30
? »
29Godart, F. (1992). La famille affaire de
génération (p. 203). Paris : Ed. puf.
30Dubet, F. & Martuccelli, D. (1996). A
l'Ecole. Sociologie de l'expérience scolaire (p. 338-339). Paris :
Ed du Seuil.
5 Conclusion
Depuis que l'école publique existe, le
décrochage scolaire a toujours existé. Les
«décrocheurs» scolaires, au temps de l'État providence,
étaient une main-d'oeuvre pour le marché du travail en
période de quasi-plein-emploi et trouvaient ainsi leur place dans la
société. Aujourd'hui, la crise économique ne favorise pas
l'emploi et les chiffres du chômage ne sont pas prêts de diminuer
(bien au contraire). Avant cette crise, le manque d'emploi était
déjà au rendez-vous et justifiait pleinement l'intervention de
l'État. Le taux de chômage des jeunes reste élevé et
a tendance à augmenter ces dernières années. La
disparité marquée par les taux de chômage des jeunes
diplômés et non diplômés justifie ainsi, les
dispositifs d'aide vers des actions ciblées. Aujourd'hui, si le
décrochage scolaire est considéré comme un problème
relevant de l'ordre public voire de la sécurité publique, les
décrocheurs sont devenus une classe dangereuse qu'il faut investir. Par
l'insertion des jeunes dans le marché de l'emploi, la réussite
scolaire est devenue un enjeu politique, économique et social. En vue
d'une réinsertion socio-éducative et socioprofessionnelle, les
dispositifs de remédiation dans l'Union européenne, en
l'occurrence en Communauté française de Belgique, proposent aux
jeunes un parcours de réinsertion linéaire, qui, dans la
pratique, n'est pas forcément mis en oeuvre. L'objectif est de donner
une seconde chance de qualification aux jeunes qui ont
«décroché» du parcours scolaire traditionnel,
producteur d'abandon scolaire. Le nouveau référentiel de
l'État social actif nous propose une nouvelle approche qui va encourager
ou décourager une série de pratiques. L'ESA va conforter une
certaine conception du problème et va permettre de construire un espace
de sens dans lequel les acteurs vont élaborer leur rapport au monde
(pour notre étude, on parlera du décrochage scolaire). Ainsi, ce
référentiel inclut un ensemble de dispositions qui se rapporte
à la manière d'intervenir sur le problème. C'est au niveau
local qu'il faut trouver les ressources pour agir face à ses propres
problèmes. En prônant la gestion et le contrôle des jeunes
en difficulté, l'État décentralise son pouvoir au niveau
des autorités politiques locales en finançant les Contrats de
Sécurité.
Si le décrochage scolaire met en évidence «
les lacunes» de l'individu et la déresponsabilisation du
système éducatif, la socialisation du jeune peut se structurer
autour du diplôme (la réussite scolaire) ou par le maintien, dans
la mesure du possible, dans des dispositifs d'insertion (prise en charge
spécifique de l'élève en difficulté) sous peine de
devenir hors-la-loi.
Chapitre 2 : Le décrochage scolaire ou
l'émergence de nouveaux dispositifs en Communauté
française de Belgique
1 Introduction
Selon Abraham Franssen (2002), on observe depuis une quinzaine
d'années une multiplication de «dispositifs sociaux»
destinés aux publics à «la marge» de la
société dans différents champs (éducation,
formation, emploi, aide sociale, politique de la jeunesse, politique de la
ville...) en vue de favoriser leur (ré)-insertion, leur autonomie et
leur «activation». « Ces dispositifs ont bien pour
finalité explicite d'assurer la « cohésion sociale» en
agissant directement sur les comportements autant que sur les psychismes des
«marginalisés» de la société de
marché31.»
Selon Jacques Pain (2000) : « dans la conjoncture
actuelle, l'école est le fil conducteur
(institutionnel) du contrôle social, et de la
socia(bi)lité. C'est en effet d'abord l'école
quidénonce la déscolarisation, juste avant les
organismes et les instances de contrôle et
d'inspection sociale, et avant les parents ou la police.
Le rapport belge pourtant soulève une idée intéressante.
Les trois « piliers » de l'accrochage scolaire sont les piliers
scolaire, judiciaire et « communal », et la proposition est
d'instaurer une concertation communale, de créer littéralement
une « mentalité » communale très certainement. Le
problème de fond reste en effet un peu partout le même :
l'émiettement sociétal, le manque de synergie et de collaboration
»32.
Dans ce chapitre, nous décrirons la base commune des
différents acteurs concernés par le décrochage scolaire en
Communauté française. L'objectif est que le lecteur puisse cerner
les normes instituées par l'État qui encourage les
opérateurs à collaborer et à prendre en
considération les jeunes en difficultés. Ensuite, nous nous
intéresserons, en partie, aux différents acteurs scolaires,
associatifs, communaux et judiciaires traitant le décrochage scolaire
sur La Louvière. Enfin, nous ciblerons, le champ de l'accrochage
scolaire sur le territoire louvièrois émanant de l'arrondissement
judiciaire de Mons en Communauté française de Belgique.
31Ibid.
32 Pain, J. (septembre 2000). VEI Enjeux,
n°122.
2 Les décrets et normes étatiques qui
balisent les opérateurs sociaux traitant le décrochage scolaire
en Communauté française
2.1 Loi du 29 juin 1983 concernant l'obligation scolaire,
art. 1er, § 1er, al.1er
« Le mineur est soumis à l'obligation scolaire
pendant une période de douze années commençant avec
l'année scolaire qui prend cours dans l'année où il
atteint l'âge de six ans et se terminant à la fin de
l'année scolaire, dans l'année au cours de laquelle il atteint
l'âge de dix-huit ans ». « En Belgique, tous les mineurs
d'âge, y compris ceux de la nationalité étrangère
qui y séjournent, sont soumis à l'obligation scolaire. Cette
obligation incombe aux parents, à la personne investie de
l'autorité parentale ou à la personne qui assume la garde en fait
du mineur33. » La loi de l'obligation scolaire impose aux
jeunes de fréquenter l'école jusqu'à 18 ans. L'obligation
se traduit pour la jeunesse par un devoir à respecter. Celui-ci est un
devoir scolaire qui est contrôlé non seulement par l'école,
mais également, par plusieurs opérateurs, à savoir : la
Direction Générale de l'Enseignement Obligatoire, la police et le
parquet qui convoque le jeune et ses parents pour un rappel à la loi
sous peine de sanction.
2.2 Le décret du 4 mars 1991
Le Décret de l'Aide à la jeunesse du 4 mars 1991
se déploie autour de cinq grands objectifs : (1) la priorité
à la prévention, (2) le droit à l'aide sociale
spécialisée, (3) le respect des droits fondamentaux des jeunes et
des familles, (4) la priorité de l'aide dans le milieu de vie et (5) la
déjudiciarisation. L'idée est de donner une chance aux enfants
socialement moins avantagés et moins bien dotés afin d'avoir les
mêmes opportunités que les enfants favorisés et cela
justifie qu'on leur consacre davantage de moyens. Ici, « il s'agit
dès lors de viser une probabilité égale, pour les membres
de groupes différents, d'accéder aux diplômes
scolaires34. »
33Direction Générale de
l'Enseignement Obligatoire. Circulaire pour l'année scolaire 2007-2008.
Obligation scolaire, inscription des élèves, fréquentation
scolaire, sanctions disciplinaires et gratuité dans l'enseignement
secondaire ordinaire subventionné par la Communauté
française. Administration générale de l'Enseignement et de
la Recherche scientifique (p. 7).
34Draelants, H. & Dupriez, V. & Maroy, C.
(2003). Le système scolaire (p. 46). Dossiers du CRISP 59.
2.3 Le décret du 30 juin 1998
Le Décret du 30 juin 1998 vise à assurer
à tous les élèves des chances égales
d'émancipation sociale, notamment par la mise en oeuvre de
discriminations positives et apporte une définition claire de
l'absentéisme et du décrochage scolaire que nous
développerons dans les pages qui vont suivre.
L'Article 2 a pour objet : 1° de distinguer certains
implantations d'enseignement ordinaire fondamental et d'établissements
ou implantations d'enseignement ordinaire secondaire, organisés ou
subventionnés par la Communauté française, ci-après
dénommés établissements, ou implantations
bénéficiaires de discriminations positives, sur la base de
critères définis ci-dessous et : a) de promouvoir dans ces
établissements ou implantations des actions pédagogiques
destinées à assurer à tous les élèves des
chances égales d'émancipation sociale, conformément
à l'article 6, 4° du même décret; b) à cet
effet, de leur attribuer des moyens supplémentaires; c) d'assurer la
coordination des moyens susvisés avec toute autre aide apportée
à ces établissements ou implantations par la Région de
Bruxelles-Capitale, la Région wallonne, l'État
fédéral, l'Union européenne et tout organisme
d'intérêt public; 2° pour tous les établissements ou
implantations visés à l'article 1er : a) de favoriser
la prévention du décrochage scolaire et de l'absentéisme;
b) de favoriser la prévention de la violence, avec une attention
particulière aux établissements d'enseignement visés au
1°; c) d'organiser la scolarité des mineurs séjournant
illégalement sur le territoire pour autant qu'ils accompagnent leurs
parents ou la personne investie de l'autorité parentalei
2.4 Décret du 13 mars 2008 portant diverses mesures
de lutte contre le décrochage scolaire, l'exclusion et la violence
à l'école35
Ce Décret met en évidence les différents
opérateurs de prévention en ce qui concerne le décrochage
scolaire, l'exclusion et la violence à l'école.
« Article 1er. - Un
dispositif de lutte contre le décrochage scolaire, l'exclusion et la
violence à l'école, composé de six mesures portant sur la
pérennisation et l'amplification du service de médiation
scolaire, la création d'équipes mobiles, la mise en place d'une
cellule
35Centre de documentation administrative. Lois
28782 (p. 1). D. 12-05-2004.
Secrétariat général mis à jour au
01/04/2008 intitulé modifié par D. 15-12-2006. Ce
Décret a connu différentes modifications : D. 12-05-2004 M.B.
21-06-2004 modifications : D. 15-12-06 (M.B. 21-03-07) D. 13-12-07 (M.B.
13-03-08).
administrative de coordination des actions de
prévention du décrochage scolaire et de la violence,
l'articulation de la formation en cours de carrière avec la
prévention de la violence à l'école, la création
d'un Centre de rescolarisation et de resocialisation, la mise en place d'un
dispositif favorisant un retour réussi à l'école des
élèves pris en charge dans des structures externes à
l'établissement originaire, est institué pour les
établissements d'enseignement fondamental et secondaire ordinaire.
»
2.5 La Circulaire 1972 pour l'année scolaire
2007-2008
La Circulaire est une mise à jour suite aux
modifications apportées par deux nouveaux décrets : Le premier,
est le Décret du 15 décembre 2006 qui renforce le dispositif des
services d'accrochage scolaire et qui établit plusieurs mesures
relatives aux règles de vie collective au sein des établissements
scolaires. Le second, est le Décret du 8 mars 2007 relatif au service
général de l'inspection, au service de conseil et du soutien
pédagogiques de l'enseignement subventionné par la
Communauté française et au statut des membres du personnel du
service général de l'inspection et des conseillers
pédagogiques (M.B. du 5 juin 2007). La Circulaire 1972 est relative
à l'Obligation scolaire, inscription des élèves,
fréquentation scolaire, sanctions disciplinaires et gratuité dans
l'enseignement secondaire ordinaire subventionné par la
Communauté française. La Circulaire est conçue par la
Direction générale de l'Enseignement obligatoire et est
destinée au secondaire ordinaire, ainsi, qu'aux différents
acteurs de la Communauté française : outre les écoles, le
Service d'Aide à la Jeunesse, les médiateurs scolaires, les Aides
en Milieu Ouvert (AMO), les Services Accrochages Scolaires (SAS), cette
Circulaire peut être une référence pour d'autres acteurs
sociaux qui traitent le décrochage scolaire. La Circulaire a pour
objectif d'instaurer une meilleure collaboration entre les secteurs de
l'enseignement et de l'Aide à la jeunesse. De plus, elle aborde la
collaboration avec la police en lien avec la Circulaire PLP 41 du
Ministère de l'intérieur.
2.6 La Circulaire ministérielle du 7 juillet 2006
<PLP 41>
En juillet 2006, le Ministre de l'Intérieur publie une
circulaire prônant la collaboration de la police et du parquet avec les
établissements scolaires dans l'objectif de « sécuriser
» l'environnement scolaire. La note vise à établir une
approche spécifique relative à des faits qualifiés
d'infraction commis par les jeunes dans leur environnement scolaire et, plus
particulièrement, les faits qualifiés de coups et blessures
volontaires, de menaces, d'extorsions, de vol avec violence, de
détention d'armes, de harcèlement, de détention et de
vente de drogue. La Circulaire vise également la
problématique de l'absentéisme scolaire et du décrochage
scolaire dont l'objectif est la réintégration rapide du jeune au
sein d'un établissement scolaire et la recherche de réponses
adaptées à la situation du jeune « décrocheur ».
Aussi, la Circulaire reconnaît et soutient les compétences des
écoles dans la gestion des problèmes liés au
décrochage scolaire et la violence scolaire à laquelle elles sont
confrontées pour autant qu'elles garantissent la sécurité
et la protection des étudiants. La circulaire PLP 41 prévoit le
développement de partenariats avec les établissements scolaires.
Ces partenariats doivent se traduire : d'une part,
««d'une manière claire et conviviale'', avec des
procédures de renvoi et de collaboration entre les diverses
communautés scolaires et la police » et d'autre part, par
« l'établissement d'un point de contact permanent,
chargé des relations avec lesdites communautés et de la
conclusion d'accords portant sur différentes problématiques dont
le traitement serait de nature à « garantir un environnement
sûr''. En vertu de la Circulaire PLP 41, ces accords doivent être
formalisés dans des conventions écrites associant, dans
l'état actuel des choses, établissements scolaires, police,
procureur du Roi et bourgmestres compétents dans la zone de police
concernée36j
3 Les acteurs du champ de l'accrochage scolaire sur le
territoire louvièrois
« Au cours des années 1995-1996, dans le cadre
du Fonds d'impulsion à la Politique des Immigrés, et à
l'initiative de la Communauté française, un Dispositif Accrochage
Scolaire a été mis en place. Ce dispositif avait pour mission de
lutter contre l'absentéisme et le décrochage scolaire par une
approche globale et préventive. Il s'agissait de prendre en compte et
d'articuler le travail de tous les acteurs scolaires et extra-scolaires tels
que les centres Psycho- Médico-Sociaux en priorité, mais aussi
les partenaires communaux dont la police, les Services d'Aide à la
Jeunesse, les Services d'Aide en Milieu Ouvert (AMO), le monde associatif, le
monde culturel37... »
Nous identifions quatre acteurs qui traitent la
problématique du décrochage scolaire : les acteurs scolaires,
communaux, judiciaires et issus du milieu associatif. Nous ne
36Direction Générale de
l'Enseignement Obligatoire. Circulaire pour l'année scolaire 2007-2008.
Obligation scolaire, inscription des élèves, fréquentation
scolaire, sanctions disciplinaires et gratuité dans l'enseignement
secondaire ordinaire subventionné par la Communauté
française. Administration générale de l'Enseignement et de
la Recherche scientifique (p. 48).
37 L'observatoire (2000). Décrochage scolaire
(p. 72). Dossier trimestriel n°28: revue d'action
sociale&médicosociale, a.s.b.l
développerons pas les spécificités de
chaque opérateur. Cependant, le lecteur peut retrouver dans notre partie
empirique, une présentation plus élaborée des
différents acteurs que nous avons sélectionnés pour notre
étude.
3.1 Les acteurs scolaires
La Direction Générale de l'Enseignement
Obligatoire (DGEO) est subsidiée par la C.F. Ce service a pour
mission de contrôler les inscriptions des élèves en
obligation scolaire et la fréquentation des élèves
inscrits. Ce service a une visée sociale, c'est-à-dire qu'il
travaille dans l'intérêt du jeune, en partenariat avec les
services de première ligne comme : les équipes mobiles, les CPMS,
les médiateurs scolaires, les Services Accrochage Scolaire (SAS), les
Aides en Milieu Ouvert (AMO), le Service Jeunesse et Famille (SJF), le parquet,
le Service Protection à la Jeunesse (SPJ), le Service d'Aide à la
Jeunesse (SAJ).
Remarques :
Avant 2007, le contrôle du décrochage scolaire
était du ressort du Service d'Aide à la Jeunesse. Aujourd'hui,
c'est à la Direction de l'Obligation de l'Enseignement Obligatoire de
contrôler les «décrocheurs». Le SAJ est subsidié
par la Communauté française et son cadre légal est le
décret du 04/01/91 relatif à l'Aide de la Jeunesse. Il propose
une aide spécialisée qui tend à permettre au jeune de se
développer dans des conditions d'égalité des chances en
vue de son ascension à une vie conforme à la dignité
humaine38. Leurs missions sont de mettre en oeuvre une politique de
prévention générale au niveau de l'aide individuelle en
travaillant en collaboration avec le réseau social.
Les établissements
scolaires39 sont subsidiés par la C.F. Au sein des
écoles du cycle secondaire tous réseaux confondus, on retrouve
les directeurs d'école, les
éducateurs. Outre les responsabilités du
directeur qui s'articulent autour des axes pédagogiques,
éducatifs, administratifs, matériels et financiers, il doit
gérer et coordonner l'équipe éducative, les relations avec
les élèves et les parents ainsi que les relations
extérieures de l'établissement. L'éducateur relève
les présences, s'assure de la gestion de l'absentéisme scolaire
et fait respecter les normes de l'école. Les écoles collaborent
étroitement avec les CPMS qui sont un service externe.
Cependant, ce service dispose généralement de locaux au sein des
murs de l'école. Le cadre légal du CPMS est le décret du
14 juillet 2006 (M.B 05/09/06) relatif aux
38 On retrouve cette idéologie de travail dans
le Décret du 9 mars 1991 de l'Aide à la Jeunesse (Articles 2
& 3).
39 Nous retrouvons une présentation plus
détaillé de ces acteurs dans notre cinquième chapitre.
missions, programmes et rapport d'activités.
L'équipe se compose généralement de psychologues,
d'assistants sociaux et d'infirmières. Le CPMS est le
référent primordial en ce qui concerne le décrochage
scolaire, l'absentéisme et la violence scolaire. Il collabore avec les
services venant en aide aux jeunes. L'action essentielle des centres
psycho-médico-sociaux a été renforcée ces
dernières années par deux nouveaux dispositifs : la
médiation scolaire et les équipes mobiles.
Les équipes mobiles sont
subsidiées par la C.F. et placées sous l'autorité de la
Direction Générale de l'Enseignement Obligatoire. Le cadre
légal est structuré par la Circulaire n° 1884 (24 mai 2007)
définissant les missions et le cadre d'action propre à ce
service. Le service est composé de vingt opérateurs ayant des
identités professionnelles différentes, pour toute la zone de la
C.F. On y retrouve des criminologues, des psychologues, des assistants sociaux,
des éducateurs qui travaillent par secteur en fonction du lieu
d'habitation de l'opérateur. Pour activer ce service, le directeur
d'école, ou le Pouvoir Organisateur, doit adresser un courrier à
la DGEO concernant toute situation relevant de la prévention et de la
gestion du décrochage scolaire, des exclusions et des violences
scolaires. Ceci signifie que l'équipe mobile dépend de la
volonté des directions d'écoles pour « exister ». Les
missions de l'équipe mobile sont diverses : construire ou renforcer
l'action éducative en matière de gestion ou de prévention
du décrochage, des exclusions et des violences scolaires ; soutenir les
équipes éducatives et les élèves confrontés
à une situation de crise40; contribuer au maintien ou
à la restauration d'un climat propice à l'apprentissage ; assurer
des formations sur les thèmes de la gestion et de la prévention
des situations critiques. Sur le terrain, les membres de l'équipe mobile
prennent en considération les partenaires qui ont connaissance du
dossier du jeune pour établir, éventuellement, un partenariat.
L'action du service est basée sur une approche globale et
systémique des problématiques scolaires.
Les médiateurs scolaires sont
subsidiés par la C.F. et sont placés sous l'autorité de la
Direction Générale de l'Enseignement Obligatoire. Ils
interviennent selon les axes définis par le Décret du 30 juin
1998 visant à assurer à tous les élèves des chances
égales d'émancipation sociale, notamment par la mise en oeuvre
des discriminations positives. L'équipe est composée de sept
médiateurs qui travaillent dans des zones géographiques bien
spécifiques dans les différents réseaux scolaires. La
médiation s'adresse aux jeunes de l'enseignement
40Au sens de l'article 31 du Décret du 30 juin
1998 visant à assurer à tous les élèves des chances
égales d'émancipation sociale par la mise en oeuvre de
discriminations positives
secondaire et, exceptionnellement, aux jeunes du fondamental.
Chaque réseau scolaire dispose d'un médiateur
référent intégré à une équipe zonale.
Les missions s'articulent autour de logiques de prévention (animations
sur des thématiques spécifiques) et d'intervention relative au
décrochage scolaire et à la violence selon les axes
définis par le décret du 30 juin 1998, en vue de favoriser,
conserver, rétablir un climat de confiance dans le champ scolaire. Ces
logiques impliquent un travail inter-réseaux et un partenariat avec des
organisations spécialisées pour favoriser l'intégration du
jeune dans son école ou sa réinsertion dans un autre
établissement scolaire.
3.2 Les acteurs issus du milieu associatif
Trois Services Accrochage Scolaire sont
subsidiés par la Communauté française et sont
formalisés par le Décret du 15 décembre 2006 (M.B.
21/03/07) renforçant le dispositif des services d'accrochage scolaire
(décret du 12 mai 2004) portant diverses mesures de lutte contre le
décrochage scolaire, l'exclusion. Le SAS est généralement
composé d'une équipe pluridisciplinaire où l'on retrouve
des éducateurs, des enseignants et un coordinateur. Le SAS exerce ses
activités en dehors des locaux des établissements d'enseignement.
L'objectif de ce service est d'accueillir l'élève en
difficulté dans le but : d'améliorer les conditions de
développement et d'apprentissage de l'élève en
difficulté ; de réintégrer le jeune dans un
établissement scolaire dans des bonnes conditions (ex :
réorientation scolaire). Le jeune en difficulté peut être
orienté vers ce service par l'intermédiaire de ses parents, sur
base volontaire de ces derniers et du mineur, mais également sur la
recommandation des professionnels (du CPMS, de l'établissement
d'enseignement, de l'Administration Générale de l'Enseignement,
du service de l'Aide à la jeunesse, du service de Protection judiciaire
ou encore du Tribunal de la jeunesse).
Les Aides en Milieu Ouvert (AMO) sont
subsidiés par la Communauté française et ont pour missions
d'assurer une aide préventive au bénéfice des jeunes dans
leur milieu de vie et dans leurs rapports avec l'environnement social. Le cadre
légal des AMO sont le Décret relatif à l'Aide de la
jeunesse du 4 mars 1991 et l'Arrêté du Gouvernement de la
Communauté française du 15 mars 1999 (M.B. 01/06/99).
L'équipe de ce service est souvent composée d'un directeur, d'une
secrétaire, d'assistants sociaux et d'éducateurs. Cette aide
comporte trois dimensions : (1) l'aide individuelle, (2) l'action communautaire
et (3) l'action collective. Le service effectue un travail d'écoute,
d'accompagnement, d'orientation et une
intervention socio-pédagogique visant à aider le
jeune à surmonter ses difficultés dans les domaines familial,
social, scolaire, administratif, juridique, professionnel et économique
; il soutient le jeune et ses proches dans l'élaboration et la mise en
oeuvre de projets personnels et prépare le jeune à l'exercice de
ses droits et devoirs et à l'apprentissage de l'autonomie et de la
citoyenneté responsable.
3.3 Les acteurs judiciaires
Le Service jeunesse et famille de la police
(SJFP) est subsidié par le gouvernement fédéral
et par la Ville. Le cadre légal est la Loi de protection de la jeunesse
de 1965 et le Décret de l'Aide à la jeunesse de 1991. Il est
composé de quatre cellules (comprenant un ou deux inspecteurs de police
spécialisés) implantés dans quatre secteurs de La
Louvière, à savoir : le Centre (La Louvière), le Sud
(Haine-St-Paul), le Nord (Houdeng-Goegnies) et le secteur Ouest
(Strepy-Bracquegnies). Les interventions s'effectuent auprès du mineur
d'âge (de 0 à 18 ans) et de sa famille, lorsque sa santé,
sa sécurité physique mentale ou morale sont compromises (voir le
Décret du 4 mars 1991). Aussi, ces services s'attèlent
également à la problématique du décrochage
scolaire. En effet, les opérateurs du secteur Centre effectuent des
contrôles en rue aux heures présumées des cours. Les agents
de police des autres secteurs sont avertis et peuvent interpeller (après
enquête) le parquet s'ils estiment que le jeune déscolarisé
est en danger et /ou d'orienter le jeune vers des services d'insertion
socio-éducatif.
Le Service de la Protection de la Jeunesse
(SPJ) a comme cadre légal le Décret du 4 mars 1991
relatif à l'Aide à la Jeunesse. Le pouvoir subsidiant est la
Communauté française. Le service compétent pour le citoyen
louvièrois se trouve à Mons. L'aide de ce service est
imposée par le tribunal de la jeunesse car aucune aide n'a fait l'objet
d'un accord avec le SAJ. L'équipe est composée de plusieurs
délégués (assistants sociaux et éducateurs) qui
rendent compte de la situation du jeune au directeur du SPJ afin de
répondre de la manière la plus adaptée à la
problématique du jeune. Dans le cas du décrochage scolaire, le
directeur peut imposer un suivi par un service compétent afin
d'intégrer le jeune dans une école.
