L'OAP traduit une élévation de la pression
télédiastolique du ventricule gauche. Toutefois, le
mécanisme à l'origine de cette élévation n'est pas
univoque et peut correspondre à deux phénomènes :
> Dilatation ventriculaire secondaire à une
altération de la fonction systolique L'altération de la
fonction systolique est caractérisée par une diminution de la
contractilité du myocarde et/ou une élévation de la
postcharge. Le mécanisme adaptatif afin de maintenir un volume
d'éjection constant se fait au prix d'une majoration du volume du
ventricule gauche, responsable d'une augmentation de sa pression
télédiastolique [9].
Les principales étiologies sont [8, 9,
18]:
· Les cardiopathies ischémiques
: angor de poitrine, syndromes coronaires aigus et infarctus du myocarde
Elles représentent la première cause d'OAP.
L'IDM est la cause la plus fréquente. L'OAP complique
fréquemment la phase aiguë de l'infarctus. Il s'agit le plus
souvent d'un infarctus étendu ou compliqué d'une rupture d'un
pilier ou d'un trouble du rythme. Mais l'OAP peut survenir à distance de
l'infarctus et être en rapport avec une dysfonction ventriculaire gauche
grave (remodelage, ectasie).
L'angor instable se complique rarement d'OAP. Celui-ci peut
survenir si l'ischémie coronaire aiguë s'accompagne d'une
dysfonction d'un pilier, d'un trouble du rythme, ou survient chez un patient
aux antécédents d'infarctus avec une fonction ventriculaire
gauche déjà altérée.
· Les atteintes myocardiques chroniques :
cardiomyopathies idiopathiques, oenoliques ou toxiques ;
· Les atteintes myocardiques aiguës :
myocardites, cardiomyopathies ;
· La pathologie valvulaire aiguë :
rupture de pilier ou de cordage, ou perforation de la valve mitrale,
insuffisance aortique aiguë, endocardite bactérienne (aortique ou
mitrale);
· La pathologie valvulaire ou sous-valvulaire
chronique : rétrécissement aortique serré,
insuffisance mitrale, insuffisance aortique, cardiomyopathie obstructive ; Elle
correspond à une surcharge mécanique (volumétrique) par
obstacle à l'éjection du ventricule gauche.
· Chez un patient porteur de prothèse
valvulaire, l'OAP signe, jusqu'à preuve contraire, un
dysfonctionnement prothétique : rupture d'un feuillet valvulaire en cas
de bioprothèse, thrombose en cas de valve mécanique ;
· Les troubles du rythme, ventriculaire ou
supraventriculaire, en particulier la fibrillation atriale;
· Les cardiopathies
congénitales.
> Insuffisances ventriculaires gauches à
fonction systolique conservée
Le tableau est celui d'une insuffisance cardiaque diastolique
isolée, secondaire à un trouble de la relaxation myocardique.
Elles sont de plus en plus fréquentes, surtout chez le sujet
âgé. Elles sont en général associées à
un remodelage concentrique ventriculaire gauche, avec hypertrophie
ventriculaire gauche (responsable d'une réduction de la compliance
ventriculaire) et des anomalies du remplissage du ventricule gauche
[18]. Ces patients sont alors incapables d'accroître
leur volume télédiastolique ventriculaire gauche ainsi que leur
volume systolique alors que leur pression télédiastolique gauche
est élevée. Il en résulte une augmentation de la pression
auriculaire gauche conduisant à une augmentation de la pression
hydrostatique pulmonaire responsable de l'oedème. Ces patients sont donc
très sensibles aux variations de remplissage du ventricule gauche, car
ils n'ont pas de réserve de précharge. Cela explique parfois
l'importance de la systole auriculaire
afin de permettre le remplissage optimal du ventricule. Dans
d'autres cas, il s'agit plutôt d'un allongement, parfois majeur, du temps
de relaxation ventriculaire : ceci explique l'influence
délétère d'une fréquence cardiaque
élevée qui réduit le temps diastolique
[9].
