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L'oedeme aigu pulmonaire cardiogénique a l'hopital du point « G »

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par Fernando KEMTA LEKPA
Université de Bamako - Doctorat d'Etat en Médecine 2005
  

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VI - COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS

Notre travail est une étude prospective, descriptive et analytique qui a porté sur 50 cas d'oedème aigu pulmonaire cardiogénique (OAP). Les patients ont été colligés, conformément aux critères d'inclusion, du 1er mars 2003 au 31 décembre 2004 dans le service de Réanimation et Urgences et le service de Cardiologie << A >> de l'Hôpital du Point << G >> (HPG). Nous avions pour but d'étudier la prise en charge diagnostique et thérapeutique de l'OAP cardiogénique. Les résultats obtenus nous ont conduit aux commentaires et discussions suivants.

1. LIMITES ET DIFFICULTES

1.1 Limites

Les limites de notre étude, au regard de nos objectifs ont été:

> La limitation du plateau technique ;

> La non réalisation de la radiographie du thorax chez certains patients (état de santé critique, problèmes financiers, décès précoce), exclus de notre échantillon;

> L'impossibilité d'avoir un bilan biologique en urgence ;

> La situation géographique du HPG, limitant la taille de notre échantillon et allongeant le délai de prise en charge;

> Le lieu d'étude, excluant tous les OAP survenus dans les autres services.

1.2 Difficultés

> Le déficit de certaines informations, lié au manque de matériel de surveillance ;

> L'interprétation en urgence des clichés radiographiques ;

> L'absence de kit d'urgence dans les différents sites.

2. RESULTATS

2.1 Données épidémiologiques

2.1.1 Fréquence hospitalière de l'OAP cardiogénique

Notre étude nous a permis de retrouver une prévalence de 1,52% #177; 3,39.

Nos résultats sont superposables à ceux retrouvés par Bétala au Cameroun [3] qui trouve 1,1%.

L'oedème aigu du poumon occupe également une place non négligeable parmi les urgences cardio-pulmonaires (OAP cardiogénique sans radiographie du thorax, OAP lésionnel, urgences hypertensives, insuffisance cardiaque congestive, IDM, cardiomyopathies, péricardites, AVC, embolie pulmonaire, crises d'asthme, infections broncho-pulmonaires, pleurésies, pneumothorax...). En effet, par rapport aux autres urgences cardio-pulmonaires, nous retrouvons un taux de 9,59% #177; 4,10 d'OAP cardiogéniques en Réanimation, 1,83% #177; 1,02 en Cardiologie << A >> et 3,68% #177; 1,62 aux Urgences.

2.1.2 Service ayant réalisé le traitement initial

La prise en charge initiale a été réalisée dans les 3 sites de notre étude. Les Urgences et la Réanimation ont reçu chacun 38% des patients (n = 19) et la Cardiologie << A >> 24% (n = 12).

2.2 Données socio-démographiques

2.2.1 Age

L'âge moyen de nos patients était de 53,72 #177; 2,58 (IC 95% [52,84 ; 55,73]). Les extrêmes étaient 15 et 90 ans. La tranche d'âge la plus représentée était la tranche 60-69 ans avec 32% des cas (n = 16). 50% #177; 13,85 de nos patients ont plus de 60ans.

Ceci nous permet d'affirmer que bien que les différentes tranches d'âge soient concernées par l'OAP cardiogénique, elle demeure une pathologie de la personne âgée.

Notre âge moyen est inférieur à celui obtenu par Bétala au Cameroun [3] qui trouve 63,22 #177; 2,33 ans (IC 95% [62,38 ; 65,32]). De plus, il affirme que 64,8% #177; 12,73 de ses patients avaient plus de 60 ans. L'her en France [2] trouve 54% de patients avec plus de 70 ans. Rabacal au Portugal [54] retrouve un âge moyen de 68,4 #177; 6,4 ans (IC 95% [67,08 ; 71,82]). Crane en Angleterre [55] retrouve un âge médian de 77 ans. Dans une étude américaine sur la pathogénie des OAP hypertensifs [36] aux Etats-Unis, Gandhi retrouve un âge moyen de 67 #177; 13 ans.