3.4 Les acteurs communaux
L'Antenne Accrochage Scolaire du Plan
Stratégique de Sécurité et de
Prévention41 (AAS du PSSP) est subsidiée par
le Ministère de l'Intérieur. L'enveloppe est gérée
au niveau local par le Bourgmestre de la Ville. Les cadres légaux sont
l'Arrêté royal du 7 décembre 2006 relatif aux PSSP et
l'Arrêté ministériel du 15 janvier 2007 relatif à
l'introduction des PSSP 2007-2010. Les missions de ce service sont de
réduire le décrochage scolaire en appelant les acteurs locaux
traitant de la problématique du décrochage scolaire à se
réunir dans le cadre de la Commission Accrochage Scolaire. L'AAS
travaille avec le jeune et sa famille, c'est un travail de soutien,
d'écoute, d'orientation et d'accompagnement vers les services
compétents. Le Plan de Proximité et de Prévention
(PPP) est subsidié en grande partie par la Région
Wallonne, le gouvernement fédéral et la Ville. Le cadre
légal est le Décret du 15 mai 2003 relatif à la
prévention de proximité dans les Villes et les communes
Wallonnes. Ce service est coordonné par un chef de service et est
composé d'une équipe pluridisciplinaire de 32 personnes
(éducateurs de rue, animateurs, assistants sociaux, psychologues,
criminologue, secrétaire) qui travaillent dans différentes
cellules d'actions sociales afin de répondre aux différentes
missions qui leur sont attribuées : (1) la médiation des Conflits
de Voisinage, (2) le Bureau d'Aide aux Victimes, (3) le Service de
Prévention des Assuétudes, (4) le Travail Social de rue et les
Maisons de quartier. Les agents ont pour mission d'orienter les jeunes vers des
circuits de réinsertion socio-éducative et
socioprofessionnelle.
Les différents acteurs scolaires, communaux,
judiciaires et issus du milieu associatif sont invités à activer
et ce, en se référant à la Circulaire 1972, un
``éventail» de partenaires comme : les médiateurs
scolaires, les équipes mobiles, les Services d'Accrochage Scolaire
(SAS), les Aides en Milieu Ouvert (AMO), le service d'Aide à la Jeunesse
et la Direction Générale de l'Enseignement Obligatoire (DGEO).
Cette Circulaire encourage le renforcement de la collaboration entre
l'enseignement et le secteur de l'Aide à la Jeunesse. De plus, lorsque
les acteurs sociaux relèvent que le jeune est en danger, ils ont la
possibilité de relayer vers des organisations comme le Service Jeunesse
et Famille (SJF), le Parquet, le Service Protection à la Jeunesse (SPJ),
le Service d'Aide à la Jeunesse(SAJ). Les Décrets, les normes,
les Lois sont des références, un point de repère pour les
opérateurs dans le champ du décrochage scolaire en ce qui
concerne : des collaborations éventuelles visant le «mieux
être» ; des relais voire de la complémentarité dans
l'action sociale pour intégrer le jeune dans des circuits de
réinsertion
41 Ibid.
socio-éducative. Après avoir
présenté les normes étatiques et les opérateurs de
terrain, nous allons dès lors, contextualiser le décrochage
scolaire en Communauté française de Belgique sur le territoire
louvièrois.
4 Présentation de la Ville de La
Louvière
La région du Centre a une superficie42 de
plus ou moins 64.000 hectares pour une population d'environ 250.000 habitants
dispersés sur huit entités. La Louvière est la ville la
plus importante de la région du Centre en nombre d'habitants. À
elle seule, l'entité louvièroise compte près de 77.243
habitants pour une superficie d'environ 6.000 hectares et comprend onze
entités (La Louvière, Saint-Vaast, Bois-du-Luc, Houdeng-Goegnies,
Houdeng-Aimeries, Maurage, Trivières, Strepy-Bracquegnies,
Haine-Saint-Pierre, Haine-Saint-Paul, Besonrieux). Née de la
révolution industrielle, la région du Centre a été
frappée par la disparition des charbonnages et la fermeture de
nombreuses entreprises et ce, après un essor économique
extraordinaire. Tout comme Mons, le Borinage et Charleroi entre lesquels elle
est placée, La Louvière est reprise dans le sillon industriel
wallon. La Louvière se caractérise par un revenu par habitant le
plus faible de toute la région du Centre. Le taux de demande d'emploi
sur cette région est de 24,9%43. En ce qui concerne le niveau
socio-économique, on ne peut nier l'influence néfaste des
années 70-80. En effet, cette région du Centre a
été affectée par le déclin de ses activités
traditionnelles et connaît encore aujourd'hui une profonde crise
structurelle de son économie. Dès lors, il en résulte un
taux de chômage élevé caractérisé
par44 : un nombre important de femmes, une augmentation de
chômage chez les moins de 25 ans, le chômage qui atteint
désormais des personnes qualifiées. Enfin, 60 % des demandeurs
d'emploi le sont depuis plus d'un an. Dans ce contexte, il est difficile pour
le citoyen louvièrois de se projeter vers l'avenir. Par ailleurs, La
Ville de La Louvière fait l'objet d'interventions communautaires dans le
cadre des fonds structurels européens45. Au niveau national,
certains de ses quartiers ont été répertoriés,
à l'initiative du Gouvernement Fédéral dans le cadre du
Fonds d'impulsion pour la Politique de l'immigration (FIPI), comme étant
des Zones d'Action Prioritaire (ZAP) nécessitant des actions positives
en faveur de l'intégration de la population immigrée locale et
des jeunes d'origine étrangère, en particulier. Ce fonds
d'urgence a pour objectif la réalisation de projets spécifiques
à l'intégration des
42Source : Service population de la Ville de La
Louvière (2006). En 2009 : 21,50%.
43Source: Institut National de Statistiques, SPF
Economie, PME, Classes moyennes et Energies (2006). 44Source:
Service population de la Ville de La Louvière.
45La Wallonie et les fonds structurels
européens 1994-1999. In Wallonie, Conseil Economique et Social de la
Région Wallonne, n°32, 1994-2, pp. 15-21.
immigrés s'inscrivant dans un des quatre axes suivants
: dépenses d'investissement pour l'infrastructure sportive et pour la
jeunesse, lutte contre le décrochage scolaire, emploi des jeunes
immigrés confrontés à des problèmes majeurs
d'insertion socioprofessionnelle, prévention de la délinquance
juvénile46. En ce qui concerne l'environnement scolaire des
jeunes louvièrois, La ville de La Louvière se caractérise
par un réseau d'enseignement très étoffé qui draine
de nombreux jeunes. Il est difficile de brosser un tableau précis de
tout ce flux d'élèves inscrits dans les établissements
scolaires de l'entité. Sur seize établissements d'enseignement
secondaire, dix sont en discrimination positive. La filière
professionnelle est largement représentée sur ce territoire. Les
seize établissements scolaires sont répartis dans
différents réseaux : six établissements pour le
réseau libre, trois établissements pour le provincial, une
école du réseau communal, une école de la
Communauté Française. On retrouve également, sur ce
territoire un CEFA et une IFAPME. L'enseignement spécialisé y est
également représenté. Ainsi, nous trouvons trois
écoles dans le réseau libre, un établissement communal et
une école du provincial. Une autre particularité de la Ville de
La Louvière est que la plupart de ces établissements se
localisent dans le Centre-Ville. Ce qui présente, entre autres, à
certains moments de la journée, de réels problèmes de
mobilité dans cette zone. De ce fait, la Ville de La Louvière
doit également faire face à un nombre important de jeunes qui se
baladent en rue pendant les heures des cours. Le Centre-Ville de La
Louvière est un carrefour multiculturel qui connaît une
mobilité de jeunes émanant des différentes communes du
Centre mais aussi des communes limitrophes comme Manage, Familleureux,
Morlanwez et Binche.
5 Le décrochage scolaire dans la tanière
des loups
Le décrochage scolaire est un phénomène
complexe qui est la partie visible d'un «problème»
que l'on peut facilement identifier à partir des normes relatives au
Décret du 30 juin 1998 (voir ci-après). Cependant, ce
problème cache souvent un « mal-être profond » qui
résulterait, selon Janosz et Leblanc (2005), d'une multitude de facteurs
dépassant le cadre purement scolaire. On retrouve dans leurs typologies
les déterminants de l'abandon scolaire - sociaux, personnels, familiaux,
interpersonnels, organisationnels - liés aux pratiques éducatives
et aux relations avec les enseignants et des déterminants personnels
liés à des données sociodémographiques. De plus,
les auteurs soulèvent que le décrochage scolaire peut être
considéré comme une manifestation extrême d'échec
scolaire, soulignant également
46Hubert, H.-O. (1999). L'Etat face à
l'insécurité : Dérives politiques des années 90
(p. 154). Bruxelles : Labor.
l'importance de la prévention, de la détection
voire de la responsabilité de l'école.
Si nous nous référons à la
définition de l'article 3 du Décret du 30 juin1998 : «
l'absentéisme est le comportement d'un élève, qui bien que
régulièrement inscrit, s'absente fréquemment des cours
sans motif valable ». Ce même article 3 définit le
décrochage scolaire comme :
« La situation d'un élève soumis
à l'obligation scolaire qui n'est inscrit dans aucun
établissement et qui n'est pas instruit à domicile; la situation
d'un élève soumis à l'obligation scolaire, inscrit dans un
établissement mais qui s'en est absenté si fréquemment
sans motif valable qu'il compte plus de 20 demi-jours d'absence
injustifiée ».
À cela s'ajoutent diverses situations particulières
d'absentéisme et de décrochage scolaire :
« Les situations d'élèves exclus ne
pouvant être réinscrits après une prise de connaissance du
dossier par la commission zonale d'inscription compétente (voir
l'article 30 du Décret) ; les situations d'élèves dits
« en crise » pouvant, de manière cumulative ou non,
présenter, entre autres, des problèmes de comportement,
d'absentéisme voire de retard scolaire, qui restent néanmoins en
situation d'élève régulier et, de ce fait, restent
inscrits dans l'établissement demandeur d'aide. Cette situation de crise
est appréciée par le conseil de classe et le centre PMS avec avis
de la commission zonale d'inscription compétente (voir l'article 31 du
même Décret) ; les situations d'élèves dits «
en crise » qui ne sont plus régulièrement inscrits dans un
établissement (voir l'article 31 bis du même
Décretj
La commission de l'éducation et de la formation en
communauté française relève que, entre la troisième
et la cinquième année du secondaire, 30 % des jeunes
découragés et démotivés quittent l'enseignement
avant la fin du secondaire47. En ce qui concerne le taux de
décrochage scolaire sur le territoire louvièrois, il n'existe pas
de chiffres précis concernant cette problématique. Si nous
prenons en considération les statistiques du service du contrôle
de l'obligation scolaire de l'année scolaire 2007-2008 pour
l'enseignement secondaire en Communauté française de
Belgique48, cette période comptabilise, dans l'arrondissement
judiciaire de Mons, 468 cas de décrochage scolaire dont, 402 dans
l'enseignement ordinaire et 66 dans l'enseignement spécialisé.
Les chiffres de la Ville de La Louvière sont traités et inclus
dans ce dossier. Par conséquent, les données ne nous donnent pas
des chiffres précis pour la région étudiée. En ce
qui concerne l'interprétation de ces données chiffrées, il
y a lieu de respecter quelques règles de prudence. Divers biais peuvent
être constatés : par exemple, certains chefs
d'établissement ne suivent pas scrupuleusement la réglementation
et certaines
47Communauté française de Belgique
(2001-2002). Données statistiques. En ligne
http://www.cfbe,
consulté en mars 2008.
48Annexe : tableau sur l'absentéisme scolaire
remis par la DGEO dans le cadre du mémoire.
situations de décrochage scolaire ne sont pas
dénoncées, des erreurs d'encodage peuvent survenir. De ce fait,
il nous semble intéressant de prendre en considération les
constats du Service d'Aide à la Jeunesse de Mons et de l'Antenne
Accrochage Scolaire du Plan de Sécurité et de Prévention
(AAS du PSSP)49 de la Ville de La Louvière afin d'avoir une
idée de la problématique sur ce territoire. Selon le SAJ,
« La Louvière est la commune qui possède le taux de
décrochages le plus important de l'arrondissement, avec Mons et
Saint-Ghislain. Le profil type du décrocheur est un garçon ou une
fille de 15 à 16 ans, en troisième professionnelle ou
humanité »50. En effet, pour
l'année 2002-2003 ce service a relevé 231 situations de
décrochage scolaire pour 178 en 2003-200451. Pour
l'année 2006, l'AAS a pris en charge 222 dossiers dont 1/3
représente des adolescents en décrochage solitaire,
c'est-àdire des « élèves fantômes » qui ne
sortent pas de leur domicile (dépression, phobie scolaire, repli sur
soi, tentative de suicide). S'agissant du type de décrochage scolaire le
plus difficile à déceler, on peut supposer que le chiffre «
réel » est plus important. Aussi, d'après le C.S.P.
louvièrois, 50% des demandes émanent des parents et des jeunes et
70% des « décrocheurs » sont âgés entre 15 ans et
18 ans52. Les chiffres du SAJ et de l'AAS confirment que la
troisième année d'études, tous types d'enseignement
confondus, s'avère être l'année charnière. L'AAS
doit faire face à un nombre important de jeunes qui se promènent
en rue pendant les heures des cours et tente de remédier à cette
problématique (le Pass scolaire) émane de ce constat). En ce qui
concerne le décrochage scolaire, les constats de terrain, en lien avec
les données statistiques53 de l'AAS, révèlent
que ce service rencontre un nombre élevé d'adolescents en
décrochage. Ceux-ci sont principalement issus de l'enseignement
spécialisé et de l'enseignement professionnel. Une fois
renvoyés de ces deux types d'enseignement, ces jeunes (parcours scolaire
instable, exclusions) sont amenés à « voyager » d'une
école à l'autre avant de, éventuellement, cesser toute
scolarité ou de côtoyer l'horaire réduit par manque
d'alternative. L'acteur communal et les acteurs scolaires aiguillent ces
adolescents vers des « Services Accrochage Scolaire » qui travaillent
la socialisation, l'intégration et l'orientation scolaire du jeune dans
un cadre adapté (équipe pluridisciplinaire, pédagogie
différenciée). Cependant, il est rare d'obtenir des places car
elles sont limitées. Trop d'adolescents ne peuvent donc pas profiter de
cette pédagogie. Dans les faits, les acteurs
49 Pour plus d'informations sur ces deux
organisations, nous invitons le lecteur à consulter les pages 27 et 41.
50Contrat de sécurité et de prévention de La
Louvière : un pass scolaire pour lutter contre le décrochage
(06/12/2004). En ligne
http://www.altereduc.be,
consulté en avril 2008.
51Arrondissement judiciaire de Mons : «
commentaires sur les résultats statistiques des trois années
scolaires de 2001 à 2004 ».
52Statistiques du décrochage scolaire de l'AAS
du PSSP de la Ville de La Louvière (2006).
53 Voir annexe 1.
qui traitent le décrochage scolaire (le Centre Psycho
Médico Social, le Contrat de Sécurité : l'AAS, le Service
Jeunesse et Famille, l'Aide en Milieu Ouvert, les éducateurs et
directions d'écoles), font des constats communs concernant les
difficultés d'orienter et d'accompagner ces jeunes. Dès lors, la
solidarité sociale des opérateurs atteint ses propres limites
face aux manques de place dans les structures d'accrochage scolaire.
6 De la concertation entre les différents
opérateurs au projet « Pass scolaire »
« Au-delà de l'école et ses
différentes filières (général, technique,
professionnel) qui en tant que telles peuvent être analysées comme
autant de dispositifs d'insertion, des dispositifs spécifiques ont
été mis en place ces dernières années en vue de
favoriser l'accrochage scolaire et la formation professionnelle des jeunes en
décrochage scolaire : ce sont les CEFA (Centre de Formation par
Alternance) et les dispositifs d'accrochage scolaire (SAS)54i
Outre ces dispositifs, il existe, des services qui se sont penchés sur
le décrochage scolaire comme : les acteurs communaux, tels que les
Contrats de Sécurité et de Prévention (aujourd'hui
définis comme des Plans Stratégiques de Sécurité et
de Prévention) et les acteurs judiciaires (le Service Jeunesse et
Famille et les criminologues du Parquet). En effet, certains
événements, relayés par les médias, ont
«activé» la mise en place de nouveaux services et ont
accentué des logiques de solidarité55 entre les
différents opérateurs qui traitent le décrochage scolaire.
Rappelons-nous la mort de Joe Van Holsbeeck, le 12 avril 2006, tué
à coups de couteau par deux jeunes adolescents pour un MP3 à la
gare de Bruxelles. Peu après, le 23 avril, en hommage à Joe, on
assistait à une marche silencieuse qui mobilisa 80.000 personnes,
à Bruxelles. En réponse à ces faits, l'ancien premier
ministre, Guy Verhofstadt, parlait de « signal politique» de la part
du Fédéral et des Communautés. Il s'agissait d'apporter du
renfort aux magistrats de la jeunesse en ce qui concerne le placement des
jeunes en centre fermé, ainsi que de nommer des criminologues au sein
des parquets pour accompagner les jeunes en décrochage scolaire et
lutter contre le racket. Dans ce contexte, l'Aide à la jeunesse, le
Fédéral et l'Enseignement ont renforcé leur collaboration
afin d' «accrocher» le jeune en difficulté ; l'idée
étant d'optimiser les actions à travers la concertation avec les
différents dispositifs. Aujourd'hui, même si on a souvent
reproché aux différents acteurs sociaux qui
54Franssen, A. (mars 2002). Thèse de doctorat,
Université Catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve. La fabrique du
sujet : Transformations normatives, crises identitaires et attentes de
reconnaissance (p. 30).
55Dans le sens où les acteurs s'entraident pour
insérer le jeune dans les circuits de réinsertion
socio-éducative voire socio-professionnelle.
traitent le décrochage scolaire de travailler de
manière «isolée», il existe plusieurs initiatives pour
lutter contre le décrochage scolaire et favoriser la collaboration entre
les différents acteurs concernés. Les institutions des
différentes sphères scolaire, judiciaire, associative et
communale sont passées de la réflexion à l'
«action» en se concertant dans des lieux communs.
« Face à l'absentéisme scolaire, qui
est une problématique difficile à gérer, la ville de La
Louvière a développé un mécanisme digne
d'intérêt. Elle a en effet créé une
``commission accrochage scolaire» rassemblant notamment des
directeurs d'école, des responsables de centres PMS, des
représentants de la médiation scolaire de la Région
wallonne, des membres du service de l'Aide à la jeunesse, du parquet et
de la police. Cette commission est gérée par l'antenne du contrat
de sécurité et de prévention de la ville. » (Philippe
de Fontaine)
« Plusieurs villes de la
Région wallonne ont effectivement développé des actions
avec les partenaires scolaires et institutionnels pour lutter contre
l'absentéisme et le décrochage scolaire sur la base des
programmes de sécurité et de prévention. Les villes de La
Louvière et de Mons se montrent particulièrement actives dans ce
domaine. La prise de conscience du phénomène par les
autorités institutionnelles est donc réelle. La lutte contre le
décrochage scolaire requiert l'implication de tous les acteurs et
intervenants ainsi que la coordination de leurs actions. L'idée de
créer un organe commun me paraît par conséquent
judicieuse56. » (Marie Arena)
Face au problème d'absentéisme et de
décrochage scolaire, une cellule a été mise en place en
juin 1994 dans le cadre du Contrat de Sécurité et de
Société au volet policier. En janvier 2002, la cellule devient
l'Antenne Accrochage Scolaire et ce, afin d'intégrer le volet
préventif. C'est dans le cadre de l'échange et des constats de
terrain établis par les acteurs locaux que l'Antenne Accrochage Scolaire
a vu le jour. Ce service assure également l'animation de la Commission
Accrochage Scolaire qui réunit les différents intervenants locaux
afin d'élaborer des projets ayant pour but de diminuer le
décrochage scolaire et le sentiment d'insécurité sur
l'entité. La Commission Accrochage Scolaire est un groupe de
réflexion et de travail qui est en place depuis plusieurs
années.
Nous retrouvons dans le Procès Verbal57 de la
CAS du 24/01/08 rédigé par l'AAS, les sujets
56Question orale de M. Philippe Fontaine à
Mme Marie Arena (mai 2006), Ministre-Présidente chargée de
l'Enseignement obligatoire et de la promotion sociale, ayant pour objet «
le « Pass » contre l'école buissonnière. En ligne
http://www.mr-pcf.be
/Travail-Parlementaire/documents/
QOPHFPasscontreecolebuissonniereCRI10- 0405.pdf -,
consulté en septembre 2008.
57Annexe 1.
que les Membres de la Commission souhaitent aborder dans un
avenir proche. Outre la concertation entre les acteurs locaux, la CAS a permis
en septembre 2004, d'appliquer le «Pass scolaire» 58
à la Ville de La Louvière : il s'agit d'un projet visant à
harmoniser les interventions en matière de décrochage scolaire
pour l'enseignement secondaire tous réseaux confondus auprès des
intervenants locaux. « C'est ainsi que dix établissements
scolaires, la police locale, le Parquet Jeunesse de Mons, les CPMS, les
médiateurs scolaires, les associations (AMO, SAS, Centre de Guidance) et
autres intervenants ont adhéré au projet. Ils ont donc
marqué leur souhait de développer des synergies et des actions
concertées autour des jeunes
«décrocheurs''59. »
Concrètement, le «Pass scolaire» vise la prévention du
décrochage/absentéisme scolaire en harmonisant les pratiques des
différents partenaires impliqués. Concrètement, chaque
élève se trouvant en rue doit être muni de son «Pass
scolaire», c'est-à-dire d'une carte reprenant son horaire
hebdomadaire, cela afin de justifier sa présence en-dehors de
l'établissement pendant les heures de cours en cas de contrôle par
la Police locale. Après chaque contrôle, si la présence en
rue est injustifiée, l'établissement scolaire ainsi que les
parents seront avertis. Trois contrôles injustifiés donnent lieu
à une information transmise par la Police locale auprès du
Parquet. Cet outil est adapté aux réalités de chaque
école et répond aux objectifs de la PLP 4160.
« Outre ces projets, la Commission Accrochage Scolaire a permis
à plusieurs services de présenter leurs missions et ce, afin de
mieux cerner les spécificités de chacun et de renforcer le
réseau existant61. » « Cette commission rencontre
un taux de participation relativement satisfaisant et montre le besoin des
intervenants locaux de se réunir pour trouver ensemble des solutions
afin de motiver les jeunes à poursuivre des études, même si
le contexte socio-économique n'est pas des plus rassurants et
encourageants. Dès lors, le travail au sein de cette structure de
concertation a tout son sens pour maintenir des liens entre les professionnels
de l'éducation62i
58En 2006, l'AAS a mené une enquête en
collaboration avec l'UMH (Université de Mons Hainaut) auprès des
directions d'écoles dans l'objectif de « mesurer » le
sentiment d'insécurité dans les écoles. Dans le cadre
cette étude, nous constatons que 75% des écoles du cycle
secondaire de la Ville de La Louvière qui fonctionnent avec des cartes
de sorties utilisent le « PASS Scolaire ».
58Annexe 1: Courrier rédigé par le C.S.P
(aujourd'hui appelé Plan Stratégique de Sécurité et
de Prévention) du 08/10/07 envoyé aux acteurs locaux qui traitent
le décrochage scolaire.
59Ibid.
60Pour plus d'informations, nous renvoyons nos
lecteurs à consulter les pages 23-24 de notre étude.
61Annexe 1 : Courrier rédigé par le
C.S.P (aujourd'hui appelé Plan Stratégique de
Sécurité et de Prévention) du 08/10/07 envoyé aux
acteurs locaux qui traitent le décrochage scolaire.
62Rapport de l'évaluatrice interne du C.S.P de
la Ville de La Louvière (2004).
7 Conclusion
Tout au long de ce chapitre, nous avons présenté
les différents acteurs qui traitent le décrochage scolaire :
premièrement, les acteurs scolaires: les directions d'écoles, les
éducateurs, les CPMS, les équipes mobiles, les médiateurs
du service de la médiation scolaire en Wallonie, la Direction
Générale de l'Enseignement Obligatoire. Deuxièmement, les
acteurs issus du milieu associatif: l'équipe pluridisciplinaire du
Service Accrochage Scolaire, l'Aide en Milieu Ouvert. Troisièmement, les
acteurs communaux: l'Antenne Accrochage Scolaire du Plan de
Sécurité et de Prévention et le Plan de Proximité
et de Prévention. Quatrièmement, les acteurs judiciaires : le
Service de Protection de la Jeunesse, le parquet de Mons, le Service Jeunesse
Famille de la police. Ces différents opérateurs sont
balisés par des textes légaux (Circulaires et Décrets) et
sont invités à créer des synergies avec d'autres
organisations. Ces dernières s'inscrivent dans une logique de
contrôle et de solidarité sociale dans le but d'insérer le
jeune dans les circuits de réinsertion socio-éducative. Nous
avons également soulevé que l'État a une fonction de
régulateur dans le champ de l'accrochage scolaire. Il a pour vocation de
faciliter et d'encourager les initiatives locales en décrétant la
concertation et la collaboration entre les différents acteurs. Ils sont
invités à se rencontrer dans le cadre d'une Commission Accrochage
Scolaire gérée par le PSSP (anciennement appelé Contrat de
Sécurité) sur le territoire louvièrois. En outre,
l'État décentralise son «pouvoir» afin que les
institutions puissent répondre à la problématique locale
du décrochage scolaire en appelant les organisations à se
concerter et à mobiliser les ressources locales.
Si l'État (le Ministère de l'Intérieur)
invite les opérateurs à se concerter dans la cadre de la
Commission Accrochage Scolaire, qu'en est-il sur le terrain ? De manière
concrète, quelle est l'influence de la CAS sur les logiques de
solidarité des acteurs scolaires, communaux, judiciaires et issus du
milieu associatif ?
Chapitre 3 : Le décrochage scolaire, une
question de solidarité
1 Introduction
Pour traiter la problématique du décrochage
scolaire, il existe des acteurs scolaires, communaux, judiciaires et des
acteurs issus du milieu associatif invités à créer des
synergies dans le but d'orienter les «décrocheurs» vers des
circuits de réinsertion socio-éducative. De plus, on retrouve au
sein de la CAS gérée par l'acteur communal, les différents
acteurs qui traitent la problématique du décrochage scolaire.
