REPUBLIC OF CAMEROON
Peace-Work-Fatherland
REPUBLIQUE DU CAMEROUN
Paix -Travail- Patrie
MINISTERE DE
L'ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR
MINISTRY OF HIGHER
EDUCATION
UNIVERSITE DE YAOUNDE II
UNIVERSITY OF YAOUNDE
II
FACULTE DES SCIENCES
JURIDIQUES ET POLITIQUES
FACULTYOF LAW AND
POLITICAL SCIENCE
Mémoire présenté et soutenu publiquement
en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes
Approfondies (DEA) en Droit
privé fondamental, option droit civil
Par :
NJOYA NJUMOU Moustapha
Maîtrise en Droit privé
Sous la direction du
Pr. Alexandre Dieudonné TJOUEN
Maître de Conférences associé à
l'Université de Yaoundé II
Avocat au Barreau du Cameroun
Année Académique 2005-2006
AVERTISSEMENT
L a Faculté des Sciences Juridiques et
Politiques
De
L'Université de Yaoundé II-SOA
N'entend
donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce
mémoire
Ces opinions devront être considérées
comme propres à leur auteur.
DEDICACE
A mon père M. NJUWOU Salifou ;
A ma mère
LINJOUOM Rikiatou,
A sa coépouse MEFIRE Riratou;
Qu'ils trouvent
en ce travail le début de concrétisation de leurs sacrifices
incommensurables.
Et enfin à ma fille FADILA MOUSTAPHA Mégane,
que ce travail soit pour elle un exemple à
suivre et à
dépasser.
REMERCIMENTS
Nous rendons grâce à DIEU, Seigneur de l'Univers
qui pourvoit à tous nos besoins ; Nos remerciements vont à
l'endroit de ceux qui, de près ou de loin ont contribué à
la réalisation de ce Mémoire ;
Nous pensons d'abord au Professeur Alexandre Dieudonné
TJOUEN, Maître de Conférence associé à
l'Université de Yaoundé II SOA qui, malgré ses multiples
occupations, a accepté de diriger ce Mémoire, guidant ainsi nos
premiers pas dans la recherche ;
Nous pensons ensuite à tous les Enseignants de
l'Université de Yaoundé II, pour la formation qu'ils nous ont
donnée à travers les cours magistraux et les conseils
d'aînés qu'ils nous ont prodigués en dehors des amphis
théâtre;
Nous pensons enfin à :
· M. Issiaka MFONDOUOP, pour ses encouragements et conseils
;
· M. Choïbou NJIKAM, pour l'éducation qu'il
nous a donnée ;
· La famille AMOUYE, pour le soutien qu'elle nous a
apporté ;
· M. Chouaibou MOUANFON pour son aide ;
· MM Loudi Simplice FOUNDIKOU et Amidou PEKA pour leurs
soutien et assistance ;
· MM. Amadou MEFIRE, Théophile LEOUSSOUCK et Serge
Bernard MVOGO pour leur soutien;
· Tous mes frères, soeurs, amis et camarades pour
les encouragements et le soutien qu'ils nous ont apportés pour le bon
accomplissement de ce travail.
TABLES DES ABREVIATIONS
· APJ : Agent de Police judiciaire
· Art : article
· C. Civ. : Code Civil
· Cass. Cour de Cassation française
· CE : Conseil d'Etat
· Cf. : confère
· chron. : chroniques
· CIC : code d'Instruction Criminelle
· Civ. : chambre civile
· CP : Code Pénal
· CPO : Criminal Procedure Ordinance
· CPP : Code de Procédure Pénale
camerounais
· CPPF : Code de Procédure Pénale
Français
· Crim : chambre criminelle
· D. : Dalloz
· éd. : édition
· GP : Gazette du Palais
· Ibidem : ici même
· JCP : Juris Classeur Périodique
· Jp. : jurisprudence
· LGDJ : Librairie Générale de Droit et de
Jurisprudence
· MP : Ministère Public
· NCPC : Nouveau Code de Procédure Civile
français
· OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du
Droit des Affaires
· Op. cit. : opere citato : dans l'ouvrage cité
· OPJ : officier de police judiciaire
· P. : page
· PP. : pages
· PUA : Presses Universitaires d'Afrique
· PV : Procès Verbal (aux)
· RASJ : Revue Africaine des Sciences Juridiques
· Req : chambre des requêtes
· TGI : Tribunal de Grande Instance
· TPI : Tribunal de Première instance
· TPIGI : Tribunal de Première et de Grande
Instance
· UY II : Université de Yaoundé 2 (SOA)
· UY : Université de Yaoundé d'avant la
réforme universitaire
· V. : Volume
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE ...1
PREMIERE PARTIE : LE MINISTERE PUBLIC, PARTIE PRINCIPALE AU
PROCES PENAL ..8
CHAPITRE I : LE REAMENEGEMENT DES FONCTIONS DU MINIST7RE PUBLIC
DANS LES PHASES
PREPARATOIRES DU PROCES ..10 SECTION I : LE MINISTERE PUBLIC,
AUTORITE DES POURSUITES .11 SECTION II : LA PERTE DE LA QUALITE DE MAGISTRAT
INSTRUCTEUR PAR LE
PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE 24
CONCLUSION DU CHAPITRE I 36
CHAPITRE II : LE MINISTERE PUBLIC ET L'EXERCICE DE L'ACTION
PUBLIQUE 38
SECTION I : LE SOUTIEN DE L'ACCUSATION .38
SECTION II : L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS ET
L'EXECUTION DES DECISIONS DE
JUSTICE REPRESSIVES PAR LE MINISTERE PUBLIC.51
CONCLUSION DU CHAPITRE II 60
CONCLUSION DE LAPREMIERE PARTIE ..61
DEUXIEME PARTIE : LE MINISTERE PUBLIC, PARTIE JOINTE AU PROCES
CIVIL 63
CHAPITRE I : LE REGIME DES COMMUNICATIONS AU MINISTERE PUBLIC,
PARTIE
JOINTE 65
SECTION I : L'INFORMATION DU MINISTERE PUBLIC : LES
TYPES DE
COMMUNICATION 65
SECTION II : LA PROCEDURE ET L'IMPACT DE LA
COMMUNICATION SUR LE PROCES
CIVIL 74
CONCLUSION DU CHAPITRE I 79
CHAPITRE II : L'EXTENTION DU ROLE DU MINISTERE PUBLIC
DANS LES PROCES CIVILS : LA DE
FENSE DE L'ORDRE PUBIC PAR VOIE D'ACTION ..80
SECTION I : LE
DOMAINE LEGAL DE L'INTERVENTION DU PARQUET PAR VOIE
D'ACTION 80
SECTION II : LA GENERALISATION CONTROVRSEE DE
L'ACTION D'OFFICE DU PARQUET
POUR LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC 89
CONCLUSION DU CHAPITRE II ..93
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 95
CONCLUSION GENERALE 96
RESUME
Le Ministère public est un corps de magistrats
établis près les juridictions de l'ordre judiciaire
(pénale et civile principalement) ayant pour mission de veiller, au nom
de la société et dans l'intérêt
général, à la bonne application de la loi et au respect de
l'ordre public. L'exercice de cette mission doit cependant tenir compte des
droits et libertés des citoyens
Dans le procès pénal, le Ministère public
est toujours partie principale, sauf devant la Cour Suprême où il
est en principe partie jointe dans toutes les affaires. L'objectif de concilier
les intérêts de la société et les droits et
libertés du citoyen est recherché par le législateur
camerounais à travers la réorganisation des attributions du
ministère public.
L'efficacité de l'action du Ministère public
comme gardien de la loi et du respect de l'ordre public pourrait être
garantie par son organisation géographiquement tentaculaire et ses
caractères particuliers que sont l'indivisibilité,
l'irresponsabilité, l'irrécusabilité,
l'indépendance et la subordination hiérarchique.
Le respect des droits et libertés des citoyens serait
assuré à travers le Ministère public par la direction et
le contrôle qu'il exerce sur l'activité de la police judiciaire,
son dessaisissement de la qualité de magistrat instructeur et le
renforcement du caractère accusatoire du procès.
Dans le procès civil, l'efficacité de son
rôle est garantie à travers les types de communication lorsqu'il
est partie jointe et par son droit d'action lorsqu'il est partie principale
dans les cas spécifiés exceptionnellement par la loi et dans ceux
touchant directement et principalement à l'ordre public.
Des problèmes demeurent cependant, qui pourraient
compromettre l'efficacité du rôle du ministère public.
Les limites à la séparation des fonctions de
justice répressive associées à l'organisation
hiérarchique du Ministère public et au statut de ses magistrats
menacent l'indépendance de la justice répressive et partant
l'égalité des citoyens devant la loi.
Le silence du législateur sur l'intervention du
Ministère public en matière de redressement judiciaire et sur son
action d'office pour la défense de l'ordre public, constitue un danger
pour la protection de l'ordre public et la sécurité des affaires
respectivement.
La modicité des moyens financiers, matériels et
humains du Ministère public est de nature à rendre son action
ineffective et porter ainsi un coup fatal à l'efficacité de sa
mission. Il en est de même de l'immatérialité sur le
territoire national de la majorité des tribunaux.
Le législateur et les pouvoirs publics sont donc
interpellés afin que l'indépendance de la justice et l'Etat de
droit soient effectivement garantis.
ABSTRACT
The public ministry is a body of magistrates established about
the jurisdictions of legal order (mainly, the penal and civil orders) having as
missions, to provide the society and the general interest, a good application
of the law and the respect of the public order. The exercise of this mission
must however take account of the rights and freedom of citizens.
In the penal lawsuit, the public ministry is always the
principal party except in front of Supreme Court where it is in fact, the joint
party in all affaires. The objective to reconcile the interest of the society,
the rights and freedom of citizens is sought by the Cameroonian legislator
through the reorganisation of the attributions of the public ministry.
The effectiveness of the action of the public ministry as care
taker of the law and the respect of public order could be guaranteed by is
geographical tentacular organisation and its particular characters which are
hierarchical subordination, independency, indivisibility, irrecusability and
irresponsibility.
The respect of the rights and freedom of the citizens would be
ensured by public ministry by the management and control which exerts on the
activity of the judicial police (criminal investigation department), its
dispossession of the quality of examining magistrate and the reinforcement of
the accusatory character of the process.
In the civil lawsuit, the effectiveness of its role is
guaranteed by the types of communication when it is joint party and by its
rights of action when it is principal party exceptionally in cases specified by
the law and those touching directly and principally the public order.
However, the problems that remain could compromise the
effectiveness of the role of the public ministry.
The limits of the separation of functions of repressive
justice associated to the hierarchical organisation of the public ministry and
to the status of its magistrates, treating the independence of repressive
justice and consequently, the equality of citizens before the law.
The silence of legislator about intervention of the public
ministry in regards to judicial rectification and on its action of the duty to
defence the public order, constitutes a danger to the protection of the law and
the safety of business respectively.
The need for financial, material and human means by the public
ministry is by nature to render its action ineffective and thus carry a fatal
stroke to the effectiveness of its mission. It is the same for the
immateriality on the national territory of the majority of the tribunals
(courts).
The legislator and the public authorities are there fore call
upon so that the independence of justice and the state of law be effectively
guaranteed.
1. Le terme magistrat est un vocable utilisé pour
désigner des personnalités diverses exerçant certaines
fonctions dans un Etat1. Le plus souvent, on n'y perçoit que
les membres du corps judiciaire chargés de la fonction de juger ;
c'est-à-dire les membres de la magistrature assise. Pourtant, à
coté des juges qui rendent les jugements et les arrêts, il en
existe d'autres qui sont chargés non pas de juger, mais de veiller
à l'application de la loi et que l'on a coutume d'appeler « Les
magistrats du Ministère public » parce que leur mission
consiste uniquement à défendre les intérêts de la
collectivité publique et spécialement, de la loi qui en est
l'expression.
2. Le Ministère public est une institution
polyvalente2, ambiguë3 et paradoxale4
dont la définition n'est pas des plus aisées. Nous retiendrons,
pour nous en contenter, celle de VOLFT (J) qui pense que «le
Ministère public est un corps permanent de magistrats
spécialisés chargés, au nom de la nation qu'ils
représentent, d'agir auprès des tribunaux de l'ordre judiciaire
et dans la société civile pour assurer la défense de
l'intérêt général et de la liberté
individuelle »5
3. Institution spéciale de droit judiciaire
français, le Ministère public a des origines fort anciennes qui
trouvent leur source dans la nuit du haut moyen age pour n'apparaître
à la lumière du droit qu'au début du XIVe
siècle. Ses ancêtres sont les avocats et procureurs du roi qui
n'étaient que des avocats ordinaires plaidant pour la défense des
intérêts privés du Roi. Au fur et à mesure que
s'affermissait l'autorité du monarque, le rôle de ces avocats et
procureurs se développait considérablement. AU XVe
siècle, les lettres de nomination des avocats du Roi leur interdisaient
de plaider pour les particuliers. Au XVIe siècle, cette
interdiction fut généralisée et ces avocats devinrent des
magistrats intégrés aux parlements et finirent par faire partie
des tribunaux. Les avocats et procureurs du Roi furent appelés à
surveiller l'application des peines d'amendes qui alimentaient le trésor
royal et après la succession de la procédure inquisitoire
à la procédure accusatoire, ils eurent le droit d'exercer
l'accusation, puis, de la soutenir et formèrent alors le
Ministère public. La révolution de 1789 modifia l'institution du
Ministère public, qui fut érigée en « agent du
pouvoir exécutif auprès des tribunaux ». Le
Ministère public moderne vit le jour avec le code d'instruction
criminelle (CIC) de 1808, qui lui confia un rôle
prépondérant dans les procès pénaux. En 1810, il
fut réorganisé en un modèle pyramidal.
4. L'entrée de cette institution en droit camerounais
s'est faite de façon schématique et
1. Le Président de la République, le maire...
2. La polyvalence vient du fait que le Ministère public a
des fonctions diverses tant sur le plan administratif que judiciaire
3. L'ambiguïté vient du fait que les membres du
Ministère public sont des juges qui ne jugent pas.
4. Le paradoxe traduit le fait que le Ministère public se
présente à la fois comme représentant de la
société et du gouvernement auprès des juridictions.
5. VOLFT (J), le Ministère
public, Paris, QUE SAIS-JE ? 1998 P. 6.
chronologique. L'ex Cameroun oriental a été le
premier à accueillir cette institution à l'époque
où la SDN (Société Des Nations) l'a placé sous
mandat français. En effet le Décret du 22 mai 1924 rendait
exécutoires sur le territoire camerounais, les lois et Décrets
promulgués en AEF antérieurement au 1er janvier 1924
et partant, le code d'instruction criminelle (CIC) dans lequel étaient
prévues les institutions du Ministère public et du juge
d'instruction. Son entrée dans l'ex Cameroun occidental s'est faite avec
l'ordonnance no 72 / 4 du 26 août 1972 car le Criminal
Procedure Ordinance (CPO) applicable dans cette partie du pays ne connaissait
pas l'institution du Ministère public ainsi que celle du juge
d'instruction. C'est dire que, l'indépendance du Cameroun le
1er Janvier 1960 puis l'indépendance de l'ex Cameroun
occidental le 1er Octobre 1961 ou Réunification suivie de
l'Unification, ne modifièrent pas la configuration du Ministère
public qui restait marquée par une inadéquation
géographique et fonctionnelle6.
Cette situation a pris définitivement fin avec le code
de procédure pénale du 27 juillet 2005, entré en vigueur
le 1er janvier 2007, uniformisant la procédure pénale
sur toute l'étendue du territoire camerounais.
5. Auprès des juridictions de
l'ordre judiciaire, le Ministère public est organisé de
façon structurée et hiérarchisée. Cette
organisation comporte parfois de nombreux services à la tête
desquels se trouve un « Procureur ». Les dispositions de
l'article 127 du code de procédure pénale camerounais
énoncent que « (...) le Ministère public est suivant les
distinctions établies au présent article constitué de
l'ensemble des magistrats du parquet7 général de la
Cour Suprême, du parquet général de la Cour d'Appel, du
parquet du tribunal de grande instance et du parquet du tribunal de
première instance.
Le parquet général de la Cour Suprême
comprend le Procureur Général près ladite Cour et
l'ensemble des magistrats dudit parquet. Son ressort territorial est celui de
la Cour Suprême8.
Le parquet général de la Cour d'Appel
comprend le Procureur Général près ladite cour et
l'ensemble des magistrats dudit parquet. Son ressort territorial est celui de
la Cour d'Appel9 .
6. SANY (F.B), le Ministère public au Cameroun,
Mémoire de Licence en Droit privé, UY 1975-1976
7. autre appellation du Ministère public dont
l'origine est controversée. Certains auteurs prétendent qu'il est
la survivance du temps où le Procureur du Roi n'était pas encore
devenu un magistrat et où de ce fait, n'ayant pas sa place à
l'estrade (situation à laquelle on est revenu en droit camerounais),
exerçait ses fonctions sur le << parquet >> de la salle
d'audience. D'autres par contre soutiennent que le mot << parquet
>> vient de ce que, dans les salles d'audience, les magistrats du
Ministère public sont isolés des magistrats du siège,
à l'intérieur d'un << petit parc >>.
8 Ce ressort s'étend au territoire national
9 L'article 19 de la Loi du 29 déc. 2006
prévoit que ce ressort est celui d'une région et peut, par
Décret présidentiel, être étendu à plusieurs.
Ces régions n'étant pas encore effectives, il faut se rapporter
aux actuelles provinces.
Le parquet du tribunal de grande instance comprend le
Procureur de la République près ledit tribunal et l'ensemble des
magistrats dudit tribunal. Son ressort territorial est celui du tribunal de
grande instance10 .
Le parquet du tribunal de première instance
comprend le Procureur de la République près ledit tribunal et
l'ensemble des magistrats dudit parquet. Son ressort territorial est celui du
tribunal de première instance11... ».
Les membres de chaque parquet exercent sous le contrôle,
la direction et la responsabilité du chef du parquet, les attributions
reconnues à celui-ci par la loi.
6. Au-delà de cette
organisation, le Ministère public présente un certain nombre de
caractères qui le distinguent profondément des magistrats du
siège. Il s'agit de l'indivisibilité, de
l'indépendance, de l'irrécusabilité, de
l'irresponsabilité, de l'amovibilité et de la subordination
hiérarchique.
L'indivisibilité du Ministère public signifie
que les actes de procédure accomplis par chaque membre du parquet sont
censés l'être par le parquet tout entier et que les membres du
parquet sont interchangeables au cours d'un même procès; ce qui
n'est pas le cas des magistrats du siège
Les magistrats du Ministère public sont
indépendants à la fois à l'égard des juridictions
et des justiciables.
L'indépendance des magistrats du Ministère
public à l'égard des juridictions auxquelles ils sont
rattachés se traduit par le fait qu'ils ne peuvent recevoir ni
instructions, ni blâmes de celles-ci relativement à leurs actes et
paroles. En outre, ces juridictions ne peuvent pas leur refuser la parole.
A l'égard des justiciables, l'indépendance du
Ministère public se manifeste par le fait que les transactions,
désistements au profit des délinquants ne le lient aucunement ;
il est toujours libre d'engager les poursuites à leur égard.
Le Ministère public, du fait de sa qualité de
partie principale et indispensable au procès pénal, ne peut pas
être récusé; il n'est pas remplaçable à la
manière d'un magistrat du siège lorsqu'il est
soupçonné de partialité. Dit-on, on ne peut pas demander
la substitution, mieux, la neutralisation12 de son adversaire.
Cependant le Ministère public est récusable en matière
civile pour les mêmes causes que les magistrats du siège lorsqu'il
est partie jointe13. Ceci peut se justifier par le fait qu'il n'est
pas dans ce cas une véritable partie au procès.
10 Ce ressort est celui du territoire d'un ou de
plusieurs départements (art. 16, loi du 29 déc.
précitée)
11 Ce ressort est celui d'un ou de plusieurs
arrondissements (art. 13, même Loi)
12 Cette neutralisation viendrait du fait de
l'indivisibilité du Ministère public ; la récusation d'un
membre du parquet pouvant traduire celle du parquet tout entier.
13 Art. 161 CPCC et art. 591 et s. CPP
L'irresponsabilité du Ministère public est de
Principe .Il ne peut ni être condamné à payer des dommages
et intérêts lorsqu'il intente une action à tort, ni
être condamné à payer les frais du
procès14 lorsqu'il succombe. Cette irresponsabilité
garantit l'absence de timidité dans l'action des magistrats du
parquet.
L'amovibilité du Ministère public signifie que
leurs nominations, mutations et promotions sont à la disposition du
pouvoir politique.
La subordination hiérarchique du Ministère
public traduit sa structure pyramidale. Au sommet se trouve le Ministre de la
justice, Garde des Sceaux, bien que ne faisant pas partie du parquet, mais du
fait de l'autorité qu'il a sur les procureurs généraux
près les Cours d'Appel. Le Garde des Sceaux peut leur adresser des
instructions et même leur donner des ordres. Cette autorité est
indirectement exercée sur les procureurs de la République par les
procureurs généraux dans les limites de leur compétence
territoriale. Les procureurs de la République exercent leur
autorité sur leurs substituts.
7. Le Ministère public est une institution commune aux
juridictions pénales et civiles de droit commun. Il intervient
également devant d'autres juridictions15. Il
dispose
d'attributions multiples et diverses dont l'inventaire exhaustif ne
saurait être dressé. Les unes sont coutumières, d'autres se
déduisent des principes généraux du droit, ou figurent
dans les textes nombreux et épars. Elles se rattachent toutes à
la fonction principale du Ministère public et à sa nature hybride
c'est-à-dire de représentant de la nation et du pouvoir
exécutif auprès des juridictions judiciaires. On peut les classer
selon les modes d'intervention du Ministère public (action, proposition
et contrôle), selon les objectifs poursuivis par celui-ci (protection,
surveillance, administration) ; selon les domaines d'activité
(pénal, civil, administratif).
Par souci de clarté, c'est cette dernière
classification que nous retiendrons et uniquement ses aspects pénal et
civil ; étant observé que dans chacun d'eux nous retrouverons les
autres classifications.
8. Dans son domaine de prédilection, le pénal,
le Ministère public exerce l'action publique. Après
investigations que ses membres mènent personnellement, dirigent,
délèguent ou surveillent, il porte une accusation publique contre
les auteurs des crimes, délits et contraventions devant les tribunaux
répressifs, la soutient à l'audience et assure enfin
l'exécution des jugements rendus.
14 Crim. 13 mars 1896, S. 1896, I, 544.
15 Devant les juridictions d'exception telles que :
le tribunal militaire, la Haute Cour de Justice et la Cour de
Sûreté de l'Etat. Devant le tribunal militaire, le
Ministère public est exercé par un commissaire du gouvernement,
un ou plusieurs substituts ; devant la Haute Cour de Justice, c'est le
Procureur Général près la Cour Suprême qui fait
office de Ministère public alors que devant la Cour de
Sûreté de l'Etat, le Procureur Général est
assisté d'un ou de plusieurs substituts. La Loi du 29 déc. 2006,
n'ayant pas prévu cette juridiction, la doctrine camerounaise estime
à raison que celle-ci a disparu avec l'ordonnance du 26 août 1972
qui l'avait créée.
L'enjeu dans le procès pénal touche de
près ou de loin à la liberté et à la
sécurité des personnes et des biens. Ce type de procès
oppose toujours le Ministère public à X qui a méconnu une
ou plusieurs dispositions du code pénal ; la partie civile n'intervenant
qu'éventuellement au cas où elle aurait subi un préjudice
résultant de l'infraction. C'est le domaine dans lequel l'ordre public
est le plus en cause et le Ministère public y est toujours partie
principale.
9. Dans le procès civil, l'opposition se fait en
principe entre X et Y, le Ministère public n'intervenant
qu'exceptionnellement dans les causes touchant à l'ordre public ou pour
représenter certaines personnes. Il y est donc en principe partie jointe
et exceptionnellement partie principale.
La distinction partie principale et partie jointe
recèle un intérêt non négligeable sur le plan
procédural, notamment en ce qui concerne les actes de procédure,
la liberté de conclusion, le tour de parole, le paiement des frais de
justice et l'exercice des voies de recours.
10. En tant que partie principale, le Ministère public
est tenu d'accomplir les actes de procédure, de procéder à
des notifications,d'être notifié et d'être présent
à l'audience ; ce qui n'est pas le cas dans les procès civils
lorsqu'il n'est que partie jointe.
Comme partie principale, le Ministère public est
irrécusable, tenu d'assister aux mesures d'instruction après
convocation dans les conditions et sanctions identiques à celles de
toute autre partie.
En ce qui concerne le paiement des frais de procédure,
le Ministère public ne les paye jamais car c'est le trésor public
qui endosse ses charges.
Le Ministère public peut exercer toutes les voies de
recours ordinaires en tant que partie principale et même certaines voies
de recours extraordinaires telles que le pourvoi en cassation, le pourvoi dans
l'intérêt de la loi ...
11. Les questions qui se posent sont multiples et relatives
à l'opportunité de l'action du Ministère public
(opportunité des poursuites) et aux droits et libertés
individuelles dans les procès pénal et civil ; autrement dit, le
Ministère public peut-il être contraint d'agir ou non ?
Dispose-t-il d'une faculté totale d'action dans les procès en
question ? L'action du Ministère public rime-t-elle avec le souci de
plus en plus grandissant de protection des droits et libertés
individuelles ; peut-on parler de l'efficacité et de
l'effectivité des fonctions du Ministère public conciliant le
respect des droits de l'Homme, l'intérêt général et
l'intérêt de la justice ?
12. L'intérêt du choix de ce sujet par nous, est
premièrement d'actualité avec l'avènement historique du
premier code de procédure pénale camerounais qui a apporté
d'innombrables innovations dans le sens d'une garantie accrue des droits et
libertés des justiciables. Deuxièmement, l'opposé des
droits et libertés des citoyens étant toujours l'ordre
public, il nous a paru utile d'analyser la place de
l'institution dont la mission essentielle consiste à préserver
cet ordre dans l'ensemble du territoire camerounais suite à
l'harmonisation des systèmes britannique et français par la
reforme. De plus, le Ministère public généralement
considéré comme acteur passif dans les procès civils, et
mal connu au Cameroun même parmi les personnes cultivées, s'est
révélé nécessaire dans une étude comme
celle-ci, dans un but didactique. Ce sujet présente en outre un
intérêt important, relativement au débat sur
l'individualisme et le collectivisme.
13. A tout prendre et dans un souci
de clarté comme déjà dit, nous analyserons le rôle
du Ministère public comme partie principale dans le procès
pénal, au regard des dispositions du Code de Procédure
Pénale camerounais dans une première partie, et comme partie
jointe dans le procès civil, dans une seconde partie.
14. Le code de procédure pénale camerounais
(CPP) du 27 juillet 2005 entré en vigueur le 1er Janvier 2007
est l'aboutissement d'une longue réflexion entamée depuis 1973
avec la mise sur pied des commissions de réforme législative. Il
poursuit un certain nombre d'objectifs énoncés à
l'exposé des motifs du projet de loi16 qui l'a fait
naître. Il s'agit notamment, comme déjà dit, de
l'harmonisation des règles de procédure sur l'ensemble du
territoire national ; de l'adaptation desdites règles aux exigences de
sauvegarde des droits du citoyen à toutes les phases de procédure
judiciaire ; de l'exécution rapide des décisions de justice ; de
la réduction des lenteurs judiciaires et du recouvrement rapide des
amendes dès le prononcé de la décision. Pour ce faire, ce
code a apporté d'innombrables innovations à la procédure
pénale camerounaise. On peut bien se demander si ces innovations n'ont
pas affecté le rôle du Ministère public; autrement dit,
quelles sont les modifications apportées aux fonctions du
Ministère public et quelle appréciation peut-on en faire au
regard des objectifs ci-dessus ?
15. Cette question ne manque pas d'intérêt car
elle nous permet de présenter l'acteur principal du procès
pénal au regard des grands principes garantissant le droit à un
procès équitable17, surtout lorsqu'on sait que sous le
couvert de protéger le corps social, on a trop souvent mis en mal les
droits de l'individu dans le procès pénal18. En effet,
les textes antérieurement applicables en matière de
procédure pénale au Cameroun recelaient en eux des insuffisances
notoires relativement à la protection et à la sauvegarde des
droits et libertés des citoyens. Le législateur essaie d'y mettre
un terme à travers le réaménagement des fonctions du
Ministère public dans les phases préparatoires au jugement
(chapitre 1) et en le mobilisant davantage dans les phases finales du
procès pénal (chapitre 2)
16 Loi N° 2007/007 du 27 juillet 2005 portant
code de procédure pénale
17 Droit prévu par des textes internationaux
ratifiés par le Cameroun comme l'article 7 de la charte africaine des
droits de l'Homme et des peuples. Ce droit s'apprécie relativement
à la longueur du procès, les garanties de la présomption
d'innocence, du droit de se défendre, à la garantie de respect de
l'intégrité physique et morale...
18 Voir les textes en vigueur avant 2007 notamment
l'Ordonnance N° 72 / 4 du 26 Août 1972 portant organisation
judiciaire qui a fusionné les autorités de poursuite et
d'instruction pour lutter contre le grand banditisme...
CHAPITRE 1 : LE REAMENAGEMENT DES FONCTIONS DU
MINISTERE PUBLIC DANS LES PHASES PREPARATOIRES DU PROCES
16. Les phases préparatoires du procès ou
phases de recherche peuvent se définir comme celles au cours desquelles
sont effectuées des investigations en vue de rassembler les
éléments nécessaires à l'établissement de la
culpabilité d'un suspect ou à sa décharge. Il s'agit plus
concrètement des enquêtes de police judiciaire et de l'information
judiciaire, phases fondamentales au cours desquelles toute opération est
capitale pour la société et pour l'individu encore sous la
protection de la présomption d'innocence. Sous le règne des
textes antérieurs19 au code de procédure pénale
(CPP), un certain nombre d'atteintes étaient portées aux
principes régissant le procès pénal tels que la
présomption d'innocence, la séparation des fonctions de justice
répressive... Cela pouvait se vérifier par l'absence de
réglementation de certaines opérations, la réglementation
permissive de certaines mesures privatives de liberté et le cumul des
fonctions de poursuite et d'instruction. En effet, l'enquête
préliminaire demeurait officieuse et la séparation des trois
fonctions de justice répressive respectée dans le code
d'instruction criminelle, avait été remplacée par le cumul
des fonctions de poursuite et d'instruction séparées de celle de
jugement par l'ordonnance de 1972 et ses textes modificatifs.
17. Le code de procédure pénale de Juillet 2005
a apporté des solutions considérables à ces
problèmes à travers la précision des fonctions du
Ministère public sur les poursuites (section I) et le dessaisissement du
Procureur de la République de la qualité de magistrat instructeur
(section II).
Section 1 : Le Ministère public, autorité
des poursuites
18. En tant qu'autorité de poursuite, le
Ministère public est chargé de constater les infractions, d'en
rechercher les auteurs et complices, de déclencher l'action publique
qu'il exercera devant le juge d'instruction et ou de jugement. Il est
aidé dans cette tache par les autorités de police judiciaire
encore appelées ses auxiliaires, et sur qui il conserve une
autorité après en avoir perdu la qualité comme d'autres
magistrats20. Cette
autorité se traduit par le
19 C'est-à-dire le code d'instruction
criminelle et le criminal procedure ordinance et les premiers textes
d'harmonisation des règles de droit processuel au Cameroun que sont :
l'ordonnance précitée et ses textes modificatifs notamment les
ordonnances N° 72 / 21 du 19 Octobre 1972, 73/ 9 du 25 Avril 1973, La Loi
N° 76/17 du 08 Juillet 1976, la Loi N° 89/019 du 29 Décembre
1989, LA LOI N° 90/ 058du 19 Décembre 1990
20 Contrairement à ce que pense un auteur
dans son exposé sur les relations entre le juge d'instruction et le
Ministère public au séminaire sur l'appropriation du code de
procédure pénale, exposé N° 6 page 4 en s'appuyant
sur les dispositions de l'article 192 qui, en parlant du « magistrat
commis » fait référence à un juge d'instruction qui
aurait reçu commission rogatoire d'un premier, suivant les dispositions
de l'article 191 CPP. Or la lecture des articles 78 et suivants est
suffisamment claire pour nous permettre de constater le dessaisissement du
Procureur de la République de la qualité d'OPJ. Et surtout
lorsqu'on les confronte à celles
pouvoir de direction (paragraphe 1) et de contrôle
(paragraphe 2). Paragraphe I : La direction des enquêtes de
police judiciaire
19. La police judiciaire peut renvoyer selon un auteur
camerounais21 à deux acceptions : une fonction et un organe.
Comme fonction, la police judiciaire renvoie à l'ensemble d'actes de
recherche, de constatation des infractions à la loi pénale, de
rassemblement des preuves qui s'y rapportent afin de faciliter
l'appréciation de l'opportunité des poursuites ou
l'appréciation des preuves. Et comme organe, elle renvoie à
l'ensemble d'autorités chargées d'exercer cette fonction.
Elle se distingue de la police administrative22
mais de façon relative23. Dans son aspect fonctionnel, elle
accomplit les actes d'enquête préliminaire régulés
par le Procureur de la République (A), régulation
tempérée par le pragmatisme dans l'enquête de flagrance
(B).
A. Le Procureur de la République,
régulateur .des actes de l'enquête préliminaire
20. Longtemps restée officieuse, l'enquête
préliminaire24 est devenue officielle25 (I) et
exercée par les autorités de police judiciaire26 que
les articles 78 et 137 (1) CPP placent sous la direction du Procureur de la
République27. Cette réglementation constitue une
garantie au respect des droits et libertés dont la violation est
sanctionnée (II)
I. La réglementation des actes de l'enquête
préliminaire
21. Le Procureur de la République est le destinataire de
toutes les plaintes, dénonciations et procès verbaux (PV). En cas
d'infraction, toute personne ayant connaissance
de l'article 9 CIC qui disposait :« la police
judiciaire sera exercée...par les Procureurs de la République ou
leurs substituts ; les juges d'instructions ; les juges des sections de
tribunaux dépourvus du Ministère public ;l es juges de paix ; ...
»
21 LAM BIDJECK (L) La police judiciaire
générale au Cameroun, thèse de Doctorat
3ème cycle Droit privé UY.
22 Jurisprudences Baud et Noua Lek CE 11 Mai 1951 S
1952 III 13 conclusion DELVOLVE « il y a police judiciaire quand
l'opération de police vise à rechercher l'infraction et police
administrative quand le but de la mission exercée est le maintient de
l'ordre ».
23 Les deux polices peuvent être
exercées par des mêmes agents ; une opération de police
administrative peut se transformer en une opération de police
administrative accomplie par la même personne c'est le cas de l'agent de
police qui dirigeant la circulation routière (opération de police
administrative), verbalise un automobiliste ayant violé ses
prescriptions.
24 Selon RASSAT (M-L), elle est appelée
ainsi parce qu'elle a lieu avant les actes judiciaires et dans le but de mettre
fin aux pratiques qui consistaient à procéder aux enquêtes
officieuses après l'instruction régulière.