Ces chiffres pourraient s'expliquer par le bas niveau socio-énonomique et par une espérance de vie moindre au Mali (48 ans), comparativement à celle des pays occidentaux (77 ans aux Etats-Unis ; en France, 74,9 ans pour les hommes et 81,2 ans pour les femmes) [56].

2.2.2 Sexe

Le sexe masculin était prédominant, avec 56% de nos patients (n = 28). Le sex ratio était de 1,27 en faveur des hommes. L'exposition des hommes au tabac pourrait expliquer nos résultats.

La prédominance masculine est confirmée par Bétala [3] qui trouve un sex ratio à 1,16 en faveur du sexe masculin. Rabacal [54] trouve un sex ratio de 2,14 en faveur des hommes. Crane [55] retrouve une distribution égale entre les deux sexes.

2.2.3 Ethnie

Les bambara représentaient 38% (n = 19) de notre échantillon (ethnie majoritaire à Bamako et dans la population générale), suivis par les peulh et les malinké avec 18% chacun.

2.2.4 Structure de provenance

70% (n = 35) de nos patients venaient directement de leur domicile, tous à bord d'un véhicule de transport commun. Aucun de nos patients n'a eu à emprunter une ambulance médicalisée. Seuls 28% de nos patients, venant tous d'une structure sanitaire, ont emprunté une ambulance non médicalisée.

2.3 Profils cliniques

2.3.1 Etiologie

L'HTA a été la principale étiologie (50% ; n = 25), suivie par les cardiomyopathies (18% ; n = 9) et l'IDM (14% ; n = 7).

Nos résultats s'écartent de ceux de la littérature qui font des cardiopathies ischémiques la première cause d'OAP hémodynamique [8, 9, 54, 57]. Fiutowski en Pologne [57] affirme que 41% des cas d'OAP sont dus à des cardiopathies ischémiques (25% liés à un IDM et 16% à un angor instable), 29% à l'HTA, 9% aux pathologies valvulaires, 8% liés à une pneumopathie et 4% à une fibrillation auriculaire paroxystique. Les étiologies de l'OAP cardiogénique retrouvées par Rabacal [54] sont les suivantes : 77,2% de cas de cardiopathies ischémiques dont 59% chroniques, 13,6% de cardiopathies hypertensives et 9,0% de valvulopathies mitrales. Dans l'étude « Consensus » regroupant des patients en classe NYHA 4, l'insuffisance cardiaque était d'origine ischémique dans 74% des cas, 19% étaient des cardiopathies hypertensives et 26% des cardiopathies non ischémiques [1].

A Bamako, l'HTA représenterait à elle seule 18,3% de l'ensemble de la pathologie cardio-vasculaire [62]. Cette prépondérance pourrait expliquer la première place occupée par l'HTA dans notre série. Dans une étude multicentrique menée en Guinée Conakry [58], 45,9% des patients hypertendus avaient une insuffisance cardiaque. De plus, dans la série de Bétala [3], 81,5% des patients étaient connus hypertendus. Ces chiffres obtenus à Conakry et à Yaoundé, comparés à ceux de Bamako, tendent à prouver que l'HTA est la principale pathologie cardiovasculaire rencontrée en Afrique sub-saharienne et aussi la première cause d'OAP cardiogénique.

Le faible taux d'IDM pourrait s'expliquer par les résultats de l'étude MONICA [59] selon lesquels 60% des décès par IDM surviennent en dehors d'une structure hospitalière et 3 décès sur 4 surviennent avant la 24ème heure. Ne disposant pas de SAMU, ni du plateau technique permettant au minimum une thrombolyse, plusieurs cas d'IDM seraient alors méconnus.

2.3.2 Facteurs de risque cardio-vasculaires

L'HTA et le tabac ont été les facteurs de risque les plus fréquents avec respectivement 70% (n = 35) et 38% (n = 19) des cas. La moitié de nos patients avaient plusieurs facteurs de risques associés.

