1.5.2 La recherche empirique sur les effets des politiques
fiscales
L'évasion fiscale est l'une des problématiques
à l'ordre du jour dans les pays en développement, compte tenu de
la pauvreté et de la nécessité pour l'État de
financer les services sociaux de base. Simultanément, les recettes
douanières constituent une source de financement des dépenses
publiques, négligeable dans les pays de l'OCDE (1% des recettes de
l'État) mais importante dans les pays à faibles revenus (22% des
recettes de l'État). Ainsi, Bouet et Roy (2008) ont mit en exergue, dans
le cas de trois pays africains, le Kenya, la Mauritanie et le Nigeria, les
influences de la protection du commerce sur le phénomène
d'évasion fiscale. Le choix de ces trois pays africains est dicté
par le fait qu'ils sont les plus dépendants des recettes
douanières.
A partir des données du commerce extérieur
MAcMAP des années 2001 et 2004, les auteurs spécifient un
modèle de panel en trois dimensions : le temps, les produits et les
partenaires. En contrôlant pour les effets fixes au niveau temporel,
produit et partenaire, les auteurs établissent les effets de la
protection douanière : les résultats du modèle montrent un
impact significatif et robuste des tarifs douaniers sur l'évasion
fiscale dans le cas du Kenya et du Nigeria. Dans le cas de la Mauritanie, les
résultats indiquent une faible relation non significative entre la
protection douanière et l'évasion fiscale.
Cet article fournit des bases pour conjecturer les effets des
tarifs douaniers. La manipulation des taux, notamment la hausse des taux de
taxation du commerce extérieur accroît le phénomène
d'évasion fiscale, source d'inefficience et d'inégalités.
Cependant, les résultats de l'article sont critiquables par rapport
à la méthode utilisée. En effet, il est vraisemblable que
l'alourdissement de la protection douanière modifiera le comportement de
demande des agents privés, qui par effet retour agira sur l'engouement
devant les produits importés. In fine, il est probable que les
résultats de cette étude, bien qu'ayant contrôlé
pour un certain nombre de phénomènes, prennent une autre
direction que celle trouvée par les auteurs.
L'évaluation des effets de la politique fiscale peut
être appréhendée en comparant deux économies
similaires dans deux situations différentes, la nuance venant
essentiellement dans la conduite de politiques fiscales non similaires. C'est
cette optique qu'envisage Robles, qui, dans un article publié en 2009,
étudie une économie dans laquelle les responsables de la
politique fiscale ne sont pas en mesure de conduire une politique fiscale
adéquate et compare cette économie à une autre similaire
mais qui en a la capacité d'appliquer une politique
Impacts des politiques fiscales sur l'économie
burkinabè: Simulation à l'aide d'un MEGC 17
fiscale adaptée. tant données deux
économies similaires, on suppose qu'une des économies ne peut pas
mettre en oeuvre une politique fiscale parfaite alors l'autre en a la
possibilité, la question centrale posée par l'auteur est la
suivante : les agrégats d'équilibre (FIB, productivité
globale des facteurs, taille moyenne des entreprises, les salaires, etc.) de
ces deux économies sont-ils différents? Et si la réponse
est affirmative, quelle est l'ampleur de ces différences? Pour
répondre à ces questionnements, l'auteur développe un
modèle d'équilibre général compétitif, dans
lequel la conduite d'une politique fiscale imparfaite agit sur
l'équilibre macroéconomique à travers deux canaux
principaux. Non seulement, elle crée une distorsion au niveau de la
production optimale aussi longtemps que la probabilité de fraude fiscale
est liée à la taille de l'entreprise, mais encore, elle engendre
une sous offre de biens publics qui est un complément à la
productivité des entreprises. La modélisation de
l'économie étudiée suppose un tat bénévole,
qui met en oeuvre une fiscalité neutre et cherche à obtenir une
consommation globale optimale, la seule contrainte étant la technique de
mise en oeuvre de la politique fiscale. Le calibrage du modèle
d'équilibre général, les simulations menées par
l'auteur permettent de relever les résultats suivants : dans
l'économie ayant des difficultés de mise en oeuvre d'une
politique fiscale non génératrice de distorsion,
l'équilibre macroéconomique se traduit par une baisse du revenu
global de 12%.
Bien que l'auteur ait eu le mérite d'avoir
intégré la production de biens publics dans les modèles
EGC, l'agrégation à l'extrême des secteurs, des
activités et des biens, a de forte chance de masquer certains secteurs
moteurs de l'économie, ce qui constitue une limite fondamentale aux
résultats de cette étude.
L'examen du cadre théorique a permis une
compréhension détaillée des canaux de transmission
probables des effets des politiques fiscales. Au niveau individuel, la
théorie économique sur la taxation prévoie un ajustement
des comportements des agents suite à la manipulation de l'instrument
fiscal par l' tat. Le sens et l'ampleur des ajustements dépendront du
jeu des forces en présence, lesquelles ne peuvent être mises en
exergue qu'au travers un modèle d'équilibre
général. C'est du reste l'optique suivie par certains chercheurs,
dont une lecture simplifiée des principaux résultats est fournie
par la revue de littérature. Vue la complexité des canaux de
transmission des politiques fiscales sur une économie, ce rapport
considère que les modèles ECG sont mieux indiqués pour de
telles évaluations. Ces modèles reposent sur la structure
l'économie du pays d'intérêt à une période
donnée. C'est ainsi que le chapitre suivant propose une description de
l'économie du Burkina Faso.
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