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Le role du ministère public en droit camerounais

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par Moustapha NJOYA NJUMOU
Université de Yaoundé II - DEA droit privé fondamental 2006
  

Disponible en mode multipage

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    REPUBLIC OF CAMEROON
    Peace-Work-Fatherland

    REPUBLIQUE DU CAMEROUN
    Paix -Travail- Patrie

    MINISTERE DE
    L'ENSEIGNEMENT
    SUPERIEUR

    MINISTRY OF HIGHER
    EDUCATION

    UNIVERSITE DE YAOUNDE II

    UNIVERSITY OF YAOUNDE
    II

    FACULTE DES SCIENCES
    JURIDIQUES ET POLITIQUES

    FACULTYOF LAW AND
    POLITICAL SCIENCE

    Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes
    Approfondies (DEA) en Droit privé fondamental, option droit civil
    Par :

    NJOYA NJUMOU Moustapha

    Maîtrise en Droit privé
    Sous la direction du

    Pr. Alexandre Dieudonné TJOUEN

    Maître de Conférences associé à l'Université de Yaoundé II
    Avocat au Barreau du Cameroun

    Année Académique 2005-2006

    AVERTISSEMENT

    L a Faculté des Sciences Juridiques et Politiques
    De
    L'Université de Yaoundé II-SOA
    N'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire
    Ces opinions devront être considérées comme propres à leur auteur.

    DEDICACE

    A mon père M. NJUWOU Salifou ;
    A ma mère LINJOUOM Rikiatou,
    A sa coépouse MEFIRE Riratou;
    Qu'ils trouvent en ce travail le début de concrétisation de leurs sacrifices incommensurables.
    Et enfin à ma fille FADILA MOUSTAPHA Mégane, que ce travail soit pour elle un exemple à
    suivre et à dépasser.

    REMERCIMENTS

    Nous rendons grâce à DIEU, Seigneur de l'Univers qui pourvoit à tous nos besoins ; Nos remerciements vont à l'endroit de ceux qui, de près ou de loin ont contribué à la réalisation de ce Mémoire ;

    Nous pensons d'abord au Professeur Alexandre Dieudonné TJOUEN, Maître de Conférence associé à l'Université de Yaoundé II SOA qui, malgré ses multiples occupations, a accepté de diriger ce Mémoire, guidant ainsi nos premiers pas dans la recherche ;

    Nous pensons ensuite à tous les Enseignants de l'Université de Yaoundé II, pour la formation qu'ils nous ont donnée à travers les cours magistraux et les conseils d'aînés qu'ils nous ont prodigués en dehors des amphis théâtre;

    Nous pensons enfin à :

    · M. Issiaka MFONDOUOP, pour ses encouragements et conseils ;

    · M. Choïbou NJIKAM, pour l'éducation qu'il nous a donnée ;

    · La famille AMOUYE, pour le soutien qu'elle nous a apporté ;

    · M. Chouaibou MOUANFON pour son aide ;

    · MM Loudi Simplice FOUNDIKOU et Amidou PEKA pour leurs soutien et assistance ;

    · MM. Amadou MEFIRE, Théophile LEOUSSOUCK et Serge Bernard MVOGO pour leur soutien;

    · Tous mes frères, soeurs, amis et camarades pour les encouragements et le soutien qu'ils nous ont apportés pour le bon accomplissement de ce travail.

    TABLES DES ABREVIATIONS

    · APJ : Agent de Police judiciaire

    · Art : article

    · C. Civ. : Code Civil

    · Cass. Cour de Cassation française

    · CE : Conseil d'Etat

    · Cf. : confère

    · chron. : chroniques

    · CIC : code d'Instruction Criminelle

    · Civ. : chambre civile

    · CP : Code Pénal

    · CPO : Criminal Procedure Ordinance

    · CPP : Code de Procédure Pénale camerounais

    · CPPF : Code de Procédure Pénale Français

    · Crim : chambre criminelle

    · D. : Dalloz

    · éd. : édition

    · GP : Gazette du Palais

    · Ibidem : ici même

    · JCP : Juris Classeur Périodique

    · Jp. : jurisprudence

    · LGDJ : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

    · MP : Ministère Public

    · NCPC : Nouveau Code de Procédure Civile français

    · OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

    · Op. cit. : opere citato : dans l'ouvrage cité

    · OPJ : officier de police judiciaire

    · P. : page

    · PP. : pages

    · PUA : Presses Universitaires d'Afrique

    · PV : Procès Verbal (aux)

    · RASJ : Revue Africaine des Sciences Juridiques

    · Req : chambre des requêtes


    · TGI : Tribunal de Grande Instance

    · TPI : Tribunal de Première instance

    · TPIGI : Tribunal de Première et de Grande Instance

    · UY II : Université de Yaoundé 2 (SOA)

    · UY : Université de Yaoundé d'avant la réforme universitaire

    · V. : Volume

    SOMMAIRE

    INTRODUCTION GENERALE ...1

    PREMIERE PARTIE : LE MINISTERE PUBLIC, PARTIE PRINCIPALE AU PROCES PENAL ..8

    CHAPITRE I : LE REAMENEGEMENT DES FONCTIONS DU MINIST7RE PUBLIC DANS LES PHASES

    PREPARATOIRES DU PROCES ..10 SECTION I : LE MINISTERE PUBLIC, AUTORITE DES POURSUITES .11 SECTION II : LA PERTE DE LA QUALITE DE MAGISTRAT INSTRUCTEUR PAR LE

    PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE 24

    CONCLUSION DU CHAPITRE I 36

    CHAPITRE II : LE MINISTERE PUBLIC ET L'EXERCICE DE L'ACTION PUBLIQUE 38

    SECTION I : LE SOUTIEN DE L'ACCUSATION .38

    SECTION II : L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS ET L'EXECUTION DES DECISIONS DE

    JUSTICE REPRESSIVES PAR LE MINISTERE PUBLIC.51

    CONCLUSION DU CHAPITRE II 60

    CONCLUSION DE LAPREMIERE PARTIE ..61

    DEUXIEME PARTIE : LE MINISTERE PUBLIC, PARTIE JOINTE AU PROCES CIVIL 63

    CHAPITRE I : LE REGIME DES COMMUNICATIONS AU MINISTERE PUBLIC, PARTIE

    JOINTE 65
    SECTION I : L'INFORMATION DU MINISTERE PUBLIC : LES TYPES DE

    COMMUNICATION 65
    SECTION II : LA PROCEDURE ET L'IMPACT DE LA COMMUNICATION SUR LE PROCES

    CIVIL 74

    CONCLUSION DU CHAPITRE I 79

    CHAPITRE II : L'EXTENTION DU ROLE DU MINISTERE PUBLIC DANS LES PROCES CIVILS : LA DE

    FENSE DE L'ORDRE PUBIC PAR VOIE D'ACTION ..80
    SECTION I : LE DOMAINE LEGAL DE L'INTERVENTION DU PARQUET PAR VOIE

    D'ACTION 80
    SECTION II : LA GENERALISATION CONTROVRSEE DE L'ACTION D'OFFICE DU PARQUET

    POUR LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC 89

    CONCLUSION DU CHAPITRE II ..93

    CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 95

    CONCLUSION GENERALE 96

    RESUME

    Le Ministère public est un corps de magistrats établis près les juridictions de l'ordre judiciaire (pénale et civile principalement) ayant pour mission de veiller, au nom de la société et dans l'intérêt général, à la bonne application de la loi et au respect de l'ordre public. L'exercice de cette mission doit cependant tenir compte des droits et libertés des citoyens

    Dans le procès pénal, le Ministère public est toujours partie principale, sauf devant la Cour Suprême où il est en principe partie jointe dans toutes les affaires. L'objectif de concilier les intérêts de la société et les droits et libertés du citoyen est recherché par le législateur camerounais à travers la réorganisation des attributions du ministère public.

    L'efficacité de l'action du Ministère public comme gardien de la loi et du respect de l'ordre public pourrait être garantie par son organisation géographiquement tentaculaire et ses caractères particuliers que sont l'indivisibilité, l'irresponsabilité, l'irrécusabilité, l'indépendance et la subordination hiérarchique.

    Le respect des droits et libertés des citoyens serait assuré à travers le Ministère public par la direction et le contrôle qu'il exerce sur l'activité de la police judiciaire, son dessaisissement de la qualité de magistrat instructeur et le renforcement du caractère accusatoire du procès.

    Dans le procès civil, l'efficacité de son rôle est garantie à travers les types de communication lorsqu'il est partie jointe et par son droit d'action lorsqu'il est partie principale dans les cas spécifiés exceptionnellement par la loi et dans ceux touchant directement et principalement à l'ordre public.

    Des problèmes demeurent cependant, qui pourraient compromettre l'efficacité du rôle du ministère public.

    Les limites à la séparation des fonctions de justice répressive associées à l'organisation hiérarchique du Ministère public et au statut de ses magistrats menacent l'indépendance de la justice répressive et partant l'égalité des citoyens devant la loi.

    Le silence du législateur sur l'intervention du Ministère public en matière de redressement judiciaire et sur son action d'office pour la défense de l'ordre public, constitue un danger pour la protection de l'ordre public et la sécurité des affaires respectivement.

    La modicité des moyens financiers, matériels et humains du Ministère public est de nature à rendre son action ineffective et porter ainsi un coup fatal à l'efficacité de sa mission. Il en est de même de l'immatérialité sur le territoire national de la majorité des tribunaux.

    Le législateur et les pouvoirs publics sont donc interpellés afin que l'indépendance de la justice et l'Etat de droit soient effectivement garantis.

    ABSTRACT

    The public ministry is a body of magistrates established about the jurisdictions of legal order (mainly, the penal and civil orders) having as missions, to provide the society and the general interest, a good application of the law and the respect of the public order. The exercise of this mission must however take account of the rights and freedom of citizens.

    In the penal lawsuit, the public ministry is always the principal party except in front of Supreme Court where it is in fact, the joint party in all affaires. The objective to reconcile the interest of the society, the rights and freedom of citizens is sought by the Cameroonian legislator through the reorganisation of the attributions of the public ministry.

    The effectiveness of the action of the public ministry as care taker of the law and the respect of public order could be guaranteed by is geographical tentacular organisation and its particular characters which are hierarchical subordination, independency, indivisibility, irrecusability and irresponsibility.

    The respect of the rights and freedom of the citizens would be ensured by public ministry by the management and control which exerts on the activity of the judicial police (criminal investigation department), its dispossession of the quality of examining magistrate and the reinforcement of the accusatory character of the process.

    In the civil lawsuit, the effectiveness of its role is guaranteed by the types of communication when it is joint party and by its rights of action when it is principal party exceptionally in cases specified by the law and those touching directly and principally the public order.

    However, the problems that remain could compromise the effectiveness of the role of the public ministry.

    The limits of the separation of functions of repressive justice associated to the hierarchical organisation of the public ministry and to the status of its magistrates, treating the independence of repressive justice and consequently, the equality of citizens before the law.

    The silence of legislator about intervention of the public ministry in regards to judicial rectification and on its action of the duty to defence the public order, constitutes a danger to the protection of the law and the safety of business respectively.

    The need for financial, material and human means by the public ministry is by nature to render its action ineffective and thus carry a fatal stroke to the effectiveness of its mission. It is the same for the immateriality on the national territory of the majority of the tribunals (courts).

    The legislator and the public authorities are there fore call upon so that the independence of justice and the state of law be effectively guaranteed.

    1. Le terme magistrat est un vocable utilisé pour désigner des personnalités diverses exerçant certaines fonctions dans un Etat1. Le plus souvent, on n'y perçoit que les membres du corps judiciaire chargés de la fonction de juger ; c'est-à-dire les membres de la magistrature assise. Pourtant, à coté des juges qui rendent les jugements et les arrêts, il en existe d'autres qui sont chargés non pas de juger, mais de veiller à l'application de la loi et que l'on a coutume d'appeler « Les magistrats du Ministère public » parce que leur mission consiste uniquement à défendre les intérêts de la collectivité publique et spécialement, de la loi qui en est l'expression.

    2. Le Ministère public est une institution polyvalente2, ambiguë3 et paradoxale4 dont la définition n'est pas des plus aisées. Nous retiendrons, pour nous en contenter, celle de VOLFT (J) qui pense que «le Ministère public est un corps permanent de magistrats spécialisés chargés, au nom de la nation qu'ils représentent, d'agir auprès des tribunaux de l'ordre judiciaire et dans la société civile pour assurer la défense de l'intérêt général et de la liberté individuelle »5

    3. Institution spéciale de droit judiciaire français, le Ministère public a des origines fort anciennes qui trouvent leur source dans la nuit du haut moyen age pour n'apparaître à la lumière du droit qu'au début du XIVe siècle. Ses ancêtres sont les avocats et procureurs du roi qui n'étaient que des avocats ordinaires plaidant pour la défense des intérêts privés du Roi. Au fur et à mesure que s'affermissait l'autorité du monarque, le rôle de ces avocats et procureurs se développait considérablement. AU XVe siècle, les lettres de nomination des avocats du Roi leur interdisaient de plaider pour les particuliers. Au XVIe siècle, cette interdiction fut généralisée et ces avocats devinrent des magistrats intégrés aux parlements et finirent par faire partie des tribunaux. Les avocats et procureurs du Roi furent appelés à surveiller l'application des peines d'amendes qui alimentaient le trésor royal et après la succession de la procédure inquisitoire à la procédure accusatoire, ils eurent le droit d'exercer l'accusation, puis, de la soutenir et formèrent alors le Ministère public. La révolution de 1789 modifia l'institution du Ministère public, qui fut érigée en « agent du pouvoir exécutif auprès des tribunaux ». Le Ministère public moderne vit le jour avec le code d'instruction criminelle (CIC) de 1808, qui lui confia un rôle prépondérant dans les procès pénaux. En 1810, il fut réorganisé en un modèle pyramidal.

    4. L'entrée de cette institution en droit camerounais s'est faite de façon schématique et

    1. Le Président de la République, le maire...

    2. La polyvalence vient du fait que le Ministère public a des fonctions diverses tant sur le plan administratif que judiciaire

    3. L'ambiguïté vient du fait que les membres du Ministère public sont des juges qui ne jugent pas.

    4. Le paradoxe traduit le fait que le Ministère public se présente à la fois comme représentant de la société et du gouvernement auprès des juridictions.

    5. VOLFT (J), le Ministère public, Paris, QUE SAIS-JE ? 1998 P. 6.

    chronologique. L'ex Cameroun oriental a été le premier à accueillir cette institution à l'époque où la SDN (Société Des Nations) l'a placé sous mandat français. En effet le Décret du 22 mai 1924 rendait exécutoires sur le territoire camerounais, les lois et Décrets promulgués en AEF antérieurement au 1er janvier 1924 et partant, le code d'instruction criminelle (CIC) dans lequel étaient prévues les institutions du Ministère public et du juge d'instruction. Son entrée dans l'ex Cameroun occidental s'est faite avec l'ordonnance no 72 / 4 du 26 août 1972 car le Criminal Procedure Ordinance (CPO) applicable dans cette partie du pays ne connaissait pas l'institution du Ministère public ainsi que celle du juge d'instruction. C'est dire que, l'indépendance du Cameroun le 1er Janvier 1960 puis l'indépendance de l'ex Cameroun occidental le 1er Octobre 1961 ou Réunification suivie de l'Unification, ne modifièrent pas la configuration du Ministère public qui restait marquée par une inadéquation géographique et fonctionnelle6.

    Cette situation a pris définitivement fin avec le code de procédure pénale du 27 juillet 2005, entré en vigueur le 1er janvier 2007, uniformisant la procédure pénale sur toute l'étendue du territoire camerounais.

    5. Auprès des juridictions de l'ordre judiciaire, le Ministère public est organisé de façon structurée et hiérarchisée. Cette organisation comporte parfois de nombreux services à la tête desquels se trouve un « Procureur ». Les dispositions de l'article 127 du code de procédure pénale camerounais énoncent que « (...) le Ministère public est suivant les distinctions établies au présent article constitué de l'ensemble des magistrats du parquet7 général de la Cour Suprême, du parquet général de la Cour d'Appel, du parquet du tribunal de grande instance et du parquet du tribunal de première instance.

    Le parquet général de la Cour Suprême comprend le Procureur Général près ladite Cour et l'ensemble des magistrats dudit parquet. Son ressort territorial est celui de la Cour Suprême8.

    Le parquet général de la Cour d'Appel comprend le Procureur Général près ladite cour et l'ensemble des magistrats dudit parquet. Son ressort territorial est celui de la Cour d'Appel9 .

    6. SANY (F.B), le Ministère public au Cameroun, Mémoire de Licence en Droit privé, UY 1975-1976

    7. autre appellation du Ministère public dont l'origine est controversée. Certains auteurs prétendent qu'il est la survivance du temps où le Procureur du Roi n'était pas encore devenu un magistrat et où de ce fait, n'ayant pas sa place à l'estrade (situation à laquelle on est revenu en droit camerounais), exerçait ses fonctions sur le << parquet >> de la salle d'audience. D'autres par contre soutiennent que le mot << parquet >> vient de ce que, dans les salles d'audience, les magistrats du Ministère public sont isolés des magistrats du siège, à l'intérieur d'un << petit parc >>.

    8 Ce ressort s'étend au territoire national

    9 L'article 19 de la Loi du 29 déc. 2006 prévoit que ce ressort est celui d'une région et peut, par Décret présidentiel, être étendu à plusieurs. Ces régions n'étant pas encore effectives, il faut se rapporter aux actuelles provinces.

    Le parquet du tribunal de grande instance comprend le Procureur de la République près ledit tribunal et l'ensemble des magistrats dudit tribunal. Son ressort territorial est celui du tribunal de grande instance10 .

    Le parquet du tribunal de première instance comprend le Procureur de la République près ledit tribunal et l'ensemble des magistrats dudit parquet. Son ressort territorial est celui du tribunal de première instance11... ».

    Les membres de chaque parquet exercent sous le contrôle, la direction et la responsabilité du chef du parquet, les attributions reconnues à celui-ci par la loi.

    6. Au-delà de cette organisation, le Ministère public présente un certain nombre de caractères qui le distinguent profondément des magistrats du siège. Il s'agit de l'indivisibilité, de l'indépendance, de l'irrécusabilité, de l'irresponsabilité, de l'amovibilité et de la subordination hiérarchique.

    L'indivisibilité du Ministère public signifie que les actes de procédure accomplis par chaque membre du parquet sont censés l'être par le parquet tout entier et que les membres du parquet sont interchangeables au cours d'un même procès; ce qui n'est pas le cas des magistrats du siège

    Les magistrats du Ministère public sont indépendants à la fois à l'égard des juridictions et des justiciables.

    L'indépendance des magistrats du Ministère public à l'égard des juridictions auxquelles ils sont rattachés se traduit par le fait qu'ils ne peuvent recevoir ni instructions, ni blâmes de celles-ci relativement à leurs actes et paroles. En outre, ces juridictions ne peuvent pas leur refuser la parole.

    A l'égard des justiciables, l'indépendance du Ministère public se manifeste par le fait que les transactions, désistements au profit des délinquants ne le lient aucunement ; il est toujours libre d'engager les poursuites à leur égard.

    Le Ministère public, du fait de sa qualité de partie principale et indispensable au procès pénal, ne peut pas être récusé; il n'est pas remplaçable à la manière d'un magistrat du siège lorsqu'il est soupçonné de partialité. Dit-on, on ne peut pas demander la substitution, mieux, la neutralisation12 de son adversaire. Cependant le Ministère public est récusable en matière civile pour les mêmes causes que les magistrats du siège lorsqu'il est partie jointe13. Ceci peut se justifier par le fait qu'il n'est pas dans ce cas une véritable partie au procès.

    10 Ce ressort est celui du territoire d'un ou de plusieurs départements (art. 16, loi du 29 déc. précitée)

    11 Ce ressort est celui d'un ou de plusieurs arrondissements (art. 13, même Loi)

    12 Cette neutralisation viendrait du fait de l'indivisibilité du Ministère public ; la récusation d'un membre du parquet pouvant traduire celle du parquet tout entier.

    13 Art. 161 CPCC et art. 591 et s. CPP

    L'irresponsabilité du Ministère public est de Principe .Il ne peut ni être condamné à payer des dommages et intérêts lorsqu'il intente une action à tort, ni être condamné à payer les frais du procès14 lorsqu'il succombe. Cette irresponsabilité garantit l'absence de timidité dans l'action des magistrats du parquet.

    L'amovibilité du Ministère public signifie que leurs nominations, mutations et promotions sont à la disposition du pouvoir politique.

    La subordination hiérarchique du Ministère public traduit sa structure pyramidale. Au sommet se trouve le Ministre de la justice, Garde des Sceaux, bien que ne faisant pas partie du parquet, mais du fait de l'autorité qu'il a sur les procureurs généraux près les Cours d'Appel. Le Garde des Sceaux peut leur adresser des instructions et même leur donner des ordres. Cette autorité est indirectement exercée sur les procureurs de la République par les procureurs généraux dans les limites de leur compétence territoriale. Les procureurs de la République exercent leur autorité sur leurs substituts.

    7. Le Ministère public est une institution commune aux juridictions pénales et civiles de droit commun. Il intervient également devant d'autres juridictions15. Il dispose
    d'attributions multiples et diverses dont l'inventaire exhaustif ne saurait être dressé. Les unes sont coutumières, d'autres se déduisent des principes généraux du droit, ou figurent dans les textes nombreux et épars. Elles se rattachent toutes à la fonction principale du Ministère public et à sa nature hybride c'est-à-dire de représentant de la nation et du pouvoir exécutif auprès des juridictions judiciaires. On peut les classer selon les modes d'intervention du Ministère public (action, proposition et contrôle), selon les objectifs poursuivis par celui-ci (protection, surveillance, administration) ; selon les domaines d'activité (pénal, civil, administratif).

    Par souci de clarté, c'est cette dernière classification que nous retiendrons et uniquement ses aspects pénal et civil ; étant observé que dans chacun d'eux nous retrouverons les autres classifications.

    8. Dans son domaine de prédilection, le pénal, le Ministère public exerce l'action publique. Après investigations que ses membres mènent personnellement, dirigent, délèguent ou surveillent, il porte une accusation publique contre les auteurs des crimes, délits et contraventions devant les tribunaux répressifs, la soutient à l'audience et assure enfin l'exécution des jugements rendus.

    14 Crim. 13 mars 1896, S. 1896, I, 544.

    15 Devant les juridictions d'exception telles que : le tribunal militaire, la Haute Cour de Justice et la Cour de Sûreté de l'Etat. Devant le tribunal militaire, le Ministère public est exercé par un commissaire du gouvernement, un ou plusieurs substituts ; devant la Haute Cour de Justice, c'est le Procureur Général près la Cour Suprême qui fait office de Ministère public alors que devant la Cour de Sûreté de l'Etat, le Procureur Général est assisté d'un ou de plusieurs substituts. La Loi du 29 déc. 2006, n'ayant pas prévu cette juridiction, la doctrine camerounaise estime à raison que celle-ci a disparu avec l'ordonnance du 26 août 1972 qui l'avait créée.

    L'enjeu dans le procès pénal touche de près ou de loin à la liberté et à la sécurité des personnes et des biens. Ce type de procès oppose toujours le Ministère public à X qui a méconnu une ou plusieurs dispositions du code pénal ; la partie civile n'intervenant qu'éventuellement au cas où elle aurait subi un préjudice résultant de l'infraction. C'est le domaine dans lequel l'ordre public est le plus en cause et le Ministère public y est toujours partie principale.

    9. Dans le procès civil, l'opposition se fait en principe entre X et Y, le Ministère public n'intervenant qu'exceptionnellement dans les causes touchant à l'ordre public ou pour représenter certaines personnes. Il y est donc en principe partie jointe et exceptionnellement partie principale.

    La distinction partie principale et partie jointe recèle un intérêt non négligeable sur le plan procédural, notamment en ce qui concerne les actes de procédure, la liberté de conclusion, le tour de parole, le paiement des frais de justice et l'exercice des voies de recours.

    10. En tant que partie principale, le Ministère public est tenu d'accomplir les actes de procédure, de procéder à des notifications,d'être notifié et d'être présent à l'audience ; ce qui n'est pas le cas dans les procès civils lorsqu'il n'est que partie jointe.

    Comme partie principale, le Ministère public est irrécusable, tenu d'assister aux mesures d'instruction après convocation dans les conditions et sanctions identiques à celles de toute autre partie.

    En ce qui concerne le paiement des frais de procédure, le Ministère public ne les paye jamais car c'est le trésor public qui endosse ses charges.

    Le Ministère public peut exercer toutes les voies de recours ordinaires en tant que partie principale et même certaines voies de recours extraordinaires telles que le pourvoi en cassation, le pourvoi dans l'intérêt de la loi ...

    11. Les questions qui se posent sont multiples et relatives à l'opportunité de l'action du Ministère public (opportunité des poursuites) et aux droits et libertés individuelles dans les procès pénal et civil ; autrement dit, le Ministère public peut-il être contraint d'agir ou non ? Dispose-t-il d'une faculté totale d'action dans les procès en question ? L'action du Ministère public rime-t-elle avec le souci de plus en plus grandissant de protection des droits et libertés individuelles ; peut-on parler de l'efficacité et de l'effectivité des fonctions du Ministère public conciliant le respect des droits de l'Homme, l'intérêt général et l'intérêt de la justice ?

    12. L'intérêt du choix de ce sujet par nous, est premièrement d'actualité avec l'avènement historique du premier code de procédure pénale camerounais qui a apporté d'innombrables innovations dans le sens d'une garantie accrue des droits et libertés des justiciables. Deuxièmement, l'opposé des droits et libertés des citoyens étant toujours l'ordre

    public, il nous a paru utile d'analyser la place de l'institution dont la mission essentielle consiste à préserver cet ordre dans l'ensemble du territoire camerounais suite à l'harmonisation des systèmes britannique et français par la reforme. De plus, le Ministère public généralement considéré comme acteur passif dans les procès civils, et mal connu au Cameroun même parmi les personnes cultivées, s'est révélé nécessaire dans une étude comme celle-ci, dans un but didactique. Ce sujet présente en outre un intérêt important, relativement au débat sur l'individualisme et le collectivisme.

    13. A tout prendre et dans un souci de clarté comme déjà dit, nous analyserons le rôle du Ministère public comme partie principale dans le procès pénal, au regard des dispositions du Code de Procédure Pénale camerounais dans une première partie, et comme partie jointe dans le procès civil, dans une seconde partie.

    14. Le code de procédure pénale camerounais (CPP) du 27 juillet 2005 entré en vigueur le 1er Janvier 2007 est l'aboutissement d'une longue réflexion entamée depuis 1973 avec la mise sur pied des commissions de réforme législative. Il poursuit un certain nombre d'objectifs énoncés à l'exposé des motifs du projet de loi16 qui l'a fait naître. Il s'agit notamment, comme déjà dit, de l'harmonisation des règles de procédure sur l'ensemble du territoire national ; de l'adaptation desdites règles aux exigences de sauvegarde des droits du citoyen à toutes les phases de procédure judiciaire ; de l'exécution rapide des décisions de justice ; de la réduction des lenteurs judiciaires et du recouvrement rapide des amendes dès le prononcé de la décision. Pour ce faire, ce code a apporté d'innombrables innovations à la procédure pénale camerounaise. On peut bien se demander si ces innovations n'ont pas affecté le rôle du Ministère public; autrement dit, quelles sont les modifications apportées aux fonctions du Ministère public et quelle appréciation peut-on en faire au regard des objectifs ci-dessus ?

    15. Cette question ne manque pas d'intérêt car elle nous permet de présenter l'acteur principal du procès pénal au regard des grands principes garantissant le droit à un procès équitable17, surtout lorsqu'on sait que sous le couvert de protéger le corps social, on a trop souvent mis en mal les droits de l'individu dans le procès pénal18. En effet, les textes antérieurement applicables en matière de procédure pénale au Cameroun recelaient en eux des insuffisances notoires relativement à la protection et à la sauvegarde des droits et libertés des citoyens. Le législateur essaie d'y mettre un terme à travers le réaménagement des fonctions du Ministère public dans les phases préparatoires au jugement (chapitre 1) et en le mobilisant davantage dans les phases finales du procès pénal (chapitre 2)

    16 Loi N° 2007/007 du 27 juillet 2005 portant code de procédure pénale

    17 Droit prévu par des textes internationaux ratifiés par le Cameroun comme l'article 7 de la charte africaine des droits de l'Homme et des peuples. Ce droit s'apprécie relativement à la longueur du procès, les garanties de la présomption d'innocence, du droit de se défendre, à la garantie de respect de l'intégrité physique et morale...

    18 Voir les textes en vigueur avant 2007 notamment l'Ordonnance N° 72 / 4 du 26 Août 1972 portant organisation judiciaire qui a fusionné les autorités de poursuite et d'instruction pour lutter contre le grand banditisme...

    CHAPITRE 1 : LE REAMENAGEMENT DES FONCTIONS DU MINISTERE PUBLIC DANS LES PHASES PREPARATOIRES DU PROCES

    16. Les phases préparatoires du procès ou phases de recherche peuvent se définir comme celles au cours desquelles sont effectuées des investigations en vue de rassembler les éléments nécessaires à l'établissement de la culpabilité d'un suspect ou à sa décharge. Il s'agit plus concrètement des enquêtes de police judiciaire et de l'information judiciaire, phases fondamentales au cours desquelles toute opération est capitale pour la société et pour l'individu encore sous la protection de la présomption d'innocence. Sous le règne des textes antérieurs19 au code de procédure pénale (CPP), un certain nombre d'atteintes étaient portées aux principes régissant le procès pénal tels que la présomption d'innocence, la séparation des fonctions de justice répressive... Cela pouvait se vérifier par l'absence de réglementation de certaines opérations, la réglementation permissive de certaines mesures privatives de liberté et le cumul des fonctions de poursuite et d'instruction. En effet, l'enquête préliminaire demeurait officieuse et la séparation des trois fonctions de justice répressive respectée dans le code d'instruction criminelle, avait été remplacée par le cumul des fonctions de poursuite et d'instruction séparées de celle de jugement par l'ordonnance de 1972 et ses textes modificatifs.

    17. Le code de procédure pénale de Juillet 2005 a apporté des solutions considérables à ces problèmes à travers la précision des fonctions du Ministère public sur les poursuites (section I) et le dessaisissement du Procureur de la République de la qualité de magistrat instructeur (section II).