Ici, il s'agit de s'intéresser aux types de solidarité de ses
opérateurs qui ont des liens avec la CAS. Pour ce faire, nous
utiliserons, dans le cadre de notre étude, la typologie du sociologue
Guy Bajoit (2002) relative aux quatre logiques de solidarité qui
soulèvent des logiques instrumentales et expressives. L'outil nous
permettra d'analyser ce qui oriente et donne du sens aux conduites des
opérateurs et ce qui les fait s'entraider. Pour construire sa typologie,
il s'est inspiré des quatre déterminants de l'action de Max Weber
(1971) et en a modifié quelque peu les modalités. Weber est un
sociologue qui s'est intéressé aux logiques sous-jacentes des
interactions sociales. Pour rendre compte de ces différentes logiques,
Max Weber s'est appuyé sur ce qu'il appelle : l'idéal type. Dans
les pages qui vont suivre, et dans l'objectif de présenter les logiques
de solidarité de Guy Bajoit, nous allons, à partir de Max Weber,
expliquer l'idéal type ainsi que ses déterminants de l'action.
Enfin, notre cadre théorique, en l'occurrence l'outil conceptuel que
nous propose Guy Bajoit, sera mobilisé pour notre partie
méthodologique. L'auteur nous propose un idéal type qui nous
permettra de rendre compte de la logique cachée derrière toute
action sociale.
« Le positionnement de la démarche dans un
cadre théorique ne se réalise pas de manière
mécanique, ni artificielle. Le cadre théorique n'est ni un poids
administratif, ni une charge académique. Il a pour fonction non pas de
compliquer mais de faciliter la vie du chercheur ; il va permettre d'ouvrir des
pistes nouvelles et, ainsi qu'on observe dans l'illustration qui
précède, il va introduire dans la réflexion des concepts
originaux et de la sorte enrichir l'ensemble de la démarche.
63»
63Albarello, L. (2003). Apprendre à
chercher. L'acteur social et la recherche scientifique (p. 37). Bruxelles :
De Boeck.
2 L'idéal type comme outil conceptuel
« Instrument d'objectivation du réel,
l'idéal type contraint le chercheur à clarifier et à
expliciter ses présupposés et, partant, à prendre
conscience des limites de la validité des résultats de sa
recherche 64». Pour Max Weber, la compréhension et
l'explication des faits sociaux s'appuient sur un idéal type qui est un
modèle idéal permettant de rendre compte de la logique
cachée derrière toute action sociale. « L'idéal
type est une représentation simplifiée de la
réalité construite en négligeant tout ce qui est
caractéristique du phénomène étudié et en
accentuant, au contraire, ses traits spécifiques. Ce n'est ni une
moyenne ni une description fidèle de la réalité, mais un
modèle abstrait, à l'image du marché chez les
économistes néoclassiques, qui doit permettre de mettre en valeur
la logique des relations sociales telles qu'elles découlent des
intentions des différents acteurs65j Cet outil ne
reflète pas la réalité empirique en soi, il aide à
son analyse et à sa compréhension ; ces représentations
schématiques accentuent délibérément certaines
propriétés pour la recherche.
« Loin d'être une simple reproduction de la
réalité, c'est une construction théorique, `'un tableau
idéal» au sens logique du terme, dont le concept d'homo
oeconomicus, forgé par des économistes classiques
représente un bon modèle66. » Ce concept est
une fiction inventée par les économistes à partir d'un
homme irréel, analogue à une figure idéale en
mathématique. Son objectif est de décrire les
phénomènes les plus élémentaires de la vie de
l'homme ayant pleinement accédé à l'économie.
En outre, c'est un outil heuristique qui, d'une part, permet d'analyser
les actions sociales, de catégoriser, d'élaborer des
hypothèses et de les comparer à la réalité ;
d'autre part, ne se présente pas comme une explication
définitive. L'idéal type est un moyen intellectuel de
compréhension et de découverte pour le chercheur. Cet outil
permet de reconstruire le sens que les individus donnent à leurs
actions. Dans ce contexte, on peut, dès lors, expliquer le
fonctionnement de l'activité sociale sous un angle précis
générant ainsi ses propres limites d'analyse (nous observons
notre sujet d'étude avec des lunettes spécifiques qui baliseront
notre démarche scientifique et donc, notre analyse et ses
résultats).
64Mendras, H. & Etienne, J. (1996). Les Grands
auteurs de la sociologie (p.145). Hater. 65Montoussé, M.
& Renouard, G. (1997). 100 fiches pour comprendre la sociologie
(p.35). Breal. 66Mendras, H. & Etienne, J. (1996). Les Grands
auteurs de la sociologie (p.145). Hater.
3 Les quatre types idéaux fondamentaux de Max
Weber
À l'aide de la typologie de Max Weber, celui-ci cherche
à reconstruire le sens que les individus donnent à leurs
activités ; tout phénomène social se comprend et
s'explique en cherchant le sens et l'origine d'une activité. La
conception weberienne de l'action ou de l'activité sociale est
précisée par celle de l'interaction : « le sens
visé se rapporte au comportement d'autrui par rapport auquel s'oriente
son déroulement. L'action ou l'activité sociale doit être
comprise par le sens que lui attachent les acteurs (les agents). Ce sens n'est
pas seulement subjectif, mais aussi intersubjectif, puisque je ne peux pas
attacher un sens à ma propre action si je ne prends pas en compte la
réponse que je suis en mesure d'anticiper de mes
partenaires67i Si pour Weber la sociologie est une discipline
interprétative, elle nous engage à tenir compte du sens que les
acteurs attachent à leurs propres positions et à leurs valeurs.
Pour expliquer le fonctionnement de l'activité sociale, Max Weber
propose la typologie des déterminants de
l'action68 :
3.1 L'action rationnelle en finalité
L'acteur détermine rationnellement à la fois les
moyens et les buts de son action.
3.2 L'action rationnelle en valeur
L'acteur cherche à accomplir une valeur.
C'est une action fondée sur des valeurs et qui ne tient
pas compte des avantages ou inconvénients qu'elle peut procurer (EX : le
respect de la parole donnée).
3.3 L'action traditionnelle
Actions « réflexes », « mécaniques
» qui sont le produit de l'habitude.
C'est un comportement guidé par la coutume ou une croyance
de longue date.
3.4 L'action affective
C'est un acte commis sous le coup d'une émotion. Ce sont
des réactions instinctives (EX : une gifle donnée sous le coup de
l'émotion).
67 Boudon, R. & Bourricaud, F. (1982).
Dictionnaire critique de la sociologie (p. 680). Paris : Puf.
68 En ligne
http://fr.Wikipedia.org/Wiki/Max
Weber, consulté en avril 2008.
Remarques:
Selon Weber, l'État moderne exerce une domination
légale-rationnelle, dont la légitimité repose sur
l'autorité « impersonnelle » de la loi. L'État devient
l'instrument d'une domination bureaucratique. Celle-ci « correspond au
pouvoir qui s'exerce dans les administrations bureaucratiques modernes. Dans ce
cadre, les individus obéissent à des règlements mis en
oeuvre par des autorités constituées qui fixent des obligations.
Les décisions prises sont orientées vers la rationalité en
finalité ou/et en valeur69 ». Ainsi, pour l'auteur,
il existe une division du travail et une coopération permanente entre
les individus qui occupent chacun une fonction avec des tâches
précises. En outre, dans ce système bureaucratique, chaque
fonction s'appuie sur une compétence liée à une
qualification précise ; les fonctionnaires respectent une
réglementation impersonnelle et enfin, leur carrière est
réglée selon des critères objectifs (qualification,
ancienneté). Pour Max Weber, « la bureaucratie est le mode de
fonctionnement typique des grandes organisations modernes qui allie
efficacité, spécialisation et continuité des tâches,
autonomie par rapport aux individus et soumission aux
règlements70. »
Selon l'auteur, les sociétés occidentales sont
caractérisées par un processus de rationalisation des
activités humaines dans tous les domaines (économiques, sociaux
et politiques). En effet, La rationalité est une valeur
caractéristique de la modernité qui oriente l'activité
sociale de l'homme. Cela signifie que les activités sociales se
rapprochent de la recherche de l'efficacité en s'éloignant de la
tradition et de l'affectif. Weber identifie deux sortes d'actions rationnelles
: la rationalité en finalité, la rationalité en valeur.
Weber les désigne comme une sociation : ces deux formes de
rationalité ont en commun d'être «conscientes» et non
pas dictées par l'émotion ou liées à une
tradition.
69Etienne, J. (1995). Dictionnaire de la sociologie
: les notions-les mécanismes-les auteurs (p.238). Haher.
70Moutoussé, M. & Renouard, G. (2003). Sciences
Economiques et Sociales-Enseignement Spécialisé-Manuel
d'enseignement. Breal.
4 Les quatre logiques de solidarité de Guy
Bajoit
« Les individus qui choisissent la (mes)
même(s) logique(s) d'échange ont souvent (mais pas toujours)
tendance à se reconnaître réciproquement dans l'action, et
à construire des liens de solidarité entre eux. Examinons la
nature de ces liens, en analysant le `'ciment» qui attache les individus
les uns aux autres : qu'est-ce qui les fait s'entraider ? Nous distinguons
quatre grandes logiques de solidarité, en nous inspirant, en partie, de
la typologie des formes de l'action selon Max Weber71.
»
4.1 La solidarité conditionnelle
Elle est fondée sur une condition sociale commune :
« même s'ils ne s'aiment pas, s'ils ne croient pas aux
mêmes valeurs et s'ils n'ont pas les mêmes intérêts,
les gens peuvent être solidaires entre eux, simplement parce qu'ils
partagent la même condition sociale : ils font partie d'une famille, d'un
clan, d'une ethnie, d'une région, d'un pays, sont du même sexe, du
même âge ou occupent la même place dans une organisation
sociale72. »
Exemple :
La majorité des participants de la CAS sont des acteurs
locaux. Ils partagent le même environnement social louvièrois, le
même public cible, les mêmes difficultés face au
décrochage scolaire. Les acteurs scolaires, communaux, judiciaires et
issus du milieu associatif sont solidaires les uns vis-à-vis des autres
parce qu'ils «vivent» dans un même contexte. La situation
sociale détermine les relations sociales.
4.2 La solidarité contractuelle
Elle est fondée sur les intérêts.
L'individu se fixe un objectif et détermine les moyens les plus
efficaces pour y parvenir. Les moyens mis en oeuvre sont adaptés aux
buts recherchés. Les gens sont solidaires parce qu'ils recherchent un
intérêt personnel c'est-à-dire un bien qui ne peut venir
que d'un autre.
71Bajoit, G. (2003). Le changement social :
Approche sociologique des sociétés occidentales
contemporaines (p. 137). Paris: Armand Collin.
72Ibid.
Exemple :
Concrètement, les différents acteurs de la CAS
doivent répondre aux exigences de leur institution. Les exigences se
traduisent sous forme d'objectifs à atteindre. Pour ce faire, les
travailleurs sociaux vont élaborer des stratégies de travail en
prônant la collaboration avec d'autres services. Cela peut se traduire de
plusieurs façons : par une orientation vers un service pouvant
répondre à la demande du jeune ; par une participation des
acteurs à un projet dans lequel ils trouveront un avantage pour leur
organisation. Aussi, certaines missions des acteurs viseront à
réunir autour d'une table les travailleurs sociaux dans le but de
coordonner les ressources locales.
4.3 La solidarité fusionnelle
Elle est fondée sur des valeurs : « les gens
sont liés entre eux par une communauté de convictions :
ils partagent une foi, des croyances, des valeurs, une idéologie, une
utopie, le même projet d'avenir, qu'ils croient bon, non seulement pour
eux-mêmes, mais aussi pour les autres73
».
Exemple :
Certains acteurs de la CAS soulèvent l'importance de
collaborer avec d'autres intervenants sociaux pour traiter la
problématique du décrochage scolaire. Pour atteindre une certaine
efficacité, les travailleurs sociaux sont sensibles aux valeurs
«professionnelles» véhiculées par les autres services.
Certains parleront du bien-être du jeune, d'immédiateté
dans la prise en charge du décrocheur, de flexibilité, de
connaissance de la problématique abordée, de l'expérience
des acteurs...
4.4 La solidarité affective
Elle est fondée sur des affects : « les gens sont
alors solidaires parce qu'ils se connaissent, parce qu'ils ont vécu la
même histoire, partagé des expériences,
intériorisé les mêmes normes culturelles et que cela a
tissé entre eux des liens affectifs plus ou moins forts et
durables74.» Exemple :
Les expériences vécues au sein de la CAS peuvent
installer des liens de « camaraderie » et faciliter ainsi, les
relations entre les opérateurs et les institutions.
73Ibid. 74Ibid.
En prenant en considération les différentes formes
de logiques de solidarité, Guy Bajoit (2002) a construit un tableau afin
de voir en quoi elles se ressemblent et se distinguent :
Logiques de solidarité
|
Construites sur le passé
|
Construites sur l'avenir
|
Logique expressive
|
Solidarité affective
|
Solidarité fusionnelle
|
Logique instrumentale
|
Solidarité conditionnelle
|
Solidarité contractuelle
|
Pour expliciter ce tableau et les logiques de
solidarité, l'auteur soulève que : « les unes sont plus
instrumentales, plus froides (la contractuelle et la conditionnelle), tandis
que les autres sont plus expressives, plus chaudes (l'affective et la
fusionnelle) ; les unes sont plus orientées vers l'avenir, plus
projectives (la fusionnelle et la contractuelle) ; les autres sont plus
déterminées par le passé (la conditionnelle et
l'affective) 75.»
Pour Guy Bajoit, différents groupes sociaux peuvent se
fonder sur la combinaison de plusieurs formes de solidarité. Par
conséquent, tout comme une corde tressée, ces groupes seraient
plus solides. Leurs membres sont ainsi liés par les différentes
logiques à la fois. À contrario, les groupes risquent
d'être plus fragiles s'ils fonctionnent sur un seul type de
solidarité.
75Op. cit., p. 138.
5 Conclusion
Les différents acteurs scolaires, communaux,
judiciaires et issus du milieu associatif se rencontrent dans le cadre d'une
Commission Accrochage Scolaire gérée par l'AAS du PSSP. Nous
pensons que cet environnement, dans lequel ils évoluent, peut orienter
les actions des participants. La rationalité de l'agent est
située dans un espace social, dans un contexte qui peut influencer
l'action des membres de la CAS. Outre les organisations qui traitent le
décrochage scolaire, « ce ne sont pas les «
organisations» qui prennent les décisions, mais des êtres
humains, qui se comportent en tant que membres d'organisations. Rien n'oblige,
en bonne logique, le membre d'une organisation à prendre ses
décisions uniquement en fonction de valeurs qui sont limitées du
point de vue de son organisation76. »
Quelques exemples : les opérateurs donneront du sens
à leurs actions en prenant en considération les objectifs de leur
organisation ; en fonction de leurs propres valeurs en ce qui concerne le
travail social ; en fonction des valeurs que véhicule leur organisation
; en collaborant avec des camarades de travail, ...
Pour dégager les logiques de solidarité des
différents opérateurs, Guy Bajoit s'est inspiré des
idéaux types de Max Weber pour proposer différentes logiques de
solidarité dites expressive et instrumentale. Nous pouvons
résumer les modifications de Bajoit sur les déterminants de
l'action de Weber : (1) l'action rationnelle en finalité ?
solidarité contractuelle; (2) l'action rationnelle en valeur ?
solidarité fusionnelle ; (3) l'action traditionnelle ? solidarité
conditionnelle et (4) l'action affective ? solidarité affective. C'est
à l'aide de la typologie de Guy Bajoit, que nous allons grossir certains
traits de la réalité où se rencontrent les
différents participants de la CAS sur le territoire louvièrois.
C'est dans cette optique que notre recherche progresse, les opérateurs
sont invités par l'AAS à se concerter autour de la
problématique du décrochage scolaire. Dans ce contexte, les
acteurs scolaires, communaux, judiciaires et issus du milieu associatif
disposent d'une autonomie par rapport aux effets supposés de leur
structure sociale et développent des conduites qui ont une «
dimension rationnelle». Notre instrument d'analyse, en l'occurrence
l'idéal type de Guy Bajoit, nous aidera à élaborer notre
hypothèse de recherche et à analyser les actions sociales des
acteurs.
76Parthenay, C. (2005). Herbert Simon :
rationalité limitée, théorie des organisations et
sciences de l'artificiel (p.14). En ligne
http://
www.grjm.net/documents/claude parthenay/Parthenay Simon.pdf,
consulté en avril 2008.
Deuxième partie : recherche empirique
Chapitre 4 : Méthodologie
1 Problématique
Comme nous l'avons soulevé dans notre premier chapitre,
le décrochage scolaire est devenu un problème public tant au
niveau politique, économique que social. Outre un cadre politique qui
s'oriente davantage vers le sécuritaire et le contrôle social,
l'environnement des acteurs scolaires, communaux, judiciaires et issus du
milieu associatif est balisé par des lois, des décrets et des
normes. De plus, ces opérateurs sont invités à
échanger, à collaborer avec des services de réinsertion
socio-éducative77. Si l'État crée les
règles du jeu et s'il développe des nouveaux dispositifs (par
exemple : l'Antenne Accrochage Scolaire du Plan Stratégique de
Sécurité et de Prévention subsidié par le
Ministère de l'Intérieur ; le Service Accrochage Scolaire et les
équipes mobiles de la Communauté française), sa vocation
est de faciliter, d'encourager les initiatives locales en
décrétant la concertation et la collaboration avec les
organisations qui traitent le décrochage scolaire. « Dans ces
nouvelles politiques, les « décideurs » supra-locaux se
contentent de définir les grandes lignes, de suggérer des
hypothèses d'interprétation des problèmes visés, et
laissent aux acteurs locaux le soin de spécifier ces orientations
générales en fonction des contextes locaux. À ce niveau,
les autorités communales sont investies de la responsabilité de
réunir des acteurs locaux dont l'action est significative par rapport
aux problèmes visés, et d'organiser entre eux une concertation de
manière à mettre au point un projet local
spécifique78 ». On retrouve sur le territoire
louvièrois en Communauté française belge, une Commission
Accrochage scolaire gérée par l'AAS (CS). Cette commission est un
lieu de concertation où gravitent les différents acteurs qui se
rencontrent dans le cadre de réunions trimestrielles et ce, dans une
logique adhocratique. Ces opérateurs ont chacun des
représentations bien spécifiques du décrochage
77Nous invitons le lecteur à la page 32 de
notre étude : malgré la collaboration entre les différents
opérateurs, la solidarité sociale des opérateurs atteint
ses propres limites face au manque de place dans les structures d'accrochage
scolaire.
78Hubert, H.-O. (1999). L'Etat face à
l'insécurité : Dérives politiques des années 90
(p. 168). Bruxelles : Labor.
scolaire et fonctionnent avec leurs propres règles,
leurs propres procédures, leurs propres normes, leurs propres
idéologies, leurs forces et leurs faiblesses. Dans un contexte où
l'on retrouve une multitude d'intervenants traitant le décrochage
scolaire et en prenant en considération leur organisation, nous
formulons les questions suivantes : (1) Quelles sont les perceptions de la
gestion du décrochage scolaire et les logiques de solidarité
mobilisées par les acteurs scolaires, communaux, judiciaires et issus du
milieu associatif au sein de leur organisation qui participent à la CAS
? (2) Comment la CAS traite la diversité des organisations qui y
participent et comment influence-t-elle leur logique de solidarité et
leur perception de la gestion du décrochage scolaire ?
2 Objectifs de recherche
Ici, il s'agit de cibler deux objectifs dans notre
étude à partir des questions que nous avons soulevées dans
les lignes précédentes, de façon à nous permettre
de structurer notre analyse et notre méthode de recherche. Le premier
objectif tentera d'apporter des éléments de réponse pour
notre hypothèse. Le second est exploratoire.
· (1) Identifier les perceptions de la gestion du
décrochage scolaire au sein de l'organisation des acteurs scolaires,
communaux, judiciaires et issus du milieu associatif qui participe à la
CAS et de dégager les logiques de solidarité chez les
différents acteurs afin de revenir sur notre hypothèse de
départ.
· (2) Identifier comment la CAS traite la
diversité des organisations qui y participent et de soulever l'influence
de la CAS sur les perceptions de la gestion du décrochage scolaire et
les logiques de solidarité des différents acteurs afin d'enrichir
notre recherche.
3 Hypothèse
Les perceptions de la gestion du décrochage
scolaire et les logiques de solidarité des acteurs scolaire, communal,
judiciaire et issu du milieu associatif sont influencées par
l'organisation à laquelle ils appartiennent.
3.1 Les variables dépendantes (V.D) et
indépendantes (V.IND)
3.1.1 V.D79
· Les logiques de solidarité (contractuelle,
fusionnelle, conditionnelle, affective) des acteurs scolaires, communaux,
judiciaires et issus du milieu associatif.
· Les perceptions de la gestion du décrochage
scolaire des acteurs scolaires, communaux, judiciaires et issus du milieu
associatif.
3.1.2 V.IND80
· L'organisation d'appartenance des acteurs. 4
Échantillon
Après avoir précisé nos objectifs de
recherche et l'hypothèse, il nous semble pertinent de rencontrer sur le
terrain les différents acteurs qui traitent le décrochage
scolaire afin de discuter (en utilisant les techniques de reformulation et
d'empathie recommandées par Carl Rogers) de leurs
représentations, à savoir : sur le décrochage scolaire ;
sur leurs pratiques, sur les autres acteurs qui traitent la
problématique ; sur des collaborations éventuelles et surtout sur
la CAS. Ces différents thèmes ont pour objectif de
répondre à nos objectifs de recherche. Dès lors,
l'entretien semi-directif nous semble être la méthode la plus
efficace car elle nous permet de créer des outils adaptés dans le
but d'obtenir des données qualitatives. L'entretien permet
également, un contact direct et personnel avec le répondant.
« Ce type d'entretien peut porter sur des comportements ou des
pratiques sociales diverses mais il concerne plus fréquemment la
recherche et la compréhension de représentations mentales. Dans
ces cas, le chercheur interroge telle personne parce que cette personne
possède telle caractéristiques, parce qu'elle appartient à
telle couche sociale, parce qu'elle a connu tel type d'expérience, telle
histoire, etc. Ce qui intéresse le chercheur, c'est donc bien ce que la
personne pense en tant qu'acteur et comment elle se représente tel
aspect de la vie sociale et non pas les
79C'est une variable qui est influencée par la
variable indépendante. 80C'est une variable
qui influe sur la variable dépendante.
informations factuelles qu'elle détiendrait
»81. La démarche peut être qualifiée
de compréhensive et inductive. Elle devrait nous permettre, d'une part,
de comprendre les logiques de solidarité élaborées par les
acteurs à partir de leurs représentations mentales et, d'autre
part, de décrire leurs pratiques sociales selon le sens qu'ils donnent
à leur réalité. Ainsi, nous allons privilégier un
regard englobant sur la réalité, prenant en compte les facteurs
contextuels et humains susceptibles de nourrir notre compréhension du
phénomène.
Aussi, dans le cadre de nos interviews, « il se peut
que le praticien-chercheur soit confronté au problème particulier
de devoir interroger certains du champ qu'il côtoie personnellement par
ailleurs. Cette situation est délicate et, sauf exception, elle doit
être évitée »82. Effectivement, nous
connaissons certains acteurs qui participent à la Commission Accrochage
Scolaire ; dans le cadre de notre étude, nous avons appliqué les
conseils de Luc Albarello (2004) : « des procédures existent
qui permettent de surmonter une telle difficulté : par exemple, faire
intervenir une autre personne pour mener les entretiens, réaliser
ceux-ci auprès des sujets identiques (c'est-à-dire qui
possèdent les mêmes caractéristiques significatives par
rapport à l'hypothèse) mais qui ne sont pas personnellement
connus, etc.»83 L'auteur suggère donc, de passer la
main à une tierce personne ou d'interviewer des sujets avec lesquels
nous n'avons pas d'attache particulière. C'est dans cette logique que
nous allons aborder notre démarche lors des entretiens84.
4.1 Critères pour interviewer les acteurs
« Même si l'approche qualitative ne vise pas
à la représentativité d'un échantillon comme cela
sera le cas dans l'approche quantitative, il importe pourtant de choisir les
individus à interroger de manière adéquate. Ce choix
s'effectue en répartissant, au sein d'une matrice, les sujets selon les
diverses variables considérées comme importantes en fonction de
l'hypothèse traitée85. »
En ce qui concerne le choix des personnes à interviewer,
nous les avons sélectionnées à partir de différents
critères :
(1) différents services traitant le décrochage
scolaire sur La Louvière.
81Op. cit., p. 44.
82Albarello, L. (2004). Devenir praticien-chercheur
: Comment réconcilier la recherche et la pratique sociale (p.75).
Bruxelles : De Boeck.
83Ibid.
84En l'occurrence, nous avons sollicité un
étudiant en 2ème Master à la FOPA pour
interviewer l'acteur communal.
85Op. cit., p. 74.
(2) Le choix s'oriente vers les participants réguliers de
la Commission Accrochage Scolaire.
(3) Nous interviewerons la ligne hiérarchique et un
opérateur pour chaque organisation.
Les différents acteurs présentés
ci-dessous nous semblent assez diversifiés et répondent aux
besoins de notre analyse dont l'objectif est de dégager des logiques
d'actions émanant des acteurs collectifs (organisations), en tenant
compte de leur participation à la CAS. Nous avons décidé
d'interviewer deux acteurs dans chaque organisation qui traite le
décrochage scolaire, excepté l'acteur scolaire qui en compte
trois. En effet, nous avons constaté dans le deuxième chapitre
que l'agent du CPMS est un acteur incontournable pour les écoles et
dès lors, celui-ci doit figurer dans notre travail.
4.2 Les acteurs communaux
Organisation
|
Antenne Accrochage Scolaire
|
Personnes à interviewer
|
Le chef de service
|
L'assistant social
|
4.3 Les acteurs scolaires
Organisation
|
École technique subventionnée
|
Personnes à interviewer
|
Le directeur
|
L'éducateur de l'école
|
L'assistant social
du CPMS
|
4.4 Les acteurs issus du milieu associatif
Organisation
|
Aide en Milieu Ouvert : l'ASBL Transit
|
Personnes à interviewer
|
Le chef de service
|
L'assistant social
|
4.5 Les acteurs judiciaires
Organisation
|
Service Jeunesse et Famille
|
Personnes à interviewer
|
La coordinatrice
|
L'agent de police
|
5 Outils et matériau pour la collecte des
données
Nous utiliserons deux catégories de sources dans la
collecte des données : d'une part, nous aurons recours à une
analyse de documents, à savoir : les Décrets et normes relatifs
au décrochage scolaire (le Décret mission, la PLP 41, la
Circulaire 1972 relative à l'obligation scolaire et de
l'absentéisme...) ; d'autre part, nous interviewerons les acteurs
scolaires, communaux, judiciaires et issus du milieu associatif. En effet,
l'interview est : « l'instrument le plus adéquat pour cerner
les systèmes de représentation, de valeurs, de normes
véhiculées par un individu86.» En
outre, pour notre approche active, nous devons (1) concevoir un guide
d'entretien sous forme de questionnaire et ce, pour interviewer -
à partir de la technique de l'entretien semi-directif -
les acteurs que nous avons sélectionnés ci-avant. (2) Enfin,
nous allons construire une matrice pour catégoriser les données
de nos entretiens.
