II. Les causes de la dynamique régressive du couvert
végétal
Les causes de l'évolution régressive de la
végétation sont d'ordre naturel et anthropique. II.1.
Les causes naturelles
La régression du couvert végétal est
liée à l'évolution spatio-temporelle et à la
combinaison des facteurs naturels comme les précipitations, les
températures, l'évaporation, l'insolation et les vents.
II.1.1. Impacts des précipitations
L'action des précipitations sur la stagnation voire la
disparition des couverts végétaux est incontestable. La
pluviométrie est l'un des principaux éléments de la
caractérisation du climat. L'analyse de la série
météorologique de 1976 à 2005, à travers les
précipitations moyennes mensuelles, permet de dire qu'il y a
essentiellement 4 mois pluvieux qui ont chacun plus de 100 mm d'eau. Il s'agit
des mois de Juin, Juillet, Août et Septembre. Cependant, les pluies sont
plus abondantes et plus régulières en Juillet et en Août
(Cf. Graphique 1). La moyenne pluviométrique annuelle est de 805 mm.
Graphique 1: Précipitation moyenne mensuelle de
1976 à 2005 (station météo de Fada)
Source des données : Direction Nationale de la
Météorologie
La courbe des précipitations établie sur une
période de 30 ans, montre une variation annuelle allant de 568 mm pour
l'année 1990 à 1058 mm pour 2003. L'indice de variation
interannuel permet de mieux apprécier cette variation. Plus il est
faible plus les variations entre les années le seront également.
On l'obtient avec la formule : Iv - Ma / ma
Iv - indice de variation Ma - maximum annuel ma - minimum
annuel
L'indice de variation interannuel des précipitations de
1976 à 2005 est égal à 1,86 et donc supérieur
à 1. Les variations entre les années sont assez notables.
Cependant, la tendance est à la hausse, contrairement à l'opinion
générale (Cf. graphique 2).
Graphique 2: Précipitations annuelles de 1976
à 2005 (station météo de Fada)
Source des données : Direction Nationale de la
Météorologie
Fada Gourma connaît en moyenne 70 jours de pluie par an.
Le nombre de jours de pluie annuel connaît une variation avec 86 jours en
1979 et 53 en 1987. L'indice de variation interannuel de 1976 à 2005 est
égal à 1,62. Cette valeur dépasse 1 et cela veut dire que
la variation entre les années est assez notable. La tendance du nombre
de jours de pluie annuel est à la baisse mrme si elle n'est pas
très sensible (Cf. Graphique 3).
Graphique 3: Le nombre de jours de pluie de 1976
à 2005 (station météo de Fada)
Source des données : Direction Nationale de la
Météorologie
La variation interannuelle de la pluviométrie se
reflète sur l'état du couvert végétal à
travers la réduction de la réserve en eau superficielle pour la
satisfaction des besoins des végétaux à enracinement peu
profond. Elle se répercute aussi sur la végétation par la
sous-alimentation des nappes phréatiques, rendant ainsi difficile
l'approvisionnement en eau des espèces à enracinement profond.
La tendance à la croissance des précipitations
et celle à la baisse du nombre de jours de pluie annuel présage
d'une agressivité de plus en plus grande des pluies avec des
conséquences sur l'environnement. A ce paramètre climatique,
viennent s'ajouter d'autres comme la température, l'insolation et
l'évaporation dont les influences sur la végétation sont
moins importantes, mais qui, associées à la variation
pluviométrique, sont néfastes.
II.1.2. Impacts de la temprature, l'insolation et de
l'évaporation
Nombre de jours de pluie Moyenne de la serie
La température et l'évaporation, facteurs
complémentaires, agissent également négativement sur la
végétation. Il en est de mrme pour l'insolation.
La température est le deuxième paramètre
climatique après la pluviométrie. Elle varie en fonction de la
latitude, de l'altitude, de la nébulosité et de l'albédo.
