Première partie : Notions
générales
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Chapitre I : IDENTITE, CULTURE, PERSONNALITE,
LITTERATURE
Ces notions (identité, culture,
personnalité), très complexes dans leurs définitions,
se rappor
tent beaucoup plus à la sociologie qu'à la
littérature. Cette derniere est l'expression par excellence de la
pensée humaine. En traduisant une représentation qu'une
époque ou qu'un homme se fait de la réalité, l'oeuvre
littéraire comporte en elle toute une dimension de l'identité, de
la culture et de la personnalité. L'auteur choisit donc une
réalité qui se perçoit à travers sa
société, son temps, sa culture ; mais aussi sa langue. En ce
sens, tout écrivain est, malgré lui, un peu tributaire de son
époque, de son contexte social. D'où la connaissance du contexte
historique et socioculturel de l'oeuvre en facilite beaucoup sa
compréhension. Par ailleurs, l'on
remarquera q
« L'oeuvre littéraire est une forme de
résistance aux dysfonctionnements, aux iniquités, aux carences
sociales. Mais, si la littérature peut se livrer à une
contestation de l'état de la société, elle ne peut
s'analyser à partir d'un seul point de vue, monosémique. Par
exemple, sa signification ne saurait etre réduite à la vision
d'un seul groupe social. Dans ce sens, la littérature ne saurait se
borner à refléter la société capitaliste.
»15
Tout de même, ces éléments ci-haut
cités (identité, culture, personnalité)
restent au coeur de toute investigation littéraire. Etant
donné que l'écrivain est issu d'une société qui a
ses struc- tures et ses principes, ses règles, ses coutumes et ses
traditions. Plus encore, l'écrivain pré-
tives. Ces éléments jouent alors un rôle
important sur la pensée de l'auteur. L'écrivain, dans
sa production littéraire, devant faire face à tous
ces éléments, met en place une oeuvre de qua-
lité qui puisse susciter nombre de critiques. Celles ci se
basent sur certains traits saillants de
l'oeuvre en question. Ainsi, aucun texte littéraire ne
saurait être mieux compris et interprété
indépendamment du contexte social dans lequel il
apparaît ainsi que celui de l'auteur qui l'a mis en place.
Au XIXème siècle, le mot «
culture » a pris un sens plus large qu'aux siècles
précédents. En 1871, l'anthropologue britannique E. B. Taylor
définissait la culture en tant que « (...) cet ensemble
complexe qui inclut la connaissance, la croyance, l'art, la morale, le droit,
la coutume et toutes autres capacités et habitudes acquises par l'homme
en tant que membre de la
15 Wadi, Bouzar, Roman et Connaissance
sociale, O.P.U., Alger, 2006, pp. 133 - 134.
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société »16. Ceci
étant, nous remarquons à quel point le mot culture en
soi est très complexe pour pouvoir déterminer son sens plus ou
moins complet. Par ailleurs, la définition ci après de
la culture nous paraît très
intéressante et détaillée.
« Elle (la culture) englobe les modes de vie, les
traditions et les croyances, les arts et les lettres, tout en intégrant
à son système des valeurs les droits fondamentaux de l'etre
humain. La culture d'un pays ne se ramène pas à la culture
savante, elle comprend également la culture populaire. Elle ne se
résume pas à l'héritage, mais s'enrichit et se
développe aussi bien par la créativité que par la
mémoire. (...) En-fin, la culture scientifique constitue, de plus en
plus, une part importante de la culture de l'humanité dont elle
contribue à fonder l'universalité »17.
Les différentes composantes de l'identité se
rencontrent dans chaque homme et plus spécialement en l'auteur qui s'en
sert pour nous dévoiler les réalités du monde. Il exploite
alors des talents latents en lui. Cependant, avant de se mettre à
écrire l'auteur tient compte du rôle de tous les
éléments marquant tout être humain. Et le texte, bien que
polysémique, ne s'écartera
pas trop du contexte social de son auteur. Cela nous
amènerait à affirmer que tout texte litté-
raire comporte des traits caractéristiques et
spécifiques propres à son auteur. Souvent, il est
difficile de le constater à première vue. C'est
grace au travail des critiques que ressortent des éclaircissements sur
le texte, quelle qu'en soit la forme ou la nature.