La prédominance du couple HTA - tabac est confirmée par Bétala au Cameroun qui trouve respectivement 81,5% et 44,4% [3].

2.3.3 Facteurs déclenchants

Nous avons retrouvé chez nos patients les principaux facteurs déclenchants décrits par L'her [2], Stainier [9] et Cohen-Solal [18].

La poussée hypertensive (48% ; n = 24) et la non compliance aux traitements antérieurs à l'épisode aigu (écart de régime [20% ; n = 10] et arrêt du traitement [10% ; n = 5]) ont été les principaux facteurs déclenchants. La poussée ischémique était incriminée chez 10% (n =5) de nos patients. Plusieurs patients (17) avaient plus d'un facteur déclenchant associé.

Bétala [3] rapporte une prédominance de l'arrêt du traitement (37%), suivi par la poussée hypertensive (13%) ; la poussée ischémique n'étant incriminée que dans 1,85% des cas.

2.3.4 Evaluation clinique à l'entrée

Dès réception de nos patients, nous avons évalué le score de Glasgow, recherché les signes fonctionnels, physiques et généraux relatifs à l'OAP cardiogénique. Les différentes constantes physiologiques suivantes ont été mesurées : pression artérielle, pouls, fréquence respiratoire, la saturation pulsée en oxygène et la température. Seuls (80%) de nos patients (n = 40) ont eu une mesure de leur SpO2 à l'entrée.

2.3.4.1 Score de Glasgow

Le score de Glasgow médian était 13 avec des extrêmes à 5 et 15. 52% de nos patients (n = 26) avaient un score entre 13 et 15. 94% de nos patients avaient un score supérieur à 10 à l'entrée.

2.3.4.2 Données du monitorage à l'entrée

> Les valeurs de la PAS oscillaient entre 60 et 260 mmHg avec une moyenne de 152,70 #177; 6,05 mmHg (IC 95% [151,82 ; 156,11]). 74% de nos patients (n = 37) avaient des chiffres de PAS supérieurs à 140 mmHg. 14% (n = 7) avaient quant à eux des chiffres inférieurs à 100 mmHg.

> La PAD moyenne était de 79,60 #177; 5,23 mmHg (IC 95% [78,72 ; 82,05]) avec des extrêmes à 40 et 140 mmHg. 58% des patients (n = 29) avaient une diastolique supérieure à 90 mmHg.

> Une tachycardie supérieure à 100 battements/min était présente chez 82% de nos patients (n = 41). Les extrêmes étaient 54 et 150 pulsations/min. La moyenne était de 108,72 #177; 2, 60 pulsations/min (IC 95% [107,84 ; 111,59]).

> La fréquence respiratoire oscillait entre 11 et 47 cycles/min. La moyenne était de 31,50 #177; 1,15 cycle/min (IC 95% [30,62 ; 33,03]). 96% de nos patients (n = 48) avaient une polypnée supérieure à 19 cycles/min.

> La SpO2 variait de 71 à 92%. La moyenne était à 84,40 #177; 0,85% (IC 95% [83,52 ; 86,93]). Une SpO2 entre 80 et 96% était retrouvée chez 87,5% de nos patients (n = 35). La courbe de dissociation de l'hémoglobine nous a permis d'avoir une approximation de la pression partielle en oxygène (PaO2). Nous avons ainsi conclu à une hypoxémie chez tous nos patients, avec des chiffres oscillant entre 35 et 80 mmHg. 72,5% de nos patients (n = 29) avaient une PaO2 comprise entre 50 et 59 mmHg.

> La température moyenne était de 37,63 #177; 0,12°C (IC 95% [36,75 ; 39,31]). Les extrêmes étaient 36°C et 39,3°C. 74% de nos patients (n = 37) étaient apyrétiques. 22% étaient fébriles (n = 11), nous faisant penser le plus souvent à une infection intercurrente.