5.1 Le guide d'entretien
Afin de faciliter notre recherche, nous suggérons un
``guide d'entretien» sous forme de questionnaire. Le guide sera
construit à partir de trois thématiques qui tiennent compte du
cadre théorique proposé par Guy Bajoit et de nos objectifs de
recherche.
5.2 La représentation de la gestion du
décrochage scolaire au sein de l'organisation
· La perception de la gestion du décrochage scolaire
au sein de l'organisation dans laquelle travaille l'acteur
interviewé.
· Les spécificités de l'organisation
liées au décrochage scolaire.
· Les limites d'interventions par rapport à la
problématique du décrochage.
? La démarche est descriptive et nous permettra, d'une
part, de différencier les différents opérateurs dans leurs
missions face au décrochage scolaire, et d'autre part, de leurs
perceptions face à la gestion de la problématique.
86Ruquoy, D. (1995). Pratiques et méthodes
de recherche en sciences sociales (p. 63). Paris : Armand Colin.
5.3 La représentation des services qui traitent le
décrochage scolaire et des collaborations éventuelles
Guy Bajoit87 nous suggère d'analyser le
«ciment» qui attache les individus les uns aux autres : qu'est-ce qui
les fait s'entraider ? En orientant davantage nos questions vers les
collaborations entre les opérateurs et vers la CAS, lieu
d'échange et d'interaction, nous pourrons dégager dans notre
analyse les logiques de solidarité (contractuelle, fusionnelle,
conditionnelle et affective) sous-jacentes aux représentations des
acteurs interviewés et identifier des éléments qui nous
permettront d'enrichir notre recherche.
· La perception du travail des acteurs judiciaires,
communaux, privés et scolaires en ce qui concerne le décrochage
scolaire.
· La description des partenaires privilégiés
et le constat sur le terrain.
· La collaboration88 avec des organisations qui
traitent le décrochage scolaire.
? Cette thématique nous permettra de présenter la
dynamique de travail avec les autres services sociaux et de soulever des
logiques de solidarité.
5.4 La représentation de la Commission Accrochage
Scolaire et des collaborations éventuelles
· La participation des acteurs scolaires, judiciaires,
privés et communaux à la Commission Accrochage Scolaire.
· La collaboration et les actions menées entre
opérateurs.
· Les intérêts des acteurs.
· Les sentiments, l'impact des relations
privilégiées.
? Cette thématique nous permettra de dégager des
logiques de solidarité entre les acteurs et de vérifier si la CAS
influence leurs perceptions sur la problématique du décrochage
scolaire.
Après avoir structuré nos thématiques, nous
allons intégrer dans chacune d'elles89 différentes
questions qui seront posées aux acteurs que nous avons
sélectionnés pour notre étude.
87Pour dégager les logiques d'action, Weber
souligne que l'action ou l'activité sociale est précisée
par celle de l'interaction.
88En retrouve la définition de la
collaboration dans Le Larousse illustré (2005) : (1) travailler avec
d'autres à une oeuvre commune ; (2) pratiquer une politique de
collaboration.
5.5 Le guide d'entretien organisé autour des trois
thématiques :
Représentation de la gestion du
décrochage scolaire
· Pourriez-vous me décrire, brièvement, votre
statut, vos missions et l'institution dans laquelle vous travaillez ?
(idéologie de l'organisation).
· Comment votre service perçoit-il le
décrochage scolaire au sein de votre organisation et sur le territoire
louviérois ? Quelle est votre définition du décrochage
scolaire ?
· Pouvez-vous en quelques mots me décrire les
spécificités de votre organisation relatives au décrochage
scolaire sur La Louvière ?
· Quelles sont vos limites d'interventions par rapport
à la problématique du décrochage scolaire ?
La représentation des services qui traitent le
décrochage scolaire et des collaborations éventuelles
· Existe-t-il un Décret, une Circulaire qui
favorisent la collaboration avec des organisations traitant le
décrochage scolaire ?
· Quels sont vos partenaires privilégiés ?
· Comment votre organisation perçoit-elle le travail
des acteurs judiciaires, communaux, privés et scolaires en ce qui
concerne le décrochage scolaire ?
Représentation de la Commission Accrochage
Scolaire et des collaborations éventuelles
· Connaissez-vous la CAS ?
· Quels sont, selon vous, les objectifs de la CAS ?
· Que représente pour vous la Commission Accrochage
Scolaire animé par l'AAS du PSSP ?
· Qu'attendez-vous d'une CAS ? Qu'est-ce qui vous a
motivé à intégrer la CAS et en quoi est-il
intéressant, selon vous, d'y participer ?
· Quelle est l'implication de votre service au sein de la
CAS ?
· Quelles sont les actions concrètes de la CAS
auxquelles vous participez ?
· Quels sont les problèmes en matière du
décrochage scolaire qui sont actuellement discuté ?
· Existe-t-il une collaboration avec les différents
acteurs de la CAS traitant le décrochage scolaire dans votre
région ?
· Pouvez-vous me donner un exemple de collaboration
établie avec les différents acteurs communaux, scolaires,
privés et judiciaires dont vous êtes particulièrement fier
?
· Selon quels critères favorisez-vous la
collaboration avec certains services et pourquoi ? Quelles sont vos conditions
pour élaborer un partenariat, sur quoi est-il construit (le relationnel,
les normes étatiques) ?
· Identifiez-vous des points de divergence ou de
convergence avec certains acteurs de la CAS ? Si oui, pouvez-vous l'expliciter
?
· Selon vous, la CAS construit-elle des valeurs communes
dans l'intérêt de l'accrochage scolaire ? Si oui, lesquelles ?
· Quelles relations professionnelles entretenez-vous avec
vos partenaires de la CAS ?
· Avez-vous développé des relations
privilégiées avec certains acteurs au sein de la CAS ? Si oui,
sur quoi se basentelles et qu'apportent-elles ?
· Pouvez-vous illustrer, sous forme d'exemple concret, un
aspect positif et négatif de la CAS ? (création de liens, de
relations de confiance, etc.)
· Dans le cadre de la CAS, avez-vous le sentiment
d'appartenir à un groupe, une communauté de praticiens ? Si oui,
pouvez-vous l'expliciter ?
· Quelle légitimité accordez-vous à
L'AAS en ce qui concerne la coordination de la CAS ?
· Selon-vous, est-ce au service subsidié par
l'État Fédéral de coordonner la CAS ?
89On y retrouve nos différentes variables vues
dans les pages précédentes.
5.6 Le traitement des données
« ...comment après avoir récolté
les données, vais-je les traiter ? Comment mettre en relation diverses
observations ? Comment analyser les matériaux récoltés ?
Quelles conclusions en tirer ? Beaucoup de praticiens chercheurs tentent de
répondre à ces questions de manière intuitive en tentant
d'inventer l'une ou l'autre procédure qui leur semblerait
adéquate. Et pourtant, être rigoureux à ces
différents niveaux - de récolte et de traitement des
données - est tout à fait indispensable. Il y va de la
crédibilité même des résultats de la
recherche90 ».
Les données ont été recueillies par
enregistrement à l'aide d'un dictaphone avec l'accord du sujet à
interviewer. Dans un premier temps, nous avons pris contact avec notre
répondant par téléphone afin de lui expliquer
brièvement quel était l'objet de notre étude et en quoi
son témoignage pouvait nous être utile. Dans un second temps, nous
avons convenu de l'heure et de l'endroit d'un rendez-vous en précisant
la durée de l'entretien (une heure maximum) afin de permettre au sujet
de s'organiser pour notre entrevue. Comme nous l'avons précisé
dans les pages précédentes, nous avons fait appel à un
collègue de la FOPA pour interviewer l'acteur communal, l'AAS où
travaille le mémorant.
5.7 Matrice pour la catégorisation
Pour construire notre matrice, nous nous
référons au cadre théorique de Guy Bajoit et à
notre guide d'entretien construit à partir de nos trois
thématiques développées dans les pages
précédentes. Celle-ci va nous aider à catégoriser/
à découper le contenu de nos entretiens et nous permettra de
répondre à nos objectifs de recherche à savoir : (1) de
dégager les perceptions des différents acteurs relatives au
décrochage scolaire; (2) de découper, à partir des
deuxième et troisième thématiques, les séquences
des entretiens afin de dégager des logiques de solidarité ; (3)
de vérifier l'influence de la perception des acteurs et de la CAS sur
ces logiques de solidarité et (4) de distinguer ou de relever les
similitudes des acteurs dans leurs logiques de solidarité.
90Albarello, L. (2004). Apprendre à chercher
: L'acteur social et la recherche scientifique (p. 57). Bruxelles
: De Boeck.
5.8 Construction de notre matrice
1. Notre cadre théorique : les quatre logiques de
solidarité de Guy Bajoit.
Solidarité contractuelle - solidarité
fusionnelle - solidarité conditionnelle - solidarité
affective
On peut dégager les logiques de solidarité en
ciblant les deuxième et troisième thématiques (c'est
là qu'on identifie l'entraide sociale entre les opérateurs).
2. Les trois thématiques créées
à partir de nos objectifs de recherche :
|
1) La représentation de la gestion du décrochage
scolaire
|
2) La représentation des services traitant le
décrochage scolaire et de leur collaboration éventuelle.
|
3) La représentation de la CAS
|
|
3. Nous avons créé à partir de
notre cadre théorique et les thématiques notre matrice pour notre
découpage et l'analyse.
Perceptions des acteurs
|
Solidarité contractuelle
|
Solidarité fusionnelle
|
Solidarité affective
|
Solidarité conditionnelle
|
R. du décrochage scolaire
|
|
|
|
|
R. des autres acteurs et de leur collaboration
|
|
|
|
|
R. de la CAS
|
|
|
|
|
6 Conclusion
Pour que notre étude soit digne d'intérêt,
il nous faut respecter les différentes étapes d'une recherche.
Nous avons construit nos objectifs de recherche et notre hypothèse
à partir de notre cadre théorique, en l'occurrence : les quatre
logiques de solidarité de Guy Bajoit. En ce qui concerne notre
échantillonnage et pour l'approche active, nous avons opté pour
une analyse qualitative. Concrètement, nous allons interviewer, à
partir de la technique de l'entretien semi-directif, les acteurs que nous avons
sélectionnés à partir de critères bien
spécifiques. Pour l'interview, nous avons élaboré un guide
d'entretien sous forme de questionnaire ainsi qu'une matrice pour
catégoriser les données de nos entretiens. Ces outils nous
permettront de dégager des logiques de solidarité et de
répondre à nos objectifs de recherche. Aussi, les entretiens
semi-directifs demandent un professionnalisme qui s'acquiert avec le temps. Ils
sollicitent des compétences bien spécifiques garantissant la
qualité de nos entretiens et, par conséquent, de notre
étude. De plus, il faut souligner que le chercheur n'est pas neutre dans
son analyse, c'est pourquoi il faut accepter sa propre subjectivité, son
regard, ses choix comme un des facteurs explicatifs du phénomène.
Le cadre méthodologique est capital, il est le guide et la boussole de
notre recherche. C'est lui, qui nous amènera à confirmer ou
infirmer notre hypothèse de départ.
Chapitre 5 : Traitements des données relatives
aux logiques de solidarité des différents opérateurs
traitant le décrochage scolaire sur le territoire louvièrois
1 Introduction
À l'aide de notre guide d'entretien, nous avons
interviewé91 les acteurs scolaires, communaux, judiciaires et
les acteurs issus du milieu associatif que nous avons
sélectionnés dans le cadre de notre étude. Nous avons
également, à partir de nos trois thématiques,
mobilisé la matrice que nous avons conçue et qui nous a permis de
dégager les perceptions des acteurs et identifier les séquences
d'entretiens qui nous semblaient les plus proches des logiques de
solidarité de Guy Bajoit, à savoir : contractuelle, fusionnelle,
conditionnelle et affective.
Ici, nous avons résumé les données
récoltées de façon à respecter le nombre de pages
qui nous est imparti92. Cependant, nous invitons nos lecteurs
à se diriger vers la partie annexe de notre étude pour une
lecture plus complète permettant de s'imprégner des discours des
acteurs interviewés.
Pour répondre à nos objectifs de recherche dans
le prochain chapitre, nous proposons une démarche méthodologique
en mobilisant nos outils de traitement de données. Premièrement,
nous allons présenter les caractéristiques des acteurs et
identifier les missions et les actions qu'ils mettent en place à partir
de notre thématique relative à leurs perceptions de la gestion du
décrochage scolaire. Le but de cette démarche est descriptif, il
nous permettra d'identifier l'environnement dans lequel évoluent les
acteurs et leurs logiques d'action (ou dynamiques de travail).
Deuxièmement, nous allons dégager les logiques de
solidarité entre les différents acteurs à partir de notre
thématique s'intéressant à la perception des
différents opérateurs et de leurs collaborations, ainsi que leur
perception de la CAS. Troisièmement, nous allons identifier si la CAS
influence la perception des acteurs dans leurs logiques de
solidarité.
91Nous retrouvons la production écrite de ces
entretiens en annexe 2.
92Nous avons découpé et
intégré les discours des acteurs en fonction de nos
thématiques et de la typologie de Guy Bajoit. Par conséquent, le
résumé de notre analyse émane de nos
catégorisations que nous trouvons en annexe 3 de notre étude. Par
ailleurs, précisons que nous avons utilisé, par moment, les
discours des acteurs qui n'ont pas été enregistré durant
l'entretien (le dictaphone étant coupé après l'entretien,
l'acteur interviewé a apporté de nouveaux
éléments). Cependant, nous avons pris des notes à la fin
de l'entretien pour enrichir notre étude.
2 Perceptions des différents acteurs relatives
à la gestion du décrochage scolaire
Ici, il s'agit de présenter les caractéristiques
des acteurs en cernant les représentations de la gestion du
décrochage scolaire des acteurs interviewés au sein de leur
organisation. Pour dégager leurs propos, nous nous sommes
référés à notre première thématique
conçue dans la partie méthodologique de notre étude. De ce
fait, les pages qui vont suivre développeront deux sous-titres, à
savoir : (1) les missions (on y intègre les spécificités
du service) des acteurs afin d'identifier ce qui les «motive»
à collaborer ; (2) les limites d'interventions des acteurs afin de
soulever les difficultés qu'ils rencontrent.
2.1 Les missions
2.1.1 L'acteur scolaire, l'école et le
CPMS93
L'école que nous avons ciblée pour notre
étude est un institut technique qui se situe au Centre Ville de La
Louvière. Cet établissement scolaire accueil 500
élèves et propose, d'une part, de l'enseignement technique de
qualification dans le secteur industriel afin de former des électriciens
automaticiens et, d'autre part, des sections professionnelles : la
maçonnerie, l'électricité, la menuiserie et la
mécanique. Selon le directeur interviewé,
celui-ci est aidé par deux chefs d'atelier en ce qui concerne la gestion
des élèves. Les tâches du directeur sont variées, il
s'occupe de la gestion du personnel, la gestion administrative, la gestion
financière94, la gestion pédagogique, la gestion
disciplinaire des élèves et la vérification de
l'absentéisme scolaire. En ce qui concerne l'aspect disciplinaire, le
directeur est épaulé par une équipe d'éducateurs
qui fonctionnent en première ligne. Si les missions du directeur sont
multiples, il délègue le travail aux opérateurs de
l'établissement (à l'économe, au secrétaire, aux
chefs d'atelier, aux enseignants et aux éducateurs), il vérifie
son bon fonctionnement et le respect des missions de chacun.
Selon l'éducateur interviewé,
son rôle est multiple : il s'assure que les normes instituées
par l'école sont respectées (respect des horaires, respect des
enseignants et des élèves) ; il gère la discipline des
élèves en les encadrant, en les responsabilisant et en les
sanctionnant (retenue,
93Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire en
annexe 3, p. 1-5.
94Il faut préciser que le directeur fait appel
à un comptable pour la gestion financière.
renvoi avec l'accord de la direction). L'éducateur
s'occupe également, de l'aspect préventif du décrochage
scolaire, d'une part, en dialoguant avec les jeunes, les parents, les
enseignants dans le but de favoriser son accrochage scolaire voire sa
réussite scolaire ; d'autre part, en orientant l'élève
vers les services compétents qui traitent la problématique du
décrochage scolaire. Aussi, l'éducateur a comme mission
principale la gestion de l'absentéisme des élèves, y
compris sur le plan administratif, à savoir : le classement des
certificats médicaux, les mots d'excuses, l'envoi des cartes d'absences
au domicile de l'élève (prévenir les parents). Si les
absences sont répétées, l'éducateur active les
services compétents comme les CPMS et l'AAS qui sont les partenaires
privilégiés de l'école. Il est rare que le directeur,
l'éducateur et le CPMS interpellent la Direction Générale
de l'Enseignement Obligatoire car ils estiment que la procédure prend
trop de temps, qu'il n'y a pas de retour et qu' «on tourne en rond».
Par conséquent, l'acteur scolaire privilégie l'efficacité
afin que l'élève revienne à l'école le plus vite
possible. L'école collabore avec l'acteur judiciaire, à savoir :
le Service de la Protection de la Jeunesse lorsqu'il estime que le jeune est en
danger (ex : l'élève est sujet au décrochage solitaire ou
à la délinquance) ; la police sollicite l'école pour
obtenir des informations sur l'absentéisme du jeune de façon
à s'assurer que ce dernier a le droit de se trouver en rue et, dans le
cas contraire, le ramène au sein de l'établissement. Enfin,
l'école étudiée manifeste de l'intérêt pour
la Commission Accrochage Scolaire (CAS) et y participe. Le directeur nomme
l'éducateur de référence (notre sujet interviewé)
pour représenter son établissement. Cependant, il faut
préciser que le fonctionnement interne de l'établissement
scolaire et la restructuration de l'équipe éducative a
influé sur la participation de l'éducateur à la CAS
(présence occasionnelle). Concernant l'assistant social du
CPMS, sa mission est d'accompagner le jeune dans son parcours scolaire
en prenant en considération son environnement immédiat (la
famille, les amis, son école, les services sociaux) et de veiller
à son épanouissement personnel. Il veille également
à ce que le jeune possède des outils et des compétences
pour s'insérer professionnellement dans le marché du travail.
Aussi, l'assistant social travaille au sein de l'établissement scolaire
avec les directions d'école et les éducateurs. Le nombre de
dossiers transmis est conséquent, il en résulte une surcharge de
travail et une impossibilité de répondre immédiatement au
problème de certains jeunes en décrochage scolaire. L'assistant
social relève un manque de personnel pour assurer le suivi des dossiers.
Le service se déplace exceptionnellement à domicile. Pour le
directeur de l'école, la prise de rendez-vous avec les
bénéficiaires se fait quelques semaines après la demande ;
par conséquent, la situation du jeune se détériore et les
demandeurs discréditent le CPMS et son efficacité. Dans le cadre
des actions de prévention, outre le fait que le CPMS est le
partenaire
privilégié de l'école, il lui appartient
de développer des synergies entre les acteurs qui interviennent sur le
terrain scolaire en matière de prévention et d'aide
psychologique, médicale ou sociale. D'après l'assistant social,
les acteurs privilégiés du CPMS sont : l'acteur issu du milieu
associatif, l'AMO et l'acteur communal, l'AAS. L'orientation de l'école
vers l'AMO a lieu lorsque le jeune et la famille acceptent l'aide. Dès
lors, le CPMS collabore avec l'Antenne Accrochage Scolaire (AAS) dans certains
dossiers. De plus, dans le contexte des actions de prévention, le CPMS
participe à toutes les réunions de la Commission Accrochage
Scolaire.
2.1.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO95
On retrouve, sur le territoire de la Ville de La
Louvière, l'ASBL AMO Transit qui est composée d'un directeur,
d'une secrétaire et de cinq assistants sociaux. Les missions du service
sont d'assurer une aide préventive au bénéfice des jeunes
dans leur milieu de vie et dans leurs rapports avec l'environnement social.
L'idée est de développer leur esprit critique en fonction des
problématiques que rencontre la jeunesse96. L'AMO travaille
à la demande de son public cible. Dans le cadre de notre étude,
nous avons interviewés le directeur et un assistant social de cette AMO.
En ce qui concerne le décrochage scolaire, l'AMO est souvent
sollicitée pour des exclusions scolaires d'élèves voire
des décrochages complets. Selon le directeur, le profil du jeune
décrocheur relève de problèmes de comportement en rapport
aux normes de l'établissement scolaire. Il souligne que pour faire
respecter le règlement intérieur de l'école, elle
écarte le jeune par la sanction, elle le renvoie dans l'objectif de
préserver sa réputation. Les acteurs interviewés parlent
de nettoyage de printemps car il existe une période où les
renvois sont plus importants : cela commence en janvier, février et se
termine en juillet. Précisons que l'AMO a traité un peu plus
d'une centaine de jeunes dans cette situation. Dans ce cadre, le travail
consiste à recourir à la sanction de l'élève en le
responsabilisant. Si celui-ci s'oppose à la sanction donnée par
l'école, les travailleurs sociaux font appel au service du Droit des
jeunes afin de vérifier, d'une part, si l'école a bien
respecté la procédure de renvoi et, d'autre part, s'il y a lieu,
de trouver un consensus entre les deux parties. Aussi, lorsque l'AMO rencontre
des jeunes qui deviennent élève libres97 , le but est
de savoir si le jeune est
95Nous retrouvons les discours de l'acteur issu du
milieu associatif en annexe 3, p. 23-25.
96Ici, nous renvoyons nos lecteurs vers la page 26-27
de notre étude pour plus d'informations sur les axes d'interventions de
l'AMO.
97Ils ont plus de trente demi-jours d'absences
injustifiés et n'ont plus le droit de passer leurs examens, en bref leur
scolarité n'a plus de sens car ils savent d'emblée qu'ils ont
raté leur année scolaire.
demandeur et s'il est prêt à effectuer les
démarches nécessaires pour récupérer son statut
d'élève régulier. Dès lors, si le jeune est en
accord avec le directeur et/ou l'assistant social, ces derniers font la demande
d'un recours à la DGEO. De plus, l'AMO propose comme levier
pédagogique, pour permettre aux jeunes de s'épanouir et
d'accepter des règles, des activités sportives. En ce qui
concerne les actions communautaires, ce service participe à des
réunions de concertation qui traitent la problématique de la
jeunesse et du décrochage scolaire sur le territoire louvièrois
(la CAS) et montois (Commission d' Aide à la Jeunesse).
2.1.3 L'acteur judiciaire, le Service Jeunesse et
Famille (SJF)98
Outre le décrochage scolaire, ces services
spécialisés composés d'assistantes sociales et de
criminologues, s'attèlent également aux problèmes de
disparition (les fugues) et de la maltraitance (violence, abus sexuel). Ici,
nous allons nous intéresser aux perceptions de la coordinatrice qui
gère le service et de l'agent de quartier du Centre Ville.
D'après la coordinatrice, le décrochage scolaire est perçu
comme une priorité : en ciblant cette problématique on peut
identifier les jeunes qui sont amenés à délinquer. L'agent
de quartier souligne l'importance du phénomène et se sent
impuissant face à la détresse du jeune et des parents : elle
relate les difficultés des familles et l'augmentation des
élèves déstructurés face au système
scolaire. Après une analyse juridique de la situation du «
décrocheur», le SJF favorise les relais vers les services
compétents dans le but de lui venir en aide. Les missions de la
responsable du service sont de coordonner les actions des agents de quartier et
de s'assurer qu'ils effectuent les contrôles en rue durant les heures
scolaires où les jeunes sont susceptibles de se trouver à
l'intérieur des murs de l'école. Outre le zonage en rue, les
agents envoient un courrier, d'une part, aux écoles afin d'obtenir des
informations complémentaires sur la situation du jeune relatif à
son comportement et à sa fréquentation scolaire ; d'autre part,
aux parents pour un rappel de la loi concernant l'obligation scolaire et les
avertir que leur enfant a été contrôlé. Si la
situation est problématique, un procès verbal est envoyé
au Parquet de Mons. Le rôle de ce dernier, est de convoquer le
décrocheur et ses parents afin de les responsabiliser et les avertir des
sanctions éventuelles. En outre, l'agent de quartier doit
répondre à différentes demandes, tant au niveau du
procureur du roi, du juge de la jeunesse, des intervenants sociaux que des
parents. La coordinatrice veille à l'harmonisation du travail dans les
différentes cellules, à l'élaboration des projets et
l'instauration des réunions d'équipe.
98Nous retrouvons les discours de l'acteur judiciaire
en annexe 3, p. 40-42.
Aussi, elle se positionne comme personne de
référence et comme point de contact pour les écoles. Ces
acteurs judiciaires participent à la CAS dans le but d'assurer et
renforcer le partenariat avec les structures d'aide en général et
de développer une prévention efficace dans un espace de
concertation pour lutter contre le décrochage scolaire avec les acteurs
locaux. Les informations de la CAS sont ensuite diffusées au reste de
l'équipe du SJF. Cependant, il faut préciser que le manque de
personnel au sein du service et la surcharge de travail n'a pas permis au SPJ
d'assister à toutes les réunions de la CAS.
2.1.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP99
Les projets de l'AAS sont orientés sur quinze
phénomènes100 et tentent de répondre aux
difficultés de terrain. Le PSSP est géré par un
Fonctionnaire de prévention assisté d'une cellule de coordination
et une évaluatrice interne. L'évaluatrice interne
«mesure» les actions à l'aide de statistiques remises par les
opérateurs des différents services et ce, pour en faire part au
Ministère de l'Intérieur. Le Fonctionnaire de Prévention
(ligne hiérarchique) doit s'assurer que les missions et les objectifs
sont bien respectés. L'enjeu de cette démarche est le financement
et la continuité du projet. En effet, pour le Fonctionnaire de
Prévention, la survie du service dépend de ses obligations envers
le Ministère de l'Intérieur : si les objectifs ne sont pas
atteints, il en résulterait des suppressions d'emplois, voire une
diminution d'une partie des subsides.