    Section 1 : Le Ministère public, autorité des poursuites

    18. En tant qu'autorité de poursuite, le Ministère public est chargé de constater les infractions, d'en rechercher les auteurs et complices, de déclencher l'action publique qu'il exercera devant le juge d'instruction et ou de jugement. Il est aidé dans cette tache par les autorités de police judiciaire encore appelées ses auxiliaires, et sur qui il conserve une autorité après en avoir perdu la qualité comme d'autres magistrats20. Cette autorité se traduit par le

    19 C'est-à-dire le code d'instruction criminelle et le criminal procedure ordinance et les premiers textes d'harmonisation des règles de droit processuel au Cameroun que sont : l'ordonnance précitée et ses textes modificatifs notamment les ordonnances N° 72 / 21 du 19 Octobre 1972, 73/ 9 du 25 Avril 1973, La Loi N° 76/17 du 08 Juillet 1976, la Loi N° 89/019 du 29 Décembre 1989, LA LOI N° 90/ 058du 19 Décembre 1990

    20 Contrairement à ce que pense un auteur dans son exposé sur les relations entre le juge d'instruction et le Ministère public au séminaire sur l'appropriation du code de procédure pénale, exposé N° 6 page 4 en s'appuyant sur les dispositions de l'article 192 qui, en parlant du « magistrat commis » fait référence à un juge d'instruction qui aurait reçu commission rogatoire d'un premier, suivant les dispositions de l'article 191 CPP. Or la lecture des articles 78 et suivants est suffisamment claire pour nous permettre de constater le dessaisissement du Procureur de la République de la qualité d'OPJ. Et surtout lorsqu'on les confronte à celles

    pouvoir de direction (paragraphe 1) et de contrôle (paragraphe 2). Paragraphe I : La direction des enquêtes de police judiciaire

    19. La police judiciaire peut renvoyer selon un auteur camerounais21 à deux acceptions : une fonction et un organe. Comme fonction, la police judiciaire renvoie à l'ensemble d'actes de recherche, de constatation des infractions à la loi pénale, de rassemblement des preuves qui s'y rapportent afin de faciliter l'appréciation de l'opportunité des poursuites ou l'appréciation des preuves. Et comme organe, elle renvoie à l'ensemble d'autorités chargées d'exercer cette fonction.

    Elle se distingue de la police administrative22 mais de façon relative23. Dans son aspect fonctionnel, elle accomplit les actes d'enquête préliminaire régulés par le Procureur de la République (A), régulation tempérée par le pragmatisme dans l'enquête de flagrance (B).

    A. Le Procureur de la République, régulateur .des actes de l'enquête préliminaire

    20. Longtemps restée officieuse, l'enquête préliminaire24 est devenue officielle25 (I) et exercée par les autorités de police judiciaire26 que les articles 78 et 137 (1) CPP placent sous la direction du Procureur de la République27. Cette réglementation constitue une garantie au respect des droits et libertés dont la violation est sanctionnée (II)

    I. La réglementation des actes de l'enquête préliminaire

    21. Le Procureur de la République est le destinataire de toutes les plaintes, dénonciations et procès verbaux (PV). En cas d'infraction, toute personne ayant connaissance

    de l'article 9 CIC qui disposait :« la police judiciaire sera exercée...par les Procureurs de la République ou leurs substituts ; les juges d'instructions ; les juges des sections de tribunaux dépourvus du Ministère public ;l es juges de paix ; ... »

    21 LAM BIDJECK (L) La police judiciaire générale au Cameroun, thèse de Doctorat 3ème cycle Droit privé UY.

    22 Jurisprudences Baud et Noua Lek CE 11 Mai 1951 S 1952 III 13 conclusion DELVOLVE « il y a police judiciaire quand l'opération de police vise à rechercher l'infraction et police administrative quand le but de la mission exercée est le maintient de l'ordre ».

    23 Les deux polices peuvent être exercées par des mêmes agents ; une opération de police administrative peut se transformer en une opération de police administrative accomplie par la même personne c'est le cas de l'agent de police qui dirigeant la circulation routière (opération de police administrative), verbalise un automobiliste ayant violé ses prescriptions.

    24 Selon RASSAT (M-L), elle est appelée ainsi parce qu'elle a lieu avant les actes judiciaires et dans le but de mettre fin aux pratiques qui consistaient à procéder aux enquêtes officieuses après l'instruction régulière.

    25 Elle l'était déjà en droit français depuis le code de procédure pénale

    26 A la lecture des articles 79 et 81 du code de procédure pénale, on peut distinguer les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire qui sont une création du code de procédure pénale, et les fonctionnaires et personnes auxquelles la Loi a reconnu les attributions d'autorité de police judiciaire.

    27 Art 78 CPP « la police judiciaire est exercée sous la direction du Procureur de la République ... » ; art. 137 (1) CPP «le Procureur de la République dirige et contrôle les diligences des officiers de police judiciaire... ».

    de sa commission est ténue d'en informer, soit directement le Procureur de la République, soit tout officier de police judiciaire ou toute autorité administrative de la localité. Cette dernière est ténue de porter cette information à la connaissance du Procureur de la République ou de l'officier de police judiciaire (OPJ) le plus proche. L'OPJ ou l'agent de police judiciaire (APJ) peut, de sa propre initiative ou sur instruction du Procureur de la République, ouvrir une enquête à propos. Dans le premier cas, le Procureur de la République recevra un PV28 qu'il pourra renvoyer pour complément d'enquête ou lui donner une autre suite. L'ouverture d'une enquête préliminaire confère aux autorités de police judiciaire des prérogatives pour effectuer les actes sur les biens (a) ou sur les personnes (b) et qui peuvent porter atteinte aux droits des citoyens. Le Procureur de la République assure donc leur régularité.

    a. Les actes sur les biens

    22. Les actes sur les biens sont les perquisitions, visites domiciliaires et saisies. L'accomplissement de ces actes nécessite en principe un mandat du Procureur de la République ou son autorisation pour éviter les atteintes à l'inviolabilité du domicile, à la vie privée et à l'intégrité des biens des citoyens.

    23. Les perquisitions sont des actes de recherche policière d'éléments de preuve d'une infraction. Elles sont effectuées au domicile de toute personne ou en tout autre lieu où pourraient se trouver des objets dont la découverte serait utile à la manifestation de la vérité.

    Lorsque l'officier ou l'agent de police judiciaire entreprend de procéder à une perquisition, il requiert du Procureur de la République, un mandat de perquisition qui lui donne le droit d'accéder au domicile ou au lieu où se trouveraient les objets suspects. Exceptionnellement, la perquisition peut s'effectuer sans mandat en cas de flagrance ou lorsque le maître des lieux donne son consentement par écrit ou appose son empreinte digitale, au cas où il ne sait pas écrire, sur le PV préalablement au début des opérations. Ce consentement peut aussi être donné par le détenteur des biens ou à défaut, par le représentant du maître des lieux ou celui du gardien des biens. Les personnes objets de perquisition doivent être présentes sur les lieux et être informées de leurs droits de procéder à la fouille de l'OPJ et de s'opposer à la perquisition. Si elles sont absentes, la présence d'un voisin et de deux témoins peut être suffisante. Les perquisitions se soldent éventuellement par la saisie.

    24. Les saisies sont l`appréhension d'objets pouvant avoir une relation avec l'infraction. Elles résultent généralement d'une opération de perquisition ou de visite domiciliaire qui

    28 On distingue les procès-verbaux en renseignement, qui ne sont pas accompagnés de la personne suspecte, et les procès-verbaux un déferrement généralement accompagnés du suspect.

    désigne l'entrée dans un milieu privé aux fins de constat ou de vérification29. Elles peuvent également être autonomes.

    25. Ces trois opérations sont effectuées dans les mêmes conditions30. L'officier de police judiciaire ou l'agent de police judiciaire chargé de mener les opérations ne peut saisir que les biens en relation avec l'infraction pour laquelle la perquisition a été autorisée. Mais il lui est permis de procéder à une saisie se rapportant à une autre infraction si celle-ci est passible d'une peine d'emprisonnement.

    Après les opérations, les biens saisis sont présentés aux personnes présentes afin qu'elles paraphent le PV établi à cet effet; le refus est mentionné audit procès verbal.

    Les mesures ci-dessus ne peuvent s'effectuer qu'entre 6 heures et 18 heures sauf autorisation du Procureur de la République31.

    b. Les actes sur les personnes

    Les actes sur la personne consistent aux auditions, interrogations, arrestations, à l'interception des communications téléphoniques et prises de vue dans les lieux privés éventuellement et aux mesures de garde à vue que nous développerons plus bas.

    26. L'OPJ peut entendre toute personne dont les déclarations lui paraissent utiles à la manifestation de la vérité. Pour ce faire, il convoque la personne concernée qui est tenue de comparaître et de déposer. Si elle s'oppose, l'OPJ en informe le Procureur de la République qui peut décerner contre elle, mandat d'amener afin qu'elle soit conduite devant lui. En cas de non opposition, la personne comparait devant l'OPJ ; celui-ci procède à son interrogatoire. Les questions et réponses sont consignées sur un PV qui, à la fin de l'entretien, devra être signé par la personne entendue et les ratures et autres erreurs, validées par elle sur chaque feuillet. Les PV doivent contenir un certain nombre de mentions32 à peine de nullité.

    L'OPJ ou l'APJ peut aussi procéder à l'arrestation33. Dans ce cas, après avoir décliné son identité, l'OPJ ou l'APJ informe la personne du motif de l'arrestation, puis lui enjoint de le suivre. Aucune atteinte ne doit être portée à l'intégrité physique ou morale de la

    29 Lexique des termes juridiques, Dalloz, 13e édition 2001.

    30 Voir art. 93 et s. CPP.

    31 L'OPJ peut procéder à une saisie après 18 heures si celle-ci a commencé avant sur autorisation du Procureur de la République ou sans cette autorisation en cas d'impossibilité matérielle de le joindre à charge pour lui de l'en informer sans délai. Ceci marque une différence entre les saisies effectuées suivant les dispositions de l'acte uniforme OHADA sur les procédures simplifiées et voies d'exécution. En effet celles-ci prévoient comme intervalle de temps pour effectuer ces opérations, de 8 heures à 18 heures.

    32 Art. 90 « le procès verbal doit énoncer les dates ,et heures du début net de la fin de chaque opération de l'enquête ; les noms, prénoms et qualité de l'enquêteur ; le cas échéant l'autorisation prévue à l'article 88 (2)... »

    33 L'arrestation est une mesure qui consiste pour l'OPJ ou l'APJ à appréhender une personne en vue de la conduire devant l'auteur du titre en vertu duquel elle est effectuée.

    personne arrêtée. La personne concernée est tenue de suivre l'OPJ ou l'APJ. Il a le droit de se faire accompagner par un tiers. En cas de refus de sa part, il sera fait usage de tout moyen coercitif proportionnel à sa résistance. Dans tout lieu public ou ouvert au public, l'auteur d'une contravention, lorsqu'elle refuse de décliner son identité ou donne une identité jugée fausse, peut être arrêté et gardé à vue pendant une période d'au plus 24 heures.

    27. Lorsqu'une personne est arrêtée elle est fouillée par l'OPJ ou l'agent de police devant qui elle est conduite afin que l'inventaire des objets trouvés sur elle soit fait. Après la libération de la personne appréhendée, ceux de ces objets qui ne constituent pas des pièces à conviction lui sont restitués sur procès verbal et le cas échéant, en présence d'un témoin.

    28. Sur autorisation écrite du Procureur de la République, et si l'infraction objet de l'enquête est assortie d'une peine d'emprisonnement d'au moins un an, l'OPJ ou l'APJ peut intercepter, enregistrer ou transcrire toutes correspondances émises par voie de télécommunication ou procéder à des prises de vue dans les lieux privés. Dans le souci de renforcer la garantie au respect des droits des citoyens, le législateur a prévue des sanctions en cas de violation des règles prescrites pour les opérations de l'enquête préliminaire.

    II. Les sanctions des irrégularités

    Les sanctions de l'inobservation des règles fixées pour les opérations sur les biens ou sur les personnes peuvent porter sur les actes (a) ou sur les auteurs desdites opérations (b).

    a. La sanction des actes irréguliers

    29. La principale sanction des opérations et actes irréguliers au cours de l'enquête préliminaire est la nullité. Cette nullité peut être absolue ou relative34.

    Les actes de police judiciaire posée au cours de l'enquête préliminaire portent généralement atteinte aux règles de procédure ; elles sont donc passibles de nullité absolue. Cette nullité peut être soulevée à toute étape de la procédure par la défense ou d'office par la juridiction de jugement.

    L'article 100, alinéa 1 du code de procédure pénale prévoit expressément la nullité des perquisitions irrégulières. Mais permet l'admission des objets saisis comme pièces à

    34 Art. 3 : << (1) la violation d'une rêve de procédure pénale est sanctionnée par la nullité absolue lorsqu'elle : a) préjudicie aux droits de la défense définis par les dispositions légales en vigueur ; b). porte atteinte à un principe d'ordre public. (2) la nullité prévue au paragraphe 1 du présent article ne peut être couverte et. Elle peut être évoquée à toute phase de la procédure par les parties. Il doit etre fait par la juridiction de jugement.

    Art. 4 : << (1) les cas de violation prévus à l'article sont sanctionnés d'une nullité relative. (1) l'exception de nullité relative doit être soulevée par les parties in limine litis et devant la juridiction d'instance. Elle est couverte après cette phase du procès.

    conviction. Ce qui distingue cette nullité de celle de droit commun35. En dehors de la sanction des actes, la responsabilité de leurs auteurs peut être aussi engagée.

    b. La responsabilité des auteurs des actes irréguliers

    30. Les auteurs d'actes irréguliers posés au cours de l'enquête préliminaire peuvent voir leur responsabilité engagée sur le plan pénal, civil et disciplinaire.

    Pénalement, leur responsabilité peut être engagée pour arrestations irrégulières, atteintes aux biens, atteintes à la vie privée...

    Civilement, leur responsabilité peut être engagée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil à condition que l'acte ait causé au suspect un dommage et que, le lien de causalité entre l'acte et le dommage soit établi.

    La responsabilité disciplinaire de l'agent ou de l'officier de police judiciaire, auteur des actes susmentionnés peut également être engagée et entraîner des conséquences sur sa carrière professionnelle.

    S'il est plausible de constater que le suspect bénéficie, grâce à la réglementation de l'enquête préliminaire, d'un ensemble de droits de nature à mettre un terme aux abus dont il faisait l'objet malgré les sanctions de la jurisprudence36 antérieure, on ne devrait pas perdre de vue que cette réglementation demeure permissive.

    31. Les opérations telles que les perquisitions, saisies et visites domiciliaires pourraient encore laisser cours aux abus, le consentement du maître des lieux ou du détenteur du bien étant irrévocable. En effet, à imaginer que ce consentement soit donné pour une inspection superficielle et que par la suite, les investigations soient plus poussées conduisant par exemple au déplacement des objets d'art au risque de les endommager, l'auteur du consentement se trouverait désarmé. Il faudrait donc de sa part la présence d'esprit de refuser dès le début, l'accomplissement de ces actes. Or ce refus pourrait s'interpréter comme étant un comportement dilatoire visant à dissimuler les objets ayant une relation avec l'infraction. Ce qui est de nature à dissuader la personne dont le consentement est sollicité. Le législateur aurait pu raisonnablement prévoir la possibilité d'une rétractation du consentement donné.

    Cette faille constitue une relativisation de la garantie de protection des droits des citoyens, relativisation qui est plus perceptible en cas de flagrance d'infraction au regard du

    35 Ceci peut se justifier par la nécessité de protéger l'ordre public.

    36 TGI NFOUNDI Jugement n° 193 Crim. Du 25 juin 1998 médit : le tribunal a condamné dans cette affaire un commissaire de police principal et un inspecteur de police respectivement à dix ans et à 6 ans d'emprisonnement ferme pour avoir causé la mort par torture, d'un jeune homme de22 ans en novembre 1997 ; TGI MFOUNDI Je n°176 / Crim. Du 5 juin 1998 MP et famille NDJOUEMEGNI c / MOTASSIE Bienvenu Inédit ici 3 policiers ont été condamnés à des pernes allant jusqu'à 1 an d'emprisonnement ferme pour torture (coups et mesures)...

    pragmatisme de l'enquête qui s'ouvre à propos.

    B. Le pragmatisme de l'enquête de flagrance

    Le code de procédure pénale n'a pas donné de définition à la flagrance ; il n'en a prévu que des hypothèses (I) qui donnent lieu à une enquête dont le pragmatisme est de nature à menacer les droits et libertés individuels (II).

    I. Les hypothèses de flagrance dans le code de procédure pénale

    32. Les hypothèses de flagrance sont prévues dans les dispositions de l'article 103 CPP. Ces dispositions permettent de distinguer les cas de flagrance et le cas assimilé à l'infraction flagrante (a), ce qui nécessite une appréciation particulière (b)

    a. Les cas de flagrance et le cas assimilé

    L'article 103 du code de procédure pénale dispose qu': « (1) est qualifié crime ou délit flagrant, le crime ou le délit qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre ; (2) il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque : (a) après la commission de l'infraction, la personne est poursuivie par la clameur publique ; (b) dans un temps très voisin de la commission de l'infraction, le suspect est trouvé en possession d'un objet ou présente des traces ou indices laissant penser qu'il a participé à la commission du crime ou du délit ; (3) il y a également flagrance lorsqu'une personne requiert le Procureur de la République ou un officier de police judiciaire de constater un crime ou un délit commis dans la maison qu'elle occupe ou dont il assure la surveillance ».

    Cet article prévoit quatre cas de flagrance et un cas assimilé à la flagrance. Les cas de flagrance sont : « (...) qui se commet actuellement » ; « (...) qui vient de se commettre » ; « (...) est poursuivie par la clameur publique » ; « (...) dans un temps très voisin (...) ».

    Le cas assimilé à la flagrance est celui de l'infraction commise dans une maison dont l'occupant requiert un constat par un OPJ ou un APJ.

    b. L'appréciation critique des hypothèses de Flagrance

    33. Cet article a supprimé l'infraction flagrante par nature née avec l'ordonnance n° 72 / 17 du 28 Septembre 197237 ce qui est une innovation importante dans la mesure où cette

    37 Cette ordonnance rendait flagrants les infractions suivantes : le vagabondage (art. 347 CP). Le chèque sans provision (art. 253 CP). Le proxénétisme (art. 294 CP) ; le vol, l'escroquerie et l'abus de confiance (art. 318 CP) ; le vol aggravé (art. 320 CP) ; l'escroquerie et l'abus de confiance aggravés (art. 321 CP) ; la prostitution de la jeunesse (art.344 CP) ; l'outrage à la pudeur d'une personne mineure de 16 ans (art. 346 CP) et l'outrage sur mineur de 16 à 21 ans (art. 347 bis CP).

    catégorie d'infractions était source d'injustice du fait de la disproportion des opérations et sanctions qui présidaient à leur procédure.

    Par ailleurs, le législateur camerounais se démarque de son homologue français en écartant de la flagrance, le cas du cadavre lorsque les causes de la mort sont indéterminées38.

    34. Mais le législateur camerounais aurait pu être plus précis dans la délimitation des hypothèses de flagrance. Ceci dans la mesure où les deuxième et quatrième cas de flagrance sont marqués par une imprécision quant au délai d'appréciation de la flagrance au regard des expressions : << qui vient de se commettre », << temps très voisin » ; le cas assimilé à la flagrance n'a par ailleurs plus de raison valable pour son maintien. Ces insuffisances peuvent être une source d'erreurs et d'injustice ce d'autant plus que le constat d'une infraction flagrante entraîne une procédure pragmatique menaçant les droits et libertés individuelles.

    II. Les pouvoirs exorbitants reconnus aux autorités de police judiciaire et aux populations

    35. « Lorsqu'on prend le coupable sur le fait, l'évidence éclate et tout scrupule disparaît »39 ainsi pourrait se résumer l'ensemble des pouvoirs reconnus aux autorités de poursuite et aux populations en cas de flagrance. Celles-ci ont la possibilité de procéder aux arrestations, perquisitions, saisies... sans mandat ; elles bénéficient d'une autorisation légale expresse. Mais en cas de flagrance les OPJ sont ténus d'informer le Procureur de la République et ont l'obligation de se transporter sur les lieux de commission de l'infraction pour éviter que les preuves ou personnes pouvant donner des renseignements ne se déplacent. Ils peuvent faire usage de la garde à vue contre toute personne suspecte, instrumenter hors du territoire de leur compétence. Le Procureur de la République y joue le rôle d'acteur et son arrivée sur les lieux dessaisit les OPJ de plein droit

    36. Si les actes sur les personnes et sur les biens en cas de flagrance peuvent se faire sans règles particulières dans les situations ordinaires et ce, malgré les abus pouvant en résulter, il en va tout autrement des actes effectués dans le lieu de service des personnes astreintes au secret professionnel. En effet, les perquisitions dans un cabinet d'avocat n'ont lieu que pour saisir les documents ou objets ayant un rapport avec une procédure judicaire ou lorsqu'il est lui-même mis en cause dans une affaire ou lorsque les documents ou objets en question sont étrangers à l'exercice de sa profession. Elles doivent être effectuées dans les conditions qui préservent le secret professionnel par le magistrat compétent en présence de l'avocat, du bâtonnier ou de son représentant. Ces prescriptions doivent être respectées à peine

    38 Art. 53 CPPF

    39 ADEMAR ESMEIN cité par RASSAT (M-L), << Le Ministère public entre son passé et son avenir » p. 172.

    de nullité. Il en est de même des perquisitions effectuées dans le cabinet d'un médecin.

    37. Toutes les opérations effectuées lors des enquêtes de police judiciaire sont secrètes et les personnes qui y ont participé sont tenues, à peine de sanction, de garder les informations acquises, confidentielles. Ceci est le signe de la protection du droit à la présomption d'innocence. Le secret n'est pas opposable au Ministère public.

    En dehors du pouvoir de direction, le Ministère public dispose d'un droit de contrôle sur la police judiciaire qui lui permet de vérifier le respect des prescriptions légales et des ordres qu'il aurait donnés.

    Paragraphe II : le contrôle de la police judiciaire par le Ministère public

    Le contrôle porte sur la garde à vue qui a particulièrement été réglementée40 par le législateur de 2005 (A) et sur toutes les activités de la police judiciaire (B) et effectué par le Procureur de la République et le Procureur Général près la Cour d'Appel.

    A. Le contrôle de La garde à vue par le paquet

    38. La garde à vue est « une mesure de police judiciaire en vertu de laquelle une personne est, dans le cadre de l'enquête préliminaire, en vue de la manifestation de la vérité, retenue dans un local de police judiciaire, pour une durée limitée »41. C'est un moyen de pression ou de contrainte qui doit être strictement limité aux nécessités de la procédure42. Dans la pratique du code d'instruction criminelle, elle était redoutée. sa durée était devenue incertaine malgré les textes, et assortie de sévices corporels ayant pour finalité l'obtention des aveux considérés comme reine des preuves, au mépris de l'article 132 bis du code pénal (CP) sur la torture. La jurisprudence a eu à sanctionner quelques cas d'abus ayant entraîné la mort des suspects43. Mais cela demeurait insuffisant du fait de la permissivité de la législation procédurale en vigueur à cette époque. Celle-ci n'ouvrait pas les voies au contrôle44. Le législateur de 2005 a voulu rompre avec ces pratiques en confiant en principe le contrôle de la garde à vue qu'il a réglementée (I) au Procureur de la République, contrôle dont les

    40 Sur la base de cette réglementation, des hommes politiques et bien de fonctionnaires enthousiastes ont pu affirmer que « rien ne sera plus comme avant. Les arrestations et séquestrations arbitraires disparaîtront, les personnes interpellées selon assistées, finies les gardes à vue fantaisistes, vive les droits de l'homme ».

    41 Art. 118 CPP.

    42 Elle est édictée pour les nécessité de défense sociale (Empêcher le suspect de fuir ou de détruire les preuves.

    43 TGI NFOUNDI Jugement n° 193 Crim du 25 juin 1998 médit : le tribunal a condamné dans cette affaire un commissaire de police principal et un inspecteur de police respectivement à dix ans et à 6 ans d'emprisonnement ferme pour avoir causé la mort par torture, d'un jeune homme de22 ans en novembre 1997 ; TGI MFOUNDI Je n°176 / Crim. Du 5 juin 1998 MP et famille NDJOUEMEGNI c / MOTASSIE Bienvenu Inédit ici 3 policiers ont été condamnés à des peines allant jusqu'à 1 an d'emprisonnement ferme pour torture.

    44 Contrôle effectué aujourd'hui par le Procureur de la République et surtout par les conseils qui peuvent intervenir dans les locaux de police ou de gendarmerie.

    conséquences sont à préciser (II).

    I. La réglementation de la garde à vue45

    Le législateur camerounais ne donne le pouvoir de prendre une mesure de garde à vue qu'à L'OPJ ; l'APJ n'en est pas compétent. Lorsque l'OPJ envisage de prendre une mesure de garde à vue à l'encontre d'une personne, il doit préalablement requérir une autorisation du Procureur de la République par tout moyen laissant trace écrite ou par voie téléphonique46. Il doit en cas de succès, avertir expressément le suspect de la suspicion qui pèse sur lui et l'inviter à donner toutes explications qu'il juge utiles. En dehors de cette formalité, le législateur a soumis cette mesure à certaines conditions (a) et a reconnu certains droits au suspect (b)

    a. Les conditions de la garde à vue

    Les conditions de la garde à vue tiennent à son ouverture (1) et à sa durée (2).

    1. Les conditions de l'ouverture de la garde à vue

    39. L'article 118 (2) du code de procédure pénale dispose que : « toute personne ayant une résidence connue ne peut, sauf cas de crime ou de délit flagrant et s'il existe contre elle des indices graves et concordants, faire l'objet d'une mesure de garde à vue ».

    Aux termes de ces dispositions, il est clair que la garde à vue n'est envisageable, dans le cadre des enquêtes, que contre une personne n'ayant pas une résidence connue. Une personne dont la résidence est connue ne peut faire l'objet d'une garde à vue, même lorsqu'elle est suspectée d'avoir perpétré un crime ou un délit flagrant, que si l'officier de police judiciaire a rassemblé contre elle les indices graves et concordants. Ceci constitue incontestablement une mesure uniquement protectrice des droits de la défense47 puisqu' ici, il n'est plus tenu compte de la flagrance qui seule, aurait été suffisante pour la prise de la décision de garde à vue. En tout état de cause, le Ministère public peut autoriser la garde à vue nonobstant les conditions ci-dessus. Mais sa durée doit être limitée.

    2. La durée de la garde à vue

    45 Il s'agit essentiellement de la garde à vue judiciaire car la garde à vue administrative n'a pas été réglementée par le CPP. Ce qui est de nature à favoriser les violations des droits du fait de l'absence de tout contrôle.

    46 C'est ce qui est appelée en droit français « le traitement en temps réel » ceci permet l'accélération de la procédure parce que l'OPJ ou l'APJ pourra rapidement recevoir les instructions du Procureur de la République.

    47 NGAI (C), la Loi n°2005/007 du 27 Juillet 2005 portant code de procédure pénale : excursion autour de la garde à vue, Juridis Périodique, n°71 juillet août septembre 2007, p. 112.

    40. Sous l'empire du code d'instruction criminelle, l'article 9 prévoyait comme durée de la garde à vue, vingt-quatre heures renouvelables trois fois. Avec le code de procédure pénale, cette durée est de 48 heures renouvelables une fois, Soit 96 heures ou 4 jours48.

    Ce délai peut être prorogé sur autorisation du Procureur de la République. Cette prorogation est écrite et doit être motivée. En dehors de ce cas, la prorogation peut être faite en fonction de la distance qui sépare le lieu d'arrestation et le local de police judiciaire. Cette prorogation est de 24 heures par 50 km c'est dire que, si la distance est inférieure ou égale à 50 km, la prorogation sera de 24 heures et si elle est supérieure à 50 km ou égale à 100 km, La prorogation sera de 48 heures... Les demandes de prorogation sont faites par tout moyen même par voie téléphonique. En cas de difficulté pour entrer en contact avec le Procureur de la République, l'OPJ est tenu de libérer le suspect. Mais il peut exceptionnellement proroger la durée de la garde à vue à 8 jours en cas de crime ou de flagrant délit, ou si le suspect n'a pas de résidence connue ou ne présente pas la garantie prévue à l'article 246 CPP49. Le délai commence à courir à partir du moment où le suspect est conduit au local de la police judiciaire. En dehors de cet encadrement, le législateur a prévu un certain nombre de droits au profit du suspect.

    b. Les droits reconnus aux suspects pendant la garde à vue

    41. L'article 122, 2 CPP dispose que le suspect doit être traité avec humanité tant matériellement que moralement. C'est ainsi qu'il doit avoir un temps de repos raisonnable entre les différents interrogatoires, ne faire l'objet ni de torture, menace, ni d'aucun autre moyen de pression (art. 122 (2)). il peut recevoir les visites de son avocat ce qui est une innovation majeure50dans le sens de la protection du suspect puisque ce conseil pourra aussi par sa présence, non seulement influer sur les agissements de la police judiciaire, mais également procéder au contrôle des conditions dans lesquelles se déroule la garde à vue et saisir le cas échéant les instances compétentes pour l'application des sanctions. Le suspect peut également recevoir les visites de sa famille aux heures ouvrables et doit être alimenté et entretenu. il peut à tout moment faire l'objet d'un examen médical par un médecin requis d'office par le Procureur de la République, médecin qui peut être assisté d'un autre choisi par le suspect et à ses frais. A la demande du suspect, le Procureur de la République a la faculté d'ordonner l'examen dans les 24 heures de ladite demande. Cet examen n'est obligatoire qu'à

    48 Ces délais sont pratiquement doublés.

    49 Il s'agit du cautionnement et du garant de sa présentation en justice..

    50 L'article 116 alinéas 3 du code de procédure pénale qui prévoit cette possibilité se démarque des législations étrangères puisqu'elle n'a pas ménagé ses conditions. En droit français par exemple, les Lois des 4 janvier et 24 août 1993 ont prévu l'intervention de l'avocat à la 20e heure de la garde à vue et à la 72e en cas de crime organisé.

    la fin de la garde à vue si le conseil ou un membre de la famille du suspect en fait la demande. Le rapport de l'examen est mentionné au dossier de la procédure ; l'OPJ est tenu de mentionner au PV les motifs de la garde à vue, ceux de la prorogation, bref toutes les conditions dans lesquelles s'est déroulée la garde à vue à peine de nullité dudit PV.

    II. Les conséquences du contrôle

    Le contrôle peut donner lieu à l'ordonnance d'office d'une libération immédiate du suspect par le Procureur de la République ou son substitut. Cet ordre peut également faire suite à une ordonnance d'habeas corpus. Mais en règle générale les conséquences portent sur la validité des actes (a) et la responsabilité des auteurs d'irrégularités (b).

    a. La nullité des actes

    42. Il s'agit essentiellement de la nullité des PV et des actes subséquents (art. 124 (4)

    CPP). Ces derniers sont ceux qui auraient été pris en conformité avec les procès verbaux irréguliers ou contenant des mentions attestant du non respect des prescriptions légales en matière de garde à vue. Cette sanction n'a pas d'effet sur la responsabilité des OPJ.

    b. La responsabilité de l'officier de police judiciaire

    43. Cette responsabilité peut être engagée sur le plan disciplinaire et sur le plan judiciaire.

    Sur le plan disciplinaire, l'autorité à saisir est le Procureur Général près la Cour d'Appel. C'est lui qui saisira par la transmission des notes et appréciations, le chef de l'administration d'origine de l'OPJ. On n'est certainement pas habilité à saisir directement le délégué général à la sûreté nationale, ni le secrétaire d'Etat à la défense ou tout autre Ministère pour les manquements de leur agent au cours des opérations de police judiciaire51.