Les étiologies les plus fréquentes sont
[8, 9, 18]:
· Les cardiopathies hypertensives
La crise aiguë hypertensive est la 2e cause
d'OAP. L'association poussée hypertensive et dysfonction diastolique
demeure un facteur pathogénique fréquent [9,
36]. En effet, l'oedème est dû à l'exacerbation du
dysfonctionnement diastolique et non à une dysfonction systolique
transitoire ou à une insuffisance mitrale [36]. Le
diagnostic est essentiellement fait par l'échocardiographie doppler qui
montre une hypertrophie ventriculaire gauche, des anomalies du remplissage du
ventricule gauche et une fraction d'éjection du ventricule gauche
conservée à la phase aiguë de l'oedème pulmonaire
[8, 36].
· Les cardiomyopathies hypertrophiques
primitives.
· Amylose, hémochromatose.
B/ Insuffisance cardiaque gauche sans insuffisance
ventriculaire gauche Il y a essentiellement quatre causes :
· La sténose mitrale
serrée;
· Les myxomes occlusifs de l'oreillette
gauche ;
· La thrombose de l'oreillette gauche ;
· Les épanchements péricardiques
constrictifs liquidiens.
10.1.2 Hypervolémie
Une surcharge volémique aiguë peut favoriser la
survenue d'un OAP. Elle survient sur deux terrains principaux :
· Hyperhydratation : par apport
hydrique excessif par voie veineuse ou transfusions massives, surtout s'il
existe une insuffisance cardiaque et/ou rénale;
· Insuffisance rénale chronique :
l'oedème est rythmé et corrigé par des séances de
dialyse. Il est souvent associé à des pleurésies.
10.1.3 OEdème par diminution de la pression
oncotique vasculaire
Ce type d'OAP est lié à une
hypoprotidémie, surtout s'il y' a insuffisance rénale et/ou
cardiaque. Sur une étude faite sur 74 patients atteints d'OAP,
Arquès et al. [37] ont montré que
l'hypo-albuminémie est un facteur favorisant fréquent de
l'insuffisance cardiaque diastolique aiguë du sujet âgé et
doit être systématiquement recherchée.
10.2 Facteurs déclenchants
L'OAP est très souvent déclenché par un
phénomène intercurrent qu'il importe de rechercher
systématiquement [9, 5, 18, 38]:
· poussée ischémique ou infarctus du myocarde
;
· poussée hypertensive;
· troubles du rythme ventriculaire ou supraventriculaire
et/ou de la conduction ;
· surcharge hydrosodée (remplissage vasculaire
excessif) ;
· écart de régime ;
· non-observance du traitement, introduction d'un
traitement inotrope négatif intempestif, intoxication digitalique,
antiarythmiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS),
corticoïdes, médicaments cardiotoxiques ;
· endocardite ;
· embolie pulmonaire ;
· dysthyroïdie (hyper- et hypothyroïdie) ;
· insuffisance rénale aiguë ;
· grossesse ;
· anémie ;
· fièvre, pneumopathie aiguë, surinfection
bronchique, poussée inflammatoire.
10.3 Manifestations cliniques (forme
typique)
Le diagnostic est porté cliniquement devant la
survenue d'une insuffisance respiratoire aiguë chez un patient porteur
d'une cardiopathie. Le tableau clinique associé passe par deux grandes
étapes :
10.3.1 Période de début
Le début est brutal, volontiers nocturne, parfois
matinal, marqué par une sensation de grésillement
laryngo-trachéal et une toux quinteuse irritative.
Rapidement, une dyspnée s'installe, à type de
polypnée, à prédominance inspiratoire, superficielle,
accompagnée de sueurs profuses et d'une angoisse importante. Les muscles
respiratoires accessoires sont mis en jeu. Le patient s'assoit au bord du lit
(orthopnée), les jambes pendantes. Cette position diminue le retour
veineux et donc la dyspnée.
10.3.2 Période d'état
Elle est réalisée en quelques minutes.