2.3.4.3 Caractères de la dyspnée

Tous nos patients étaient dyspnéiques. La majorité (68%) d'entre eux avait des signes de détresse respiratoire aiguë (tirage, battement des ailes du nez, geignement, respiration abdominale). La polypnée inspiratoire superficielle à type d'orthopnée avec détresse respiratoire aiguë a été le mode le plus rencontré (46%). Le

déclenchement de l'épisode aigu a été nocturne dans 68% des cas (n = 34) et vespérale dans 22% (n = 11).

Buff aux USA retrouve une prédominance matinale [60].

2.3.4.4 Signes fonctionnels

La dyspnée et l'expectoration étaient présentes chez tous nos patients (100% ; n = 50), suivies par la toux (98% ; n = 49), l'anxiété (84% ; n = 42) et l'hypersudation (78% ; n = 39). Seuls 24% (n = 12) de nos patients se plaignaient de douleurs dont 11patients de douleurs thoraciques. L'expectoration était mousseuse blanchâtre dans 52% des cas (n = 26), saumonée chez 42% (n = 21) et hémoptoïque dans 6% (n = 3).

La dyspnée associée à la toux avec expectoration mousseuse, anxiété et hypersudation représentait le profil clinique le plus rencontré, avec 66% des cas (n = 33).

Les autres signes étaient représentés par les signes généraux suivants : céphalées, troubles visuels, vertiges, hémiparésie, hémiplégie, dysarthrie, nausées, vomissements, anurie, givres urémiques, incontinence urinaire, cardiothyréose, goitre, arthrite, fracture du fémur et hémorroïdes.

2.3.4.5 Signes physiques cardio-pulmonaires

Les bruits du coeur étaient réguliers chez 70% de nos patients (n = 35). Le souffle d'IM était présent chez 38 patients (76%). Il était isolé dans 34 cas et associé à d'autres souffles chez 4 patients. Un bruit de galop a été perçu chez 25 patients (50%) dont 23 galops protodiastoliques B3 et 2 galops présystoliques B4. L'éclat de B2 était entendu au foyer pulmonaire chez 10 patients (20%) et aortique chez 2 patients (4%).

Les râles crépitants étaient présents chez 46 patients (92%). 6 patients (12%) avaient des sibilants, mimant parfois un asthme bronchique.

2.4 Profils paracliniques

Une radiographie du thorax a été réalisée chez tous nos patients. Certains patients ont effectué un ECG, une échographie cardiaque et un bilan biochimique minimum. Nous n'avons réalisé aucun cathétérisme cardiaque car non disponible dans notre pays.

2.4.1 Données radiographiques

Les anomalies fréquemment retrouvées étaient la redistribution vasculaire vers les sommets (100% ; n = 50), la cardiomégalie (96% ; n = 48), les opacités hilifuges en ailes de papillon (58% ; n = 29), et le flou périhilaire (22% ; n = 11). L'index cardio-thoracique le plus représenté était la classe V2 (0,55-0,59) avec 31 cas (62%), suivie par la classe V3 (0,60-0,64) avec 16 patients (32%).

La redistribution vasculaire vers les sommets associée aux opacités nodulaires bilatérales en ailes de papillon et à une cardiomégalie a constitué le profil radiographique le plus souvent observé (56% ; n = 28).

2.4.2 Données électrocardiographiques

42 patients (84%) avaient réalisé un ECG. Les principales anomalies étaient l'HVG (83,3% ; n =35), la tachycardie sinusale (54,7% ; n =23) et les troubles de la repolarisation (52,3% ; n =22).

2.4.3 Données échocardiographiques

23 de nos patients avaient réalisé une échographie cardiaque après accalmie de l'épisode aigu. La cardiomyopathie dilatée à fonction systolique altérée était de loin l'anomalie la plus rencontrée (65,2% ; n = 15), suivie par les troubles de la cinétique septale (43,4% ; n = 10), la cardiomyopathie dilatée à fonction systolique conservée (17,4% ; n = 4) et les troubles de la relaxation du VG (17,4% ; n = 4). 20 patients avaient une cardiomyopathie décelée à l'échographie.