25 Elle l'était déjà en droit
français depuis le code de procédure pénale
26 A la lecture des articles 79 et 81 du code de
procédure pénale, on peut distinguer les officiers de police
judiciaire, les agents de police judiciaire qui sont une création du
code de procédure pénale, et les fonctionnaires et personnes
auxquelles la Loi a reconnu les attributions d'autorité de police
judiciaire.
27 Art 78 CPP « la police judiciaire est
exercée sous la direction du Procureur de la République ...
» ; art. 137 (1) CPP «le Procureur de la République
dirige et contrôle les diligences des officiers de police judiciaire...
».
de sa commission est ténue d'en informer, soit
directement le Procureur de la République, soit tout officier de police
judiciaire ou toute autorité administrative de la localité. Cette
dernière est ténue de porter cette information à la
connaissance du Procureur de la République ou de l'officier de police
judiciaire (OPJ) le plus proche. L'OPJ ou l'agent de police judiciaire (APJ)
peut, de sa propre initiative ou sur instruction du Procureur de la
République, ouvrir une enquête à propos. Dans le premier
cas, le Procureur de la République recevra un PV28 qu'il
pourra renvoyer pour complément d'enquête ou lui donner une autre
suite. L'ouverture d'une enquête préliminaire confère aux
autorités de police judiciaire des prérogatives pour effectuer
les actes sur les biens (a) ou sur les personnes (b) et qui peuvent porter
atteinte aux droits des citoyens. Le Procureur de la République assure
donc leur régularité.
a. Les actes sur les biens
22. Les actes sur les biens sont les perquisitions, visites
domiciliaires et saisies. L'accomplissement de ces actes nécessite en
principe un mandat du Procureur de la République ou son autorisation
pour éviter les atteintes à l'inviolabilité du domicile,
à la vie privée et à l'intégrité des biens
des citoyens.
23. Les perquisitions sont des actes de recherche
policière d'éléments de preuve d'une infraction. Elles
sont effectuées au domicile de toute personne ou en tout autre lieu
où pourraient se trouver des objets dont la découverte serait
utile à la manifestation de la vérité.
Lorsque l'officier ou l'agent de police judiciaire entreprend
de procéder à une perquisition, il requiert du Procureur de la
République, un mandat de perquisition qui lui donne le droit
d'accéder au domicile ou au lieu où se trouveraient les objets
suspects. Exceptionnellement, la perquisition peut s'effectuer sans mandat en
cas de flagrance ou lorsque le maître des lieux donne son consentement
par écrit ou appose son empreinte digitale, au cas où il ne sait
pas écrire, sur le PV préalablement au début des
opérations. Ce consentement peut aussi être donné par le
détenteur des biens ou à défaut, par le
représentant du maître des lieux ou celui du gardien des biens.
Les personnes objets de perquisition doivent être présentes sur
les lieux et être informées de leurs droits de procéder
à la fouille de l'OPJ et de s'opposer à la perquisition. Si elles
sont absentes, la présence d'un voisin et de deux témoins peut
être suffisante. Les perquisitions se soldent éventuellement par
la saisie.
24. Les saisies sont l`appréhension d'objets pouvant
avoir une relation avec l'infraction. Elles résultent
généralement d'une opération de perquisition ou de visite
domiciliaire qui
28 On distingue les procès-verbaux en
renseignement, qui ne sont pas accompagnés de la personne suspecte, et
les procès-verbaux un déferrement généralement
accompagnés du suspect.
désigne l'entrée dans un milieu privé aux
fins de constat ou de vérification29. Elles peuvent
également être autonomes.
25. Ces trois opérations sont effectuées dans
les mêmes conditions30. L'officier de police judiciaire ou
l'agent de police judiciaire chargé de mener les opérations ne
peut saisir que les biens en relation avec l'infraction pour laquelle la
perquisition a été autorisée. Mais il lui est permis de
procéder à une saisie se rapportant à une autre infraction
si celle-ci est passible d'une peine d'emprisonnement.
Après les opérations, les biens saisis sont
présentés aux personnes présentes afin qu'elles paraphent
le PV établi à cet effet; le refus est mentionné audit
procès verbal.
Les mesures ci-dessus ne peuvent s'effectuer qu'entre 6
heures et 18 heures sauf autorisation du Procureur de la
République31.
b. Les actes sur les personnes
Les actes sur la personne consistent aux auditions,
interrogations, arrestations, à l'interception des communications
téléphoniques et prises de vue dans les lieux privés
éventuellement et aux mesures de garde à vue que nous
développerons plus bas.
26. L'OPJ peut entendre toute personne dont les
déclarations lui paraissent utiles à la manifestation de la
vérité. Pour ce faire, il convoque la personne concernée
qui est tenue de comparaître et de déposer. Si elle s'oppose,
l'OPJ en informe le Procureur de la République qui peut décerner
contre elle, mandat d'amener afin qu'elle soit conduite devant lui. En cas de
non opposition, la personne comparait devant l'OPJ ; celui-ci procède
à son interrogatoire. Les questions et réponses sont
consignées sur un PV qui, à la fin de l'entretien, devra
être signé par la personne entendue et les ratures et autres
erreurs, validées par elle sur chaque feuillet. Les PV doivent contenir
un certain nombre de mentions32 à peine de nullité.
L'OPJ ou l'APJ peut aussi procéder à
l'arrestation33. Dans ce cas, après avoir
décliné son identité, l'OPJ ou l'APJ informe la personne
du motif de l'arrestation, puis lui enjoint de le suivre. Aucune atteinte ne
doit être portée à l'intégrité physique ou
morale de la
29 Lexique des termes juridiques, Dalloz,
13e édition 2001.
30 Voir art. 93 et s. CPP.
31 L'OPJ peut procéder à une saisie
après 18 heures si celle-ci a commencé avant sur autorisation du
Procureur de la République ou sans cette autorisation en cas
d'impossibilité matérielle de le joindre à charge pour lui
de l'en informer sans délai. Ceci marque une différence entre les
saisies effectuées suivant les dispositions de l'acte uniforme OHADA sur
les procédures simplifiées et voies d'exécution. En effet
celles-ci prévoient comme intervalle de temps pour effectuer ces
opérations, de 8 heures à 18 heures.
32 Art. 90 « le procès verbal doit
énoncer les dates ,et heures du début net de la fin de chaque
opération de l'enquête ; les noms, prénoms et
qualité de l'enquêteur ; le cas échéant
l'autorisation prévue à l'article 88 (2)... »
33 L'arrestation est une mesure qui consiste pour
l'OPJ ou l'APJ à appréhender une personne en vue de la conduire
devant l'auteur du titre en vertu duquel elle est effectuée.
personne arrêtée. La personne concernée
est tenue de suivre l'OPJ ou l'APJ. Il a le droit de se faire accompagner par
un tiers. En cas de refus de sa part, il sera fait usage de tout moyen
coercitif proportionnel à sa résistance. Dans tout lieu public ou
ouvert au public, l'auteur d'une contravention, lorsqu'elle refuse de
décliner son identité ou donne une identité jugée
fausse, peut être arrêté et gardé à vue
pendant une période d'au plus 24 heures.
27. Lorsqu'une personne est arrêtée elle est
fouillée par l'OPJ ou l'agent de police devant qui elle est conduite
afin que l'inventaire des objets trouvés sur elle soit fait.
Après la libération de la personne appréhendée,
ceux de ces objets qui ne constituent pas des pièces à conviction
lui sont restitués sur procès verbal et le cas
échéant, en présence d'un témoin.
28. Sur autorisation écrite du Procureur de la
République, et si l'infraction objet de l'enquête est assortie
d'une peine d'emprisonnement d'au moins un an, l'OPJ ou l'APJ peut intercepter,
enregistrer ou transcrire toutes correspondances émises par voie de
télécommunication ou procéder à des prises de vue
dans les lieux privés. Dans le souci de renforcer la garantie au respect
des droits des citoyens, le législateur a prévue des sanctions en
cas de violation des règles prescrites pour les opérations de
l'enquête préliminaire.
II. Les sanctions des
irrégularités
Les sanctions de l'inobservation des règles fixées
pour les opérations sur les biens ou sur les personnes peuvent porter
sur les actes (a) ou sur les auteurs desdites opérations (b).
a. La sanction des actes irréguliers
29. La principale sanction des opérations et actes
irréguliers au cours de l'enquête préliminaire est la
nullité. Cette nullité peut être absolue ou
relative34.
Les actes de police judiciaire posée au cours de
l'enquête préliminaire portent généralement atteinte
aux règles de procédure ; elles sont donc passibles de
nullité absolue. Cette nullité peut être soulevée
à toute étape de la procédure par la défense ou
d'office par la juridiction de jugement.
L'article 100, alinéa 1 du code de procédure
pénale prévoit expressément la nullité des
perquisitions irrégulières. Mais permet l'admission des objets
saisis comme pièces à
34 Art. 3 : << (1) la violation d'une
rêve de procédure pénale est sanctionnée par la
nullité absolue lorsqu'elle : a) préjudicie aux droits de la
défense définis par les dispositions légales en vigueur ;
b). porte atteinte à un principe d'ordre public. (2) la nullité
prévue au paragraphe 1 du présent article ne peut être
couverte et. Elle peut être évoquée à toute phase de
la procédure par les parties. Il doit etre fait par la juridiction de
jugement.
Art. 4 : << (1) les cas de violation prévus
à l'article sont sanctionnés d'une nullité relative. (1)
l'exception de nullité relative doit être soulevée par les
parties in limine litis et devant la juridiction d'instance. Elle est couverte
après cette phase du procès.
conviction. Ce qui distingue cette nullité de celle de
droit commun35. En dehors de la sanction des actes, la
responsabilité de leurs auteurs peut être aussi engagée.
b. La responsabilité des auteurs des actes
irréguliers
30. Les auteurs d'actes irréguliers posés au cours
de l'enquête préliminaire peuvent voir leur responsabilité
engagée sur le plan pénal, civil et disciplinaire.
Pénalement, leur responsabilité peut être
engagée pour arrestations irrégulières, atteintes aux
biens, atteintes à la vie privée...
Civilement, leur responsabilité peut être
engagée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil à
condition que l'acte ait causé au suspect un dommage et que, le lien de
causalité entre l'acte et le dommage soit établi.
La responsabilité disciplinaire de l'agent ou de
l'officier de police judiciaire, auteur des actes susmentionnés peut
également être engagée et entraîner des
conséquences sur sa carrière professionnelle.
S'il est plausible de constater que le suspect
bénéficie, grâce à la réglementation de
l'enquête préliminaire, d'un ensemble de droits de nature à
mettre un terme aux abus dont il faisait l'objet malgré les sanctions de
la jurisprudence36 antérieure, on ne devrait pas perdre de
vue que cette réglementation demeure permissive.
31. Les opérations telles que les perquisitions,
saisies et visites domiciliaires pourraient encore laisser cours aux abus, le
consentement du maître des lieux ou du détenteur du bien
étant irrévocable. En effet, à imaginer que ce
consentement soit donné pour une inspection superficielle et que par la
suite, les investigations soient plus poussées conduisant par exemple au
déplacement des objets d'art au risque de les endommager, l'auteur du
consentement se trouverait désarmé. Il faudrait donc de sa part
la présence d'esprit de refuser dès le début,
l'accomplissement de ces actes. Or ce refus pourrait s'interpréter comme
étant un comportement dilatoire visant à dissimuler les objets
ayant une relation avec l'infraction. Ce qui est de nature à dissuader
la personne dont le consentement est sollicité. Le législateur
aurait pu raisonnablement prévoir la possibilité d'une
rétractation du consentement donné.
Cette faille constitue une relativisation de la garantie de
protection des droits des citoyens, relativisation qui est plus perceptible en
cas de flagrance d'infraction au regard du
35 Ceci peut se justifier par la
nécessité de protéger l'ordre public.
36 TGI NFOUNDI Jugement n° 193 Crim. Du 25
juin 1998 médit : le tribunal a condamné dans cette affaire un
commissaire de police principal et un inspecteur de police respectivement
à dix ans et à 6 ans d'emprisonnement ferme pour avoir
causé la mort par torture, d'un jeune homme de22 ans en novembre 1997 ;
TGI MFOUNDI Je n°176 / Crim. Du 5 juin 1998 MP et famille NDJOUEMEGNI c /
MOTASSIE Bienvenu Inédit ici 3 policiers ont été
condamnés à des pernes allant jusqu'à 1 an
d'emprisonnement ferme pour torture (coups et mesures)...
pragmatisme de l'enquête qui s'ouvre à propos.
B. Le pragmatisme de l'enquête de flagrance
Le code de procédure pénale n'a pas donné
de définition à la flagrance ; il n'en a prévu que des
hypothèses (I) qui donnent lieu à une enquête dont le
pragmatisme est de nature à menacer les droits et libertés
individuels (II).
I. Les hypothèses de flagrance dans le code de
procédure pénale
32. Les hypothèses de
flagrance sont prévues dans les dispositions de l'article 103 CPP. Ces
dispositions permettent de distinguer les cas de flagrance et le cas
assimilé à l'infraction flagrante (a), ce qui nécessite
une appréciation particulière (b)
a. Les cas de flagrance et le cas
assimilé
L'article 103 du code de procédure pénale
dispose qu': « (1) est qualifié crime ou délit flagrant,
le crime ou le délit qui se commet actuellement ou qui vient de se
commettre ; (2) il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque : (a)
après la commission de l'infraction, la personne est poursuivie par la
clameur publique ; (b) dans un temps très voisin de la commission de
l'infraction, le suspect est trouvé en possession d'un objet ou
présente des traces ou indices laissant penser qu'il a participé
à la commission du crime ou du délit ; (3) il y a
également flagrance lorsqu'une personne requiert le Procureur de la
République ou un officier de police judiciaire de constater un crime ou
un délit commis dans la maison qu'elle occupe ou dont il assure la
surveillance ».
Cet article prévoit quatre cas de flagrance et un cas
assimilé à la flagrance. Les cas de flagrance sont : «
(...) qui se commet actuellement » ; « (...) qui vient de se
commettre » ; « (...) est poursuivie par la clameur publique
» ; « (...) dans un temps très voisin (...)
».
Le cas assimilé à la flagrance est celui de
l'infraction commise dans une maison dont l'occupant requiert un constat par un
OPJ ou un APJ.
b. L'appréciation critique des hypothèses
de Flagrance
33. Cet article a supprimé
l'infraction flagrante par nature née avec l'ordonnance n° 72 / 17
du 28 Septembre 197237 ce qui est une innovation importante dans la
mesure où cette
37 Cette ordonnance rendait flagrants les
infractions suivantes : le vagabondage (art. 347 CP). Le chèque sans
provision (art. 253 CP). Le proxénétisme (art. 294 CP) ; le vol,
l'escroquerie et l'abus de confiance (art. 318 CP) ; le vol aggravé
(art. 320 CP) ; l'escroquerie et l'abus de confiance aggravés (art. 321
CP) ; la prostitution de la jeunesse (art.344 CP) ; l'outrage à la
pudeur d'une personne mineure de 16 ans (art. 346 CP) et l'outrage sur mineur
de 16 à 21 ans (art. 347 bis CP).
catégorie d'infractions était source d'injustice du
fait de la disproportion des opérations et sanctions qui
présidaient à leur procédure.
Par ailleurs, le législateur camerounais se
démarque de son homologue français en écartant de la
flagrance, le cas du cadavre lorsque les causes de la mort sont
indéterminées38.
34. Mais le législateur camerounais aurait pu
être plus précis dans la délimitation des hypothèses
de flagrance. Ceci dans la mesure où les deuxième et
quatrième cas de flagrance sont marqués par une
imprécision quant au délai d'appréciation de la flagrance
au regard des expressions : << qui vient de se commettre », <<
temps très voisin » ; le cas assimilé à la flagrance
n'a par ailleurs plus de raison valable pour son maintien. Ces insuffisances
peuvent être une source d'erreurs et d'injustice ce d'autant plus que le
constat d'une infraction flagrante entraîne une procédure
pragmatique menaçant les droits et libertés individuelles.
II. Les pouvoirs exorbitants reconnus aux
autorités de police judiciaire et aux populations
35. « Lorsqu'on prend le coupable sur le fait,
l'évidence éclate et tout scrupule disparaît
»39 ainsi pourrait se résumer l'ensemble des
pouvoirs reconnus aux autorités de poursuite et aux populations en cas
de flagrance. Celles-ci ont la possibilité de procéder aux
arrestations, perquisitions, saisies... sans mandat ; elles
bénéficient d'une autorisation légale expresse. Mais en
cas de flagrance les OPJ sont ténus d'informer le Procureur de la
République et ont l'obligation de se transporter sur les lieux de
commission de l'infraction pour éviter que les preuves ou personnes
pouvant donner des renseignements ne se déplacent. Ils peuvent faire
usage de la garde à vue contre toute personne suspecte, instrumenter
hors du territoire de leur compétence. Le Procureur de la
République y joue le rôle d'acteur et son arrivée sur les
lieux dessaisit les OPJ de plein droit
36. Si les actes sur les personnes et sur les biens en cas de
flagrance peuvent se faire sans règles particulières dans les
situations ordinaires et ce, malgré les abus pouvant en résulter,
il en va tout autrement des actes effectués dans le lieu de service des
personnes astreintes au secret professionnel. En effet, les perquisitions dans
un cabinet d'avocat n'ont lieu que pour saisir les documents ou objets ayant un
rapport avec une procédure judicaire ou lorsqu'il est lui-même mis
en cause dans une affaire ou lorsque les documents ou objets en question sont
étrangers à l'exercice de sa profession. Elles doivent être
effectuées dans les conditions qui préservent le secret
professionnel par le magistrat compétent en présence de l'avocat,
du bâtonnier ou de son représentant. Ces prescriptions doivent
être respectées à peine
38 Art. 53 CPPF
39 ADEMAR ESMEIN cité par RASSAT (M-L),
<< Le Ministère public entre son passé et son avenir
» p. 172.
de nullité. Il en est de même des perquisitions
effectuées dans le cabinet d'un médecin.
37. Toutes les opérations effectuées lors des
enquêtes de police judiciaire sont secrètes et les personnes qui y
ont participé sont tenues, à peine de sanction, de garder les
informations acquises, confidentielles. Ceci est le signe de la protection du
droit à la présomption d'innocence. Le secret n'est pas opposable
au Ministère public.
En dehors du pouvoir de direction, le Ministère public
dispose d'un droit de contrôle sur la police judiciaire qui lui permet de
vérifier le respect des prescriptions légales et des ordres qu'il
aurait donnés.
Paragraphe II : le contrôle de la police
judiciaire par le Ministère public
Le contrôle porte sur la garde à vue qui a
particulièrement été
réglementée40 par le législateur de 2005 (A) et
sur toutes les activités de la police judiciaire (B) et effectué
par le Procureur de la République et le Procureur Général
près la Cour d'Appel.
A. Le contrôle de La garde à vue par le
paquet
38. La garde à vue est « une mesure de police
judiciaire en vertu de laquelle une personne est, dans le cadre de
l'enquête préliminaire, en vue de la manifestation de la
vérité, retenue dans un local de police judiciaire, pour une
durée limitée »41. C'est un moyen de
pression ou de contrainte qui doit être strictement limité aux
nécessités de la procédure42. Dans la pratique
du code d'instruction criminelle, elle était
redoutée. sa durée
était devenue incertaine malgré les textes, et assortie de
sévices corporels ayant pour finalité l'obtention des aveux
considérés comme reine des preuves, au mépris de l'article
132 bis du code pénal (CP) sur la torture. La jurisprudence a eu
à sanctionner quelques cas d'abus ayant entraîné la mort
des suspects43. Mais cela demeurait insuffisant du fait de la
permissivité de la législation procédurale en vigueur
à cette époque. Celle-ci n'ouvrait pas les voies au
contrôle44. Le législateur de 2005 a voulu rompre avec
ces pratiques en confiant en principe le contrôle de la garde à
vue qu'il a réglementée (I) au Procureur de la République,
contrôle dont les
40 Sur la base de cette réglementation, des
hommes politiques et bien de fonctionnaires enthousiastes ont pu affirmer que
« rien ne sera plus comme avant. Les arrestations et
séquestrations arbitraires disparaîtront, les personnes
interpellées selon assistées, finies les gardes à vue
fantaisistes, vive les droits de l'homme ».
41 Art. 118 CPP.
42 Elle est édictée pour les
nécessité de défense sociale (Empêcher le suspect de
fuir ou de détruire les preuves.
43 TGI NFOUNDI Jugement n° 193 Crim du 25 juin
1998 médit : le tribunal a condamné dans cette affaire un
commissaire de police principal et un inspecteur de police respectivement
à dix ans et à 6 ans d'emprisonnement ferme pour avoir
causé la mort par torture, d'un jeune homme de22 ans en novembre 1997 ;
TGI MFOUNDI Je n°176 / Crim. Du 5 juin 1998 MP et famille NDJOUEMEGNI c /
MOTASSIE Bienvenu Inédit ici 3 policiers ont été
condamnés à des peines allant jusqu'à 1 an
d'emprisonnement ferme pour torture.
44 Contrôle effectué aujourd'hui par le
Procureur de la République et surtout par les conseils qui peuvent
intervenir dans les locaux de police ou de gendarmerie.
conséquences sont à préciser (II).
I. La réglementation de la garde à
vue45
Le législateur camerounais ne donne le pouvoir de
prendre une mesure de garde à vue qu'à L'OPJ ; l'APJ n'en est pas
compétent. Lorsque l'OPJ envisage de prendre une mesure de garde
à vue à l'encontre d'une personne, il doit préalablement
requérir une autorisation du Procureur de la République par tout
moyen laissant trace écrite ou par voie
téléphonique46. Il doit en cas de succès,
avertir expressément le suspect de la suspicion qui pèse sur lui
et l'inviter à donner toutes explications qu'il juge utiles. En dehors
de cette formalité, le législateur a soumis cette mesure à
certaines conditions (a) et a reconnu certains droits au suspect (b)
a. Les conditions de la garde à vue
Les conditions de la garde à vue tiennent à son
ouverture (1) et à sa durée (2).
1. Les conditions de l'ouverture de la garde à
vue
39. L'article 118 (2) du code de
procédure pénale dispose que : « toute personne ayant
une résidence connue ne peut, sauf cas de crime ou de délit
flagrant et s'il existe contre elle des indices graves et concordants, faire
l'objet d'une mesure de garde à vue ».
Aux termes de ces dispositions, il est clair que la garde
à vue n'est envisageable, dans le cadre des enquêtes, que contre
une personne n'ayant pas une résidence connue. Une personne dont la
résidence est connue ne peut faire l'objet d'une garde à vue,
même lorsqu'elle est suspectée d'avoir perpétré un
crime ou un délit flagrant, que si l'officier de police judiciaire a
rassemblé contre elle les indices graves et concordants. Ceci constitue
incontestablement une mesure uniquement protectrice des droits de la
défense47 puisqu' ici, il n'est plus tenu compte de la
flagrance qui seule, aurait été suffisante pour la prise de la
décision de garde à vue. En tout état de cause, le
Ministère public peut autoriser la garde à vue nonobstant les
conditions ci-dessus. Mais sa durée doit être limitée.
2. La durée de la garde à vue
45 Il s'agit essentiellement de la garde à vue
judiciaire car la garde à vue administrative n'a pas été
réglementée par le CPP. Ce qui est de nature à favoriser
les violations des droits du fait de l'absence de tout contrôle.
46 C'est ce qui est appelée en droit
français « le traitement en temps réel » ceci
permet l'accélération de la procédure parce que l'OPJ ou
l'APJ pourra rapidement recevoir les instructions du Procureur de la
République.
47 NGAI (C), la Loi n°2005/007 du 27 Juillet 2005
portant code de procédure pénale : excursion autour de la garde
à vue, Juridis Périodique, n°71 juillet août septembre
2007, p. 112.
40. Sous l'empire du code d'instruction criminelle, l'article
9 prévoyait comme durée de la garde à vue, vingt-quatre
heures renouvelables trois fois. Avec le code de procédure
pénale, cette durée est de 48 heures renouvelables une fois, Soit
96 heures ou 4 jours48.
Ce délai peut être prorogé sur
autorisation du Procureur de la République. Cette prorogation est
écrite et doit être motivée. En dehors de ce cas, la
prorogation peut être faite en fonction de la distance qui sépare
le lieu d'arrestation et le local de police judiciaire. Cette prorogation est
de 24 heures par 50 km c'est dire que, si la distance est inférieure ou
égale à 50 km, la prorogation sera de 24 heures et si elle est
supérieure à 50 km ou égale à 100 km, La
prorogation sera de 48 heures... Les demandes de prorogation sont faites par
tout moyen même par voie téléphonique. En cas de
difficulté pour entrer en contact avec le Procureur de la
République, l'OPJ est tenu de libérer le suspect. Mais il peut
exceptionnellement proroger la durée de la garde à vue à 8
jours en cas de crime ou de flagrant délit, ou si le suspect n'a pas de
résidence connue ou ne présente pas la garantie prévue
à l'article 246 CPP49. Le délai commence à
courir à partir du moment où le suspect est conduit au local de
la police judiciaire. En dehors de cet encadrement, le législateur a
prévu un certain nombre de droits au profit du suspect.
b. Les droits reconnus aux suspects pendant la garde
à vue
41. L'article 122, 2 CPP dispose que le suspect doit
être traité avec humanité tant matériellement que
moralement. C'est ainsi qu'il doit avoir un temps de repos raisonnable entre
les différents interrogatoires, ne faire l'objet ni de torture, menace,
ni d'aucun autre moyen de pression (art. 122 (2)). il peut recevoir les visites
de son avocat ce qui est une innovation majeure50dans le sens de la
protection du suspect puisque ce conseil pourra aussi par sa présence,
non seulement influer sur les agissements de la police judiciaire, mais
également procéder au contrôle des conditions dans
lesquelles se déroule la garde à vue et saisir le cas
échéant les instances compétentes pour l'application des
sanctions. Le suspect peut également recevoir les visites de sa famille
aux heures ouvrables et doit être alimenté et
entretenu. il peut à tout
moment faire l'objet d'un examen médical par un médecin requis
d'office par le Procureur de la République, médecin qui peut
être assisté d'un autre choisi par le suspect et à ses
frais. A la demande du suspect, le Procureur de la République a la
faculté d'ordonner l'examen dans les 24 heures de ladite demande. Cet
examen n'est obligatoire qu'à
48 Ces délais sont pratiquement
doublés.
49 Il s'agit du cautionnement et du garant de sa
présentation en justice..
50 L'article 116 alinéas 3 du code de
procédure pénale qui prévoit cette possibilité se
démarque des législations étrangères puisqu'elle
n'a pas ménagé ses conditions. En droit français par
exemple, les Lois des 4 janvier et 24 août 1993 ont prévu
l'intervention de l'avocat à la 20e heure de la garde
à vue et à la 72e en cas de crime organisé.
la fin de la garde à vue si le conseil ou un membre de
la famille du suspect en fait la demande. Le rapport de l'examen est
mentionné au dossier de la procédure ; l'OPJ est tenu de
mentionner au PV les motifs de la garde à vue, ceux de la prorogation,
bref toutes les conditions dans lesquelles s'est déroulée la
garde à vue à peine de nullité dudit PV.
II. Les conséquences du contrôle
Le contrôle peut donner lieu à l'ordonnance
d'office d'une libération immédiate du suspect par le Procureur
de la République ou son substitut. Cet ordre peut également faire
suite à une ordonnance d'habeas corpus. Mais en règle
générale les conséquences portent sur la validité
des actes (a) et la responsabilité des auteurs
d'irrégularités (b).
a. La nullité des actes
42. Il s'agit essentiellement de la
nullité des PV et des actes subséquents (art. 124 (4)
CPP). Ces derniers sont ceux qui auraient été
pris en conformité avec les procès verbaux irréguliers ou
contenant des mentions attestant du non respect des prescriptions
légales en matière de garde à vue. Cette sanction n'a pas
d'effet sur la responsabilité des OPJ.
b. La responsabilité de l'officier de police
judiciaire
43. Cette responsabilité peut
être engagée sur le plan disciplinaire et sur le plan
judiciaire.
Sur le plan disciplinaire, l'autorité à saisir
est le Procureur Général près la Cour d'Appel. C'est lui
qui saisira par la transmission des notes et appréciations, le chef de
l'administration d'origine de l'OPJ. On n'est certainement pas habilité
à saisir directement le délégué
général à la sûreté nationale, ni le
secrétaire d'Etat à la défense ou tout autre
Ministère pour les manquements de leur agent au cours des
opérations de police judiciaire51.
Les poursuites judiciaires aboutiront éventuellement
à une condamnation pénale ou civile. Pénalement, la
responsabilité sera fondée sur les dispositions de l'article 236
du code de procédure pénale relatives à la garde à
vue et à la détention provisoire abusives. Les OPJ pourraient
également être poursuivis pénalement pour bien d'autres
infractions telles que l'abus de fonction, le favoritisme, la négligence
systématique...à charge pour les poursuivants de les prouver.
Civilement, les dispositions de l'article 236 CPP seront
applicables et l'Etat sera tenu à titre principal comme commettant et
pourra exercer une action récursoire contre l'agent
51 NGAI (C), op. Cit. p 115.
responsable (art. 236 (3)). L'indemnité est
concrètement allouée par la commission prévue à
l'article 137 CPP. Cette commission est présidée par un
conseiller de la Cour Suprême et saisie par requête dans les six
mois de la cessation de la garde à vue, de la décision de non
lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive. En dehors du
contrôle effectué par le Procureur de la République, le
Procureur Général exerce également un contrôle
beaucoup plu général.
B. Le contrôle général
effectué par le Procureur Général près la Cour
d'Appel
Il importe de donner l'étendue de ce contrôle (I)
avant que de faire une appréciation critique sur l'ensemble du
contrôle effectué par le Ministère public (II)
I. L'étendue du contrôle
44. Le Procureur
Général près la Cour d'Appel exerce un contrôle sur
l'ensemble des activités des OPJ et APJ en service dans le ressort de la
Cour d'Appel. Il adresse semestriellement au Ministre de la justice, un rapport
sur leurs activités. Il a le pouvoir d'apprécier et de noter les
OPJ et transmet ces notes et appréciations au chef d'administration
d'origine de l'OPJ concerné. Ce contrôle peut avoir un impact sur
la carrière de l'OPJ ou de l'APJ qui pourrait, suite à des notes
et appréciations défavorables, faire l'objet de sanctions
disciplinaires.
II. L'appréciation critique sur le contrôle
de la police judiciaire
Le code de procédure pénale à travers le
contrôle reconnu au Ministère public sur l'activité de la
police judiciaire a fait de cette institution le garant des droits et
libertés individuelles (a) et laisse subsister quelques pesanteurs
(b)
a. Le Ministère public, garant des droits et
libertés des suspects
45. Par son autorité sur la
police judiciaire, le Ministère public se présente comme le
garant des droits et libertés individuelles à la phase des
enquêtes policières. En effet après avoir
régulé les opérations d'enquête par ses mandats,
autorisations, prescriptions et substitutions, le Ministère public
procède au contrôle pour s'assurer du respect de ses prescriptions
ou des droits du suspect. Ceci pourrait mettre un terme aux abus de la police
judiciaire tant en ce qui concerne les arrestations, les perquisitions et
saisies qu'en ce qui concerne la garde à vue. Mais des pesanteurs sont
décelables.
b. Les pesanteurs à la garantie
46. L'on peut craindre que les garanties ne revêtent
qu'un caractère formel car l'effectivité des contrôles
n'est pas assurée52. Tout d'abord le contrôle ne fait
pas l'objet d'une réglementation quant à son régime. Il se
ferait suivant les instructions de la chancellerie, au moins une fois par
semaine sans préjudice à la possibilité d'effectuer des
contrôles inopinés. Il demeure donc officiellement une
faculté pour les parquets qui ne pourront l'exercer
qu'exceptionnellement, sinon pas du tout ce d'autant plus qu'ils sont
surchargés par de multiples affaires53 et manquent par
ailleurs de personnels. Le législateur aurait pu fixer un régime
pour les contrôles. Même si la solution la plus adéquate
serait d'accroître le nombre de personnel magistrats dans nos parquets et
de rendre effectif les différents tribunaux sur le territoire
national.
47. Par ailleurs on pourrait se demander si la
réglementation de l'enquête préliminaire
caractérisée par la surprotection du suspect ne pourrait pas
entraîner une impunité du fait de la timidité qu'elle
provoquerait chez les autorités de police judiciaire. Le moins qu'on
puisse dire est que le respect de la légalité par la police
judiciaire et la mise à sa disposition de moyens logistiques suffisants
peut contribuer à concilier la protection de l'intérêt
général et la garantie des droits du suspect. Et que, dans
l'état où se trouve actuellement la police judiciaire
camerounaise, c'est-à-dire un état de pauvreté en
matériels logistiques, cet objectif pourrait s'avérer assez
difficile à atteindre dans la phase des enquêtes en application de
la législation actuelle. D'où le risque de voir
l'évolution du droit opéré sur le plan textuel ne pas
avoir la même positivité sur le plan factuel ou social et pire
encore, son effectivité pourrait se traduire par une évolution de
la criminalité. Une dotation de la police judiciaire en moyens
financiers et matériels pourrait de ce fait contribuer à garantir
le respect de la législation actuelle et la répression des
délinquants, ce qui concilierait le respect des droits du suspect et la
protection de l'ordre public.
Le rôle du Ministère public sur les poursuites ne
se limite pas aux enquêtes de police judiciaire. Il les
déclenche54 et les exerce dans la phase de jugement et
préalablement, à
52 Nous avons été témoin de
plusieurs cas de garde à vue abusives lors d'une visite que nous avons
effectuée dans un commissariat de la ville de YAOUNDE. En fait plusieurs
individus qui se trouvaient gardés ont sauvé un jeune cordonnier
qui tentait de se donner la mort parce que, arrêté pour avoir
récupéré de force son tabouret d'une jeune fille qui
refusait de le lui remettre, il était retenu dans les locaux de ce
commissariat depuis plus de 16 jours sans suites
53 Le TGI Du Mfoundi par exemple ne compte que 5
magistrats au parquet, un Procureur de la République et quatre
substituts pour traiter de tous les crimes et délits connexes pouvant
être commis dans tout le département. Le TPIGI de Foumban quant
à lui compte 3 magistrats, un Procureur de la République et deux
substituts pour couvrir tous les arrondissements de ce département en
matière criminelle et plus de quatre arrondissements en matière
de délits et contraventions.
54 Voir chapitre 2
celle de l'information judiciaire dont il a perdue la
maîtrise comme organe55.
Section 2 : La perte de la qualité de magistrat
instructeur par le Procureur de la République
Cumulant depuis 1972 les fonctions de poursuites et
d'instruction du fait de sa double << casquette »56 de
magistrat du Ministère public et de magistrat instructeur57,
le Procureur de la République a été dessaisi de la
qualité de magistrat instructeur par la résurrection du juge
d'instruction, magistrat du siège. Ce dernier est chargé
désormais de mener l'instruction préparatoire (paragraphe I) ce
qui mérite d'être apprécié (paragraphe II).