    Les poursuites judiciaires aboutiront éventuellement à une condamnation pénale ou civile. Pénalement, la responsabilité sera fondée sur les dispositions de l'article 236 du code de procédure pénale relatives à la garde à vue et à la détention provisoire abusives. Les OPJ pourraient également être poursuivis pénalement pour bien d'autres infractions telles que l'abus de fonction, le favoritisme, la négligence systématique...à charge pour les poursuivants de les prouver.

    Civilement, les dispositions de l'article 236 CPP seront applicables et l'Etat sera tenu à titre principal comme commettant et pourra exercer une action récursoire contre l'agent

    51 NGAI (C), op. Cit. p 115.

    responsable (art. 236 (3)). L'indemnité est concrètement allouée par la commission prévue à l'article 137 CPP. Cette commission est présidée par un conseiller de la Cour Suprême et saisie par requête dans les six mois de la cessation de la garde à vue, de la décision de non lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive. En dehors du contrôle effectué par le Procureur de la République, le Procureur Général exerce également un contrôle beaucoup plu général.

    B. Le contrôle général effectué par le Procureur Général près la Cour d'Appel

    Il importe de donner l'étendue de ce contrôle (I) avant que de faire une appréciation critique sur l'ensemble du contrôle effectué par le Ministère public (II)

    I. L'étendue du contrôle

    44. Le Procureur Général près la Cour d'Appel exerce un contrôle sur l'ensemble des activités des OPJ et APJ en service dans le ressort de la Cour d'Appel. Il adresse semestriellement au Ministre de la justice, un rapport sur leurs activités. Il a le pouvoir d'apprécier et de noter les OPJ et transmet ces notes et appréciations au chef d'administration d'origine de l'OPJ concerné. Ce contrôle peut avoir un impact sur la carrière de l'OPJ ou de l'APJ qui pourrait, suite à des notes et appréciations défavorables, faire l'objet de sanctions disciplinaires.

    II. L'appréciation critique sur le contrôle de la police judiciaire

    Le code de procédure pénale à travers le contrôle reconnu au Ministère public sur l'activité de la police judiciaire a fait de cette institution le garant des droits et libertés individuelles (a) et laisse subsister quelques pesanteurs (b)

    a. Le Ministère public, garant des droits et libertés des suspects

    45. Par son autorité sur la police judiciaire, le Ministère public se présente comme le garant des droits et libertés individuelles à la phase des enquêtes policières. En effet après avoir régulé les opérations d'enquête par ses mandats, autorisations, prescriptions et substitutions, le Ministère public procède au contrôle pour s'assurer du respect de ses prescriptions ou des droits du suspect. Ceci pourrait mettre un terme aux abus de la police judiciaire tant en ce qui concerne les arrestations, les perquisitions et saisies qu'en ce qui concerne la garde à vue. Mais des pesanteurs sont décelables.

    b. Les pesanteurs à la garantie

    46. L'on peut craindre que les garanties ne revêtent qu'un caractère formel car l'effectivité des contrôles n'est pas assurée52. Tout d'abord le contrôle ne fait pas l'objet d'une réglementation quant à son régime. Il se ferait suivant les instructions de la chancellerie, au moins une fois par semaine sans préjudice à la possibilité d'effectuer des contrôles inopinés. Il demeure donc officiellement une faculté pour les parquets qui ne pourront l'exercer qu'exceptionnellement, sinon pas du tout ce d'autant plus qu'ils sont surchargés par de multiples affaires53 et manquent par ailleurs de personnels. Le législateur aurait pu fixer un régime pour les contrôles. Même si la solution la plus adéquate serait d'accroître le nombre de personnel magistrats dans nos parquets et de rendre effectif les différents tribunaux sur le territoire national.

    47. Par ailleurs on pourrait se demander si la réglementation de l'enquête préliminaire caractérisée par la surprotection du suspect ne pourrait pas entraîner une impunité du fait de la timidité qu'elle provoquerait chez les autorités de police judiciaire. Le moins qu'on puisse dire est que le respect de la légalité par la police judiciaire et la mise à sa disposition de moyens logistiques suffisants peut contribuer à concilier la protection de l'intérêt général et la garantie des droits du suspect. Et que, dans l'état où se trouve actuellement la police judiciaire camerounaise, c'est-à-dire un état de pauvreté en matériels logistiques, cet objectif pourrait s'avérer assez difficile à atteindre dans la phase des enquêtes en application de la législation actuelle. D'où le risque de voir l'évolution du droit opéré sur le plan textuel ne pas avoir la même positivité sur le plan factuel ou social et pire encore, son effectivité pourrait se traduire par une évolution de la criminalité. Une dotation de la police judiciaire en moyens financiers et matériels pourrait de ce fait contribuer à garantir le respect de la législation actuelle et la répression des délinquants, ce qui concilierait le respect des droits du suspect et la protection de l'ordre public.

    Le rôle du Ministère public sur les poursuites ne se limite pas aux enquêtes de police judiciaire. Il les déclenche54 et les exerce dans la phase de jugement et préalablement, à

    52 Nous avons été témoin de plusieurs cas de garde à vue abusives lors d'une visite que nous avons effectuée dans un commissariat de la ville de YAOUNDE. En fait plusieurs individus qui se trouvaient gardés ont sauvé un jeune cordonnier qui tentait de se donner la mort parce que, arrêté pour avoir récupéré de force son tabouret d'une jeune fille qui refusait de le lui remettre, il était retenu dans les locaux de ce commissariat depuis plus de 16 jours sans suites

    53 Le TGI Du Mfoundi par exemple ne compte que 5 magistrats au parquet, un Procureur de la République et quatre substituts pour traiter de tous les crimes et délits connexes pouvant être commis dans tout le département. Le TPIGI de Foumban quant à lui compte 3 magistrats, un Procureur de la République et deux substituts pour couvrir tous les arrondissements de ce département en matière criminelle et plus de quatre arrondissements en matière de délits et contraventions.

    54 Voir chapitre 2

    celle de l'information judiciaire dont il a perdue la maîtrise comme organe55.

    Section 2 : La perte de la qualité de magistrat instructeur par le Procureur de la République

    Cumulant depuis 1972 les fonctions de poursuites et d'instruction du fait de sa double << casquette »56 de magistrat du Ministère public et de magistrat instructeur57, le Procureur de la République a été dessaisi de la qualité de magistrat instructeur par la résurrection du juge d'instruction, magistrat du siège. Ce dernier est chargé désormais de mener l'instruction préparatoire (paragraphe I) ce qui mérite d'être apprécié (paragraphe II).

    Paragraphe I : l'instruction préparatoire, prérogative du juge d'instruction

    48. La décision à rendre dans un procès pénal nécessite que l'on connaisse parfaitement les circonstances dans lesquelles la loi pénale a été violée et assez la personne du contrevenant afin d'apprécier son degré de responsabilité. Comme les enquêtes de police judiciaire, l'instruction préparatoire ou information judiciaire est la phase du procès qui vise l'atteinte de cet objectif. Cette phase comporte deux aspects distincts. Elle consiste premièrement à rechercher les preuves à charge et à décharge vis-à-vis de la personne poursuivie et à les réunir. Dans un aspect second, elle consiste à apprécier les charges tant du point de vue du droit (pour vérifier que les faits tombent sous le coup de la loi pénale), que du point de vue des faits (pour vérifier qu'elles sont suffisantes pour justifier l'intervention d'une juridiction de jugement).

    Elle est obligatoire en cas de crime et d'infractions commises par les mineurs de 18 ans58 et facultative en matière de délit et de contravention. L'article 142 al. 3 du CPP dispose que l'information judiciaire est conduite par le juge d'instruction, magistrat du siège59. Celui-ci est saisi au moyen, soit du réquisitoire introductif d'instance par le Procureur de la République, soit de la plainte avec constitution de partie60 civile par la victime. Pour l'accomplissement de sa mission, le juge d'instruction dispose d'importants moyens d'investigation et de contrainte (A) qui sont effectués suivant des modalités précises (B).

    A. Les moyens d'information du juge d'instruction

    55 Montesquieu ne disait-il pas déjà que toute personne qui est portée au pouvoir peut être tentée d'en abuser ?

    56 MEBU NCHIMI (J C), le Procureur de la République << décoiffée » de sa casquette de magistrat instructeur, les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, PUA, pp 241 et s.

    57 Voir ANOUKAHA (F) << le magistrat instructeur en procédure pénale camerounaise » et GOUDEM (J) << l'organisationnelle du Cameroun », thèses de Doctorat 3eme cycle en droit prive UY

    58 Cf. art. 142 (1) et 700(1) CPP.

    59 La Loi n° 2006/14 du 29 Décembre 2006 portant organisation judiciaire a rendu effective cette disposition en prévoyant dans chaque juridiction un ou plusieurs juges d'instruction.

    60 Ces actes de saisine seront développés plus Loi n cf. le déclanchement de l'action publique chapitre 2.

    On distingue les moyens d'ordre formel (I) et les moyens d'ordre matériel (II)

    I. Les moyens d'ordre formel

    Le juge d'instruction a le pouvoir de prendre des actes d'ordre formel tels que les ordonnances (a), les mandats (b) et le dossier de l'instruction (c).

    a. Les ordonnances

    49. Les ordonnances sont les actes juridictionnels61 pris par un juge seul dans son cabinet62. Le juge d'instruction les prend dans plusieurs cas, soit pour répondre à une demande formulée par les parties ou le Ministère public, soit pour ouvrir ou mettre un terme à l'information judiciaire... ainsi, lorsqu'il est saisi d'un réquisitoire à fin d'informer par le Ministère public, il peut prendre, suivant qu'il entend ouvrir l'instruction ou pas, une ordonnance à fin d'informer ou une ordonnance de refus d'informer. Au cours de la procédure d'information, le Procureur de la République peut lui demander la communication du dossier de procédure de l'instruction, dans ce cas, il prend une ordonnance de soit informé. Si le Procureur de la République lui demande de procéder à de nouvelles inculpations ou investigations, et s'il n'entend pas faire suite à cette demande, il prend une ordonnance de refus de plus ample informé. A la clôture de l'information judiciaire le juge d'instruction peut rendre une ordonnance de renvoi lorsqu'il veut que l'affaire passe en phase de jugement ou alors une ordonnance de non lieu quand il estime que les éléments rassemblés ne sont pas suffisants pour pouvoir passer à cette phase...

    b. Les mandats63

    50. dans l'accomplissement de sa mission, le juge d'instruction peut avoir besoin d'entendre une partie ou un témoin. Dans ce cas il peut décerner contre l'intéressé un mandat de comparution ou d'amener. Si des perquisitions doivent être faites pour la découverte de la vérité, il lui est permis de délivrer des mandats à cette fin. Lorsque l'inculpé doit être mis en détention provisoire ou retiré de la prison, il délivre alors un mandat de détention provisoire ou d'extraction respectivement. Si un suspect ou un inculpé se trouve sur le territoire de compétence d'un autre juge d'instruction ou sur le territoire d'un autre pays, un mandat d'arrêt peut être délivré contre lui par les autorités judiciaires dont le juge d'instruction.

    61 Les actes juridictionnels peuvent être contentieux (lorsqu'ils tranchent un litige), ou gracieux (lorsque la juridiction du juge ou du tribunal rend une décision en dehors de toute contestation). La définition de ces actes pose encore d'énormes problèmes au regard des critères qui sont dégagés par la doctrine pour permettre leur identification. Car ces critères sont difficilement retrouvés en totalité dans un même acte.

    62 Les actes pris par le Président de la République dans le domaine de la loi sur autorisation du législateur sont aussi dénommés Ordonnances et ont valeur égale à celle de la Loi après leur ratification.

    63 Art.13 et suivants CPP

    c. Le dossier de l'instruction

    51. L'information est secrète et écrite c'est-à-dire qu'elle a un caractère inquisitoire. Elle donne lieu à l'ouverture d'un dossier dans lequel sont rassemblés tous les actes dactylographiés par le greffier de l'instruction sous le contrôle du juge d'instruction. Toutes les pièces du dossier sont cotées et inventoriées par le greffe d'instruction au fur et à mesure de leur rédaction. Le dossier est établi en deux exemplaires dont l'un pourra éventuellement être envoyé à la Cour d'Appel. Les parties peuvent se faire délivrer une copie à leurs frais. Le dossier de l'instruction est une consécration du code de procédure pénale de 2005.

    Les moyens d'ordre formel ont pour but de faciliter l'accomplissement des actes matériels ou de consigner leurs résultats.

    II. Les moyens d'ordre matériel

    Les actes matériels permettent de mettre la main sur les objets suspects, d'éviter la dissipation des preuves ou la protection des inculpés. Elles facilitent la découverte de la vérité et portent sur les personnes (a) ou sur les choses (b).

    a. Les actes sur la personne

    En dehors de l'interception des correspondances qu'il peut ordonner, le juge d'instruction procède aux inculpations, auditions et confrontations (1). Il peut procéder aussi au placement en détention provisoire, ou prendre une mesure de surveillance judiciaire à l'endroit d'un inculpé (2)

    1. Les inculpations, auditions et confrontations

    52. Lorsque l'information judiciaire est ouverte contre personne dénommée, le juge d'instruction la convoque et l'entend. Cette première comparution est appelée inculpation. Au cours de celle-ci, il est procédé à la vérification de l'identité de l'inculpé qui est ensuite informé des faits qui lui sont reprochés et de l'impossibilité pour la police et la gendarmerie de l'entendre à nouveau sauf sur commission rogatoire. L'inculpé est également informé du fait qu'il pourra être, à la fin de l'information judiciaire, placé en détention provisoire ou renvoyé devant la juridiction de jugement compétente.

    L'inculpé peut choisir de se défendre seul ou assisté d'un ou de plusieurs conseils et n'est tenu de faire aucune déclaration sur-le- champ. En cas de choix d'un ou de plusieurs conseils, l'inculpé est tenu de donner le nom et l'adresse de ce conseil ou de celui des conseils à qui devront être notifiés les actes de procédure, et doit élire domicile au siège du tribunal afin

    de faciliter sa représentation devant les juridictions.

    Les déclarations volontaires que fera l'inculpé seront enregistrées par le juge d'instruction. Ce dernier ne doit lui poser aucune question relative à sa responsabilité pénale et n'est pas tenu de communiquer le dossier à son conseil. Mais avant les prochaines comparutions, le dossier devra être communiqué au conseil de l'inculpé au moins dans les 48 heures les précédant ou dans les 72 heures, si le conseil réside hors du siège du tribunal. Ceci constitue une garantie du droit à la défense. Mais on peut tout de même déplorer le fait que le législateur ait seulement pris en compte l'extranéité de la résidence par rapport au siège du tribunal sans se préoccuper de la distance qui pourrait séparer ces lieux64. Si cette attitude garantit la célérité de la procédure, on ne saurait en dire autant des droits de la défense.

    En dehors de l'inculpation qui tient plus ou moins compte des droits de la défense, le juge d'instruction peut aussi entendre les témoins ou les confronter ainsi que les autres parties.

    Certaines mesures de privation ou de restriction de liberté peuvent être prises par le juge d'instruction telles que le placement en détention provisoire qui mérite d'être examinée au regard des innovations qui y ont été apportées.

    2. La détention provisoire

    53. Du point de vue de la théorie générale du droit pénal, la détention provisoire est un lieu de conflit entre deux intérêts : l'intérêt social et l'intérêt individuel65. Elle remplace la détention préventive qui revêtait une connotation contraire au principe de la présomption d'innocence.

    Jusqu'à lors la détention provisoire faisait l'objet d'une réglementation insuffisante au Cameroun. Cette permissivité a entraîné beaucoup de critiques de la part de la doctrine surtout parce que la détention provisoire était illimitée dans le temps66. Avec le code de procédure pénale, elle est désormais une mesure exceptionnelle qui ne peut être ordonnée qu'en cas de crime ou de délit et si l'inculpé n'a pas de domicile connu. Elle doit intervenir avant l'ordonnance de renvoi, sur ordonnance motivée du juge d'instruction. Ce qui signifie qu'elle est susceptible de recours. Cette ordonnance est notifiée au Procureur de la République

    64 Ainsi un conseil qui résiderait à KOUSSERI, dans l'Extrême- Nord du pays, sera soumis au même délai que celui qui réside à SOA si le tribunal avait pour siège, YAOUNDE

    65 Elle recherche soit la protection de l'individu contre d'éventuelles mesures de vengeance de la victime ou de sa famille en même temps qu'elle garantit la représentation du suspect devant la justice.

    66 DJOUENDJEU GAMENI (E. N.), code de procédure pénale, principales innovations et analyses téléologiques in La Nouvelle Expression, N° 1726 du 11 Mai 2006, p 10.

    et à l'inculpé67.

    54. La durée de la détention provisoire est de 6 mois avec prorogation motivée de 6 mois pour les délits et 12 mois pour les crimes soit un maximum de 12 mois pour les délits et 18 mois pour les crimes. Ainsi pourrait être sonné le glas des détentions interminables68 qui ont valu au Cameroun des condamnations par les instances internationales pour contrariété au principe du délai raisonnable69.

    A l'expiration des délais ci-dessus le juge d'instruction est tenu d'ordonner la mise en liberté de l'inculpé. En outre, l'inculpé peut bénéficier avant le terme légal de la détention provisoire, d'une liberté sans ou sous caution. Ceci signifie que la liberté dans ce cas n'est plus « provisoire » et correspond davantage au principe de la présomption d'innocence.

    Afin de garantir le respect de cette réglementation, le législateur a reconnu à l'inculpé la faculté d'engager la responsabilité pénale ou civile du juge d'instruction qui peut également faire l'objet de sanction disciplinaire.

    En dehors de la détention provisoire, on a aussi la surveillance judiciaire comme mesure restrictive de liberté.

    3. La surveillance judiciaire

    55. La surveillance judiciaire est une mesure qui peut être substituée à la détention provisoire et qui consiste à laisser le prévenu en liberté avec quelques restrictions de son droit d'aller et venir. Elle est prise en considération de la personnalité du prévenu. On peut la rapprocher de la condamnation avec sursis.

    A coté des actes sur la personne, le juge d'instruction peut prendre des actes sur les biens afin de rassembler les éléments prompts à faciliter l'appréciation de la suite à donner au procès.

    b. Les actes sur les biens

    56. En dehors de l'expertise, les actes matériels renvoient à ceux effectués par les autorités de police judiciaire telles qu'indiquées supra70. Ils se déroulent dans les mêmes conditions et susceptibles des mêmes sanctions. Il s'agit du transport sur les lieux, des

    67 Etant motivée, cette ordonnance peut faire l'objet de recours.

    68 Les articles 222 et suivants prévoient même la mise en liberté avec ou sans caution.

    69 Comité des droits de l'Homme des Nations Unies au sujet de l'affaire MUKONG citée par GONO (S), L'application des règles internationales du procès équitable in Juridis Périodique N° 63 Juillet- Août - Septembre 2005, édition spéciale ; Commission africaine des droits de l'Homme et de peuples au sujet de l'affaire EMBGA MEKONGO où l'inculpé avait passé 12 ans de détention...

    70 Voir enquête préliminaire.

    perquisitions, visites domiciliaires et saisies. Ces actes doivent être effectués en principe dans les limites territoriales de la compétence du juge d'instruction. Mais il est possible qu'ils soient diligentés hors de ce territoire à condition que le Procureur de la République du lieu des investigations en soit informé par celui de la juridiction du juge d'instruction. Ces actes sont effectués suivant des modalités variées. Celles-ci sont propres à l'instruction préparatoire dans son ensemble.

    B. Les modalités de l'instruction préparatoire

    En principe, le juge d'instruction accomplit les actes d'instruction personnellement. Mais pour des raisons liées à l'efficacité de ces actes, il est aidé par les forces de maintien de l'ordre et peut confier l'exécution desdits actes aux OPJ (I) ou aux autres juges d'instruction (II). Ces délégations sont dénommées commissions rogatoires71

    I. Les commissions rogatoires aux autorités de police judiciaire

    57. Les délégations au profit des OPJ sont limitées matériellement et soumises à certaines conditions en ce qui concerne l'accomplissement des actes hors du territoire de sa compétence.

    Matériellement, le juge d'instruction peut en principe donner commissions rogatoires aux OPJ pour tous les actes relevant de sa compétence. Mais il est tenu d'effectuer personnellement les actes tels que : l'inculpation, les interrogatoires, la délivrance des mandats de placement en détention provisoire ainsi que celle de placement d'un inculpé en surveillance judiciaire. Ces limitations découlent de la séparation des organes de poursuite et d'instruction dans la mesure où les autorités de police judiciaire sont soumises à l'autorité du Ministère public72.

    Pour ce qui est de la délégation pour effectuer des actes d'instruction hors du territoire de sa compétence, le juge d'instruction doit s'adresser au Procureur de la République de son tribunal. C'est ce dernier qui tiendra informé le Procureur de la République du lieu où les opérations doivent être effectuées. La collaboration s'avère alors nécessaire entre le juge d'instruction et le Procureur de la République de sa juridiction d'attache, un conflit entre les deux magistrats pouvant constituer un blocage à la procédure.

    II. Les commissions rogatoires aux autres juges d'instruction

    71 Art. 191 CPP

    72 C'est ce qui justifie également le dessaisissement des magistrats de la qualité d'officier de police judiciaire

    58. Antérieurement au code de procédure pénale, le juge d'instruction avait la possibilité d'adresser commissions rogatoires aux magistrats du Ministère public dans la mesure où ceux-ci faisaient partie des OPJ. Mais depuis le 1er janvier 2007, il ne peut le faire qu'au profit des magistrats autres que ceux du Ministère public. Ceci est caractéristique du renforcement de la Séparation des fonctions de poursuites et d'instruction.

    59. Toute commission rogatoire doit indiquer la nature de l'infraction objet de poursuites, être datée, signée et revêtue du sceau du magistrat qui l'a délivrée. Elle ne peut prescrire que des actes d'information se rattachant directement à l'infraction objet des poursuites.

    En cas d'urgence, la commission rogatoire peut être diffusée par tous les moyens laissant trace écrite. Dans ce cas, ces moyens doivent prescrire les mentions essentielles de l'original, notamment l'inculpation, le nom et la qualité du juge d'instruction mandant.

    L'instruction préparatoire ainsi menée par le juge d'instruction, magistrat du siège, entraîne un certain nombre de conséquences.

    Paragraphe II : L'appréciation critique de la perte des pouvoirs d'instruction par le Procureur de la République

    La perte de la qualité de magistrat instructeur par le Procureur de la République présente des avantages liés à la résurgence de la séparation des fonctions de poursuites et d'instruction (A) même si quelques limites y sont décelables (B)

    A. La résurgence de la séparation des fonctions de poursuite et d'instruction

    60. La séparation des fonctions de poursuites et d'instruction est l'un des aspects de la séparation des fonctions de justice répressive. Ce principe se traduit par l'indépendance de chacune des phases du procès par rapport aux autres tant sur le plan organique que sur le plan fonctionnel. Il ne devrait donc exister aucune influence de l'une des fonctions sur l'autre. Si la fusion des fonctions de poursuites et d'instruction a été opérée depuis 1972 au Cameroun73 au profit du Ministère public, il faut dire que le retour du juge d'instruction dans le paysage judiciaire camerounais marque la scission nouvelle de ces phases du procès sur le plan organique. Ceci est de nature à garantir le droit à un tribunal indépendant et impartial (I) et le droit à une bonne justice (II).

    I. La garantie du droit à un tribunal indépendant et impartial

    73 L'Italie a suivi le même exemple dans son code de procédure de 1989.

    La garantie résulterait du statut du juge d'instruction tant en ce qui concerne l'indépendance du tribunal (b) qu'en ce qui touche à l'impartialité (a)

    a. Le droit à un tribunal indépendant

    61. « L'indépendance s'exprime en externe par rapport à d'autres pouvoirs »74. Elle s'entend de l'absence de toute influence extérieure. A l'instruction préparatoire, elle est garantie à travers l'absence de subordination du juge d'instruction aux pouvoirs législatif et exécutif. ce qui signifie que le juge d'instruction ne peut recevoir d'ordre ni du Ministre de la justice ni d'aucune autre autorité extérieure au pouvoir judiciaire. En outre, l'inamovibilité dont il bénéficie, à l'image de tous les autres magistrats du siège, est de nature à lui conférer une certaine stabilité et à renforcer son indépendance. Contrairement au CIC qui permettait au Ministère public de choisir le juge d'instruction pour mener l'information dans une affaire donnée, le CPP renforce la séparation entre les poursuites et l'instruction préparatoire en dessaisissant le parquet de cette prérogative au profit du Président du tribunal, ce qui renforce aussi l'indépendance du juge d'instruction vis-à-vis du pouvoir exécutif qui pouvait indirectement, à travers l'autorité qu'il exerce sur le Ministère public, choisir un juge d'instruction à sa convenance. L'inculpé se trouve ainsi dans une situation de sécurité, sécurité d'autant plus renforcée lorsqu'on prend en compte l'impartialité du tribunal.

    b. Le droit à un tribunal impartial

    62. L'impartialité du tribunal est garantie en pratique par la récusation75 et le renvoi d'une juridiction à une autre. Sur le plan théorique, elle est garantie par la séparation des fonctions de justice répressive dans la mesure où le juge de jugement n'étant pas habilité à passer les actes de poursuite ni ceux de jugement, pourrait avoir une appréciation beaucoup plus objective que s'il connaissait des trois fonctions à la fois. De même le cumul des fonctions de poursuites et d'instruction était une source de partialité du magistrat instructeur qui, ayant déjà une connaissance de la personne de l'inculpé dans la phase d'enquête de police judiciaire, pouvait mener l'information avec moins d'objectivité.

    Par ailleurs, étant chargé de soutenir l'accusation dans la phase de jugement et après avoir déjà engagé les poursuites, le Ministère public se présentait à la phase d'information judiciaire beaucoup plus comme juge et partie, ce qui augurait sans trop de doute une instruction plus à charge qu'à décharge. Le suspect ne pouvait plus compter que sur le juge de

    74 GONO (S) op. Cit. p.36

    75 L'art. 146 (3) reconnaît le droit aux parties de demander par requête motivée le dessaisissement du juge d'instruction au profit d'un autre ; c'est en quelque sorte un droit de récusation à l'étape de l'instruction.

    jugement pour faire chuter la dose de subjectivité que regorgeait le dossier parvenu à la phase de jugement. Si on prend aussi en compte le fait que les droits du suspect n'étaient pas suffisamment pris en compte à l'étape des enquêtes policières76, on peut toute suite apprécier le degré d'insécurité ou d'injustice dans laquelle pouvait se trouver les justiciables. Le retour du juge d'instruction opéré par le CPP peut de ce point de vue être considéré comme la garantie du droit à un tribunal impartial, surtout que l'impartialité nécessite comme préalable, l'indépendance qui n'est pas vraiment l'apanage du Procureur de la République.

    Le retour à la séparation des fonctions de poursuites et d'instruction constitue aussi le gage d'une justice éclairée.

    II. La garantie d'une bonne justice

    63. L'effectivité de l'instruction préparatoire n'était pas garantie avec le système antérieur dans la mesure où le Procureur de la République, magistrat instructeur, pouvait trouver inutile la reprise des actes qui avaient déjà été effectués lors des enquêtes de police. Celles-ci acquerraient une puissance importante à laquelle le CPP a mis un terme (a), terme qui se trouve davantage renforcé avec le double degré d'instruction (b)

    a. Le frein à la toute puissance du Ministère public

    64. Parler de la toute puissance du Ministère public renvoie au fait qu'il pouvait faire des PV de la police ce qu'il voulait, et qu'en pratique, seuls ces PV parvenaient à la juridiction de jugement. Pourtant ces PV contenaient des éléments de preuve obtenus par les moyens insoupçonnés de torture ou de toutes autres exactions. Ceci exposait le juge à des erreurs judiciaires inavouables77. Car sa décision pouvait être influencée en grande partie par ces PV. Le code de 2005 vient mettre un terme à cela en garantissant par le retour de la séparation des fonctions de poursuites et d'instruction, l'effectivité des investigations78 à la deuxième phase du procès pénal79, permettant ainsi de remettre en cause la force probante des PV de police judiciaire.

    b. Le double degré de l'instruction

    Si le retour du juge l'instruction marque la fin de la toute puissance du Ministère

    76 BOKALLI (V-E), la protection du suspect dans le code de procédure pénale in RASJ V.4, n°1 2007, p.11.

    77 BOKALLI (E-V), op. Cit. p. 13

    78 On se demandait si effectivement le Procureur de la République pouvait se saisir personnellement et par quels actes.

    79 La doctrine et la jurisprudence avait déclaré la caducité des actes de saisine validant ainsi les procès dans lesquelles la phase d'information judiciaire n'était pas à respectée (T. G. I. du WOURI, le jugement 108/crim. Du 23 février 1995, J.P n° 25, janvier, février mars 1996. Cité par MEBU NCHIMI (J C) op. Cit.

    public, il faut dire que la chambre de contrôle de l'instruction constitue elle, un frein à l'omnipotence du juge d'instruction80. En effet celui-ci n'étant soumis à aucune autorité, pourrait se considérer comme un juge avant jugement et ses actes81 se présenteraient comme l'expression de la volonté du prince ne souffrant d'aucun contrôle. La chambre de contrôle de l'instruction82 garantit donc le double degré de l'instruction permettant la reformation ou l'annulation des actes du juge d'instruction.

    65. La chambre de contrôle de l'instruction est une innovation du code de procédure pénale dans la mesure où la réforme de 1972 avait supprimé la chambre de mise en accusation que l'on peut considérer comme son ancêtre. Elle connaît des appels contre les actes du juge d'instruction. Toute partie peut demander l'annulation d'un acte de procédure d'instruction pris en violation de ses droits83. Le Ministère public peut requérir l'annulation de tout acte d'instruction. Dans tous les cas, le juge d'instruction en est avisé par écrit. Lorsque c'est le Ministère public qui le fait, il requiert la transmission du duplicatum du dossier de l'instruction au président de la chambre de contrôle de l'instruction en vue de l'annulation de l'acte. Le juge d'instruction peut faire droit à cette requête (il prend une ordonnance de transmission) ou alors, par ordonnance motivée et notifiée au Ministère public et aux autres parties, s'opposer à cette transmission (il prend une ordonnance de refus de transmission). La voie d'appel est alors ouverte dans ce cas84.

    66. Mais la saisine de la chambre reste limitée, puisque seul le Procureur de la République peut la saisir lorsqu'il faut requérir l'annulation d'une ordonnance de renvoi total ou partiel ou une ordonnance de non-lieu partiel ou total. La reconnaissance des mêmes droits aux autres parties, surtout à la défense à notre avis, devrait être opérée.