En croisant ces données avec les patients ayant une HTA, nous constatons que 3 patients (60%) avaient une altération de la fonction systolique et 2 d'entre eux (40%) une dysfonction diastolique avec fonction systolique conservée. Nos chiffres se rapprochent ainsi de ceux de Gandhi et al. [36] qui démontre qu'en cas d'OAP

hypertensif, une insuffisance cardiaque diastolique est retrouvée dans près de la moitié des cas, soit 47,36%.

2.4.4 Données biochimiques

Nos conditions de travail ne nous permettaient pas d'avoir un bilan biochimique à orientation cardiologique en urgence. En effet, l'ionogramme sanguin, la numération formule sanguine, le dosage des enzymes myocardiques et la créatininémie ne pouvaient pas être réalisés en urgence dans notre hôpital. La gazométrie et le dosage du BNP [39, 40, 41] dont la valeur pronostique est connue ne sont pas réalisables au Mali.

2.5 Profils thérapeutiques

La prise en charge préhospitalière n'a été effective que chez un seul patient, bien que peu adaptée. Ne disposant pas de kit d'urgences, l'ordonnance était remise aux accompagnants. Ceci constituait un second facteur de retard dans la prise en charge thérapeutique. Le troisième facteur de retard était relatif aux conditions financières des patients et accompagnants.

2.5.1 Thérapeutiques médicamenteuses

Le furosémide a été administré chez tous nos patients (100% ; n = 50), suivi par l'oxygénothérapie nasale (masque et lunette) à fort débit (74% ; n = 37), les antihypertenseurs (62% ; n = 31), les salicylés comme antiagrégant plaquettaire (56% ; n = 28), les antibiotiques (54% ; n = 27). Seuls 46% (n = 23) de nos patients ont reçu un dérivé nitré, dont 36% (n = 18) par voie sublinguale et 10% (n = 5) par voie transdermique. Les dérivés nitrés par voie injectable n'ont pas été administrés car non disponibles au Mali. La digoxine et les corticoïdes ont été administrés respectivement chez 28% (n = 14) et 24% (n = 12).

Le furosémide, les dérivés nitrés et l'oxygène ont été administrés respectivement chez 100%, 59,3% et 24,4% des patients dans la série de Bétala [3]. Dans l'étude de Fiutowski en Pologne [57], les principales drogues administrées étaient les diurétiques (89%), suivies par les antibiotiques (84%) et l'aspirine (81%).

Dans notre série, l'administration de furosémide et d'oxygène semble être associée à un taux élevé de guérison (14 guérisons versus 5 décès ; p = 0,48). Par contre, l'administration de furosémide, d'oxygène et du dinitrate d'isosorbide par voie sublinguale s'associe à un taux de guérison moindre (9 guérisons versus 4 décès ; p = 0, 53). Ce constat pourrait laisser croire à un effet antagoniste des dérivés nitrés dans la prise en charge des OAP cardiogéniques. L'absence de dérivés nitrés injectables dans notre contexte pourrait expliquer ce fait car les dérivés nitrés per os ont un effet retard et moindre par rapport à la forme injectable. Ceci plaide en faveur de l'acquisition et de l'introduction des dérivés nitrés injectables dans la liste des médicaments essentiels puis dans notre stratégie de prise en charge. De plus, l'observation n'est pas statistiquement significative car nos probabilités sont nettement supérieures au seuil de signification p = 0,05.

Crane [55] affirme que moins de 70% des patients ont reçu les dérivés nitrés. Dans cette même étude, l'utilisation des dérivés nitrés était associée à une augmentation du taux de guérison. Rabacal [54] recommandait déjà l'utilisation des dérivés nitrés en première ligne dans le traitement de l'OAP cardiogénique dès 1993, lorsque la PA le permettait. En Pologne [57], les dérivés nitrés injectables étaient moins utilisés chez les patients décédés (52% versus 78% ; p < 0,00001).

Bien que la supériorité des vasodilatateurs nitrés sur le furosémide ait été récemment démontrée [52], il est clair que ces deux thérapeutiques ne doivent pas s'opposer mais se compléter [2, 18, 38, 46, 52].

2.5.2 Type de soluté

Seuls 4 (8%) de nos patients n'ont pas reçu du sérum glucosé 5% (dextrose 5%) à l'entrée.