L'AAS est composée d'un assistant social et d'un
éducateur de rue. Le rôle de l'assistant social, est d'une part,
de travailler en deuxième ligne dans la prise en charge de la famille du
jeune en décrochage scolaire ; d'autre part, de coordonner la Commission
Accrochage Scolaire et des projets en partenariat avec les acteurs sociaux
traitant la problématique du décrochage scolaire sur la
région. L'éducateur est un agent de première ligne, il va
à la rencontre des jeunes en rue afin de se positionner comme personne
de référence et tente de ramener les décrocheurs vers le
chemin de l'école pour retrouver un rythme scolaire normal. Les
opérateurs ont pour missions principales : l'accueil, l'écoute et
l'accompagnement des jeunes en difficulté ainsi que l'orientation de ces
jeunes vers les institutions compétentes du réseau local. Selon
l'assistant social, l'AAS est spécifique car elle a une vision globale
du décrochage scolaire dans la mesure où les intervenants sociaux
ne sont pas isolés entre «quatre murs» et ont une
disponibilité pour traiter la problématique. L'assistant
social
99Nous retrouvons les discours de l'acteur communal en
annexe 3, p. 58-62. 100Annexe 1.
distingue l'AAS du CPMS car son service répond à
la demande du jeune et des parents dans l'immédiateté au
contraire du CPMS qui leur donne des rendez-vous après deux à
trois semaines. Dans les faits, selon l'assistant social, le jeune et les
parents vivent cette attente difficilement.
L'AAS a pour objectif stratégique n°1 de
promouvoir une approche intégrée et intégrale, en
s'insérant dans un réseau de partenaires oeuvrant activement
contre le phénomène du décrochage scolaire. En outre,
l'AAS doit participer à des groupes de travail sur des
problématiques localisées et initier elle-même des groupes
de travail dans le cadre de la Commission Accrochage Scolaire qui réunit
les différents intervenants locaux pour élaborer ensemble des
partenariats sous forme de projets dans l'objectif de diminuer le
décrochage scolaire sur l'entité (ce lieu de concertation est en
adéquation avec le Plan de Cohésion Sociale). À titre
d'exemple, un projet Pass scolaire est issu de cette commission et
utilisé par plusieurs écoles de l'entité101. Le
Fonctionnaire de prévention associe l'AAS à un réseau de
partenaires qui constitue une force en agissant en première ligne pour
relayer les jeunes en difficultés vers les services compétents.
Il soulève également que son service est un réceptacle, un
maillon qui centralise et coordonne le décrochage scolaire sur La
Louvière. L'assistant social précise que cette
problématique est complexe sur le territoire, on y retrouve : des jeunes
qui s'isolent au domicile (décrochage solitaire, phobie scolaire,
élève victime du racket, tentative de suicide,
dépression), des élèves qui traînent dans la rue et
sont susceptibles de basculer dans une certaine délinquance (vol, deal,
racket, consommation de produits illicites). Enfin, l'assistant social souligne
qu'il est difficile de retrouver une école pour le jeune en
difficulté car il est étiqueté par son passé. Il en
résulte que, malgré la motivation du jeune pour
réintégrer une école, les choix sont limités.
Dès lors, l'enjeu est de trouver un établissement scolaire qui
corresponde à la situation du jeune.
101En 2006, l'AAS a mené une enquête
en collaboration avec l'UMH (Université de Mons Hainaut) auprès
des directions d'écoles dans l'objectif de « mesurer » le
sentiment d'insécurité dans les écoles. Dans le cadre
cette étude, nous constatons que 75% des écoles du cycle
secondaire de la Ville de La Louvière qui fonctionnent avec des cartes
de sorties utilisent le « PASS Scolaire ».
2.2 Limites des acteurs face au décrochage
scolaire
2.2.1 L'acteur scolaire, l'école et le
CPMS102
Pour le directeur, le financement lié
aux écoles en discrimination positive octroyé par la
Communauté française va permettre d'engager un préfet de
discipline qui coordonnera l'équipe éducative en ce qui concerne
le décrochage scolaire. Il relève également que tous les
dispositifs de l'accrochage scolaire ne répondent pas réellement
aux demandes des écoles. Le directeur se demande dans quelle mesure cet
argent investi dans ces dispositifs ne pourrait pas l'être dans les
écoles. Il souligne qu'un service comme l'AAS en interne pourrait
soutenir l'équipe éducative et donner davantage de sens dans les
actions visant l'accrochage scolaire. En outre, selon le directeur,
l'accrochage se joue à l'intérieur des murs de l'école.
Cependant, encore faut-il disposer de moyens humains et financiers !
Pour l'éducateur, les
difficultés relèvent d'une surcharge de travail administratif qui
limite une approche psycho-éducative. L'idée est de suivre le
jeune dans un travail d'écoute, de dialogue et d'alternative en
partenariat avec les enseignants, les éducateurs et les parents.
Même si l'éducateur interviewé est conscient de la
difficulté à solliciter les enseignants, il existe un sas
d'écoute au sein de l'école. En effet, le sas crée des
synergies en interne : il est géré par l'éducateur, des
enseignants motivés par le projet (bénévolat) et le CPMS.
L'éducateur, de par une expérience positive, manifeste un
intérêt pour se rendre au domicile du jeune afin de prendre en
considération son environnement et d'intervenir de manière
cohérente. Il souligne que les liens entre les deux parties se
renforcent et facilitent, à la fois, le travail éducatif et la
réinsertion du jeune au sein de l'école. L'éducateur fait
également référence à ses inquiétudes pour
l'avenir concernant la gestion du décrochage scolaire et la
réputation de son établissement scolaire.
Pour l'assistant social du CPMS, la
difficulté se manifeste par un manque de personnel lié à
une forte demande des écoles. Les ordres de la ligne hiérarchique
limitent les visites à domicile qui, selon l'assistant social,
facilitent le travail social. De plus, il soulève le nombre important
des services sociaux traitant le décrochage scolaire, ce qui crée
une confusion, tant pour les acteurs sociaux que pour les usagers. C'est dans
ce contexte que le CPMS invite ces services dans ses locaux afin de mettre en
place un protocole d'intervention tenant compte des
102Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire
en annexe 3, p. 5-8.
compétences et des spécificités de chacun.
Cependant, par manque de temps et d'agents sociaux, ces réunions sont
devenues rares.
2.2.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO103
Selon le directeur de cette ASBL, la plupart des écoles
associent104 l'AMO Transit au Droits des jeunes. Cette association
crée des tensions et des difficultés pour les acteurs issus du
milieu associatif pour collaborer avec les écoles. En effet, la
dénonciation des renvois et du fonctionnement de l'école aux
Droits des jeunes peut influer sur l'image de l'établissement scolaire
et donc, sur sa réputation. De ce fait, les collaborations avec les
écoles se font rares sur le territoire louvièrois105.
Cependant, l'AMO a pour partenaire privilégié l'acteur scolaire,
le CPMS. Aussi, le directeur met en évidence les besoins de l'AMO pour
faire face aux difficultés que rencontre la jeunesse. À
l'époque, le directeur a demandé à son pouvoir subsidiant
(Communauté française) de financer davantage son service pour
engager du personnel afin de répondre aux analyses de besoins de l'AMO.
En parallèle, les Contrats de Sécurité ont eu des moyens
financiers pour davantage contrôler la jeunesse. Le directeur et
l'assistant social ont mal vécu cette situation et l'ont traduite comme
une non reconnaissance du secteur associatif. De plus, l'AMO va connaître
des plans de restructuration et des diminutions de son enveloppe
budgétaire. Il en résultera (peut-être ?) pour le
directeur, plusieurs licenciements (un directeur et trois assistants sociaux)
et l'extinction du service. De ce fait, l'avenir de l'AMO Transit reste
incertain.
2.2.3 L'acteur judiciaire, le SJF106
Malgré les démarches et les avertissements du
SJF auprès du jeune et de la famille concernant l'obligation scolaire,
il existe une discordance entre ce qui est dit et ce qui est fait. L'acteur
judiciaire s'appuie également sur une loi qui encourage les parents
à tout mettre oeuvre pour faire respecter cette obligation. Les parents
sont passibles d'une amende. Celle-ci est gérée par le tribunal
de la Police. Dans les faits, outre les contrôles du SJF, cette loi n'est
pas appliquée sur le terrain. Il en résulte à la fois, un
sentiment d'impunité des parents et des
103Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire
en annexe 3, p. 26-27.
104L'association se rapporte à la
vérification du respect de la procédure de renvoi du jeune. Il
arrive que les procédures ne soient pas respectées (renvois
abusifs) par les établissements scolaires. Voir page 59.
105Peut-on y voir des tensions entre droit et
devoir du jeune face à des écoles qui exigent de leurs
élèves des comportements adaptés pour préserver une
image de leur établissement scolaire ou une inadaptation de
l'école à garder ce type d'individus au sein de ses murs?
106Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire
en annexe 3, p. 42-43.
jeunes et un sentiment d'impuissance pour le SJF. L'acteur
judiciaire rencontre des élèves en souffrance psychologique qui
demandent des compétences plus spécifiques pour les soutenir et
les accompagner vers les circuits de réinsertion socio-éducative.
Dans ce contexte, les agents de quartier orientent les jeunes en
difficultés et les familles vers des services compétents.
Ensuite, un procès verbal est envoyé au Parquet de Mons afin de
le prévenir de la situation du jeune. L'agent de quartier rencontre dans
sa pratique des élèves ayant plus de trente demi-jours d'absences
non déclarés à la DGEO ou au CPMS. Selon l'acteur
judiciaire, certaines écoles ne jouent pas le «jeu», ne
faisant pas les démarches nécessaires pour dénoncer le
décrochage scolaire du jeune107. Enfin, dans la
réalité de terrain de l'acteur judiciaire, le manque de personnel
et les missions ne permettent pas une collaboration optimale dans les suivis
des décrocheurs car cela demande du temps et de l'énergie
(téléphoner aux différentes institutions, faire des
retours, etc.). L'agent de quartier suggère un temps plein pour
répondre à cette lacune.
2.2.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP108
Selon le Fonctionnaire de prévention, le manque de
moyens humains a influé sur les pratiques des intervenants sociaux
(l'AAS fonctionnait à l'époque avec deux éducateurs).
D'ailleurs, après l'entretien avec l'assistant social, celui-ci
précise que les demandes du Bourgmestre ne prennent pas toujours en
compte la réalité de terrain de l'AAS. Le sentiment d'être
instrumentalisé par le politique se confirme par une non reconnaissance
du travail effectué. Les différents changements organisationnels
diminuent, selon l'assistant social, la crédibilité du service.
En effet, les intervenants sociaux doivent se réadapter et multiplier
différentes casquettes pour répondre à leur
hiérarchie en élargissant leurs missions et leurs publics cibles.
De ce fait, il est difficile de s'investir dans des projets au sein de la CAS.
Aujourd'hui, la polyvalence est préférable à la
spécificité au sein de l'AAS.
107Selon l'agent de quartier, l'objectif des
directions d'écoles étant de préserver un nombre
d'élèves suffisant pour avoir droit - à partir d'un quota-
aux subsides nécessaire (octroyés par la Communauté
française) pour l'année suivante. L'agent de quartier souligne
que la donne n'est pas la même pour tout le monde et que c'est au
gouvernement de réagir face à ce constat. En effet, que devient
le jeune en situation de décrochage, est-il considéré
comme un sujet à soutenir ou un sujet permettant de subsidier le
fonctionnement d'une école ?
108Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire
en annexe 3, p. 62.
3 Les logiques de solidarité des acteurs
Ici, il s'agit de dégager les logiques de
solidarité des acteurs interviewés pour répondre à
notre premier objectif de recherche dans notre prochain chapitre. Pour ce
faire, nous avons mobilisé à partir des deuxième et
troisième thématiques de notre matrice, à savoir : la
représentation des services qui traitent le décrochage scolaire
et la représentation de la CAS et des collaborations
éventuelles.
Nous avons relevé d'une part, que la deuxième
thématique s'inscrit davantage dans des logiques de solidarité
contractuelle et, d'autre part, que la troisième s'étend sur
toutes les logiques de solidarité.
3.1 Logique de solidarité conditionnelle
Elle est fondée sur une condition sociale commune :
« même s'ils ne s'aiment pas, s'ils ne croient pas aux
mêmes valeurs et s'ils n'ont pas les mêmes intérêts,
les gens peuvent être solidaires entre eux, simplement parce qu'ils
partagent la même condition sociale : ils font partie d'une famille, d'un
clan, d'une ethnie, d'une région, d'un pays, sont du même sexe, du
même âge ou occupent la même place dans une organisation
sociale109. »
3.1.1 L'acteur scolaire, l'école et le
CPMS110
En prenant en considération les constats de terrain des
acteurs scolaires, nous soulevons qu'ils sont inscrits dans une logique de
solidarité conditionnelle. Voici les constats que nous avons
relevés dans notre lecture : une augmentation de la problématique
sur le territoire louvièrois ; un besoin de travailler en collaboration
avec les autres services sociaux pour ramener le jeune à l'école
; un besoin de s'outiller et de s'informer sur les services existants, sur les
nouveaux décrets. Face à la problématique du
décrochage scolaire, les acteurs scolaires participent à la CAS
et forment un groupe de professionnels.
3.1.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO
Tout comme les autres acteurs, l'AMO est inscrite dans le
contexte louvièrois où le décrochage scolaire est un
problème que rencontrent tous les acteurs sociaux et qui demande de
travailler en collaboration avec certains partenaires. Il participe à la
CAS dans des objectifs bien spécifiques.
109Bajoit, G. (2003). Le changement social :
Approche sociologique des sociétés occidentales
contemporaines (p. 137). Paris: Armand Collin.
110Ici, nous n'avons pas relevé directement le
discours de l'acteur scolaire en rapport avec cette logique de
solidarité. Néanmoins, tout au long de notre lecture, nous
induisons une logique conditionnelle.
3.1.3 L'acteur judiciaire, le SJF111
Dans le cadre de la CAS, l'acteur judiciaire a le sentiment
d'appartenir à un groupe de travail qui oeuvre dans la même
direction. Face à la problématique du décrochage scolaire,
l'agent de quartier souligne que les acteurs locaux sont tous dans le
même bateau : le but est d'aider la famille et le jeune en
difficulté. Pour l'agent de quartier, chaque acteur est un maillon
important de la chaîne de l'entraide sociale, de la solidarité.
Nous relevons que les objectifs communs des membres de la CAS relèvent
aussi d'une valeur commune et, par conséquent, s'inscrivent dans une
solidarité fusionnelle.
3.1.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP112
Pour l'acteur communal, il existe une collaboration avec
chaque partenaire qui adhère à la CAS, lieu de centralisation de
toutes les informations et des actions où chacun apporte sa pierre
à l'édifice de la lutte contre le décrochage scolaire.
Cette CAS regroupe des acteurs qui sont régulièrement
présents et favorise des liens privilégiés professionnels
utiles pour les décrocheurs et les parents.
3.2 Logique de solidarité contractuelle
Ce type de solidarité est fondé sur les
intérêts. L'individu se fixe un objectif et détermine les
moyens les plus efficaces pour y parvenir. Les moyens mis en oeuvre sont
adaptés aux buts recherchés. Les gens sont solidaires parce
qu'ils recherchent un intérêt personnel, c'est-à-dire un
bien qui ne peut venir que d'un autre.
3.2.1 L'acteur scolaire, l'école et le
CPMS113
Les établissements scolaires et leurs agents ont la
possibilité d'activer et ce, en se référant à la
Circulaire 1972, un «éventail» de partenaires comme : le CPMS,
les médiateurs scolaires, les équipes mobiles, les Services
d'Accrochage Scolaire (SAS), les Aides en Milieu Ouvert (AMO), le service
d'Aide à la Jeunesse et la Direction Générale de
l'Enseignement Obligatoire (DGEO). Cette Circulaire encourage le renforcement
de la collaboration entre l'école et le secteur de l'Aide à la
Jeunesse. Ces dispositifs sont des soutiens incontournables pour les
écoles. Cependant, les établissements scolaires ont d'autres
alternatives quant aux
111Nous retrouvons les discours de l'acteur
Judiciaire en annexe 3, p. 45. 112Nous retrouvons les discours de
l'acteur Judiciaire en annexe 3, p. 67. 113Nous retrouvons les
discours de l'acteur scolaire en annexe 3, p. 9-14.
choix du partenariat. Le directeur et l'éducateur que
nous avons interviewés ne reconnaissent pas cette Circulaire. Cependant,
ces derniers privilégient la collaboration avec l'acteur communal,
l'Antenne Accrochage Scolaire (lorsque le CPMS ne sait pas répondre
à la demande) mais aussi avec les acteurs judiciaires comme le Parquet
de Mons et le Service Jeunesse et Famille (S.J.F) de la Police.
En ce qui concerne les collaborations avec les autres
acteurs, nous constatons que le directeur fait
référence à une logique d'action qui se base sur un
intérêt qui est de faire revenir le jeune au sein de
l'établissement scolaire. Pour ce faire, l'école fait appel au
CPMS et l'AAS. Dans l'objectif d'un retour du jeune à
l'école, il existe un échange dans la procédure entre
l'école et la police : l'une donne des informations, l'autre accompagne
le jeune à l'école. Enfin, lorsque l'école estime que le
jeune est en danger, celle-ci passe le relais au Service de la
Protection de la Jeunesse.
L'école a créé un sas d'écoute
auquel collabore le CPMS. Selon
l'éducateur, il y a une complémentarité
en termes de compétence professionnelle. De plus, les éducateurs
transmettent des informations au CPMS dans le cadre de
réunions afin de vérifier si le jeune a repris le chemin de
l'école. L'éducateur soulève qu'il est difficile de
rentrer en contact avec les élèves lorsqu'ils sont en
décrochage scolaire, malgré l'envoi des courriers et les coups de
téléphone. Pour répondre à ce problème, ils
font appel à l'AAS pour les visites à domicile
de façon à obtenir un retour sur la situation du jeune (pour
rappel, l'éducateur ne peut pas se rendre au domicile du jeune mais
pense que cette démarche est efficace). Les éducateurs
n'hésitent pas à demander des informations à
l'AAS afin de mieux cerner les difficultés du jeune
dont ils s'occupent. Dans notre analyse, nous ne relevons pas de collaboration
avec l'acteur issu du milieu associatif. En revanche, après avoir
été informé par l'AAS de l'existence du travail
des agents de quartier, l'éducateur compte, si
nécessaire, établir une collaboration pour l'année
scolaire ultérieure. D'après l'assistant social
du CPMS, son service travaille avec l'AMO pour préparer
le retour du jeune à l'école dans les meilleures conditions.
Cependant, vu le nombre important des dossiers à gérer, l'AMO ne
peu répondre à toutes les demandes. Le CPMS active
également l'AAS pour rencontrer le jeune dans des conditions - endroit
neutre et non contraignant pour l'élève - favorisant
l'écoute et le soutien du décrocheur. En effet, selon l'assistant
social, le CPMS est associé à l'école, lieu de
«malêtre» pour le jeune. Enfin, la DGEO envoie un courrier aux
jeunes et aux familles pour qu'ils prennent contact avec le CPMS. On retrouve
dans cette démarche la procédure à suivre dans la
Circulaire 1972. Le CPMS favorise les acteurs locaux afin de répondre
à la problématique du décrochage scolaire. L'assistant
social soulève que le fait de travailler avec la DGEO
ou le
SAJ ne porte pas ses fruits dans la mesure
où ces derniers relaient vers les services locaux. De ce fait, pour
éviter de tourner en rond, le CPMS active les partenaires de la
région pour apporter des solutions concrètes qui ne prennent pas
trop de temps. En ce qui concerne la police, lorsque l'aide
négociée ne suffit pas, le CPMS reconnaît la place de
l'aide contraignante. Dans notre analyse, nous soulevons des collaborations
bien spécifiques tant avec les agents de quartier que le SAJ lorsque la
situation de l'élève devient compliquée.
En ce qui concerne la perception de la CAS,
le directeur la considère comme un lieu où l'on
peut s'outiller, toujours dans l'objectif de ramener l'élève
à l'école. Il envoie un représentant de l'école, en
l'occurrence l'éducateur interviewé. Celui-ci
participe à la CAS pour obtenir des informations, des outils pour
faciliter son travail et aborder au mieux le décrochage scolaire.
Ensuite, il communique les informations en interne auprès de ses
collègues. La CAS est considérée par l'assistant
social du CPMS comme un lieu d'échange qui permet de
découvrir de nouveaux acteurs pour un éventuel partenariat.
Aussi, c'est un lieu qui crée des liens et des outils de
prévention comme le Pass scolaire.
3.2.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO
Même si nous ne le relevons pas dans nos analyses, les
AMO sont susceptibles d'être sollicitées par les services
émanant de la Communauté française (Service d'Aide
à la jeunesse, les médiateurs scolaires, les équipes
mobiles, les Services d'Accrochage Scolaire et les écoles). En effet,
nous retrouvons dans la Circulaire 1972 (p.23) une procédure à
suivre lorsque le jeune est en difficulté et peut, dès lors,
être orienté vers les AMO. Nous avons relevé que ce service
active la DGEO afin d'envoyer, avec l'accord du jeune, un recours pour qu'il
redevienne élève libre. Nous le verrons dans les pages qui vont
suivre, le CPMS et l'AMO travaillent en collaboration sur certains dossiers.
Même si le directeur et l'assistant n'ont pas connaissance de la
Circulaire 1972, l'AMO privilégie les acteurs du même pouvoir
subsidiant. En ce qui concerne l'acteur communal et judiciaire, les acteurs
interviewés relèvent qu'il n'y a pas de collaboration avec la
police. En revanche, il existe un partenariat avec les acteurs communaux (AAS
et le PPP) dans le cadre de projets bien spécifiques (la conception d'un
outil pédagogique destiné aux écoles du cycle secondaire
et des activités sportives organisées par les éducateurs
de rue). Enfin, l'assistant social participe, d'une part, aux réunions
de la CAS pour rencontrer les acteurs locaux qui traitent le décrochage
scolaire et, d'autre part, aux réunions de la Commission d'Aide à
la Jeunesse114 - organisées par les
114Cette Commission de pilotage s'inscrit dans le
Décret du 13 mars 2008 portant diverses mesures contre le
acteurs de la Communauté française (les
médiateurs scolaires) - pour créer des campagnes de
prévention et réfléchir sur des questions relatives
à la violence à l'école, l'exclusion et le
décrochage scolaire115. En ce qui concerne
la collaboration avec les autres acteurs, l'AMO collabore avec les
éducateurs de l'action prévention de proximité
(appelée également PPP) pour des
activités sportives. L'intérêt des acteurs
interviewés est de répondre aux objectifs de leur organisation.
Selon eux, les éducateurs de rue rencontrent davantage de jeune dans les
quartiers, ce qui facilite le travail de l'AMO pour toucher un maximum de
jeunes malgré le manque de personnel. De plus, le service communal a
accès aux ressources locales tant pour l'organisation que la gestion des
activités à mettre sur pied. Dans ce contexte, l'AMO
s'intègre dans des projets gérés par l'acteur communal
pour répondre à leur objectif de travail. L'ASBL a très
peu de contact avec les acteurs judiciaires (Police, Parquet) même si ces
derniers orientent les jeunes vers l'AMO. Comme ce service travaille sans
mandat, les jeunes ne sont pas dans l'obligation de se présenter ;
généralement, ils ne présentent pas. Comme nous l'avons
souligné dans les pages précédentes, il existe une tension
pour établir des collaborations avec les écoles. Cependant,
l'acteur privilégié est le CPMS. Selon
l'assistant social, ils se téléphonent et s'informent sur des
situations où le jeune a des difficultés avec la famille et son
entourage. L'idée est que le jeune puisse retourner à
l'école dans de bonnes conditions. Dans la pratique, les acteurs sociaux
partagent des dossiers communs ou relaient la situation pour intervenir en
fonction des compétences et des réalités de chacun face au
décrochage scolaire. Aussi, il y a un intérêt pour l'AMO
à travailler avec la DGEO afin de
réintégrer le jeune en situation d'élève
irrégulier au sein de son école. Enfin, l'ASBL demande des moyens
financiers à la Commission de l'Aide à la
Jeunesse pour envoyer ses jeunes en activités. En participant
aux réunions de concertation, l'AMO utilise les folders et les affiches
de prévention qui émanent de la CAJ. En ce qui concerne
la participation de l'AMO au sein de la CAS, le directeur
souligne que l'objectif est de mettre des noms sur des visages et que cela
facilite le travail de partenariat entre les différents participants.
Pour le décrochage scolaire, il privilégie la Commission de La
Louvière dans le but de rencontrer les acteurs locaux et de
défendre chaque année une idée qui peut s'étendre
sur ce territoire. Selon l'assistant social, les réunions permettent
également de connaître le fonctionnement, les compétences,
les pratiques et la réalité de chaque acteur qui travaille avec
la jeunesse. L'assistant social soulève aussi que les réunions
permettent d'avoir une vision plus complète du décrochage
scolaire et qu'elles influent sur la vision du travail. Concrètement,
l'AMO
décrochage scolaire, l'exclusion et la violence à
l'école (voir p. 22-23).
115Nous retrouvons les discours de l'acteur issu du
milieu associatif en annexe 3, p. 28.
s'inscrit dans le projet qui émane de la CAS. Celui-ci
consiste à créer un outil pédagogique destiné aux
écoles. Le rôle de l'AMO est d'apporter son expérience et
son matériel audiovisuel pour filmer des petites scènes qui
traitent des entretiens d'embauche dans le marché du
travail116 .