    La séparation des fonctions de poursuites et d'instruction n'est pas absolue. Comme déjà dit, elle connaît quelques atténuations, mieux quelques limites qui pourraient être d'un impact considérable sur le procès pénal.

    B. La relativisation de la séparation des fonctions de poursuite et d'instruction

    80 Cette toute puissance du juge d'instruction et le fait qu'il reprend en partie les actes de l'enquête préliminaire a été, et continue d'être le motif de la demande de son élimination du système judiciaire français.

    81 Les décisions telles que les ordonnances de non lieu partiel ou total, de renvoi total ou partiel, de placement en détention provisoire...

    82 La chambre de contrôle de l'instruction est une formation spéciale de la Cour d'Appel présidée par un magistrat du siège de la Cour, désigné par ordonnance du Président de ladite Cour pour une année judiciaire. Le Ministère public et les autres parties ont le droit d'assister à ses audiences.

    83 Le juge d'instruction peut constater lui-même d'un acte de procédure d'instruction est entaché de nullité dans ce cas, il avise le Procureur de la République par écrit. Ce dernier requiert la transmission du duplicatum du dossier de procédure au président de la chambre de contrôle de l'instruction.

    84 Voir les articles 272 CPP et suivants pour la procédure devant la chambre de contrôle de l'instruction.

    67. Le juge d'instruction ne peut pas s'autosaisir même en cas de flagrance comme c'était le cas avec le CIC; il doit l'être par le réquisitoire introductif d'instance du Procureur de la République85 ou la plainte avec constitution de partie civile de la victime. Et en cas de découverte de nouveaux faits, le juge d'instruction est tenu de requérir un réquisitoire supplétif, ce qui le place en situation de quémandeur86 devant le parquet. Si les relations du juge d'instruction avec le Procureur de la République sont conflictuelles, celui-ci peut bloquer l'action de celui-là, ce d'autant plus qu'aucune sanction, ni délai n'est prévu pour pouvoir contraindre le Procureur à réagir. Et si le juge d'instruction procède à l'inculpation en violation de l'article 169 CPP87, celle-ci sera frappée de nullité absolue puisqu'il s'agira de la violation d'une règle de procédure pouvant porter atteinte aux droits de la défense88. Cette réglementation contribue au renforcement de la séparation des fonctions de poursuites et d'instruction qui pourtant n'est pas conçue de façon absolue. En effet le législateur relativise ce principe par la procédure de flagrant délit (II) et par la possibilité de mettre un terme à l'information judiciaire (I) reconnue au Procureur générale près la Cour d'Appel.

    I. L'arrêt de l'instruction par le Ministère public via le Procureur Général près la Cour d'Appel89

    68. L'article 64 CPP dispose que « (1) le Procureur Général près la Cour d'Appel, sur autorisation écrite du Ministre de la justice, peut demander l'arrêt des poursuites à tout stade de la procédure avant l'intervention d'une décision de fond, lorsque celles-ci sont de nature à compromettre l'intérêt social ou la paix publique ;

    (2) dans le cas prévu au paragraphe1er du présent article, le juge d'instruction ou la juridiction de jugement constate son dessaisissement sur l'action publique et donne mainlevée des mandats éventuellement décernés contre le bénéficiaire de l'arrêt des poursuites ».

    Cette disposition peut être une arme dangereuse entre les mains du Ministère public et par transitivité, du gouvernement qui, en l'instrumentalisant, pourrait contrôler la justice répressive et éventuellement, faire échapper ses protégés aux filets de la répression. Comme le pense un auteur, « c'est un anachronisme »90 dans un pays qui entend consolider l'Etat de droit car l'égalité des citoyens devant la loi se trouve menacée, ce qui peut être source de

    85 La plainte avec constitution de partie civile peut également le saisir.

    86 ROBERT (J-H), de la nécessite d'un Ministère public, office du juge : part de souveraineté ou puissance nulle, études rassemblées par Olivier CAYLA et Marie-France RENOUX-ZAGAME, éd. Bruyant LGDJ, 2001 p. 231

    87 Cette disposition fait obligation au juge de requérir le réquisitoire supplétif.

    88 Voir art. 3 et 251 CPP.

    89 TCHAKOUA (J-M), la considération de l'intérêt social et de la paix publique en matière de poursuites : conjectures autour de l'article 64 du code de procédure pénale, les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, PUA, pp 81 et s.

    90 DJOUENDJEU GAMENI (E-N), op. Cit. p. 11

    frustrations. Et l'encadrement dont fait l'objet cette possibilité, notamment l'antériorité à l'intervention d'une décision de fond et la compromission de l'intérêt social et de la paix publique, pourrait se révéler fallacieux ce d'autant plus que les notions de paix sociale et d'intérêt social ne font pas l'objet de définitions par le législateur.

    Le Procureur de la République peut aussi exercer les fonctions d'information.

    II. L'exercice des actes d'instruction en cas de flagrance

    69. En cas de flagrant délit, le Procureur de la République a la faculté de saisir le juge d'instruction ou de procéder lui-même aux actes que l'on peut qualifier d'actes d'instruction. La plus importante est la décision de placement en détention provisoire, en dehors de l'identification du suspect et de son interrogatoire sommaire, véritable inculpation. L'on peut justifier cela par le besoin de célérité dans la procédure de flagrance. En effet lorsqu'on se trouve dans un cas de flagrant délit le Procureur de la République, après avoir effectué ses diligences va dresser un PV. Quand il aura décidé d'engager les poursuites, il traduira directement le suspect devant la juridiction de jugement à la plus prochaine audience.

    On peut constater que la séparation des fonctions de poursuites et d'instruction est respectée de façon unilatérale en cas de flagrance dans la mesure où le Procureur de la République peut poser les actes d'instruction alors que le juge d'instruction ne peut même pas s'autosaisir.

    70. Il nous semble par ailleurs que la limitation de l'obligation d'information aux crimes et aux infractions commises par les mineurs de 18 ans n'est pas satisfaisante. En effet si cette limitation tient compte de la gravité de la sanction, cela ne saurait également être valable pour tous les cas de délits puisque certains sont assortis de sanctions élevées91. Le législateur pourrait se référer à la sanction encourue pour une infraction et non à la nature de celle-ci pour l'exigence de l'information judiciaire. Les lenteurs de la procédure souvent évoquées pour justifier cette limitation ne sont pas convaincantes ; elles résultent en général, non pas du double degré des investigations, mais du formalisme procédural92.

    71. A la clôture de l'information judiciaire, le juge d'instruction est tenu de communiquer le dossier au Procureur de la République afin que celui-ci prenne son réquisitoire définitif sur la décision de renvoi ou de non-lieu. Le Procureur de la République dispose à cet effet de cinq jours93 à compter de la réception, pour retourner le dossier au juge d'instruction,

    91 Le délit est une infraction punie d'une peine d'emprisonnement supérieur à 10jours et ne pouvant excéder 10 ans et ou d'une amende supérieur à 25000 francs.

    92 MEBU NCHIMI (J C), le Procureur de la République « décoiffée » de sa casquette de magistrat instructeur, les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, PUA, pp 241 et s.

    93 Délai assez court si l'on tient compte du volume des dossiers de procédure et du nombre d'affaires qu'ont à

    accompagné de son réquisitoire. Ce réquisitoire ne lie pas le juge d'instruction.

    CONCLUSION DU CHAPITRE I

    72. Au terme de ce chapitre, on peut constater que le législateur a fait oeuvre d'humanisme dans la mesure où il a réglementé la phase des enquêtes de police judiciaire, jadis siège d'abus de toute sorte et qu'il l'a placée sous le contrôle du Ministère public afin de fortifier les garanties accordées au suspects à cette étape du procès94.

    Pour renforcer la garantie des droits des justiciables, il a restauré le principe de la séparation des fonctions de poursuites et d'instruction. Ceci a commencé par la dépossession des magistrats de la « casquette » d'OPJ suivie de la résurrection du juge d'instruction, cet « ancien-nouveau »95 qui assurera désormais l'information judiciaire en lieu et place du Procureur de la République.

    73. Cependant des failles demeurent çà et là. C'est ainsi que le contrôle du Procureur sur les actes de police judiciaire porte en grande partie sur les PV. Les visites dans les locaux de la police judiciaire sont facultatives. Ce qui compromet leur effectivité sur le terrain, surtout si on tient compte de l'insuffisance du personnel magistrat dans nos parquets et du cumul de compétence dont ils font l'objet du fait de l'ineffectivité des parquets des TPI sur l'ensemble du territoire national96.

    74. Par ailleurs, la possibilité reconnue au Ministère public d'arrêter les poursuites à toutes les phases du procès pénal par l'article 64 CPP pourrait être source d'instrumentalisation politique. L'exécutif, au regard de sa supériorité hiérarchique sur les parquets, pourrait avoir une main mise sur le procès pénal. Au lieu d'une séparation, le législateur aurait alors réalisé une fusion des fonctions de poursuites et d'instruction au profit de l'exécutif. Ce qui nécessite des réaménagements pour ne pas gâcher l'important travail effectué dans le sens de la garantie des droits et libertés des citoyens. Ce travail qui ne s'est d'ailleurs pas limité aux phases préjudiciaires du procès.

    connaître le petit nombre de magistrats disponibles dans nos différents parquets.

    94 BOKALLI (E-V), op. Cit. p. 13

    95 OHANDJA ELOUNDOU (A), un revenant : le juge d'instruction, Juridis périodique, n°65 2006, pp 91 et s.

    96 En dehors des chefs lieux de provinces qui disposent des TPI distincts des TGI, l'on ne dénombre pas plus de 6 TPI sur un ensemble de plus de 200 arrondissements que compte le Cameroun.

    CHAPITRE II : LE MINISTERE PUBLIC ET L'EXERCICE DE L'ACTION PUBLIQUE

    75. « L'action publique tend à faire prononcer contre l'auteur d'une infraction, une peine ou une mesure de sûreté97 édictée par la loi »98 elle est pour ainsi dire une combinaison des enquêtes de police judiciaire et des poursuites99. En réalité, l'exercice de l'action publique commence au niveau de l'instruction préparatoire. Le Ministère public y assiste aux auditions, interrogatoires, inculpations, et a la possibilité de consulter le dossier de l'instruction à tout moment. Il peut exercer les recours contre les actes du juge d'instruction devant la chambre de contrôle de l'instruction. Lorsque la phase de l'instruction est achevée, le Ministère public peut continuer l'exercice de l'action publique devant la juridiction de jugement. A ce niveau, il va soutenir l'accusation publique après avoir déclenché les poursuites (section 1) ; et comme les autres parties, il pourra exercer éventuellement les voies de recours et procéder à l'exécution des décisions de justice (section 2).

    Section I : le soutien de l'accusation

    Selon RASSAT100, poursuivre consiste non seulement à mettre l'action publique en mouvement (paragraphe I), mais aussi à l'exercer. L'exercice consiste dans la phase de jugement à soutenir l'accusation publique (paragraphe II). Ce qui veut dire en d'autres termes que le Ministère public n'est pas tenu de soutenir l'action publique lorsqu'elle est déclanchée par d'autres personnes. C'est en fait ce qui fait souvent dire que le Ministère public n'a pas seulement pour rôle de requérir la condamnation de l'accusé ou du prévenu. Ici se pose le problème essentiel de la présomption d'innocence et de l'égalité entre les parties au procès.

    Paragraphe I : le déclenchement préalable de l'action publique

    76. Le Procureur de la République est le destinataire de tous les procès verbaux de la police judiciaire relatifs aux infractions commises dans son ressort et relevant de la juridiction de droit commun101. Lorsqu'il les reçoit il décide de la suite à leur donner ce qui lui confère un

    97 La mesure de sûreté se distingue de la peine par son caractère généralement préventif puisqu'elle intervient avant la commission de l'infraction. Elle découle des idées de l'école positiviste qui préconise les mesures de protection de la société contre l'état dangereux de l'individu.

    98 Art. 59 (2) CPP.

    99 MATTER dans ses conclusions sur un arrêt de la cour de cassation française ch. réunies en date du 29 Jan.

    1931, DP 1931, I, 94, pense que « les poursuites sont tous les actes accomplis par les officiers du Ministère

    public depuis la mise en mouvement de l'action publique jusqu'à ce qu'une décision judiciaire définitive soit

    intervenue sur la question ».

    100 RASSAT (M-L) Le Ministère public entre son passé et son avenir, éd 1967 pp 88-90

    101 Les procès verbaux afférents aux faits relevant du tribunal militaire sont transmis au Ministère chargé de la

    rôle prépondérant dans le déclanchement des poursuites dont il apprécie l'opportunité (A) ; les excès susceptibles d'en résulter sont atténués par le droit de mettre l'action publique en mouvement reconnu à d'autres personnes (B).

    A. L'appréciation de l'opportunité des poursuites

    L'appréciation de l'opportunité des poursuites (II) se fait par le Procureur de la République à la suite d'autres actes préalables (I).

    I. Les actes préalables à l'appréciation de l'opportunité des poursuites

    Les opérations préalables à l'opportunité des poursuites sont en principe le contrôle de la légalité (a) et la vérification des obstacles aux poursuites (b)

    a. La vérification de l'incrimination des faits

    77. Le Procureur de la République doit vérifier, chaque fois qu'il est saisi des faits, si ceux-ci tombent sous le coup d`une qualification légale afin de se conformer au principe de la légalité des délits et des peines, principe fondamental dans la garantie de la sécurité juridique et de l'Etat de droit. En fait, le Procureur va se servir de sa culture juridique pour repérer dans le catalogue des infractions du code pénal, celles qui cadreraient avec les faits qu'il est appelé à qualifier. Après avoir recensé les différentes qualifications possibles, il retiendra celle qui correspondra exactement aux faits dont il est saisi. Il lui est parfois arrivé d'ignorer certains faits pour pouvoir modifier la qualification qui devrait normalement être retenue. C'est ainsi qu'on a eu au Cameroun pendant la période d'application des ordonnances répressives de 1972, les pratiques de « correctionnalisation >>102 et de « contraventionnalisation >>103. Ce qui en soit, était protecteur des droits du suspect mais contraire au principe de la légalité des délits et des peines.

    78. Au terme de cette confrontation des faits aux différentes qualifications du code pénal, le Procureur de la République peut, soit classer l'affaire sans suite lorsque les faits ne constituent pas une infraction pénale, soit alors, si les faits constituent une infraction, vérifier s'il n'existe aucun obstacle à leur poursuite.

    b. La vérification des obstacles aux poursuites

    79. Le code de procédure pénale a prévu plusieurs obstacles aux poursuites pénales.

    justice militaire (art. 85 CPP)

    102 La correctionnalisation est transformation d'un crime en délit pour atténuer la sanction.

    103 La contraventionnalisation quant à elle est la transformation d'un délit en contravention.

    Ceux-ci peuvent être l'extinction de l'action publique pour les causes prévues par l'article 62 CPP. Il s'agit notamment de : << a) la mort du suspect, de l'inculpé, du prévenu ou de l'accusé ; b) la prescription104 ; c) l'amnistie ; d) l'abrogation de la loi ; e) la chose jugée ; J) la transaction lorsque la loi le prévoit expressément ; g) le retrait de la plainte lorsque celle-ci est une condition de la mise en mouvement de l'action publique ». Pourraient aussi constituer des obstacles à la poursuite, la condition préalable d'une plainte de la victime, l'immunité de poursuite ou de juridiction dont bénéficierait le suspect, les causes d'exonération ou de non imputabilité105, ou l'autorité de la chose jugée...le Ministère public, par la personne du Procureur de la République, va s'assurer qu'aucun de ces freins n'existe.

    Après l'appréciation de la légalité106 et la vérification des obstacles à l'action publique, le Procureur de la République n'est pas ténu d'engager les poursuites. Il dispose d'une assez grande marge de liberté pour décider de la suite à donner au procès.

    II. Le principe l'opportunité des poursuites

    80. Le code de procédure pénale camerounais a opté pour principe de l'opportunité des poursuites107. Une fois le constat de l'infraction opéré ainsi que celui de l'absence des obstacles ci-dessus, le Procureur de la République décidera de poursuivre ou non. Dans la première hypothèse, il pourra saisir, soit le juge d'instruction par un réquisitoire introductif d'instance, obligatoire en cas de crime et de délit commis par un mineur de 18 ans, soit la juridiction de jugement par une citation directe en cas de délit ou de contravention, ou par la voie de la procédure de flagrant délit. Dans la seconde hypothèse, il procédera à un classement sans suite108. La doctrine s'est toujours intéressée à ce pouvoir pour savoir sous quelle impulsion la décision du Procureur de la République devrait obéir109. Mais le moins que nous pouvons dire est que l'opportunité des poursuites a un fondement (a) qui confère une liberté au Procureur de la République, liberté limitée par la subordination hiérarchique (b).

    a. Le fondement de l'opportunité des poursuites

    104 La prescription est de 1 an pour les contraventions, 3ans pour les délits et 10 ans pour les crimes.

    105 Les cas de causes d'exonération ou de non imputabilité ne le contraignent pas forcement à classer l'affaire puisque celles-ci doivent être soulevées par la défense si elle est assez performante. Mais pour des raisons d'économie et de désencombrement du prétoire, le Ministère prend généralement la décision de classer simplement les cas pareils.

    106 Les partisans de la légalité des poursuites soutenaient que pour des injustices, chaque fois que des faits tombent sur le coup d'une qualification pénale, elles devraient faire l'objet des poursuites. Ils s'opposaient ainsi à l'opportunité des poursuites.

    107 Voir art. 141 CPP << le Procureur de la République saisi dans les conditions prévues aux articles 135, 139 et 140 peut (...) décider de la poursuite du suspect ».

    108 Art. 141 (c) et (e).

    109 ROBERT (J-H), De la nécessité d'un Ministère public, in l'office du juge : part de souveraineté ou puissance nulle, études rassemblées par Olivier CAYLA, MARIE-France, RENOUX-ZAGAME, éditons BRUYANT LGDJ 2001, pp 227et s

    81. La décision de classer sans suite une affaire serait fondée sur la qualité de représentant de la société et de gardien de l'ordre public. En effet, étant le représentant de la société et le gardien de l'ordre public, le Ministère public est compétent pour apprécier l'ampleur du trouble causé à la société par l'infraction, ou que pourrait causer un déclanchement immédiat de la répression110.

    En droit français, il est permis au Procureur de la République de recourir à la médiation pénale en accord avec les parties111 s'il lui paraît « qu'une telle mesure est susceptible d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction et de contribuer au reclassement de l'auteur de l'infraction ». Il lui est même reconnu pour les infractions graves112, le pouvoir de proposer une composition pénale113 à la personne majeure qui reconnaît avoir commis le délit114.

    b. La subordination hiérarchique comme limite à la liberté du Procureur de la République

    82. La liberté d'apprécier l'opportunité des poursuites n'est pas absolue. Elle est relativisée par la soumission du parquet à l'autorité hiérarchique du Garde des Sceaux.

    Le Garde des Sceaux, à travers l'autorité qu'il exerce directement sur le Procureur Général près la Cour d'Appel115, peut soumettre indirectement le Procureur de la République puisque celui-ci est soumis au Procureur Général près la Cour d'Appel116. En effet le Procureur général, aux termes de l'article 133 (1) veille à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du ressort de la Cour d'Appel. Il peut prescrire aux magistrats du Ministère public de son ressort d'enquêter sur les infractions dont il a connaissance, de procéder à un classement sans suite ou d'engager les poursuites. Ces prescriptions s'imposent au Procureur de la République qui ne peut s'y opposer qu'en se fondant sur les limites de la subordination

    110 Il serait par exemple inopportun pour le Ministère public d'engager des poursuites immédiatement contre le proviseur d'un lycée et les professeurs du même lycée à l'approche des examens officiels car ces poursuites nuiraient plus qu'il ne plairaient.

    111 Art. 41-1 CPPF.

    112Violence, vols simples, usage de stupéfiants, port d'armes, abandon de famille, conduite en état d'alcoolique...

    113 La composition pénale consiste à verser une amende au trésor public, se dessaisir au profit de l'Etat de l'objet qui a servi à commettre l'infraction, remettre au greffe son permis de conduire ou de chasser, effectuer au profit de la collectivité un travail non rémunéré. Cette sanction doit être acceptée par l'auteur de l'infraction et validée par le président du TGI ; son exécution éteint l'action publique.

    114 LE GUNEHEC (F), Présentation de la Loi n°99-515 du 23 Juin 1999, JCP 1999, actualité n°28, p.1325 et n°29, p 1393 ; PRADEL (J), Une consécration du << plea bargaining >> à la française : la composition pénale, JCP 2000, F, 198.

    115 L'article 30 (1) de la Loi du 29 Décembre 2006 dispose qu' << il existe auprès de chaque Cour d'Appel un parquet général dirigé par un Procureur Général qui relève directement du Ministre chargé de la justice >>

    116 L'article 30 (2) op. Cit. Prévoit la subordination directe du Procureur de la République au Procureur Général près la Cour d'Appel.

    hiérarchique que sont le pouvoir propre du chef de parquet117 et la liberté de parole118 pourtant ces limites sont inefficaces.

    83. Le pouvoir propre des chefs de parquets peut être aisément contourné par la prescription à un substitut du Procureur de la République « récalcitrant >> d'effectuer les actes de celui-ci. Ce qui est d'autant plus plausible lorsqu'on voit l'effort de renforcement de la subordination de parquet à parquet119opéré par le législateur de 2005.

    En fin de compte on pourrait dire que l'opportunité des poursuites appartient plus au Ministre de la justice, Garde des Sceaux qu'au Procureur de la République, nonobstant la possibilité reconnue à d'autres personnes de mettre l'action publique en mouvement.

    B. Le déclenchement des poursuites par d'autres personnes

    L'article 60 du code de procédure pénale dispose que « l'action publique est mise en mouvement et exercée par le Ministère public. Elle peut aussi être mise en mouvement par une administration (II) ou par la victime (I) dans les conditions déterminées par la loi ». La situation des juges nécessite également d'être étudiée (III)

    I. Le déclenchement des poursuites par la partie civile ou victime

    La partie civile bénéficie de la faculté de déclencher l'action publique, soit pour vaincre l'éventuel blocus opéré par le Procureur de la République, soit tout simplement pour éviter de passer par ce dernier. Il convient de présenter les conditions (a) et les modalités de cette mobilisation des poursuites (b).

    a. Les conditions du déclenchement de l'action publique par la partie civile

    84. Toute victime peut engager les poursuites qu'elle soit une personne physique ou morale. Mais le problème s'est posé relativement aux personnes morales représentant un groupe car leur action présente l'aspect d'une action publique surtout lorsqu'elles agissent pour ne pas demander grand-chose comme indemnisation120. Le législateur y a apporté des solutions en fixant certaines conditions pour le déclenchement de l'action publique par la partie civile en

    117 L'exercice de ce pouvoir nécessite un courage énorme au regard de l'instrumentalisation possible du régime disciplinaire des magistrats du parquet.

    118 La liberté de parole ne pouvant intervenir qu'après le déclanchement de l'action publique nécessite une information préalable de l'autorité hiérarchique directement supérieure (art 3 (3) du Décret portant statut de la magistrature).

    119 L'article 133 (2) dispose que « il (le Procureur Général près la Cour d'Appel) a autorité sur tous les magistrats du Ministère public de son ressort >>.

    120 Lire LARGUIER (J), L'action publique menacée (à propos de l'action civile des associations devant les juridictions répressives), Recueil Dalloz 1958, chron. VI pp 6 et s.

    générale (1) et celles relatives aux personnes morales en particulier (2).

    1. Les conditions générales de déclanchement des poursuites par la partie civile

    Aux termes de l'article 71 du code de procédure pénale, toute personne qui aurait subi un préjudice résultant d'une infraction est recevable en justice à l'exception des mineurs non émancipés et des majeurs frappés d'une incapacité. Ceux-ci ne peuvent agir que par le biais d'un représentant. Il suffit donc pour une personne physique de prouver qu'elle a subi un préjudice que celui-ci résulte de l'infraction et qu'il s'agit d'un préjudice direct, certain et actuel. Les ayants droits d'une personne décédée peuvent également exercer l'action civile née d'une infraction devant une juridiction répressive.

    Des conditions supplémentaires existent pour les personnes morales.

    2. Les conditions particulières aux personnes morales

    L'article 74 CPP fixe les conditions particulières aux personnes morales. Le paragraphe 1 de cet article est relatif aux associations, syndicats et ordres professionnels. Ces personnes morales ne sont recevables que sous la condition d'invoquer un dommage certain et un intérêt collectif ou professionnel. C'est dire qu'elles sont irrecevables si l'intérêt en cause est particulier à un des membres ou si le préjudice n'est qu'éventuel.

    Le paragraphe 2 quant à lui est relatif à l'assureur de responsabilité. Celui-ci est irrecevable devant les juridictions répressives.

    85. Il ne suffit pas d'être recevable et d'exercer une action devant une juridiction répressive pour voir l'action publique mobilisée. Il faut en plus le faire par les modalités appropriées.

    b. Les modalités du déclenchement de l'action publique par la partie civile

    La partie civile peut mettre l'action publique en mouvement par citation directe (1) ou par plainte avec constitution de partie civile (2)

    1. La citation directe

    86. La citation directe est la sommation à comparaître devant une juridiction de jugement délivrée par exploit d'huissier à la requête soit, du Ministère public, soit de la partie lésée par l'infraction ou de toute autre personne intéressée. Elle permet à la personne ayant subi un préjudice résultant de l'infraction de mettre l'action publique en mouvement. Lorsque

    la victime le fait, elle est tenue d'élire domicile au siège du tribunal saisi si elle n'y est pas domiciliée. La citation portera éventuellement la mention de ce domicile élu ainsi que d'autres indications telles que la date de sa délivrance, les noms, prénoms, adresses, profession et résidence du requérant ; les noms, prénoms et adresses de l'huissier ; les noms, prénoms, filiation et l'adresse complète du destinataire, particulièrement son domicile ou son lieu de travail. La citation doit en outre énoncer les faits incriminés et viser le texte de loi qui les réprime121.

    87. L'huissier doit faire toutes diligences nécessaires pour servir la citation au destinataire. Il mentionne sur l'original ainsi que sur les copies ses diligences, ainsi que les réponses faites à ses éventuelles interpellations122. L'huissier de justice est tenu de signifier la citation dans les 5 jours de sa délivrance sauf si le destinataire réside hors de la ville du lieu de comparution. La prorogation est de 1 jour/25 km et de 90 jours si le prévenu réside à l'étranger. Le non respect des délais entraîne la nullité de la citation. Celle-ci est prononcée par la juridiction qui ordonne une nouvelle citation. Elle peut aussi être annulée en cas d'inobservation d'autres formalités portant atteinte aux droits du concerné. Les frais d'annulation sont à la charge de l'huissier de justice si elle résulte de son fait.

    On peut tout de même signaler que les frais nécessaires pour procéder par voie de citation directe ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Ce qui rend cette modalité sélective123.

    2. La plainte avec constitution de partie civile

    88. La plainte avec constitution de partie civile est l'acte par lequel une personne qui s'estime lésée par une infraction saisit le juge d'instruction pour obtenir réparation du préjudice qu'elle prétend avoir subi. Elle est soumise à certaines conditions pour son admission124 et met l'action publique en mouvement.

    La constitution de partie civile n'est pas possible pour les infractions dont la poursuite est réservée au seul Ministère public et pour les contraventions. La personne qui entend se constituer initialement partie civile doit consigner au greffe du tribunal une somme fixée par une ordonnance du juge d'instruction suivant les nécessités des enquêtes ; un supplément de consignation pouvant être demandé au cours de celles-ci.

    89. Lorsque ces conditions sont remplies, la saisine du juge est valable et met l'action

    121 Art. 41 CPP.

    122 Lire pour complément l'art. 42 et suivants CPP.

    123 Surtout lorsqu'on sait que les aider judiciaires n'est pas facile à obtenir au Cameroun.

    124 Il faut de savoir qu'il existe deux types de constitution de partie civile ; la constitution de parte civile initiale (celle que nous étudions ici) et la constitution de partie civile incidente qui vient se greffer à l'action publique déjà engagée.

    publique en mouvement. Cela n'a pas toujours été ainsi c'est la jurisprudence qui, opérant un revirement, a eu à l'admettre dans un arrêt de la Cour de Cassation française125. Le législateur camerounais vient confirmer cette jurisprudence dans les dispositions de l'article 157, paragraphe 2 CPP.

    Toute constitution de partie civile abusive engage la responsabilité civile de son auteur, ce qui permet d'éviter l'engorgement des cabinets d'instruction par des constitutions de partie civile fantaisistes.

    Le législateur prévoit, en dehors du déclenchement de l'action publique par la partie civile, la possibilité pour certaines administrations de le faire.

    II. Le déclenchement de l'action publique par certaines administrations

    90. Certaines administrations peuvent également mettre en mouvement l'action publique mais seulement lorsque l'infraction porte sur la violation d'une disposition de la législation dont elles ont la charge de veiller au respect. Il s'agit des administrations telles que les eaux et forets, les douanes, le fisc, la prévoyance sociale...il s'agit en fait d'un droit de déclanchement spécial pour les infractions touchant à leur domaine d'activité. En effet si une infraction est commise dans ces domaines, ces autorités joueront à la fois le rôle de la police judiciaire et, dans une moindre mesure, celui du Ministère public qu'elles assistent devant la juridiction de jugement.

    91. A l'examen on se rend compte que les voies ouvertes aux autres personnes pour mobiliser les poursuites sont assez sélectives, soit du fait du manque de moyens financiers pour les emprunter, soit pour des causes relatives à la spécialisation du domaine d'intervention. Ceci rend donc l'utilisation de la voie principale assez incontournable.

    On pourrait dire que c'est le Ministre de la justice ou le pouvoir exécutif qui est juge des poursuites puisqu'il dispose non seulement des moyens de pression sur le Ministère public susceptibles de réduire son pouvoir d'apprécier l'opportunité des poursuites, mais également, peut autoriser ou « demander » l'arrêt des poursuites à toutes les étapes de la procédure même lorsque c'est d'autres personnes ou administrations qui les ont déclenchées.

    Le législateur aurait pu prévoir un organisme national ad hoc composé de magistrats de la cour de cassation qui déciderait du bien fondé des classements sans suite politiques ou non, et de l'arrêt de la procédure. Ceci pourrait obliger le Procureur de la République récalcitrant à délivrer le réquisitoire litigieux, d'éviter les frustrations et de

    125 Cass. 8 /12/1906 (arrêt Laurent ATTHALIN) D 1907, I, p207 « qu'en investissant la partie lésée du droit de

    saisir de l'action civile le juge d'instruction, le législateur a nécessairement entendu que le dépôt même de la

    plainte entre les mains du magistrat, avec constitution de partie civile, mettrait également en mouvement

    l'action publique »

    respecter le principe de la séparation des pouvoirs. Ce serait une adaptation de la commission des requêtes qu'avait proposée en France, la commission TRUCHE126, dans notre système judiciaire. Aussi l'article 64 devrait être revisité par le législateur.