2.5.3 Thérapeutiques non médicamenteuses

Nous avons eu recours à une aspiration pour libérer les voies aériennes supérieures chez 18% de nos patients. Une intubation trachéale a été effectuée chez 12% des patients (n = 6) et 4% (n = 2) de ceux-ci ont été mis sous assistance respiratoire (5 décès ; 83,33%).

Par ailleurs, le nombre de décès chez les patients intubés est très élevé en comparaison avec le taux de 27% cité par L'her [2].

2.6 Evolution

Elle a été spectaculaire chez certains de nos patients, avec régression rapide des symptômes. Toutefois, des complications et des décès ont été très souvent rencontrés.

2.6.1 Complications

19 de nos patients (38%) ont présenté des complications. Le choc cardiogénique et la fibrillation auriculaire ont été les complications le plus souvent rencontrées avec respectivement 6 cas chacun. Nous avons observé une relation signifiacative entre l'existence des complications et les décès (p = 0,0001) :7 patients avaient 2 complications et ont eu une survie nulle ; 6 patients ayant une seule complication sont décédés. Les 6 autres patients avec complication unique ont eu une évolution favorable. L'insuffisance rénale aiguë et l'arrêt cardio-respiratoire ont suivi avec 5 cas chacun. Nous avons aussi observés 2 cas d'hyperkaliémie et 2 cas de pleurésie.

2.6.2 Durée du séjour à l'hôpital

32% de nos patients (n = 16) ont séjourné à l'hôpital pendant 7 à 9 jours. Les extrêmes étaient de 3 heures et 24 jours. 72% de nos patients (n = 36) sont sortis de l'hôpital avant le 10e jour d'hospitalisation.

2.6.3 MortalitéNous avons eu 13 décès, soit 26% de notre effectif.

Le taux de mortalité est très variable selon les séries hospitalières. L'her évoque un taux de 16 à 20% [2], Bétala rapporte 18,5% de décès dans les 24 premières heures [3]. Fiutowski obtient un taux de 21% [57]. Notre taux est proche de celui de Crane qui trouve 26,2% [55]. Dans une étude portant sur les thrombolyses au cours de l'IDM à Dakar [61], Ndongo retrouve 25% de décès chez les patients ayant présenté un OAP.

Malgré toutes nos insuffisances dans la prise en charge des OAP cardiogéniques, notre taux de mortalité est comparable à celui des autres équipes. Toutefois, ce taux pourrait être revu à la hausse si nous avions pris en compte tous les patients chez qui il avait été suspecté un OAP cardiogénique mais décédés avant la réalisation d'une radiographie du thorax. Ce fait nous amène à prendre des mesures rapides pour améliorer notre pratique afin d'avoir une gestion des cas plus efficace et plus consensuelle.

2.7 Protocole de prise en charge de l'OAP cardiogénique

L'insuffisance du plateau technique ne nous permet pas une prise en charge optimale de l'OAP cardiogénique tel que décrit dans la littérature. Cela nous a conduit à proposer un protocole de prise en charge adapté à notre contexte.

Ce protocole comprend trois grandes étapes :

1) Orientation diagnostique devant un OAP cardiogénique

Cette étape souffre du délai entre l'épisode aigu et la réalisation des examens complémentaires, au premier rang desquels nous trouvons la radiographie du thorax. Leur accessibilité devrait être renforcée dans les situations d'urgence.

2) Prise en charge hospitalière de l'OAP cardiogénique : traitement symptomatique

L'absence de dérivés nitrés injectables au Mali représente la principale entorse à cette seconde étape. Comme substitut, malgré le délai d'absorption lent par rapport à la voie injectable, nous préconisons l'utilisation des dérivés nitrés per os chez tous les patients ayant un OAP cardiogénique, en s'assurant que la pression artérielle soit = 100 mmHg.

3) Prise en charge hospitalière de l'OAP cardiogénique : traitement étiologique

Le plateau technique nous amène également à cette étape à réadapter les protocoles de prise en charge des étiologies de l'OAP.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry