CONCLUSION GENERALE ET PRINCIPAUX ENSEIGNEMENTS
En conclusion, il s'est agi dans cette étude de
répondre à la question de savoir : en quoi les
réformes financières améliorent-elles la
rentabilité du système bancaire des pays de la
CEMAC ? Cette étude a été menée
en mesurant la rentabilité bancaire à travers deux
variables : la première lie la banque à son environnement
interne (rentabilité des actifs) et la seconde présente
l'influence de l'environnement externe liée à
l'intermédiation (la marge d'intérêt). La
méthodologie a consisté à utiliser en deux parties, des
outils à la fois documentaire, statistique et
économétrique.
La première partie a permis dans un premier chapitre
d'analyser les facteurs de la crise du système bancaire de la CEMAC, ce
qui a justifié la mise en oeuvre des réformes financières.
Le second chapitre a présenté le contenu et le bilan desdites
réformes sur le système bancaire des pays de la CEMAC. Comme
principaux résultats on note : la stabilité retrouvée
des banques et le respect des normes prudentielles. Pour y arriver, il a fallu
deux mouvements de restructurations bancaires. La première
hypothèse de l'étude est alors vérifiée :
l'influence des réformes financières sur la
stabilité des banques est positive en zone CEMAC. Mais la
faible implication des banques dans le financement des économies et la
contrainte des risques contrastent quelque peu ce résultat.
La deuxième partie quant à elle visait à
vérifier l'influence des réformes sur un point spécifique
de la stabilité du système : la rentabilité bancaire.
Ainsi, nous avons mesuré la rentabilité bancaire sur deux
volets : la rentabilité des actifs et les marges
d'intérêt. Le chapitre trois a ainsi étudié l'impact
des réformes financières sur la rentabilité des actifs.
Ayant estimé deux modèles (un avant les réformes et
l'autre après), l'évolution des coefficients a permis de
conclure. Comme résultat, on retient que les réformes
améliorent la rentabilité des actifs. La deuxième
hypothèse : les changements bancaires,
monétaires et institutionnels améliorent la rentabilité
des actifs du système bancaire de la zone CEMAC, est
vérifiée. En ce qui concerne la marge d'intérêt,
l'influence des réformes sur cette mesure est élaborée au
chapitre quatre. Force est de constater que ce travail académique est
parmi les premiers à notre connaissance dans la sous-région qui
met en évidence cette mesure de la rentabilité bancaire. En
dehors de l'ajout des conditions de banques, toutes les autres variables sont
identiques au premier modèle. Et comme résultats, les
réformes entreprises dans la zone améliorent progressivement les
marges d'intérêt bancaires confirmant ainsi la dernière
hypothèse de l'étude : les réformes
bancaires, monétaires et institutionnelles accroissent les marges
d'intérêt des banques des pays de la CEMAC.
Des deux parties, il ressort que les réformes
financières signées en 1990 et implémentées
à partir de 1994, ont eu un impact global et significatif sur le
système bancaire des pays de la CEMAC. Mais, il est importe aussi de
nuancer ces résultats au regard de l'implémentation et du timing
desdites réformes.
Ce travail pourra nécessiter d'autres études
futures liées par exemple à la détermination de la
durée optimale utile pour mesurer l'apport des réformes et aussi
au caractère de la réforme elle-même posant ainsi le
débat du gradualisme et de la thérapie des chocs.
En s'appuyant sur toutes ces conclusions, quelques
enseignements provisoires s'avèrent importants :
en premier lieu, il convient de consolider les acquis
y relatifs et poursuivre leur mise en oeuvre. A ce niveau, il serait
important de procéder à des évaluations continuelles et
sanctionner les banques qui fonctionneraient en marge des normes
établies. Adam Madji (1997), souligne que la réussite des normes
comptables appliquées dans la sous-région serait efficiente si
l'implication des Etats évolue ;
en deuxième lieu, il convient de renforcer le
processus de privatisation du capital et de la qualité de la gestion
dudit capital. La gestion du capital présente encore de nos
jours une influence négative sur la rentabilité bancaire en
général. De par sa valeur (-38,94036 dans l'estimation de
la rentabilité des actifs après les reformes), elle réduit
cette rentabilité. A ce niveau les gestionnaires de banques peuvent
mener une gestion au rendement des crédits, intégrer l'approche
fonds économique dans l'octroi des crédits. Pour ce qui est de la
privatisation, elle doit non seulement promouvoir l'initiative privée
dans la création et la gestion des banques, mais aussi viser la
multiplicité des services offerts par les banques. A ce niveau, les
réformes entamées visaient le retrait progressif des Etats dans
le capital des banques. Le but d'une telle mesure est la réduction du
risque de crédit qui affecte de façon significative la
stabilité bancaire. Pour mener à bien ce processus, les chefs
d'Etat des pays de la CEMAC peuvent créer et renforcer
financièrement les banques de développement qui jusqu'en 1985,
contribuaient aux grands investissements ;
en troisième lieu, il faut accroître les
crédits bancaires surtout ceux à moyen ou long
terme afin d'accroître le ratio crédit bancaire sur actif
total qui de nos jours a un effet négatif (de sa valeur -52,304031) sur
la rentabilité des banques. A ce niveau les pays de la CEMAC peuvent par
exemple diversifier leurs économies ce qui permettra non seulement
l'exploitation de nouveaux secteurs d'activité, mais aussi une
implication de grande ampleur des banques. Dans le même sillage, les
banques de développement peuvent être créées afin de
garantir les types de crédit ci-dessus cités. La faible
proportion des crédits de moyen et long terme en zone CEMAC tire son
explication de la nature des banques de la zone. Celles-ci sont des filiales
des banques étrangères ; elles sont de nature commerciale
par conséquent recherchent un profit rapide et à court terme ;
il faut en quatrième lieu améliorer le
climat des affaires dans les six pays de la CEMAC. Car, si le risque
bancaire demeure élevé, cela traduit l'environnement dans lequel
évoluent les banques. La conséquence la plus visible ici est la
surliquidité des banques de la sous-région. Or, plus la banque
est surliquide, moins elle dégage des ressources capables de
générer des produits. Ainsi, les problèmes de corruption
et de mal gouvernance, les lenteurs administratives doivent être
solutionnés (Doing Business, 2009). Ce qui permettra aux investisseurs
nationaux et étrangers d'accroître les investissements dans la
zone. La présence des banques dans le financement des projets augmentera
leur rentabilité ;
enfin, il faut promouvoir le
renforcement des institutions sous-régionales en leur assurant
une marge de manoeuvre assez importante et des moyens financiers
conséquents pour mener à bien leur mission de supervision, de
contrôle, d'évaluation et de dissuasion.
C'est sous ces différentes conditions que la zone CEMAC
pourra bénéficier d'un système bancaire rentable, stable
et qui s'impliquerait de façon conséquente au financement des
économies de la sous-région.
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