    III. Le déclenchement de l'action publique par les juges

    Les juges dont il s'agit sont le juge d'instruction (a) et le juge de jugement (b).

    a. Le juge d'instruction et la mise en mouvement de l'action publique

    92. Dans le CIC, le juge d'instruction avait la possibilité de se saisir d'une affaire en cas de crimes ou de délits flagrants. Avec le code de procédure pénale, aucune permission ne lui est accordée pour déclancher l'action publique. Les articles 143 et 157 sont assez clairs à ce sujet. L'information judiciaire ne peut être ouverte que si le juge d'instruction est saisi par un acte du Procureur de la République ou par une plainte avec constitution de partie civile. A ce niveau la séparation des fonctions de justice répressive est respectée. Qu'en est il du juge de jugement ?

    b. Le juge de jugement et le déclenchement de l'action publique

    93. En principe, le juge de jugement ne dispose pas du pouvoir de mettre l'action publique en mouvement. Mais la loi lui donne la possibilité de le faire lorsqu'une infraction est commise à l'audience. A ce niveau il faut distinguer selon que l'infraction est une contravention, un délit ou un crime.

    En cas de contravention, le tribunal dresse sur le champ un PV des faits et entend les contrevenants, les témoins et le Ministère public, et statue. Il met donc l'action publique en mouvement (art. 624 a) CPP).

    Lorsque l'infraction est un délit, le tribunal procède comme dans le cas des contraventions.

    En cas de crime, « le président du tribunal ordonne l'arrestation de son auteur, procède à son audition, dresse PV de ses déclarations et le fait conduire devant le Procureur de la République qui procède conformément à la loi » (art. 624 c) CPP). On peut au regard de ces dispositions, dire que le président de la juridiction ne dispose pas du pouvoir de déclancher l'action publique. Ce d'autant plus que suivant les dispositions de l'article 142 CPP, l'information judiciaire est obligatoire en matière de crime. Donc en disposant que le

    126 ROBERT (J-H), De la nécessité d'un Ministère public, l'office du juge : par de souveraineté ou puissance nulle. Etudes rassemblées par CAYLA (O), MARIE-France, RENOUX-ZAGAME, Bruyant LGDJ, 2001.

    Procureur de la République procède conformément à la loi, l'article 624 c renvoie certainement à l'exercice par ce dernier de son pouvoir d'appréciation de la mise en mouvement de l'action publique. Ce déclanchement des poursuites qui ne peut se faire que par le truchement du réquisitoire introductif d'instance. Ce qui rend aussi le juge d'instruction actif. C'est cette mobilisation qui caractérise le Ministère public à l'audience pénale.

    Paragraphe II : le rôle actif du Ministère public aux audiences pénales

    94. Les juridictions de jugement sont le TGI et le TPI. Elles sont saisies par ordonnance de renvoi du juge d'instruction ou arrêt de la chambre de contrôle de l'instruction, par une citation directe de la partie civile ou du Ministère public, ou enfin, par la procédure de flagrant délit. Les grands principes ici sont l'égalité des armes et la présomption d'innocence. C'est cette dernière qui déterminera le rôle du parquet dans la mesure où l'attitude du prévenu ou de l'accusé modifie le déroulement de la procédure.

    Avec l'harmonisation de la procédure accusatoire du CPO, le déroulement des débats est fonction de l'attitude de l'accusé ou du prévenu. Lorsque le président du tribunal entre dans la salle d'audience, il déclare l'audience ouverte et invite l'assistance à s'asseoir. Le greffier audiencier fait appel des affaires inscrites au rôle. Le président vérifie la présence de chaque partie et de toute autre personne convoquée. La présence du Ministère public est obligatoire à peine de nullité de la procédure. Le code exige désormais la présence de l'accusé ou du prévenu. Celui-ci ne peut être absent que si la peine encourue en cas de condamnation est inférieure à 2 ans d'emprisonnement. Au cas contraire, son avocat ne sera invité qu'à donner les raisons de son absence et la décision qui interviendra sera contradictoire à son égard. Lorsque le président aura vérifié l'identité des prévenus ou accusés, il leur communiquera sommairement les faits qui leur sont reprochés et leur demandera s'ils plaident coupables (A) ou non (B).

    A. La passivité relative du Ministère public en cas d'admission de sa culpabilité par la défense

    95. Lorsque le prévenu ou accusé plaide coupable, le débat est bref. Le tribunal vérifie si cette réponse n'est pas donnée par le prévenu ou l'accusé pour sauver d'éventuels coauteurs ou complices, ou alors pour s'en sortir au meilleur compte. Après ces vérifications, le tribunal enregistre sa déclaration au plumitif d'audience. Le Ministère public expose les faits de la cause, propose la qualification pénale et énonce les dispositions légales applicables. La parole est donnée à la partie civile pour présenter ses observations sur les faits relatés par le Ministère

    public. Enfin l'accusé ou le prévenu fait les déclarations qu'il désire. Le tribunal se prononce soit en acceptant la déclaration de culpabilité, soit en la rejetant. Dans le premier cas, la parole est donnée à la partie civile ou son avocat pour formuler sa demande en dommages et intérêts avec justificatifs. Le Ministère public prend la parole pour produire le casier judiciaire de l'accusé ou du prévenu et requérir sur la peine et sur les dommages et intérêts. Le conseil de la défense intervient éventuellement pour plaider les circonstances atténuantes. Le prévenu ou l'accusé fait ses dernières déclarations. Le tribunal déclare les débats clos. La décision ne peut cependant jamais intervenir à la première audience.

    On remarque que lorsque le prévenu ou l'accusé se déclare coupable, le Ministère public ne joue pas véritablement un rôle actif. Ce qui est tout le contraire lorsque la défense plaide non coupable. Car un débat contradictoire, oral et public127 s'ouvre.

    B. La mobilisation du Ministère public en cas de refus de culpabilité par la défense

    96. Le Ministère public sera tenu de soutenir l'accusation par la production et la discussion des preuves (I) et l'interrogatoire des témoins (II) lorsque le prévenu ou l'accusé plaide non coupable.

    I. La production et la discussion des preuves par le Ministère public

    Le code de procédure pénale de 2005 a consacré le principe de production et de discussion contradictoire des preuves128. Ce principe qui repose essentiellement sur le principe de la présomption d'innocence, au regard de la relativisation de l'aveu par l'article 315129 CPP, procède à une distribution des taches. L'accusateur est débiteur principal de la preuve (a) la défense, débitrice exceptionnelle (b) et le juge joue essentiellement le rôle d'arbitre afin de découvrir la vérité et de mettre de l'ordre à l'audience.

    a. L'accusation, débitrice principale de la preuve

    97. L'article 307du code de procédure pénale dispose que « la charge de la preuve incombe à celui qui a mis en mouvement, l'action publique» cela s'exprime en latin par la maxime « actori incumbit probatio ». Ceci veut dire qu'en principe c'est l'accusateur qui doit rapporter la preuve de l'infraction dans ses éléments constitutifs et établir la culpabilité de

    127 Ces trois caractères sont fondamentaux dans la procédure à l'audience de jugement.

    128 NKOLLO (P), la recherche et la production des preuves dans l'avant projet du code de procédure pénale camerounais, thèse dactylographiée de Doctorat 3ème cycle Droit privé UY, p190.

    129 Cet article dispose que l'aveu n'est pas admis comme preuve s'il a été obtenu par violence, menaces, contraintes ou contre promesse d'un avantage quelconque ou tout autre moyen portant atteinte à la libre volonté de son auteur.

    l'accusé ou du prévenu. Le Ministère public n'étant pas forcement celui qui a mis l'action publique en mouvement, il peut arriver qu'il soutienne plutôt la défense130 en requerrant la relaxe ou l'acquittement du prévenu ou du suspect.

    Mais lorsque le Ministère public a lui-même mis l'action publique en mouvement, il agit rarement sinon jamais pour la défense du prévenu ou du suspect. Son travail consiste généralement à établir la preuve des éléments matériels de l'infraction ainsi que celle de l'élément moral. S'il s'agit par exemple du vol, il devra démontrer qu'il y a eu soustraction de la chose d'autrui, que cette soustraction a été frauduleuse (éléments matériels) et en plus, que l'auteur de la soustraction a eu pour intention de s'approprier la chose (élément moral) ; il est dispensé de l'obligation d'établir la preuve de la connaissance par le prévenu ou l'accusé du caractère répréhensible de ses actes : « Nul n'est censé ignorer la loi ». Mais dans certains cas, ses investigations devraient être beaucoup plus poussées dans la mesure où il pourra être tenu, en fonction de la qualification qu'il a donnée aux faits, d'établir en dehors du dol général131, le dol spécial132 ou alors le dol éventuel133.

    98. Il existe tout de même des cas où le législateur prévoit des présomptions de culpabilité renversant ainsi la charge de la preuve, celle-ci devant être désormais rapportée par la défense. En dehors de cela, il est facile de constater que lorsque le Ministère public a mis l'action publique en mouvement et qu'il y a également constitution de partie civile, il est aidé par la partie civile. L'inverse n'étant pas toujours vrai134.

    99. Lorsque la preuve de l'infraction est rapportée ainsi que celle de la culpabilité de l'accusé ou du prévenu, celui-ci peut toujours se défendre. Il lui reviendra dans ce cas de rapporter la preuve des moyens de défense qu'il pourra invoquer.

    b. La défense, débitrice exceptionnelle de la preuve

    La défense est tenue de rapporter la preuve des moyens de défense qu'elle invoque : « reus in excipiendo fit actor ». C'est dire que si le défendeur soulève une exception, il devra en rapporter la preuve. Dans l'hypothèse où le défendeur poursuivi pour meurtre invoque la légitime défense, il devra établir qu'il faisait, au moment de son coup fatal, l'objet d'une

    130 Il n'est pas simplement accusateur public ; il défend aussi une grande cause : la vérité.

    131 « Le dol général consiste à savoir que l'acte qu'on va poser est défendu et à vouloir le commettre » (NKOLLO (P), op. cit. p. 218

    132 Le dol spécial est « l'intention précise, requise par des Loi s particulières, comme élément constitutif de certaines infractions à propos desquelles le législateur incrimine généralement la production d'un résultat déterminé » (MERLE cité par NKOLLO (P), op. cit.p220

    133 Le dol éventuel c'est le fait de poser un acte recherchant un résultat précis tout en sachant qu'un autre pourrait être atteint.

    134 En fait il est constant de voir le membre du parquet s'évertuer à combattre, après avoir établi la preuve de l'infraction, à combattre les prétentions de la partie civile en lui reprochant par exemple d'avoir organisé toutes les circonstances pour se retrouver dans la situation de victime.

    attaque menaçant son intégrité physique, sa vie ou celles d'une autre personne et que sa réaction a été proportionnelle à ladite attaque.

    Par ailleurs, il peut être amené à titre principal, à rapporter la preuve de son innocence dans les cas où la loi prévoit les présomptions de culpabilité.

    100. A coté de la production et de la discussion des preuves qui, à travers leur caractère contradictoire, constituent des garanties fondamentales de la présomption d'innocence et donc des droits de la défense, le législateur a organisé la confrontation des témoins.

    II. La confrontation contradictoire des témoins

    Lorsque le prévenu ne reconnaît pas les faits, le tribunal entend les témoins. Ceux du Ministère public, accusateur, sont entendus les premiers, suivis de ceux de la partie civile et enfin de ceux de la défense. Aucune limitation n'est faite par rapport au nombre de témoins. Chacune des parties peut présenter autant de témoins qu'elle le désire.

    101. Chaque témoin subi l'interrogatoire de celui qui l'a fait cité (examination-in-chief), puis de la partie adverse (cross-examination) et éventuellement un second interrogatoire de celui qui l'a fait citer (re-examination). Le tribunal appelle les témoins l'un après l'autre de la salle des pas perdus où ils sont généralement confinés par le président de la juridiction (art. 373 CPP) pour éviter les corroborations des dires des uns à ceux des autres.

    Le Ministère public procède à l'examination-in-chief de ses témoins ainsi qu'à leur « ré-examination » au terme de la cross-examination. Si le tribunal estime les éléments de preuve suffisamment réunis pour que le prévenu ou l'accusé présente sa défense et lui explique ses droits, il lui demande s'il a des témoins à faire entendre ou d'autres éléments de preuve à présenter. Le témoin à décharge ou le prévenu lui-même est entendu conformément aux dispositions de l'article 332. Le Ministère public procède chaque fois à la cross-examination.

    102. Après la clôture des débats, le conseil de la partie civile intervient éventuellement, puis le Ministère public et le conseil de la défense. Le tribunal statue. Le Ministère public présente le casier judiciaire de l'accusé ou du prévenu, le conseil de la partie civile prend ensuite la parole. Après lui, le conseil de la défense est appelé à plaider les circonstances atténuantes ; le prévenu ou l'accusé fait sa dernière déclaration et le tribunal rend son jugement.

    L'on peut se rendre compte qu'ici les droits importants sont reconnus à la défense qui se trouverait en quelque sorte dans une position d'égalité avec l'accusation. Mais il y a lieu de dire que cela n'est qu'une vue superficielle de la chose dans la mesure où la défense ne dispose pas des mêmes capacités d'investigation que le Ministère public. Celui-ci, aidé par la police judiciaire, la force de maintien de l'ordre et éventuellement par la partie civile, pourra

    accéder facilement à certaines informations ou éléments de preuve contrairement à la défense.

    103. L'on pourrait améliorer davantage le sort de la défense en prévoyant l'obligation pour la juridiction, en cas de demande faite par la défense, d'ordonner les mesures d'instruction pour permettre à cette dernière de faire face à d'éventuelles obstructions dans sa démarche pour la découverte des preuves. Ceci pourrait favoriser la manifestation de la vérité et rendre la justice pénale moins judiciaire.

    Par ailleurs, l'accès à l'aide judiciaire ou assistance judiciaire devrait être facilité.

    En tout état de cause, la décision du juge marque la fin normale de l'instance, ce qui ne traduit pas la fin du procès qui peut se poursuivre par l'exercice éventuel des recours et l'exécution des décisions.

    Section II : l'exercice des voies de recours et l'exécution des décisions de justice répressive par le Ministère public

    Si le jugement marque la fin de l'instance, c'est en général l'exécution de la décision rendue (paragraphe 2) qui marque celle du procès puisque cette étape est prise en compte tout comme celle de l'exercice des recours (paragraphe 1) lorsqu'on apprécie la durée raisonnable du procès.

    Paragraphe 1 : l'exercice des voies de recours

    104. Les voies de recours sont généralement classées en deux catégories : les voies de recours ordinaires (A) et les voies de recours extraordinaires (B). Dans ces deux catégories, l'intervention du Ministère public est relativement limitée.

    A. Les voies de recours ordinaires

    Constituent les vies de recours ordinaires l'opposition (I) et l'appel (II) I. L'opposition

    105. L'opposition est une voie de recours qui remet les parties devant le même juge ; c'est une voie de rétractation. Elle n'est ouverte qu'aux parties ayant fait défaut lors des audiences qui ont donné lieu aux décisions contestées (jugement ou arrêt). La présence du Ministère public étant obligatoire lors des audiences sous peine de nullité, il ne lui est pas reconnu le droit de faire opposition.

    L'opposition est faite par déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision, soit par télégramme ou par lettre recommandée avec accusé de réception ou par tout

    autre moyen laissant trace écrite adressé au greffier en chef dans les délais légaux135. Dès la réception de la déclaration, le greffier en chef dresse un procès-verbal dont copie est communiquée au Ministère public et aux autres parties.

    L'opposition a un effet suspensif et peut porter sur une partie seulement de la décision.. L'opposant peut se limiter aux dispositions civiles ou pénales. Lorsque les délais pour faire opposition ont expiré, les parties ne disposent plus que de l'appel ou du pourvoi en cassation.

    II. L'appel

    106. Contrairement à l'opposition l'appel est une voie de recours qui transmet l'affaire à une autre juridiction, la Cour d'Appel ; c'est une voie de reformation ouverte au Ministère public, comme à toute autre partie. Le Ministère public peut même le faire lorsque le tribunal a statué dans le sens de ses réquisitions.

    L' appel est formé à peine d'irrecevabilité au greffe de la juridiction ayant rendu le jugement par déclaration, lettre ordinaire ou recommandée avec accusé de réception, ou par télégramme avec récépissé, ou tout autre moyen laissant trace écrite et ayant date certaine. Elle est adressée au greffier en chef de cette juridiction. A l'exception des appels formés par lettres ordinaires ou par déclaration, la date d'appel est celle de l'envoi, et le timbre à date du bureau de poste en constitue le repère.

    L'appel doit être interjeté dans les 48 heures de la notification pour les jugements avant dire droit et la Cour d'Appel doit statuer dans les sept jours à compter du lendemain du jour de la réception du dossier d'appel. Après avoir statué, la décision est notifiée aux parties et le dossier est retourné au greffe du tribunal.

    107. L'appel contre les jugements définitifs est ouvert à toute personne ayant été partie au procès et à toute personne ayant mis l'action publique en mouvement. L'appel principal doit être interjeté dans les dix jours pour toutes les parties y compris le Ministère public. Ceci à compter du lendemain de la date du jugement contradictoire ou du lendemain du jour de l'expiration du délai d'opposition. Le délai pour faire appel incident est de 5 jours à compter du lendemain de la notification de l'acte d'appel principal. La partie appelante doit produire à la suite de la déclaration ou de sa lettre, un Mémoire contenant ses moyens et conclusions. Le greffier en chef adresse immédiatement au Procureur de la République ainsi qu'aux parties, copie du procès-verbal ou de la déclaration d'appel par tout moyen laissant trace écrite.

    135 L'opposition se fait dans un délai de 10 à compter du lendemain de la signification du jugement à personne lorsque le condamné réside au Cameroun, à domicile, à voisin, au lieu de travail, à mairie; de 3 mois à compter de la signification faite à personne à l'étranger.

    A l'expiration du délai de production du Mémoire ci-dessus indiqué136, le greffier en chef met en état le dossier de procédure qui comprend l'acte d'appel, la procuration éventuellement, le procès-verbal d'appel, les procès-verbaux d'enquête de police judiciaire, les actes de procédure, les conclusions et Mémoires produits par les parties devant le tribunal, Les notes d'audience, toutes les décisions avant dire droit rendues par le tribunal et une copie du jugement. Ce dossier est transmis au greffier en chef de la Cour d'Appel qui le transmet au président de la cour qui, après avis du Procureur Général près ladite cour, fixe la date d'audience. Il fait communiquer au Procureur Général le dossier pour citation des parties et des témoins. En cas d'urgence, et sauf réquisition contraire du Procureur général, le président peut faire réduire de deux cinquième, le délai de citation des parties et des témoins137. Le Procureur Général rétablit le dossier au greffe de la cour.

    La procédure devant la Cour d'Appel est identique à celle qui a lieu devant les tribunaux. L'appelant est entendu le premier, le Ministère public en deuxième position et le condamné, le dernier.

    Si l'appel a été interjeté par le Ministère public, il est entendu le premier, l'intimé ensuite et le condamné, le dernier.

    On remarque que l'intervention du Ministère public dans les recours ordinaires est relative dans la mesure où il n'intervient que pour les appels et ne peut pas faire opposition. C'est également le cas dans les recours extraordinaires.

    B. Les voies de recours extraordinaires

    Les voies de recours extraordinaires sont le pourvoi en cassation (I) et la révision

    (II)

    I. Le pourvoi en cassation

    108. Le pourvoi en cassation est une voie de recours ouverte contre toute décision en dernier ressort, porté devant la cour suprême. Il peut être exercé par toutes les parties. Le Procureur Général près la Cour d'Appel peut le faire ainsi que le Procureur Général près la cour de cassation. Dans ce cas, il acquiert la qualité de partie principale.

    Le pourvoi en cassation est ouvert pour les cas d'incompétence, de dénaturation des

    136 15 jours à compter du jour de l'enregistrement de l'appel ou du lendemain du jour de la réception de la lettre du greffier en chef, d'une copie du procès verbal ou de la déclaration d'appel

    137 Art. 52 CPP Le délai entre le jour où la citation est délivrée et le jour fixé pour la comparution est de 5 Jours. Au moins si la partie citée réside dans la ville où a lieu son audition ou son interrogatoire. le délai est de 5 jour plus un délai de distance d'un jour pour 25 kilomètres lorsque la personne citée réside hors de la ville ou de la localité où a lieu l'audition ou interrogatoire. Ces délais sont calculés sur la distance séparant la résidence de la personne citée du lieu de l'audition ou de l'interrogatoire.

    faits de la cause ou des pièces de la procédure ; Il peut aussi intervenir pour défaut de contradiction ou pour insuffisance de motifs. Le pourvoi en cassation est également possible pour non-réponse aux conclusions des parties ou aux réquisitions du Ministère public. Il est recevable en cas de vice de forme138 le pourvoi est en outre ouvert pour excès de pouvoir, violation de la loi, ou violation de la règle de publicité d'audience. Le non-respect de la jurisprudence de la cour suprême ayant statué en sections réunies d'une chambre ou en chambres réunies139 peut également donner lieu à pourvoi.

    L'auteur du pourvoi saisit la cour suprême par déclaration faite au greffe de la Cour d'Appel qui constitue un dossier comprenant ladite déclaration, le procès-verbal de réception, les conclusions et Mémoires produits par les parties devant le tribunal et ou la Cour d'Appel, toutes les décisions avant dire droit rendues par les précédentes juridictions et les copies des jugements et de l'arrêt de la Cour d'Appel.

    Le pourvoi doit être formé à peine d'irrecevabilité dans le délai de 30 jours contre les arrêts par défaut, à compter du lendemain du jour de l'expiration du délai d'opposition. Ce délai est de 5 jours à compter de la date de notification de l'arrêt de la chambre de contrôle de l'instruction pour ses arrêts et de 10 jours à compter du lendemain du prononcé de l'arrêt contradictoire.

    109. Le pourvoi en cassation n'a pas d'effet suspensif. La suspension de l'exécution est possible sur demande de sursis à exécution introduite après le pourvoi ou concomitamment en matière civile. Le rejet de cette demande peut donner lieu à pourvoi d'ordre formé par le Procureur Général près la cour suprême sans aucune exigence de délai.

    En dehors du pourvoi, il existe aussi la révision comme voie de recours extraordinaire.

    II. La revision

    110. La révision est une voie de recours qui n'est pas ouverte au Ministère public. Seuls peuvent demander la révision le Ministre de la justice, le condamné ou son représentant légal, toute personne ayant intérêt à agir à cette fin, en cas de décès ou d'absence juridiquement

    constatée d'un condamné. Sans aucune condition de délai, la révision a lieu dans les cas après une condamnation, des éléments de preuve de l'innocence du condamné sont trouvés. Il
    peu s'agir par exemple, d'une condamnation pour meurtre dont le prétendu mort est retrouvé

    138 Lorsque la décision attaquée n'a pas été rendue par le nombre de juges prescrit ou a été rendu par les juges qui n'ont pas siégé à toutes les audiences, l'indivisibilité n'étant pas propres aux magistrats du siège. Lorsque le Ministère public n'a pas été représenté ou lorsque la parole ne lui a pas été donnée et lorsqu'il y a eu violation de la règle de la publicité des audiences

    139 Les chambres réunies remplacent l'assemblée plénière depuis la reforme de l'organisation judiciaire opérée par la loi due décembre 2006.

    vivant.

    La chambre judiciaire de la cour suprême siégeant en sections réunies, peut déclarer la demande recevable ou non. Si elle reçoit la demande, elle peut rendre un arrêt d'acquittement140 ou de relaxe lorsqu'elle estime la demande fondée ; l'arrêt de rejet peut intervenir dans le cas contraire.

    Ici encore on constate que le Ministère public est recevable pour les pourvois et ne peut pas exercer une demande en révision. Par ailleurs, les droits des justiciables sont garantis à travers le double degré de juridiction, accru par la reconnaissance à leur profit d'une possibilité de rectifier les erreurs judiciaires qui auraient été à l'origine de leur condamnation.

    111. Mais on peut tout simplement déplorer le fait que le pourvoi dans l'intérêt de la loi, lorsqu'il est formé sur initiative personnelle du Procureur Général près la cour suprême, ne puisse pas profiter aux parties. Il aurait été plus judicieux de faire produire les effets des différentes voies de recours à toutes les parties. Car justice ne signifie pas seulement application de la loi mais aussi, respect des droits de l'Homme.

    Lorsque les voies de recours ne peuvent plus être exercées ou lorsqu'elles sont épuisées la décision acquière force de chose jugée et peut légitimement être exécutée.

    Paragraphe II : le Ministère public, autorité d'exécution des décisions de justice répressive

    112. L'efficacité d'une bonne justice ne dépend pas uniquement de la qualité des décisions rendues, mais aussi de l'effectivité et la rapidité de leur exécution. Le code de procédure pénale de 2005 a confié au Ministère public, en dehors de l'exécution immédiate des ordres et décisions judiciaires d'arrestation, de détention, de mise en liberté, celle des décisions de justice devenues irrévocables. En leur qualité de parties au procès, le Ministère public ou les parties civiles poursuivent chacun en ce qui le concerne cette exécution141. Le Ministère public procède donc à l'exécution des peines privatives de liberté (A) et des condamnations pécuniaires (B).

    A. L'exécution des peines privatives de liberté

    En tant que représentant de la société, le Ministère public veille à l'exécution effective des peines privatives de liberté. Il peut à cet effet se présenter comme le garant de la paix et la sécurité publiques (I) ce qui entraîne certaines conséquences (II).

    I. Le Ministère public, garant de la paix et de la sécurité publiques

    140 On parle d'acquittement en cas de crime et de relaxe lorsqu'il s'agit des délits.

    141 Voir article 545 (3) du code de procédure pénale

    113. L'exécution des peines privatives de liberté est assurée par le Procureur de la République ou le Procureur Général qui disposent du droit de requérir directement la force publique. Concrètement, après le prononcé de toute décision, le président de la juridiction doit s'assurer de son exécution. Pour ce faire, il communiquera la décision au greffe de la juridiction. Le greffier portera la décision dans le registre ouvert à cet effet auprès de chaque greffe. Une copie de la décision sera remise au Ministère public ainsi qu'aux autres parties. Le Ministère public veillera donc à l'exécution des condamnations.

    Selon l'école de la défense sociale positiviste, la société doit être protégée contre le délinquant. La peine va se présenter ainsi comme une mesure d'intimidation, d'élimination des menaces à la paix et à la sécurité publiques. La peine privative de liberté doit conduire à l'incarcération du condamné de façon immédiate. Et c'est au Ministère public que revient la charge de rendre cette exécution effective. Il saisira à cet effet les agents de la police ou de la gendarmerie ou encore ceux de l'administration pénitentiaire aux fins de conduire le condamné à la prison, lieu où il purgera sa peine. Il s'ensuit que le Ministère public n'a pas à ce niveau un pouvoir pour apprécier l'exécution de la peine ; des conséquences en résultent.

    II. L'appréciation critique de l'exécution des peines privatives de liberté

    114. L'absence d'un pouvoir d'appréciation de l'exécution de la peine privative de liberté chez le Ministère public a pour conséquence que toutes décisions prévoyant un emprisonnement doivent être exécutées dans les locaux de la prison. Le Ministère public ne peut donc pas comme c'est le cas en France, communiquer certains dossiers au juge de l'application des peines, celui-ci étant inexistant dans la structure judiciaire camerounaise. Ceci pourrait justifier les surcharges constatées dans nos différentes prisons142.

    115. L'autre conséquence serait que la personnalisation de l'exécution de la peine ne peut être envisagée qu'avant son prononcé. Ce qui n'est pas rassurant dans la mesure où le juge ne dispose pas de temps suffisant pour apprécier la personnalité du délinquant ou son comportement. Or cela peut être facilement effectué par le juge de l'application des peines après le prononcé de la décision.

    Si dans le schéma classique du fonctionnement des institutions, la loi fixe la peine, le juge la prononce et l'administration l'exécute, ce schéma peut s'avérer aujourd'hui obsolète puisque la fonction du juge s'étend davantage au contrôle de l'exécution des décisions de justice rendues. En fait, le sort du condamné ne devrait plus être laissé à l'administration

    142 Voir les effectifs des prisons centrales de YAOUNDE et DOUALA par exemple où les condamnés à des petites peines cohabitent avec les grands criminels. Ce qui a généralement pour conséquence de les rendre plus délinquants et récidivistes à leur sortie. La fonction de protection de la peine se trouvant ainsi remise en cause.

    pénitentiaire car la peine n'est plus immuable ; elle peut être aménagée en considération du comportement du condamné. La défense sociale devrait également tenir compte de la réinsertion sociale du condamné143. La peine ne remplit plus seulement une fonction de rétribution, d'élimination temporaire, ou de dissuasion, elle a aussi une fonction d'amendement et de réinsertion sociale. Ce qui constitue des garanties d'humanisation, de prévention de la récidive et de meilleure efficacité de la justice pénale. L'institution d'un juge de l'application des peines en droit camerounais s'avère ainsi comme une nécessité imparable144 malgré l'insuffisance d'infrastructures appropriées pour la personnalisation de l'exécution des peines.

    116. Le juge de l'application des peines a un double rôle : contrôler dans un premier temps les conditions générales de l'exécution des peines probatoires d'emprisonnement et décider de leur personnalisation éventuelle lorsque les peines relèvent de sa compétence145, dans un second temps. Il n'est pas compétent pour connaître des incidents d'exécution.

    L'institution d'un juge de l'application des peines constituerait un complément à la garantie de l'efficacité de la justice répressive par le Ministère public, garantie qui s'étend également à l'exécution des condamnations pécuniaires

    B. L'exécution des condamnations pécuniaires.

    117. En disposant que « Le Ministère public et les parties poursuivent, chacun en ce qui le concerne, l'exécution des décisions devenues irrévocables », l'article 545 paragraphes 3 du code de procédure pénale voudrait dire que le Ministère public n'a pas pour mission de veiller au recouvrement des dommages et intérêts pour la partie civile. Il a pour mission essentielle, en dehors de l'exécution des peines privatives de liberté, de garantir les intérêts de l'Etat. A cet effet, il veille au recouvrement immédiat des amendes et autres frais de justice (I) et peut également procéder à leur recouvrement forcé (II).

    I. Le rôle du Ministère public dans le recouvrement des amendes

    118. Sous le vocable « amendes », on peut regrouper les amendes ordinaires, les amendes forfaitaires et les frais de justice. Le Ministère public veille au recouvrement des amendes ordinaires et frais de justice ainsi qu'au recouvrement des amendes forfaitaires.

    Les amendes et frais de justice sont payés au greffier en chef de la juridiction qui a

    143 il s'agit précisément des idées de la défense sociale Nouvelle de marc Ancel.

    144 Une étude menée par BOUVIER (O-L) a révélé que les juges de l'application des peines a été institué en Colombie, en Côte d'Ivoire depuis 1969, au Burkina Faso depuis 1988, à Madagascar, au Brésil, en Jordanie, au Bénin, au Niger, au Togo ; en Afrique du Sud la reforme pénitentiaire implique les juges dans le contrôle de l'exécution des peines...