Paragraphe I : l'instruction préparatoire,
prérogative du juge d'instruction
48. La décision à
rendre dans un procès pénal nécessite que l'on connaisse
parfaitement les circonstances dans lesquelles la loi pénale a
été violée et assez la personne du contrevenant afin
d'apprécier son degré de responsabilité. Comme les
enquêtes de police judiciaire, l'instruction préparatoire ou
information judiciaire est la phase du procès qui vise l'atteinte de cet
objectif. Cette phase comporte deux aspects distincts. Elle consiste
premièrement à rechercher les preuves à charge et à
décharge vis-à-vis de la personne poursuivie et à les
réunir. Dans un aspect second, elle consiste à apprécier
les charges tant du point de vue du droit (pour vérifier que les faits
tombent sous le coup de la loi pénale), que du point de vue des faits
(pour vérifier qu'elles sont suffisantes pour justifier l'intervention
d'une juridiction de jugement).
Elle est obligatoire en cas de crime et d'infractions commises
par les mineurs de 18 ans58 et facultative en matière de
délit et de contravention. L'article 142 al. 3 du CPP dispose que
l'information judiciaire est conduite par le juge d'instruction, magistrat du
siège59. Celui-ci est saisi au moyen, soit du
réquisitoire introductif d'instance par le Procureur de la
République, soit de la plainte avec constitution de partie60
civile par la victime. Pour l'accomplissement de sa mission, le juge
d'instruction dispose d'importants moyens d'investigation et de contrainte (A)
qui sont effectués suivant des modalités précises (B).
A. Les moyens d'information du juge d'instruction
55 Montesquieu ne disait-il pas déjà que
toute personne qui est portée au pouvoir peut être tentée
d'en abuser ?
56 MEBU NCHIMI (J C), le Procureur de la
République << décoiffée » de sa casquette de
magistrat instructeur, les tendances de la nouvelle procédure
pénale camerounaise, PUA, pp 241 et s.
57 Voir ANOUKAHA (F) << le magistrat
instructeur en procédure pénale camerounaise » et GOUDEM
(J) << l'organisationnelle du Cameroun », thèses de
Doctorat 3eme cycle en droit prive UY
58 Cf. art. 142 (1) et 700(1) CPP.
59 La Loi n° 2006/14 du 29 Décembre 2006
portant organisation judiciaire a rendu effective cette disposition en
prévoyant dans chaque juridiction un ou plusieurs juges
d'instruction.
60 Ces actes de saisine seront
développés plus Loi n cf. le déclanchement de l'action
publique chapitre 2.
On distingue les moyens d'ordre formel (I) et les moyens d'ordre
matériel (II)
I. Les moyens d'ordre formel
Le juge d'instruction a le pouvoir de prendre des actes d'ordre
formel tels que les ordonnances (a), les mandats (b) et le dossier de
l'instruction (c).
a. Les ordonnances
49. Les ordonnances sont les actes
juridictionnels61 pris par un juge seul dans son
cabinet62. Le juge d'instruction les prend dans plusieurs cas, soit
pour répondre à une demande formulée par les parties ou le
Ministère public, soit pour ouvrir ou mettre un terme à
l'information judiciaire... ainsi, lorsqu'il est saisi d'un réquisitoire
à fin d'informer par le Ministère public, il peut prendre,
suivant qu'il entend ouvrir l'instruction ou pas, une ordonnance à fin
d'informer ou une ordonnance de refus d'informer. Au cours de la
procédure d'information, le Procureur de la République peut lui
demander la communication du dossier de procédure de l'instruction, dans
ce cas, il prend une ordonnance de soit informé. Si le Procureur de la
République lui demande de procéder à de nouvelles
inculpations ou investigations, et s'il n'entend pas faire suite à cette
demande, il prend une ordonnance de refus de plus ample informé. A la
clôture de l'information judiciaire le juge d'instruction peut rendre une
ordonnance de renvoi lorsqu'il veut que l'affaire passe en phase de jugement ou
alors une ordonnance de non lieu quand il estime que les éléments
rassemblés ne sont pas suffisants pour pouvoir passer à cette
phase...
b. Les mandats63
50. dans l'accomplissement de sa
mission, le juge d'instruction peut avoir besoin d'entendre une partie ou un
témoin. Dans ce cas il peut décerner contre
l'intéressé un mandat de comparution ou d'amener. Si des
perquisitions doivent être faites pour la découverte de la
vérité, il lui est permis de délivrer des mandats à
cette fin. Lorsque l'inculpé doit être mis en détention
provisoire ou retiré de la prison, il délivre alors un mandat de
détention provisoire ou d'extraction respectivement. Si un suspect ou un
inculpé se trouve sur le territoire de compétence d'un autre juge
d'instruction ou sur le territoire d'un autre pays, un mandat d'arrêt
peut être délivré contre lui par les autorités
judiciaires dont le juge d'instruction.
61 Les actes juridictionnels peuvent être
contentieux (lorsqu'ils tranchent un litige), ou gracieux (lorsque la
juridiction du juge ou du tribunal rend une décision en dehors de toute
contestation). La définition de ces actes pose encore d'énormes
problèmes au regard des critères qui sont dégagés
par la doctrine pour permettre leur identification. Car ces critères
sont difficilement retrouvés en totalité dans un même
acte.
62 Les actes pris par le Président de la
République dans le domaine de la loi sur autorisation du
législateur sont aussi dénommés Ordonnances et ont valeur
égale à celle de la Loi après leur ratification.
63 Art.13 et suivants CPP
c. Le dossier de l'instruction
51. L'information est secrète et écrite
c'est-à-dire qu'elle a un caractère inquisitoire. Elle donne lieu
à l'ouverture d'un dossier dans lequel sont rassemblés tous les
actes dactylographiés par le greffier de l'instruction sous le
contrôle du juge d'instruction. Toutes les pièces du dossier sont
cotées et inventoriées par le greffe d'instruction au fur et
à mesure de leur rédaction. Le dossier est établi en deux
exemplaires dont l'un pourra éventuellement être envoyé
à la Cour d'Appel. Les parties peuvent se faire délivrer une
copie à leurs frais. Le dossier de l'instruction est une
consécration du code de procédure pénale de 2005.
Les moyens d'ordre formel ont pour but de faciliter
l'accomplissement des actes matériels ou de consigner leurs
résultats.
II. Les moyens d'ordre matériel
Les actes matériels permettent de mettre la main sur
les objets suspects, d'éviter la dissipation des preuves ou la
protection des inculpés. Elles facilitent la découverte de la
vérité et portent sur les personnes (a) ou sur les choses (b).
a. Les actes sur la personne
En dehors de l'interception des correspondances qu'il peut
ordonner, le juge d'instruction procède aux inculpations, auditions et
confrontations (1). Il peut procéder aussi au placement en
détention provisoire, ou prendre une mesure de surveillance judiciaire
à l'endroit d'un inculpé (2)
1. Les inculpations, auditions et
confrontations
52. Lorsque l'information judiciaire est ouverte contre
personne dénommée, le juge d'instruction la convoque et l'entend.
Cette première comparution est appelée inculpation. Au cours de
celle-ci, il est procédé à la vérification de
l'identité de l'inculpé qui est ensuite informé des faits
qui lui sont reprochés et de l'impossibilité pour la police et la
gendarmerie de l'entendre à nouveau sauf sur commission rogatoire.
L'inculpé est également informé du fait qu'il pourra
être, à la fin de l'information judiciaire, placé en
détention provisoire ou renvoyé devant la juridiction de jugement
compétente.
L'inculpé peut choisir de se défendre seul ou
assisté d'un ou de plusieurs conseils et n'est tenu de faire aucune
déclaration sur-le- champ. En cas de choix d'un ou de plusieurs
conseils, l'inculpé est tenu de donner le nom et l'adresse de ce conseil
ou de celui des conseils à qui devront être notifiés les
actes de procédure, et doit élire domicile au siège du
tribunal afin
de faciliter sa représentation devant les juridictions.
Les déclarations volontaires que fera l'inculpé
seront enregistrées par le juge d'instruction. Ce dernier ne doit lui
poser aucune question relative à sa responsabilité pénale
et n'est pas tenu de communiquer le dossier à son conseil. Mais avant
les prochaines comparutions, le dossier devra être communiqué au
conseil de l'inculpé au moins dans les 48 heures les
précédant ou dans les 72 heures, si le conseil réside hors
du siège du tribunal. Ceci constitue une garantie du droit à la
défense. Mais on peut tout de même déplorer le fait que le
législateur ait seulement pris en compte l'extranéité de
la résidence par rapport au siège du tribunal sans se
préoccuper de la distance qui pourrait séparer ces
lieux64. Si cette attitude garantit la célérité
de la procédure, on ne saurait en dire autant des droits de la
défense.
En dehors de l'inculpation qui tient plus ou moins compte des
droits de la défense, le juge d'instruction peut aussi entendre les
témoins ou les confronter ainsi que les autres parties.
Certaines mesures de privation ou de restriction de
liberté peuvent être prises par le juge d'instruction telles que
le placement en détention provisoire qui mérite d'être
examinée au regard des innovations qui y ont été
apportées.
2. La détention provisoire
53. Du point de vue de la
théorie générale du droit pénal, la
détention provisoire est un lieu de conflit entre deux
intérêts : l'intérêt social et l'intérêt
individuel65. Elle remplace la détention préventive
qui revêtait une connotation contraire au principe de la
présomption d'innocence.
Jusqu'à lors la détention provisoire faisait
l'objet d'une réglementation insuffisante au Cameroun. Cette
permissivité a entraîné beaucoup de critiques de la part de
la doctrine surtout parce que la détention provisoire était
illimitée dans le temps66. Avec le code de procédure
pénale, elle est désormais une mesure exceptionnelle qui ne peut
être ordonnée qu'en cas de crime ou de délit et si
l'inculpé n'a pas de domicile connu. Elle doit intervenir avant
l'ordonnance de renvoi, sur ordonnance motivée du juge d'instruction. Ce
qui signifie qu'elle est susceptible de recours. Cette ordonnance est
notifiée au Procureur de la République
64 Ainsi un conseil qui résiderait à
KOUSSERI, dans l'Extrême- Nord du pays, sera soumis au même
délai que celui qui réside à SOA si le tribunal avait pour
siège, YAOUNDE
65 Elle recherche soit la protection de l'individu
contre d'éventuelles mesures de vengeance de la victime ou de sa famille
en même temps qu'elle garantit la représentation du suspect devant
la justice.
66 DJOUENDJEU GAMENI (E. N.), code de
procédure pénale, principales innovations et analyses
téléologiques in La Nouvelle Expression, N° 1726 du 11
Mai 2006, p 10.
et à l'inculpé67.
54. La durée de la détention provisoire est de
6 mois avec prorogation motivée de 6 mois pour les délits et 12
mois pour les crimes soit un maximum de 12 mois pour les délits et 18
mois pour les crimes. Ainsi pourrait être sonné le glas des
détentions interminables68 qui ont valu au Cameroun des
condamnations par les instances internationales pour contrariété
au principe du délai raisonnable69.
A l'expiration des délais ci-dessus le juge
d'instruction est tenu d'ordonner la mise en liberté de
l'inculpé. En outre, l'inculpé peut bénéficier
avant le terme légal de la détention provisoire, d'une
liberté sans ou sous caution. Ceci signifie que la liberté dans
ce cas n'est plus « provisoire » et correspond davantage au principe
de la présomption d'innocence.
Afin de garantir le respect de cette réglementation, le
législateur a reconnu à l'inculpé la faculté
d'engager la responsabilité pénale ou civile du juge
d'instruction qui peut également faire l'objet de sanction
disciplinaire.
En dehors de la détention provisoire, on a aussi la
surveillance judiciaire comme mesure restrictive de liberté.
3. La surveillance judiciaire
55. La surveillance judiciaire est une mesure qui peut
être substituée à la détention provisoire et qui
consiste à laisser le prévenu en liberté avec quelques
restrictions de son droit d'aller et venir. Elle est prise en
considération de la personnalité du prévenu. On peut la
rapprocher de la condamnation avec sursis.
A coté des actes sur la personne, le juge
d'instruction peut prendre des actes sur les biens afin de rassembler les
éléments prompts à faciliter l'appréciation de la
suite à donner au procès.
b. Les actes sur les biens
56. En dehors de l'expertise, les actes matériels
renvoient à ceux effectués par les autorités de police
judiciaire telles qu'indiquées supra70. Ils se
déroulent dans les mêmes conditions et susceptibles des
mêmes sanctions. Il s'agit du transport sur les lieux, des
67 Etant motivée, cette ordonnance peut faire
l'objet de recours.
68 Les articles 222 et suivants prévoient
même la mise en liberté avec ou sans caution.
69 Comité des droits de l'Homme des Nations
Unies au sujet de l'affaire MUKONG citée par GONO (S), L'application
des règles internationales du procès équitable in Juridis
Périodique N° 63 Juillet- Août - Septembre 2005,
édition spéciale ; Commission africaine des droits de l'Homme et
de peuples au sujet de l'affaire EMBGA MEKONGO où l'inculpé avait
passé 12 ans de détention...
70 Voir enquête préliminaire.
perquisitions, visites domiciliaires et saisies. Ces actes
doivent être effectués en principe dans les limites territoriales
de la compétence du juge d'instruction. Mais il est possible qu'ils
soient diligentés hors de ce territoire à condition que le
Procureur de la République du lieu des investigations en soit
informé par celui de la juridiction du juge d'instruction. Ces actes
sont effectués suivant des modalités variées. Celles-ci
sont propres à l'instruction préparatoire dans son ensemble.
B. Les modalités de l'instruction
préparatoire
En principe, le juge d'instruction accomplit les actes
d'instruction personnellement. Mais pour des raisons liées à
l'efficacité de ces actes, il est aidé par les forces de maintien
de l'ordre et peut confier l'exécution desdits actes aux OPJ (I) ou aux
autres juges d'instruction (II). Ces délégations sont
dénommées commissions rogatoires71
I. Les commissions rogatoires aux autorités de
police judiciaire
57. Les délégations
au profit des OPJ sont limitées matériellement et soumises
à certaines conditions en ce qui concerne l'accomplissement des actes
hors du territoire de sa compétence.
Matériellement, le juge d'instruction peut en principe
donner commissions rogatoires aux OPJ pour tous les actes relevant de sa
compétence. Mais il est tenu d'effectuer personnellement les actes tels
que : l'inculpation, les interrogatoires, la délivrance des mandats de
placement en détention provisoire ainsi que celle de placement d'un
inculpé en surveillance judiciaire. Ces limitations découlent de
la séparation des organes de poursuite et d'instruction dans la mesure
où les autorités de police judiciaire sont soumises à
l'autorité du Ministère public72.
Pour ce qui est de la délégation pour effectuer
des actes d'instruction hors du territoire de sa compétence, le juge
d'instruction doit s'adresser au Procureur de la République de son
tribunal. C'est ce dernier qui tiendra informé le Procureur de la
République du lieu où les opérations doivent être
effectuées. La collaboration s'avère alors nécessaire
entre le juge d'instruction et le Procureur de la République de sa
juridiction d'attache, un conflit entre les deux magistrats pouvant constituer
un blocage à la procédure.
II. Les commissions rogatoires aux autres juges
d'instruction
71 Art. 191 CPP
72 C'est ce qui justifie également le
dessaisissement des magistrats de la qualité d'officier de police
judiciaire
58. Antérieurement au code de procédure
pénale, le juge d'instruction avait la possibilité d'adresser
commissions rogatoires aux magistrats du Ministère public dans la mesure
où ceux-ci faisaient partie des OPJ. Mais depuis le 1er
janvier 2007, il ne peut le faire qu'au profit des magistrats autres que ceux
du Ministère public. Ceci est caractéristique du renforcement de
la Séparation des fonctions de poursuites et d'instruction.
59. Toute commission rogatoire doit indiquer la nature de
l'infraction objet de poursuites, être datée, signée et
revêtue du sceau du magistrat qui l'a délivrée. Elle ne
peut prescrire que des actes d'information se rattachant directement à
l'infraction objet des poursuites.
En cas d'urgence, la commission rogatoire peut être
diffusée par tous les moyens laissant trace écrite. Dans ce cas,
ces moyens doivent prescrire les mentions essentielles de l'original, notamment
l'inculpation, le nom et la qualité du juge d'instruction mandant.
L'instruction préparatoire ainsi menée par le
juge d'instruction, magistrat du siège, entraîne un certain nombre
de conséquences.
Paragraphe II : L'appréciation critique de la
perte des pouvoirs d'instruction par le Procureur de la
République
La perte de la qualité de magistrat instructeur par le
Procureur de la République présente des avantages liés
à la résurgence de la séparation des fonctions de
poursuites et d'instruction (A) même si quelques limites y sont
décelables (B)
A. La résurgence de la séparation des
fonctions de poursuite et d'instruction
60. La séparation des fonctions de poursuites et
d'instruction est l'un des aspects de la séparation des fonctions de
justice répressive. Ce principe se traduit par l'indépendance de
chacune des phases du procès par rapport aux autres tant sur le plan
organique que sur le plan fonctionnel. Il ne devrait donc exister aucune
influence de l'une des fonctions sur l'autre. Si la fusion des fonctions de
poursuites et d'instruction a été opérée depuis
1972 au Cameroun73 au profit du Ministère public, il faut
dire que le retour du juge d'instruction dans le paysage judiciaire camerounais
marque la scission nouvelle de ces phases du procès sur le plan
organique. Ceci est de nature à garantir le droit à un tribunal
indépendant et impartial (I) et le droit à une bonne justice
(II).
I. La garantie du droit à un tribunal
indépendant et impartial
73 L'Italie a suivi le même exemple dans son
code de procédure de 1989.
La garantie résulterait du statut du juge d'instruction
tant en ce qui concerne l'indépendance du tribunal (b) qu'en ce qui
touche à l'impartialité (a)
a. Le droit à un tribunal
indépendant
61. « L'indépendance
s'exprime en externe par rapport à d'autres pouvoirs
»74. Elle s'entend de l'absence de toute influence
extérieure. A l'instruction préparatoire, elle est garantie
à travers l'absence de subordination du juge d'instruction aux pouvoirs
législatif et exécutif. ce qui signifie que le juge d'instruction
ne peut recevoir d'ordre ni du Ministre de la justice ni d'aucune autre
autorité extérieure au pouvoir judiciaire. En outre,
l'inamovibilité dont il bénéficie, à l'image de
tous les autres magistrats du siège, est de nature à lui
conférer une certaine stabilité et à renforcer son
indépendance. Contrairement au CIC qui permettait au Ministère
public de choisir le juge d'instruction pour mener l'information dans une
affaire donnée, le CPP renforce la séparation entre les
poursuites et l'instruction préparatoire en dessaisissant le parquet de
cette prérogative au profit du Président du tribunal, ce qui
renforce aussi l'indépendance du juge d'instruction vis-à-vis du
pouvoir exécutif qui pouvait indirectement, à travers
l'autorité qu'il exerce sur le Ministère public, choisir un juge
d'instruction à sa convenance. L'inculpé se trouve ainsi dans une
situation de sécurité, sécurité d'autant plus
renforcée lorsqu'on prend en compte l'impartialité du
tribunal.
b. Le droit à un tribunal impartial
62. L'impartialité du
tribunal est garantie en pratique par la récusation75 et le
renvoi d'une juridiction à une autre. Sur le plan théorique, elle
est garantie par la séparation des fonctions de justice
répressive dans la mesure où le juge de jugement n'étant
pas habilité à passer les actes de poursuite ni ceux de jugement,
pourrait avoir une appréciation beaucoup plus objective que s'il
connaissait des trois fonctions à la fois. De même le cumul des
fonctions de poursuites et d'instruction était une source de
partialité du magistrat instructeur qui, ayant déjà une
connaissance de la personne de l'inculpé dans la phase d'enquête
de police judiciaire, pouvait mener l'information avec moins
d'objectivité.
Par ailleurs, étant chargé de soutenir
l'accusation dans la phase de jugement et après avoir déjà
engagé les poursuites, le Ministère public se présentait
à la phase d'information judiciaire beaucoup plus comme juge et partie,
ce qui augurait sans trop de doute une instruction plus à charge
qu'à décharge. Le suspect ne pouvait plus compter que sur le juge
de
74 GONO (S) op. Cit. p.36
75 L'art. 146 (3) reconnaît le droit aux parties
de demander par requête motivée le dessaisissement du juge
d'instruction au profit d'un autre ; c'est en quelque sorte un droit de
récusation à l'étape de l'instruction.
jugement pour faire chuter la dose de subjectivité que
regorgeait le dossier parvenu à la phase de jugement. Si on prend aussi
en compte le fait que les droits du suspect n'étaient pas suffisamment
pris en compte à l'étape des enquêtes
policières76, on peut toute suite apprécier le
degré d'insécurité ou d'injustice dans laquelle pouvait se
trouver les justiciables. Le retour du juge d'instruction opéré
par le CPP peut de ce point de vue être considéré comme la
garantie du droit à un tribunal impartial, surtout que
l'impartialité nécessite comme préalable,
l'indépendance qui n'est pas vraiment l'apanage du Procureur de la
République.
Le retour à la séparation des fonctions de
poursuites et d'instruction constitue aussi le gage d'une justice
éclairée.
II. La garantie d'une bonne justice
63. L'effectivité de
l'instruction préparatoire n'était pas garantie avec le
système antérieur dans la mesure où le Procureur de la
République, magistrat instructeur, pouvait trouver inutile la reprise
des actes qui avaient déjà été effectués
lors des enquêtes de police. Celles-ci acquerraient une puissance
importante à laquelle le CPP a mis un terme (a), terme qui se trouve
davantage renforcé avec le double degré d'instruction (b)
a. Le frein à la toute puissance du
Ministère public
64. Parler de la toute puissance du
Ministère public renvoie au fait qu'il pouvait faire des PV de la police
ce qu'il voulait, et qu'en pratique, seuls ces PV parvenaient à la
juridiction de jugement. Pourtant ces PV contenaient des éléments
de preuve obtenus par les moyens insoupçonnés de torture ou de
toutes autres exactions. Ceci exposait le juge à des erreurs judiciaires
inavouables77. Car sa décision pouvait être
influencée en grande partie par ces PV. Le code de 2005 vient mettre un
terme à cela en garantissant par le retour de la séparation des
fonctions de poursuites et d'instruction, l'effectivité des
investigations78 à la deuxième phase du procès
pénal79, permettant ainsi de remettre en cause la force
probante des PV de police judiciaire.
b. Le double degré de l'instruction
Si le retour du juge l'instruction marque la fin de la toute
puissance du Ministère
76 BOKALLI (V-E), la protection du suspect dans le
code de procédure pénale in RASJ V.4, n°1 2007, p.11.
77 BOKALLI (E-V), op. Cit. p. 13
78 On se demandait si effectivement le Procureur de la
République pouvait se saisir personnellement et par quels actes.
79 La doctrine et la jurisprudence avait
déclaré la caducité des actes de saisine validant ainsi
les procès dans lesquelles la phase d'information judiciaire
n'était pas à respectée (T. G. I. du WOURI, le jugement
108/crim. Du 23 février 1995, J.P n° 25, janvier, février
mars 1996. Cité par MEBU NCHIMI (J C) op. Cit.
public, il faut dire que la chambre de contrôle de
l'instruction constitue elle, un frein à l'omnipotence du juge
d'instruction80. En effet celui-ci n'étant soumis à
aucune autorité, pourrait se considérer comme un juge avant
jugement et ses actes81 se présenteraient comme l'expression
de la volonté du prince ne souffrant d'aucun contrôle. La chambre
de contrôle de l'instruction82 garantit donc le double
degré de l'instruction permettant la reformation ou l'annulation des
actes du juge d'instruction.
65. La chambre de contrôle de l'instruction est une
innovation du code de procédure pénale dans la mesure où
la réforme de 1972 avait supprimé la chambre de mise en
accusation que l'on peut considérer comme son ancêtre. Elle
connaît des appels contre les actes du juge d'instruction. Toute partie
peut demander l'annulation d'un acte de procédure d'instruction pris en
violation de ses droits83. Le Ministère public peut
requérir l'annulation de tout acte d'instruction. Dans tous les cas, le
juge d'instruction en est avisé par écrit. Lorsque c'est le
Ministère public qui le fait, il requiert la transmission du duplicatum
du dossier de l'instruction au président de la chambre de contrôle
de l'instruction en vue de l'annulation de l'acte. Le juge d'instruction peut
faire droit à cette requête (il prend une ordonnance de
transmission) ou alors, par ordonnance motivée et notifiée au
Ministère public et aux autres parties, s'opposer à cette
transmission (il prend une ordonnance de refus de transmission). La voie
d'appel est alors ouverte dans ce cas84.
66. Mais la saisine de la chambre reste limitée,
puisque seul le Procureur de la République peut la saisir lorsqu'il faut
requérir l'annulation d'une ordonnance de renvoi total ou partiel ou une
ordonnance de non-lieu partiel ou total. La reconnaissance des mêmes
droits aux autres parties, surtout à la défense à notre
avis, devrait être opérée.
La séparation des fonctions de poursuites et
d'instruction n'est pas absolue. Comme déjà dit, elle
connaît quelques atténuations, mieux quelques limites qui
pourraient être d'un impact considérable sur le procès
pénal.
B. La relativisation de la séparation des
fonctions de poursuite et d'instruction
80 Cette toute puissance du juge d'instruction et le
fait qu'il reprend en partie les actes de l'enquête préliminaire a
été, et continue d'être le motif de la demande de son
élimination du système judiciaire français.
81 Les décisions telles que les ordonnances de
non lieu partiel ou total, de renvoi total ou partiel, de placement en
détention provisoire...
82 La chambre de contrôle de l'instruction
est une formation spéciale de la Cour d'Appel présidée par
un magistrat du siège de la Cour, désigné par ordonnance
du Président de ladite Cour pour une année judiciaire. Le
Ministère public et les autres parties ont le droit d'assister à
ses audiences.
83 Le juge d'instruction peut constater
lui-même d'un acte de procédure d'instruction est entaché
de nullité dans ce cas, il avise le Procureur de la République
par écrit. Ce dernier requiert la transmission du duplicatum du dossier
de procédure au président de la chambre de contrôle de
l'instruction.
84 Voir les articles 272 CPP et suivants pour la
procédure devant la chambre de contrôle de l'instruction.
67. Le juge d'instruction ne peut pas s'autosaisir même
en cas de flagrance comme c'était le cas avec le CIC; il doit
l'être par le réquisitoire introductif d'instance du Procureur de
la République85 ou la plainte avec constitution de partie
civile de la victime. Et en cas de découverte de nouveaux faits, le juge
d'instruction est tenu de requérir un réquisitoire
supplétif, ce qui le place en situation de
quémandeur86 devant le parquet. Si les relations du juge
d'instruction avec le Procureur de la République sont conflictuelles,
celui-ci peut bloquer l'action de celui-là, ce d'autant plus qu'aucune
sanction, ni délai n'est prévu pour pouvoir contraindre le
Procureur à réagir. Et si le juge d'instruction procède
à l'inculpation en violation de l'article 169 CPP87, celle-ci
sera frappée de nullité absolue puisqu'il s'agira de la violation
d'une règle de procédure pouvant porter atteinte aux droits de la
défense88. Cette réglementation contribue au
renforcement de la séparation des fonctions de poursuites et
d'instruction qui pourtant n'est pas conçue de façon absolue. En
effet le législateur relativise ce principe par la procédure de
flagrant délit (II) et par la possibilité de mettre un terme
à l'information judiciaire (I) reconnue au Procureur
générale près la Cour d'Appel.
I. L'arrêt de l'instruction par le
Ministère public via le Procureur Général près la
Cour d'Appel89
68. L'article 64 CPP dispose que « (1) le Procureur
Général près la Cour d'Appel, sur autorisation
écrite du Ministre de la justice, peut demander l'arrêt des
poursuites à tout stade de la procédure avant l'intervention
d'une décision de fond, lorsque celles-ci sont de nature à
compromettre l'intérêt social ou la paix publique ;
(2) dans le cas prévu au paragraphe1er
du présent article, le juge d'instruction ou la juridiction de jugement
constate son dessaisissement sur l'action publique et donne mainlevée
des mandats éventuellement décernés contre le
bénéficiaire de l'arrêt des poursuites ».
Cette disposition peut être une arme dangereuse entre
les mains du Ministère public et par transitivité, du
gouvernement qui, en l'instrumentalisant, pourrait contrôler la justice
répressive et éventuellement, faire échapper ses
protégés aux filets de la répression. Comme le pense un
auteur, « c'est un anachronisme »90 dans un pays
qui entend consolider l'Etat de droit car l'égalité des citoyens
devant la loi se trouve menacée, ce qui peut être source de
85 La plainte avec constitution de partie civile peut
également le saisir.
86 ROBERT (J-H), de la nécessite d'un
Ministère public, office du juge : part de souveraineté ou
puissance nulle, études rassemblées par Olivier CAYLA et
Marie-France RENOUX-ZAGAME, éd. Bruyant LGDJ, 2001 p. 231
87 Cette disposition fait obligation au juge de
requérir le réquisitoire supplétif.
88 Voir art. 3 et 251 CPP.
89 TCHAKOUA (J-M), la considération de
l'intérêt social et de la paix publique en matière de
poursuites : conjectures autour de l'article 64 du code de procédure
pénale, les tendances de la nouvelle procédure pénale
camerounaise, PUA, pp 81 et s.
90 DJOUENDJEU GAMENI (E-N), op. Cit. p. 11
frustrations. Et l'encadrement dont fait l'objet cette
possibilité, notamment l'antériorité à
l'intervention d'une décision de fond et la compromission de
l'intérêt social et de la paix publique, pourrait se
révéler fallacieux ce d'autant plus que les notions de paix
sociale et d'intérêt social ne font pas l'objet de
définitions par le législateur.
Le Procureur de la République peut aussi exercer les
fonctions d'information.
II. L'exercice des actes d'instruction en cas de
flagrance
69. En cas de flagrant délit, le Procureur de la
République a la faculté de saisir le juge d'instruction ou de
procéder lui-même aux actes que l'on peut qualifier d'actes
d'instruction. La plus importante est la décision de placement en
détention provisoire, en dehors de l'identification du suspect et de son
interrogatoire sommaire, véritable inculpation. L'on peut justifier cela
par le besoin de célérité dans la procédure de
flagrance. En effet lorsqu'on se trouve dans un cas de flagrant délit le
Procureur de la République, après avoir effectué ses
diligences va dresser un PV. Quand il aura décidé d'engager les
poursuites, il traduira directement le suspect devant la juridiction de
jugement à la plus prochaine audience.
On peut constater que la séparation des fonctions de
poursuites et d'instruction est respectée de façon
unilatérale en cas de flagrance dans la mesure où le Procureur de
la République peut poser les actes d'instruction alors que le juge
d'instruction ne peut même pas s'autosaisir.
70. Il nous semble par ailleurs que la limitation de
l'obligation d'information aux crimes et aux infractions commises par les
mineurs de 18 ans n'est pas satisfaisante. En effet si cette limitation tient
compte de la gravité de la sanction, cela ne saurait également
être valable pour tous les cas de délits puisque certains sont
assortis de sanctions élevées91. Le législateur
pourrait se référer à la sanction encourue pour une
infraction et non à la nature de celle-ci pour l'exigence de
l'information judiciaire. Les lenteurs de la procédure souvent
évoquées pour justifier cette limitation ne sont pas
convaincantes ; elles résultent en général, non pas du
double degré des investigations, mais du formalisme
procédural92.
71. A la clôture de l'information judiciaire, le juge
d'instruction est tenu de communiquer le dossier au Procureur de la
République afin que celui-ci prenne son réquisitoire
définitif sur la décision de renvoi ou de non-lieu. Le Procureur
de la République dispose à cet effet de cinq jours93
à compter de la réception, pour retourner le dossier au juge
d'instruction,
91 Le délit est une infraction punie d'une
peine d'emprisonnement supérieur à 10jours et ne pouvant
excéder 10 ans et ou d'une amende supérieur à 25000
francs.
92 MEBU NCHIMI (J C), le Procureur de la
République « décoiffée » de sa casquette de
magistrat instructeur, les tendances de la nouvelle procédure
pénale camerounaise, PUA, pp 241 et s.
93 Délai assez court si l'on tient compte du
volume des dossiers de procédure et du nombre d'affaires qu'ont
à
accompagné de son réquisitoire. Ce
réquisitoire ne lie pas le juge d'instruction.
CONCLUSION DU CHAPITRE I
72. Au terme de ce chapitre, on peut constater que le
législateur a fait oeuvre d'humanisme dans la mesure où il a
réglementé la phase des enquêtes de police judiciaire,
jadis siège d'abus de toute sorte et qu'il l'a placée sous le
contrôle du Ministère public afin de fortifier les garanties
accordées au suspects à cette étape du
procès94.
Pour renforcer la garantie des droits des justiciables, il a
restauré le principe de la séparation des fonctions de poursuites
et d'instruction. Ceci a commencé par la dépossession des
magistrats de la « casquette » d'OPJ suivie de la résurrection
du juge d'instruction, cet « ancien-nouveau »95
qui assurera désormais l'information judiciaire en lieu et place du
Procureur de la République.
73. Cependant des failles demeurent çà et
là. C'est ainsi que le contrôle du Procureur sur les actes de
police judiciaire porte en grande partie sur les PV. Les visites dans les
locaux de la police judiciaire sont facultatives. Ce qui compromet leur
effectivité sur le terrain, surtout si on tient compte de l'insuffisance
du personnel magistrat dans nos parquets et du cumul de compétence dont
ils font l'objet du fait de l'ineffectivité des parquets des TPI sur
l'ensemble du territoire national96.
74. Par ailleurs, la possibilité reconnue au
Ministère public d'arrêter les poursuites à toutes les
phases du procès pénal par l'article 64 CPP pourrait être
source d'instrumentalisation politique. L'exécutif, au regard de sa
supériorité hiérarchique sur les parquets, pourrait avoir
une main mise sur le procès pénal. Au lieu d'une
séparation, le législateur aurait alors réalisé une
fusion des fonctions de poursuites et d'instruction au profit de
l'exécutif. Ce qui nécessite des réaménagements
pour ne pas gâcher l'important travail effectué dans le sens de la
garantie des droits et libertés des citoyens. Ce travail qui ne s'est
d'ailleurs pas limité aux phases préjudiciaires du
procès.
connaître le petit nombre de magistrats disponibles dans
nos différents parquets.
94 BOKALLI (E-V), op. Cit. p. 13
95 OHANDJA ELOUNDOU (A), un revenant : le juge
d'instruction, Juridis périodique, n°65 2006, pp 91 et s.
96 En dehors des chefs lieux de provinces qui
disposent des TPI distincts des TGI, l'on ne dénombre pas plus de 6 TPI
sur un ensemble de plus de 200 arrondissements que compte le Cameroun.
CHAPITRE II : LE MINISTERE PUBLIC ET L'EXERCICE DE
L'ACTION PUBLIQUE
75. « L'action publique tend à faire
prononcer contre l'auteur d'une infraction, une peine ou une mesure de
sûreté97 édictée par la loi
»98 elle est pour ainsi dire une combinaison des
enquêtes de police judiciaire et des poursuites99. En
réalité, l'exercice de l'action publique commence au niveau de
l'instruction préparatoire. Le Ministère public y assiste aux
auditions, interrogatoires, inculpations, et a la possibilité de
consulter le dossier de l'instruction à tout moment. Il peut exercer les
recours contre les actes du juge d'instruction devant la chambre de
contrôle de l'instruction. Lorsque la phase de l'instruction est
achevée, le Ministère public peut continuer l'exercice de
l'action publique devant la juridiction de jugement. A ce niveau, il va
soutenir l'accusation publique après avoir déclenché les
poursuites (section 1) ; et comme les autres parties, il pourra exercer
éventuellement les voies de recours et procéder à
l'exécution des décisions de justice (section 2).