3.2.3 L'acteur judiciaire, le SJF
Le SJF fait appel à plusieurs services de par ses
missions et les directives de sa hiérarchie. Les acteurs suivent des
procédures bien spécifiques et font appel à
différents acteurs, à savoir : l'acteur judiciaire (le Parquet de
Mons, le tribunal de la Police), l'acteur scolaire (écoles, CPMS) et
l'acteur communal (l'AAS). Comme nous l'avons soulevé dans les pages
précédentes, le SJFP aiguille (si nécessaire) les
décrocheurs vers le service le plus apte à répondre
à sa demande. En théorie, le SJFP s'appuie sur la Circulaire PLP
41 pour favoriser le partenariat avec les écoles117. Il est
demandé à la police locale de créer un point de contact
permanent pour les écoles de son territoire. Pour la DGEO, «
tant la circulaire que les projets de convention examinés se
réfèrent aux situations de décrochage ou
d'absentéisme scolaire118.» En revanche,
selon la coordinatrice du SJF, le partenariat consiste à travailler sur
la problématique de la délinquance juvénile plutôt
que sur le décrochage scolaire (celui-ci étant un
phénomène à identifier pouvant conduire à la
délinquance juvénile). Dans les faits, la PLP 41 n'a pas
influencé les relations avec les écoles réfractaires
à ce type de collaboration. Cependant, les contacts se sont
intensifiés avec certaines directions d'écoles. L'agent de
quartier souligne qu'il y a une légère amélioration. Il ne
sait pas si c'est lié à la Circulaire dans la mesure où
l'acteur judiciaire n'a pas attendu ces normes pour établir des
partenariats avec d'autres acteurs. Enfin, la participation à des
réunions de concertation (CAS) avec les acteurs du champ de l'accrochage
scolaire déstygmatise et relativise l'image de la Police (outre la
répression, il y a un réel travail de prévention et
d'orientation vers les services compétents) favorisant ainsi la
collaboration avec de nouveaux acteurs (ex : la DGEO, les équipes
mobiles). De plus, dans le cadre de la CAS, la Police s'est inscrite dans le
projet Pass scolaire où elle figure comme l'un des acteurs principaux.
En effet, sans les contrôles en rue, ce projet n'a pas de sens. Cette
outil permet aux agents de quartier, d'une part, de leur fournir
116Nous retrouvons les discours de l'acteur issu du
milieu associatif en annexe 3, p. 30-35.
117Pour rappel, le Ministère de
l'Intérieur publiait une Circulaire relative à la collaboration
de la police avec les établissements scolaires. L'accord de
collaboration doit se traduire dans des conventions écrites associant
établissements scolaires, police, procureur du Roi et bourgmestres
compétents dans la zone de police concernée.
118Direction Générale de l'Enseignement Obligatoire,
(Circulaire 2007-2008). Obligation scolaire, inscription des
élèves, fréquentation scolaire, sanctions disciplinaires
et gratuité dans l'enseignement secondaire ordinaire subventionné
par la Communauté française.
plus d'informations sur le décrocheur et, de l'autre,
de faciliter les collaborations avec les acteurs
scolaires119. Dans le cadre des missions de SJF,
les agents doivent répondre aux demandes du Procureur du Roi
(Juge de la Jeunesse), des intervenants sociaux qui traitent
le décrochage scolaire, des parents et des jeunes. Outre les Circulaires
et les Décrets susceptibles de baliser leurs actions, le SJF a le besoin
de s'informer sur la fréquentation de l'élève (est-il
élève libre ?), sur son comportement et ses résultats
scolaires. Pour atteindre cet objectif, les acteurs judiciaires travaillent en
partenariat avec les acteurs scolaires (direction d'école, CPMS) et
l'acteur communal (AAS) pour traiter la problématique du
décrochage scolaire et éviter que la situation du jeune se
judiciarise et se détériore (au contraire, il faut
déjudiciariser sa situation). La collaboration avec les
écoles et l'AAS se limite à des relais
et des échanges d'informations. L'agent de quartier aiguille le
décrocheur vers l'AAS afin d'identifier les causes du décrochage
scolaire en tenant compte de son environnement familial. Selon l'agent de
quartier, dont le rôle est limité (elle ne peut pas travailler
l'aspect thérapeutique), l'AAS, de par ses compétences et son
rôle, peut développer une vision plus globale de la
problématique du jeune. Dans la même dynamique, en fonction du
contexte, il contacte le CPMS et les écoles dans l'objectif de signaler
la situation du jeune et si possible, d'intervenir au sein du foyer familial et
- après la visite à domicile du CPMS - de donner un retour
à la Police de façon à réagir en
conséquence. Cette démarche est multilatérale dans la
mesure où le CPMS active également le SJF
lorsque c'est nécessaire.
Selon la coordinatrice, lorsque certains directeurs se
trouvent dans l'impasse face des élèves
«ingérables», ils font appel aux agents de quartier pour
gérer la situation et être informés des institutions
susceptibles de répondre à leurs demandes. La coordinatrice
explique que ces demandes relèvent actuellement d'une prise de
conscience commune aux différents acteurs, dans la mesure où l'on
ne peut pas travailler seul dans son coin. Elle ajoute que chaque
problème demande une réponse adaptée et qu'il y a des
services spécifiques pour y répondre. Aussi, si l'agent de
quartier relaie vers l'AMO, la collaboration est
limité, il n'existe pas d'échange réel et de retour quant
au suivi du jeune. Il précise que ce service est difficilement joignable
et que le manque de personnel et de temps au sein du SJF ne favorisent pas les
contacts120.
119Nous retrouvons les discours de l'acteur Judiciaire
en annexe 3, p. 43. 120Nous retrouvons les discours de l'acteur
Judiciaire en annexe 3, p. 46-52.
3.2.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP
Nous avons soulevé dans les pages
précédentes que l'objectif stratégique de l'AAS est de
réunir les acteurs locaux pour traiter le décrochage scolaire,
l'outil privilégié de ce service étant la Commission
Accrochage Scolaire. De ce fait, l'AAS collabore et réunit autour d'une
même table les acteurs communaux, scolaires, judiciaires et issus du
milieu associatif. À partir des Décrets, des Circulaires, des
Lois relatives au décrochage scolaire, l'AAS présente les acteurs
inscrits dans ces normes (ex : la Circulaire 1972) dans l'objectif de
sensibiliser les différents acteurs et d'activer des partenariats. Pour
le Fonctionnaire de prévention, il est important que les partenaires
jouent le jeu car il en va de la réinsertion du jeune. L'assistant
social relève que le partenariat est une priorité pour apporter
des réponses appropriées à la problématique du
décrochage scolaire. Selon l'assistant social, il existe peu de
collaboration avec l'AMO car il estime qu'elle est peu
impliquée dans la lutte contre le décrochage scolaire. Cependant,
un partenariat est établi dans le cadre d'un projet qui émane de
la CAS pour la création d'un outil pédagogique. L'assistant
social souligne que l'AMO peut considérer que l'AAS du PSSP est un
acteur public qui relève du contrôle social. De ce fait, cette
perception peut freiner les collaborations entre les deux services.
En revanche, l'AAS est reconnue auprès des acteurs
judiciaires (la police, les criminologues du Parquet de Mons). Pour l'assistant
social, ces acteurs sont incontournables car ce sont eux qui contrôlent
les jeunes et qui reçoivent les plaintes. La
complémentarité est réelle dans la mesure où il
existe des échanges, des relais dans l'objectif de
réintégrer le jeune en difficulté dans une école.
Selon les dires de l'assistant social, les relations avec certains CPMS sont
fructueuses, chacun respecte le travail de l'autre et n'hésite pas
à relayer des jeunes en difficultés. En ce qui concerne les
écoles, l'assistant social relève qu'elles ne reconnaissent pas
toujours le décrochage scolaire au sein de leur établissement.
Suite aux demandes de l'AAS, les écoles collaborent pour informer l'AAS
dans le suivi de certains dossiers121.
En invitant des services comme les Services Accrochages
Scolaires et la DGEO pour les présenter aux participants de la CAS,
l'AAS répond à ses objectifs. Dans le cadre de la CAS, l'AAS
permet aux différents acteurs de s'informer sur les différents
services existants, de rencontrer des acteurs qui peuvent répondre
à leurs demandes, de communiquer sur des constats de terrain, de
s'outiller et de mettre en place des pistes de travail communes pour
réduire le décrochage scolaire (le Pass scolaire en est
l'exemple). Selon le Fonctionnaire de prévention, la CAS vise
l'efficacité et la communication entre les partenaires. Elle facilite
les
121Nous retrouvons les discours de l'acteur communal
en annexe 3, p. 64-68.
interventions sociales et formalise les partenariats.
L'assistant social précise que cette dynamique ne peut se faire que dans
ce lieu de concertation qui démystifie les différentes
organisations présentes. Dans ce contexte, l'AAS a convié la
DGEO, le SAS et les équipes mobiles pour les présenter aux
membres de la CAS. Outre la CAS, comme nous l'avons vu dans les pages
précédentes, l'AAS échange des informations et relaie vers
la Police, le Parquet, le CPMS et, plus ponctuellement, dans le cadre d'un
projet pédagogique avec l'AMO122.
3.3 La solidarité fusionnelle
Elle est fondée sur des valeurs : « les gens
sont liés entre eux par une communauté de convictions :
ils partagent une foi, des croyances, des valeurs, une idéologie, une
utopie, le même projet d'avenir qu'ils croient bon, non seulement pour
eux-mêmes, mais aussi pour les autres123
».
3.3.1 L'acteur scolaire, l'école et le
CPMS124
En ce qui concerne les collaborations avec les autres
acteurs, l'efficacité et le fait d'être professionnel
sont des valeurs importantes pour le directeur d'école. Ces valeurs
donnent du crédit à l'AAS et le CPMS, acteurs
privilégiés de l'école125. Aussi, la notion de
temps dans l'intervention pour accrocher l'élève en
décrochage scolaire est capitale. En effet, pour le directeur, il ne
sert à rien d'intervenir un mois après avoir constaté
l'absence du jeune. Plus vite on intervient, au mieux l'école peut
envisager son accrochage scolaire.
Selon l'éducateur, le CPMS et l'AAS répondent
favorablement à chaque demande de l'école pour les jeunes en
difficulté. De plus, l'éducateur donne de l'importance au retour
que ces services peuvent lui faire. Pour l'éducateur, la motivation et
l'investissement de l'AAS peuvent diminuer le décrochage scolaire.
En ce qui concerne la CAS, l'éducateur soulève
que, pour combattre le décrochage scolaire, il faut que tous travaillent
dans le même sens et fonctionnent de la même façon. Sans
cette conviction, il ne sert à rien d'y participer. Selon l'assistant
social du CPMS, les membres de la CAS se centrent sur une valeur commune,
c'est-à-dire, l'épanouissement du jeune.
122Nous retrouvons les discours de l'acteur communal
en annexe 3, p. 62.
123Bajoit, G. (2003). Le changement social :
Approche sociologique des sociétés occidentales
contemporaines (p. 137). Paris: Armand Collin.
124Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire
en annexe 3, p. 15-17.
125De ce constat, pouvons-nous en déduire que
la direction ne travaille pas avec d'autres services parce qu'ils ne sont pas
efficaces et donc, peu professionnels ?
3.3.2 L'acteur issu du milieu associatif, L'AMO126
Selon l'assistant social, il existe une vision commune du
décrochage scolaire malgré les différences entre les
organisations présentes au sein de la CAS, la collaboration à
celle-ci faisant office de valeur. Il précise que le critère
primordial pour collaborer est l'envie de réaliser un projet et de
s'impliquer. La collaboration est quasi inévitable pour répondre
à la problématique du décrochage scolaire.
3.3.3 L'acteur judiciaire, le SJF127
L'AAS est le partenaire le plus important pour le SJF. Il est
considéré comme un service dynamique qui ne se limite pas aux
difficultés scolaires du jeune. Le travail de l'AAS s'oriente
également sur les difficultés relationnelles du jeune avec son
entourage. Aussi, selon la coordinatrice, l'AAS développe une
très bonne collaboration avec le réseau de l'accrochage scolaire
en gardant son indépendance et son professionnalisme lors des entretiens
individuels. Il existe une solidarité fusionnelle dans la mesure
où le SJF met un point d'honneur - malgré qu'il n'a pas
systématiquement de retour de la situation du jeune - sur le fait qu'il
y a une véritable prise en charge du décrocheur tenant compte de
sa situation globale. Aussi, outre le besoin de travailler en partenariat, la
coordinatrice estime que pour que cela soit faisable, il faut réunir les
différents acteurs autour d'une table de façon à exploiter
les idées de chacun. C'est la cohésion entre les acteurs qui
permettra de faire face au décrochage scolaire. L'agent de quartier
relate que, face au décrochage scolaire, il n'y pas de
compétition128 mais plutôt de la collaboration et du
partenariat entre les intervenants sociaux parce qu'ils oeuvrent, pour la
plupart, dans l'intérêt du jeune. Même si les moyens et les
objectifs sont différents, ça n'empêche pas de travailler
ensemble.
3.3.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP129
Selon l'acteur communal, la valeur qui réunit les
membres de la CAS, c'est l'envie de travailler en collaboration, de se
connaître et d'élaborer des méthodologies qui visent
126Nous retrouvons les discours de l'acteur issu du
milieu associatif en annexe 3, p. 36.
127Nous retrouvons les discours de l'acteur Judiciaire
en annexe 3, p. 53-54.
128Cependant, l'agent de quartier soulève
qu'il y a un manque de communication entre partenaires. Il souligne qu'il
existe une motivation et une reconnaissance personnelle à sortir le
décrocheur de ses difficultés : c'est une victoire pour tous les
intervenants sociaux. Néanmoins, il faudrait peu de chose pour devenir
concurrent, il faut rester diplomate pour ne pas choquer son partenaire.
129Nous retrouvons les discours de l'acteur communal
en annexe 3, p. 71.
l'efficacité par la complémentarité entre
les professionnels qui traitent le décrochage scolaire.
3.4 Logique de solidarité affective
Elle est fondée sur des affects : « les gens
sont alors solidaires parce qu'ils se connaissent, parce qu'ils ont vécu
la même histoire, partagé des expériences,
intériorisé les mêmes normes culturelles et que cela a
tissé entre eux des liens affectifs plus ou moins forts et
durables130.»
3.4.1 L'acteur scolaire, l'école et le
CPMS131
Selon l'éducateur, la CAS est un lieu où l'on
fait partie d'un groupe, un lieu décontracté, un lieu où
l'on rigole, où l'on a l'impression de se connaître de longue
date. Il souligne que cette ambiance crée des liens avec d'autres
éducateurs et pourrait, également, faciliter le travail avec les
autres écoles. Quant à l'assistant social du CPMS, il estime que
la CAS permet de nouer un partenariat et des liens entre les différents
acteurs.
3.4.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO132
Le directeur de l'AMO a développé des relations
privilégiées avec l'éducateur de l'AAS qui participe et
coordonne la CAS quand l'assistant social est absent. Ces relations sont
construites avec le temps. L'assistant social de l'AMO aime collaborer avec les
personnes qu'il connaît et permet de travailler dans une certaine
transparence.
3.4.3 L'acteur judiciaire, le SJF133
Selon l'agent de quartier, la CAS permet de mieux se
connaître et d'améliorer avec les différents participants,
le travail social tout en restant professionnel (il n'y a pas pour autant du
favoritisme). Il précise, que c'est dans ce cadre que l'on crée
des affinités et des liens affectifs (il y a de l'émotion) avec
les intervenants sociaux.
3.4.4 L'acteur communal, l'AAS du PSSP134
Les acteurs qui participent à la CAS se connaissent de
longue date. À force de se fréquenter,
130Ibid.
131Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire
en annexe 3, p. 17.
132Nous retrouvons les discours de l'acteur issu du
milieu associatif en annexe 3, p. 37. 133Nous retrouvons les
discours de l'acteur Judiciaire en annexe 3, p. 54.
134Nous retrouvons les discours de l'acteur communal
en annexe 3, p. 72.
ils ont créé des liens professionnels
privilégiés facilitant la collaboration dans les suivis des
dossiers, dans les échanges d'informations. Ces liens ont permis de ne
plus se cacher derrière le secret professionnel et ont apporté
des actions plus ciblées optimalisant le suivi socioéducatif.
4 Influence de la Commission Accrochage Scolaire sur
les différents acteurs
Nous avons soulevé dans les pages
précédentes l'influence de la CAS sur les logiques de
solidarité des différents acteurs. Cependant, nous proposons un
résumé de notre analyse pour répondre à notre
deuxième objectif de recherche. Selon nos constats, on peut dire que la
CAS répond aux besoins des acteurs et influe sur leurs perceptions du
problème. Ces perceptions génèrent des logiques de
solidarité conditionnelle, contractuelle, fusionnelle et affective.
4.1 L'acteur scolaire, l'école et le CPMS135
L'assistant social du CPMS relève que les
réunions de la CAS ont permis de créer des liens et des
partenariats avec les autres acteurs sociaux tels que les médiateurs
scolaires, l'AAS et la police. Avant ces réunions, l'assistant social ne
travaillait pas spécialement avec ces services. Il souligne
également que le fait de se concerter avec les autres acteurs qui
traitent le décrochage scolaire permet, en mettant des noms sur des
visages, de connaître les missions de chacun et d'humaniser les relations
professionnelles. Ce contexte ouvre des perspectives de partenariat. Dans les
faits, les différents acteurs sont devenus des partenaires dans le
travail quotidien du CPMS grâce à la CAS. Ce lieu de concertation
a permis de créer un outil qui vise le contrôle des
élèves en rue, en l'occurrence le Pass scolaire, qui
réunit les acteurs scolaires, communaux et judiciaires. L'idée
est de responsabiliser chaque acteur social qui traite le décrochage
scolaire. Pour l'assistant social, cet outil crée des normes entre les
opérateurs. De plus, une sous-commission s'est créée
à partir de la CAS. Celle-ci rassemble les acteurs scolaires, communaux
et issus du milieu associatif ; elle forme un groupe de réflexion et de
travail dans le but de créer un outil pédagogique destiné
aux écoles du secondaire. Enfin, les acteurs scolaires reconnaissent la
légitimité de la CAS et des acteurs qui la gèrent. Les
acteurs scolaires soulignent l'importance et la nécessité de ce
lieu de concertation car il permet de construire des collaborations, des outils
et des procédures pour traiter le décrochage scolaire.
135Nous retrouvons les discours de l'acteur scolaire
en annexe 3, p. 18-19.
4.2 L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO136
Selon l'assistant social, la Commission a diminué les
tensions entre l'acteur issu du milieu associatif et l'acteur communal (l'AAS
du PSSP). Elle permet d'identifier les acteurs locaux qui traitent le
décrochage scolaire ; d'influer sur la perception du décrochage
scolaire de l'AMO ; d'activer en cas de besoins les services compétents
; d'intensifier les partenariats avec les CPMS et de s'inscrire dans des
projets qui correspondent aux missions et aux objectifs de l'AMO.
4.3 L'acteur judiciaire, le SJF137
En ce qui concerne la CAS, la coordinatrice et l'agent de
quartier précisent qu'elle permet, d'une part, d'obtenir des
informations générales sur le décrochage scolaire, des
échanges d'informations entre les participants et, d'autre part,
d'identifier chaque acteur de façon à ne plus travailler dans
l'anonymat (pour l'agent de quartier, cela influe sur la perception du
décrochage). C'est dans ce contexte que l'agent de quartier a
rencontré la personne de référence qui travaille à
la DGEO (ce contact a permis d'établir des pistes de collaboration entre
les deux services), ainsi que le coordinateur de l'équipe mobile et le
coordinateur du SAS de Mons. Selon la coordinatrice, à l'époque,
il fallait défendre l'image de la Police considérée par
les différents acteurs traitant le décrochage scolaire comme un
service purement répressif (procès verbal, procès,
sanctions). Aujourd'hui, les choses ont évolué, la Police est de
mieux en mieux acceptée, elle n'est plus sur la défensive puisque
la CAS lui a permis de présenter un autre visage. En effet, elle
précise que la CAS a amélioré d'une part, l'image du
service en facilitant les échanges qui ont permis de démontrer
que le SJF travaillait, en grande partie, sur un volet préventif et,
d'autre part, a créé un langage commun avec les acteurs sociaux.
La CAS a également permis au SJF de faciliter les collaborations avec
ses participants et, grâce au Pass scolaire, d'obtenir des renseignements
sur les décrocheurs. Il en résulte pour le SJF que la CAS est un
lieu qui répond à sa demande et facilite ainsi, son travail de
terrain. Cependant, lorsque les projets demandent un investissement important,
les acteurs judiciaires ne peuvent pas y participer (manque de personnel et de
temps).
136Nous retrouvons les discours de l'acteur issu du
milieu associatif en annexe 3, p. 38. 137Nous retrouvons les
discours de l'acteur Judiciaire en annexe 3, p. 49-52.
4.4 L'acteur communal, l'AAS
L'AAS coordonne la Commission Accrochage Scolaire qui
réunit les acteurs scolaires, communaux, judiciaires et issus du milieu
associatif. Dans ce cadre, L'AAS a une «double casquette» : d'une
part, elle orchestre la Commission et, de l'autre, elle se positionne au
même titre que les autres acteurs comme une organisation qui traite le
décrochage scolaire. L'acteur communal relate que la CAS est un lieu qui
permet aux différents acteurs de démystifier les autres
organisations en présentant les fonctions de chacun ; par ailleurs,
c'est un lieu où l'on peut cibler les besoins des participants et ceux
des jeunes «décrocheurs». L'assistant social précise
également que la CAS ressemble à un petit marché où
l'on vient chercher des outils pour traiter le décrochage scolaire.
Selon l'interviewé, la CAS donne la possibilité de créer
des partenariats avec l'AAS mais aussi entre les différents membres. Un
des objectifs de l'AAS est de connaître son réseau en identifiant
les organisations mais également, de développer des relations de
confiance et de viser une plus grande efficacité en mettant en place des
actions concrètes sur le terrain. L'AAS a ciblé les besoins des
acteurs par des constats de terrain et tente d'y répondre en mobilisant
la casquette de la CAS. Le sujet interviewé a une forte conscience du
sens qu'il donne à son action. Ce constat n'est pas anodin, l'objectif
stratégique de cette organisation est en lien avec son objectif
stratégique n°1 qui est de promouvoir une approche
intégrée et intégrale. En outre, les objectifs
opérationnels sont d'une part, de s'insérer au sein d'un
réseau de partenaires travaillant activement sur le
phénomène du décrochage scolaire ; d'autre part, de
participer à des groupes de travail sur des problématiques
localisées, initier des groupes de travail. En effet, lorsque nous
interpellons l'assistant social quant au rôle de l'AAS relatif à
la CAS, il a tout a fait conscience qu'il peut «changer» certains
modes de fonctionnement des différents services sociaux en abordant le
décrochage scolaire. De plus, la plupart des partenaires de l'AAS
participent à la CAS.
Chapitre 6 : Discussion sur le contenu de la
méthode
1 Introduction
Au début de notre étude, nous avons
élaboré un double objectif de recherche, à savoir :
Le premier permettant de confirmer ou d'infirmer notre hypothèse
de départ :
(1) Identifier les perceptions de la gestion du
décrochage scolaire au sein de l'organisation des acteurs scolaires,
communaux, judiciaires et issus du milieu associatif qui participent à
la CAS et dégager les logiques de solidarité chez les
différents acteurs.
Hypothèse de départ :
Les perceptions de la gestion du décrochage scolaire
et les logiques de solidarité des acteurs scolaire, communal, judiciaire
et issu du milieu associatif sont influencées par l'organisation
à laquelle ils appartiennent.
Le second, à titre exploratoire, permettant
d'enrichir notre recherche :
(2) A titre exploratoire, identifier comment la CAS traite la
diversité des organisations qui y participent et soulever l'influence de
la CAS sur les perceptions du décrochage scolaire et les logiques de
solidarité des différents acteurs afin d'enrichir notre
recherche.
Pour répondre à notre premier objectif, nous
allons faire ressortir d'une part, la diversité des différents
acteurs appartenant à des organisations bien spécifiques et
d'autre part, à partir d'un résumé sous forme de tableaux
rendant compte des résultats de notre étude, procéder
à une analyse d'interprétation.
Pour le second objectif, nous utiliserons le même
procédé que le premier en proposant un tableau qui
présentera les forces et les faiblesses de la Commission Accrochage
Scolaire. Nous parlerons également de la légitimité de
l'acteur communal qui gère cette Commission, ainsi que de la
manière dont les acteurs qui y participent sont traités.
Après avoir répondu à nos objectifs de
recherche, nous émettrons une critique sur notre méthode de
travail ainsi que sur le cadre théorique proposé par Guy Bajoit.
Enfin, nous clôturerons ce chapitre sur les perspectives de notre
étude.
2 Résultats et interprétation des
différentes perceptions de la gestion du décrochage scolaire des
acteurs au sein de leur organisation
Les représentations de la gestion du décrochage
scolaire véhiculées par les acteurs diffèrent selon
l'organisation à laquelle ils appartiennent.
Sur un plan administratif, l'acteur scolaire
va davantage contrôler l'absentéisme de l'élève tout
en envoyant des cartes d'absences aux parents et classer les certificats
médicaux ainsi que les mots d'excuses. Sur un plan préventif,
l'école propose un sas d'écoute en partenariat avec le CPMS et
les enseignants pour écouter le jeune et éviter le
décrochage scolaire (on s'intéresse au bien-être du jeune).
La surcharge administrative et le manque de personnel limite l'investissement
des éducateurs dans le soutien des élèves en
difficulté. Le CPMS veille à
l'épanouissement du jeune mais il ne peut répondre à
toutes les demandes des écoles vu le nombre important de dossiers, le
manque de personnel et le manque de temps. Le décrochage scolaire est
géré au niveau interne, encore faut-il que le jeune soit
présent.
L'AMO reçoit les jeunes et les parents
en fonction de leurs demandes et tente de développer l'esprit critique
du jeune en le responsabilisant face à son comportement et son renvoi
scolaire. Si le jeune n'est pas en accord avec la sanction, le service va
collaborer avec le service Droits des Jeunes pour vérifier si la
procédure a été respectée. La démarche
auprès de Droits des Jeunes n'est pas appréciée
auprès des écoles. Pour l'AMO, un directeur doit respecter les
procédures de renvoi. Cependant, l'ASBL comprend la difficulté de
l'école de gérer les élèves difficiles au sein de
l'établissement.