    145 Il peut ainsi substituer à une peine d'emprisonnement, l'exécution d'un travail intérêt général ou une mesure de semi-liberté...

    rendu la décision. Le greffier en chef délivre préalablement une copie de la décision contenant le décompte des amendes et frais de justice au condamné. Si celui-ci peut s'acquitter de ces frais immédiatement, il le fait et le greffier en chef lui délivre une quittance de paiement sans frais, extraite d'un carnet à souches. Une copie du paiement est également transmise au Ministère public par le greffier en chef ainsi que l'extrait de la décision devenue irrévocable.

    119. Le recouvrement des amendes forfaitaires146 est effectué par les officiers de police judiciaire147 agissant comme agent verbalisateur sous le contrôle du Ministère public.

    L'agent verbalisateur doit être muni d'un carnet à souches spécial côté et paraphé par le parquet compétent. Le paiement148d'une amende forfaitaire est facultatif149 et donne lieu à la délivrance sur-le-champ d'un reçu du carnet à souches et à l'établissement d'un procèsverbal qui sera communiqué au Ministère public. Le taux de l'amende forfaitaire est fixé, suivant la classe de la contravention150. Les sommes perçues au titre des amendes forfaitaires sont versées sans délai au trésor public. Le trésorier ou tout autre responsable habilité des services du trésor dresse un état des versements dont une copie signée par lui est adressée au Procureur de la République compétent. Celui-ci exercera son contrôle sur la légalité de l'amende perçue. Si le Procureur de la République constate que le montant de l'amende forfaitaire perçue est supérieur151 ou inférieur152 au taux légal, il rétablira la situation par ordonnance notifiée au contrevenant (art 619 CPP).

    Le paiement de l'amende forfaitaire éteint l'action publique. Alors que le refus de payer peut donner lieu à l'ouverture des poursuites.

    120. En tout état de cause la non exécution d'une condamnation pécuniaire peut donner lieu à une mesure d'exécution forcée.

    II. L'exécution forcée des condamnations pécuniaires

    146 L'amende forfaitaire est une peine pécuniaire applicable aux contraventions et dont le montant est fixé d'avance par la loi. Elle n'est pas perçue lorsque la contravention a causé un dommage corporel ou matériel ; est connexe à un délit ou à un crime ; se rapporte à la gérance ou à l'exploitation d'un débit de boissons ; lorsqu'une disposition légale impose à l'agent verbalisateur de prendre une mesure administrative notamment la mise en fourrière du véhicule ou le retrait du permis de conduire ou de toute autre pièce ; si le contrevenant est en état d'ivresse dans un lieu public.

    147 Les agents de police judiciaire et les agents publics investis les attributions de police judiciaire ne peuvent percevoir lesdites amendes que s'ils y sont régulièrement habilités.

    148 Avant de procéder à la perception de l'amende, l'agent forfaitaire doit prouver sa qualité au contrevenant en produisant sa carte professionnelle

    149 . Toute mesure vexatoire ou d'intimidation à l'égard du contrevenant qui refuse de payer est passible des sanctions prévues à l'article 140 CP (art 614 CPP)

    150 1000 F pour la première classe; 2400 F pour la deuxième classe ; 3600 F pour la troisième classe ; 25000F pour la quatrième classe

    151 La restitution sera nécessairement effectuée, sur présentation de l'ordonnance du Procureur de la République ou du jugement, par le trésor public.

    152 Ce cas constitue une contravention de quatrième classe engageant la responsabilité de l'agent verbalisateur.

    A côté des mesures d'exécution forcée153 prévues dans l'Acte Uniforme OHADA sur les procédures simplifiées et voies d'exécution, le code de procédure pénale a prévu la contrainte par corps. Celle-ci vise à obliger le condamné à exécuter les condamnations pécuniaires ou à effectuer les restitutions ordonnées par une juridiction répressive.

    121. Consistant en une incarcération, la contrainte par corps est exécutée à la diligence du Ministère public tant au profit de l'Etat que dans l'intérêt de la partie civile154. Elle ne peut pas être exercée contre les personnes âgées de moins de dix-huit ans ou de plus de soixante ans au moment de son exécution, ni contre les femmes enceintes. Elle ne peut non plus être prononcée contre les civilement responsables ou l'assureur de responsabilité. Son exécution ne peut pas se faire simultanément avec celle d'une peine privative de liberté ; elle intervient après l'exécution de celle-ci et s'éteint avec la prescription de la peine qui l'a fait naître. Son exécution peut être suspendue en cas de proposition d'une caution acceptée. L'exécution de la contrainte par corps n'éteint pas la dette.

    CONCLUSION DU CHAPITRE II

    122. Au terme de ce chapitre où il a été question de l'exercice de l'action publique et de l'exécution des décisions de justice par le Ministère public, le constat qui peut être fait est que, le ministère public pèse d'un poids important sur la décision de mise en mouvement de l'action publique malgré la reconnaissance par le législateur à la partie civile et à certaines administrations du droit de déclencher les poursuites.

    Le législateur de 2005, dans le souci de garantir la présomption d'innocence et l'égalité entre les parties, a rendu le Ministère public plus actif. Il a ainsi accentué le caractère accusatoire du procès pénal lors des audiences par la redistribution des rôles dans la production et la discussion des preuves, et les interrogatoires croisés des témoins. Désormais le parquet, comme toutes les autres parties, ne siégera plus à l'extrade il ne pourra produire le casier judiciaire du prévenu ou du suspect qu'à la fin des débats.

    Par ailleurs, pour garantir l'intérêt public, la présence du Ministère public est obligatoire lors des audiences et l'effectivité de cette présence est assurée par la réaffirmation du principe de l'indivisibilité du parquet.

    Relativement à l'exécution, on se rend compte que le législateur met un accent

    153 Il s'agit notamment de la saisie vente des biens du condamné, de la saisie attribution...

    154 La durée de la contrainte par corps diffère selon qu'il s'agit des intérêts publics ou privés (art 564 CPP). Lorsqu'il s'agit des intérêts privés la requête la contrainte par corps est effectuée à la suite d'une requête de l'intéressé ; alors que le mandat d'incarcération est immédiatement établi au prononcé de la décision et transmis au Ministère public pour exécution (art 558).

    particulier sur les objectifs de protection de la société et de recouvrement rapide et effectif des biens pécuniaires de l'Etat au point où toute peine prononcée pourra aboutir à l'incarcération de celui contre qui elle l'est.

    123. Si ces objectifs peuvent être atteints, il faut souligner que leur conciliation avec le respect des droits et libertés individuelles n'est pas garantie. Car le législateur camerounais a manifesté, dans le CPP une indifférence à l'égard des idées de la défense sociale nouvelle. Indifférence caractérisée par l'absence d'un juge de l'application des peines et l'utilisation de l'incarcération comme solution à tous les problèmes.

    CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

    124. le Ministère public se présente comme le « nerf central » du procès pénal. C'est lui qui constate les infractions à la loi pénale et en recherche les auteurs pour les soumettre ou non à la justice des juges. Il donne à ce procès toute son impulsion par le déclenchement des poursuites et l'exercice de l'action publique aux étapes de l'information judiciaire et de jugement, le régularise par l'exercice des voies de recours et son concours à l'exécution des décisions pécuniaires et privatives de liberté.

    125. Pour atteindre ses objectifs, le législateur de 2005, en harmonisant la procédure pénale, a maintenu le Ministère public et a jeté son dévolu sur ses attributions.

    Afin de se conformer aux exigences de sauvegarde des droits et liberté du citoyen, le législateur a réglementé la phase policière du procès pénal. Il a ainsi officialisé l'enquête préliminaire et a reconnu au suspect un certain nombre de droits lors de la garde à vue. Le Ministère public s'est vu doté de la qualité de gardien de ces droits par l'impulsion et le contrôle qu'il assure à cette phase.

    Dans l'optique de garantir le droit à une justice équitable, le législateur a dessaisi le Procureur de la République de la qualité de magistrat instructeur, renouant ainsi avec le principe de la séparation des fonctions de poursuites et d'instruction mise en veilleuse depuis la réforme de 1972. IL a renforcé le caractère accusatoire du procès pour assurer l'égalité entre les parties, rendant ainsi le Ministère public plus actif. C'est également à travers le Ministère public, que passent l'exécution rapide des décisions de justice répressive et le recouvrement effectif des amendes et autres frais de justice.

    126. Cependant l'atteinte de ces objectifs n'est pas absolument garantie. Des pesanteurs existent qui pourraient compromettre la finalité principale du procès pénal qu'est la conciliation de la protection des droits de l'Homme et celle de l'ordre public ou de l'intérêt général.

    Tout d'abord, la garantie au contrôle de la garde à vue n'est pas assurée. Aucun régime n'est prévu à cet effet et les moyens du parquet ne le prédisposent pas à l'accomplissement d'une tache qui lui est facultative.

    Ensuite, le Ministère public, loin d'être simplement le titulaire de l'exercice de l'action publique, se présente davantage comme le maître des poursuites. Il dispose de l'opportunité de les déclencher, et peut les arrêter à tout stade de la procédure. Ce qui remet en cause le principe de la séparation des fonctions de justice répressive, garantie fondamentale du procès équitable. L'article 64 du CPP devrait à cet effet être revisitée par le législateur

    Enfin, si la rapidité de l'exécution des décisions de justice et le recouvrement

    immédiat et effectif des condamnations pécuniaires assurent la protection de l'ordre public et de l'intérêt de l'Etat, il faut déplorer le fait que le législateur ait fait table rase du souci de réinsertion sociale des délinquants, tout comme il a privilégié les intérêts pécuniaires au détriment des libertés individuelles. La contrainte par corps à notre avis est une mesure anachronique puisque des solutions alternatives existent, telles que les mesures d'exécution forcées prévues par l'Acte Uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution entrée en vigueur depuis le 10 juillet 1998 pour assurer le recouvrement des condamnations pécuniaires.

    127. La « justice » dans le procès pénal dépend donc en grande partie de ce qu'est le Ministère public : Trop puissant, celle-ci en pâtirait ; trop faible, l'ordre public et la paix sociale seraient perpétuellement menacés. Il convient à cet effet de le doter de pouvoirs moyens, mais suffisants pour l'accomplissement effectif et efficace de sa mission, mission qui s'étend à d'autres types de procès tels que le procès civil.

    128. Dans les procès civils, le contentieux oppose généralement les particuliers et porte sur les intérêts privés. Le Ministère public y joue a priori un rôle effacé. Il ne donne en principe que son avis à la juridiction relativement à l'application de la loi. Il est donc partie jointe et intervient par voie de réquisition orale ou écrite dans un procès déjà engagé par les particuliers.

    Mais il peut aussi y être partie principale comme en matière pénale. La loi prévoit en principe les cas où cela est possible de façon expresse. Dans de tels cas, il est demandeur ou défendeur et les règles ordinaires de la procédure lui sont applicables, mais avec quelques modérations155.

    Etant le représentant de la société auprès des juridictions, et chargé de veiller au respect de la loi et de l'ordre public, on se demande alors si le Ministère public peut être partie principale dans les cas non spécifiés par la loi sur le fondement de cette mission. Autrement dit, le Ministère public dispose-t-il d'un droit général d'action pour la défense de l'ordre public ou de la loi ? Cette interrogation ne manque pas d'intérêt en droit camerounais. Sur le plan de la théorie du droit, la sécurité des biens, des personnes et des affaires ne peut être assurée juridiquement que par la clarté et la précision des textes. Ce qui ne semble pas être le cas au Cameroun au regard des règles applicables en matière de procédure civile et commerciale156. Par ailleurs, le rôle du Ministère public est en général mal connu en matière de procédure civile d'où l'intérêt didactique qu'on peut tirer de cette partie.

    129. Pour répondre à cette préoccupation, il convient de dire que si le Ministère public peut intervenir comme partie jointe dans toutes les affaires après avoir reçu communication des dossiers de procédure (chapitre 1), son droit d'action d'office demeure encore exceptionnel au Cameroun (chapitre 2)

    155 Il n'est pas tenu d'avoir recours à un avocat ; il n'est pas tenu de déposer les conclusions écrites avant de prendre la parole ; il n'est jamais condamné aux dépens ; agissant dans l'intérêt de l'ordre public, il peut interjeter appel même lorsque le jugement rendu est conforme à ses conclusions (CA Toulouse, 31 mars 1947, S. 1947. 2. 109).

    156 La procédure civile camerounaise est encore régie par le vieux code de procédure civile et commerciale hérité de la France à travers son passage sur le territoire national en tant que puissance mandataire de la SDN et tutrice du Cameroun avec l'onction de l'ONU.

    CHAPITRE I : LE REGIME DES COMMUNICATIONS AU MINISTERE PUBLIC, PARTIE JOINTE

    130. Lorsque le procès est déjà engagé par les particuliers, le Ministère public intervient comme partie jointe. Malgré cette dénomination, il n'a pas véritablement la qualité de partie au procès. A cet effet il peut être récusé comme le serait un juge ; il ne peut en principe exercer aucun recours157 et le trésor public ne peut aucunement être tenu de supporter les frais de procédure qui restent entièrement à la charge des parties.

    Selon les cas, l'intervention du Ministère public peut s'avérer nécessaire ou facultative d'où les différents types de communication prévus pour favoriser son information (section 1). Cette communication se fait suivant une procédure bien déterminée et son ineffectivité donne lieu à sanction (section 2).

    Section I : L'information du Ministère public : les types de communication

    Comme nous venons de le dire, l'intervention du Ministère public peut être obligatoire ou facultative selon les cas. Elle est obligatoire lorsque la loi l'a prévue expressément ; la communication revêt alors un caractère impératif (paragraphe 1). Dans le cas contraire, la communication est faite, soit à la demande du Ministère public, soit sur initiative personnelle du juge ; elle est dans ces cas facultative ou judiciaire (paragraphe 2), ce qui ressort clairement des dispositions de l'article 36158 du CPCC.

    Paragraphe I : La communication impérative ou légale 159

    131. La communication légale oblige le Ministère public à intervenir pour présenter ses observations dans certaines matières (B) ou devant certaines juridictions (A). C'est dans ces cas qu'on dit souvent que l'affaire est communicable au Ministère public.

    157 Mais il exerce généralement l'appel dans certains cas.

    158 Art. 36 CPCC : « seront communiquées au Ministère public les causes suivantes : 1) celles qui concernent l'ordre public, l'Etat, le territoire, les domaines, les communes, les établissements publics, les dons et legs au profit des pauvres ; 2) celles qui concernent l'état des personnes et les tutelles ; 3) les déclinatoires sur incompétences ; 4) les règlements des juges, les récusations et renvois pour parenté et alliance ; 5) les prises à partie ; 6) les causes des femmes non autorisées par leurs maris, ou même autorisées, lorsqu'il s'agit de leur dot, et qu'elles sont mariées sous le régime dotal ; les causes des mineurs, et généralement toutes celles oh l'une des parties est défendue par un curateur ; 7) les causes concernant ou intéressant les personnes présumées absentes. Le Procureur de la République pourra néanmoins prendre communication de toutes les autres causes dans lesquelles il croira son Ministère nécessaire ; le tribunal ou le juge de paix à compétence étendue pourront même l'ordonner d'office ».

    159 Elle est d'ordre public et a lieu d'office cf. cassation 1ère civ. 14 déc. 1983, bull civ. I, n°297 ; cass. Ch. Mixte 21 juillet 1978, Gaz. Pal. 1978.2.579, note J. VIATTE... la liste de s matières communicables est limitative.

    A. La communication légale devant la Cour Suprême

    132. La cour Suprême n'est pas un troisième degré de juridiction160 ; elle ne connaît pas des faits mais seulement du droit. C'est dire que la Cour Suprême ne peut être saisie que pour des questions qui portent sur l'application de la loi, qu'elle soit de fond ou de procédure. Elle joue à cet effet le rôle d'une juridiction d'unification et d'harmonisation de la jurisprudence. Elle peut être saisie dans les délais légaux161 par les parties au procès et exceptionnellement162 par le Ministère public qui n'a en général devant elle que le rôle de partie jointe, tenue de donner son avis sur toutes les affaires qui y parviennent.

    Concrètement, les pourvois sont formés, soit par requête, soit par lettre ou par déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision en dernier ressort, par le demandeur en personne, par son avocat ou par un mandataire muni d'un pouvoir spécial163. Le greffier qui reçoit la déclaration dresse un PV dont la première expédition est adressée au greffier en chef de la Cour Suprême, et une seconde au greffier en chef de la Cour d'Appel ou de la juridiction dont la décision est attaquée. Dans la quinzaine de la réception du pourvoi, le greffier de la juridiction dont émane la décision attaquée dénonce le pourvoi au demandeur ou à son domicile, par lettre recommandée avec accusé de réception ou par exploit d'huissier. Dans un délai maximum de 60 jours à compter de la déclaration, il met le dossier en état et le transmet au greffier en chef de la Cour Suprême. Après certaines vérifications, le greffier en chef de la Cour Suprême avise l'avocat choisi ou désigné, du dépôt du dossier à son greffe et du temps à lui imparti pour déposer le Mémoire ampliatif articulant et développant les moyens de droit qu'il invoque au soutient de son pourvoi. Ce Mémoire doit être fourni en autant d'exemplaires qu'il y a de défendeurs plus deux. Le greffier en chef assure la notification du Mémoire au défendeur qui dispose de 30 jours pour déposer un Mémoire en réponse en autant d'exemplaires qu'il y a de demandeurs plus deux. Notification de ce Mémoire est également faite au demandeur par le greffier en chef. Si le demandeur estime nécessaire, il lui est permis d'adresser un Mémoire en réplique.

    160 Même comme depuis la Loi de décembre 2006 elle peut évoquer et statuer au fond lorsque l'affaire est en état d'être jugée car cela ne lui confère pas pour autant la qualité d'une juridiction de fond.

    161 En matière civile, commerciale et sociale le délai de saisine de la Cour suprême est de 30 jours à compter de la signification. En matière pénale les délais sont de 10 jours pour les arrêts rendus au fond, 07 jours pour les arrêts avant dire droit à compter du lendemain d jour du prononcé de la décision contradictoire, de 30 jours contre les arrêts par défaut et court à compter du lendemain du jour de l'expiration du délai d'opposition, et enfin de 05 jours contre les arrêts de la chambre de contrôle de l'instruction à compter de la date de notification de l'arrêt au Ministère public , aux parties ou à leurs conseils.

    162 Le Procureur Général près la Cour suprême peut par exemple saisir la Cour suprême dans le cadre du pourvoi dans l'intérêt de la loi dont les effets ne profitent d'ailleurs pas aux parties

    163 En cas d'absence de pouvoir spécial, le pourvoi reste valable si la personne concernée a fait des actes de régularisation dudit pourvoi personnellement. Ces actes peuvent être soit la constitution d'un avocat, soit l'introduction d'une demande d'assistance judiciaire.

    Lorsque l'affaire est en état, le greffier en chef transmet au président le dossier pour désignation d'un rapporteur. Le président ou le conseiller rapporteur rétablit le dossier au greffe dans un délai maximum de 30 jours sans y joindre son rapport. Le rapport du rapporteur est transmis sous pli confidentiel au président de la Cour Suprême qui en communique sous pli confidentiel, une copie au Procureur Général près ladite Cour. Le dossier rétabli au greffe est transmis, en même temps que les copies des différents Mémoires, sans délai au Procureur Général près la Cour suprême. On peut noter à ce niveau la différence avec la procédure devant la Cour d'Appel en matière civile164 où le Procureur général, lorsqu'il veut prendre des conclusions dans une affaire importante, assiste aux débats, écoute les plaidoiries et demande à la Cour communication du dossier pour préparer ses conclusions165. Ce qui fait que le parquet intervient avant le conseiller. C'est donc le contraire devant la Cour Suprême. Après réception du dossier, le Procureur Général près la Cour Suprême, comme le conseiller rapporteur ou le président, propose dans ses conclusions une solution précise au litige. Il peut d'office soulever des moyens. Il dispose d'un délai de 30 jours pour adresser au président ses conclusions sur pli confidentiel. Le président en fait communication aux membres de la Cour et rétablit le dossier au greffe en même temps qu'il formule ses propositions pour l'inscription de l'affaire au rôle. Dès que le Procureur Général retourne le dossier au greffe, celui-ci le soumet au président pour fixation de la date d'audience. Cette date est notifiée au Procureur Général et aux membres de la Cour ; les parties en sont informées par affichage du rôle.

    133. A l'audience, le conseiller- rapporteur lit son rapport, les conseils des parties et le Procureur Général développent leurs arguments à l'appui de leurs Mémoires et conclusions respectivement. Lorsque les solutions proposées par le conseiller et le Procureur Général sont divergentes, l'affaire est mise en délibéré pour permettre aux membres de la Cour de prendre connaissance des pièces de la procédure.

    Le Ministère public joue donc un rôle important devant la cour Suprême et intervient dans toutes les affaires pour proposer une solution à celles-ci, solution si nécessaire, bien rédigée afin de corroborer les écrits aux propositions. Comme le pense un auteur, «il ne suffit pas de concevoir une idée, il faut la rédiger. Si la plume se refuse à traduire cette idée, c'est généralement que celle-ci est mauvaise »166.

    Le Ministère public n'a pas communication seulement devant la Cour suprême ; il lui est communiqué obligatoirement d'autres affaires devant d'autres juridictions pour des intérêts complémentaires à la défense de la loi.

    164 L'autre différence est qu'en matière civile, le rôle du Ministère public est assez discret devant la Cour d'Appel
    puisque l'avocat général n'intervient presque jamais à la chambre civile sinon officieusement dans le délibéré.

    165 Voir Mémoire de fin de maîtrise en Droit privé d'ELOUNDOU ELOUNDOU (A) p. 12.

    166 ELOUNDOU ELOUNDOU (A) op. cit. p 12.

    B. La communication dans l'intérêt de la justice et des particuliers

    134. Le Ministère public intervient nécessairement dans certaines matières pour la protection des intérêts de l'Etat (I), la protection de certaines personnes (I) et dans l'intérêt de la justice (III) ; ces matières sont prévues par le code de procédure civile et commerciale et par bien d'autres textes dans lesquels il est dit << qu'il doit faire connaître son avis » ou qu'il sera statué << le Ministère public entendu » ou << après réquisitions du Ministère public »...

    I. La communication dans le but de la protection des intérêts étatiques

    Tout ce qui touche à l'état civil (a) et à la nationalité (b) est extrêmement sensible et suivi de très près par le Ministère public. Il en est de même des causes qui concernent l'ordre public, le territoire, les domaines, les communes les établissements publics, les dons et legs au profit des pauvres167.

    a. Les questions relatives à l'état civil

    135. L'état civil étant par essence le moyen utilisé par l'Etat pour individualiser les citoyens, il faut s'assurer de sa fiabilité et de sa stabilité. C'est la raison pour laquelle cet état doit être attribué avec certitude et modifié uniquement en cas de nécessité extrême. L'état civil d'une personne se définit par son nom, son ou ses prénoms, sa date et son lieu de naissance, son sexe, sa filiation, éléments auxquels s'ajoutent son mariage et son décès. Lorsque ces différents éléments sont portés devant une juridiction, il en est fait communication au Ministère public.

    Relativement à l'état civil en général, le Ministère public contrôle les registres d'état civil chaque année. En effet, les registres sont clos et arrêtés par l'officier et le secrétaire d'état civil compétents chaque 31 Décembre et transmis dans les 15 jours au Procureur de la République du ressort pour visa et oblitération des feuilles non utilisées168. Si ce rôle relève de ses attributions administratives, son intervention dans la procédure d'établissement de la filiation, relève quant à elle de ses attributions judiciaires. Le Ministère public intervient en effet dans la procédure d'établissement des actes de naissance, lorsqu'à l'expiration des délais légaux169, la naissance de l'enfant n'a pas fait l'objet de déclaration. Concrètement, le Ministère public, en la personne du Procureur de la République, saisi dans les trois mois de la

    167 Cf. art. 36 CPCC.

    168 Art. 18, paragraphe 2 de l'Ordonnance du 29 juin 1981.

    169 La naissance doit être déclarée dans les 30 jours suivant l'accouchement à l'officier d'état civil du lieu de naissance. Si l'accouchement a lieu dans un établissement hospitalier,le chef de l'établissement ou à défaut le médecin, ou toute personne qui a assisté la femme dispose de 15 jours pour effectuer la déclaration. En cas de défaillance des personnes ci-dessus visées, les parents peuvent le faire dans les 15 jours suivants.

    naissance de l'enfant, va requérir après certaines vérifications, l'enregistrement de la déclaration. Si dans ce délai le Procureur de la République n'est pas saisi, la filiation de l'enfant ne pourra être établie par l'officier d'état civil, qu'après un jugement rendu par le tribunal, qui devra préalablement à sa décision, communiquer la requête du demandeur au Procureur de la République aux fins d'enquête. En cas de demande de rectification ou de reconstitution d'un acte d'état civil, il est également fait communication au Ministère public de la requête aux mêmes fins par la juridiction saisie.

    136. Le Ministère public intervient aussi dans les procédures d'établissement d'actes de mariage170 et de décès. Il a un important rôle à jouer dans les questions de nationalité.

    b. Les affaires relatives à la nationalité

    Les questions de nationalité relèvent en règle générale de la compétence des autorités du pouvoir exécutif qui octroient ou refusent la nationalité par Décret. Mais lorsqu'il s'agit du contentieux de la nationalité, c'est-à-dire quand se pose une contestation sur la nationalité reconnue ou à reconnaître à un individu, les juridictions civiles sont exclusivement compétentes171. L'article 41 de la loi de 1968 sur la nationalité qui le prévoit, dispose en son paragraphe 4 que « le Ministère public doit toujours être mis en cause et a seul qualité pour agir ou défendre au nom de l'Etat ». Il en résulte que le Ministère public doit recevoir communication des affaires relatives à la nationalité en cas de contentieux.

    137. En dehors de la communication obligatoire pour la défense des intérêts de l'Etat, le Ministère public intervient obligatoirement pour la défense des faibles.

    II. La communication pour la défense des faibles

    Dans un but de protection des faibles, le Ministère public a communication des affaires relatives à la tutelle, aux causes des incapables, à la puissance paternelle (a) et aux causes intéressant les personnes présumées absentes (b).

    a. Les causes relatives à la tutelle, aux incapables et à la puissance paternelle172

    S'il est reconnu au Cameroun que le père est, du vivant des époux, administrateur légal des biens de leurs enfants mineurs et la mère, en cas de déchéance du mari, les problèmes

    170 Il peut notamment en cas d'empêchement grave requérir l'officier d'état civil de se transporter au domicile ou à la résidence de l'un des futurs mariés pour célébrer le mariage.

    171 Du point de vue du droit prospectif, l'avant projet du code camerounais de la famille et des personnes attribue cette compétence aux juridictions administratives. Ce qui rendra ces questions préjudicielles devant les juridictions civiles.

    172 En droit français on parle actuellement de l'autorité parentale

    interviennent généralement en cas de séparation de corps ou de divorce. Malgré le fait que l'article 389 du Code civil dispose que l'administration des biens de ou des enfants mineurs appartient à l'époux auquel est confié sa ou leur garde, il peut avoir opposition d'intérêts entre le mineur et l'administrateur. Dans ce cas, il sera nommé un administrateur ad hoc par le tribunal statuant sur requête en chambre de conseil. Communication devra être faite au Ministère public ainsi qu'en cas de déchéance du mari et de la femme de l'administration légale.

    Lorsqu'il s'agit des enfants naturels reconnus par leur père et mère, celui des parents qui exercera la puissance paternelle n'administrera les biens de son enfant qu'en qualité de tuteur légal, sous le contrôle d'un subrogé tuteur. Si l'enfant naturel n'est reconnu par aucun de ses géniteurs, le tribunal pourra, même si la tutelle a été organisée, soit d'office, soit sur réquisition du Ministère public, designer un délégué chargé de veiller aux besoins matériels et moraux de l'enfant.

    138. L'article 36 du code de procédure civile et commerciale dans les dispositions du paragraphe 6 prévoit expressément l'obligation de communication pour les causes relatives aux incapables. Cet article prévoit aussi la communication obligatoire pour la défense des personnes présumées absentes.

    b. Les causes intéressant les présumés absents

    Les articles 36, paragraphe 7 et 457 CPCC mentionnent la communication des causes relatives aux personnes présumées absentes. L'art. 114173 C. civ. dispose que « le Ministère public est spécialement chargé de veiller aux intérêts des personnes présumées absentes ; et il sera entendu sur toutes les demandes les concernant ». Avant que l'absence soit déclarée, le Ministère public veillera à la protection des intérêts de celui qui aura cessé de paraître dans les circonstances laissant croire qu'il n'est pas décédé.

    139. En dehors des cas de communication pour la défense de certaines personnes morales ou physiques, le Ministère public a communication des affaires qui ont trait à la justice.

    III. La communication dans l'intérêt de la justice

    Nous pouvons à ce niveau citer les déclinatoires sur incompétences, les règlements des juges, les récusations et renvois pour parenté et alliance, les prises à partie (a) et les affaires

    173 Le chapitre VI de l'avant projet du code camerounais de la famille et des personnes bien qu'apportant des modifications importantes relativement à l'absence, n'omet pas de mentionner la nécessité de communiquer les affaires y relatives au Ministère public.

    gracieuses (b).

    a. Les règlements des juges, les récusations et renvois pour parenté et alliance et les prises à partie

    140. Lorsque deux juridictions de l'ordre judiciaire saisies de la même affaire ou de deux affaires étroitement liées, par exemple en cas de connexité ou d'indivisibilité, se reconnaissent compétentes ou non, il en résulte un conflit positif ou négatif qui est résolu par la procédure de règlement de juges. Le règlement de juges consiste à saisir la juridiction supérieure qui désignera laquelle des différentes juridictions de même degré, devra connaître de l'affaire. Le représentant du parquet devra produire ses conclusions dans la procédure.

    141. La récusation est le remède apporté à la suspicion de partialité d'un magistrat du siège ou du parquet lorsque ce dernier est partie jointe dans un procès. Elle a lieu pour les causes définies par l'article 159174 du CPCC.

    Le renvoi d'une juridiction à une autre quant à lui constitue une garantie de l'impartialité de la juridiction. Concrètement, lorsqu'une partie aura deux parents ou alliés jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement parmi les juges d'un tribunal ou trois parents ou alliés au même degré dans la Cour d'Appel, ou lorsqu'elle aura un parent audit degré parmi les juges du TPI ou deux parents dans la Cour d'Appel, et qu'elle même sera membre du tribunal ou de cette Cour, l'autre partie pourra demander le renvoi de l'affaire devant une autre juridiction.