Section I : le soutien de l'accusation
Selon RASSAT100, poursuivre consiste non seulement
à mettre l'action publique en mouvement (paragraphe I), mais aussi
à l'exercer. L'exercice consiste dans la phase de jugement à
soutenir l'accusation publique (paragraphe II). Ce qui veut dire en d'autres
termes que le Ministère public n'est pas tenu de soutenir l'action
publique lorsqu'elle est déclanchée par d'autres personnes. C'est
en fait ce qui fait souvent dire que le Ministère public n'a pas
seulement pour rôle de requérir la condamnation de l'accusé
ou du prévenu. Ici se pose le problème essentiel de la
présomption d'innocence et de l'égalité entre les parties
au procès.
Paragraphe I : le déclenchement
préalable de l'action publique
76. Le Procureur de la République est le destinataire
de tous les procès verbaux de la police judiciaire relatifs aux
infractions commises dans son ressort et relevant de la juridiction de droit
commun101. Lorsqu'il les reçoit il décide de la suite
à leur donner ce qui lui confère un
97 La mesure de sûreté se distingue de
la peine par son caractère généralement préventif
puisqu'elle intervient avant la commission de l'infraction. Elle découle
des idées de l'école positiviste qui préconise les mesures
de protection de la société contre l'état dangereux de
l'individu.
98 Art. 59 (2) CPP.
99 MATTER dans ses conclusions sur un arrêt de
la cour de cassation française ch. réunies en date du 29 Jan.
1931, DP 1931, I, 94, pense que « les poursuites
sont tous les actes accomplis par les officiers du Ministère
public depuis la mise en mouvement de l'action publique
jusqu'à ce qu'une décision judiciaire définitive soit
intervenue sur la question ».
100 RASSAT (M-L) Le Ministère public entre son
passé et son avenir, éd 1967 pp 88-90
101 Les procès verbaux afférents aux faits relevant
du tribunal militaire sont transmis au Ministère chargé de la
rôle prépondérant dans le
déclanchement des poursuites dont il apprécie
l'opportunité (A) ; les excès susceptibles d'en résulter
sont atténués par le droit de mettre l'action publique en
mouvement reconnu à d'autres personnes (B).
A. L'appréciation de l'opportunité des
poursuites
L'appréciation de l'opportunité des poursuites (II)
se fait par le Procureur de la République à la suite d'autres
actes préalables (I).
I. Les actes préalables à
l'appréciation de l'opportunité des poursuites
Les opérations préalables à
l'opportunité des poursuites sont en principe le contrôle de la
légalité (a) et la vérification des obstacles aux
poursuites (b)
a. La vérification de l'incrimination des
faits
77. Le Procureur de la République doit
vérifier, chaque fois qu'il est saisi des faits, si ceux-ci tombent sous
le coup d`une qualification légale afin de se conformer au principe de
la légalité des délits et des peines, principe fondamental
dans la garantie de la sécurité juridique et de l'Etat de droit.
En fait, le Procureur va se servir de sa culture juridique pour repérer
dans le catalogue des infractions du code pénal, celles qui cadreraient
avec les faits qu'il est appelé à qualifier. Après avoir
recensé les différentes qualifications possibles, il retiendra
celle qui correspondra exactement aux faits dont il est saisi. Il lui est
parfois arrivé d'ignorer certains faits pour pouvoir modifier la
qualification qui devrait normalement être retenue. C'est ainsi qu'on a
eu au Cameroun pendant la période d'application des ordonnances
répressives de 1972, les pratiques de « correctionnalisation
>>102 et de « contraventionnalisation
>>103. Ce qui en soit, était protecteur des droits du
suspect mais contraire au principe de la légalité des
délits et des peines.
78. Au terme de cette confrontation des faits aux
différentes qualifications du code pénal, le Procureur de la
République peut, soit classer l'affaire sans suite lorsque les faits ne
constituent pas une infraction pénale, soit alors, si les faits
constituent une infraction, vérifier s'il n'existe aucun obstacle
à leur poursuite.
b. La vérification des obstacles aux
poursuites
79. Le code de procédure
pénale a prévu plusieurs obstacles aux poursuites
pénales.
justice militaire (art. 85 CPP)
102 La correctionnalisation est transformation d'un crime en
délit pour atténuer la sanction.
103 La contraventionnalisation quant à elle est la
transformation d'un délit en contravention.
Ceux-ci peuvent être l'extinction de l'action publique
pour les causes prévues par l'article 62 CPP. Il s'agit notamment de :
<< a) la mort du suspect, de l'inculpé, du prévenu ou
de l'accusé ; b) la prescription104 ; c) l'amnistie
; d) l'abrogation de la loi ; e) la chose jugée ; J) la transaction
lorsque la loi le prévoit expressément ; g) le retrait de la
plainte lorsque celle-ci est une condition de la mise en mouvement de l'action
publique ». Pourraient aussi constituer des obstacles à la
poursuite, la condition préalable d'une plainte de la victime,
l'immunité de poursuite ou de juridiction dont
bénéficierait le suspect, les causes d'exonération ou de
non imputabilité105, ou l'autorité de la chose
jugée...le Ministère public, par la personne du Procureur de la
République, va s'assurer qu'aucun de ces freins n'existe.
Après l'appréciation de la
légalité106 et la vérification des obstacles
à l'action publique, le Procureur de la République n'est pas
ténu d'engager les poursuites. Il dispose d'une assez grande marge de
liberté pour décider de la suite à donner au
procès.
II. Le principe l'opportunité des
poursuites
80. Le code de procédure
pénale camerounais a opté pour principe de l'opportunité
des poursuites107. Une fois le constat de l'infraction
opéré ainsi que celui de l'absence des obstacles ci-dessus, le
Procureur de la République décidera de poursuivre ou non. Dans la
première hypothèse, il pourra saisir, soit le juge d'instruction
par un réquisitoire introductif d'instance, obligatoire en cas de crime
et de délit commis par un mineur de 18 ans, soit la juridiction de
jugement par une citation directe en cas de délit ou de contravention,
ou par la voie de la procédure de flagrant délit. Dans la seconde
hypothèse, il procédera à un classement sans
suite108. La doctrine s'est toujours intéressée
à ce pouvoir pour savoir sous quelle impulsion la décision du
Procureur de la République devrait obéir109. Mais le
moins que nous pouvons dire est que l'opportunité des poursuites a un
fondement (a) qui confère une liberté au Procureur de la
République, liberté limitée par la subordination
hiérarchique (b).
a. Le fondement de l'opportunité des
poursuites
104 La prescription est de 1 an pour les contraventions, 3ans
pour les délits et 10 ans pour les crimes.
105 Les cas de causes d'exonération ou de non
imputabilité ne le contraignent pas forcement à classer l'affaire
puisque celles-ci doivent être soulevées par la défense si
elle est assez performante. Mais pour des raisons d'économie et de
désencombrement du prétoire, le Ministère prend
généralement la décision de classer simplement les cas
pareils.
106 Les partisans de la légalité des poursuites
soutenaient que pour des injustices, chaque fois que des faits tombent sur le
coup d'une qualification pénale, elles devraient faire l'objet des
poursuites. Ils s'opposaient ainsi à l'opportunité des
poursuites.
107 Voir art. 141 CPP << le Procureur de la
République saisi dans les conditions prévues aux articles 135,
139 et 140 peut (...) décider de la poursuite du suspect ».
108 Art. 141 (c) et (e).
109 ROBERT (J-H), De la nécessité d'un
Ministère public, in l'office du juge : part de souveraineté ou
puissance nulle, études rassemblées par Olivier CAYLA,
MARIE-France, RENOUX-ZAGAME, éditons BRUYANT LGDJ 2001, pp 227et
s
81. La décision de classer sans suite une affaire
serait fondée sur la qualité de représentant de la
société et de gardien de l'ordre public. En effet, étant
le représentant de la société et le gardien de l'ordre
public, le Ministère public est compétent pour apprécier
l'ampleur du trouble causé à la société par
l'infraction, ou que pourrait causer un déclanchement immédiat de
la répression110.
En droit français, il est permis au Procureur de la
République de recourir à la médiation pénale en
accord avec les parties111 s'il lui paraît « qu'une
telle mesure est susceptible d'assurer la réparation du dommage
causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de
l'infraction et de contribuer au reclassement de l'auteur de l'infraction
». Il lui est même reconnu pour les infractions
graves112, le pouvoir de proposer une composition
pénale113 à la personne majeure qui reconnaît
avoir commis le délit114.
b. La subordination hiérarchique comme limite
à la liberté du Procureur de la République
82. La liberté d'apprécier l'opportunité
des poursuites n'est pas absolue. Elle est relativisée par la soumission
du parquet à l'autorité hiérarchique du Garde des
Sceaux.
Le Garde des Sceaux, à travers l'autorité qu'il
exerce directement sur le Procureur Général près la Cour
d'Appel115, peut soumettre indirectement le Procureur de la
République puisque celui-ci est soumis au Procureur
Général près la Cour d'Appel116. En effet le
Procureur général, aux termes de l'article 133 (1) veille
à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du
ressort de la Cour d'Appel. Il peut prescrire aux magistrats du
Ministère public de son ressort d'enquêter sur les infractions
dont il a connaissance, de procéder à un classement sans suite ou
d'engager les poursuites. Ces prescriptions s'imposent au Procureur de la
République qui ne peut s'y opposer qu'en se fondant sur les limites de
la subordination
110 Il serait par exemple inopportun pour le Ministère
public d'engager des poursuites immédiatement contre le proviseur d'un
lycée et les professeurs du même lycée à l'approche
des examens officiels car ces poursuites nuiraient plus qu'il ne plairaient.
111 Art. 41-1 CPPF.
112Violence, vols simples, usage de
stupéfiants, port d'armes, abandon de famille, conduite en état
d'alcoolique...
113 La composition pénale consiste à verser une
amende au trésor public, se dessaisir au profit de l'Etat de l'objet qui
a servi à commettre l'infraction, remettre au greffe son permis de
conduire ou de chasser, effectuer au profit de la collectivité un
travail non rémunéré. Cette sanction doit être
acceptée par l'auteur de l'infraction et validée par le
président du TGI ; son exécution éteint l'action
publique.
114 LE GUNEHEC (F), Présentation de la Loi
n°99-515 du 23 Juin 1999, JCP 1999, actualité n°28, p.1325 et
n°29, p 1393 ; PRADEL (J), Une consécration du << plea
bargaining >> à la française : la composition
pénale, JCP 2000, F, 198.
115 L'article 30 (1) de la Loi du 29 Décembre 2006
dispose qu' << il existe auprès de chaque Cour d'Appel un parquet
général dirigé par un Procureur Général qui
relève directement du Ministre chargé de la justice >>
116 L'article 30 (2) op. Cit. Prévoit la subordination
directe du Procureur de la République au Procureur Général
près la Cour d'Appel.
hiérarchique que sont le pouvoir propre du chef de
parquet117 et la liberté de parole118 pourtant ces
limites sont inefficaces.
83. Le pouvoir propre des chefs de parquets peut être
aisément contourné par la prescription à un substitut du
Procureur de la République « récalcitrant >>
d'effectuer les actes de celui-ci. Ce qui est d'autant plus plausible lorsqu'on
voit l'effort de renforcement de la subordination de parquet à
parquet119opéré par le législateur de 2005.
En fin de compte on pourrait dire que l'opportunité
des poursuites appartient plus au Ministre de la justice, Garde des Sceaux
qu'au Procureur de la République, nonobstant la possibilité
reconnue à d'autres personnes de mettre l'action publique en
mouvement.
B. Le déclenchement des poursuites par d'autres
personnes
L'article 60 du code de procédure pénale
dispose que « l'action publique est mise en mouvement et
exercée par le Ministère public. Elle peut aussi être mise
en mouvement par une administration (II) ou par la victime (I)
dans les conditions déterminées par la loi ». La
situation des juges nécessite également d'être
étudiée (III)
I. Le déclenchement des poursuites par la partie
civile ou victime
La partie civile bénéficie de la faculté
de déclencher l'action publique, soit pour vaincre l'éventuel
blocus opéré par le Procureur de la République, soit tout
simplement pour éviter de passer par ce dernier. Il convient de
présenter les conditions (a) et les modalités de cette
mobilisation des poursuites (b).
a. Les conditions du déclenchement de l'action
publique par la partie civile
84. Toute victime peut engager les poursuites qu'elle soit
une personne physique ou morale. Mais le problème s'est posé
relativement aux personnes morales représentant un groupe car leur
action présente l'aspect d'une action publique surtout lorsqu'elles
agissent pour ne pas demander grand-chose comme indemnisation120. Le
législateur y a apporté des solutions en fixant certaines
conditions pour le déclenchement de l'action publique par la partie
civile en
117 L'exercice de ce pouvoir nécessite un courage
énorme au regard de l'instrumentalisation possible du régime
disciplinaire des magistrats du parquet.
118 La liberté de parole ne pouvant intervenir
qu'après le déclanchement de l'action publique nécessite
une information préalable de l'autorité hiérarchique
directement supérieure (art 3 (3) du Décret portant statut de la
magistrature).
119 L'article 133 (2) dispose que « il (le Procureur
Général près la Cour d'Appel) a autorité sur tous
les magistrats du Ministère public de son ressort >>.
120 Lire LARGUIER (J), L'action publique menacée (à
propos de l'action civile des associations devant les juridictions
répressives), Recueil Dalloz 1958, chron. VI pp 6 et s.
générale (1) et celles relatives aux personnes
morales en particulier (2).
1. Les conditions générales de
déclanchement des poursuites par la partie civile
Aux termes de l'article 71 du code de procédure
pénale, toute personne qui aurait subi un préjudice
résultant d'une infraction est recevable en justice à l'exception
des mineurs non émancipés et des majeurs frappés d'une
incapacité. Ceux-ci ne peuvent agir que par le biais d'un
représentant. Il suffit donc pour une personne physique de prouver
qu'elle a subi un préjudice que celui-ci résulte de l'infraction
et qu'il s'agit d'un préjudice direct, certain et actuel. Les ayants
droits d'une personne décédée peuvent également
exercer l'action civile née d'une infraction devant une juridiction
répressive.
Des conditions supplémentaires existent pour les
personnes morales.
2. Les conditions particulières aux personnes
morales
L'article 74 CPP fixe les conditions particulières aux
personnes morales. Le paragraphe 1 de cet article est relatif aux associations,
syndicats et ordres professionnels. Ces personnes morales ne sont recevables
que sous la condition d'invoquer un dommage certain et un intérêt
collectif ou professionnel. C'est dire qu'elles sont irrecevables si
l'intérêt en cause est particulier à un des membres ou si
le préjudice n'est qu'éventuel.
Le paragraphe 2 quant à lui est relatif à
l'assureur de responsabilité. Celui-ci est irrecevable devant les
juridictions répressives.
85. Il ne suffit pas d'être recevable et d'exercer une
action devant une juridiction répressive pour voir l'action publique
mobilisée. Il faut en plus le faire par les modalités
appropriées.
b. Les modalités du déclenchement de
l'action publique par la partie civile
La partie civile peut mettre l'action publique en mouvement par
citation directe (1) ou par plainte avec constitution de partie civile (2)
1. La citation directe
86. La citation directe est la sommation à
comparaître devant une juridiction de jugement délivrée par
exploit d'huissier à la requête soit, du Ministère public,
soit de la partie lésée par l'infraction ou de toute autre
personne intéressée. Elle permet à la personne ayant subi
un préjudice résultant de l'infraction de mettre l'action
publique en mouvement. Lorsque
la victime le fait, elle est tenue d'élire domicile au
siège du tribunal saisi si elle n'y est pas domiciliée. La
citation portera éventuellement la mention de ce domicile élu
ainsi que d'autres indications telles que la date de sa délivrance, les
noms, prénoms, adresses, profession et résidence du
requérant ; les noms, prénoms et adresses de l'huissier ; les
noms, prénoms, filiation et l'adresse complète du destinataire,
particulièrement son domicile ou son lieu de travail. La citation doit
en outre énoncer les faits incriminés et viser le texte de loi
qui les réprime121.
87. L'huissier doit faire toutes diligences
nécessaires pour servir la citation au destinataire. Il mentionne sur
l'original ainsi que sur les copies ses diligences, ainsi que les
réponses faites à ses éventuelles
interpellations122. L'huissier de justice est tenu de signifier la
citation dans les 5 jours de sa délivrance sauf si le destinataire
réside hors de la ville du lieu de comparution. La prorogation est de 1
jour/25 km et de 90 jours si le prévenu réside à
l'étranger. Le non respect des délais entraîne la
nullité de la citation. Celle-ci est prononcée par la juridiction
qui ordonne une nouvelle citation. Elle peut aussi être annulée en
cas d'inobservation d'autres formalités portant atteinte aux droits du
concerné. Les frais d'annulation sont à la charge de l'huissier
de justice si elle résulte de son fait.
On peut tout de même signaler que les frais
nécessaires pour procéder par voie de citation directe ne sont
pas à la portée de toutes les bourses. Ce qui rend cette
modalité sélective123.
2. La plainte avec constitution de partie
civile
88. La plainte avec constitution de partie civile est l'acte
par lequel une personne qui s'estime lésée par une infraction
saisit le juge d'instruction pour obtenir réparation du préjudice
qu'elle prétend avoir subi. Elle est soumise à certaines
conditions pour son admission124 et met l'action publique en
mouvement.
La constitution de partie civile n'est pas possible pour les
infractions dont la poursuite est réservée au seul
Ministère public et pour les contraventions. La personne qui entend se
constituer initialement partie civile doit consigner au greffe du tribunal une
somme fixée par une ordonnance du juge d'instruction suivant les
nécessités des enquêtes ; un supplément de
consignation pouvant être demandé au cours de celles-ci.
89. Lorsque ces conditions sont remplies, la saisine du juge est
valable et met l'action
121 Art. 41 CPP.
122 Lire pour complément l'art. 42 et suivants CPP.
123 Surtout lorsqu'on sait que les aider judiciaires n'est pas
facile à obtenir au Cameroun.
124 Il faut de savoir qu'il existe deux types de constitution
de partie civile ; la constitution de parte civile initiale (celle que nous
étudions ici) et la constitution de partie civile incidente qui vient se
greffer à l'action publique déjà engagée.
publique en mouvement. Cela n'a pas toujours été
ainsi c'est la jurisprudence qui, opérant un revirement, a eu à
l'admettre dans un arrêt de la Cour de Cassation
française125. Le législateur camerounais vient
confirmer cette jurisprudence dans les dispositions de l'article 157,
paragraphe 2 CPP.
Toute constitution de partie civile abusive engage la
responsabilité civile de son auteur, ce qui permet d'éviter
l'engorgement des cabinets d'instruction par des constitutions de partie civile
fantaisistes.
Le législateur prévoit, en dehors du
déclenchement de l'action publique par la partie civile, la
possibilité pour certaines administrations de le faire.
II. Le déclenchement de l'action publique par
certaines administrations
90. Certaines administrations peuvent également mettre
en mouvement l'action publique mais seulement lorsque l'infraction porte sur la
violation d'une disposition de la législation dont elles ont la charge
de veiller au respect. Il s'agit des administrations telles que les eaux et
forets, les douanes, le fisc, la prévoyance sociale...il s'agit en fait
d'un droit de déclanchement spécial pour les infractions touchant
à leur domaine d'activité. En effet si une infraction est commise
dans ces domaines, ces autorités joueront à la fois le rôle
de la police judiciaire et, dans une moindre mesure, celui du Ministère
public qu'elles assistent devant la juridiction de jugement.
91. A l'examen on se rend compte que les voies ouvertes aux
autres personnes pour mobiliser les poursuites sont assez sélectives,
soit du fait du manque de moyens financiers pour les emprunter, soit pour des
causes relatives à la spécialisation du domaine d'intervention.
Ceci rend donc l'utilisation de la voie principale assez incontournable.
On pourrait dire que c'est le Ministre de la justice ou le
pouvoir exécutif qui est juge des poursuites puisqu'il dispose non
seulement des moyens de pression sur le Ministère public susceptibles de
réduire son pouvoir d'apprécier l'opportunité des
poursuites, mais également, peut autoriser ou « demander »
l'arrêt des poursuites à toutes les étapes de la
procédure même lorsque c'est d'autres personnes ou administrations
qui les ont déclenchées.
Le législateur aurait pu prévoir un organisme
national ad hoc composé de magistrats de la cour de cassation qui
déciderait du bien fondé des classements sans suite politiques ou
non, et de l'arrêt de la procédure. Ceci pourrait obliger le
Procureur de la République récalcitrant à délivrer
le réquisitoire litigieux, d'éviter les frustrations et de
125 Cass. 8 /12/1906 (arrêt Laurent ATTHALIN) D 1907, I,
p207 « qu'en investissant la partie lésée du droit
de
saisir de l'action civile le juge d'instruction, le
législateur a nécessairement entendu que le dépôt
même de la
plainte entre les mains du magistrat, avec constitution de
partie civile, mettrait également en mouvement
l'action publique »
respecter le principe de la séparation des pouvoirs. Ce
serait une adaptation de la commission des requêtes qu'avait
proposée en France, la commission TRUCHE126, dans notre
système judiciaire. Aussi l'article 64 devrait être
revisité par le législateur.
III. Le déclenchement de l'action publique par
les juges
Les juges dont il s'agit sont le juge d'instruction (a) et le
juge de jugement (b).
a. Le juge d'instruction et la mise en mouvement de
l'action publique
92. Dans le CIC, le juge
d'instruction avait la possibilité de se saisir d'une affaire en cas de
crimes ou de délits flagrants. Avec le code de procédure
pénale, aucune permission ne lui est accordée pour
déclancher l'action publique. Les articles 143 et 157 sont assez clairs
à ce sujet. L'information judiciaire ne peut être ouverte que si
le juge d'instruction est saisi par un acte du Procureur de la
République ou par une plainte avec constitution de partie civile. A ce
niveau la séparation des fonctions de justice répressive est
respectée. Qu'en est il du juge de jugement ?
b. Le juge de jugement et le déclenchement de
l'action publique
93. En principe, le juge de jugement
ne dispose pas du pouvoir de mettre l'action publique en mouvement. Mais la loi
lui donne la possibilité de le faire lorsqu'une infraction est commise
à l'audience. A ce niveau il faut distinguer selon que l'infraction est
une contravention, un délit ou un crime.
En cas de contravention, le tribunal dresse sur le champ un PV
des faits et entend les contrevenants, les témoins et le
Ministère public, et statue. Il met donc l'action publique en mouvement
(art. 624 a) CPP).
Lorsque l'infraction est un délit, le tribunal
procède comme dans le cas des contraventions.
En cas de crime, « le président du tribunal
ordonne l'arrestation de son auteur, procède à son audition,
dresse PV de ses déclarations et le fait conduire devant le Procureur de
la République qui procède conformément à la loi
» (art. 624 c) CPP). On peut au regard de ces dispositions, dire que
le président de la juridiction ne dispose pas du pouvoir de
déclancher l'action publique. Ce d'autant plus que suivant les
dispositions de l'article 142 CPP, l'information judiciaire est obligatoire en
matière de crime. Donc en disposant que le
126 ROBERT (J-H), De la nécessité d'un
Ministère public, l'office du juge : par de souveraineté ou
puissance nulle. Etudes rassemblées par CAYLA (O), MARIE-France,
RENOUX-ZAGAME, Bruyant LGDJ, 2001.
Procureur de la République procède
conformément à la loi, l'article 624 c renvoie certainement
à l'exercice par ce dernier de son pouvoir d'appréciation de la
mise en mouvement de l'action publique. Ce déclanchement des poursuites
qui ne peut se faire que par le truchement du réquisitoire introductif
d'instance. Ce qui rend aussi le juge d'instruction actif. C'est cette
mobilisation qui caractérise le Ministère public à
l'audience pénale.
Paragraphe II : le rôle actif du Ministère
public aux audiences pénales
94. Les juridictions de jugement sont le TGI et le TPI. Elles
sont saisies par ordonnance de renvoi du juge d'instruction ou arrêt de
la chambre de contrôle de l'instruction, par une citation directe de la
partie civile ou du Ministère public, ou enfin, par la procédure
de flagrant délit. Les grands principes ici sont l'égalité
des armes et la présomption d'innocence. C'est cette dernière qui
déterminera le rôle du parquet dans la mesure où l'attitude
du prévenu ou de l'accusé modifie le déroulement de la
procédure.
Avec l'harmonisation de la procédure accusatoire du
CPO, le déroulement des débats est fonction de l'attitude de
l'accusé ou du prévenu. Lorsque le président du tribunal
entre dans la salle d'audience, il déclare l'audience ouverte et invite
l'assistance à s'asseoir. Le greffier audiencier fait appel des affaires
inscrites au rôle. Le président vérifie la présence
de chaque partie et de toute autre personne convoquée. La
présence du Ministère public est obligatoire à peine de
nullité de la procédure. Le code exige désormais la
présence de l'accusé ou du prévenu. Celui-ci ne peut
être absent que si la peine encourue en cas de condamnation est
inférieure à 2 ans d'emprisonnement. Au cas contraire, son avocat
ne sera invité qu'à donner les raisons de son absence et la
décision qui interviendra sera contradictoire à son égard.
Lorsque le président aura vérifié l'identité des
prévenus ou accusés, il leur communiquera sommairement les faits
qui leur sont reprochés et leur demandera s'ils plaident coupables (A)
ou non (B).
A. La passivité relative du Ministère
public en cas d'admission de sa culpabilité par la
défense
95. Lorsque le prévenu ou accusé plaide
coupable, le débat est bref. Le tribunal vérifie si cette
réponse n'est pas donnée par le prévenu ou l'accusé
pour sauver d'éventuels coauteurs ou complices, ou alors pour s'en
sortir au meilleur compte. Après ces vérifications, le tribunal
enregistre sa déclaration au plumitif d'audience. Le Ministère
public expose les faits de la cause, propose la qualification pénale et
énonce les dispositions légales applicables. La parole est
donnée à la partie civile pour présenter ses observations
sur les faits relatés par le Ministère
public. Enfin l'accusé ou le prévenu fait les
déclarations qu'il désire. Le tribunal se prononce soit en
acceptant la déclaration de culpabilité, soit en la rejetant.
Dans le premier cas, la parole est donnée à la partie civile ou
son avocat pour formuler sa demande en dommages et intérêts avec
justificatifs. Le Ministère public prend la parole pour produire le
casier judiciaire de l'accusé ou du prévenu et requérir
sur la peine et sur les dommages et intérêts. Le conseil de la
défense intervient éventuellement pour plaider les circonstances
atténuantes. Le prévenu ou l'accusé fait ses
dernières déclarations. Le tribunal déclare les
débats clos. La décision ne peut cependant jamais intervenir
à la première audience.
On remarque que lorsque le prévenu ou l'accusé
se déclare coupable, le Ministère public ne joue pas
véritablement un rôle actif. Ce qui est tout le contraire lorsque
la défense plaide non coupable. Car un débat contradictoire, oral
et public127 s'ouvre.
B. La mobilisation du Ministère public en cas de
refus de culpabilité par la défense
96. Le Ministère public sera tenu de soutenir
l'accusation par la production et la discussion des preuves (I) et
l'interrogatoire des témoins (II) lorsque le prévenu ou
l'accusé plaide non coupable.
I. La production et la discussion des preuves par le
Ministère public
Le code de procédure pénale de 2005 a
consacré le principe de production et de discussion contradictoire des
preuves128. Ce principe qui repose essentiellement sur le principe
de la présomption d'innocence, au regard de la relativisation de l'aveu
par l'article 315129 CPP, procède à une distribution
des taches. L'accusateur est débiteur principal de la preuve (a) la
défense, débitrice exceptionnelle (b) et le juge joue
essentiellement le rôle d'arbitre afin de découvrir la
vérité et de mettre de l'ordre à l'audience.
a. L'accusation, débitrice principale de la
preuve
97. L'article 307du code de procédure pénale
dispose que « la charge de la preuve incombe à celui qui a mis
en mouvement, l'action publique» cela s'exprime en latin par la
maxime « actori incumbit probatio ». Ceci veut dire qu'en principe
c'est l'accusateur qui doit rapporter la preuve de l'infraction dans ses
éléments constitutifs et établir la culpabilité
de
127 Ces trois caractères sont fondamentaux dans la
procédure à l'audience de jugement.
128 NKOLLO (P), la recherche et la production des preuves dans
l'avant projet du code de procédure pénale camerounais,
thèse dactylographiée de Doctorat 3ème cycle
Droit privé UY, p190.
129 Cet article dispose que l'aveu n'est pas admis comme
preuve s'il a été obtenu par violence, menaces, contraintes ou
contre promesse d'un avantage quelconque ou tout autre moyen portant atteinte
à la libre volonté de son auteur.
l'accusé ou du prévenu. Le Ministère
public n'étant pas forcement celui qui a mis l'action publique en
mouvement, il peut arriver qu'il soutienne plutôt la
défense130 en requerrant la relaxe ou l'acquittement du
prévenu ou du suspect.
Mais lorsque le Ministère public a lui-même mis
l'action publique en mouvement, il agit rarement sinon jamais pour la
défense du prévenu ou du suspect. Son travail consiste
généralement à établir la preuve des
éléments matériels de l'infraction ainsi que celle de
l'élément moral. S'il s'agit par exemple du vol, il devra
démontrer qu'il y a eu soustraction de la chose d'autrui, que cette
soustraction a été frauduleuse (éléments
matériels) et en plus, que l'auteur de la soustraction a eu pour
intention de s'approprier la chose (élément moral) ; il est
dispensé de l'obligation d'établir la preuve de la connaissance
par le prévenu ou l'accusé du caractère
répréhensible de ses actes : « Nul n'est censé
ignorer la loi ». Mais dans certains cas, ses investigations
devraient être beaucoup plus poussées dans la mesure où il
pourra être tenu, en fonction de la qualification qu'il a donnée
aux faits, d'établir en dehors du dol
général131, le dol spécial132 ou
alors le dol éventuel133.
98. Il existe tout de même des cas où le
législateur prévoit des présomptions de culpabilité
renversant ainsi la charge de la preuve, celle-ci devant être
désormais rapportée par la défense. En dehors de cela, il
est facile de constater que lorsque le Ministère public a mis l'action
publique en mouvement et qu'il y a également constitution de partie
civile, il est aidé par la partie civile. L'inverse n'étant pas
toujours vrai134.
99. Lorsque la preuve de l'infraction est rapportée
ainsi que celle de la culpabilité de l'accusé ou du
prévenu, celui-ci peut toujours se défendre. Il lui reviendra
dans ce cas de rapporter la preuve des moyens de défense qu'il pourra
invoquer.
b. La défense, débitrice exceptionnelle de
la preuve
La défense est tenue de rapporter la preuve des moyens
de défense qu'elle invoque : « reus in excipiendo fit actor ».
C'est dire que si le défendeur soulève une exception, il devra en
rapporter la preuve. Dans l'hypothèse où le défendeur
poursuivi pour meurtre invoque la légitime défense, il devra
établir qu'il faisait, au moment de son coup fatal, l'objet d'une
130 Il n'est pas simplement accusateur public ; il défend
aussi une grande cause : la vérité.
131 « Le dol général consiste à
savoir que l'acte qu'on va poser est défendu et à vouloir le
commettre » (NKOLLO (P), op. cit. p. 218
132 Le dol spécial est « l'intention
précise, requise par des Loi s particulières, comme
élément constitutif de certaines infractions à propos
desquelles le législateur incrimine généralement la
production d'un résultat déterminé » (MERLE
cité par NKOLLO (P), op. cit.p220
133 Le dol éventuel c'est le fait de poser un acte
recherchant un résultat précis tout en sachant qu'un autre
pourrait être atteint.
134 En fait il est constant de voir le membre du parquet
s'évertuer à combattre, après avoir établi la
preuve de l'infraction, à combattre les prétentions de la partie
civile en lui reprochant par exemple d'avoir organisé toutes les
circonstances pour se retrouver dans la situation de victime.
attaque menaçant son intégrité physique, sa
vie ou celles d'une autre personne et que sa réaction a
été proportionnelle à ladite attaque.
Par ailleurs, il peut être amené à titre
principal, à rapporter la preuve de son innocence dans les cas où
la loi prévoit les présomptions de culpabilité.
100. A coté de la production et de la discussion des
preuves qui, à travers leur caractère contradictoire, constituent
des garanties fondamentales de la présomption d'innocence et donc des
droits de la défense, le législateur a organisé la
confrontation des témoins.
II. La confrontation contradictoire des
témoins
Lorsque le prévenu ne reconnaît pas les faits,
le tribunal entend les témoins. Ceux du Ministère public,
accusateur, sont entendus les premiers, suivis de ceux de la partie civile et
enfin de ceux de la défense. Aucune limitation n'est faite par rapport
au nombre de témoins. Chacune des parties peut présenter autant
de témoins qu'elle le désire.
101. Chaque témoin subi l'interrogatoire de celui qui
l'a fait cité (examination-in-chief), puis de la partie adverse
(cross-examination) et éventuellement un second interrogatoire de celui
qui l'a fait citer (re-examination). Le tribunal appelle les témoins
l'un après l'autre de la salle des pas perdus où ils sont
généralement confinés par le président de la
juridiction (art. 373 CPP) pour éviter les corroborations des dires des
uns à ceux des autres.
Le Ministère public procède à
l'examination-in-chief de ses témoins ainsi qu'à leur «
ré-examination » au terme de la cross-examination. Si le tribunal
estime les éléments de preuve suffisamment réunis pour que
le prévenu ou l'accusé présente sa défense et lui
explique ses droits, il lui demande s'il a des témoins à faire
entendre ou d'autres éléments de preuve à
présenter. Le témoin à décharge ou le
prévenu lui-même est entendu conformément aux dispositions
de l'article 332. Le Ministère public procède chaque fois
à la cross-examination.
102. Après la clôture des débats, le
conseil de la partie civile intervient éventuellement, puis le
Ministère public et le conseil de la défense. Le tribunal statue.
Le Ministère public présente le casier judiciaire de
l'accusé ou du prévenu, le conseil de la partie civile prend
ensuite la parole. Après lui, le conseil de la défense est
appelé à plaider les circonstances atténuantes ; le
prévenu ou l'accusé fait sa dernière déclaration et
le tribunal rend son jugement.
L'on peut se rendre compte qu'ici les droits importants sont
reconnus à la défense qui se trouverait en quelque sorte dans une
position d'égalité avec l'accusation. Mais il y a lieu de dire
que cela n'est qu'une vue superficielle de la chose dans la mesure où la
défense ne dispose pas des mêmes capacités d'investigation
que le Ministère public. Celui-ci, aidé par la police judiciaire,
la force de maintien de l'ordre et éventuellement par la partie civile,
pourra
accéder facilement à certaines informations ou
éléments de preuve contrairement à la défense.