Elle est aussi fonction de
l'insolation. Dans la province du Gourma, la
température moyenne annuelle est de 28°3 C avec une moyenne des
minima de 21°8 C et celle des maxima de 34°9 C. Les mois les plus
chauds sont Mars, Avril, Mai et les plus frais sont Décembre et Janvier
avec une amplitude thermique annuelle égale à 7°55 C (Cf.
graphique 4).
Graphique 4: Variation des températures moyennes
mensuelles de 1976 à 2005 (Station météo de
Fada)
Source des données : Direction Nationale de la
Météorologie
Il y a également une variation interannuelle des
températures moyennes de la série météorologique.
La température moyenne annuelle la plus faible 26°6 C a
été observée en 1979 tandis que celle la plus
élevée 29°45 C en 2005. La variation interannuelle des
températures, de 1976 à 2005, est égale à 1,1. La
tendance générale est à la hausse (Cf. graphique 5).
Graphique 5: Variation des températures moyennes
annuelles de 1976 à 2005 (Station météo de
Fada).
7 --1
2 a)
.2 3
D 7:1
,_ CD,
D 0
+ C D 7
w 1 0 =
3 0 5 `.<
D CD
7
= CD
03 7 7 C CD CD 7
N -0N mNuN
Source des données : Direction Nationale de la
Météorologie
Dans la série météorologique de 1995
à 2005, l'insolation est élevée en début et en fin
d'année (Janvier, Octobre, Novembre et Décembre). Elle varie
aussi suivant les années avec un indice de variation interannuelle de
1995 à 2005, égale à 1,2.
La valeur moyenne annuelle de l'évaporation est de
3.249,2 mm avec une variation interannuelle de 1995 à 2005 dont l'indice
est égal à 1,12. Les mois qui connaissent une forte
évaporation sont Janvier, Février, Mars, Avril, Mai et
Décembre dont les valeurs moyennes dépassent 300 mm. Tous ces
paramètres (température, évaporation et insolation) ont
des effets négatifs sur le couvert végétal.
En effet, l'évaporation qui est conditionnée par
les températures, évolue dans le mrme sens que celles-ci. Elle
augmente au fur et à mesure que les températures mensuelles
s'élèvent. L'évaporation comme l'insolation, connaissent
un développement maximum en saison sèche (Cf. graphique 6). Les
canicules entraînent un dessèchement des herbacées et de
certaines jeunes plantes surtout en saison sèche. Elles entraînent
l'abaissement du niveau de la nappe phréatique et agissent aussi
négativement sur l'état du couvert végétal par le
biais de l'évapotranspiration. D'une manière
générale, le dessèchement entraîne une importante
vulnérabilité aux feux de brousse et à l'érosion
(hydrique ou éolienne).
Graphique 6: Variation annuelle de la température,
de l'insolation et de l'évaporation de 1995 à 2005 (station
météo de Fada).
Source des données : Direction Nationale de la
Météorologie
II.1.3. Impacts du vent
L'action du vent est assez minime dans le processus de
dégradation de la végétation. Sa vitesse
moyenne annuelle est de 1,4 m/s avec une variation interannuelle de 1976
à 2005, égale à 2,3. Les seuls mois oil on a une vitesse
moyenne inférieure à 1m/s sont Septembre et Octobre. Tous les
autres mois connaissent des ve nts dont la
vitesse va de 1 à 2 m/s.
Le vent agit négativement sur les branches et sur les
feuilles des arbres. Le feuillage qui est en permanence fouetté par le
vent, se développe difficilement et cela entraîne la limitation de
la voûte et donc la réduction de la production de matière
organique. Il contribue aussi par le biais de la déflation
éolienne à dénuder les racines des arbres les rendant de
ce fait encore plus vulnérables.
Le couvert végétal fragilisé par la
combinaison de tous ces facteurs est soumis inévitablement à une
dégradation accélérée. Cependant, les facteurs
naturels ne sauraient expliquer à eux seuls l'évolution
régressive de la végétation. Les causes profondes
résident dans l'exploitation de plus en plus intense et anarchiques des
ressources végétales par l'homme.
II.2. Les causes anthropiques
Le nombre d'habitants de la commune de Matiacoali a connu une
augmentation de 18.638 individus soit une hausse de 51,86 % depuis le RGPH de
1996. Cela confirme une tendance dont les origines sont
certainement antérieures à cette date. Cette augmentation de la
population a conduit à un accroissement des besoins. Pour satisfaire ces
besoins, les populations se sont ruées sur les ressources naturelles
à travers une exploitation inadéquate et néfaste, sans
aucun souci de préservation de l'équilibre
écologique. Au titre de ces exploitations
néfastes, il y a le défrichement, le déboisement, le
surpâturage et les feux de brousse.
II.2.1. Impacts du défrichement et du
déboisement
L'augmentation de la population a entraîné une
croissance des superficies emblavées (3,47 % en 1992 à 9,53 % en
2005) d'autant plus que les champs s'appauvrissent du fait des
difficultés liées à l'intensification de la production
agricole. L'accroissement de la production du coton a aussi une part de
responsabilité dans l'augmentation des superficies emblavées. Il
en est de même pour le déboisement.
En effet, les besoins en énergie et en bois de service
se trouvent aussi accrus. Le déboisement se déroule en toute
saison, avec plus d'ampleur en saison sèche qui est la période de
désoeuvrement des populations. Dans la localité, 3 % des
personnes enquêtés sont des exploitants de bois. Cette
activité est pratiquée librement avec des outils rudimentaires
(coupe-coupe, hache). L'inexistence d'espaces fixes d'exploitation rend
difficile tout contrôle dans la zone d'étude. L'élevage
constitue aussi un facteur de dégradation du couvert
végétal dans la localité.
II.2.2. Impacts du surpâturage
L'action du bétail sur le couvert végétal
s'observe surtout à travers le surpâturage et le
piétinement.
Le manque de zone pastorale rend le contrôle du parcours
des troupeaux difficile et cela entraîne un surpâturage à
certains endroits. La première manifestation de ce
phénomène est la modification de la composition floristique. Les
espèces appétées, trop sollicitées, disparaissent
au profit de celles qui ne le sont pas et qui ont de ce fait, une forte
possibilité de se multiplier.
Aussi, par leurs sabots et du fait de leur nombre, les animaux
piétinent, écrasent et déchaussent les racines des
herbacés rendant difficile la pérennisation de certaines
espèces. La raréfaction du tapis herbacé, voire sa
disparition, et le piétinement qui contribue à la compaction du
sol, favorisent l'érosion hydrique.
Cependant, il faut relever que l'action du bétail n'est
pas toujours néfaste si la capacité de charge des ressources est
respectée. Cette capacité de charge est estimée à 6
ha/UBT dans la zone biogéographique soudano sahélien (5-
BELLEFONTAINE et al, 1997). A défaut d'une estimation rigoureuse de la
capacité de charge dans la zone d'étude, cette norme doit ~tre
respectée. Ainsi par la fumure organique et par la zoochorie, le
bétail contribue à la dissémination de nombreuses
espèces et à la régénération des sols. Ceci
est possible s'il n'y a pas les feux de brousse.
II.2.3. Impacts des feux de brousse
Les feux de brousse sont fréquents bien qu'il n'y ait
pas de coutume les encourageant. Excepté quelques rares cas oil ils sont
dus à la foudre, la cause principale dans la zone d'étude est
anthropique. Le feu est volontaire (feux de chasse, de pasteurs) ou accidentel
(feux mal éteints de voyageurs, feux de nettoyage agricole qui
débordent). Les effets des feux sur le couvert végétal se
traduisent après leur passage par la destruction des herbacées,
des arbustes et de certains arbres à moitié
desséchés.
La combinaison de tous ces facteurs qu'ils soient anthropiques
ou physiques, entraîne inéluctablement la dégradation du
couvert végétal avec des conséquences
socio-économiques et environnementales désastreuses.
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