    En principe, les juges sont irresponsables et ne peuvent faire l'objet d'aucune sanction pour les faits commis dans l'exercice de leur fonction. Ce qui constitue une garantie importante de sérénité dans l'accomplissement de leur mission. Cependant cette irresponsabilité n'est pas absolue ; la responsabilité des juges peut être engagée par la procédure de la prise à partie en cas de déni de justice, de dol, de concussion et de faute lourde professionnelle qui aurait été commise à l'instruction ou au jugement. La prise à partie peut aussi intervenir pour les cas où la loi déclare les juges responsables de dommages et intérêts. Dans ces cas, l'Etat est tenu à titre principal en sa qualité de commettant, et dispose d'un recours contre le magistrat responsable. En réalité, la prise à partie concerne tous les magistrats. Le président saisi à cet effet, ne pourra statuer qu'après avoir pris l'avis du Ministère public de sa juridiction.

    142. Si tous ces cas ont essentiellement trait à l'administration de la justice, on ne saurait

    174 Tout juge peut être récusé pour les causes ci-après : s'il est parent ou allié des parties ou de l'une d'elles, jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement ; si la femme du juge est parente ou alliée, employeur ou employée de l'une des parties, ou si le juge est parent ou allié de la femme de l'une des parties, au degré cidessus, lorsque la femme est vivante, ou qu'étant , il en existe des enfants ; si elle est décédée et qu'il n'y ait point d'enfant, le beau père, le gendre, ni les beaux frères ne pourront être juges...

    en dire autant des affaires gracieuses où l'avis du Ministère public est aussi obligatoire. b. La communication des affaires gracieuses

    Les matières gracieuses sont celles dans lesquelles il y a absence d'opposition de prétentions ou absence de contestation. Il s'agit en fait des procédures ne portant pas sur un litige. Le tribunal est simplement saisi pour donner son quitus à une requête qui lui est soumise. Il peut s'agir entre autre de l'adoption, de la légitimation ou de la reconnaissance d'enfant naturel, de changement de nom, de régimes matrimoniaux en l'absence de toute opposition... les décisions qui peuvent être prises à cet effet peuvent être lourdes de conséquences pour les tiers ou la société. La présence du Ministère public y est donc nécessaire pour pallier l'absence de contradiction et éviter ainsi des injustices ou des troubles probables à l'ordre public. Il reçoit la requête du juge et vérifie la régularité du dossier. Il peut soit renvoyer le dossier au requerrant lorsque ce dossier lui parait incomplet, soit le retourner au juge s'il est complet. Dans ce dernier cas, il y joint son avis qui peut s'exprimer en un acquiescement ou en une opposition. Le tribunal n'est pas tenu de suivre cet avis dans sa décision. Celle-ci est notifiée aux parties et aux tiers dont les intérêts peuvent être menacés ainsi qu'au Ministère public. Il peut après réception de l'expédition de la décision, exercer un recours contre ladite décision. Le Ministère public a autrefois joué un rôle important dans la procédure de suspension de l'exécution provisoire des décisions de justice non répressive175

    143. Les communications légales invitent donc le Ministère public à intervenir soit dans l'intérêt de la loi, soit pour la défense de certaines personnes ou enfin, pour garantir une bonne administration de la justice ; bref le Ministère public se présente comme l'assistant du juge ou son conseiller dans la mission de rendre justice. Cela se vérifie également lorsqu'on envisage les autres types de communication

    Paragraphe II : les communications judiciaire et facultative

    Les communications judiciaire et facultative sont prévues par l'article 36, paragraphe 7. Nous allons les analyser successivement.

    A. La communication judiciaire

    L'article 36176 précité dispose que le tribunal ou le juge de paix à compétence

    175 TJOUEN (D.A) l'exécution des décisions de justice en droit camerounais, revue internationale de droit comparé 2000 p 429 à 442

    176 Les dispositions analogues en droit français sont prévues par l'article 427 NCPCF.

    étendue177 pourra même l'ordonner (ordonner la communication) d'office. Elle est donc facultative au juge et oblige le Ministère public à intervenir. Ainsi, le juge apprécie souverainement l'opportunité de communiquer le dossier au Ministère public pour avoir son avis sur l'application de la loi lorsque la question lui parait confuse.

    On peut cependant se demander si le Procureur de la République dans ce cas doit donner un avis motivé, des conclusions ou s'en rapporter à la sagesse du tribunal. Des opinions divergent à ce sujet puisque certains estiment que le principe de la séparation des fonctions de justice répressive confère au Ministère public une indépendance qui ne l'oblige pas à adopter un moyen précis pour son intervention. D'autres quand à eux pensent que le Ministère public devrait donner un avis motivé. Le moins qu'on puisse dire est que le Ministère public devrait faire connaître son opinion de façon claire et précise afin d'aider le juge au lieu de se rapporter à la sagesse du tribunal.

    144. Si la communication judiciaire est facultative pour le juge, il en va tout autrement de la communication à l'initiative du Ministère public.

    B. La communication facultative

    Aux termes de l'article 36, paragraphe 7 CPCC, lorsque le Procureur de la République croira son Ministère nécessaire, il pourra prendre communication dans toutes affaires. Il lui est donc loisible quelle que soit la nature de l'affaire, de donner son avis soit par des conclusions écrites, soit oralement à l'audience sans aucune restriction ni réserve.

    On pourrait bien se demander comment le Ministère public peut être informé d'une affaire civile dont la procédure est essentiellement écrite au point de juger son intervention nécessaire. En règle générale, le Ministère public a non seulement accès aux dossiers de procédure, mais reçoit la plupart du temps, copie des dossiers et Mémoires des parties.

    145. Il est à noter que cette faculté reconnue au Ministère public fait rarement objet d'usage. Ce qui peut se justifier par la modicité de ses moyens. Cela est déplorable dans la mesure où cette « inertie forcée » prive les juridictions d'un point de vue avisé qui peut leur être d'une aide considérable dans l'application de la loi.

    Les types de communications ainsi présentés, il convient de passer à la procédure de la communication et de son impact sur le procès civil.

    Section II : la procédure et l'impact de la communication sur le procès civil

    Après avoir retracé la procédure de la communication (paragraphe 1), nous

    177 Il s'agit du juge du TGI.

    analyserons la preuve et la sanction des communications comme impact de celle-ci sur le procès (paragraphe 2).

    Paragraphe I : la procédure de la communication

    146. Le procès civil est régi par certains principes directeurs tels que le principe dispositif et la contradiction... Ces principes permettent de déterminer le cadre du procès civil dans son déroulement avec le rôle y joué par les différents protagonistes dont le Ministère public. Celui-ci doit avoir un cadre d'intervention qui tient compte de ces principes (B) après être informé par le moyen de la communication qui se déroule selon les modalités précises (A).

    A. Les modalités de la communication

    Nous répondrons essentiellement à la question de savoir qui est l'auteur de la communication (I) et par quels moyens intervient le Ministère public (II)

    I. L'auteur de la communication

    147. La communication a lieu à la diligence du juge sauf dispositions contraires de la loi. Il s'assure que le greffier a bien effectué cette communication. Il ne revient pas aux parties de veiller à ce que la communication des affaires communicables soit faites au Ministère public. Ainsi on ne saurait reprocher à une partie de n'avoir pas communiqué son recours au Ministère public178. La communication doit avoir lieu en temps utile pour ne pas retarder le jugement et si la décision en fait état, elle est présumée avoir eu lieu avant l'ouverture des débats179.

    II. Les moyens d'intervention du Ministère public

    148. Le Procureur de la République ou le Procureur Général ont le choix entre donner un avis motivé ou non ; rédiger des conclusions écrites ou exprimer leur opinion oralement à l'audience devant la juridiction. Ils ne sont pas tenus d'être présents à l'audience même lorsqu'ils ont reçu communication d'une affaire180 sauf dispositions contraires de la loi. Ces moyens doivent être mis en oeuvre dans un cadre garantissant le respect de certaines règles.

    B. Le cadre d'intervention du Ministère public

    Parler du cadre d'intervention du Ministère public revient à situer l'étendue de ses conclusions, avis ou opinions et à préciser le moment de cette intervention. Ce cadre nous

    178 Cass. 2èmeciv, 8 Oct 1986. 2. Panor 286.

    179 Cass. Com. 11 mai 1982, bull. civ. IV, n° 176.

    180 Cass. Com.15 juill 1975, bull. civ. IV, n°204, D. 1975. 735, note F.D. 4 mai 1976, D. 1976, IR 231.

    permet d'apprécier le respect du principe dispositif (a) et celui de la contradiction (b)

    I. L'intervention du Ministère public et le principe dispositif

    149. Le principe dispositif est celui qui préside à la distribution des rôles entre le juge et les parties. Selon ce principe, les parties ont seules la faculté d'initiative, de désistement, d'acquiescement, d'impulsion c'est-à-dire d'entamer ou d'interrompre le procès civil181. Ils ont la charge d'alléguer et de prouver les faits dans le procès civil, alors qu'il revient au juge de les qualifier selon la règle de droit adéquate182. Le principe dispositif fait du procès civil un procès essentiellement accusatoire où le juge n'a en principe que le rôle d'un arbitre neutre. Il ne lui est pas permis de faire intervenir dans les débats les faits dont il aurait personnellement connaissance en dehors du procès. C'est donc les parties qui fixent et délimitent le cadre du procès dans son étendue, à travers les faits allégués au soutien de leurs prétentions respectives. La décision du juge doit uniquement tenir compte des faits portés à sa connaissance par les parties et porter sur toutes les prétentions et uniquement sur elles. Lorsque le juge omet de statuer sur l'une des prétentions, on dit qu'il a statué infra petita ; lorsqu'il statue au-delà de ce qui lui a été demandé, on dit qu'il a statué ultra petita et lorsqu'il a dénaturé les prétentions183 des parties, on dit généralement qu'il a statué extra petita. Et la décision doit être, dans les deux premiers cas, révisée soit pour statuer sur la prétention omise, soit pour retrancher ce qui a été ajouté. On se demande donc si ce principe s'impose au Ministère public avec la même acuité.

    150. Le Ministère public veille à l'application des lois, règlements et décisions de justice et peut, dans l'intérêt de la loi, prendre devant toute juridiction auprès de laquelle il est représenté, les réquisitions qu'il estime utiles. Quand il intervient, il donne un avis et fait entendre la voie du représentant de l'autorité publique sur la légalité. En tant que partie jointe au procès civil le Ministère public doit respecter le principe dispositif ; son intervention doit se limiter en principe au cadre fixé par les parties. Il doit « accepter le procès avec les limites et l'étendue que lui ont données les parties. Il n'a pas le droit d'élargir le procès, d'émettre les prétentions auxquelles les plaideurs n'auraient pas recourues »184. Mais il existe une atténuation à cette règle.

    181 Contrairement au procès pénal où le Ministère public, bien qu'ayant la faculté d'entamer les poursuites, n'a pas en principe la possibilité de transiger à propos ou de l'interrompre sauf à considérer l'article 64 CPP.

    182 L'article 12 NCPC dispose en ce sens que : « Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée... »

    183 La cour de cassation française sanctionne généralement ce genre de décision. Elle l'a fait dans un cas où une Cour d'Appel saisie pour se prononcer sur l'extension d'une liquidation des biens à un dirigeant de l'entreprise, a condamné ce dernier au paiement du passif social. ( Cass. Com. 28 nov. 1979, bull civ IV, n°314).

    184 GLASSON, TISSIER et MOREL, tome II, n° 506, cité par ELOUNDOU ELOUNDOU op. Cit. p.27.

    Le Ministère public ayant pour mission la défense de l'ordre public, il lui revient, au cas où une décision risque de porter atteinte à celui-ci, de veiller à ce que cela soit évité. Il peut signaler au juge les moyens d'ordre public185même par l'allégation des faits non évoqués par les parties. Lorsqu'il intervient dans les matières communicables, sa passivité n'est plus de rigueur. C'est ainsi qu'il peut verser au débat tous les documents et renseignements de nature à contribuer à la solution du litige186 ; par exemple, produire à une partie dans une action en recherche de paternité, les documents qui attestent l'entretien de l'enfant, alors que son action reposait sur la séduction dolosive et le concubinage notoire187. Dans la pratique, le Ministère public peut même aider l'une des parties indirectement tout simplement en évoquant un moyen dont il précise qu'il ne peut faire entrer dans les débats en application du principe dispositif.

    Il en résulte que l'intervention du Ministère public peut être d'un impact considérable sur le principe dispositif et élargir ainsi le cadre du débat, sinon inverser le cours du procès en aidant l'une des parties. Cela pourrait contribuer à rendre la justice moins judiciaire dans le procès civil, puisque la vérité dissimulée par certaines parties pourrait être révélée par l'intervention du Ministère public.

    151. Le procès civil peut être davantage juste si le principe de la contradiction est respecté à travers l'intervention du parquet.

    II. L'intervention du parquet et la contradiction

    Principe émergent, la contradiction a longtemps été absente dans les écrits de la doctrine. Elle a figuré curieusement dans un paragraphe de l'ouvrage en cinq volumes de GLASSON, TISSIER et MOREL : « les juges ne peuvent en principe statuer sur une demande qu'après instruction et débat contradictoires ; il doit y avoir libre défense, libre contradiction. Ce sont les garanties essentielles qui dominent toute la procédure »188. La contradiction implique l'échange des conclusions entre les parties et la connaissance par chacune d'elles de tous les éléments de fait et de droit sur lesquels sont fondées les prétentions respectives pour leur permettre de mieux préparer leur défense. Ces pièces et conclusions doivent être produites dans des délais propices pour garantir une bonne prise de connaissance par chacune des parties.

    152. Le Ministère public intervenant dans le procès civil en tant que partie jointe donne

    185 Les moyens d'ordre public sont ceux qui peuvent être soulevés d'office par le juge et qui peuvent être reçu en tout état de cause c'est-à-dire à toue étape de la procédure.

    186 Civ. 1ère 18 mars 1958, bull civ n° 156 p.120.

    187 Paris 23 juin 1955, JCP 1956, II, 9064, obs. DOUDE ; RTDC, 1956, p.172, obs. HEBRAUD.

    188 Cité par MARTIN (R), les principes directeurs du procès, rep. Pr. Civ. Dalloz, mai 2000. p 21

    son avis, soit en prenant la parole à l'audience, soit en déposant des conclusions écrites. Lorsqu'il intervient oralement, il a la parole le dernier189, les parties ne pouvant plus que déposer des notes en délibéré en réponse à ses arguments. Cette règle est considérée comme étant d'ordre public par la jurisprudence190 et sanctionnée par la nullité de la décision191. Si par contre le Ministère public décide d'intervenir par le moyen des conclusions écrites, il ne lui est fait aucune prescription sur le moment de la production desdites conclusions. Il suffit qu'elles soient communiquées aux parties le jour des débats192.

    On peut remarquer que la contradiction n'est pas assez respectée relativement à l'intervention du Ministère public, surtout lorsqu'il intervient oralement. La Cour européenne des droits de l'Homme a d'ailleurs sanctionné193 cette pratique qui est significative d'une discrimination injustifiable, privilégiant le Ministère public qui ne dispose d'ailleurs d'aucune garantie d'infaillibilité194. Son avis devrait donc faire l'objet de discussion autant que celui du juge lorsqu'il soulève d'office des moyens de droit. Ce d'autant plus que son avis peut peser d'un poids important sur le cours du procès au point de faire basculer son issue.

    153. L'intervention du Ministère public en tant que partie jointe se révèle donc lourde de conséquences car non seulement elle est susceptible d'éclairer le juge, mais aussi peut faire basculer le cours du procès. Cette influence est accrue par la sanction réservée aux procédures dont la preuve de la communication au Ministère public n'a pas été faite alors qu'un texte de loi l'a prescrite.

    Paragraphe II : la preuve et la sanction de l'absence de communication

    Lorsque l'intervention du Ministère public est requise, c'est-à-dire dans les matières ou causes communicables, la régularité de la procédure en dépendra. Car l'absence de la preuve de la communication (A) la rendra irrégulière (B).

    A. La preuve de la communication

    189 Art 87 du Décret du 30 mars 1808 : « le Ministère public une fois entendu, aucune partie ne peut plus obtenir

    la parole après lui » ; art. 443 NCPC « Le Ministère public, partie jointe, a le dernier la parole. S'il estime ne

    pas pouvoir prendre la parole sur-le-champ, il peut demander que son audition soit reportée à une prochaine

    audience ».

    190 Civ. 2ème 3 avril 1978

    191 Civ. 3ème 18 mars 1974, bull civ III, n° 129 ; civ 2ème 14 nov. 1975 qui énonce que : « les dispositions de l'article 91 du Décret du 20 juillet 1972 aux termes de laquelle le Ministère public, partie jointe, prend la parole le dernier,est d'ordre public. Doit donc être cassé l'arrêt des énonciations duquel il résulte que le Ministère a été entendu avant les avocats des parties », JCP 1976. II. 18511, note MARTIN (R) et VAN DER CORPUT (S) ; RTD civ. 1977, 187, obs. PERROT (R) ; 3 avril 1979, bull civ. II, n° 115.

    192 Civ. 1ère 20 juill. 1994, bull civ. I, n° 259.

    193 Arrêt VERMELIN, arrêt MACHADO contre Portugal. Arrêt gorges : « le Ministère public doit transmettre ses observations à la partie civile faute de quoi il y a violation du principe de l'égalité des armes »

    194 Lire MARTIN (R), faut-il supprimer le Ministère public devant les juridictions civiles et administratives ? RTD civ 1998, 873.

    Le défaut de communication met le Ministère public hors d'état de donner son avis qui est obligatoire dans certains cas. Dans ces cas, la communication est une formalité substantielle et son absence peut être sanctionnée sévèrement.

    La décision doit porter la mention des conclusions du Ministère public avec la précision qu'elles ont été faites en dernière position. Aucun texte ne prévoit l'obligation de mentionner que la communication a lieu195. Ce qui dénote l'absence de réglementation de sa preuve qui peut par conséquent être faite par tous moyens en application de la maxime selon laquelle « là oil la loi ne distingue pas, il ne faut pas distinguer ».

    154. C'est donc à bon escient que la jurisprudence admet les pièces de la procédure telles que le procès verbal d'audience, le libellé même du jugement ou de l'arrêt et toute autre pièce196 comme preuve de la communication. La simple mention dans la décision ou au registre d'audience, soit que le Ministère public était présent aux débats, soit qu'il a été entendu197, est constitutive d'une présomption que la communication lui a été faite. Il en est de même de la mention sur un dossier « vu au parquet général »198. Tout comme lorsque les conclusions de l'une des parties portent en marge, « pour le Procureur »199.

    Cette attitude de la jurisprudence est de nature à atténuer la gravité de la sanction pouvant intervenir en cas d'absence de communication.

    B. La sanction du manquement à la formalité de la communication

    155. Comme déjà dit, le manquement à la formalité de la communication met le Ministère public hors d'état de donner son avis qui est obligatoire. Etant donc une formalité substantielle, le manquement à son accomplissement est sanctionné par la nullité de la décision, nullité qui a un effet dévolutif ; c'est-à-dire une nullité qui permet à la juridiction l'ayant prononcée de statuer sur l'affaire. Mais suivant les dispositions de l'article 223 alinéa 8, lorsque la communication n'a pas été faite dans les cas où la loi l'exige, et que le jugement a été rendu contre celui pour qui elle était ordonnée, celle-ci peut provoquer sa rétractation au moyen de la requête civile200.

    En tout état de cause, la nullité de la décision peut être demandée par la voie d'appel ou de pourvoi en cassation respectivement s'il s'agit d'un jugement ou d'un arrêt de la Cour d'Appel, par la partie dans l'intérêt de laquelle la communication est exigée si elle est

    195 Cass. Com. 10 oct. 1978, bull civ. IV, n°221.

    196 Cass. Ch. Mixte, 21 juill. 1978, gaz pal. 1978. 2 .579, note VIATTE (J).

    197 Civ. 1ère 27 févr. 1979, bull civ. I ; n° 76.

    198 Cass. Com. 20 févr. 1980, bull civ IV, n°92.

    199 Cass. Ch. Mixte, 21 juill. 1978, gaz pal. 1978. 2 .579, note VIATTE (J).

    200 La requête civile est une voie de recours extraordinaire qui est remplacée actuellement par le recours en révision

    perdante201, ou par le perdant si la communication est exigée dans l'intérêt de l'ordre public.

    Cette sanction nous parait sévère étant donné qu'elle pourrait résulter d'une simple inadvertance du juge ou du greffier lors de la rédaction de la décision. C'est certainement ce qui emmène la jurisprudence à adopter une attitude de souplesse dans la preuve de la communication.

    CONCLUSION DU CHAPITRE I

    Au terme de ce chapitre où il a été essentiellement question du rôle de principe du Ministère public dans le procès civil, on peut se rendre compte que son intervention est susceptible d'influencer doublement ce procès.

    156. Lorsque cette intervention est facultative ou judiciaire, elle peut avoir pour conséquence d'éclairer simplement le juge ou, de façon négative, de porter atteinte au principe de la contradiction. Et lorsque l'intervention du Ministère public est obligatoire, en dehors de l'éclairage qu'elle peut donner au juge, elle peut aussi porter atteinte au principe de la contradiction et au principe dispositif, sans omettre son impact sur la décision, celle-ci pouvant être annulée pour manquement à l'obligation de communication.

    157. Il serait nécessaire d'apporter des solutions à ces problèmes par la réglementation stricte du cadre et du moment d'intervention du Ministère public, partie jointe au procès civil. Ceci constituerait, avec la lumière qu'il apporte relativement à l'application de la loi, des garanties considérables d'une justice civile plus juste et plus protectrice de l'ordre public, motif qui justifie en partie son intervention comme partie principale dans ce type de procès.

    201 Cass. Civ. I 22 juin 1953. Bull civ. I, n° 212. p 176.

    CHAPITRE II : L'EXTENSION DU ROLE DU MINISTERE PUBLIC : LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC PAR VOIE D'ACTION

    158. Comme partie principale, le Ministère public peut intervenir sans attendre que le procès soit engagé par les particuliers. C'est-à-dire qu'il peut agir par voie d'action pour attaquer ou pour défendre. Il est une partie à part entière et ne peut plus être récusé ; il peut exercer toutes les voies de recours possibles.

    Le Ministère public peut en principe intervenir comme partie principe dans les cas prévus par la loi de façon explicite. Une tendance à la généralisation de cette intervention par voie d'action se dessine en droit camerounais pour la défense de l'ordre public et l'on se pose la question de savoir si l'on ne risque pas d'aboutir a une situation où le Ministre public se permettra d'agir dans toutes sortes d'affaires au risque de compromettre certains intérêts particuliers

    159. Nous présenterons les cas légalement prévus où le Ministère public intervient par voie d'action (section 1) et le domaine problématique de cette intervention (section 2)

    Section I : le domaine légal de l'intervention du parquet par voie d'action

    La loi prévoit les cas dans lesquels le Ministère public peut agir comme partie principale dans un procès civil. Nous présenterons ces cas (paragraphe 1) avant de faire une analyse du cas de l'action du Ministère public dans les procédures de redressement judiciaire des entreprises en difficulté (paragraphe 2).

    Paragraphe I : les cas légaux d'intervention du parquet par voie d'action dans le procès civil

    Les textes prévoyant l'intervention du Ministère public comme partie principale sont divers et portent soit sur la famille dont le Ministère public apparaît comme le grand protecteur (A), soit sur l'état et la nationalité (B).

    A. Le Ministère public, protecteur de la famille

    160. Le Ministère public intervient comme partie principale en matière d'actes d'état civil, de tutelle des majeurs, en cas de contestation de la validité d'un mariage, en cas de conflit sur la garde des enfants mineurs ou les modalités d'attribution de l'autorité parentale, en cas d'absence et de placement d'une personne dans un établissement d'aliénés. La protection peut donc porter sur les faibles (I) ou sur l'institutions du mariage (II)

    I. Le Ministère public, protecteur des faibles

    Comme faibles, on peut citer les absents et disparus, les personnes placées dans un établissement d'aliéner (a), et les incapables (b).

    a. La protection des absents, disparus et personnes placées dans un établissement d'aliénés par le Ministère public

    161. L'absent est celui qui a cessé de paraître à son domicile ou à sa résidence pendant un certain temps au point où l'on ne sait plus s'il est vivant au mort. L'institution de l'absence a été organisée dans le code civil pour protéger les intérêts de l'absent. C'est la raison pour laquelle la requête en déclaration d'absence en l'état actuel du droit camerounais, n'est recevable qu'après une période de quatre ans, marquant l'étape de la présomption d'absence. Pendant cette période, le patrimoine de la personne présumée absente fait l'objet d'une protection assurée spécialement par le Ministère public202. Celui-ci pourra représenter l'absent présumé à défaut d'un Procureur fondé, dans tous les actes d'inventaire, compte, partage et liquidation où il sera intéressé. Pour constater l'absence, le tribunal ordonnera qu'une enquête soit faite contradictoirement avec le Ministère public dans l'arrondissement du domicile, et dans celui de la résidence de l'absent s'ils sont distincts l'un de l'autre. L'absence déclarée, les héritiers présomptifs pourront obtenir l'envoi en possession provisoire des biens de l'absent. Et le testament, s'il en existe un, sera ouvert à la réquisition des parties intéressées, ou du Procureur de la République203.

    162. La disparition elle, renvoie à la situation dans laquelle une ou plusieurs personnes cessent de paraître dans des circonstances faisant présumer qu'elles sont mortes. Dans ce cas, le Ministère public, en la personne du Procureur de la République, peut demander la déclaration de décès. Et si ladite demande émane des parties intéressées, elle est transmise par l'intermédiaire du Procureur de la République qui pourra par ailleurs, poursuivre l'annulation du jugement déclaratif du décès si le disparu réapparaît.

    163. Dans le cadre du placement d'une personne dans un établissement d'aliénés, le Ministère public peut tout d'abord requérir du tribunal de première instance, la nomination d'un curateur, ou d'un administrateur provisoire des biens de l'aliéné. Le Procureur de la République est également admis à demander la sortie de l'intéressé, sortie qui pourra être ordonnée par le tribunal de première instance statuant en chambre du conseil. S'il s'agit d'un mineur, à sa sortie il sera placé sous l'autorité des personnes qui en bénéficiait conformément à la loi, sauf décision contraire du tribunal de première instance à la requête du Procureur de la République

    202 Article 114 C. Civ. « le Ministère public le Ministère public est spécialement chargé de veiller aux intérêts des personnes présumées absentes ; et ils sera entendu sur toutes les demandes qui les concernent ».

    203 Article 123 C. Civ.

    sur avis du médecin traitant de l'établissement.

    Ceci nous conduit immédiatement à voir le rôle de protecteur joué par le Ministère public relativement aux incapables.

    b. La protection des incapables par le Ministère public

    164. On distingue en règle générale les incapables majeurs (2) des incapables mineurs (1) ; la protection du Ministère public porte sur ces deux catégories de personnes.

    1. La protection des mineurs

    Les mineurs sont protégés par le Ministère public à la fois sur les terrains de la puissance paternelle, de la tutelle, de l'adoption d'enfants naturels, du droit successoral et de l'hypothèque légale.

    Le mineur certes a des droits, mais ne dispose pas de la capacité pour les exercer. En droit camerounais, c'est le père, s'ils sont mariés, ou la mère en cas de déchéance ou de décès du mari qui veille à son éducation et à l'administration de ses biens. Lorsque l'enfant est né hors mariage, la puissance paternelle est exercée conjointement par le père et la mère si sa filiation a été également établie à leur égard sinon, seul le parent à l'égard duquel la filiation a été établie exercera sur cet enfant la puissance paternelle204. Si l'enfant est menacée sur les plans de la sécurité morale, physique et matérielle au regard du comportement de ses parents205, le Ministère public peut introduire devant le tribunal de grande instance, une demande de déchéance de la puissance paternelle. En cas de demande de restitution de la puissance paternelle par les parents, le Procureur de la République peut requérir la prise de mesures d'assistance éducative.

    165. En cas de divorce ou de séparation de corps, et lorsque la garde de l'enfant a été confiée à l'un des parents, le président du tribunal, à la requête du Procureur de la République ou à la demande du Père ou de toute autre personne, peut modifier ou révoquer l'ordonnance relative à cette garde.

    Le Ministère public peut en outre demander au juge des tutelles la transformation de l'administration légale en tutelle, la convocation du conseil de famille aux fins de nomination du tuteur datif, de prononcer l'exclusion, la destitution, la récusation du tuteur ou du subrogé

    204 Il existe une disparité entre le père et la mère en faveur du premier lorsqu'ils sont mariés ; alors que c'est l'inverse qui est constaté lorsqu'ils ne sont pas mariés puisque la filiation des enfants naturels était facilement établie vis-à-vis de la mère, l'accouchement valant reconnaissance à son égard. L'égalité entre les deux parents n'est observée que lorsque que la filiation de l'enfant naturel est établie conjointement à leur égard malgré l'inappriation de l'expression « puissance paternelle » remplacée sur d'autres cieux à celle d' « autoritéparentale ».

    205 Ivrognerie, délinquance, défaut de son, négligence pendant plus de deux ans d'exercer les droits et devoirs les unissant à leur enfant lorsque celui-ci fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative.

    tuteur. Les délibérations du conseil de famille peuvent être annulées à la requête du Ministère public206.

    166. Dans le cadre de l'adoption d'enfants naturels, le Ministère public bénéficie également d'un droit d'action. En effet, lorsqu'une personne désire adopter un enfant, elle va déposer une demande auprès du TGI compétent. Cette requête passe généralement par l'intermédiaire du Ministère public. Le tribunal, après avoir entendu le Procureur de la République, et sans aucune forme de procédure, décide sans énoncer de motifs, qu'il y a lieu, ou qu'il n'y a pas lieu à adoption207. L'homologation de l'adoption ou non par le tribunal peut être attaquée par le Ministère public devant la Cour d'Appel208.

    167. En matière de succession vacante, et dans l'intérêt de tous les héritiers, le Procureur de la République peut requérir la nomination par le président du TPI du lieu d'ouverture de la succession, d'un curateur qui sera chargé d'administrer les biens de ladite succession. Dans le cadre du partage et des rapports, l'article 819 C. Civ. dispose que : « les scellés doivent être apposés dans l'intérêt des enfants ou des interdits à la diligence du Procureur de la République ou d'office par le juge du tribunal de première instance, dans l'arrondissement duquel la succession est ouverte, dans les plus brefs délais si tous les héritiers ne sont pas présents »209.

    168. Par ailleurs, le Ministère public a la possibilité de faire prononcer la déchéance du grevé et l'ouverture du droit des appelés lorsque le premier n'a pas satisfait aux obligations de l'article 1056 du code civil. Ceci constitue un autre cas d'ouverture de la substitution210 puisque celle-ci intervient normalement après le décès du grevé.

    169. En ce qui concerne l'hypothèque légale, l'article 2143 du Code civil déclare que le Ministère public peut saisir le juge des tutelles dans les cas où il y a lieu à administration légale, afin que celui-ci puisse décider de l'inscription de cette hypothèque sur certains immeubles du mineur lorsque l'hypothèque n'aura pas été restreinte par l'acte de nomination du tuteur.

    On se rend compte que le Ministère public est un véritable « ange gardien » des intérêts du mineur. Ce rôle s'étend également aux incapables majeurs.