103. L'on pourrait améliorer davantage le sort de la
défense en prévoyant l'obligation pour la juridiction, en cas de
demande faite par la défense, d'ordonner les mesures d'instruction pour
permettre à cette dernière de faire face à
d'éventuelles obstructions dans sa démarche pour la
découverte des preuves. Ceci pourrait favoriser la manifestation de la
vérité et rendre la justice pénale moins judiciaire.
Par ailleurs, l'accès à l'aide judiciaire ou
assistance judiciaire devrait être facilité.
En tout état de cause, la décision du juge
marque la fin normale de l'instance, ce qui ne traduit pas la fin du
procès qui peut se poursuivre par l'exercice éventuel des recours
et l'exécution des décisions.
Section II : l'exercice des voies de recours et
l'exécution des décisions de justice répressive par le
Ministère public
Si le jugement marque la fin de l'instance, c'est en
général l'exécution de la décision rendue
(paragraphe 2) qui marque celle du procès puisque cette étape est
prise en compte tout comme celle de l'exercice des recours (paragraphe 1)
lorsqu'on apprécie la durée raisonnable du procès.
Paragraphe 1 : l'exercice des voies de recours
104. Les voies de recours sont généralement
classées en deux catégories : les voies de recours ordinaires (A)
et les voies de recours extraordinaires (B). Dans ces deux catégories,
l'intervention du Ministère public est relativement limitée.
A. Les voies de recours ordinaires
Constituent les vies de recours ordinaires l'opposition (I) et
l'appel (II) I. L'opposition
105. L'opposition est une voie de recours qui remet les
parties devant le même juge ; c'est une voie de rétractation. Elle
n'est ouverte qu'aux parties ayant fait défaut lors des audiences qui
ont donné lieu aux décisions contestées (jugement ou
arrêt). La présence du Ministère public étant
obligatoire lors des audiences sous peine de nullité, il ne lui est pas
reconnu le droit de faire opposition.
L'opposition est faite par déclaration au greffe de la
juridiction qui a rendu la décision, soit par télégramme
ou par lettre recommandée avec accusé de réception ou par
tout
autre moyen laissant trace écrite adressé au
greffier en chef dans les délais légaux135. Dès
la réception de la déclaration, le greffier en chef dresse un
procès-verbal dont copie est communiquée au Ministère
public et aux autres parties.
L'opposition a un effet suspensif et peut porter sur une
partie seulement de la décision.. L'opposant peut se limiter aux
dispositions civiles ou pénales. Lorsque les délais pour faire
opposition ont expiré, les parties ne disposent plus que de l'appel ou
du pourvoi en cassation.
II. L'appel
106. Contrairement à l'opposition l'appel est une voie
de recours qui transmet l'affaire à une autre juridiction, la Cour
d'Appel ; c'est une voie de reformation ouverte au Ministère public,
comme à toute autre partie. Le Ministère public peut même
le faire lorsque le tribunal a statué dans le sens de ses
réquisitions.
L' appel est formé à peine
d'irrecevabilité au greffe de la juridiction ayant rendu le jugement par
déclaration, lettre ordinaire ou recommandée avec accusé
de réception, ou par télégramme avec
récépissé, ou tout autre moyen laissant trace
écrite et ayant date certaine. Elle est adressée au greffier en
chef de cette juridiction. A l'exception des appels formés par lettres
ordinaires ou par déclaration, la date d'appel est celle de l'envoi, et
le timbre à date du bureau de poste en constitue le repère.
L'appel doit être interjeté dans les 48 heures
de la notification pour les jugements avant dire droit et la Cour d'Appel doit
statuer dans les sept jours à compter du lendemain du jour de la
réception du dossier d'appel. Après avoir statué, la
décision est notifiée aux parties et le dossier est
retourné au greffe du tribunal.
107. L'appel contre les jugements définitifs est
ouvert à toute personne ayant été partie au procès
et à toute personne ayant mis l'action publique en mouvement. L'appel
principal doit être interjeté dans les dix jours pour toutes les
parties y compris le Ministère public. Ceci à compter du
lendemain de la date du jugement contradictoire ou du lendemain du jour de
l'expiration du délai d'opposition. Le délai pour faire appel
incident est de 5 jours à compter du lendemain de la notification de
l'acte d'appel principal. La partie appelante doit produire à la suite
de la déclaration ou de sa lettre, un Mémoire contenant ses
moyens et conclusions. Le greffier en chef adresse immédiatement au
Procureur de la République ainsi qu'aux parties, copie du
procès-verbal ou de la déclaration d'appel par tout moyen
laissant trace écrite.
135 L'opposition se fait dans un délai de 10 à
compter du lendemain de la signification du jugement à personne lorsque
le condamné réside au Cameroun, à domicile, à
voisin, au lieu de travail, à mairie; de 3 mois à compter de la
signification faite à personne à l'étranger.
A l'expiration du délai de production du Mémoire
ci-dessus indiqué136, le greffier en chef met en état
le dossier de procédure qui comprend l'acte d'appel, la procuration
éventuellement, le procès-verbal d'appel, les
procès-verbaux d'enquête de police judiciaire, les actes de
procédure, les conclusions et Mémoires produits par les parties
devant le tribunal, Les notes d'audience, toutes les décisions avant
dire droit rendues par le tribunal et une copie du jugement. Ce dossier est
transmis au greffier en chef de la Cour d'Appel qui le transmet au
président de la cour qui, après avis du Procureur
Général près ladite cour, fixe la date d'audience. Il fait
communiquer au Procureur Général le dossier pour citation des
parties et des témoins. En cas d'urgence, et sauf réquisition
contraire du Procureur général, le président peut faire
réduire de deux cinquième, le délai de citation des
parties et des témoins137. Le Procureur Général
rétablit le dossier au greffe de la cour.
La procédure devant la Cour d'Appel est identique
à celle qui a lieu devant les tribunaux. L'appelant est entendu le
premier, le Ministère public en deuxième position et le
condamné, le dernier.
Si l'appel a été interjeté par le
Ministère public, il est entendu le premier, l'intimé ensuite et
le condamné, le dernier.
On remarque que l'intervention du Ministère public dans
les recours ordinaires est relative dans la mesure où il n'intervient
que pour les appels et ne peut pas faire opposition. C'est également le
cas dans les recours extraordinaires.
B. Les voies de recours extraordinaires
Les voies de recours extraordinaires sont le pourvoi en
cassation (I) et la révision
(II)
I. Le pourvoi en cassation
108. Le pourvoi en cassation est une
voie de recours ouverte contre toute décision en dernier ressort,
porté devant la cour suprême. Il peut être exercé par
toutes les parties. Le Procureur Général près la Cour
d'Appel peut le faire ainsi que le Procureur Général près
la cour de cassation. Dans ce cas, il acquiert la qualité de partie
principale.
Le pourvoi en cassation est ouvert pour les cas
d'incompétence, de dénaturation des
136 15 jours à compter du jour de l'enregistrement de
l'appel ou du lendemain du jour de la réception de la lettre du greffier
en chef, d'une copie du procès verbal ou de la déclaration
d'appel
137 Art. 52 CPP Le délai entre le jour où la
citation est délivrée et le jour fixé pour la comparution
est de 5 Jours. Au moins si la partie citée réside dans la ville
où a lieu son audition ou son interrogatoire. le délai est de 5
jour plus un délai de distance d'un jour pour 25 kilomètres
lorsque la personne citée réside hors de la ville ou de la
localité où a lieu l'audition ou interrogatoire. Ces
délais sont calculés sur la distance séparant la
résidence de la personne citée du lieu de l'audition ou de
l'interrogatoire.
faits de la cause ou des pièces de la procédure
; Il peut aussi intervenir pour défaut de contradiction ou pour
insuffisance de motifs. Le pourvoi en cassation est également possible
pour non-réponse aux conclusions des parties ou aux réquisitions
du Ministère public. Il est recevable en cas de vice de
forme138 le pourvoi est en outre ouvert pour excès de
pouvoir, violation de la loi, ou violation de la règle de
publicité d'audience. Le non-respect de la jurisprudence de la cour
suprême ayant statué en sections réunies d'une chambre ou
en chambres réunies139 peut également donner lieu
à pourvoi.
L'auteur du pourvoi saisit la cour suprême par
déclaration faite au greffe de la Cour d'Appel qui constitue un dossier
comprenant ladite déclaration, le procès-verbal de
réception, les conclusions et Mémoires produits par les parties
devant le tribunal et ou la Cour d'Appel, toutes les décisions avant
dire droit rendues par les précédentes juridictions et les copies
des jugements et de l'arrêt de la Cour d'Appel.
Le pourvoi doit être formé à peine
d'irrecevabilité dans le délai de 30 jours contre les
arrêts par défaut, à compter du lendemain du jour de
l'expiration du délai d'opposition. Ce délai est de 5 jours
à compter de la date de notification de l'arrêt de la chambre de
contrôle de l'instruction pour ses arrêts et de 10 jours à
compter du lendemain du prononcé de l'arrêt contradictoire.
109. Le pourvoi en cassation n'a pas d'effet suspensif. La
suspension de l'exécution est possible sur demande de sursis à
exécution introduite après le pourvoi ou concomitamment en
matière civile. Le rejet de cette demande peut donner lieu à
pourvoi d'ordre formé par le Procureur Général près
la cour suprême sans aucune exigence de délai.
En dehors du pourvoi, il existe aussi la révision
comme voie de recours extraordinaire.
II. La revision
110. La révision est une voie de recours qui n'est pas
ouverte au Ministère public. Seuls peuvent demander la révision
le Ministre de la justice, le condamné ou son représentant
légal, toute personne ayant intérêt à agir à
cette fin, en cas de décès ou d'absence juridiquement
constatée d'un condamné. Sans aucune condition de
délai, la révision a lieu dans les cas
oüaprès une condamnation, des éléments de
preuve de l'innocence du condamné sont trouvés. Il
peu s'agir
par exemple, d'une condamnation pour meurtre dont le prétendu mort est
retrouvé
138 Lorsque la décision attaquée n'a pas
été rendue par le nombre de juges prescrit ou a été
rendu par les juges qui n'ont pas siégé à toutes les
audiences, l'indivisibilité n'étant pas propres aux magistrats du
siège. Lorsque le Ministère public n'a pas été
représenté ou lorsque la parole ne lui a pas été
donnée et lorsqu'il y a eu violation de la règle de la
publicité des audiences
139 Les chambres réunies remplacent l'assemblée
plénière depuis la reforme de l'organisation judiciaire
opérée par la loi due décembre 2006.
vivant.
La chambre judiciaire de la cour suprême siégeant
en sections réunies, peut déclarer la demande recevable ou non.
Si elle reçoit la demande, elle peut rendre un arrêt
d'acquittement140 ou de relaxe lorsqu'elle estime la demande
fondée ; l'arrêt de rejet peut intervenir dans le cas
contraire.
Ici encore on constate que le Ministère public est
recevable pour les pourvois et ne peut pas exercer une demande en
révision. Par ailleurs, les droits des justiciables sont garantis
à travers le double degré de juridiction, accru par la
reconnaissance à leur profit d'une possibilité de rectifier les
erreurs judiciaires qui auraient été à l'origine de leur
condamnation.
111. Mais on peut tout simplement déplorer le fait que
le pourvoi dans l'intérêt de la loi, lorsqu'il est formé
sur initiative personnelle du Procureur Général près la
cour suprême, ne puisse pas profiter aux parties. Il aurait
été plus judicieux de faire produire les effets des
différentes voies de recours à toutes les parties. Car justice ne
signifie pas seulement application de la loi mais aussi, respect des droits de
l'Homme.
Lorsque les voies de recours ne peuvent plus être
exercées ou lorsqu'elles sont épuisées la décision
acquière force de chose jugée et peut légitimement
être exécutée.
Paragraphe II : le Ministère public,
autorité d'exécution des décisions de justice
répressive
112. L'efficacité d'une bonne justice ne dépend
pas uniquement de la qualité des décisions rendues, mais aussi de
l'effectivité et la rapidité de leur exécution. Le code de
procédure pénale de 2005 a confié au Ministère
public, en dehors de l'exécution immédiate des ordres et
décisions judiciaires d'arrestation, de détention, de mise en
liberté, celle des décisions de justice devenues
irrévocables. En leur qualité de parties au procès, le
Ministère public ou les parties civiles poursuivent chacun en ce qui le
concerne cette exécution141. Le Ministère public
procède donc à l'exécution des peines privatives de
liberté (A) et des condamnations pécuniaires (B).
A. L'exécution des peines privatives de
liberté
En tant que représentant de la société,
le Ministère public veille à l'exécution effective des
peines privatives de liberté. Il peut à cet effet se
présenter comme le garant de la paix et la sécurité
publiques (I) ce qui entraîne certaines conséquences (II).
I. Le Ministère public, garant de la paix et de
la sécurité publiques
140 On parle d'acquittement en cas de crime et de relaxe
lorsqu'il s'agit des délits.
141 Voir article 545 (3) du code de procédure
pénale
113. L'exécution des peines privatives de
liberté est assurée par le Procureur de la République ou
le Procureur Général qui disposent du droit de requérir
directement la force publique. Concrètement, après le
prononcé de toute décision, le président de la juridiction
doit s'assurer de son exécution. Pour ce faire, il communiquera la
décision au greffe de la juridiction. Le greffier portera la
décision dans le registre ouvert à cet effet auprès de
chaque greffe. Une copie de la décision sera remise au Ministère
public ainsi qu'aux autres parties. Le Ministère public veillera donc
à l'exécution des condamnations.
Selon l'école de la défense sociale
positiviste, la société doit être protégée
contre le délinquant. La peine va se présenter ainsi comme une
mesure d'intimidation, d'élimination des menaces à la paix et
à la sécurité publiques. La peine privative de
liberté doit conduire à l'incarcération du condamné
de façon immédiate. Et c'est au Ministère public que
revient la charge de rendre cette exécution effective. Il saisira
à cet effet les agents de la police ou de la gendarmerie ou encore ceux
de l'administration pénitentiaire aux fins de conduire le
condamné à la prison, lieu où il purgera sa peine. Il
s'ensuit que le Ministère public n'a pas à ce niveau un pouvoir
pour apprécier l'exécution de la peine ; des conséquences
en résultent.
II. L'appréciation critique de l'exécution
des peines privatives de liberté
114. L'absence d'un pouvoir d'appréciation de
l'exécution de la peine privative de liberté chez le
Ministère public a pour conséquence que toutes décisions
prévoyant un emprisonnement doivent être exécutées
dans les locaux de la prison. Le Ministère public ne peut donc pas comme
c'est le cas en France, communiquer certains dossiers au juge de l'application
des peines, celui-ci étant inexistant dans la structure judiciaire
camerounaise. Ceci pourrait justifier les surcharges constatées dans nos
différentes prisons142.
115. L'autre conséquence serait que la
personnalisation de l'exécution de la peine ne peut être
envisagée qu'avant son prononcé. Ce qui n'est pas rassurant dans
la mesure où le juge ne dispose pas de temps suffisant pour
apprécier la personnalité du délinquant ou son
comportement. Or cela peut être facilement effectué par le juge de
l'application des peines après le prononcé de la
décision.
Si dans le schéma classique du fonctionnement des
institutions, la loi fixe la peine, le juge la prononce et l'administration
l'exécute, ce schéma peut s'avérer aujourd'hui
obsolète puisque la fonction du juge s'étend davantage au
contrôle de l'exécution des décisions de justice rendues.
En fait, le sort du condamné ne devrait plus être laissé
à l'administration
142 Voir les effectifs des prisons centrales de YAOUNDE et
DOUALA par exemple où les condamnés à des petites peines
cohabitent avec les grands criminels. Ce qui a généralement pour
conséquence de les rendre plus délinquants et récidivistes
à leur sortie. La fonction de protection de la peine se trouvant ainsi
remise en cause.
pénitentiaire car la peine n'est plus immuable ; elle
peut être aménagée en considération du comportement
du condamné. La défense sociale devrait également tenir
compte de la réinsertion sociale du condamné143. La
peine ne remplit plus seulement une fonction de rétribution,
d'élimination temporaire, ou de dissuasion, elle a aussi une fonction
d'amendement et de réinsertion sociale. Ce qui constitue des garanties
d'humanisation, de prévention de la récidive et de meilleure
efficacité de la justice pénale. L'institution d'un juge de
l'application des peines en droit camerounais s'avère ainsi comme une
nécessité imparable144 malgré l'insuffisance
d'infrastructures appropriées pour la personnalisation de
l'exécution des peines.
116. Le juge de l'application des peines a un double
rôle : contrôler dans un premier temps les conditions
générales de l'exécution des peines probatoires
d'emprisonnement et décider de leur personnalisation éventuelle
lorsque les peines relèvent de sa compétence145, dans
un second temps. Il n'est pas compétent pour connaître des
incidents d'exécution.
L'institution d'un juge de l'application des peines
constituerait un complément à la garantie de l'efficacité
de la justice répressive par le Ministère public, garantie qui
s'étend également à l'exécution des condamnations
pécuniaires
B. L'exécution des condamnations
pécuniaires.
117. En disposant que « Le Ministère public
et les parties poursuivent, chacun en ce qui le concerne, l'exécution
des décisions devenues irrévocables », l'article 545
paragraphes 3 du code de procédure pénale voudrait dire que le
Ministère public n'a pas pour mission de veiller au recouvrement des
dommages et intérêts pour la partie civile. Il a pour mission
essentielle, en dehors de l'exécution des peines privatives de
liberté, de garantir les intérêts de l'Etat. A cet effet,
il veille au recouvrement immédiat des amendes et autres frais de
justice (I) et peut également procéder à leur recouvrement
forcé (II).
I. Le rôle du Ministère public dans le
recouvrement des amendes
118. Sous le vocable « amendes », on peut regrouper
les amendes ordinaires, les amendes forfaitaires et les frais de justice. Le
Ministère public veille au recouvrement des amendes ordinaires et frais
de justice ainsi qu'au recouvrement des amendes forfaitaires.
Les amendes et frais de justice sont payés au greffier en
chef de la juridiction qui a
143 il s'agit précisément des idées de la
défense sociale Nouvelle de marc Ancel.
144 Une étude menée par BOUVIER (O-L) a
révélé que les juges de l'application des peines a
été institué en Colombie, en Côte d'Ivoire depuis
1969, au Burkina Faso depuis 1988, à Madagascar, au Brésil, en
Jordanie, au Bénin, au Niger, au Togo ; en Afrique du Sud la reforme
pénitentiaire implique les juges dans le contrôle de
l'exécution des peines...
145 Il peut ainsi substituer à une peine d'emprisonnement,
l'exécution d'un travail intérêt général ou
une mesure de semi-liberté...
rendu la décision. Le greffier en chef délivre
préalablement une copie de la décision contenant le
décompte des amendes et frais de justice au condamné. Si celui-ci
peut s'acquitter de ces frais immédiatement, il le fait et le greffier
en chef lui délivre une quittance de paiement sans frais, extraite d'un
carnet à souches. Une copie du paiement est également transmise
au Ministère public par le greffier en chef ainsi que l'extrait de la
décision devenue irrévocable.
119. Le recouvrement des amendes forfaitaires146 est
effectué par les officiers de police judiciaire147 agissant
comme agent verbalisateur sous le contrôle du Ministère public.
L'agent verbalisateur doit être muni d'un carnet
à souches spécial côté et paraphé par le
parquet compétent. Le paiement148d'une amende forfaitaire est
facultatif149 et donne lieu à la délivrance
sur-le-champ d'un reçu du carnet à souches et à
l'établissement d'un procèsverbal qui sera communiqué au
Ministère public. Le taux de l'amende forfaitaire est fixé,
suivant la classe de la contravention150. Les sommes perçues
au titre des amendes forfaitaires sont versées sans délai au
trésor public. Le trésorier ou tout autre responsable
habilité des services du trésor dresse un état des
versements dont une copie signée par lui est adressée au
Procureur de la République compétent. Celui-ci exercera son
contrôle sur la légalité de l'amende perçue. Si le
Procureur de la République constate que le montant de l'amende
forfaitaire perçue est supérieur151 ou
inférieur152 au taux légal, il rétablira la
situation par ordonnance notifiée au contrevenant (art 619 CPP).
Le paiement de l'amende forfaitaire éteint l'action
publique. Alors que le refus de payer peut donner lieu à l'ouverture des
poursuites.
120. En tout état de cause la non exécution d'une
condamnation pécuniaire peut donner lieu à une mesure
d'exécution forcée.
II. L'exécution forcée des condamnations
pécuniaires
146 L'amende forfaitaire est une peine pécuniaire
applicable aux contraventions et dont le montant est fixé d'avance par
la loi. Elle n'est pas perçue lorsque la contravention a causé un
dommage corporel ou matériel ; est connexe à un délit ou
à un crime ; se rapporte à la gérance ou à
l'exploitation d'un débit de boissons ; lorsqu'une disposition
légale impose à l'agent verbalisateur de prendre une mesure
administrative notamment la mise en fourrière du véhicule ou le
retrait du permis de conduire ou de toute autre pièce ; si le
contrevenant est en état d'ivresse dans un lieu public.
147 Les agents de police judiciaire et les agents publics
investis les attributions de police judiciaire ne peuvent percevoir lesdites
amendes que s'ils y sont régulièrement habilités.
148 Avant de procéder à la perception de l'amende,
l'agent forfaitaire doit prouver sa qualité au contrevenant en
produisant sa carte professionnelle
149 . Toute mesure vexatoire ou d'intimidation à
l'égard du contrevenant qui refuse de payer est passible des sanctions
prévues à l'article 140 CP (art 614 CPP)
150 1000 F pour la première classe; 2400 F pour la
deuxième classe ; 3600 F pour la troisième classe ; 25000F pour
la quatrième classe
151 La restitution sera nécessairement effectuée,
sur présentation de l'ordonnance du Procureur de la République ou
du jugement, par le trésor public.
152 Ce cas constitue une contravention de quatrième classe
engageant la responsabilité de l'agent verbalisateur.
A côté des mesures d'exécution
forcée153 prévues dans l'Acte Uniforme OHADA sur les
procédures simplifiées et voies d'exécution, le code de
procédure pénale a prévu la contrainte par corps. Celle-ci
vise à obliger le condamné à exécuter les
condamnations pécuniaires ou à effectuer les restitutions
ordonnées par une juridiction répressive.
121. Consistant en une incarcération, la contrainte
par corps est exécutée à la diligence du Ministère
public tant au profit de l'Etat que dans l'intérêt de la partie
civile154. Elle ne peut pas être exercée contre les
personnes âgées de moins de dix-huit ans ou de plus de soixante
ans au moment de son exécution, ni contre les femmes enceintes. Elle ne
peut non plus être prononcée contre les civilement responsables ou
l'assureur de responsabilité. Son exécution ne peut pas se faire
simultanément avec celle d'une peine privative de liberté ; elle
intervient après l'exécution de celle-ci et s'éteint avec
la prescription de la peine qui l'a fait naître. Son exécution
peut être suspendue en cas de proposition d'une caution acceptée.
L'exécution de la contrainte par corps n'éteint pas la dette.
CONCLUSION DU CHAPITRE II
122. Au terme de ce chapitre où il a été
question de l'exercice de l'action publique et de l'exécution des
décisions de justice par le Ministère public, le constat qui peut
être fait est que, le ministère public pèse d'un poids
important sur la décision de mise en mouvement de l'action publique
malgré la reconnaissance par le législateur à la partie
civile et à certaines administrations du droit de déclencher les
poursuites.
Le législateur de 2005, dans le souci de garantir la
présomption d'innocence et l'égalité entre les parties, a
rendu le Ministère public plus actif. Il a ainsi accentué le
caractère accusatoire du procès pénal lors des audiences
par la redistribution des rôles dans la production et la discussion des
preuves, et les interrogatoires croisés des témoins.
Désormais le parquet, comme toutes les autres parties, ne siégera
plus à l'extrade il ne pourra produire le casier judiciaire du
prévenu ou du suspect qu'à la fin des débats.
Par ailleurs, pour garantir l'intérêt public, la
présence du Ministère public est obligatoire lors des audiences
et l'effectivité de cette présence est assurée par la
réaffirmation du principe de l'indivisibilité du parquet.
Relativement à l'exécution, on se rend compte que
le législateur met un accent
153 Il s'agit notamment de la saisie vente des biens du
condamné, de la saisie attribution...
154 La durée de la contrainte par corps diffère
selon qu'il s'agit des intérêts publics ou privés (art 564
CPP). Lorsqu'il s'agit des intérêts privés la requête
la contrainte par corps est effectuée à la suite d'une
requête de l'intéressé ; alors que le mandat
d'incarcération est immédiatement établi au
prononcé de la décision et transmis au Ministère public
pour exécution (art 558).
particulier sur les objectifs de protection de la
société et de recouvrement rapide et effectif des biens
pécuniaires de l'Etat au point où toute peine prononcée
pourra aboutir à l'incarcération de celui contre qui elle
l'est.
123. Si ces objectifs peuvent
être atteints, il faut souligner que leur conciliation avec le respect
des droits et libertés individuelles n'est pas garantie. Car le
législateur camerounais a manifesté, dans le CPP une
indifférence à l'égard des idées de la
défense sociale nouvelle. Indifférence caractérisée
par l'absence d'un juge de l'application des peines et l'utilisation de
l'incarcération comme solution à tous les problèmes.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
124. le Ministère public se présente comme le
« nerf central » du procès pénal. C'est lui qui
constate les infractions à la loi pénale et en recherche les
auteurs pour les soumettre ou non à la justice des juges. Il donne
à ce procès toute son impulsion par le déclenchement des
poursuites et l'exercice de l'action publique aux étapes de
l'information judiciaire et de jugement, le régularise par l'exercice
des voies de recours et son concours à l'exécution des
décisions pécuniaires et privatives de liberté.
125. Pour atteindre ses objectifs, le législateur de
2005, en harmonisant la procédure pénale, a maintenu le
Ministère public et a jeté son dévolu sur ses
attributions.
Afin de se conformer aux exigences de sauvegarde des droits
et liberté du citoyen, le législateur a réglementé
la phase policière du procès pénal. Il a ainsi
officialisé l'enquête préliminaire et a reconnu au suspect
un certain nombre de droits lors de la garde à vue. Le Ministère
public s'est vu doté de la qualité de gardien de ces droits par
l'impulsion et le contrôle qu'il assure à cette phase.
Dans l'optique de garantir le droit à une justice
équitable, le législateur a dessaisi le Procureur de la
République de la qualité de magistrat instructeur, renouant ainsi
avec le principe de la séparation des fonctions de poursuites et
d'instruction mise en veilleuse depuis la réforme de 1972. IL a
renforcé le caractère accusatoire du procès pour assurer
l'égalité entre les parties, rendant ainsi le Ministère
public plus actif. C'est également à travers le Ministère
public, que passent l'exécution rapide des décisions de justice
répressive et le recouvrement effectif des amendes et autres frais de
justice.
126. Cependant l'atteinte de ces objectifs n'est pas
absolument garantie. Des pesanteurs existent qui pourraient compromettre la
finalité principale du procès pénal qu'est la conciliation
de la protection des droits de l'Homme et celle de l'ordre public ou de
l'intérêt général.
Tout d'abord, la garantie au contrôle de la garde
à vue n'est pas assurée. Aucun régime n'est prévu
à cet effet et les moyens du parquet ne le prédisposent pas
à l'accomplissement d'une tache qui lui est facultative.
Ensuite, le Ministère public, loin d'être
simplement le titulaire de l'exercice de l'action publique, se présente
davantage comme le maître des poursuites. Il dispose de
l'opportunité de les déclencher, et peut les arrêter
à tout stade de la procédure. Ce qui remet en cause le principe
de la séparation des fonctions de justice répressive, garantie
fondamentale du procès équitable. L'article 64 du CPP devrait
à cet effet être revisitée par le législateur
Enfin, si la rapidité de l'exécution des
décisions de justice et le recouvrement
immédiat et effectif des condamnations
pécuniaires assurent la protection de l'ordre public et de
l'intérêt de l'Etat, il faut déplorer le fait que le
législateur ait fait table rase du souci de réinsertion sociale
des délinquants, tout comme il a privilégié les
intérêts pécuniaires au détriment des
libertés individuelles. La contrainte par corps à notre avis est
une mesure anachronique puisque des solutions alternatives existent, telles que
les mesures d'exécution forcées prévues par l'Acte
Uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et voies
d'exécution entrée en vigueur depuis le 10 juillet 1998 pour
assurer le recouvrement des condamnations pécuniaires.
127. La « justice » dans
le procès pénal dépend donc en grande partie de ce qu'est
le Ministère public : Trop puissant, celle-ci en pâtirait ; trop
faible, l'ordre public et la paix sociale seraient perpétuellement
menacés. Il convient à cet effet de le doter de pouvoirs moyens,
mais suffisants pour l'accomplissement effectif et efficace de sa mission,
mission qui s'étend à d'autres types de procès tels que le
procès civil.
128. Dans les procès civils, le contentieux oppose
généralement les particuliers et porte sur les
intérêts privés. Le Ministère public y joue a priori
un rôle effacé. Il ne donne en principe que son avis à la
juridiction relativement à l'application de la loi. Il est donc partie
jointe et intervient par voie de réquisition orale ou écrite dans
un procès déjà engagé par les particuliers.
Mais il peut aussi y être partie principale comme en
matière pénale. La loi prévoit en principe les cas
où cela est possible de façon expresse. Dans de tels cas, il est
demandeur ou défendeur et les règles ordinaires de la
procédure lui sont applicables, mais avec quelques
modérations155.
Etant le représentant de la société
auprès des juridictions, et chargé de veiller au respect de la
loi et de l'ordre public, on se demande alors si le Ministère public
peut être partie principale dans les cas non spécifiés par
la loi sur le fondement de cette mission. Autrement dit, le Ministère
public dispose-t-il d'un droit général d'action pour la
défense de l'ordre public ou de la loi ? Cette interrogation ne manque
pas d'intérêt en droit camerounais. Sur le plan de la
théorie du droit, la sécurité des biens, des personnes et
des affaires ne peut être assurée juridiquement que par la
clarté et la précision des textes. Ce qui ne semble pas
être le cas au Cameroun au regard des règles applicables en
matière de procédure civile et commerciale156. Par
ailleurs, le rôle du Ministère public est en général
mal connu en matière de procédure civile d'où
l'intérêt didactique qu'on peut tirer de cette partie.
129. Pour répondre à cette
préoccupation, il convient de dire que si le Ministère public
peut intervenir comme partie jointe dans toutes les affaires après avoir
reçu communication des dossiers de procédure (chapitre 1), son
droit d'action d'office demeure encore exceptionnel au Cameroun (chapitre 2)
155 Il n'est pas tenu d'avoir recours à un avocat ; il
n'est pas tenu de déposer les conclusions écrites avant de
prendre la parole ; il n'est jamais condamné aux dépens ;
agissant dans l'intérêt de l'ordre public, il peut interjeter
appel même lorsque le jugement rendu est conforme à ses
conclusions (CA Toulouse, 31 mars 1947, S. 1947. 2. 109).
156 La procédure civile camerounaise est encore
régie par le vieux code de procédure civile et commerciale
hérité de la France à travers son passage sur le
territoire national en tant que puissance mandataire de la SDN et tutrice du
Cameroun avec l'onction de l'ONU.
CHAPITRE I : LE REGIME DES COMMUNICATIONS AU
MINISTERE PUBLIC, PARTIE JOINTE
130. Lorsque le procès est déjà
engagé par les particuliers, le Ministère public intervient comme
partie jointe. Malgré cette dénomination, il n'a pas
véritablement la qualité de partie au procès. A cet effet
il peut être récusé comme le serait un juge ; il ne peut en
principe exercer aucun recours157 et le trésor public ne peut
aucunement être tenu de supporter les frais de procédure qui
restent entièrement à la charge des parties.
Selon les cas, l'intervention du Ministère public peut
s'avérer nécessaire ou facultative d'où les
différents types de communication prévus pour favoriser son
information (section 1). Cette communication se fait suivant une
procédure bien déterminée et son ineffectivité
donne lieu à sanction (section 2).
Section I : L'information du Ministère public :
les types de communication
Comme nous venons de le dire, l'intervention du
Ministère public peut être obligatoire ou facultative selon les
cas. Elle est obligatoire lorsque la loi l'a prévue expressément
; la communication revêt alors un caractère impératif
(paragraphe 1). Dans le cas contraire, la communication est faite, soit
à la demande du Ministère public, soit sur initiative personnelle
du juge ; elle est dans ces cas facultative ou judiciaire (paragraphe 2), ce
qui ressort clairement des dispositions de l'article 36158 du
CPCC.
Paragraphe I : La communication impérative ou
légale 159
131. La communication légale oblige le
Ministère public à intervenir pour présenter ses
observations dans certaines matières (B) ou devant certaines
juridictions (A). C'est dans ces cas qu'on dit souvent que l'affaire est
communicable au Ministère public.
157 Mais il exerce généralement l'appel dans
certains cas.
158 Art. 36 CPCC : « seront communiquées au
Ministère public les causes suivantes : 1) celles qui concernent l'ordre
public, l'Etat, le territoire, les domaines, les communes, les
établissements publics, les dons et legs au profit des pauvres ; 2)
celles qui concernent l'état des personnes et les tutelles ; 3) les
déclinatoires sur incompétences ; 4) les règlements des
juges, les récusations et renvois pour parenté et alliance ; 5)
les prises à partie ; 6) les causes des femmes non autorisées par
leurs maris, ou même autorisées, lorsqu'il s'agit de leur dot, et
qu'elles sont mariées sous le régime dotal ; les causes des
mineurs, et généralement toutes celles oh l'une des parties est
défendue par un curateur ; 7) les causes concernant ou
intéressant les personnes présumées absentes. Le Procureur
de la République pourra néanmoins prendre communication de toutes
les autres causes dans lesquelles il croira son Ministère
nécessaire ; le tribunal ou le juge de paix à compétence
étendue pourront même l'ordonner d'office ».
159 Elle est d'ordre public et a lieu d'office cf. cassation
1ère civ. 14 déc. 1983, bull civ. I, n°297 ;
cass. Ch. Mixte 21 juillet 1978, Gaz. Pal. 1978.2.579, note J. VIATTE... la
liste de s matières communicables est limitative.
A. La communication légale devant la Cour
Suprême
132. La cour Suprême n'est pas
un troisième degré de juridiction160 ; elle ne
connaît pas des faits mais seulement du droit. C'est dire que la Cour
Suprême ne peut être saisie que pour des questions qui portent sur
l'application de la loi, qu'elle soit de fond ou de procédure. Elle joue
à cet effet le rôle d'une juridiction d'unification et
d'harmonisation de la jurisprudence. Elle peut être saisie dans les
délais légaux161 par les parties au procès et
exceptionnellement162 par le Ministère public qui n'a en
général devant elle que le rôle de partie jointe, tenue de
donner son avis sur toutes les affaires qui y parviennent.
Concrètement, les pourvois sont formés, soit par
requête, soit par lettre ou par déclaration au greffe de la
juridiction qui a rendu la décision en dernier ressort, par le demandeur
en personne, par son avocat ou par un mandataire muni d'un pouvoir
spécial163. Le greffier qui reçoit la
déclaration dresse un PV dont la première expédition est
adressée au greffier en chef de la Cour Suprême, et une seconde au
greffier en chef de la Cour d'Appel ou de la juridiction dont la
décision est attaquée. Dans la quinzaine de la réception
du pourvoi, le greffier de la juridiction dont émane la décision
attaquée dénonce le pourvoi au demandeur ou à son
domicile, par lettre recommandée avec accusé de réception
ou par exploit d'huissier. Dans un délai maximum de 60 jours à
compter de la déclaration, il met le dossier en état et le
transmet au greffier en chef de la Cour Suprême. Après certaines
vérifications, le greffier en chef de la Cour Suprême avise
l'avocat choisi ou désigné, du dépôt du dossier
à son greffe et du temps à lui imparti pour déposer le
Mémoire ampliatif articulant et développant les moyens de droit
qu'il invoque au soutient de son pourvoi. Ce Mémoire doit être
fourni en autant d'exemplaires qu'il y a de défendeurs plus deux. Le
greffier en chef assure la notification du Mémoire au défendeur
qui dispose de 30 jours pour déposer un Mémoire en réponse
en autant d'exemplaires qu'il y a de demandeurs plus deux. Notification de ce
Mémoire est également faite au demandeur par le greffier en chef.
Si le demandeur estime nécessaire, il lui est permis d'adresser un
Mémoire en réplique.
160 Même comme depuis la Loi de décembre 2006
elle peut évoquer et statuer au fond lorsque l'affaire est en
état d'être jugée car cela ne lui confère pas pour
autant la qualité d'une juridiction de fond.
161 En matière civile, commerciale et sociale le
délai de saisine de la Cour suprême est de 30 jours à
compter de la signification. En matière pénale les délais
sont de 10 jours pour les arrêts rendus au fond, 07 jours pour les
arrêts avant dire droit à compter du lendemain d jour du
prononcé de la décision contradictoire, de 30 jours contre les
arrêts par défaut et court à compter du lendemain du jour
de l'expiration du délai d'opposition, et enfin de 05 jours contre les
arrêts de la chambre de contrôle de l'instruction à compter
de la date de notification de l'arrêt au Ministère public , aux
parties ou à leurs conseils.
162 Le Procureur Général près la Cour
suprême peut par exemple saisir la Cour suprême dans le cadre du
pourvoi dans l'intérêt de la loi dont les effets ne profitent
d'ailleurs pas aux parties
163 En cas d'absence de pouvoir spécial, le pourvoi
reste valable si la personne concernée a fait des actes de
régularisation dudit pourvoi personnellement. Ces actes peuvent
être soit la constitution d'un avocat, soit l'introduction d'une demande
d'assistance judiciaire.
Lorsque l'affaire est en état, le greffier en chef
transmet au président le dossier pour désignation d'un
rapporteur. Le président ou le conseiller rapporteur rétablit le
dossier au greffe dans un délai maximum de 30 jours sans y joindre son
rapport. Le rapport du rapporteur est transmis sous pli confidentiel au
président de la Cour Suprême qui en communique sous pli
confidentiel, une copie au Procureur Général près ladite
Cour. Le dossier rétabli au greffe est transmis, en même temps que
les copies des différents Mémoires, sans délai au
Procureur Général près la Cour suprême. On peut
noter à ce niveau la différence avec la procédure devant
la Cour d'Appel en matière civile164 où le Procureur
général, lorsqu'il veut prendre des conclusions dans une affaire
importante, assiste aux débats, écoute les plaidoiries et demande
à la Cour communication du dossier pour préparer ses
conclusions165. Ce qui fait que le parquet intervient avant le
conseiller. C'est donc le contraire devant la Cour Suprême. Après
réception du dossier, le Procureur Général près la
Cour Suprême, comme le conseiller rapporteur ou le président,
propose dans ses conclusions une solution précise au litige. Il peut
d'office soulever des moyens. Il dispose d'un délai de 30 jours pour
adresser au président ses conclusions sur pli confidentiel. Le
président en fait communication aux membres de la Cour et
rétablit le dossier au greffe en même temps qu'il formule ses
propositions pour l'inscription de l'affaire au rôle. Dès que le
Procureur Général retourne le dossier au greffe, celui-ci le
soumet au président pour fixation de la date d'audience. Cette date est
notifiée au Procureur Général et aux membres de la Cour ;
les parties en sont informées par affichage du rôle.
133. A l'audience, le conseiller-
rapporteur lit son rapport, les conseils des parties et le Procureur
Général développent leurs arguments à l'appui de
leurs Mémoires et conclusions respectivement. Lorsque les solutions
proposées par le conseiller et le Procureur Général sont
divergentes, l'affaire est mise en délibéré pour permettre
aux membres de la Cour de prendre connaissance des pièces de la
procédure.
Le Ministère public joue donc un rôle important
devant la cour Suprême et intervient dans toutes les affaires pour
proposer une solution à celles-ci, solution si nécessaire, bien
rédigée afin de corroborer les écrits aux propositions.
Comme le pense un auteur, «il ne suffit pas de concevoir une
idée, il faut la rédiger. Si la plume se refuse à traduire
cette idée, c'est généralement que celle-ci est mauvaise
»166.
Le Ministère public n'a pas communication seulement
devant la Cour suprême ; il lui est communiqué obligatoirement
d'autres affaires devant d'autres juridictions pour des intérêts
complémentaires à la défense de la loi.
164 L'autre différence est qu'en matière civile,
le rôle du Ministère public est assez discret devant la Cour
d'Appel
puisque l'avocat général n'intervient presque jamais
à la chambre civile sinon officieusement dans le
délibéré.
165 Voir Mémoire de fin de maîtrise en Droit
privé d'ELOUNDOU ELOUNDOU (A) p. 12.
166 ELOUNDOU ELOUNDOU (A) op. cit. p 12.
B. La communication dans l'intérêt de la
justice et des particuliers
134. Le Ministère public intervient
nécessairement dans certaines matières pour la protection des
intérêts de l'Etat (I), la protection de certaines personnes (I)
et dans l'intérêt de la justice (III) ; ces matières sont
prévues par le code de procédure civile et commerciale et par
bien d'autres textes dans lesquels il est dit << qu'il doit faire
connaître son avis » ou qu'il sera statué << le
Ministère public entendu » ou << après
réquisitions du Ministère public »...
I. La communication dans le but de la protection des
intérêts étatiques
Tout ce qui touche à l'état civil (a) et
à la nationalité (b) est extrêmement sensible et suivi de
très près par le Ministère public. Il en est de même
des causes qui concernent l'ordre public, le territoire, les domaines, les
communes les établissements publics, les dons et legs au profit des
pauvres167.
a. Les questions relatives à l'état
civil
135. L'état civil étant par essence le moyen
utilisé par l'Etat pour individualiser les citoyens, il faut s'assurer
de sa fiabilité et de sa stabilité. C'est la raison pour laquelle
cet état doit être attribué avec certitude et
modifié uniquement en cas de nécessité extrême.
L'état civil d'une personne se définit par son nom, son ou ses
prénoms, sa date et son lieu de naissance, son sexe, sa filiation,
éléments auxquels s'ajoutent son mariage et son
décès. Lorsque ces différents éléments sont
portés devant une juridiction, il en est fait communication au
Ministère public.
Relativement à l'état civil en
général, le Ministère public contrôle les registres
d'état civil chaque année. En effet, les registres sont clos et
arrêtés par l'officier et le secrétaire d'état civil
compétents chaque 31 Décembre et transmis dans les 15 jours au
Procureur de la République du ressort pour visa et oblitération
des feuilles non utilisées168. Si ce rôle relève
de ses attributions administratives, son intervention dans la procédure
d'établissement de la filiation, relève quant à elle de
ses attributions judiciaires. Le Ministère public intervient en effet
dans la procédure d'établissement des actes de naissance,
lorsqu'à l'expiration des délais légaux169, la
naissance de l'enfant n'a pas fait l'objet de déclaration.
Concrètement, le Ministère public, en la personne du Procureur de
la République, saisi dans les trois mois de la
167 Cf. art. 36 CPCC.
168 Art. 18, paragraphe 2 de l'Ordonnance du 29 juin 1981.
169 La naissance doit être déclarée dans
les 30 jours suivant l'accouchement à l'officier d'état civil du
lieu de naissance. Si l'accouchement a lieu dans un établissement
hospitalier,le chef de l'établissement ou à défaut le
médecin, ou toute personne qui a assisté la femme dispose de 15
jours pour effectuer la déclaration. En cas de défaillance des
personnes ci-dessus visées, les parents peuvent le faire dans les 15
jours suivants.
naissance de l'enfant, va requérir après
certaines vérifications, l'enregistrement de la déclaration. Si
dans ce délai le Procureur de la République n'est pas saisi, la
filiation de l'enfant ne pourra être établie par l'officier
d'état civil, qu'après un jugement rendu par le tribunal, qui
devra préalablement à sa décision, communiquer la
requête du demandeur au Procureur de la République aux fins
d'enquête. En cas de demande de rectification ou de reconstitution d'un
acte d'état civil, il est également fait communication au
Ministère public de la requête aux mêmes fins par la
juridiction saisie.
136. Le Ministère public intervient aussi dans les
procédures d'établissement d'actes de mariage170 et de
décès. Il a un important rôle à jouer dans les
questions de nationalité.
b. Les affaires relatives à la
nationalité
Les questions de nationalité relèvent en
règle générale de la compétence des
autorités du pouvoir exécutif qui octroient ou refusent la
nationalité par Décret. Mais lorsqu'il s'agit du contentieux de
la nationalité, c'est-à-dire quand se pose une contestation sur
la nationalité reconnue ou à reconnaître à un
individu, les juridictions civiles sont exclusivement
compétentes171. L'article 41 de la loi de 1968 sur la
nationalité qui le prévoit, dispose en son paragraphe 4 que
« le Ministère public doit toujours être mis en cause et
a seul qualité pour agir ou défendre au nom de l'Etat
». Il en résulte que le Ministère public doit recevoir
communication des affaires relatives à la nationalité en cas de
contentieux.
137. En dehors de la communication obligatoire pour la
défense des intérêts de l'Etat, le Ministère public
intervient obligatoirement pour la défense des faibles.
II. La communication pour la défense des
faibles
Dans un but de protection des faibles, le Ministère
public a communication des affaires relatives à la tutelle, aux causes
des incapables, à la puissance paternelle (a) et aux causes
intéressant les personnes présumées absentes (b).
a. Les causes relatives à la tutelle, aux
incapables et à la puissance paternelle172
S'il est reconnu au Cameroun que le père est, du vivant
des époux, administrateur légal des biens de leurs enfants
mineurs et la mère, en cas de déchéance du mari, les
problèmes
170 Il peut notamment en cas d'empêchement grave
requérir l'officier d'état civil de se transporter au domicile ou
à la résidence de l'un des futurs mariés pour
célébrer le mariage.
171 Du point de vue du droit prospectif, l'avant projet du
code camerounais de la famille et des personnes attribue cette
compétence aux juridictions administratives. Ce qui rendra ces questions
préjudicielles devant les juridictions civiles.
172 En droit français on parle actuellement de
l'autorité parentale
interviennent généralement en cas de
séparation de corps ou de divorce. Malgré le fait que l'article
389 du Code civil dispose que l'administration des biens de ou des enfants
mineurs appartient à l'époux auquel est confié sa ou leur
garde, il peut avoir opposition d'intérêts entre le mineur et
l'administrateur. Dans ce cas, il sera nommé un administrateur ad hoc
par le tribunal statuant sur requête en chambre de conseil. Communication
devra être faite au Ministère public ainsi qu'en cas de
déchéance du mari et de la femme de l'administration
légale.
Lorsqu'il s'agit des enfants naturels reconnus par leur
père et mère, celui des parents qui exercera la puissance
paternelle n'administrera les biens de son enfant qu'en qualité de
tuteur légal, sous le contrôle d'un subrogé tuteur. Si
l'enfant naturel n'est reconnu par aucun de ses géniteurs, le tribunal
pourra, même si la tutelle a été organisée, soit
d'office, soit sur réquisition du Ministère public, designer un
délégué chargé de veiller aux besoins
matériels et moraux de l'enfant.
138. L'article 36 du code de procédure civile et
commerciale dans les dispositions du paragraphe 6 prévoit
expressément l'obligation de communication pour les causes relatives aux
incapables. Cet article prévoit aussi la communication obligatoire pour
la défense des personnes présumées absentes.
b. Les causes intéressant les
présumés absents
Les articles 36, paragraphe 7 et 457 CPCC mentionnent la
communication des causes relatives aux personnes présumées
absentes. L'art. 114173 C. civ. dispose que « le
Ministère public est spécialement chargé de veiller aux
intérêts des personnes présumées absentes ; et il
sera entendu sur toutes les demandes les concernant ». Avant que
l'absence soit déclarée, le Ministère public veillera
à la protection des intérêts de celui qui aura cessé
de paraître dans les circonstances laissant croire qu'il n'est pas
décédé.
139. En dehors des cas de communication pour la
défense de certaines personnes morales ou physiques, le Ministère
public a communication des affaires qui ont trait à la justice.
III. La communication dans l'intérêt de la
justice
Nous pouvons à ce niveau citer les déclinatoires
sur incompétences, les règlements des juges, les
récusations et renvois pour parenté et alliance, les prises
à partie (a) et les affaires
173 Le chapitre VI de l'avant projet du code camerounais de la
famille et des personnes bien qu'apportant des modifications importantes
relativement à l'absence, n'omet pas de mentionner la
nécessité de communiquer les affaires y relatives au
Ministère public.
gracieuses (b).
a. Les règlements des juges, les
récusations et renvois pour parenté et alliance et les prises
à partie
140. Lorsque deux juridictions de l'ordre judiciaire saisies
de la même affaire ou de deux affaires étroitement liées,
par exemple en cas de connexité ou d'indivisibilité, se
reconnaissent compétentes ou non, il en résulte un conflit
positif ou négatif qui est résolu par la procédure de
règlement de juges. Le règlement de juges consiste à
saisir la juridiction supérieure qui désignera laquelle des
différentes juridictions de même degré, devra
connaître de l'affaire. Le représentant du parquet devra produire
ses conclusions dans la procédure.
141. La récusation est le remède apporté
à la suspicion de partialité d'un magistrat du siège ou du
parquet lorsque ce dernier est partie jointe dans un procès. Elle a lieu
pour les causes définies par l'article 159174 du CPCC.
Le renvoi d'une juridiction à une autre quant à
lui constitue une garantie de l'impartialité de la juridiction.
Concrètement, lorsqu'une partie aura deux parents ou alliés
jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement parmi les juges
d'un tribunal ou trois parents ou alliés au même degré dans
la Cour d'Appel, ou lorsqu'elle aura un parent audit degré parmi les
juges du TPI ou deux parents dans la Cour d'Appel, et qu'elle même sera
membre du tribunal ou de cette Cour, l'autre partie pourra demander le renvoi
de l'affaire devant une autre juridiction.
En principe, les juges sont irresponsables et ne peuvent
faire l'objet d'aucune sanction pour les faits commis dans l'exercice de leur
fonction. Ce qui constitue une garantie importante de
sérénité dans l'accomplissement de leur mission. Cependant
cette irresponsabilité n'est pas absolue ; la responsabilité des
juges peut être engagée par la procédure de la prise
à partie en cas de déni de justice, de dol, de concussion et de
faute lourde professionnelle qui aurait été commise à
l'instruction ou au jugement. La prise à partie peut aussi intervenir
pour les cas où la loi déclare les juges responsables de dommages
et intérêts. Dans ces cas, l'Etat est tenu à titre
principal en sa qualité de commettant, et dispose d'un recours contre le
magistrat responsable. En réalité, la prise à partie
concerne tous les magistrats. Le président saisi à cet effet, ne
pourra statuer qu'après avoir pris l'avis du Ministère public de
sa juridiction.
142. Si tous ces cas ont essentiellement trait à
l'administration de la justice, on ne saurait
174 Tout juge peut être récusé pour les
causes ci-après : s'il est parent ou allié des parties ou de
l'une d'elles, jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement ;
si la femme du juge est parente ou alliée, employeur ou employée
de l'une des parties, ou si le juge est parent ou allié de la femme de
l'une des parties, au degré cidessus, lorsque la femme est vivante, ou
qu'étant , il en existe des enfants ; si elle est
décédée et qu'il n'y ait point d'enfant, le beau
père, le gendre, ni les beaux frères ne pourront être
juges...
en dire autant des affaires gracieuses où l'avis du
Ministère public est aussi obligatoire. b. La communication des
affaires gracieuses
Les matières gracieuses sont celles dans lesquelles il
y a absence d'opposition de prétentions ou absence de contestation. Il
s'agit en fait des procédures ne portant pas sur un litige. Le tribunal
est simplement saisi pour donner son quitus à une requête qui lui
est soumise. Il peut s'agir entre autre de l'adoption, de la
légitimation ou de la reconnaissance d'enfant naturel, de changement de
nom, de régimes matrimoniaux en l'absence de toute opposition... les
décisions qui peuvent être prises à cet effet peuvent
être lourdes de conséquences pour les tiers ou la
société. La présence du Ministère public y est donc
nécessaire pour pallier l'absence de contradiction et éviter
ainsi des injustices ou des troubles probables à l'ordre public. Il
reçoit la requête du juge et vérifie la
régularité du dossier. Il peut soit renvoyer le dossier au
requerrant lorsque ce dossier lui parait incomplet, soit le retourner au juge
s'il est complet. Dans ce dernier cas, il y joint son avis qui peut s'exprimer
en un acquiescement ou en une opposition. Le tribunal n'est pas tenu de suivre
cet avis dans sa décision. Celle-ci est notifiée aux parties et
aux tiers dont les intérêts peuvent être menacés
ainsi qu'au Ministère public. Il peut après réception de
l'expédition de la décision, exercer un recours contre ladite
décision. Le Ministère public a autrefois joué un
rôle important dans la procédure de suspension de
l'exécution provisoire des décisions de justice non
répressive175
143. Les communications
légales invitent donc le Ministère public à intervenir
soit dans l'intérêt de la loi, soit pour la défense de
certaines personnes ou enfin, pour garantir une bonne administration de la
justice ; bref le Ministère public se présente comme l'assistant
du juge ou son conseiller dans la mission de rendre justice. Cela se
vérifie également lorsqu'on envisage les autres types de
communication
Paragraphe II : les communications judiciaire et
facultative
Les communications judiciaire et facultative sont prévues
par l'article 36, paragraphe 7. Nous allons les analyser successivement.
A. La communication judiciaire
L'article 36176 précité dispose que le
tribunal ou le juge de paix à compétence
175 TJOUEN (D.A) l'exécution des décisions de
justice en droit camerounais, revue internationale de droit
comparé 2000 p 429 à 442
176 Les dispositions analogues en droit français sont
prévues par l'article 427 NCPCF.
étendue177 pourra même l'ordonner
(ordonner la communication) d'office. Elle est donc facultative au juge et
oblige le Ministère public à intervenir. Ainsi, le juge
apprécie souverainement l'opportunité de communiquer le dossier
au Ministère public pour avoir son avis sur l'application de la loi
lorsque la question lui parait confuse.
On peut cependant se demander si le Procureur de la
République dans ce cas doit donner un avis motivé, des
conclusions ou s'en rapporter à la sagesse du tribunal. Des opinions
divergent à ce sujet puisque certains estiment que le principe de la
séparation des fonctions de justice répressive confère au
Ministère public une indépendance qui ne l'oblige pas à
adopter un moyen précis pour son intervention. D'autres quand à
eux pensent que le Ministère public devrait donner un avis
motivé. Le moins qu'on puisse dire est que le Ministère public
devrait faire connaître son opinion de façon claire et
précise afin d'aider le juge au lieu de se rapporter à la sagesse
du tribunal.
144. Si la communication judiciaire est facultative pour le
juge, il en va tout autrement de la communication à l'initiative du
Ministère public.
B. La communication facultative
Aux termes de l'article 36, paragraphe 7 CPCC, lorsque le
Procureur de la République croira son Ministère
nécessaire, il pourra prendre communication dans toutes affaires. Il lui
est donc loisible quelle que soit la nature de l'affaire, de donner son avis
soit par des conclusions écrites, soit oralement à l'audience
sans aucune restriction ni réserve.
On pourrait bien se demander comment le Ministère
public peut être informé d'une affaire civile dont la
procédure est essentiellement écrite au point de juger son
intervention nécessaire. En règle générale, le
Ministère public a non seulement accès aux dossiers de
procédure, mais reçoit la plupart du temps, copie des dossiers et
Mémoires des parties.
145. Il est à noter que cette faculté reconnue
au Ministère public fait rarement objet d'usage. Ce qui peut se
justifier par la modicité de ses moyens. Cela est déplorable dans
la mesure où cette « inertie forcée » prive les
juridictions d'un point de vue avisé qui peut leur être d'une aide
considérable dans l'application de la loi.
Les types de communications ainsi présentés, il
convient de passer à la procédure de la communication et de son
impact sur le procès civil.
Section II : la procédure et l'impact de la
communication sur le procès civil
Après avoir retracé la procédure
de la communication (paragraphe 1), nous
177 Il s'agit du juge du TGI.
analyserons la preuve et la sanction des communications comme
impact de celle-ci sur le procès (paragraphe 2).
Paragraphe I : la procédure de la
communication
146. Le procès civil est
régi par certains principes directeurs tels que le principe dispositif
et la contradiction... Ces principes permettent de déterminer le cadre
du procès civil dans son déroulement avec le rôle y
joué par les différents protagonistes dont le Ministère
public. Celui-ci doit avoir un cadre d'intervention qui tient compte de ces
principes (B) après être informé par le moyen de la
communication qui se déroule selon les modalités précises
(A).
A. Les modalités de la communication
Nous répondrons essentiellement à la question de
savoir qui est l'auteur de la communication (I) et par quels moyens intervient
le Ministère public (II)
I. L'auteur de la communication
147. La communication a lieu
à la diligence du juge sauf dispositions contraires de la loi. Il
s'assure que le greffier a bien effectué cette communication. Il ne
revient pas aux parties de veiller à ce que la communication des
affaires communicables soit faites au Ministère public. Ainsi on ne
saurait reprocher à une partie de n'avoir pas communiqué son
recours au Ministère public178. La communication doit avoir
lieu en temps utile pour ne pas retarder le jugement et si la décision
en fait état, elle est présumée avoir eu lieu avant
l'ouverture des débats179.
II. Les moyens d'intervention du Ministère
public
148. Le Procureur de la
République ou le Procureur Général ont le choix entre
donner un avis motivé ou non ; rédiger des conclusions
écrites ou exprimer leur opinion oralement à l'audience devant la
juridiction. Ils ne sont pas tenus d'être présents à
l'audience même lorsqu'ils ont reçu communication d'une
affaire180 sauf dispositions contraires de la loi. Ces moyens
doivent être mis en oeuvre dans un cadre garantissant le respect de
certaines règles.
B. Le cadre d'intervention du Ministère
public
Parler du cadre d'intervention du Ministère public revient
à situer l'étendue de ses conclusions, avis ou opinions et
à préciser le moment de cette intervention. Ce cadre nous
178 Cass. 2èmeciv, 8 Oct 1986. 2. Panor 286.
179
Cass. Com. 11 mai 1982, bull. civ. IV,
n° 176.
180
Cass. Com.15 juill 1975, bull. civ. IV,
n°204, D. 1975. 735, note F.D. 4 mai 1976, D. 1976, IR 231.
permet d'apprécier le respect du principe dispositif (a)
et celui de la contradiction (b)
I. L'intervention du Ministère public et le
principe dispositif
149. Le principe dispositif est celui qui préside
à la distribution des rôles entre le juge et les parties. Selon ce
principe, les parties ont seules la faculté d'initiative, de
désistement, d'acquiescement, d'impulsion c'est-à-dire d'entamer
ou d'interrompre le procès civil181. Ils ont la charge
d'alléguer et de prouver les faits dans le procès civil, alors
qu'il revient au juge de les qualifier selon la règle de droit
adéquate182. Le principe dispositif fait du procès
civil un procès essentiellement accusatoire où le juge n'a en
principe que le rôle d'un arbitre neutre. Il ne lui est pas permis de
faire intervenir dans les débats les faits dont il aurait
personnellement connaissance en dehors du procès. C'est donc les parties
qui fixent et délimitent le cadre du procès dans son
étendue, à travers les faits allégués au soutien de
leurs prétentions respectives. La décision du juge doit
uniquement tenir compte des faits portés à sa connaissance par
les parties et porter sur toutes les prétentions et uniquement sur
elles. Lorsque le juge omet de statuer sur l'une des prétentions, on dit
qu'il a statué infra petita ; lorsqu'il statue au-delà de ce qui
lui a été demandé, on dit qu'il a statué ultra
petita et lorsqu'il a dénaturé les
prétentions183 des parties, on dit généralement
qu'il a statué extra petita. Et la décision doit être, dans
les deux premiers cas, révisée soit pour statuer sur la
prétention omise, soit pour retrancher ce qui a été
ajouté. On se demande donc si ce principe s'impose au Ministère
public avec la même acuité.
150. Le Ministère public veille à l'application
des lois, règlements et décisions de justice et peut, dans
l'intérêt de la loi, prendre devant toute juridiction
auprès de laquelle il est représenté, les
réquisitions qu'il estime utiles. Quand il intervient, il donne un avis
et fait entendre la voie du représentant de l'autorité publique
sur la légalité. En tant que partie jointe au procès civil
le Ministère public doit respecter le principe dispositif ; son
intervention doit se limiter en principe au cadre fixé par les parties.
Il doit « accepter le procès avec les limites et
l'étendue que lui ont données les parties. Il n'a pas le droit
d'élargir le procès, d'émettre les prétentions
auxquelles les plaideurs n'auraient pas recourues »184.
Mais il existe une atténuation à cette règle.
181 Contrairement au procès pénal où le
Ministère public, bien qu'ayant la faculté d'entamer les
poursuites, n'a pas en principe la possibilité de transiger à
propos ou de l'interrompre sauf à considérer l'article 64 CPP.
182 L'article 12 NCPC dispose en ce sens que : « Le
juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui
sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux
faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination
que les parties en auraient proposée... »
183 La cour de cassation française sanctionne
généralement ce genre de décision. Elle l'a fait dans un
cas où une Cour d'Appel saisie pour se prononcer sur l'extension d'une
liquidation des biens à un dirigeant de l'entreprise, a condamné
ce dernier au paiement du passif social. (
Cass. Com. 28 nov. 1979, bull civ IV,
n°314).
184 GLASSON, TISSIER et MOREL, tome II, n° 506, cité
par ELOUNDOU ELOUNDOU op. Cit. p.27.
Le Ministère public ayant pour mission la
défense de l'ordre public, il lui revient, au cas où une
décision risque de porter atteinte à celui-ci, de veiller
à ce que cela soit évité. Il peut signaler au juge les
moyens d'ordre public185même par l'allégation des faits
non évoqués par les parties. Lorsqu'il intervient dans les
matières communicables, sa passivité n'est plus de rigueur. C'est
ainsi qu'il peut verser au débat tous les documents et renseignements de
nature à contribuer à la solution du litige186 ; par
exemple, produire à une partie dans une action en recherche de
paternité, les documents qui attestent l'entretien de l'enfant, alors
que son action reposait sur la séduction dolosive et le concubinage
notoire187. Dans la pratique, le Ministère public peut
même aider l'une des parties indirectement tout simplement en
évoquant un moyen dont il précise qu'il ne peut faire entrer dans
les débats en application du principe dispositif.
Il en résulte que l'intervention du Ministère
public peut être d'un impact considérable sur le principe
dispositif et élargir ainsi le cadre du débat, sinon inverser le
cours du procès en aidant l'une des parties. Cela pourrait contribuer
à rendre la justice moins judiciaire dans le procès civil,
puisque la vérité dissimulée par certaines parties
pourrait être révélée par l'intervention du
Ministère public.
151. Le procès civil peut être davantage juste si
le principe de la contradiction est respecté à travers
l'intervention du parquet.
II. L'intervention du parquet et la
contradiction
Principe émergent, la contradiction a longtemps
été absente dans les écrits de la doctrine. Elle a
figuré curieusement dans un paragraphe de l'ouvrage en cinq volumes de
GLASSON, TISSIER et MOREL : « les juges ne peuvent en principe statuer
sur une demande qu'après instruction et débat contradictoires ;
il doit y avoir libre défense, libre contradiction. Ce sont les
garanties essentielles qui dominent toute la procédure
»188. La contradiction implique l'échange des
conclusions entre les parties et la connaissance par chacune d'elles de tous
les éléments de fait et de droit sur lesquels sont fondées
les prétentions respectives pour leur permettre de mieux préparer
leur défense. Ces pièces et conclusions doivent être
produites dans des délais propices pour garantir une bonne prise de
connaissance par chacune des parties.
152. Le Ministère public intervenant dans le
procès civil en tant que partie jointe donne
185 Les moyens d'ordre public sont ceux qui peuvent être
soulevés d'office par le juge et qui peuvent être reçu en
tout état de cause c'est-à-dire à toue étape de la
procédure.
186 Civ. 1ère 18 mars 1958, bull civ n°
156 p.120.
187 Paris 23 juin 1955, JCP 1956, II, 9064, obs. DOUDE ; RTDC,
1956, p.172, obs. HEBRAUD.
188 Cité par MARTIN (R), les principes directeurs du
procès, rep. Pr. Civ. Dalloz, mai 2000. p 21
son avis, soit en prenant la parole à l'audience, soit
en déposant des conclusions écrites. Lorsqu'il intervient
oralement, il a la parole le dernier189, les parties ne pouvant plus
que déposer des notes en délibéré en réponse
à ses arguments. Cette règle est considérée comme
étant d'ordre public par la jurisprudence190 et
sanctionnée par la nullité de la décision191.
Si par contre le Ministère public décide d'intervenir par le
moyen des conclusions écrites, il ne lui est fait aucune prescription
sur le moment de la production desdites conclusions. Il suffit qu'elles soient
communiquées aux parties le jour des débats192.
On peut remarquer que la contradiction n'est pas assez
respectée relativement à l'intervention du Ministère
public, surtout lorsqu'il intervient oralement. La Cour européenne des
droits de l'Homme a d'ailleurs sanctionné193 cette pratique
qui est significative d'une discrimination injustifiable, privilégiant
le Ministère public qui ne dispose d'ailleurs d'aucune garantie
d'infaillibilité194. Son avis devrait donc faire l'objet de
discussion autant que celui du juge lorsqu'il soulève d'office des
moyens de droit. Ce d'autant plus que son avis peut peser d'un poids important
sur le cours du procès au point de faire basculer son issue.
153. L'intervention du
Ministère public en tant que partie jointe se révèle donc
lourde de conséquences car non seulement elle est susceptible
d'éclairer le juge, mais aussi peut faire basculer le cours du
procès. Cette influence est accrue par la sanction
réservée aux procédures dont la preuve de la communication
au Ministère public n'a pas été faite alors qu'un texte de
loi l'a prescrite.
Paragraphe II : la preuve et la sanction de l'absence
de communication
Lorsque l'intervention du Ministère public est requise,
c'est-à-dire dans les matières ou causes communicables, la
régularité de la procédure en dépendra. Car
l'absence de la preuve de la communication (A) la rendra
irrégulière (B).
A. La preuve de la communication
189 Art 87 du Décret du 30 mars 1808 : « le
Ministère public une fois entendu, aucune partie ne peut plus
obtenir
la parole après lui » ; art. 443 NCPC
« Le Ministère public, partie jointe, a le dernier la parole. S'il
estime ne
pas pouvoir prendre la parole sur-le-champ, il peut demander
que son audition soit reportée à une prochaine
audience ».
190 Civ. 2ème 3 avril 1978
191 Civ. 3ème 18 mars 1974, bull civ
III, n° 129 ; civ 2ème 14 nov. 1975 qui énonce
que : « les dispositions de l'article 91 du Décret du 20
juillet 1972 aux termes de laquelle le Ministère public, partie jointe,
prend la parole le dernier,est d'ordre public. Doit donc être
cassé l'arrêt des énonciations duquel il résulte que
le Ministère a été entendu avant les avocats des parties
», JCP 1976. II. 18511, note MARTIN (R) et VAN DER CORPUT (S) ;
RTD civ. 1977, 187, obs. PERROT (R) ; 3 avril 1979, bull civ. II,
n° 115.
192 Civ. 1ère 20 juill. 1994, bull civ. I,
n° 259.
193 Arrêt VERMELIN, arrêt MACHADO contre Portugal.
Arrêt gorges : « le Ministère public doit transmettre ses
observations à la partie civile faute de quoi il y a violation du
principe de l'égalité des armes »
194 Lire MARTIN (R), faut-il supprimer le Ministère public
devant les juridictions civiles et administratives ? RTD civ 1998,
873.
Le défaut de communication met le Ministère
public hors d'état de donner son avis qui est obligatoire dans certains
cas. Dans ces cas, la communication est une formalité substantielle et
son absence peut être sanctionnée sévèrement.
La décision doit porter la mention des conclusions du
Ministère public avec la précision qu'elles ont été
faites en dernière position. Aucun texte ne prévoit l'obligation
de mentionner que la communication a lieu195. Ce qui dénote
l'absence de réglementation de sa preuve qui peut par conséquent
être faite par tous moyens en application de la maxime selon laquelle
« là oil la loi ne distingue pas, il ne faut pas distinguer
».
154. C'est donc à bon escient que la jurisprudence
admet les pièces de la procédure telles que le procès
verbal d'audience, le libellé même du jugement ou de l'arrêt
et toute autre pièce196 comme preuve de la communication. La
simple mention dans la décision ou au registre d'audience, soit que le
Ministère public était présent aux débats, soit
qu'il a été entendu197, est constitutive d'une
présomption que la communication lui a été faite. Il en
est de même de la mention sur un dossier « vu au parquet
général »198. Tout comme lorsque les
conclusions de l'une des parties portent en marge, « pour le Procureur
»199.
Cette attitude de la jurisprudence est de nature à
atténuer la gravité de la sanction pouvant intervenir en cas
d'absence de communication.
B. La sanction du manquement à la
formalité de la communication
155. Comme déjà dit, le manquement à la
formalité de la communication met le Ministère public hors
d'état de donner son avis qui est obligatoire. Etant donc une
formalité substantielle, le manquement à son accomplissement est
sanctionné par la nullité de la décision, nullité
qui a un effet dévolutif ; c'est-à-dire une nullité qui
permet à la juridiction l'ayant prononcée de statuer sur
l'affaire. Mais suivant les dispositions de l'article 223 alinéa 8,
lorsque la communication n'a pas été faite dans les cas où
la loi l'exige, et que le jugement a été rendu contre celui pour
qui elle était ordonnée, celle-ci peut provoquer sa
rétractation au moyen de la requête civile200.
En tout état de cause, la nullité de la
décision peut être demandée par la voie d'appel ou de
pourvoi en cassation respectivement s'il s'agit d'un jugement ou d'un
arrêt de la Cour d'Appel, par la partie dans l'intérêt de
laquelle la communication est exigée si elle est
195
Cass. Com. 10 oct. 1978, bull civ.
IV, n°221.
196 Cass. Ch. Mixte, 21 juill. 1978, gaz pal. 1978. 2
.579, note VIATTE (J).
197 Civ. 1ère 27 févr. 1979, bull
civ. I ; n° 76.
198
Cass. Com. 20 févr. 1980, bull civ
IV, n°92.
199 Cass. Ch. Mixte, 21 juill. 1978, gaz pal. 1978. 2
.579, note VIATTE (J).
200 La requête civile est une voie de recours
extraordinaire qui est remplacée actuellement par le recours en
révision
perdante201, ou par le perdant si la communication est
exigée dans l'intérêt de l'ordre public.
Cette sanction nous parait sévère étant
donné qu'elle pourrait résulter d'une simple inadvertance du juge
ou du greffier lors de la rédaction de la décision. C'est
certainement ce qui emmène la jurisprudence à adopter une
attitude de souplesse dans la preuve de la communication.
CONCLUSION DU CHAPITRE I
Au terme de ce chapitre où il a été
essentiellement question du rôle de principe du Ministère public
dans le procès civil, on peut se rendre compte que son intervention est
susceptible d'influencer doublement ce procès.
156. Lorsque cette intervention est facultative ou
judiciaire, elle peut avoir pour conséquence d'éclairer
simplement le juge ou, de façon négative, de porter atteinte au
principe de la contradiction. Et lorsque l'intervention du Ministère
public est obligatoire, en dehors de l'éclairage qu'elle peut donner au
juge, elle peut aussi porter atteinte au principe de la contradiction et au
principe dispositif, sans omettre son impact sur la décision, celle-ci
pouvant être annulée pour manquement à l'obligation de
communication.
157. Il serait nécessaire d'apporter des solutions
à ces problèmes par la réglementation stricte du cadre et
du moment d'intervention du Ministère public, partie jointe au
procès civil. Ceci constituerait, avec la lumière qu'il apporte
relativement à l'application de la loi, des garanties
considérables d'une justice civile plus juste et plus protectrice de
l'ordre public, motif qui justifie en partie son intervention comme partie
principale dans ce type de procès.
201 Cass. Civ. I 22 juin 1953. Bull civ. I, n° 212. p
176.
CHAPITRE II : L'EXTENSION DU ROLE DU MINISTERE PUBLIC
: LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC PAR VOIE D'ACTION
158. Comme partie principale, le Ministère public peut
intervenir sans attendre que le procès soit engagé par les
particuliers. C'est-à-dire qu'il peut agir par voie d'action pour
attaquer ou pour défendre. Il est une partie à part
entière et ne peut plus être récusé ; il peut
exercer toutes les voies de recours possibles.
Le Ministère public peut en principe intervenir comme
partie principe dans les cas prévus par la loi de façon
explicite. Une tendance à la généralisation de cette
intervention par voie d'action se dessine en droit camerounais pour la
défense de l'ordre public et l'on se pose la question de savoir si l'on
ne risque pas d'aboutir a une situation où le Ministre public se
permettra d'agir dans toutes sortes d'affaires au risque de compromettre
certains intérêts particuliers
159. Nous présenterons les cas légalement
prévus où le Ministère public intervient par voie d'action
(section 1) et le domaine problématique de cette intervention (section
2)
Section I : le domaine légal de l'intervention
du parquet par voie d'action
La loi prévoit les cas dans lesquels le
Ministère public peut agir comme partie principale dans un procès
civil. Nous présenterons ces cas (paragraphe 1) avant de faire une
analyse du cas de l'action du Ministère public dans les
procédures de redressement judiciaire des entreprises en
difficulté (paragraphe 2).
Paragraphe I : les cas légaux d'intervention du
parquet par voie d'action dans le procès civil
Les textes prévoyant l'intervention du
Ministère public comme partie principale sont divers et
portent soit sur la famille dont le Ministère public apparaît
comme le grand protecteur (A), soit sur l'état et la nationalité
(B).
A. Le Ministère public, protecteur de la
famille
160. Le Ministère public intervient comme partie
principale en matière d'actes d'état civil, de tutelle des
majeurs, en cas de contestation de la validité d'un mariage, en cas de
conflit sur la garde des enfants mineurs ou les modalités d'attribution
de l'autorité parentale, en cas d'absence et de placement d'une personne
dans un établissement d'aliénés. La protection peut donc
porter sur les faibles (I) ou sur l'institutions du mariage (II)
I. Le Ministère public, protecteur des
faibles
Comme faibles, on peut citer les absents et disparus, les
personnes placées dans un établissement d'aliéner (a), et
les incapables (b).
a. La protection des absents, disparus et personnes
placées dans un établissement d'aliénés par le
Ministère public
161. L'absent est celui qui a cessé de paraître
à son domicile ou à sa résidence pendant un certain temps
au point où l'on ne sait plus s'il est vivant au mort. L'institution de
l'absence a été organisée dans le code civil pour
protéger les intérêts de l'absent. C'est la raison pour
laquelle la requête en déclaration d'absence en l'état
actuel du droit camerounais, n'est recevable qu'après une période
de quatre ans, marquant l'étape de la présomption d'absence.
Pendant cette période, le patrimoine de la personne
présumée absente fait l'objet d'une protection assurée
spécialement par le Ministère public202. Celui-ci
pourra représenter l'absent présumé à défaut
d'un Procureur fondé, dans tous les actes d'inventaire, compte, partage
et liquidation où il sera intéressé. Pour constater
l'absence, le tribunal ordonnera qu'une enquête soit faite
contradictoirement avec le Ministère public dans l'arrondissement du
domicile, et dans celui de la résidence de l'absent s'ils sont distincts
l'un de l'autre. L'absence déclarée, les héritiers
présomptifs pourront obtenir l'envoi en possession provisoire des biens
de l'absent. Et le testament, s'il en existe un, sera ouvert à la
réquisition des parties intéressées, ou du Procureur de la
République203.
162. La disparition elle, renvoie à la situation dans
laquelle une ou plusieurs personnes cessent de paraître dans des
circonstances faisant présumer qu'elles sont mortes. Dans ce cas, le
Ministère public, en la personne du Procureur de la République,
peut demander la déclaration de décès. Et si ladite
demande émane des parties intéressées, elle est transmise
par l'intermédiaire du Procureur de la République qui pourra par
ailleurs, poursuivre l'annulation du jugement déclaratif du
décès si le disparu réapparaît.
163. Dans le cadre du placement d'une personne dans un
établissement d'aliénés, le Ministère public peut
tout d'abord requérir du tribunal de première instance, la
nomination d'un curateur, ou d'un administrateur provisoire des biens de
l'aliéné. Le Procureur de la République est
également admis à demander la sortie de
l'intéressé, sortie qui pourra être ordonnée par le
tribunal de première instance statuant en chambre du conseil. S'il
s'agit d'un mineur, à sa sortie il sera placé sous
l'autorité des personnes qui en bénéficiait
conformément à la loi, sauf décision contraire du tribunal
de première instance à la requête du Procureur de la
République
202 Article 114 C. Civ. « le Ministère public le
Ministère public est spécialement chargé de veiller aux
intérêts des personnes présumées absentes ; et ils
sera entendu sur toutes les demandes qui les concernent ».
203 Article 123 C. Civ.
sur avis du médecin traitant de l'établissement.
Ceci nous conduit immédiatement à voir le
rôle de protecteur joué par le Ministère public
relativement aux incapables.
b. La protection des incapables par le Ministère
public
164. On distingue en règle générale les
incapables majeurs (2) des incapables mineurs (1) ; la protection du
Ministère public porte sur ces deux catégories de personnes.
1. La protection des mineurs
Les mineurs sont protégés par le
Ministère public à la fois sur les terrains de la puissance
paternelle, de la tutelle, de l'adoption d'enfants naturels, du droit
successoral et de l'hypothèque légale.
Le mineur certes a des droits, mais ne dispose pas de la
capacité pour les exercer. En droit camerounais, c'est le père,
s'ils sont mariés, ou la mère en cas de déchéance
ou de décès du mari qui veille à son éducation et
à l'administration de ses biens. Lorsque l'enfant est né hors
mariage, la puissance paternelle est exercée conjointement par le
père et la mère si sa filiation a été
également établie à leur égard sinon, seul le
parent à l'égard duquel la filiation a été
établie exercera sur cet enfant la puissance paternelle204.
Si l'enfant est menacée sur les plans de la sécurité
morale, physique et matérielle au regard du comportement de ses
parents205, le Ministère public peut introduire devant le
tribunal de grande instance, une demande de déchéance de la
puissance paternelle. En cas de demande de restitution de la puissance
paternelle par les parents, le Procureur de la République peut
requérir la prise de mesures d'assistance éducative.
165. En cas de divorce ou de séparation de corps, et
lorsque la garde de l'enfant a été confiée à l'un
des parents, le président du tribunal, à la requête du
Procureur de la République ou à la demande du Père ou de
toute autre personne, peut modifier ou révoquer l'ordonnance relative
à cette garde.
Le Ministère public peut en outre demander au juge des
tutelles la transformation de l'administration légale en tutelle, la
convocation du conseil de famille aux fins de nomination du tuteur datif, de
prononcer l'exclusion, la destitution, la récusation du tuteur ou du
subrogé
204 Il existe une disparité entre le père et la
mère en faveur du premier lorsqu'ils sont mariés ; alors que
c'est l'inverse qui est constaté lorsqu'ils ne sont pas mariés
puisque la filiation des enfants naturels était facilement
établie vis-à-vis de la mère, l'accouchement valant
reconnaissance à son égard. L'égalité entre les
deux parents n'est observée que lorsque que la filiation de l'enfant
naturel est établie conjointement à leur égard
malgré l'inappriation de l'expression « puissance paternelle
» remplacée sur d'autres cieux à celle d' «
autoritéparentale ».
205 Ivrognerie, délinquance, défaut de son,
négligence pendant plus de deux ans d'exercer les droits et devoirs les
unissant à leur enfant lorsque celui-ci fait l'objet d'une mesure
d'assistance éducative.
tuteur. Les délibérations du conseil de famille
peuvent être annulées à la requête du
Ministère public206.
166. Dans le cadre de l'adoption d'enfants naturels, le
Ministère public bénéficie également d'un droit
d'action. En effet, lorsqu'une personne désire adopter un enfant, elle
va déposer une demande auprès du TGI compétent. Cette
requête passe généralement par l'intermédiaire du
Ministère public. Le tribunal, après avoir entendu le Procureur
de la République, et sans aucune forme de procédure,
décide sans énoncer de motifs, qu'il y a lieu, ou qu'il n'y a pas
lieu à adoption207. L'homologation de l'adoption ou non par
le tribunal peut être attaquée par le Ministère public
devant la Cour d'Appel208.
167. En matière de succession vacante, et dans
l'intérêt de tous les héritiers, le Procureur de la
République peut requérir la nomination par le président du
TPI du lieu d'ouverture de la succession, d'un curateur qui sera chargé
d'administrer les biens de ladite succession. Dans le cadre du partage et des
rapports, l'article 819 C. Civ. dispose que : « les scellés
doivent être apposés dans l'intérêt des enfants ou
des interdits à la diligence du Procureur de la République ou
d'office par le juge du tribunal de première instance, dans
l'arrondissement duquel la succession est ouverte, dans les plus brefs
délais si tous les héritiers ne sont pas présents
»209.
168. Par ailleurs, le Ministère public a la
possibilité de faire prononcer la déchéance du
grevé et l'ouverture du droit des appelés lorsque le premier n'a
pas satisfait aux obligations de l'article 1056 du code civil. Ceci constitue
un autre cas d'ouverture de la substitution210 puisque celle-ci
intervient normalement après le décès du grevé.
169. En ce qui concerne l'hypothèque légale,
l'article 2143 du Code civil déclare que le Ministère public peut
saisir le juge des tutelles dans les cas où il y a lieu à
administration légale, afin que celui-ci puisse décider de
l'inscription de cette hypothèque sur certains immeubles du mineur
lorsque l'hypothèque n'aura pas été restreinte par l'acte
de nomination du tuteur.
On se rend compte que le Ministère public est un
véritable « ange gardien » des intérêts du
mineur. Ce rôle s'étend également aux incapables
majeurs.
206 Voir les articles 391, 405, 446,447 C. Civ.
207 Article 362 C. Civ.
208 Article 363 même code.
209 L'article 497 CPCC dispose également dans ce sens
que : « le scellé sera apposé, soit à la
diligence du Ministère public, soit sur la déclaration du maire
ou adjoint de la commune ou du chef de l'unité administrative, et
même d'office par le juge : si le mineur est sans tuteur, et que le
scellé ne soit pas requis par un parent ; si le conjoint, ou les
héritiers ou l'un d'eux sont absents ; si le défunt était
dépositaire public, auquel cas le scellé ne sera apposé
que pour raison de ce dépôt et pour les objets qui le composent
».
210 La substitution fidéi commissaire est une donation
faite à une personne nommée « grevée »,
avec charge pour celle-ci de conserver sa vie durant le bien reçu et de
transmettre à une autre personne nommée « appelée
».
2. La protection des incapables majeurs
Les majeurs incapables sont ceux qui sont atteints d'une
altération de leurs facultés mentales. La réforme
législative du 3 janvier 1968 en France leur a aménagé
trois régimes à savoir la sauvegarde de justice, la tutelle et la
curatelle, et a prévu des dispositions protectrices applicables en
l'absence des mesures de protection qu'elle institue.
Lorsque les biens du majeur protégé sont en
péril, le Procureur de la République s'il est informé, est
ténu de provoquer d'urgence, toute mesure conservatoire desdits
biens.
Si le majeur a subi une altération profonde de ses
facultés personnelles constatées par un médecin
spécialiste sur une liste établie par le Procureur de la
République, le juge des tutelles peut le placer d'office ou sur
requête du Ministère public sous le régime de la tutelle
des majeurs.
170. Lorsqu'un patient d'un médecin présente
des anomalies psychiques justifiant sa protection par la loi, ce médecin
peut en faire la déclaration au Procureur de la République qui
pourra demander son placement sous sauvegarde de justice. Le Ministère
public peut également demander la révocation d'un mandataire
constitué par le majeur. Comme tout ceux qui ont qualité pour
demander l'ouverture d'une tutelle, le Ministère public à
l'obligation de faire les actes conservatoires que nécessite la gestion
du patrimoine du protégé. Il peut ainsi attaquer en
nullité, les engagements pris par le majeur placé sous sauvegarde
de justice ou demander leur réduction. La sauvegarde de justice prend
fin avec la cessation de l'altération des facultés ou la
radiation de cette protection par le Procureur de la République.
171. Hormis les incapables, le Ministère public
protège également la famille dans son fondement institutionnel
qu'est le mariage.
II. Le Ministère public, protecteur de
l'institution du mariage
Le mariage est un acte- condition c'est-à-dire un acte
dans lequel on est libre d'entrer, mais tenu d'y vivre ou d'y mettre un terme
selon les règles bien établies. Sa conclusion nécessite le
respect d'un certain nombre de conditions dont le manquement peut être
sanctionné par la nullité du mariage. L'ordonnance du 29 juin
1981 qui réglementent actuellement la matière au Cameroun, ne
donne pas de précision quant aux personnes qui peuvent exercer cette
action. On peut donc se référer au code civil, article 184 qui
investit le Ministère public211du droit, sinon de
l'obligation de demander la nullité du mariage, du vivant des
époux, et de les faire condamner à se séparer en cas de
non-respect de la condition d'âge, d'absence de consentement, de non
respect de la forme de mariage ou d'inceste, bref de la
211 Ainsi que les personnes intéressées
violation des conditions d'ordre public. Le Ministère
public peut en outre demander la condamnation des officiers de l'état
civil qui ont célébré le mariage en contravention de ces
règles.
Cette action du Ministère public sur l'acte de mariage
s'étend sur la quasi-totalité des actes d'état civil ainsi
que sur la nationalité.
B. Les actes d'état civil et la
nationalité
172. Les actes d'état civil et la nationalité
sont ceux qui permettent à l'état de maîtriser ses
nationaux, de repérer facilement un individu et de le suivre partout
où il pourrait se trouver. Ce sont des actes constitutifs de
l'identité d'une personne, identité à laquelle est
attaché un patrimoine. Leur attribution et les modifications qui peuvent
y être apportées, doivent être régulières et
sincères dans l'intérêt de certains particuliers et de la
société en général. Le Ministère public
bénéficie alors d'un droit d'action dans ces domaines. Nous
examinerons d'abord l'action du Ministère public dans le contentieux de
la nationalité (I) avant de le présenter comme partie principale
en matière d'actes d'état civil (II).
I. Le parquet comme partie principale dans le
contentieux de la nationalité
La procédure d'acquisition de la nationalité
camerounaise est administrative. C'est en fait un Décret du Ministre de
la justice publié au journal officiel qui naturalise,
réintègre ou déchoit un individu de la nationalité.
Dans cette procédure ou dans d'autres, des oppositions ou contestations
peuvent être soulevées.
173. Lorsqu'il s'agit d'une contestation intervenue de
manière incidente212dans un procès, le
Ministère public doit toujours être mis en cause. Il est en cela
partie jointe. Les articles 41, alinéa 4213de la loi de 1968
sur la nationalité et 8 du Décret de 1968 sur les
modalités d'application du code de nationalité confèrent
au Ministère public un droit d'action exclusive comme demandeur ou
défendeur au nom de l'état. L'article 8 précité
dispose que : « la validité d'une déclaration
enregistrée peut toujours être contestée par le
Ministère public ou par toute personne intéressée. Dans ce
dernier cas le Ministère public doit toujours être mis en cause
». Il en résulte que le Ministère public intervient
à la fois comme partie jointe et comme partie principale en
matière de nationalité avec un penchant pour la défense
dans ce dernier cas. Cela peut également se vérifier en
matière d'actes d'état civil.
212 Il s'agit des exceptions de nationalité et
d'extranéité c'est-à-dire de la revendication de la
nationalité camerounaise et de la réfutation de celle-ci par un
individu ou par son adversaire au procès.
213 « Le Ministère public doit toujours
être mis en cause et a seul, qualité pour agir ou défendre
au nom de l'état ».
II. L'action du parquet en matière d'actes
d'état civil
Nous examinerons les modifications portées sur les actes
et leur reconstitution
174. En principe, les actes d'état civil sont
intangibles et définitifs c'est-à-dire qu'ils ne sont
établis qu'une fois et ne peuvent plus être modifiés. Le
principe de l'intangibilité connaît des exceptions. En effet,
lorsque des erreurs ont été faites par l'officier d'état
civil lors de la rédaction d'un acte d'état civil, celles-ci
peuvent être corrigées et la mention des rectificatifs est
portée au verso de l'acte. L'action en rectification peut être
présentée par les personnes intéressées ou par le
Ministère public. Le Procureur de la République est ténu
d'agir d'office lorsque l'erreur ou l'omission porte sur une indication
essentielle. Des modifications peuvent également être
apportées à l'acte d'état civil suite à
l'aboutissement d'une procédure de changement, de relèvement ou
de camerounisation de nom ou de prénom. Le Ministère public peut
intervenir en amont dans cette procédure qui est purement
administrative, en cas d'opposition, pour saisir la Cour d'Appel afin que
celle-ci statue sur ladite opposition214.
Il arrive parfois qu'un acte d'état civil soit
égaré, volé ou détruit. Dans ces cas, le
caractère définitif de l'acte d'état civil subit à
son tour une atténuation. Il est admis qu'on puisse procéder
à la reconstitution de l'acte en question. Le Ministère public ne
joue que le rôle d'enquêteur dans ces situations pour pouvoir
découvrir la vérité et s'opposer le cas
échéant à la reconstitution de l'acte.
175. L'importance du rôle joué par le
Ministère public comme partie principale dans les matières qui
touchent à la famille, à la nationalité et aux actes
d'état civil ne doit pas nous faire perdre de vue celui qu'il doit
remplit en matière de redressement judiciaire.
Paragraphe II : Le parquet et le redressement
judiciaire des entreprises
Le monde du XXIe siècle est basé essentiellement
sur les affaires. La puissance d'un pays ou d'une nation repose sur plusieurs
critères parmi lesquels l'importance de ses entreprises en nombre et en
moyens occupe une place de choix. Il peut arriver que ces entreprises
connaissent des difficultés mettant en péril leur survie. Dans le
but d'éviter les conséquences que pourrait engendrer la
disparition d'une société ou d'une entreprise sur le plan social,
économique et même politique, le législateur a
organisé les mesures de sauvetage des
214 Article 22 de la Loi n° 69 -LF - 3 du 14 juin 1969 portant
réglementation de l'usage des noms, prénoms et pseudonymes
« en cas d'opposition le Ministre de la justice, à l'expiration
du délai de six mois de l'article 19, transmet ensemble la demande et
les lettres d'opposition qui lui sont parvenues au Procureur
Général du domicile ou de la résidence du demandeur. Le
Procureur Général saisit dans les trente jours de la
réception des pièces visées la Cour d'Appel qui statue en
chambre du conseil. Le Ministère public est toujours entendu outre le ou
les opposants et le demandeur. Tout témoin est entendu à la
requête des parties ou du Ministère public... ».
entreprises qui peuvent être concrétisées
à travers la procédure de redressement judiciaire. Le
Ministère public, depuis quelques années, dispose d'un droit
d'action dans cette procédure. Si ailleurs le législateur l'a
reconnu expressément (A), en droit camerounais la situation est tout
à fait différente (B)
A. L'action en redressement judiciaire par le
Ministère public en droit étranger
176. Nous prendrons comme
législation étrangère, le droit français. En effet,
les lois des 13 et 24 juillet 1966 en France reconnaissaient déjà
au Ministère public la possibilité de demander à tout
moment la résiliation du contrat de location gérance en
matière de règlement judiciaire215. Le Décret
de décembre 1967 reconnaissait au Procureur de la République, aux
termes des dispositions de l'article 109, le droit d'appel contre la
décision rendue en matière de faillite personnelle et
d'interdiction de diriger une entreprise. Il ne s'agissait là que d'un
droit d'action en matière commerciale en général et non de
sauvetage de l'entreprise.
Le droit de provoquer l'ouverture des procédures
collectives à l'égard d'une entreprise a commencé à
être reconnu au Ministère public à travers la loi de
1967216. Il a été renforcé par la loi du 25
janvier 1985217 et le Décret du 27 décembre de la
même année218, modifié par le Décret du
21 octobre 1994. L'article 25 de la loi de 1985 précitée dispose
en effet que « le tribunal peut se saisir d'office ou être saisi
par le Procureur de la République » de l'ouverture du
redressement judiciaire. Si le Ministère public est informé de la
situation d'une entreprise qui ne parvient plus à faire face à
son passif avec son actif, c'est-à-dire une situation de cessation de
paiements, il peut saisir le tribunal de commerce aux fins d'ouverture du
redressement judiciaire. Il peut également le faire lorsque l'entreprise
n'exécute pas ses engagements financiers pris dans le cadre d'un
règlement amiable219 ou en cas de décès d'un
commerçant ou d'un artisan se trouvant en état de cessation des
paiements220.
Le traitement de l'entreprise en difficulté
financière ne constitue plus seulement une affaire entre un
débiteur en déconfiture et ses créanciers. Il est devenu
une mesure de sauvetage des emplois générés par celle-ci
et donc de protection de l'ordre public. L'intervention du Ministère
public y revêt un caractère général. Il est
recevable à demander le renvoi d'une juridiction à une autre, le
report de la date de cessation des paiements, le remplacement de
l'administrateur, la nomination d'un nouveau commissaire au plan de
continuation de l'activité,
215 Article 28 de la Loi du 13 juillet 1966
216 Loi n° 67 -- 563 du 13 juillet 967, D. 1967. 269
217 Loi n° 85 -- 98 du 25 janvier 1985, D. 1985. 147
218 D. 1986.84
219 Article 5 Loi du 25 janvier 1985.
220 Article 16 et 17 même Loi.
la résolution du plan et l'ouverture d'une liquidation
judiciaire. Il peut également intervenir dans l'exécution du
contrat de location gérance de l'entreprise, ou de cession à un
repreneur, dans la fixation de la durée de la période
d'observation, ainsi que dans la liquidation judiciaire, dont il a le droit de
demander l'ouverture. Le Procureur de la République peut saisir le
tribunal pour mettre en cause les dirigeants de fait ou de droit d'une personne
morale en vue d'un comblement du passif de celle-ci.
177. D'une manière générale, la
jurisprudence admet l'appel interjeté par le Ministère public
contre les décisions compromettant des intérêts
légitimes221. si
le Ministère public joue ainsi un rôle important en matière
de redressement judiciaire en droit français, il semble par contre un
peu oublié en droit camerounais dans le même domaine.
B. Le silence du législateur camerounais sur
l'action du Ministère public en matière de redressement
judiciaire
Le Cameroun est l'un des pays qui ont signé le
traité OHADA, Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires afin de garantir la sécurité juridique des affaires dans
l'espace portant ce nom. Ce traité a été suivi par
l'adoption de nombreux actes uniformes dont celui portant procédures
collectives d'apurement du passif entré en vigueur le 1er janvier 1999.
C'est dire que le droit des entreprises en difficulté est actuellement
régi au Cameroun par cet acte uniforme.
178. Comme la plupart des législations des
états parties de l'OHADA, le droit camerounais n'a jamais utilisé
la saisine du tribunal par le Ministère public en vue de provoquer
l'ouverture d'une procédure collective à l'endroit d'une
entreprise222. C'est également le cas de la saisine d'office
par le juge. Si ce dernier cas a été résorbé par le
législateur OHADA, il en va tout autrement du premier. Car l'acte
uniforme OHADA ne mentionne nulle part la possibilité pour le
Ministère public de provoquer l'ouverture d'une procédure
collective. Si M. SAWADOGO estime que cette absence peut se justifier par une
supposition de la part du législateur OHADA que les
éléments d'information disponibles entre les mains du
Ministère public pourraient être facilement communiqués
à la juridiction compétente afin qu'elle se saisisse
elle-même, il convient de mentionner comme le fait d'ailleurs cet auteur
que, cette saisine indirecte et officieuse est moins efficace que la saisine
directe du tribunal par le Ministère public. En effet la saisine du
tribunal par le Ministère public oblige ce dernier à exposer le
bien-fondé de sa prétention comme le fait tout plaideur, et de
faire connaître ainsi au
221
Cass. Com. 24 juin 1986, D. 1986. 2.
panor. 250.
222 FILIGA (M) SAWADOGO, droit des entreprises en
difficulté OHADA, collection droit uniforme africain, p 117.
tribunal l'ampleur de la situation de l'entreprise sur l'ordre
public
179. Le rôle du Ministère public comme partie
principale dans le domaine du traitement des entreprises en difficulté
observé ci-dessus, notamment en droit français devrait
également lui être reconnu par le législateur OHADA dans la
mesure où cela permet de garantir efficacement le respect de l'ordre
public, motif pour lequel l'action du Ministère public tend à
être généralisée en matière civile
Section II : la généralisation
controversée de l'action d'office du parquet pour la défense de
l'ordre public
Un principe résultant de la loi des 16-24 août
1790 énonce que l'action en justice en matière civile est
réservée à ceux dont les droits ou intérêts
ont été lésés. Le Ministère public
intervient en principe comme partie jointe et exceptionnellement comme partie
principale dans les cas expressément énoncés par la loi.
Le problème s'est posé relativement à son action d'office
pour la défense de l'ordre public en dehors des cas légaux. Une
controverse a été animée par la doctrine et la
jurisprudence (paragraphe 1) interpellant le législateur dont
l'intervention reste encore attendue en droit camerounais (paragraphe 2)
Paragraphe I : la controverse doctrinale et
jurisprudentielle
La controverse est née de la rédaction de
l'article 46, alinéa 2 de la loi du 20 avril 1810 qui
énonçait que : « il (le Ministère public)
surveille l'exécution des lois, des arrêts, des jugements ; il
poursuit d'office cette exécution dans les dispositions qui
intéressent l'ordre public ». Deux thèses se sont alors
affrontées relativement à son interprétation (A) et la
jurisprudence a pris position (B).
A. Les thèses de la controverse
La thèse restrictive s'est opposée à la
thèse extensive
180. Pour la thèse restrictive,
l'interprétation de l'article 46 ne devrait pas commencer à
l'alinéa 2, puisque son alinéa premier dispose que le
Ministère public ne peut agir que « dans les cas
spécifiés par la loi ». L'alinéa 2 de ce fait,
ne lui aurait permis de prendre sans texte que des mesures d'exécution
en dehors de tout procès. Les auteurs de cette
thèse223 estimaient que si le Ministère public est
habilité à agir quand l'ordre public est intéressé,
il ne s'agirait, d'après les conceptions libérales, que d'un
ordre public défini par le législateur qui délimite par la
même occasion les cas où cette intervention est possible.
181. La thèse extensive quant à elle, admet que
le Ministère public peut agir en vertu de
223 VINCENT, la procédure civile n° 188 et suivants, la
procédure civile et l'ordre public, mélanges ROUBIER, tome 2, p.
303, ouvrage cité par ELOUNDOU ELOUNDOU, op. Cit. p. 57.
l'article 46, alinéa 2 précité,
dès lors que l'ordre public est intéressé. Puisque,
estime-t-elle, étant gardien de cet ordre, le Ministère public
peut juger de l'opportunité d'intenter une action devant le juge civil
lorsque les parties ne le font pas s'il lui apparaît que l'ordre public
est menacé. Cette thèse a été soutenue par des
auteurs comme SOLUS et PERROT224.
B. La position de la jurisprudence
182. Pendant la première partie du XIXe siècle,
la thèse restrictive a été adoptée par la
jurisprudence225. Le revirement est intervenu vers la fin de ce
siècle, conduisant à une admission de l'action du
Ministère public en dehors des cas légaux (I) ; admission dont la
généralisation a été limitée (II).
I. L'admission de l'action du Ministère public
pour la défense de l'ordre public
Cette admission a commencé à poindre avec
l'arrêt de la chambre civile de la cour de cassation française en
date du 21 mai 1856.
183. En 1855, M. POTTIER se présenta à
l'officier de l'état civil de Vitré pour le prier de
procéder à la publication de son projet de mariage avec une
demoiselle LOUVIGNE. Le Procureur de la République forma opposition
à la célébration du mariage pour empêcher la
bigamie226. Pottier demanda mainlevée de l'opposition
estimant qu'elle était irrecevable. Le tribunal lui donna raison. Le
Ministère public interjeta appel contre le jugement du 18 juillet 1855
devant la cour de Rennes qui, par arrêt du 22 août 1855, confirma
la décision des premiers juges du fond. Se prononçant sur le
pourvoi introduit contre l'arrêt de la cour de Rennes, la cour de
cassation énonça que : « (...) l'article 46 de la loi du
20 avril 1810 charge le Ministère public de surveiller
l'exécution des lois et de Poursuivre d'office cette exécution
dans les dispositions qui intéressent l'ordre public (...) ».
S'accrochant sur cet argument, la plupart des commentateurs ont
trouvé en cet arrêt la consécration du droit d'action du
Ministère public pour la défense de l'ordre public. Mais des
doutes pouvaient encore subsister au regard de l'argument a fortiori
avancé par la cour227. D'autres arrêts sont venus
confirmer et consolider la
224 SOLUS et PERROT, droit judiciaire privé, tome 1, Paris
1961. N° 879 et suivants.
225 Civ. 29 févr. 1832, jur. Gén., V°
Ministère public.
226 Un acte de naissance inscrit sur les registres de
l'état civil de la commune de Chaumeré sur déclaration de
POTTIER lui-même constatait qu'un enfant était né de lui et
de dame R... son épouse.
227 « que la disposition de la Loi , qui
défend de contacter un second mariage avant la dissolution du premier,
intéresse l'ordre public au plus au degré ; que le
Ministère public qui, aux termes de l'article 184 du code
Napoléon, a le droit d'agir pour faire prononcer en justice la
nullité du second mariage, doit avoir à plus forte raison le
droit de s'opposer à l'accomplissement de ce mariage, de prévenir
ainsi la consommation d'un crime dont il pourrait être obligé de
poursuivre la répression devant les tribunaux
criminels...».
thèse extensive228 en affirmant le droit
d'action du Ministère public, pour des raisons d'ordre public en dehors
des cas spécifiés par la loi229. C'est l'arrêt
BODIN230 en date 17 décembre 1913 qui a apporté des
restrictions à la thèse extensive.
II. Les limites à l'action du parquet pour la
défense de l'ordre public
Loin de se situer aux antipodes de la thèse extensive,
l'arrêt Bodin fait partie de ceux qui la consolident mais en lui donnant
simplement des précisions et restrictions.
184. En Cochinchine, Honoré Bodin avait, en l'espace
d'un mois, demandé et obtenu devant le tribunal la reconnaissance de
près d'une quarantaine d'enfants afin de leur conférer la
nationalité française231. Le Procureur de la
République, sans sous-estimer la virilité de Bodin, a
attaqué ces reconnaissances devant la Cour d'Appel. Par arrêt du
18 novembre 1910, la Cour d'Appel d'Indochine a déclaré
irrecevable la demande du Ministère public procédant d'office et
par voie d'action principale. Le Ministère public s'est pourvu en
cassation devant la Cour de Cassation française. Celle-ci, par le
célèbre arrêt du 17 décembre 1913, décidait
que : « (...) Si, la loi du 20 avril 1810 dispose en son article 46,
qu'en matière civile, le Ministère public agit d'office dans les
cas spécifiés par la loi, le droit d'action du Ministère
public ne s'explique et ne se justifie que dans les circonstances oil
l'ordre public est directement et principalement intéressé
à l'occasion de faits qui y portent une grave atteinte, sans
léser aucun intérêt rival (...)». Ce faisant,
la jurisprudence a donné des précisions (a) et un domaine
restrictifs (b) à l'action d'office du Ministère public pour la
défense de l'ordre public.
a. Les précisions restrictives relatives
à l'action d'office du parquet pour la défense de l'ordre
public.
185. La Cour de Cassation donne deux précisions
essentielles : l'action d'office du Ministère public ne se justifie
premièrement que si l'ordre public est « directement et
principalement intéressé » et ensuite si « les
faits lui portent gravement atteinte ».ainsi, estimet-elle,
« les questions de filiation et de paternité intéressent
moins l'ordre public que le repos des familles » ; la reconnaissance
d'enfants naturels ne porterait donc pas gravement atteinte à l'ordre
public. C'est cette position qui fut observée par la jurisprudence
majoritaire postérieurement à l'arrêt Bodin232.
Le tribunal de la Seine dans le jugement du 3 février 1948,
228 Cass. civ. 24 déc. 1901, S. 1902.1.363, note E.H.
PERREAU
229 GLASSON, TISSIER et MOREL, traité, 3e
éd. T. I, n° 188.
230 Cass. civ. 17 déc. 1913, DP 1914. 1. 261, note Binet ;
S. 1914. 1. 153, note Ruben de Couder.
231 Ces reconnaissances étaient faites moyennant
rémunération et en fraude de la procédure administrative
prescrite pour l'acquisition de la nationalité française à
cette époque.
232 SOLUS, La jurisprudence contemporaine et le droit du
Ministère public d'agir en justice au service de l'ordre public in
Mélanges Capitant, 1939, p. 769 et s.
Ministère public c/ consorts V. déclare
irrecevable l'action principale du Ministère public en nullité
d'une filiation incestueuse233. Çà a été
également le cas pour les enfants naturels
adultérins234.
186. Ces précisions restrictives ont été
accompagnées par des arguments d'une restriction du domaine de l'action
d'office du Ministère public.
b. Le domaine restreint de l'action d'office du
Ministère public
Si la nationalité se présente comme le domaine
où la thèse extensive a trouvé une pleine expansion parce
que intéressant suffisamment l'ordre public et qui plus est, a
été entériné par le
législateur235, il en va tout autrement des autres domaines
tels que celui de la filiation et tout ceux où l'ordre public risque de
léser « un intérêt rival ».
187. L'on peut se demander ce qui serait constitutif de
l'intérêt rival. La jurisprudence Bodin donne un début de
réponse à cette préoccupation : il s'agit par exemple de
« l'honneur et (du) repos des familles ». De l'avis
de certains auteurs236 il pourrait s'agir de tous les cas où
l'action du Ministère public comporterait des risques d'arbitraire, ou
entraînerait des troubles plus dangereux. Toutes ces tergiversations
interpellent le législateur pour plus de clarté.
Paragraphe II : La nécessite D'une Solution
Législative
Si le législateur camerounais est resté
indifférent (B) jusqu'ici, ce n'est pas le cas du français qui a
élargi considérablement le domaine de l'action d'office du
parquet (A)
A. La solution du législateur français
188. Dans le Nouveau Code de Procédure Civile, le
législateur français a pris position en faveur de la thèse
extensive. En effet, après avoir énoncé à l'article
422 que Le Ministère public agit d'office dans les cas
spécifiés par la loi, il ajoute qu' « En dehors de ces
cas, il peut agir pour la défense de l'ordre public à l'occasion
des faits qui portent atteinte à celui-ci ».
La notion d'ordre public237 étant fuyante,
le champ d'action du Ministère public se trouve ainsi
indéfiniment vaste. Ce d'autant plus que, selon la chambre des
requêtes, lorsque la
233 « (...) en matière d'état des
personnes, le législateur n'a admis qu'un petit de dérogations
à cette règle prohibitive (...). Le Ministère public ne
peut donc pas demander l'annulation de la reconnaissance d'un enfant
incestueux, émanant du père et postérieur à l'acte
de naissance, qui porte reconnaissance de la part de la mère
»
234 Cass. civ. 10 juin 1953, D. 1953, 612. JCP 1953. II. 7823,
note J. S ; 29 mars 1955, D. 1955. 429.
235 Art. 129 et s. de l'ordo. Du 19 oct. 1945 portant code de la
nationalité en France ; voir aussi le code de nationalité
camerounais.
236 C'est le cas de TERRE (F) et LEQUETTE (Y), les grands
arrêts de la jurisprudence civile, 11e éd. t. 1,
9-10, p.54.
237 En droit administratif, l'ordre public englobe la
sécurité publique, la salubrité publique, la
tranquillité publique, était depuis l'arrêt du lancer de
nain, la dignité humaine.
notion d'ordre public n'est pas définie par un
écrit visant expressément l'objet du litige, elle découle
de « l'organisation politique, sociale, économique et morale
d'un pays, telle que le législateur, organe de la conscience publique et
gardien de l'intérêt commun l'a conçue
»238. Or toute règle de droit peut participer
à l'organisation politique, économique et sociale dans un
Etat.
En droit français donc, l'ordre public est
désormais la condition nécessaire et suffisante pour la
recevabilité de l'action du Ministère public en dehors des cas
légaux. Il en est de même de la fraude239.
L'intérêt rival ne constitue plus une limite à cette
action. Et le Ministère public en apprécie l'opportunité.
La situation est différente en droit camerounais.
B. L'indifférence du législateur
camerounais
189. La procédure civile camerounaise demeure
régie par le vieux code de procédure civile et commerciale. Les
textes législatifs adoptés en matière de procédure
depuis l'indépendance du pays, certes modifient l'organisation
judiciaire et les attributions des institutions judiciaires dont le
Ministère public, mais ne touchent pas à son droit d'action en
tant que partie principale dans les procès civils et commerciaux. On
pourrait légitimement dire à ce propos que la jurisprudence Bodin
pèse encore de tout son poids. Le législateur, à notre
avis, devait simplement l'ériger en règle de droit pour
éviter les immixtions injustifiées du Ministère public
dans les affaires privées. Même comme le Ministère public
use rarement de cette faculté. C'est dire que la position du
législateur français n'est pas à imiter.
Conclusion du chapitre II
190. Au terme de ce chapitre, on peut noter que le rôle du
Ministère public comme partie principale consiste en la défense
d'intérêts divers et louables.
Il défend les incapables, l'institution du mariage, la
filiation et la nationalité dans leurs différents aspects
frauduleux. Il veille au respect de l'ordre public dans les cas légaux
et en dehors de ceux-ci. Si ce rôle est plus complet en droit
français malgré quelques débordements, la situation est
tout à fait différente au Cameroun.
191. Certaine situations intéressant la paix sociale
et donc l'ordre public comme celle des entreprises en difficulté, ne
font pas partie des cas légaux de l'action d'office du Ministère
public au Cameroun du fait du silence de la législation OHADA à
propos. En outre, le législateur devrait se prononcer sur l'action
d'office du Ministère public.
238 Req. 4 nov. 1946, S. 1947. 1. 43.
239 TGI châlon-sur-Marne, 16 févr. 1972, Gaz. Pal.
1972. 2. 477, note P. Decheix.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
192. Le procès civil qui résout les conflits
d'intérêts privés, est également le domaine
oüla loi et l'ordre public sont intéressés. Le
Ministère public y joue alors un rôle non moins
considérable et intervient de deux manières.
Il intervient par voie de réquisitions ou de
conclusions dans un procès déjà engagé par les
parties principales. Il est alors partie jointe et reçoit communication
des dossiers de procédure obligatoirement ou facultativement, aux fins
de donner son opinion sur l'application de la loi et de protection
d'intérêts divers. Ces intérêts sont parfois si
importants, antagonistes et égoïstes que son intervention par voie
d'action est permise. Il agit alors comme demandeur ou défendeur dans
les cas légaux. Une possibilité d'action pour la défense
de l'ordre public en général lui est reconnue par la
jurisprudence, et même par le législateur sur d'autres cieux.
193. Ce rôle en matière civile est d'une
importance considérable. Non seulement son intervention éclaire
le juge sur l'interprétation de la loi, mais en plus, elle assure la
défense de certaines institutions et personnes que l'on pourrait
qualifier de faibles à l'instar des incapables majeurs et mineurs, des
absents et disparus... Il contribue également à la garantie de la
bonne administration de la justice à travers son intervention dans
l'exécution des décisions de justice non répressive et les
procédures particulières telles que la prise à partie, la
récusation des magistrats, le déclinatoire de
compétence...
194. Cependant, ce rôle a un
domaine disparate et très vaste, et manque par ailleurs de fil
conducteur. Ceci est source d'insécurité juridique du fait de
l'imprévisibilité de ses interventions qui pourraient constituer
des immiscions dans les affaires privées. Si la modicité de ses
moyens ne lui permet pas à l'heure actuelle d'opérer de telles
intrusions, il faut tout de même reconnaître que cela ne constitue
pas une garantie certaine pour les justiciables en matière de
procédure civile. Leurs affaires peuvent se trouver menacées Car
une simple action de la part du parquet peut constituer un frein
considérable à la réussite d'une affaire, celle-ci
reposant sur la célérité. La systématisation de
l'intervention du Ministère public en matière civile se
présente donc comme une nécessité imparable.
L'axe principal de cette théorie pourrait bien entendu,
être la défense de la loi et de l'intérêt
général comme en matière pénale. En effet c'est le
législateur qui prévoit des dispositions protectrices de
certaines personnes ; c'est également lui qui devrait fixer des limites
à l'action du Ministère public dans les procès civils.
Ceci permettrait de concilier l'intérêt général et
les intérêts privés du fait de la clarté qui en
résulterait. La doctrine est donc interpellée afin que
l'intervention du législateur, le moment venu, soit concluante.
195. Institution aux fonctions multiples et diverses, le
Ministère public est un acteur fondamental dans les procès qui se
déroulent devant les juridictions de droit commun. Il y intervient
tantôt comme partie principale en matière pénale et
exceptionnellement en matière civile pour la défense de l'ordre
public et d'intérêts divers, tantôt comme partie jointe en
toute matière devant la Cour Suprême ainsi qu'en matière
civile pour donner son avis sur l'application de la loi. Il est pour ainsi
dire, le gardien de la loi et de l'ordre public. Là est le fondement de
ses fonctions en tant que magistrat.
196. Mais le Ministère public est également
chargé de suivre et de veiller à l'application de la politique
gouvernementale. Ceci a pour conséquence de faire de ses magistrats, des
agents du gouvernement et comme tel, soumis à l'autorité
hiérarchique du Garde des Sceaux. Se pose alors le problème du
fondement de l'institution même du Ministère public : est-il le
représentant de l'exécutif ou celui de la société
auprès des juridictions ? La réponse à cette interrogation
est fondamentale pour la justification de l'organisation du Ministère
public d'une part, celle du statut de ses magistrats d'autre part, deux aspects
pouvant être considérés comme les garanties essentielles de
l'efficacité de sa mission.
A cette interrogation, la doctrine dans sa grande
majorité240, décline pour la thèse selon
laquelle le Ministère public serait un corps de «
magistrats-fonctionnaires »241. C'est cette vision qu'a
également le législateur camerounais lorsqu'il prévoit
dans le statut de la magistrature que « les magistrats du parquet
(...) relèvent administrativement de la seule autorité du Garde
des Sceaux »242. On peut dire avec M-L RASSAT que
cette dualité de nature est difficilement conciliable. Cela est
d'ailleurs perceptible au Cameroun et susceptible de compromettre grandement
l'indépendance de la justice et partant, la garantie de l'Etat de
droit.
197. Le législateur de 2005, dans le souci de
concilier les impératifs de protection de l'ordre public et de
sauvegarde des droits et libertés des citoyens, a modifié
considérablement les attributions du Ministère public. S'il l'a
fait en lui confiant la charge de veiller au respect des droits et
libertés du citoyen dans la phase policière du procès, en
le dessaisissant de la qualité de magistrat instructeur ou enfin, en
accentuant son action dans les phases de jugement et de l'exécution des
décisions de justice par le renforcement du caractère accusatoire
du procès, il faut souligner qu'il a également manifesté
le désir de faire du Garde des Sceaux, le véritable titulaire de
l'action publique et le maître du procès pénal.
Le législateur a en effet, non seulement gardé un
silence aberrant sur l'ordre du
240 M-L RASSAT, le Ministère public entre son passé
et son avenir, Paris, LGDJ 1967 p.247
241 Cette doctrine avançait au soutien de son point de
vue que ces fonctions ne s'exercent jamais simultanément mais toujours
successivement : les officiers du Ministère public seraient uniquement
fonctionnaires dans leurs parquets, et magistrats à l'audience.
242 Art. 3 Décret n° 95/ du 8 mars 1995 portant
statut de la magistrature.
Ministre de la justice au Ministère public d'engager ou
non les poursuites, mais aussi renforcé la subordination
hiérarchique entre parquets et a conféré au
Ministère public la possibilité d'arrêter les poursuites
à tout stade de la procédure sur autorisation du Garde des
Sceaux. Ce qui, dans un système de liberté243 comme
celui du Cameroun, signifie que le Garde des Sceaux jouit d'une totale
liberté en ce qui concerne l'ordre d'engager ou non les poursuites et
qu'il a également une totale maîtrise de l'action publique du fait
de la hiérarchie qui le place au dessus des parquets.
198. Si la subordination hiérarchique constitue une
garantie pour le gouvernement de veiller au respect de la politique par lui
définie, il convient de dire que cette subordination hiérarchique
devrait être limitée pour permettre aux magistrats du parquet de
remplir également leurs fonctions judiciaires en toute quiétude.
Or ces limites au Cameroun souffrent d'une fragilité plutôt
injustifiable. En effet, si la liberté de parole à l'audience est
compromise par les dispositions de l'article 3, al. 3 du Décret de
1995244, le pouvoir propre des chefs des parquets quant à
lui, ne pourrait être mis en oeuvre que par les magistrats jaloux d'une
certaine éthique professionnelle245 et assez audacieux, au
regard du régime disciplinaire auquel ils sont soumis et de
l'amovibilité qui les caractérise.
199. Les freins à l'indépendance des magistrats
du parquet et l'influence possible de l'exécutif sur le procès et
donc sur la justice pénale sont susceptibles des mêmes
conséquences en matière civile, domaine où le rôle
du Ministère public est par ailleurs caractérisé par un
manque de systématisation criarde.
200. Il conviendrait à notre avis, pour la garantie de
l'efficacité du rôle du Ministère public, de faire de lui
un corps de magistrats, « représentants de la
société auprès des tribunaux chargés simplement de
tenir compte du point de vue du gouvernement 246». Ces
magistrats bénéficieraient ainsi de l'inamovibilité
réelle et d'un régime disciplinaire qui leur permettrait
d'être moins soumis à l'exécutif comme c'est le cas
aujourd'hui. On pourrait créer au sein du Conseil Supérieur de la
magistrature, qui serait lui-même reconfiguré dans sa composition,
un organe spécial qui prendrait des sanctions disciplinaires à
l'égard des
243 On sait qu'un système de liberté est celui
dans lequel tout ce qui n'est pas proscrit est permis. Il est opposé au
système d'interdiction c'est-à-dire celui dans lequel tout ce qui
n'est pas permis est interdit.
244 Art. 3 al. 3 « leur liberté de parole ne
s'exerce à l'audience, lorsque des instructions leur ont
été données, qu'à condition qu'il aient
préalablement et en temps utile, informé leur chef
hiérarchique direct de leur intention de s'écarter oralement des
réquisitions ou conclusions écrites déposées
conformément aux instructions reçues ».
245 Ethique dont on peut légitimement douter au regard
des réalités sociales camerounaises. Notamment les fraudes
souvent enregistrées au concours d'entrée à l'Ecole
Nationale d'Administration et de Magistrature (88 candidats au concours
d'entrée au cycle "B" de l'Ecole pour l'année académique
en cours, convaincus de fraude ont été suspendus pour trois ans
de toute présentation audit concours par Le conseil académique de
cette institution, réuni le 20 juillet 2007.)Et la corruption qui nous a
valu, il y a quelques années une couronne mondiale.
246 M-L RASSAT, le Ministère public entre son passé
et son avenir, op. Cit. p.247
magistrats du parquet. Ce qui constituerait une certaine
unification des régimes disciplinaires des magistrats du parquet et du
siège.
201. Par ailleurs, la
modicité des moyens du parquet rend parfois son rôle ineffectif au
point de compromettre la défense de l'ordre public et la sauvegarde des
droits et libertés des citoyens. Il conviendrait donc de doter les
parquets de moyens humains, matériels et financiers suffisants pour
remédier à ce problème. Bien que l'ineffectivité de
la couverture du territoire national par les tribunaux soit conjoncturelle, il
serait tout à fait judicieux que les pouvoirs publics tiennent compte de
cette question pour mettre fin au cumul de compétence et permettre au
droit existant de se réaliser, cette « réalisation qui
est la vie du droit et qui est le droit luimême » puisque
« ce qui ne se passe point dans la réalité, ce qui
n'existe que sur du papier n'est qu'un fantôme du droit, ce ne sont que
des mots »247.
247 IHERIN, cité par R DEMOGUE, les notions fondamentales
du droit, p. 8
INDEX ALPHABETIQUE
A
abrogation
· 40
accusateur
· 48, 49, 50
accusation
· 2, 5, 33, 38, 48, 49, 51
accusé
· 38, 40, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 66
acquittement
· 22, 49, 55 action civile
· 43,
45
action en recherche de paternité
· 76
action publique
· 5, 10, 24, 35, 38, 39, 40, 41, 42, 43,
44,
45, 46, 47, 49, 53, 59, 60, 61, 97
administration légale
· 70, 82, 83
administration pénitentiaire
· 56, 57
adoption
· 72, 82, 83, 88 amendes
· 2, 9,
58, 59, 61 amendes forfaitaires
· 58 amnistie
·
40
amovibilité
· 4, 5, 98
auditions
· 13, 26, 38
autorisation
· 12, 13, 14, 19, 20, 34, 98
C
causes communicables
· 78 cessation des paiements
· 87, 88
chambre de contrôle de l'instruction
· 33, 47, 66
changement de nom
· 72
chose jugée
· 40, 55
citation directe
· 40, 43, 44, 47 classement sans
suite
· 40, 42 commission rogatoire
· 10, 30 communication
facultative
· 73 communication judiciaire
· 73 communication
légale
· 65, 66 consignation
· 45
contradiction
· 54, 72, 74, 75, 76, 77, 79
correctionnalisation
· 39
crimes
· 5, 23, 28, 35, 40, 46 cross-examination
· 50
culpabilité
· 10, 48, 49, 50 curatelle
·
84
D
demandeur · 64, 66, 69, 85,
|
|
86,
95
|
|
dessaisissement · 10,
|
11,
|
29,
|
31
|
|
détention préventive ·
|
27
|
|
|
|
détention provisoire ·
|
21,
|
26,
|
27, 28,
|
29, 35
|
dossier de l'instruction
· 25, 26
douanes
· 45
double degré d'instruction
· 32
droits de la défense
· 14, 19, 27, 34, 50 droits
et libertés individuelles
· 6, 17, 22, 60
E
eaux et forets
· 45
effet suspensif
· 52, 54
enquête préliminaire
· 10, 11, 14, 15, 18,
19, 23, 29, 61 état civil
· 68, 69, 80, 85, 86, 90
examen médical
· 21
examination-in-chief
· 50
exercice de l'action publique
· 38 extra petita
· 75
F
filiation
· 44, 68, 69, 82, 91, 92, 93
fisc
· 45
flagrant délit
· 20, 35, 40, 47 frais de justice
· 6, 58, 61 frais de procédure
· 6, 65
G
garde à vue
· 13, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 61
Garde des Sceaux
· 5, 41, 42, 97, 98
greffier
· 26, 47, 52, 53, 56, 58, 66, 67, 74, 79
H
huissier de justice
· 44 hypothèque légale
· 82, 83
I
impartialité
· 71
inamovibilité
· 98
incarcération
· 56, 59, 60
incrimination
· 39
inculpation
· 27, 29, 30, 34, 35 inculpé
· 26, 27, 28, 29, 31, 40 indépendance
· 3, 4, 31, 73,
93, 97, 98 indices
· 16, 19
indivisibilité
· 4, 54, 60, 71 infra
petita
· 75
instruction préparatoire
· 24, 30, 31, 38
interception des communications
· 13
intérêt de la justice
· 6, 68, 71
intérêt général
· 23, 57, 95
interrogatoire
· 13, 35, 48, 50, 53 irrecevabilité
·
52, 54
irrécusabilité
· 4
irrécusable
· 6
irresponsabilité
· 4, 5, 71
J
juge d'instruction
· 3, 10, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 31,
33,
34, 35, 36, 38, 40, 44, 45, 46, 47
juge d'instruction
· 10, 24, 30, 33, 36
jugements avant dire droit
· 53
jugements définitifs
· 53
juridictions
· 3, 4, 5, 43, 47, 54, 65, 68, 69, 71, 73,
77, 97
L
légalité des délits et des peines
·
39
légitimation
· 72
légitime défense
· 50
l'enquête de flagrance
· 11, 16 liquidation
judiciaire
· 88
M
magistrat instructeur
· 24 magistrats du
siège.
· 4, 54 mandat
· 3, 12, 13, 17, 59 mariage
· 68, 69, 80, 82, 84, 85, 90, 91, 93
mémoire ampliatif
· 66 mémoire en
réplique
· 66 mémoire en réponse
· 66
mineurs
· 24, 35, 43, 65, 70, 80, 82, 95
N
nationalité · 68, 69, 80, 85, non lieu ·
22, 25, 33, 36 notifications · 6
nullité · 13, 14, 15, 18, 21, 91, 92
|
86,
33,
|
91,
34,
|
92,
44,
|
93 47,
|
52,
|
77,
|
79,
|
84,
|
O
opportunité · 6, 11, 39, 40,
|
41,
|
42,
|
46,
|
61,
|
73,
|
90,
|
93
|
|
opposition
· 6, 13, 52, 53, 54, 66, 70, 72, 86, 90
ordonnance
· 3, 5, 10, 16, 21, 25, 28, 33, 45, 47, 59, 82, 84
ordre public
· 6, 7, 14, 15, 41, 61, 62, 64, 65, 68, 72,
76,
77, 79, 80, 85, 87, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 97, 99
P
paix publique
· 34
partie civile
· 6, 42, 43, 44, 45, 47, 48, 49, 50, 51,
58, 59, 77
partie jointe
· 4, 6, 7, 63, 64, 65, 66, 71, 76, 77, 79,
85, 89, 95, 97
perquisitions
· 12, 15, 17, 29
pièces à conviction
· 14, 15
plainte avec constitution de partie civile
· 24, 34, 43,
44, 46
plumitif
· 48
police administrative
· 11
police judiciaire
· 10, 11, 12, 14, 15, 17, 18, 19, 20,
21,
22, 23, 24, 29, 36, 38, 51, 53, 58
pourvoi dans l'intérêt de la loi
· 6, 55
pourvoi en cassation
· 6, 52, 54, 79
prescription
· 40, 42, 59, 77
présomption d'innocence
· 9, 10, 18, 27, 38, 47,
48, 50, 60
preuve de la communication
· 78, 79
preuves
· 11, 17, 18, 48, 50, 51, 60
prévenu
· 28, 38, 40, 44, 47, 48, 49, 50, 51, 60
principe dispositif
· 74, 75, 76, 79
prise à partie
· 71, 95
procès équitable
· 9
procureurs du roi
· 2
puissance paternelle
· 69, 70, 82
R
récidive
· 57
recouvrement
· 9, 58, 60, 61, 62
récusation
· 31, 71, 83, 95
redressement judiciaire
· 80, 86, 87, 88 re-examination
· 50
règlement de juges
· 71
renvoi
· 25, 28, 33, 47, 71, 88
réquisitoire définitif
· 36
réquisitoire introductif
· 24, 34, 40, 47
réquisitoire supplétif
· 34
responsabilité
· 4, 15, 21, 27, 28, 43, 45, 59,
71 rétractation du consentement
· 15
retrait de la plainte
· 40
S
saisies
· 12, 13, 15, 17, 29, 71 saisine
· 24,
33, 45, 66, 88
sanctions disciplinaires
· 22, 99 sécurité
juridique
· 39, 88
séparation des fonctions de justice répressive
· 10, 46,
61, 73
subordination
· 4, 5, 31, 41, 42, 98 subordination
hiérarchique
· 4, 5, 41, 42, 98
surveillance judiciaire
· 26, 28, 29
suspect
· 10, 12, 15, 16, 18, 19, 20, 21, 27, 32, 35,
40, 49, 60, 61
T
témoins
· 12, 27, 46, 48, 50, 53, 60
transaction
· 40
U
ultra petita
· 75
V
visites domiciliaires
· 12, 15, 29
voies d'exécution
· 62
voies de recours
· 6, 38, 51, 52, 54, 55, 61, 80
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nouveau code Cahiers de mutation, n°038, Ydé, juillet 2006 p
3
· TJOUEN (A. D) l'exécution des décisions de
justice en droit camerounais, revue internationale de droit
comparé, Paris 2000, pp 429 à 442
· VINCENT (J) la procédure civile et l'ordre public,
Mélanges en l'honneur de Paul ROUBIER, Paris 1961, p 303
WEBOGRAPHIE
· BERLIOZ (J.C) impartialité et objectivité
du Ministère public google
· MARIN (J.C) le Ministère public dans les affaires
civiles et commerciales, google
·
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TABLE DES MATIERES.
AVERTISSEMENTS I
DEDICACES ..II
REMERCIEMENTS ........III
TABLES DES ABREVIATIONS .IV
SOMMAIRE ..VI
RESUME ..VII
ABSTRACT .VIII
INTRODUCTION GENERALE 0
PREMIERE PARTIE : LE MINISTRE PUBLIC, PARTIE PRINCIPALE AU PROCES
PENAL 16
CHAPITRE 1 : LE REAMENAGEMENT DES FONCTIONS DU MINISTERE
PUBLIC DANS LES PHASES PREPARATOIRES DU PROCES 18
SECTION 1 : LE MINISTERE PUBLIC, AUTORITE DES POURSUITES
18
PARAGRAPHE I : LA DIRECTION DES ENQUETES DE POLICE
JUDICIAIRE 19
A. Le Procureur de la République, régulateur .des
actes de l'enquête préliminaire 19
I. La réglementation des actes de l'enquête
préliminaire 19
a. Les actes sur les biens 20
b. Les actes sur les personnes 21
II. Les sanctions des irrégularités 22
a. La sanction des actes irréguliers 22
b. La responsabilité des auteurs des actes
irréguliers 23
B. Le pragmatisme de l'enquête de flagrance 24
I. Les hypothèses de flagrance dans le code de
procédure pénale 24
a. Les cas de flagrance et le cas assimilé 24
b. L'appréciation critique des hypothèses de
Flagrance 24
II. Les pouvoirs exorbitants reconnus aux autorités de
police judiciaire et aux populations 25
PARAGRAPHE II : LE CONTROLE DE LA POLICE JUDICIAIRE PAR
LE MINISTERE PUBLIC 26
A. Le contrôle de La garde à vue par le paquet 26
I. La réglementation de la garde à vue 27
a. Les conditions de la garde à vue 27
1. Les conditions de l'ouverture de la garde à vue 27
2. La durée de la garde à vue 27
b. Les droits reconnus aux suspects pendant la garde à vue
28
II. Les conséquences du contrôle 29
a. La nullité des actes 29
b. La responsabilité de l'officier de police judiciaire
29
B. Le contrôle général effectué par le
Procureur Général près la Cour d'Appel 30
I. L'étendue du contrôle 30
II. L'appréciation critique sur le contrôle de la
police judiciaire 30
a. Le Ministère public, garant des droits et
libertés des suspects 30
b. Les pesanteurs à la garantie 31
SECTION 2 : LA PERTE DE LA QUALITE DE MAGISTRAT
INSTRUCTEUR PAR LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE 32
PARAGRAPHE I : L'INSTRUCTION PREPARATOIRE, PREROGATIVE DU
JUGE D'INSTRUCTION 32
A. Les moyens d'information du juge d'instruction 32
I. Les moyens d'ordre formel 33
a. Les ordonnances 33
b. Les mandats 33
c. Le dossier de l'instruction 34
II. Les moyens d'ordre matériel 34
a. Les actes sur la personne 34
1. Les inculpations, auditions et confrontations 34
2. La détention provisoire 35
3. La surveillance judiciaire 36
b. Les actes sur les biens 36
B. Les modalités de l'instruction préparatoire
37
I. Les commissions rogatoires aux autorités de police
judiciaire 37
II. Les commissions rogatoires aux autres juges d'instruction
37
PARAGRAPHE II : L'APPRECIATION CRITIQUE DE LA PERTE DES
POUVOIRS D'INSTRUCTION PAR LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE 38
A. La résurgence de la séparation des fonctions de
poursuite et d'instruction 38
I. La garantie du droit à un tribunal indépendant
et impartial 38
a. Le droit à un tribunal indépendant 39
b. Le droit à un tribunal impartial 39
II. La garantie d'une bonne justice 40
a. Le frein à la toute puissance du Ministère
public 40
b. Le double degré de l'instruction 40
B. La relativisation de la séparation des fonctions de
poursuite et d'instruction 41
I. L'arrêt de l'instruction par le Ministère public
via le Procureur Général près la Cour d'Appel 42
II. L'exercice des actes d'instruction en cas de flagrance 43
CONCLUSION DU CHAPITRE I 44
CHAPITRE II : LE MINISTERE PUBLIC ET L'EXERCICE DE
L'ACTION PUBLIQUE 45
SECTION I : LE SOUTIEN DE L'ACCUSATION 45
PARAGRAPHE I : LE DECLENCHEMENT PREALABLE DE L'ACTION
PUBLIQUE 45
A. L'appréciation de l'opportunité des poursuites
46
I. Les actes préalables à l'appréciation de
l'opportunité des poursuites 46
a. La vérification de l'incrimination des faits 46
b. La vérification des obstacles aux poursuites 46
II. Le principe l'opportunité des poursuites 47
a. Le fondement de l'opportunité des poursuites 47
b. La subordination hiérarchique comme limite à la
liberté du Procureur de la République 48
B. Le déclenchement des poursuites par d'autres personnes
49
I. Le déclenchement des poursuites par la partie civile ou
victime 49
a. Les conditions du déclenchement de l'action publique
par la partie civile 49
1. Les conditions générales de
déclanchement des poursuites par la partie civile 50
2. Les conditions particulières aux personnes morales
50
b. Les modalités du déclenchement de l'action
publique par la partie civile 50
1. La citation directe 50
2. La plainte avec constitution de partie civile 51
II. Le déclenchement de l'action publique par certaines
administrations 52
III. Le déclenchement de l'action publique par les juges
53
a. Le juge d'instruction et la mise en mouvement de l'action
publique 53
b. Le juge de jugement et le déclenchement de l'action
publique 53
PARAGRAPHE II : LE ROLE ACTIF DU MINISTERE PUBLIC AUX
AUDIENCES PENALES 54
A. La passivité relative du Ministère public en
cas d'admission de sa culpabilité par la défense 54
B. La mobilisation du Ministère public en cas de refus de
culpabilité par la défense 55
I. La production et la discussion des preuves par le
Ministère public 55
a. L'accusation, débitrice principale de la preuve 55
b. La défense, débitrice exceptionnelle de la
preuve 56
II. La confrontation contradictoire des témoins 57
SECTION II : L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS ET
L'EXECUTION DES DECISIONS DE JUSTICE REPRESSIVE PAR LE MINISTERE PUBLIC
58
PARAGRAPHE 1 : L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS
58
A. Les voies de recours ordinaires 58
I. L'opposition 58
II. L'appel 59
B. Les voies de recours extraordinaires 60
I. Le pourvoi en cassation 60
II. La révision 61
PARAGRAPHE II : LE MINISTERE PUBLIC, AUTORITE D'EXECUTION
DES DECISIONS DE JUSTICE REPRESSIVE 62
A. L'exécution des peines privatives de liberté
62
I. Le Ministère public, garant de la paix et de la
sécurité publiques 62
II. L'appréciation critique de l'exécution des
peines privatives de liberté 63
B. L'exécution des condamnations pécuniaires.
64
I. Le rôle du Ministère public dans le recouvrement
des amendes 64
II. L'exécution forcée des condamnations
pécuniaires 65
CONCLUSION DU CHAPITRE II 66
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 68
DEUXIEME PARTIE : LE MINISTERE PUBLIC, PARTIE JOINTE AU PROCES
CIVIL 70
CHAPITRE I : LE REGIME DES COMMUNICATIONS AU MINISTERE PUBLIC,
PARTIE JOINTE 72
SECTION I : L'INFORMATION DU MINISTERE PUBLIC : LES TYPES
DE COMMUNICATION . 72
PARAGRAPHE I : LA COMMUNICATION IMPERATIVE OU LEGALE
72
A. La communication légale devant la Cour Suprême
73
B. La communication dans l'intérêt de la justice et
des particuliers 75
I. La communication dans le but de la protection des
intérêts étatiques 75
a. Les questions relatives à l'état civil 75
b. Les affaires relatives à la nationalité 76
II. La communication pour la défense des faibles 76
a. Les causes relatives à la tutelle, aux incapables et
à la puissance paternelle 76
b. Les causes intéressant les présumés
absents 77
III. La communication dans l'intérêt de la justice
77
a. Les règlements des juges, les récusations et
renvois pour parenté et alliance et les prises à partie 78
b. La communication des affaires gracieuses 79
PARAGRAPHE II : LES COMMUNICATIONS JUDICIAIRE ET
FACULTATIVE 79
A. La communication judiciaire 79
B. La communication facultative 80
SECTION II : LA PROCEDURE ET L'IMPACT DE LA COMMUNICATION
SUR LE PROCES CIVIL 80
PARAGRAPHE I : LA PROCEDURE DE LA COMMUNICATION
81
A. Les modalités de la communication 81
I. L'auteur de la communication 81
II. Les moyens d'intervention du Ministère public 81
B. Le cadre d'intervention du Ministère public 81
I. L'intervention du Ministère public et le principe
dispositif 82
II. L'intervention du parquet et la contradiction 83
PARAGRAPHE II : LA PREUVE ET LA SANCTION DE L'ABSENCE DE
COMMUNICATION 84
A. La preuve de la communication 84
B. La sanction du manquement à la formalité de la
communication 85
CONCLUSION DU CHAPITRE I 86
CHAPITRE II : L'EXTENSION DU ROLE DU MINISTERE PUBLIC DANS LES
PROCES CIVILS : LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC PAR VOIE D'ACTION 87
SECTION I : LE DOMAINE LEGAL DE L'INTERVENTION DU
PARQUET PAR VOIE D'ACTION
87
PARAGRAPHE I : LES CAS LEGAUX D'INTERVENTION DU PARQUET
PAR VOIE D'ACTION DANS LE PROCES CIVIL 87
A. Le Ministère public, protecteur de la famille 87
I. Le Ministère public, protecteur des faibles 87
a. La protection des absents, disparus et personnes
placées dans un établissement d'aliénés par le
Ministère public 88
b. La protection des incapables par le Ministère public
89
1. La protection des mineurs 89
2. La protection des incapables majeurs 91
II. Le Ministère public, protecteur de l'institution du
mariage 91
B. Les actes d'état civil et la nationalité 92
I. Le parquet comme partie principale dans le contentieux de la
nationalité 92
II. L'action du parquet en matière d'actes d'état
civil 93
PARAGRAPHE II : LE PARQUET ET LE REDRESSEMENT JUDICIAIRE
DES ENTREPRISES 93
A. L'action en redressement judiciaire par le Ministère
public en droit étranger 94
B. Le silence du législateur camerounais sur l'action du
Ministère public en matière de redressement judiciaire
95
SECTION II : LA GENERALISATION CONTROVERSEE DE L'ACTION
D'OFFICE DU
PARQUET POUR LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC 96
PARAGRAPHE I : LA CONTROVERSE DOCTRINALE ET
JURISPRUDENTIELLE 96
A. Les thèses de la controverse 96
B. La position de la jurisprudence 97
I. L'admission de l'action du Ministère public pour la
défense de l'ordre public 97
II. Les limites à l'action du parquet pour la
défense de l'ordre public 98
a. Les précisions restrictives relatives à
l'action d'office du parquet pour la défense de l'ordre public 98
b. Le domaine restreint de l'action d'office du Ministère
public 99
PARAGRAPHE II : LA NECESSITE D'UNE SOLUTION LEGISLATIVE
99
A. La solution du législateur français 99
B. L'indifférence du législateur camerounais
100
CONCLUSION DU CHAPITRE II 100
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 102
CONCLUSION GENERALE 103
INDEX ALPHABETIQUE 107
BIBLIOGRAPHIE : 109
TABLE DES MATIERES. 112