Les effets de l'incivisme fiscal sur la mobilisation des ressources fiscales locales: cas de la commune de Ouagadougou( Télécharger le fichier original )par Lawadoun Achille Constant SOW Institut international de management de Ouagadougou Burkina Faso - Master 2 en management et droit des affaires 2011 |
Paragraphe II : Analyse de la situation de recouvrement des différents impôts et taxes.Dans cette partie nous allons donner quelques explications sur les performances en matière de recouvrement de certains impôts et taxes qui sont essentiellement liées à l'incivisme fiscal avec son corollaire, la fraude fiscale. I/ Les causes de l'incivisme fiscal et de la fraude fiscale.Les causes de la fraude fiscale plongent très loin leur racine dans l'instauration de l'impôt. Comme le souligne le président français Georges Pompidou : << Tout impôt en lui-même est une incitation à la fraude>>42(*). Nous voyons là qu'il est clair que l'instauration de tout impôt rencontre l'hostilité des contribuables. Ces derniers manifestent leur allergie par la fraude fiscale. Mais ces causes peuvent être classées en deux groupes. I.1/ Les causes psychologiques. La psychologie du contribuable n'est pas favorable à l'impôt. Beaucoup de travaux ont insisté sur l'importance de la mentalité des contribuables. Ce qui fait que le plus souvent ils cherchent des voies et moyens pour y échapper. A cet effet MM Brochier et Tabatoni disait : << la fraude est le fruit d'une fiscalité mal reçue>>43(*). Autrement dit la mentalité des contribuables est défavorable au paiement des impôts. Ce qui concourt fortement à créer un climat favorable à la fraude fiscale. De l'avis du Pr Filga Michel SAWADOGO le civisme fiscal fait appel à la psychologie du contribuable.44(*) Dans les sociétés capitalistes en général et à Ouagadougou en particulier la valeur d'un homme est mesurée selon ses biens ou sa richesse. Ce qui amène très souvent les gens à admirer sans modération aucune les belles voitures, les belles maisons et autres biens luxuriants de certains « hommes forts ». Pour corroborer ce propos Jean Yado Toé a écrit d que : << jamais fléau n'a été considéré autant que la fraude douanière et fiscale avec autant d'indulgence et de complaisance. C'est peu dire que les fraudeurs bénéficient auprès du public d'un préjugé favorable. Ils ne sont que trop souvent apparus sous l'étiquette d'hommes intelligents, seuls capables de déjouer les milles rets tendus par une administration tracassière>>45(*). Ainsi, nous pouvons affirmer non sans raison qu'à Ouagadougou l'incivisme fiscal a largement pris une ascendance sur le civisme fiscal. Ce n'est plus comme au temps du grand père de Jean MONNET qui arborait son costume de dimanche pour aller s'acquitter de l'honorable contribution aux charges publiques. De nos jours le contribuable moderne aurait plutôt tendance à mettre sa tenue de combat.46(*) Mais le problème est que l'on ne se pose même pas la question de savoir comment les intéressés ont fait pour acquérir leurs biens. Et si c'était le fruit d'une fraude fiscale ? Cette question ne semble pas effleurer l'esprit de bon nombre de citoyens. Ce qui nous semble encourager la fraude tout comme si la fin justifiait les moyens. A cet effet un auteur anglais du XIX siècle disait : <<le fraudeur fiscal me plaît, c'est un voleur honnête, car il ne vole que l'Etat qui n'est qu'une abstraction>>47(*). De nos jours, malheureusement dans nos sociétés l'opinion de cet auteur Anglais vaut son pesant d'or. Pourtant à l'opposé l'opinion publique condamne fermement le vol de la chose d'autrui. Mais comment pouvons nous expliquer ce paradoxe ? Condamner fermement le vol de la chose d'autrui et tolérer pourtant la fraude fiscale qui est aussi un vol aussi. A notre avis le contraire aurait été raisonnable, car celui qui fraude vole une communauté toute entière alors que celui qui vole le bien d'autrui ne vole qu'un élément de la communauté. A ce propos Laurent FABUIS disait que << voler l'impôt, c'est voler les autres et ce vol ne mérite aucune indulgence>>48(*). Le prélèvement de l'impôt repose fortement sur l'économie. Plus l'économie d'un pays est performante, plus les recettes fiscales sont importantes. Mais le cas de la commune de Ouagadougou est spécifique puisqu'elle ne possède pas d'autres sources de revenu si ce n'est les impôts et taxes. Mais le niveau de recouvrement des impôts reste insatisfaisant. En tout état de cause le contribuable n'est tenté d'éluder frauduleusement l'impôt et de courir les risques que cela comporte que si la charge fiscale qu'il supporte excède sa capacité contributive. Dans une société donnée, plus l'économie est performante plus les risques de fraude sont minimisés. A contrario, une productivité faible ou médiocre est un facteur de fraude. En d'autres termes l'impôt est beaucoup mieux supporté lorsqu'il frappe un revenu élevé que lorsqu'il s'applique à un revenu faible. Ce qui est réconfortant c'est que l'impôt est payé en fonction de la faculté contributive de chaque contribuable. Cette justice fiscale n'est pas une vérité absolue à cause de l'incivisme fiscal qui engendre la fraude fiscale. * 42 Repris par Philippe AUBERGER in L'allergie fiscale, Calmann Levy, 1984 * 43 Cité par Bruno TADDEI dans son ouvrage La fraude fiscale, Litec, 1974 * 44 Filga Michel SAWADOGO, op cit, p 75 * 45 Jean Yado TOE, Les aspects fiscaux et douaniers du développement économique de l'Afrique de l'Ouest, tome 2, Paris IV, 1978, P.185 * 46 Jean Claude MATINEZ, La fraude fiscale, Paris 1994, PUF, Que sais-je ?, p 24 * 47 Repris par Philippe AUBERGER in L'allergie fiscale, Paris 1984, Calmann-Lévy, p 57 * 48 Repris par Bruno TADDEI in La fraude fiscale, Litec 1974 |
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