Si le jeune a perdu son statut d'élève
régulier, l'AMO l'accompagnera dans une démarche avec la DGEO
pour réinsérer le jeune au sein de son école. Aussi, l'AMO
collabore avec les CPMS afin de travailler, avec l'accord du jeune et de la
famille, le retour à l'école dans de bonnes conditions et de
sensibiliser les usagers à l'autorité parentale et aux questions
de responsabilité. L'AMO propose également aux jeunes qui ont des
difficultés avec l'autorité et les règles des
activités inter-sportives. Le décrochage scolaire est
traité avec l'accord du jeune (et sa famille) exprimant sa
volonté d'accrocher à l'école. La difficulté est
que généralement ces jeunes n'aiment pas l'école.
Pour le Service Jeunesse et Famille, le
décrochage scolaire est une priorité, l'objectif
étant d'enrayer la problématique du décrochage scolaire
et d'identifier les jeunes susceptibles de glisser dans la
délinquance. Le décrochage scolaire est ciblé comme un
indicateur de la
délinquance. Le SJF se positionne comme un service de
référence pour les écoles. Il contrôle les jeunes en
rue et envoie des courriers aux écoles et aux parents pour signaler
l'absentéisme. Le SJF prévient le jeune et la famille des
sanctions éventuelles et, en fonction de la situation, les orientent
vers des services d'aide sociale visant la réinsertion du jeune au sein
de l'école et/ou vers des structures de soutien psychologique. Si la
situation du jeune est problématique, un procès verbal peut
être envoyé au Parquet pour des sanctions éventuelles. La
gestion du décrochage scolaire s'effectue par un rappel de la loi, de
l'obligation scolaire et des sanctions que le jeune et la famille risquent
d'encourir. La surcharge de travail et le manque de personnel est un frein dans
les suivis des dossiers et dans les contrôles en rue.
L'AAS se positionne à partir des ses
objectifs stratégiques (diminuer le décrochage scolaire et le
sentiment d'insécurité) comme un service de
référence et un maillon qui centralise et coordonne le
décrochage scolaire sur le territoire louvièrois en gérant
la Commission Accrochage Scolaire. Cette Commission présente les acteurs
traitant le décrochage scolaire, les nouvelles lois ou les
Décrets qui traitent de la problématique et propose des outils et
des pistes d'actions en concertation avec les participants pour diminuer le
décrochage. D'une part, l'éducateur du service va à la
rencontre des jeunes décrocheurs pour tenter de les ramener à
l'école ; d'autre part, avec l'assistant social du service, il propose
une écoute, un soutien, un accompagnement et une orientation vers les
services pouvant venir en aide au jeune. La difficulté est qu'il est
difficile de trouver une école qui intègre les jeunes ayant un
comportement jugé problématique et qui ne respectent pas les
normes scolaires. Le décrochage scolaire est géré avec le
réseau que l'AAS a mis en place. L'AAS reçoit un nombre important
de relais par la Police et le Parquet car ce sont eux qui reçoivent les
plaintes et contrôlent des jeunes. Ensuite, l'AAS relaie vers les
services locaux compétents pour insérer le jeune et éviter
qu'il reste en rue.
Comme nous le constatons, les acteurs se distinguent selon les
missions de leur organisation et leur réalité de terrain.
L'école et le SJF s'inscrivent dans une logique de contrôle de
l'absentéisme scolaire. Le contrôle se gère au sein de
l'école et au niveau extra-muros par la Police et l'AAS, dans une
certaine mesure138. Il existe une complémentarité dans
la gestion administrative du décrochage scolaire entre les acteurs
scolaire et judiciaire. Cependant, il
138La prévention du décrochage
scolaire au sein des écoles est de la responsabilité de la
Communauté française (l'acteur scolaire). En revanche, le travail
de prévention en ce qui concerne les jeunes se trouvant en rue est de la
responsabilité du Fédéral (Ministère de
l'Intérieur, les acteurs judiciaire et communal). La collaboration entre
les différents opérateurs est incontournable dans la mesure
où ces jeunes sont sensés être - sous-contrôle-
à l'école.
faut souligner le sentiment d'impuissance de l'école
pour gérer ce type d'élève malgré les tentatives
d'aides sociales. A contrario, l'AMO et le CPMS ne s'inscrivent pas dans une
logique de contrôle mais de solidarité tenant compte des
difficultés scolaires du jeune. L'AAS a une position plus ambiguë
dans sa façon de gérer le problème : même si le
service collabore avec un réseau d'aide sociale, il est
l'intermédiaire de la police et du Parquet par rapport à certains
dossiers - les échanges d'informations entre ces services peuvent
influer sur leur gestion du dossier du jeune (n'est-ce pas une façon de
contrôler la situation du jeune et de le sanctionner s'il ne respecte pas
certaines démarches pour s'insérer dans les circuits socio-
éducatifs ?).
Enfin, on retrouve une convergence quant aux limites des
services et de la complexité de gérer la problématique du
décrochage scolaire. Il est difficile de travailler seul pour soutenir
les jeunes, cela demande de s'ouvrir aux autres organisations susceptibles
d'apporter des réponses adaptées.
Les acteurs et les Décrets favorisant la
collaboration :
L'acteur scolaire : Le directeur de
l'école ne relève pas les Circulaires favorisant la collaboration
autour du décrochage scolaire avec d'autres acteurs. L'éducateur
se réfère à l'AAS et à la CAS pour expliciter les
Décrets existants. Le CPMS reconnaît la Circulaire 1972 et s'en
inspire (relais vers la DGEO, les équipes mobiles) 139.
L'acteur issu du milieu associatif :
Le directeur de l'AMO souligne que malgré la multitude de
décrets, on n'empêchera pas les gens de collaborer ou de ne pas
collaborer entre eux. Selon lui, ce sont les gens qui décident en
fonction de leur envie car, pour collaborer, il faut être plusieurs (ex :
l'AMO ne peut pas travailler avec la Police ; cependant, si elle estime que
cela est pertinent, la collaboration peut exister. L'AMO doit travailler avec
les écoles ; néanmoins, si celles-ci ne veulent pas collaborer,
l'AMO ne peut qu'accepter cette décision140).
L'acteur judiciaire : La collaboration
est soutenue par la PLP 41 mais, selon l'agent de quartier, cela
n'empêche pas les écoles de rester réticentes aux
partenariats (ce sont les contacts qui génèrent les
collaborations et non pas les Circulaires) 141.
L'acteur communal : C'est lui qui diffuse
et explicite les recommandations et les textes légaux dans le cadre de
la CAS.
139Annexe 3, acteur scolaire, p.9.
140Annexe 3, acteur issu du milieu associatif, p.28.
141Annexe 3, acteur judiciaire, p.44.
3 Résultats et interprétation des
différentes logiques de solidarité des différents acteurs
Logique de solidarité conditionnelle
:
|
L'acteur scolaire, l'école technique
subventionnée
|
Une augmentation de la problématique du
décrochage scolaire sur le territoire louvièrois ; un besoin de
travailler avec les autres services sociaux pour ramener le jeune à
l'école. Face à ce constat, l'école participe à la
CAS pour former un groupe de professionnels afin de s'outiller, de s'informer
sur les services existants et les nouveaux décrets.
Constat sur le décrochage scolaire (DS) :
l'éducateur142 a conscience de l'importance du DS.
Il relève
|
que la problématique est de plus en plus
inquiétante et insuffisamment prise en main par les autorités de
l'école. CPMS143 : l'AS relève une augmentation
inquiétante du DS tant dans le secondaire que le primaire. Il estime que
le CPMS n'est pas assez compétent pour assurer une réponse
adaptée dans une situation de plus en plus complexe.
|
L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO
Transit
|
Forme un groupe de professionnels pour la gestion du
décrochage scolaire.
Constat sur le DS : la problématique est
de plus en plus difficile à gérer (problèmes de
comportement
|
des élèves, renvois dans différentes
écoles). Il y a lieu de réfléchir sur le
phénomène144.
|
L'acteur judiciaire, le Service Jeunesse et
Famille
|
Sentiment d'appartenir à un groupe de travail qui oeuvre
dans la même direction. Face au DS, « on est tous dans le même
bateau. »
Constat sur le DS : le travail à
accomplir est colossal : les jeunes sont de plus en plus
déstructurés, le
|
service se sent limité et impuissant car tout le monde est
en détresse145. Il est indispensable de travailler en
collaboration (il y a du « bon boulot » avec les différents
intervenants).
|
L'acteur communal, l'Antenne Accrochage Scolaire du
PSSP
|
La CAS (lieu de centralisation de toutes les informations et
des actions où chacun apporte sa pierre à l'édifice contre
le décrochage scolaire) regroupe des acteurs sociaux qui sont
régulièrement présents. Constat sur le DS:
la problématique est assez importante sur la zone de La
Louvière, la situation est
|
complexe car elle relève de différents facteurs
avec, également, des conséquences diverses : isolement (phobie
scolaire, victime de racket, dépression, tentative de suicide) ;
mauvaise orientation scolaire, problèmes de consommation d'alcool et de
drogue ; glissement vers une certaine délinquance (racket, deal)
146.
|
Commentaires :
Les acteurs locaux se rencontrent à raison de trois
à quatre fois par an dans le cadre de réunions de concertation
gérées par l'acteur communal. Ils font partie d'une même
région avec ses caractéristiques147 et d'un même
groupe de professionnels face à un problème commun : la
complexité de gérer le décrochage scolaire et d'apporter
des réponses adaptées. Par conséquent, les acteurs se
rencontrent avec des demandes communes : trouver des solutions et, pour
l'acteur issu du milieu associatif, réfléchir sur le
phénomène. Selon nous, cette solidarité conditionnelle est
le socle des autres logiques de solidarité entre les
opérateurs.
142Voir annexe 2, interview de l'éducateur, L.
11-13 & 27-30.
143Voir annexe 3, p.8 : L. 11-21.
144Voir annexe 2, interview de l'assistant social, L.
262-267.
145Voir interview de l'agent de quartier, L.
210-219.
146Voir interview de l'assistant social, L. 14-23.
147Pour rappel, nous invitons nos lecteurs à
consulter le second chapitre de notre travail relatif à la
présentation de la Ville de La Louvière et du décrochage
scolaire sur ce territoire (p.30-34).
Logique de solidarité contractuelle
:
|
L'acteur scolaire, l'école technique
subventionnée
|
Ecole : Intérêt de faire revenir le
jeune au sein de l'école (collaboration ave le CPMS, l'AAS
|
pour des visites au domicile du jeune, avec la Police pour des
échanges d'informations), si le jeune est en danger, l'école
relaie vers le service de la Protection à la Jeunesse. Création
d'un sas d'écoute en interne pour prévenir le décrochage
scolaire (collaboration avec le CPMS et les enseignants).
Participation à la CAS : pour s'outiller
; adhésion au projet Pass scolaire ; obtenir des
|
informations pour faciliter le travail et aborder au mieux le
décrochage scolaire.
CPMS : Etant donné les limites de
collaboration de la DGEO et le SAJ, l'AS favorise les
|
acteurs locaux : l'AMO pour préparer le retour du jeune
à l'école dans les meilleures conditions ; l'AAS pour favoriser
l'écoute et le soutien des jeunes dans un endroit «neutre».
Lorsque la situation du jeune devient inquiétante, il existe une
collaboration avec la Police et le SAJ (échanges d'informations).
Participation à la CAS : découvrir
de nouveaux acteurs et établir d'éventuels partenariats
|
(participation à la conception du Pass scolaire ;
collaboration avec certains membres (CPMS, AAS) de la CAS pour la
création d'un outil pédagogique destiné aux
écoles.).
|
L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO
Transit
|
Collaboration avec le CPMS dans certains dossiers
(préparer le retour du jeune à l'école) ; collaboration
avec les éducateurs de rue de l'Action de Prévention et de
Citoyenneté (ressources humaines, financières et logistiques
importantes) pour des activités intersportives, collaboration avec la
DGEO afin de réintégrer le jeune dans son école.
Participation à la Commission de l'Aide à la Jeunesse :
création de campagnes de prévention (folders, affiches) et
demande de financer les activités des jeunes.
Participation à la CAS : avoir une vision
plus complète du DS ; identifier les acteurs locaux
|
qui travaillent avec la jeunesse en mettant des noms sur des
visages (identifier leurs compétences, leur fonctionnement, leurs
réalités de terrain) pour favoriser le partenariat ;
défendre des idées qui peuvent s'étendre sur le territoire
; collaboration avec certains membres (CPMS, AAS) de la CAS pour la
création d'un outil pédagogique destiné aux
écoles.
|
L'acteur judiciaire, le Service Jeunesse et
Famille
|
Le partenariat ave les autres acteurs (les équipes
mobiles, la DGEO) vise à détecter les jeunes susceptibles de
basculer dans la délinquance ; orientation vers les services sociaux
pour insérer le jeune (l'AAS, les écoles et l'AMO) ;
répondre aux demandes du Procureur du Roi (Juge de la Jeunesse) ;
intervention dans les écoles pour les élèves
considérés comme ingérables.
Participation à la CAS : participation au
projet Pass scolaire : contrôle en rue des jeunes et
|
collaboration avec les acteurs scolaire et communal dans les
échanges d'informations (fréquentation scolaire du jeune,
comportement et résultats scolaires).
|
L'acteur communal, l'Antenne Accrochage Scolaire du
PSSP
|
Collaboration (échanges d'informations et
complémentarité dans l'action sociale visant la
réinsertion du jeune dans une école) avec des partenaires
incontournables, le Parquet de Mons (ave les criminologues) et la Police car se
sont eux qui contrôlent les jeunes et reçoivent les plaintes :
collaboration avec le CPMS et les écoles (informations sur le suivi des
dossiers) ; dans le cadre de projet pédagogique, l'AAS échange
des informations avec l'AMO.
Gestion de la CAS : Réunit les acteurs
traitant le DS, diffuse des informations sur les
|
nouveaux décrets et présente des acteurs sociaux en
vue d'établir des collaborations éventuelles (répond
à ses objectifs stratégiques).
|
Pour répondre à leurs missions, les
différents acteurs collaborent, échangent des informations ou
participent à des projets bien spécifiques avec les organisations
qui répondent au mieux à leurs intérêts. En ce qui
concerne les collaborations avec les acteurs en général, nous
avons soulevé que les différents acteurs fonctionnent sur des
logiques contractuelles. Ce qui distingue les acteurs dans notre analyse, ce
sont leurs missions, leurs limites, leurs perceptions des autres acteurs qui
traitent le décrochage scolaire. Chacun va privilégier des
services qui répondent au mieux à ses intérêts, ses
objectifs et son idéologie du travail social.
Les intérêts des différents acteurs qui
participent à la CAS sont sensiblement communs : l'éducateur
scolaire y cherche des outils, des informations (décrets, nouvelles
lois), des contacts avec d'autres organisations pour aborder au mieux le
décrochage scolaire ; le CPMS y participe pour établir des
partenariats et s'insérer dans des projets qui rencontrent au mieux ses
objectifs (création d'un outil pédagogique destiné au
école) ; l'AMO adhère également à la
création de l'outil pédagogique dans le cadre d'une
sous-commission ; elle participe à la CAS pour identifier les
compétences et les fonctionnements des autres acteurs ainsi, pour
obtenir une vision globale de la problématique abordée,
défendre ses idées afin de les étendre sur le territoire
louvièrois ; le SJF y participe pour favoriser les collaborations avec
les acteurs scolaires et adhère au Pass scolaire pour obtenir davantage
d'informations sur les élèves ; en gérant la CAS, l'AAS
répond à ses objectifs en établissant des contacts entre
les différents acteurs et en élaborant des projets visant
à diminuer le décrochage scolaire. Enfin, précisons que
l'AMO n'adhère pas au projet du Pass scolaire faisant office de
contrôle social. L'acteur issu du milieu associatif s'inscrit davantage
dans l'optique des Droits des jeunes et travaille à la demande de son
public cible. En revanche, le Pass scolaire est utilisé par les acteurs
scolaire, communal148 et judiciaire qui axent leur travail sur le
binôme préventionrépression pour accrocher le jeune en
difficulté.
148Il existe une ambigüité quant au
rôle de l'acteur communal. En effet, l'AAS ne sanctionne pas
«directement» l'élève. Le service utilise des moyens de
pression (la loi répressive) pour responsabiliser le jeune. En
collaborant et en faisant des retours sur certains dossiers (le jeune
étant informé de la démarche) aux acteurs judiciaires (le
SJF et les criminologues du Parquet de Mons), l'élève, en
fonction de ses démarches personnelles et des efforts fournis pour
intégrer une école, sera ou ne sera pas réprimandé
ou sanctionné (est-il en danger ou dangereux pour la
société ? ) par les acteurs judiciaires.
Logique de solidarité fusionnelle :
|
L'acteur scolaire, l'école technique
subventionnée
|
Collaboration privilégiée avec l'AAS et le CPMS
axée sur l'efficacité (l'intervention rapide est capitale pour
accrocher l'élève) ; le professionnalisme (importance du retour
d'information, répondre à la demande) ; la motivation et
l'investissement des partenaires. Dans le cadre de la CAS, les membres se
centrent sur l'épanouissement du jeune ; sur la conviction que pour
combattre le DS, les participants doivent aller dans le même sens (sans
cette conviction, il ne sert à rien d'y participer).
|
L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO
Transit
|
La collaboration est une valeur incontournable, de même que
l'envie de réaliser un projet et de s'impliquer.
|
L'acteur judiciaire, le Service Jeunesse et
Famille
|
Le besoin de travailler en partenariat ; c'est la cohésion
qui permettra de faire face au décrochage scolaire ; il faut travailler
dans l'intérêt du jeune. Le partenaire privilégié
est l'AAS parce qu'il garde son indépendance et son professionnalisme
par rapport au réseau de l'accrochage scolaire.
|
L'acteur communal, l'Antenne Accrochage Scolaire du
PSSP
|
L'envie de travailler en collaboration, de se connaître
et d'élaborer des méthodes qui visent l'efficacité par la
complémentarité avec les intervenants sociaux (cela évite
de se cacher derrière le secret professionnel).
|
Commentaires :
Nous pouvons noter que la CAS génère des
logiques de solidarité fusionnelle : les acteurs soulèvent, en
effet, des valeurs communes comme la collaboration (influencer les missions de
chacun), la complémentarité (tant au niveau des suivis des jeunes
que de la mise en place des projets), l'efficacité, l'envie de faire
quelque chose avec des partenaires sociaux pour aider le jeune et les familles
en difficulté. L'un des objectifs149 communs est donc le
bien-être du jeune. Les acteurs ont conscience qu'il faut travailler avec
les différents services et se réunir autour d'une table pour
traiter la problématique. Dès lors, selon les acteurs, les
réunions de concertation sont capitales pour atteindre ces objectifs.
Ces logiques de solidarité fusionnelle se fondent sur des valeurs
communes (le bien-être du jeune, etc.) et sur des croyances telles que
«l'union fait la force». Par ailleurs, notons que l'acteur scolaire
est le partenaire privilégié des acteurs scolaire et judiciaire :
ces derniers mettent en évidence le professionnalisme et
l'efficacité de l'AAS. En revanche, l'AMO est l'acteur le plus
«marginalisé» dans les collaborations parce que, d'une part,
il ne s'inscrit pas dans relations qui visent le contrôle social du jeune
et, d'autre part, il est mal vu par les écoles d'interpeller les Droits
des Jeunes.
149Un autre objectif commun aux acteurs communal,
scolaire et judiciaire est de contrôler les jeunes à l'aide du
Pass scolaire. Cet outil, selon le CPMS consiste à concevoir des normes
communes avec les différents acteurs qui adhèrent au projet
(annexe 3, p. 19).
Logique de solidarité affective :
|
L'acteur scolaire, l'école technique
subventionnée
|
La CAS : lieu où l'on fait partie d'un groupe ; un lieu
décontracté où l'on rigole ; impression de se
connaître de longue date ; crée des liens (noue des partenariats)
et favorise le travail avec les membres en présence.
|
L'acteur issu du milieu associatif, l'AMO
Transit
|
Aime collaborer avec les personnes connues car cela permet de
travailler dans une certaine transparence (confiance). Exemple : relation
privilégiée, construite avec le temps, avec l'éducateur de
l'AAS.
|
L'acteur judiciaire, le Service Jeunesse et
Famille
|
La CAS permet de mieux se connaître et
d'améliorer le travail social entre les différents membres et
crée des liens affectifs et des affinités : déstygmatise
l'image de la Police (répression et prévention) et favorise les
collaborations avec certains acteurs scolaires.
|
L'acteur communal, l'Antenne Accrochage Scolaire du
PSSP
|
A force de se fréquenter, les acteurs se connaissent de
longue date ; création des liens privilégiés favorisant
les collaborations avec les intervenants sociaux (échanges de dossiers
et d'informations) ; grâce à ces liens, on ne se cache plus
derrière le secret professionnel et les actions sont plus ciblées
(optimalisant le suivi socio-éducatif).
|
Commentaires :
Nous constatons que la CAS est un lieu qui favorise les
rencontres entre les acteurs du champ de l'accrochage scolaire. La CAS permet
de réunir ces personnes dans un contexte «convivial» et de
créer ainsi des affinités, des liens privilégiés se
construisant au fil du temps. Selon certains acteurs, ces liens optimalisent
les collaborations dans les suivis socio-éducatifs des jeunes en
difficultés.
Ce type de solidarité a intensifié les relations
entre l'AMO et les CPMS ; a amélioré l'image de la Police
auprès des intervenants sociaux ; a favorisé l'échange
d'informations sur certains dossiers entre les acteurs communal, scolaire et
judiciaire et, selon l'AAS, a permis de ne plus se cacher derrière le
secret professionnel150.
150Le secret professionnel n'a pas été
abordé dans notre étude. Cette question vaudrait d'être
approfondie au regard des logiques de solidarité.
4 Résultats et interprétation de la
participation des différents acteurs à la Commission Accrochage
Scolaire
L'acteur scolaire, l'école technique
subventionnée
|
Force: Pour l'éducateur la CAS a permis
de s'enrichir et d'obtenir des réponses à certaines questions
liées au DS ; d'avoir des pistes face à la problématique
et d'obtenir
|
des informations pour faciliter le travail. Remarque :
En ce qui concerne la légitimité de la coordination de
la CAS gérée par l'AAS, l'éducateur note que les membres
de
|
l'AAS savent de quoi ils parlent et font de leur mieux ; qu'ils
sont confrontés au DS en présentant des exemples concrets.
|
Force : Pour le CPM la CAS a facilité la
construction de partenariats, d'outils et de procédures pour traiter le
DS ; la création de nouveaux liens avec les médiateurs
|
scolaires, l'AAS et la Police (perspectives de partenariat) ;
une meilleure connaissance des missions de chacun ; l'humanisation des
relations professionnelles ; la formation d'un groupe de réflexion et
de travail (création d'un outil pédagogique ; création de
normes communes à partir du projet Pass scolaire). Rassemblement des
différents acteurs traitant le décrochage scolaire ;
création de projets communs et innovants. Remarque : En
ce qui concerne la légitimité de la coordination de la CAS par
l'AAS :
|
les travailleurs de l'AAS sont perçus comme ayant une
connaissance approfondie du territoire louvièrois, du réseau et
des différents services sociaux (connaissances importantes pour la
gestion de la CAS); l'assistant social considère que le Service de
l'Aide à la Jeunesse, excentré de La Louvière, ne serait
pas à même de gérer la CAS car cette mission
nécessite d'être au plus proche du terrain.
|
Faiblesse : Les projets demandent de temps et de
l'investissement ; l'impression de perdre de vue les objectifs et de se noyer
dans différents projets et des détails
|
organisationnels. Proposition : Eviter les
objectifs à long terme car ils sont difficilement réalisables
pour des questions d'organisation ; se montrer plus modeste dans la
|
définition de certains objectifs; réaliser les
objectifs dans un délai raisonnable.
|
L'acteur issu du milieu associatif, l'Aide en Milieu
Ouvert : l'ASBL Transit
|
Force : A permis de diminuer les tensions avec
l'acteur communal du PSSP ; d'identifier les acteurs locaux ; d'influer sur les
perceptions du DS ; d'activer des services
|
compétents en fonction de la situation du jeune ;
d'intensifier la collaboration avec les CPMS et de s'inscrire dans des projets
en lien avec les missions du service. Remarque : En ce qui
concerne la légitimité de la coordination de la CAS par l'AAS :
c'est le service le mieux placé pour la gérer, c'est son
rôle de coordonner la CAS.
|
Faiblesse : Etre attentif aux différentes
attentes des acteurs : certains risquent de s'exclure s'ils n'adhèrent
pas à tel ou tel projet.
|
L'acteur judiciaire, le Service Jeunesse et
Famille
|
Force : A permis d'obtenir des informations sur
le DS, d'échanger avec les différents acteurs ; d'identifier les
intervenants sociaux (cela influe sur la perception de la
|
gestion du DS, rencontre avec la DGEO, les équipes
mobiles, le SAS) ; d'être mieux accepté par les membres de la CAS
(une meilleure image de la Police) ; de créer un langage commun ; de
faciliter les collaborations et d'obtenir des informations sur les
décrocheurs grâce au Pass scolaire, de faciliter le travail sur le
terrain.
|
Faiblesse: Risque de mettre en chantier des
projets trop lourds qui demandent un investissement tel de la part des membres
de la CAS que certains renoncent à s'y
|
impliquer. La légitimité de la coordination
de la CAS par l'AAS : elle a une disponibilité, les moyens pour
coordonner et elle est bien implantée sur le territoire.
|
L'acteur communal, l'Antenne Accrochage Scolaire du
PSSP
|
Force : A permis de démystifier les
autres organisations en présentant les fonctions de chacun. De cibler
les besoins de chaque acteur et ceux des jeunes en DS; de
|
chercher des outils pour traiter la problématique ; de
créer des partenariats ; de développer des relations de confiance
; viser une plus grande efficacité dans les interventions sociales en
mettant en place des actions concrètes; s'insérer au sein d'un
réseau pour travailler activement sur le phénomène ;
d'initier à un groupe de travail et d'y participer ; de changer certains
modes de fonctionnement des différents services sociaux.
Remarque : L'AAS jouit d'une certaine
crédibilité auprès de ses partenaires parce qui
soulèvent son professionnalisme et sa cohérence dans le
travail.
|
Faiblesse : La crédibilité de la
CAS est néanmoins fragilisés par les changements organisationnels
du service, les partenaires risquent de ne plus y voir très clair.
Des
|
clarifications sur ces changements sont inscrites dans l'agenda
de la CAS (à suivre...).
|
Commentaires :
Comme nous l'avons soulevé dans les pages
précédentes, la CAS génère différentes
logiques de solidarité. Selon nos constats, on peut dire que la CAS
répond aux besoins des acteurs et influe sur leurs perceptions du
problème. Ces perceptions génèrent des logiques de
solidarité conditionnelle, contractuelle, fusionnelle et affective.
Ces logiques relèvent des aspects positifs
abordés dans le chapitre précédent et le tableau ciavant.
De ce fait, nous ne reviendrons pas sur ce sujet. En revanche, nous allons nous
intéresser à la légitimité et aux faiblesses de la
CAS.
La légitimité de l'AAS :
L'AAS est reconnue par les participants que nous avons
interviewés.
Pour l'acteur scolaire, l'AAS est perçue comme un
service ayant une connaissance approfondie du territoire louvièrois, du
réseau et des différents services sociaux (connaissances
importantes pour la gestion de la CAS) ; tout comme l'acteur judiciaire,
l'acteur scolaire considère que le Service de l'Aide à la
Jeunesse, excentré de La Louvière, ne serait pas à
même de gérer la CAS car cette mission nécessite
d'être au plus proche du terrain. De son côté, l'acteur
judiciaire souligne la disponibilité et les moyens de l'AAS pour la
gestion de la Commission.
L'AMO considère également que l'AAS est le
service le mieux placé pour la gérer, dans la mesure où le
Plan Stratégique de Prévention et de Sécurité a
ciblé le décrochage scolaire pour prévenir voire diminuer
la délinquance sur le territoire. L'AAS a une légitimité
légale octroyée par le Ministère de l'Intérieur
pour animer la Commission. Pour le directeur de l'AMO151, si les
écoles géraient ce type de Commission, cela ouvrirait d'autres
perspectives pour les projets et dans la dynamique de travail, l'école
ayant une autre perception que l'AAS du PSSP.
Outre l'assise légale et la légitimité
donnée par ses partenaires à l'AAS en tant que gestionnaire de la
CAS, les intérêts, les valeurs et les affinités des
différents acteurs renforcent la position de l'AAS dans son rôle
de coordinateur.
151Il aurait été intéressant de
relancer des questions sur ce sujet pour obtenir davantage
d'éléments qui auraient pu enrichir notre étude.
Les faiblesses :
Le CPMS, le SJF soulèvent qu'il faut éviter
d'élaborer des projets qui demandent une part d'investissement
importante. En effet, les projets doivent être raisonnables et
réalisables tout en prenant en considération les limites
organisationnelles de chaque acteur.
L'AMO souligne qu'il faut être attentif aux organisations
qui ne s'inscrivent pas dans des projets de la CAS, cela risquerait de les
exclure.
Quant à l'AAS, sa crédibilité
auprès des participants au sein de la CAS est un enjeu réel. En
effet, de nombreux changements organisationnels intervenus récemment
durant l'année empêchent l'AAS de s'impliquer dans des projets et
dans la gestion des réunions. Dans ce contexte, les partenaires risquent
de discréditer l'AAS et, par conséquent, la CAS.
5 Retour à nos objectifs de recherche
Au début de notre étude, nous avons posé
comme hypothèse (premier objectif de recherche) que les perceptions de
la gestion du décrochage scolaire et les logiques de solidarité
des acteurs scolaire, communal, judiciaire et issu du milieu associatif sont
influencées par l'organisation à laquelle ils appartiennent.
Si nous prenons en considération notre
échantillonnage152 et les résultats de nos analyses,
nos observations vont dans le sens de notre hypothèse. En effet, les
perceptions des différents acteurs sont influencées par les
objectifs et les limites de leur organisation qui balise leurs actions. Pour
atteindre certains objectifs, les acteurs créent des logiques de
solidarité en collaborant avec d'autres intervenants sociaux.
Aussi, à titre exploratoire nous avons soulevé
comme question de recherche : (1) comment la CAS traite la diversité des
organisations qui y participent et (2) comment influence-t-elle leur logique de
solidarité et leur perception de la gestion du décrochage
scolaire ?
(1) Si nous nous référons aux discours de
l'acteur communal, l'AAS, les acteurs sont traités comme des ressources
locales susceptibles d'infléchir le sentiment d'insécurité
et du décrochage scolaire sur le territoire louvièrois
(«chacun apporte sa pierre à l'édifice contre le DS»)
en élaborant des projets spécifiques (ex : le Pass scolaire, la
création d'un outil
152Cette hypothèse est valide pour notre
échantillonnage. Cependant, nous ne pouvons pas la
généraliser. En effet, pour généraliser notre
travail il aurait fallu étendre notre échantillonnage vers
davantage d'acteurs scolaires, judiciaires, communaux et issus du milieu
associatif.
pédagogique destiné aux écoles) tout en
prenant en considération les intérêts de chacun autour
d'enjeux partagés. Ce constat répond aux objectifs
stratégiques de l'AAS. La CAS ressemble à un petit marché
qui réunit certains acteurs scolaires, communaux, judiciaires et issus
du milieu associatif qui cherchent à s'outiller, à s'informer,
à créer de la complémentarité avec d'autres
partenaires pour, dès lors, s'inscrire dans des actions qui
correspondent au mieux aux intérêts de leur organisation.
(2) Comme nous l'avons vu, la CAS génère des
logiques de solidarité conditionnelle, contractuelle, fusionnelles et
affective. Nous avons relevé que les différentes logiques peuvent
s'imbriquer les unes dans les autres. En effet, la solidarité
conditionnelle constitue le socle commun à tous les acteurs et influe
sur d'autres logiques de solidarité. Les acteurs adhérent non
seulement à ces réunions de concertation mais aussi à un
groupe de professionnels sensibles à l'importance de s'outiller, de
s'informer, de connaître les intervenants sociaux jouant un rôle
dans le processus de réinsertion sociale du jeune et dans le soutien des
familles. Dans les faits, aucun acteur n'est dans l'obligation de s'inscrire
à la Commission Accrochage Scolaire, c'est un acte volontaire qui a pour
objectif de collaborer avec d'autres professionnels (vu la complexité de
la problématique, on ne peut travailler seul, on a besoin des autres)
dont on reconnaît la complémentarité. Nous avons vu
également que les intérêts des membres de la CAS sont
variés et influencent leurs actions, selon leur position et les
objectifs de leur organisation. Dans les faits, les acteurs s'inscrivent dans
des projets et des collaborations proches de leurs missions et de leur
idéologie de travail. Cette dynamique d'action représente une
importante logique de solidarité contractuelle. Les acteurs
interviewés ont conscience de l'orientation de leur action. En effet, le
besoin de collaborer (dicté, pour partie, par les missions et limites
d'intervention inhérentes à chaque opérateur) pour le
bienêtre des usagers (le jeune et sa famille) est une convergence que
l'on retrouve chez tous les acteurs interviewés ; ils s'inscrivent,
dès lors, dans une logique de solidarité fusionnelle (on retrouve
également comme valeurs communes : le bien-être du jeune et des
familles ; la crédibilité ; la complémentarité ; la
collaboration ; une bonne communication ; l'efficacité ;
l'immédiateté, l'orientation, ...).
Dans ce contexte, malgré la présence de
différentes organisations au sein de la CAS, des divergences,
liées à leur position institutionnelle et à leurs
missions, existent entre les opérateurs. Néanmoins, celles-ci ne
débouchent pas sur le conflit ou des tensions entre les institutions
mais sur la complémentarité dans l'action sociale. Comme nous
l'avons soulevé dans notre analyse, en effet, la CAS a permis
d'atténuer les tensions entre l'acteur issu du
milieu associatif et l'acteur communal. La CAS a
également modifié, chez les différents intervenants
sociaux, l'image de la Police locale. Ce lieu de concertation est aussi un lieu
qui génère des habitudes, de la convivialité et des liens
professionnels privilégiés ; on y travaille dans une transparence
encouragée par cette relative familiarité. En outre, la logique
de solidarité affective renforce les liens entre les acteurs de la CAS
et facilite les actions sur le terrain en fonction des réalités
de chacun. De ce constat, nos analyses vont dans le sens où la
Commission Accrochage Scolaire influence les perceptions de la gestion du
décrochage scolaire des acteurs qui y participent.
6 Critique sur la méthode
Avec du recul, les questions que nous avons posées aux
différents acteurs se sont davantage orientées vers la CAS (cela
explique l'abondance de données recueillies sur ce sujet). Ce constat
nous empêche de nuancer les logiques de solidarité qui
émanent de la CAS aux logiques d'actions issues des collaborations
quotidiennes des acteurs.
En ce qui concerne les entretiens, nous aurions pu, en
fonction des réponses de l'acteur (comme par exemple sur leur vision
personnelle du décrochage scolaire, sur le secret professionnel, sur
l'absence de certains acteurs au sein de la CAS...) relancer des questions
ponctuelles pour enrichir nos données. Aussi, il aurait
été pertinent d'interviewer des acteurs qui ont participé
à la CAS et qui n'y adhèrent plus afin d'établir une
analyse comparative avec ses adhérents. Pour les outils mobilisés
et notre méthode de travail, il faut bien avouer que ce fut difficile de
procéder par des copier/coller pour intégrer les discours des
acteurs. Nous avons donc procédé à une lecture
segmentée par nos thématiques et intégré des
résumés respectueux des discours. En intégrant ces
résumés nous avons eu le souci de respecter le volume de pages
imposé à notre étude. Cependant, cette condition nous
à contraint à renoncer à intégrer les extraits de
discours avec, pour conséquence, une perte de richesse des
données.
7 Retour aux cadres théoriques
(1) Si nous nous référons au tableau de Guy
Bajoit153 relatif aux logiques de solidarité expressive et
instrumentale construites sur le passé et sur l'avenir, nous relevons
dans notre analyse que les différents acteurs qui participent à
la CAS sont liés par plusieurs formes de solidarité à la
fois (affective, conditionnelle, fusionnelle et contractuelle). De ce fait,
d'après
153Nous renvoyons nos lecteurs vers le chapitre 3 de
notre étude, p. 44.
l'auteur, ces différents groupes sociaux
établissent des relations solides qui sont les ciments de l'entraide
sociale entre les acteurs. Aussi, nous avons constaté que ces logiques
se superposent et se complètent comme une «corde
tressée154». Même si nous retrouvons les quatre
logiques entre les acteurs comme une «force», celle-ci risque
néanmoins d'être éphémère. En effet, si nous
nous référons aux discours de l'assistant social qui gère
la CAS (lieu de concertation qui influe sur les autres acteurs présents
à la CAS), les changements organisationnels peuvent
générer une perte de crédit du service vis-à-vis
des autres opérateurs et pourrait, dès lors, influer sur les
autres logiques de solidarité155. Malgré les liens qui
soudent les membres de la CAS, si une tresse (une logique de solidarité)
se détache de la corde dans quelle mesure les autres logiques ne
risquent-t-elles pas de se détériorer ?
2) Aujourd'hui, selon nous, il ne suffit plus de baliser les
acteurs par des Décrets156, il faut aussi réinventer
de nouvelles solidarités entre les opérateurs. Celles-ci ne
s'inscrivent-elles pas dans les stratégies du nouveau
référentiel politique (l'ESA) qui tente de préserver sa
crédibilité auprès des électeurs en prenant en
considération les problèmes locaux et en prônant davantage
d'efficacité sur le terrain ? Le Ministère de l'Intérieur,
en encourageant la coordination horizontale des différents
opérateurs du champ de l'accrochage scolaire (réunions de
concertation gérées par l'AAS), favorise, d'une part, la
formation d'un groupe multidisciplinaire de professionnels possédant une
bonne connaissance du contexte local et, d'autre part, l'établissement
d'objectifs spécifiques prenant en considération les
intérêts de chacun autour d'enjeux partagés. La
proximité des acteurs crée des affinités, des perceptions
nouvelles du travail social où l'individu, à partir de ses
compétences professionnelles, peut influer sur des logiques d'actions
dans le cadre de son travail ; cette dynamique a pour effet de renforcer les
relations entre les acteurs issus de différents secteurs pour traiter la
problématique du décrochage scolaire. De plus, comme nous
l'exposions au premier chapitre de notre étude, l'Etat Social Actif veut
activer les décrocheurs afin de les intégrer dans le
marché de l'emploi. Or notre analyse fait état des limites et des
difficultés des acteurs à répondre à la
problématique du décrochage scolaire. Les acteurs scolaires et
issus du milieu associatif relèvent le manque de moyen pour financer les
écoles et les projets favorisant la gestion et l'accrochage scolaire des
jeunes en difficulté au sein de leur école.
154Expression utilisée par Guy Bajoit pour
définir la solidité des relations entre les acteurs.
155Nous avons relevé le même constat
dans notre premier chapitre relatif au décrochage scolaire sujet de
contrôle et d'insécurité (p.14-16). Nous avons
soulevé d'une part, les conséquences des changements
organisationnels et, de l'autre, la précarité du statut de
l'opérateur communal, contraint de devoir remplir ses missions dans un
cadre de travail pour le moins instable.
156Nous l'avons vu dans les pages
précédentes : outre l'adhésion aux prescriptions des
Décrets, il faut que les gens se rencontrent et s'engagent à
collaborer concrètement avec les différents acteurs.
Pour le directeur d'école :
«...l'objectif final quand même de la Communauté
et de la D Plus est double : c'est qu'on n'aime pas de voir les gens dans les
rues euh...parce que ce n'est pas là qu'ils doivent se trouver ...
d'abord parce que moi, je crois c'est quand même pour le pouvoir
politique ce n'est pas bien vu pour les électeurs, on associe ça
à la délinquance et au sentiment d'insécurité. Euh
comment ...Le rôle de l'école est de plus en plus pénible,
les élèves sont de plus difficiles à gérer et on ne
nous donne pas les moyens de les garder. Moi, je veux bien garder tous les
élèves difficiles tant que j'ai les moyens de les encadrer dans
le cadre de l'école ...Un élève, bien souvent, il n'a plus
la volonté d'étudier. Alors, ça, c'est des questions de
motivation qui peuvent être multiples. La raison aussi qu'on a une
génération d'enfants rois qui arrive ici, auquel on a tout
octroyé sans effort. Derrière ça, c'est de dire, ben,
euh...il faut d'abord leur redonner le goût de l'effort. Lorsqu'on pense
à certaines circulaires d'il y a une dizaine ou 15 ans, qui disait pour
x raison sociale, c'est idiot dans le sens où on habitue le jeune
à ne pas travailler à intégrer individuellement
l'étude, il y a bien un moment où il faut se mettre seul devant
son travail157.
Pour le directeur de l'AMO : « On
identifie que c'est un problème d'avenir, que les jeunes sont souvent en
contact avec des gens qui sont au chômage et qui ne travaillent plus de
longue durée qui leur disent que ça ne sert à rien ».
Donc, on va leur parler de ça, c'est que, s'ils veulent s'en sortir
c'est quand même l'école qui est le meilleur moyen. Mais j'ai
jamais rencontré ça, hein. J'ai rencontré tout un
réseau de plusieurs profs qui bougeaient, ce que j'ai rencontré
c'est des acteurs qui avec un peu plus moyens pour l'école alors je
ferai autre chose donnez-moi encore plus de moyens et alors je pourrai agir
dessus158 ».
Faut-il créer autant de dispositifs d'accrochage
scolaire en sachant que les acteurs sont dépassés par la
problématique ? Ne serait-il pas intéressant de se pencher sur
des études qui proposent des pistes favorisant un réel accrochage
scolaire qui s'intéresse au jeune et à son apprentissage ? Dans
le cadre d'un colloque159 et en s'inspirant de Walzer (1997), V.
Dupriez (2008) relève qu'il est dans l'intérêt
de la collectivité d'investir dans les écoles
qui travaillent en milieu précaire et défavorisé qui
regroupent une concentration d'élèves en difficultés. En
effet, outre les politiques compensatoires (aides financières, ex : D+,
voir p.22), il est de la responsabilité du système
éducatif d'optimaliser les chances des jeunes pour intégrer le
marché du travail « en garantissant l'acquisition pour tous d'un
socle de savoirs de base et culture commune, condition indispensable à
l'épanouissement de chacun à la qualité de la vie
collective et à la cohésion sociale160 ». Pour
atteindre cet objectif, V. Dupriez, suggère de s'inspirer de
l'expérience aux Etats-Unis du «Whole school program» (projet
d'encadrement différencié). Celui-ci propose de cibler les
écoles travaillant dans des milieux précaires et d'oeuvrer sur
différents paramètres : les infrastructures (lieu de sens et de
repérage important pour les jeunes et le quartier), le matériel
pédagogique, attirer les meilleurs directeurs et enseignants, un suivi
des apprentissages piloté sur base d'indicateurs (évaluation
externe tous les deux ans). Cette approche pourrait déclencher une
dynamique positive chez les jeunes, aux écoles de la C.F et à la
collectivité.
157Voir annexe 3, l'acteur scolaire, p.22.
158Voir annexe 2, l'acteur issu du milieu associatif,
p. 4 : L. 136-142.
159Colloque du 28 octobre Van inspiration day 2008 :
vers un socle de compétences ? Quelle école dans quelle
société ? En ligne
http://www.vanin.be/vanin
master/page.aspx?pid=489 consulté en décembre 2008.
160Ibid., plan de présentation du discours de
Vincent Dupriez dans le cadre du colloque Van inspiration day 2008.
8 Perspective
Si nous devions poursuivre notre étude, nous
mobiliserions deux cadres théoriques avec deux approches
spécifiques. Premièrement, dans une approche structurelle, nous
aurions recours au
cadre théorique de Hollyngsworth et Boyer161
(1997). Ceux-ci proposent une typologie oül'on retrouve cinq
formes de coordination de l'action, à savoir : l'Etat, le marché,
le réseau,
les organisations et les communautés. L'outil permet de
développer une analyse structurelle et institutionnelle qui aurait pour
but de montrer la complexité et la diversité des formes de
coordination entre les différents acteurs du champ de l'accrochage
scolaire. Cette approche permettrait d'analyser les différentes
modalités de coordination en se penchant sur la typologie des auteurs.
Pour ces derniers, les réseaux, les alliances stratégiques
faisant office de partenariat et les formes d'ententes entre les acteurs
sociaux sont des mécanismes hybrides qui peuvent être
situés dans leur schéma.
Deuxièmement, d'après notre étude, les
différents acteurs scolaires, communaux et judiciaires traitant le
décrochage scolaire adhérent au projet du Pass
scolaire162 (développé au sein de la CAS). Ce projet a
construit des normes communes entre ces différents acteurs qui
correspondent à leurs besoins et s'inscrivent, entre autre, dans une
logique de contrôle social. Ici, dans une approche active, il s'agirait
d'observer (à partir d'un échantillonnage plus important) comment
les différents acteurs scolaires, communaux et judicaires mettent en
place cette collaboration, les difficultés, conflits ou tensions qui
peuvent en découler. L'idée est de dégager les formes et
les limites que la collaboration peut avoir au sein de la CAS autour du Pass
scolaire. Concrètement, nous pourrions utiliser la typologie des
partenariats conçus par les sociologues Lise Demailly & Juliette
Verdière163. Les auteurs proposent des modalités de
coopération qui tournent autour du degré de partage des objectifs
entre les partenaires et des conditions de mise en oeuvre164.
161Nous retrouvons le cadre théorique de ces
auteurs dans les cours de Dupriez, V. (2007- 2008). Analyse sociologique
des organisations socio-éducatives. FOPM 2002, UCL, FOPA
162Marie Arena (2006) : « Des
expériences formidables ont été réalisées
avec les agents de prévention et de sécurité. A La
Louvière par exemple, les écoles ont signé des conventions
avec la commune afin de lutter contre l'absentéisme. L'école,
dans son règlement d'ordre intérieur, a élaboré un
système de cartes dont la couleur informe sur l'autorisation
éventuelle, donnée par les parents, de quitter
l'établissement pendant la journée. Les agents, lorsqu'ils
croisent des jeunes dans la rue, leur demandent donc ce document et les
renvoient éventuellement à l'école...de telles mesures ne
sont pas policières. Il ne s'agit pas d'un contrôle
d'identité, mais de rappeler à l'enfant la règle
établie par son autorité parentale. Nous encourageons de telles
initiatives. » En ligne
http://www.philippefontaine.be
163D'après une étude de Lise Demailly
& Juliette Verdière : les limites de la coopération dans
les partenariats en ZEP. Ville-école-Intégration,
n°117, juin 1999.
164Nous retrouvons la typologie des auteurs en annexe
1.
Conclusion générale
Dans la présente étude, nous avons tenté de
démêler l'écheveau des aides multiples en matière de
décrochage scolaire sur le territoire louvièrois.
Nous avons vu que l'Etat Social Actif légitime des
dispositifs dont le but est «d'activer» les «décrocheurs
sociaux» ; l'idée étant de leur donner toutes les chances
d'entrer dans le marché de l'emploi, devenant ainsi des agents actifs
contribuant aux ressources de financement traditionnelles de la
sécurité sociale.
Pour répondre aux problèmes sociaux locaux, le
Ministère de l'Intérieur finance les Contrats de
Sécurité et de Prévention pour d'une part, être plus
«proche» (pour plus de contrôle et de sécurité)
du citoyen et des réalités de terrain des opérateurs
traitant le décrochage scolaire et, d'autre part, créer une
solidarité entre les différents acteurs sociaux autour d'une
problématique commune.
Pour saisir les différents leviers de cette
solidarité socio-professionnelle qui lie spécifiquement les
acteurs que nous avons rencontrés, nous avons mobilisé la
typologie des logiques de solidarité du sociologue Guy Bajoit,
elle-même inspirée en partie de la typologie des formes de
l'action selon Max Weber. Nous avons construit des outils
méthodologiques pour confirmer ou infirmer notre hypothèse de
départ, à savoir : les perceptions de la gestion du
décrochage scolaire et les logiques de solidarité des acteurs
scolaire, communal, judiciaire et issu du milieu associatif sont
influencées par l'organisation à laquelle ils appartiennent.
Pour répondre à notre hypothèse, nous
avons récolté des données qualitatives (entretiens
semi-directifs auprès des acteurs interviewés) pour ensuite
analyser et traiter les résultats à l'aide d'une matrice
conçue pour l'occasion. Ceci nous a permis de dégager les
perceptions de la gestion du décrochage scolaire et les logiques de
solidarité des différents acteurs scolaires (l'école et le
CPMS), communal (l'AAS du PSSP), judiciaire (SJF de la Police) et issu du
milieu associatif (l'AMO). Les résultats soumis à notre analyse
nous ont d'abord permis d'observer que les perceptions de la gestion du
décrochage scolaire et les logiques de solidarité des acteurs
sont influencées par l'organisation à laquelle ils appartiennent.
Ces différentes observations vont dans le sens d'une confirmation de
notre hypothèse.
Revenons à la question du contrôle social
évoquée plus haut. Nous avons relevé que le Pass scolaire
mobilise bon nombre de partenaires. Le succès de cet outil
révèle bien toute l'ambiguïté (prévention vs
répression ; solidarité sociale vs contrôle social)
vécue par des travailleurs sociaux guidés par une logique de
contrôle, de moins en moins déguisée, d'une population
stigmatisée (décrochage scolaire, précarité...).
En somme, les logiques de solidarité entre les acteurs
que nous avons interviewés ont renforcé le contrôle social
des «jeunes en difficultés». Sur ce point, un des acteurs,
toutefois, fait exception : en effet, l'AMO, qui prône les Droits des
jeunes, s'isole par rapport aux écoles soucieuses de protéger
leur réputation et aux autres acteurs s'inscrivant davantage dans le
contrôle social. Il est plus facile pour les écoles de collaborer
avec l'acteur communal ou judiciaire car celui-ci répond sur-le-champ
à la demande (renvoyer le jeune au sein de l'école ou l'orienter
vers des services compétents pour des suivis socio-éducatifs).
Dès lors, l'acteur issu du milieu associatif s'inscrit et collabore dans
des projets qui correspondent (l'acteur communal rencontre un nombre important
de jeunes pour participer à des activités sportives...) au mieux
à ses objectifs tout en justifiant ses actions auprès de sa
hiérarchie.
Pour terminer, ce travail nous laisse perplexe quant à
la manière d'agir sur le problème du décrochage scolaire.
En effet, si l'on tient compte des difficultés et de l'aveu
d'impuissance face au décrochage scolaire formulés par les
acteurs interrogés, il nous est permis de nous interroger sur
l'efficacité de ces différentes collaborations.
Ainsi, nous rejoignons le point de vue du directeur de
l'établissement scolaire que nous avons questionné,
considérant qu'il serait plus pertinent d'octroyer des ressources
financières et humaines aux écoles pour y accrocher le jeune
plutôt que de créer une multitude de services
périphériques qui, in fine, sont dépassés par la
problématique et, de surcroît, tendent non seulement à
soustraire à l'école une part de son pouvoir d'action mais
également à « grignoter le coeur de son métier »
: l'apprentissage165.
Cette étude nous a permis de soulever l'influence des
réunions de concertation gérées par le Plan
Stratégique de Sécurité et de Prévention de la
Ville de La Louvière ainsi que ses limites. En tant qu'agent de
l'Antenne Accrochage Scolaire, nous sommes en position de
réfléchir à l'orientation de la Commission Accrochage
Scolaire et aux sujets qu'elle aborde avec les intervenants sociaux.
165Le lecteur peut revenir sur la critique
émise sur la construction du décrochage scolaire dans notre
premier chapitre, p. 17-18.
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Louvière : un pass scolaire pour lutter contre le décrochage
(06/12/2004).
www.altereduc.be.
Glossaire :
AAS
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Antenne Accrochage Scolaire
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AMO
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Aide en Milieu Ouvert
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AS
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Assistant Social
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CAJ
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Commission de l'Aide à la Jeunesse
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CAS
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Commission Accrochage Scolaire
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CF
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Communauté Française
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CS
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Contrat de Sécurité
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CPMS
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Centre Psycho-Médico-Social
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DGEO
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Direction Générale de l'enseignement Obligatoire
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DS
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Décrochage Scolaire
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ESA
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État Social Actif
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PPP
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Plan de Proximité et de Prévention
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PSSP
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Plan Stratégique de Sécurité et de
Prévention
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SAJ
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Service de l'Aide à la Jeunesse
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SAS
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Service Accrochage Scolaire
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SJF
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Service Jeunesse Famille
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SPJ
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Service de Protection de la Jeunesse
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