Le monde contemporain apparaît alors comme un
réveil pour l'écrivain d'aujourd'hui. Les
événements les plus marquants de ce temps se présentent
à l'homme comme une « source » d'inspiration. Cette
inspiration l'affecte dans tout son être jusqu'à atteindre son
identité. Une sorte de crise identitaire s'installe en lui, donnant
alors lieu à une série de questions sur le monde en
général. En effet, « La crise identitaire définit
diverses situations individuelles et de groupe qui, en dehors de tout
déterminisme pathogène, provoque une confusion des limites en
subjectivité du moi en alternant le sentiment d'unité et de
continuité qu'une personne en situation normale éprouve
habituellement vis-à-vis d'elle-même et du monde qui l'entoure
»18
16 John, Murray, Primitive culture : Reseaches in
Development of Methodology, Philosophy, Religion, Language, Art and Custom,
London, 1871, p.1, in Le français dans le monde, «
Cultures, Culture... », Hachette, Paris, 1996, p. 9.
D
17 Ibidem, p.1.
D
18 Fouad, Laroussi, Langues et identité au
Maghreb, Casbah, Alger, 2000, p. 20.
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Ainsi, l'homme se pose une série de questions sur son
existence, sur son origine, sur sa destinée et sur les changements du
monde qui l'abrite, sans négliger les événements
quotidiens qui font l'atmosphere de son milieu de vie. D es changements de
valeurs culturelles trouvent alors place en ce moment là
entraînant une restructuration identitaire ; mais aussi
d'autres facteurs sociaux et psychologiques qui interviennent dans les formes
d'identité. Pour ce, les réponses qui jaillissent de ces
questionnements constituent les matériaux de son identité. Si
l'un des ces matériaux (la culture, le savoir, la
tradition, la religion, la langue, etc.) arrive à faillir,
c'est toute la personne qui s'en trouve secouée. Ceci montre bel et bien
la complémentarité entre les divers éléments
caractéristiques de l'être humain ; de son identité.
Ainsi, affirmons-nous qu'au XXème siecle,
l'identité tient au coeur de l'humanité et de cer- taines
personnes en particulier. Toutes les guerres qui ont marqué ce
siècle, ne se rapportaient qu'aux problemes identitaires de l'homme.
L'être humain est de nature complexe. C'est un être habité
de plusieurs choses : l'envie des biens, l'idée de
supériorité (l'extermination des Juifs au cours de la
deuxième guerre mondiale, par exemple), l'hypocrisie, la
méfiance, l'orgueil, la jalousie, etc. c'est un être changeant
dans son identité. Cela peut se lire dans la définition de
l'identité, donnée par Mucchielli dans son ouvrage
L'identité, telle que mention-
D
'est aussi un phénomène dynamique qui
La religion n'est pas sans place dans la littérature et
fait partie intégrante de l'identité humaine d'une façon
particuliere. On y ajoute la langue qui est un
élément actif reflétant notre apparte
moyen de communication, « est aussi un signe
d'appartenance à une communauté, à une culture ; c'est
dans la langue que l'individu trouve un ancrage pour son identité. Elle
s'inscrit dans la conscience identitaire qui caractérise les peuples et
leurs civilisations »19 Ainsi, « la Religion a
vocation d'être exclusive, la Langue pas. On peut pratiquer à la
fois l'arabe, l'hébreu, l'italien, le suédois, mais on ne peut
etre à la fois juif, musulman, catholique et lu-
19 Ouafa, Dridi sous dir. de Dr. Salah Khennour,
L'identité algérienne : Enjeux d'un fondement
linguistique Mémoire de Magister, Université de Ouargla,
2008/2009, p. 7.
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thérien ; (..) La langue a cette merveilleuse
particularité d'être à la fois facteur d'identité et
instrument de communication. »20
Pourtant, cette conception (de la religion) paraît en
contradiction avec ces mots surprenants
d'Omar-Jo à propos de sa religion. « Je suis
de la religion de Dieu. De celle de mon père et de ma mère ... de
toutes les autres, si je les connaissais. (..) Si Dieu existe, (...) Il nous
aime tous. Il a créé le monde, l'univers et les hommes. Il
écoute toutes nos voix. (..) Dieu est par-tout. (..) »21
Savoir qui l'on est, la perception ou l'image que l'on se fait
de soi, la connaissance des autres se résume en la fameuse phrase de
Socrate précédemment citée (« Homme, connais-toi
toimême ») mais aussi sous le terme de personnalité
Ainsi,
« Ce que la personnalité représente
essentiellement, c'est l'unité intégrative d'un homme, avec tout
l'ensemble de ses caractéristiques différentielles permanentes
(intelligence, caractère, tempérament, constitution), et ses
modalités propres de comportement. La définition qu'en donne
Sheldon, inspirée de Warren et d'Allport, correspond assez bien à
cette notion : la personnalité, d'après lui, est ` l'organisation
dynamique des aspects cognitifs, affectifs, conatifs, physiologiques et
morphologiques de l'individu' »22.
En effet, rares sont les personnes capables de se faire
une description parfaite de leur person nalité, étant
donné que l'introspection demande une concentration considérable
ainsi qu'une totale objectivité.
L'idée de « personnalité » étant
alors complexe, elle a suivi tout un parcours déterminé par
les
de trouver un concept plus solidaire des écoles et des
attitudes des auteurs mettant en lumière
la signification exacte de ce concept. Aujourd'hui,
l'idée générale qui ressort des différentes visions
de la personnalité est qu'elle est l'ensemble des comportements qui
constituent l'individualité d'une personne. Elle rend compte de ce qui
qualifie l'individu : permanence et continuité des modes d'action et de
réaction, originalité et spécificité de sa
manière d'être. C'est le noyau relativement stable de l'individu,
sorte de synthèse complexe et évolutive des
20 Amin, Maalouf, Op.cit., p. 153
D
21 Andrée, Chedid, Op.cit., pp. 24-25
D
22 Henri, Piéron, Vocabulaire de la psychologie,
PUF, Paris, 1951, p. 331
données innées (gènes) et des
éléments disponibles dans le milieu social et l'environnement
en
général.
« La personnalité humaine ne devient
historiquement réelle et culturellement productive qu'en tant que partie
d'un tout social, dans sa classe et à travers sa classe (...). L'homme
ne naît pas comme un organisme biologique abstrait mais comme
propriétaire terrien ou paysan, comme bourgeois ou prolétaire et
cela est essentiel. Ensuite, il naît russe ou français et, enfin,
il naît en 1800 ou en 1900. Seule cette localisation sociale et
historique rend l'homme réel et détermine le contenu de sa
création personnelle et culturelle »23.
Compte tenu de tout ce qui vient d'être dit
précédemment, l'on se rend compte de la grande difficulté
qu'il y a pour délimiter la vraie signification de chacun des
éléments constitutifs de l'être humain et, en particulier,
de l'écrivain qui essaie de « faire le vrai (...) donner
l'illusion complète du vrai selon la logique des faits. (...) l'illusion
du monde. Il n'a d'autres missions que de reproduire fidèlement cette
illusion avec tous les procédés d'art qu'il a appris et dont il
peut disposer »24. Tous ces éléments se
complétent et s'entremêlent immanquablement.
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23 Edmond, Cros, La Sociocritique, L'Harmattan, Paris,
2003, p. 49 D
24 Wadi, Bouzar, Op. cit., p. 48.
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