    206 Voir les articles 391, 405, 446,447 C. Civ.

    207 Article 362 C. Civ.

    208 Article 363 même code.

    209 L'article 497 CPCC dispose également dans ce sens que : « le scellé sera apposé, soit à la diligence du Ministère public, soit sur la déclaration du maire ou adjoint de la commune ou du chef de l'unité administrative, et même d'office par le juge : si le mineur est sans tuteur, et que le scellé ne soit pas requis par un parent ; si le conjoint, ou les héritiers ou l'un d'eux sont absents ; si le défunt était dépositaire public, auquel cas le scellé ne sera apposé que pour raison de ce dépôt et pour les objets qui le composent ».

    210 La substitution fidéi commissaire est une donation faite à une personne nommée « grevée », avec charge pour celle-ci de conserver sa vie durant le bien reçu et de transmettre à une autre personne nommée « appelée ».

    2. La protection des incapables majeurs

    Les majeurs incapables sont ceux qui sont atteints d'une altération de leurs facultés mentales. La réforme législative du 3 janvier 1968 en France leur a aménagé trois régimes à savoir la sauvegarde de justice, la tutelle et la curatelle, et a prévu des dispositions protectrices applicables en l'absence des mesures de protection qu'elle institue.

    Lorsque les biens du majeur protégé sont en péril, le Procureur de la République s'il est informé, est ténu de provoquer d'urgence, toute mesure conservatoire desdits biens.

    Si le majeur a subi une altération profonde de ses facultés personnelles constatées par un médecin spécialiste sur une liste établie par le Procureur de la République, le juge des tutelles peut le placer d'office ou sur requête du Ministère public sous le régime de la tutelle des majeurs.

    170. Lorsqu'un patient d'un médecin présente des anomalies psychiques justifiant sa protection par la loi, ce médecin peut en faire la déclaration au Procureur de la République qui pourra demander son placement sous sauvegarde de justice. Le Ministère public peut également demander la révocation d'un mandataire constitué par le majeur. Comme tout ceux qui ont qualité pour demander l'ouverture d'une tutelle, le Ministère public à l'obligation de faire les actes conservatoires que nécessite la gestion du patrimoine du protégé. Il peut ainsi attaquer en nullité, les engagements pris par le majeur placé sous sauvegarde de justice ou demander leur réduction. La sauvegarde de justice prend fin avec la cessation de l'altération des facultés ou la radiation de cette protection par le Procureur de la République.

    171. Hormis les incapables, le Ministère public protège également la famille dans son fondement institutionnel qu'est le mariage.

    II. Le Ministère public, protecteur de l'institution du mariage

    Le mariage est un acte- condition c'est-à-dire un acte dans lequel on est libre d'entrer, mais tenu d'y vivre ou d'y mettre un terme selon les règles bien établies. Sa conclusion nécessite le respect d'un certain nombre de conditions dont le manquement peut être sanctionné par la nullité du mariage. L'ordonnance du 29 juin 1981 qui réglementent actuellement la matière au Cameroun, ne donne pas de précision quant aux personnes qui peuvent exercer cette action. On peut donc se référer au code civil, article 184 qui investit le Ministère public211du droit, sinon de l'obligation de demander la nullité du mariage, du vivant des époux, et de les faire condamner à se séparer en cas de non-respect de la condition d'âge, d'absence de consentement, de non respect de la forme de mariage ou d'inceste, bref de la

    211 Ainsi que les personnes intéressées

    violation des conditions d'ordre public. Le Ministère public peut en outre demander la condamnation des officiers de l'état civil qui ont célébré le mariage en contravention de ces règles.

    Cette action du Ministère public sur l'acte de mariage s'étend sur la quasi-totalité des actes d'état civil ainsi que sur la nationalité.

    B. Les actes d'état civil et la nationalité

    172. Les actes d'état civil et la nationalité sont ceux qui permettent à l'état de maîtriser ses nationaux, de repérer facilement un individu et de le suivre partout où il pourrait se trouver. Ce sont des actes constitutifs de l'identité d'une personne, identité à laquelle est attaché un patrimoine. Leur attribution et les modifications qui peuvent y être apportées, doivent être régulières et sincères dans l'intérêt de certains particuliers et de la société en général. Le Ministère public bénéficie alors d'un droit d'action dans ces domaines. Nous examinerons d'abord l'action du Ministère public dans le contentieux de la nationalité (I) avant de le présenter comme partie principale en matière d'actes d'état civil (II).

    I. Le parquet comme partie principale dans le contentieux de la nationalité

    La procédure d'acquisition de la nationalité camerounaise est administrative. C'est en fait un Décret du Ministre de la justice publié au journal officiel qui naturalise, réintègre ou déchoit un individu de la nationalité. Dans cette procédure ou dans d'autres, des oppositions ou contestations peuvent être soulevées.

    173. Lorsqu'il s'agit d'une contestation intervenue de manière incidente212dans un procès, le Ministère public doit toujours être mis en cause. Il est en cela partie jointe. Les articles 41, alinéa 4213de la loi de 1968 sur la nationalité et 8 du Décret de 1968 sur les modalités d'application du code de nationalité confèrent au Ministère public un droit d'action exclusive comme demandeur ou défendeur au nom de l'état. L'article 8 précité dispose que : « la validité d'une déclaration enregistrée peut toujours être contestée par le Ministère public ou par toute personne intéressée. Dans ce dernier cas le Ministère public doit toujours être mis en cause ». Il en résulte que le Ministère public intervient à la fois comme partie jointe et comme partie principale en matière de nationalité avec un penchant pour la défense dans ce dernier cas. Cela peut également se vérifier en matière d'actes d'état civil.

    212 Il s'agit des exceptions de nationalité et d'extranéité c'est-à-dire de la revendication de la nationalité camerounaise et de la réfutation de celle-ci par un individu ou par son adversaire au procès.

    213 « Le Ministère public doit toujours être mis en cause et a seul, qualité pour agir ou défendre au nom de l'état ».

    II. L'action du parquet en matière d'actes d'état civil

    Nous examinerons les modifications portées sur les actes et leur reconstitution

    174. En principe, les actes d'état civil sont intangibles et définitifs c'est-à-dire qu'ils ne sont établis qu'une fois et ne peuvent plus être modifiés. Le principe de l'intangibilité connaît des exceptions. En effet, lorsque des erreurs ont été faites par l'officier d'état civil lors de la rédaction d'un acte d'état civil, celles-ci peuvent être corrigées et la mention des rectificatifs est portée au verso de l'acte. L'action en rectification peut être présentée par les personnes intéressées ou par le Ministère public. Le Procureur de la République est ténu d'agir d'office lorsque l'erreur ou l'omission porte sur une indication essentielle. Des modifications peuvent également être apportées à l'acte d'état civil suite à l'aboutissement d'une procédure de changement, de relèvement ou de camerounisation de nom ou de prénom. Le Ministère public peut intervenir en amont dans cette procédure qui est purement administrative, en cas d'opposition, pour saisir la Cour d'Appel afin que celle-ci statue sur ladite opposition214.

    Il arrive parfois qu'un acte d'état civil soit égaré, volé ou détruit. Dans ces cas, le caractère définitif de l'acte d'état civil subit à son tour une atténuation. Il est admis qu'on puisse procéder à la reconstitution de l'acte en question. Le Ministère public ne joue que le rôle d'enquêteur dans ces situations pour pouvoir découvrir la vérité et s'opposer le cas échéant à la reconstitution de l'acte.

    175. L'importance du rôle joué par le Ministère public comme partie principale dans les matières qui touchent à la famille, à la nationalité et aux actes d'état civil ne doit pas nous faire perdre de vue celui qu'il doit remplit en matière de redressement judiciaire.

    Paragraphe II : Le parquet et le redressement judiciaire des entreprises

    Le monde du XXIe siècle est basé essentiellement sur les affaires. La puissance d'un pays ou d'une nation repose sur plusieurs critères parmi lesquels l'importance de ses entreprises en nombre et en moyens occupe une place de choix. Il peut arriver que ces entreprises connaissent des difficultés mettant en péril leur survie. Dans le but d'éviter les conséquences que pourrait engendrer la disparition d'une société ou d'une entreprise sur le plan social, économique et même politique, le législateur a organisé les mesures de sauvetage des

    214 Article 22 de la Loi n° 69 -LF - 3 du 14 juin 1969 portant réglementation de l'usage des noms, prénoms et pseudonymes « en cas d'opposition le Ministre de la justice, à l'expiration du délai de six mois de l'article 19, transmet ensemble la demande et les lettres d'opposition qui lui sont parvenues au Procureur Général du domicile ou de la résidence du demandeur. Le Procureur Général saisit dans les trente jours de la réception des pièces visées la Cour d'Appel qui statue en chambre du conseil. Le Ministère public est toujours entendu outre le ou les opposants et le demandeur. Tout témoin est entendu à la requête des parties ou du Ministère public... ».

    entreprises qui peuvent être concrétisées à travers la procédure de redressement judiciaire. Le Ministère public, depuis quelques années, dispose d'un droit d'action dans cette procédure. Si ailleurs le législateur l'a reconnu expressément (A), en droit camerounais la situation est tout à fait différente (B)

    A. L'action en redressement judiciaire par le Ministère public en droit étranger

    176. Nous prendrons comme législation étrangère, le droit français. En effet, les lois des 13 et 24 juillet 1966 en France reconnaissaient déjà au Ministère public la possibilité de demander à tout moment la résiliation du contrat de location gérance en matière de règlement judiciaire215. Le Décret de décembre 1967 reconnaissait au Procureur de la République, aux termes des dispositions de l'article 109, le droit d'appel contre la décision rendue en matière de faillite personnelle et d'interdiction de diriger une entreprise. Il ne s'agissait là que d'un droit d'action en matière commerciale en général et non de sauvetage de l'entreprise.

    Le droit de provoquer l'ouverture des procédures collectives à l'égard d'une entreprise a commencé à être reconnu au Ministère public à travers la loi de 1967216. Il a été renforcé par la loi du 25 janvier 1985217 et le Décret du 27 décembre de la même année218, modifié par le Décret du 21 octobre 1994. L'article 25 de la loi de 1985 précitée dispose en effet que « le tribunal peut se saisir d'office ou être saisi par le Procureur de la République » de l'ouverture du redressement judiciaire. Si le Ministère public est informé de la situation d'une entreprise qui ne parvient plus à faire face à son passif avec son actif, c'est-à-dire une situation de cessation de paiements, il peut saisir le tribunal de commerce aux fins d'ouverture du redressement judiciaire. Il peut également le faire lorsque l'entreprise n'exécute pas ses engagements financiers pris dans le cadre d'un règlement amiable219 ou en cas de décès d'un commerçant ou d'un artisan se trouvant en état de cessation des paiements220.

    Le traitement de l'entreprise en difficulté financière ne constitue plus seulement une affaire entre un débiteur en déconfiture et ses créanciers. Il est devenu une mesure de sauvetage des emplois générés par celle-ci et donc de protection de l'ordre public. L'intervention du Ministère public y revêt un caractère général. Il est recevable à demander le renvoi d'une juridiction à une autre, le report de la date de cessation des paiements, le remplacement de l'administrateur, la nomination d'un nouveau commissaire au plan de continuation de l'activité,

    215 Article 28 de la Loi du 13 juillet 1966

    216 Loi n° 67 -- 563 du 13 juillet 967, D. 1967. 269

    217 Loi n° 85 -- 98 du 25 janvier 1985, D. 1985. 147

    218 D. 1986.84

    219 Article 5 Loi du 25 janvier 1985.

    220 Article 16 et 17 même Loi.

    la résolution du plan et l'ouverture d'une liquidation judiciaire. Il peut également intervenir dans l'exécution du contrat de location gérance de l'entreprise, ou de cession à un repreneur, dans la fixation de la durée de la période d'observation, ainsi que dans la liquidation judiciaire, dont il a le droit de demander l'ouverture. Le Procureur de la République peut saisir le tribunal pour mettre en cause les dirigeants de fait ou de droit d'une personne morale en vue d'un comblement du passif de celle-ci.

    177. D'une manière générale, la jurisprudence admet l'appel interjeté par le Ministère public contre les décisions compromettant des intérêts légitimes221. si le Ministère public joue ainsi un rôle important en matière de redressement judiciaire en droit français, il semble par contre un peu oublié en droit camerounais dans le même domaine.

    B. Le silence du législateur camerounais sur l'action du Ministère public en matière de redressement judiciaire

    Le Cameroun est l'un des pays qui ont signé le traité OHADA, Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires afin de garantir la sécurité juridique des affaires dans l'espace portant ce nom. Ce traité a été suivi par l'adoption de nombreux actes uniformes dont celui portant procédures collectives d'apurement du passif entré en vigueur le 1er janvier 1999. C'est dire que le droit des entreprises en difficulté est actuellement régi au Cameroun par cet acte uniforme.

    178. Comme la plupart des législations des états parties de l'OHADA, le droit camerounais n'a jamais utilisé la saisine du tribunal par le Ministère public en vue de provoquer l'ouverture d'une procédure collective à l'endroit d'une entreprise222. C'est également le cas de la saisine d'office par le juge. Si ce dernier cas a été résorbé par le législateur OHADA, il en va tout autrement du premier. Car l'acte uniforme OHADA ne mentionne nulle part la possibilité pour le Ministère public de provoquer l'ouverture d'une procédure collective. Si M. SAWADOGO estime que cette absence peut se justifier par une supposition de la part du législateur OHADA que les éléments d'information disponibles entre les mains du Ministère public pourraient être facilement communiqués à la juridiction compétente afin qu'elle se saisisse elle-même, il convient de mentionner comme le fait d'ailleurs cet auteur que, cette saisine indirecte et officieuse est moins efficace que la saisine directe du tribunal par le Ministère public. En effet la saisine du tribunal par le Ministère public oblige ce dernier à exposer le bien-fondé de sa prétention comme le fait tout plaideur, et de faire connaître ainsi au

    221 Cass. Com. 24 juin 1986, D. 1986. 2. panor. 250.

    222 FILIGA (M) SAWADOGO, droit des entreprises en difficulté OHADA, collection droit uniforme africain, p 117.

    tribunal l'ampleur de la situation de l'entreprise sur l'ordre public

    179. Le rôle du Ministère public comme partie principale dans le domaine du traitement des entreprises en difficulté observé ci-dessus, notamment en droit français devrait également lui être reconnu par le législateur OHADA dans la mesure où cela permet de garantir efficacement le respect de l'ordre public, motif pour lequel l'action du Ministère public tend à être généralisée en matière civile

    Section II : la généralisation controversée de l'action d'office du parquet pour la défense de l'ordre public

    Un principe résultant de la loi des 16-24 août 1790 énonce que l'action en justice en matière civile est réservée à ceux dont les droits ou intérêts ont été lésés. Le Ministère public intervient en principe comme partie jointe et exceptionnellement comme partie principale dans les cas expressément énoncés par la loi. Le problème s'est posé relativement à son action d'office pour la défense de l'ordre public en dehors des cas légaux. Une controverse a été animée par la doctrine et la jurisprudence (paragraphe 1) interpellant le législateur dont l'intervention reste encore attendue en droit camerounais (paragraphe 2)

    Paragraphe I : la controverse doctrinale et jurisprudentielle

    La controverse est née de la rédaction de l'article 46, alinéa 2 de la loi du 20 avril 1810 qui énonçait que : « il (le Ministère public) surveille l'exécution des lois, des arrêts, des jugements ; il poursuit d'office cette exécution dans les dispositions qui intéressent l'ordre public ». Deux thèses se sont alors affrontées relativement à son interprétation (A) et la jurisprudence a pris position (B).

    A. Les thèses de la controverse

    La thèse restrictive s'est opposée à la thèse extensive

    180. Pour la thèse restrictive, l'interprétation de l'article 46 ne devrait pas commencer à l'alinéa 2, puisque son alinéa premier dispose que le Ministère public ne peut agir que « dans les cas spécifiés par la loi ». L'alinéa 2 de ce fait, ne lui aurait permis de prendre sans texte que des mesures d'exécution en dehors de tout procès. Les auteurs de cette thèse223 estimaient que si le Ministère public est habilité à agir quand l'ordre public est intéressé, il ne s'agirait, d'après les conceptions libérales, que d'un ordre public défini par le législateur qui délimite par la même occasion les cas où cette intervention est possible.

    181. La thèse extensive quant à elle, admet que le Ministère public peut agir en vertu de

    223 VINCENT, la procédure civile n° 188 et suivants, la procédure civile et l'ordre public, mélanges ROUBIER, tome 2, p. 303, ouvrage cité par ELOUNDOU ELOUNDOU, op. Cit. p. 57.

    l'article 46, alinéa 2 précité, dès lors que l'ordre public est intéressé. Puisque, estime-t-elle, étant gardien de cet ordre, le Ministère public peut juger de l'opportunité d'intenter une action devant le juge civil lorsque les parties ne le font pas s'il lui apparaît que l'ordre public est menacé. Cette thèse a été soutenue par des auteurs comme SOLUS et PERROT224.

    B. La position de la jurisprudence

    182. Pendant la première partie du XIXe siècle, la thèse restrictive a été adoptée par la jurisprudence225. Le revirement est intervenu vers la fin de ce siècle, conduisant à une admission de l'action du Ministère public en dehors des cas légaux (I) ; admission dont la généralisation a été limitée (II).

    I. L'admission de l'action du Ministère public pour la défense de l'ordre public

    Cette admission a commencé à poindre avec l'arrêt de la chambre civile de la cour de cassation française en date du 21 mai 1856.

    183. En 1855, M. POTTIER se présenta à l'officier de l'état civil de Vitré pour le prier de procéder à la publication de son projet de mariage avec une demoiselle LOUVIGNE. Le Procureur de la République forma opposition à la célébration du mariage pour empêcher la bigamie226. Pottier demanda mainlevée de l'opposition estimant qu'elle était irrecevable. Le tribunal lui donna raison. Le Ministère public interjeta appel contre le jugement du 18 juillet 1855 devant la cour de Rennes qui, par arrêt du 22 août 1855, confirma la décision des premiers juges du fond. Se prononçant sur le pourvoi introduit contre l'arrêt de la cour de Rennes, la cour de cassation énonça que : « (...) l'article 46 de la loi du 20 avril 1810 charge le Ministère public de surveiller l'exécution des lois et de Poursuivre d'office cette exécution dans les dispositions qui intéressent l'ordre public (...) ». S'accrochant sur cet argument, la plupart des commentateurs ont trouvé en cet arrêt la consécration du droit d'action du Ministère public pour la défense de l'ordre public. Mais des doutes pouvaient encore subsister au regard de l'argument a fortiori avancé par la cour227. D'autres arrêts sont venus confirmer et consolider la

    224 SOLUS et PERROT, droit judiciaire privé, tome 1, Paris 1961. N° 879 et suivants.

    225 Civ. 29 févr. 1832, jur. Gén., V° Ministère public.

    226 Un acte de naissance inscrit sur les registres de l'état civil de la commune de Chaumeré sur déclaration de POTTIER lui-même constatait qu'un enfant était né de lui et de dame R... son épouse.

    227 « que la disposition de la Loi , qui défend de contacter un second mariage avant la dissolution du premier, intéresse l'ordre public au plus au degré ; que le Ministère public qui, aux termes de l'article 184 du code Napoléon, a le droit d'agir pour faire prononcer en justice la nullité du second mariage, doit avoir à plus forte raison le droit de s'opposer à l'accomplissement de ce mariage, de prévenir ainsi la consommation d'un crime dont il pourrait être obligé de poursuivre la répression devant les tribunaux criminels...».

    thèse extensive228 en affirmant le droit d'action du Ministère public, pour des raisons d'ordre public en dehors des cas spécifiés par la loi229. C'est l'arrêt BODIN230 en date 17 décembre 1913 qui a apporté des restrictions à la thèse extensive.

    II. Les limites à l'action du parquet pour la défense de l'ordre public

    Loin de se situer aux antipodes de la thèse extensive, l'arrêt Bodin fait partie de ceux qui la consolident mais en lui donnant simplement des précisions et restrictions.

    184. En Cochinchine, Honoré Bodin avait, en l'espace d'un mois, demandé et obtenu devant le tribunal la reconnaissance de près d'une quarantaine d'enfants afin de leur conférer la nationalité française231. Le Procureur de la République, sans sous-estimer la virilité de Bodin, a attaqué ces reconnaissances devant la Cour d'Appel. Par arrêt du 18 novembre 1910, la Cour d'Appel d'Indochine a déclaré irrecevable la demande du Ministère public procédant d'office et par voie d'action principale. Le Ministère public s'est pourvu en cassation devant la Cour de Cassation française. Celle-ci, par le célèbre arrêt du 17 décembre 1913, décidait que : « (...) Si, la loi du 20 avril 1810 dispose en son article 46, qu'en matière civile, le Ministère public agit d'office dans les cas spécifiés par la loi, le droit d'action du Ministère public ne s'explique et ne se justifie que dans les circonstances oil l'ordre public est directement et principalement intéressé à l'occasion de faits qui y portent une grave atteinte, sans léser aucun intérêt rival (...)». Ce faisant, la jurisprudence a donné des précisions (a) et un domaine restrictifs (b) à l'action d'office du Ministère public pour la défense de l'ordre public.

    a. Les précisions restrictives relatives à l'action d'office du parquet pour la défense de l'ordre public.

    185. La Cour de Cassation donne deux précisions essentielles : l'action d'office du Ministère public ne se justifie premièrement que si l'ordre public est « directement et principalement intéressé » et ensuite si « les faits lui portent gravement atteinte ».ainsi, estimet-elle, « les questions de filiation et de paternité intéressent moins l'ordre public que le repos des familles » ; la reconnaissance d'enfants naturels ne porterait donc pas gravement atteinte à l'ordre public. C'est cette position qui fut observée par la jurisprudence majoritaire postérieurement à l'arrêt Bodin232. Le tribunal de la Seine dans le jugement du 3 février 1948,

    228 Cass. civ. 24 déc. 1901, S. 1902.1.363, note E.H. PERREAU

    229 GLASSON, TISSIER et MOREL, traité, 3e éd. T. I, n° 188.

    230 Cass. civ. 17 déc. 1913, DP 1914. 1. 261, note Binet ; S. 1914. 1. 153, note Ruben de Couder.

    231 Ces reconnaissances étaient faites moyennant rémunération et en fraude de la procédure administrative prescrite pour l'acquisition de la nationalité française à cette époque.

    232 SOLUS, La jurisprudence contemporaine et le droit du Ministère public d'agir en justice au service de l'ordre public in Mélanges Capitant, 1939, p. 769 et s.

    Ministère public c/ consorts V. déclare irrecevable l'action principale du Ministère public en nullité d'une filiation incestueuse233. Çà a été également le cas pour les enfants naturels adultérins234.

    186. Ces précisions restrictives ont été accompagnées par des arguments d'une restriction du domaine de l'action d'office du Ministère public.

    b. Le domaine restreint de l'action d'office du Ministère public

    Si la nationalité se présente comme le domaine où la thèse extensive a trouvé une pleine expansion parce que intéressant suffisamment l'ordre public et qui plus est, a été entériné par le législateur235, il en va tout autrement des autres domaines tels que celui de la filiation et tout ceux où l'ordre public risque de léser « un intérêt rival ».

    187. L'on peut se demander ce qui serait constitutif de l'intérêt rival. La jurisprudence Bodin donne un début de réponse à cette préoccupation : il s'agit par exemple de « l'honneur et (du) repos des familles ». De l'avis de certains auteurs236 il pourrait s'agir de tous les cas où l'action du Ministère public comporterait des risques d'arbitraire, ou entraînerait des troubles plus dangereux. Toutes ces tergiversations interpellent le législateur pour plus de clarté.

    Paragraphe II : La nécessite D'une Solution Législative

    Si le législateur camerounais est resté indifférent (B) jusqu'ici, ce n'est pas le cas du français qui a élargi considérablement le domaine de l'action d'office du parquet (A)

    A. La solution du législateur français

    188. Dans le Nouveau Code de Procédure Civile, le législateur français a pris position en faveur de la thèse extensive. En effet, après avoir énoncé à l'article 422 que Le Ministère public agit d'office dans les cas spécifiés par la loi, il ajoute qu' « En dehors de ces cas, il peut agir pour la défense de l'ordre public à l'occasion des faits qui portent atteinte à celui-ci ».

    La notion d'ordre public237 étant fuyante, le champ d'action du Ministère public se trouve ainsi indéfiniment vaste. Ce d'autant plus que, selon la chambre des requêtes, lorsque la

    233 « (...) en matière d'état des personnes, le législateur n'a admis qu'un petit de dérogations à cette règle prohibitive (...). Le Ministère public ne peut donc pas demander l'annulation de la reconnaissance d'un enfant incestueux, émanant du père et postérieur à l'acte de naissance, qui porte reconnaissance de la part de la mère »

    234 Cass. civ. 10 juin 1953, D. 1953, 612. JCP 1953. II. 7823, note J. S ; 29 mars 1955, D. 1955. 429.

    235 Art. 129 et s. de l'ordo. Du 19 oct. 1945 portant code de la nationalité en France ; voir aussi le code de nationalité camerounais.

    236 C'est le cas de TERRE (F) et LEQUETTE (Y), les grands arrêts de la jurisprudence civile, 11e éd. t. 1, 9-10, p.54.

    237 En droit administratif, l'ordre public englobe la sécurité publique, la salubrité publique, la tranquillité publique, était depuis l'arrêt du lancer de nain, la dignité humaine.

    notion d'ordre public n'est pas définie par un écrit visant expressément l'objet du litige, elle découle de « l'organisation politique, sociale, économique et morale d'un pays, telle que le législateur, organe de la conscience publique et gardien de l'intérêt commun l'a conçue »238. Or toute règle de droit peut participer à l'organisation politique, économique et sociale dans un Etat.

    En droit français donc, l'ordre public est désormais la condition nécessaire et suffisante pour la recevabilité de l'action du Ministère public en dehors des cas légaux. Il en est de même de la fraude239. L'intérêt rival ne constitue plus une limite à cette action. Et le Ministère public en apprécie l'opportunité. La situation est différente en droit camerounais.

    B. L'indifférence du législateur camerounais

    189. La procédure civile camerounaise demeure régie par le vieux code de procédure civile et commerciale. Les textes législatifs adoptés en matière de procédure depuis l'indépendance du pays, certes modifient l'organisation judiciaire et les attributions des institutions judiciaires dont le Ministère public, mais ne touchent pas à son droit d'action en tant que partie principale dans les procès civils et commerciaux. On pourrait légitimement dire à ce propos que la jurisprudence Bodin pèse encore de tout son poids. Le législateur, à notre avis, devait simplement l'ériger en règle de droit pour éviter les immixtions injustifiées du Ministère public dans les affaires privées. Même comme le Ministère public use rarement de cette faculté. C'est dire que la position du législateur français n'est pas à imiter.

    Conclusion du chapitre II

    190. Au terme de ce chapitre, on peut noter que le rôle du Ministère public comme partie principale consiste en la défense d'intérêts divers et louables.

    Il défend les incapables, l'institution du mariage, la filiation et la nationalité dans leurs différents aspects frauduleux. Il veille au respect de l'ordre public dans les cas légaux et en dehors de ceux-ci. Si ce rôle est plus complet en droit français malgré quelques débordements, la situation est tout à fait différente au Cameroun.

    191. Certaine situations intéressant la paix sociale et donc l'ordre public comme celle des entreprises en difficulté, ne font pas partie des cas légaux de l'action d'office du Ministère public au Cameroun du fait du silence de la législation OHADA à propos. En outre, le législateur devrait se prononcer sur l'action d'office du Ministère public.

    238 Req. 4 nov. 1946, S. 1947. 1. 43.

    239 TGI châlon-sur-Marne, 16 févr. 1972, Gaz. Pal. 1972. 2. 477, note P. Decheix.

    CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

    192. Le procès civil qui résout les conflits d'intérêts privés, est également le domaine la loi et l'ordre public sont intéressés. Le Ministère public y joue alors un rôle non moins

    considérable et intervient de deux manières.

    Il intervient par voie de réquisitions ou de conclusions dans un procès déjà engagé par les parties principales. Il est alors partie jointe et reçoit communication des dossiers de procédure obligatoirement ou facultativement, aux fins de donner son opinion sur l'application de la loi et de protection d'intérêts divers. Ces intérêts sont parfois si importants, antagonistes et égoïstes que son intervention par voie d'action est permise. Il agit alors comme demandeur ou défendeur dans les cas légaux. Une possibilité d'action pour la défense de l'ordre public en général lui est reconnue par la jurisprudence, et même par le législateur sur d'autres cieux.

    193. Ce rôle en matière civile est d'une importance considérable. Non seulement son intervention éclaire le juge sur l'interprétation de la loi, mais en plus, elle assure la défense de certaines institutions et personnes que l'on pourrait qualifier de faibles à l'instar des incapables majeurs et mineurs, des absents et disparus... Il contribue également à la garantie de la bonne administration de la justice à travers son intervention dans l'exécution des décisions de justice non répressive et les procédures particulières telles que la prise à partie, la récusation des magistrats, le déclinatoire de compétence...

    194. Cependant, ce rôle a un domaine disparate et très vaste, et manque par ailleurs de fil conducteur. Ceci est source d'insécurité juridique du fait de l'imprévisibilité de ses interventions qui pourraient constituer des immiscions dans les affaires privées. Si la modicité de ses moyens ne lui permet pas à l'heure actuelle d'opérer de telles intrusions, il faut tout de même reconnaître que cela ne constitue pas une garantie certaine pour les justiciables en matière de procédure civile. Leurs affaires peuvent se trouver menacées Car une simple action de la part du parquet peut constituer un frein considérable à la réussite d'une affaire, celle-ci reposant sur la célérité. La systématisation de l'intervention du Ministère public en matière civile se présente donc comme une nécessité imparable.

    L'axe principal de cette théorie pourrait bien entendu, être la défense de la loi et de l'intérêt général comme en matière pénale. En effet c'est le législateur qui prévoit des dispositions protectrices de certaines personnes ; c'est également lui qui devrait fixer des limites à l'action du Ministère public dans les procès civils. Ceci permettrait de concilier l'intérêt général et les intérêts privés du fait de la clarté qui en résulterait. La doctrine est donc interpellée afin que l'intervention du législateur, le moment venu, soit concluante.

    195. Institution aux fonctions multiples et diverses, le Ministère public est un acteur fondamental dans les procès qui se déroulent devant les juridictions de droit commun. Il y intervient tantôt comme partie principale en matière pénale et exceptionnellement en matière civile pour la défense de l'ordre public et d'intérêts divers, tantôt comme partie jointe en toute matière devant la Cour Suprême ainsi qu'en matière civile pour donner son avis sur l'application de la loi. Il est pour ainsi dire, le gardien de la loi et de l'ordre public. Là est le fondement de ses fonctions en tant que magistrat.

    196. Mais le Ministère public est également chargé de suivre et de veiller à l'application de la politique gouvernementale. Ceci a pour conséquence de faire de ses magistrats, des agents du gouvernement et comme tel, soumis à l'autorité hiérarchique du Garde des Sceaux. Se pose alors le problème du fondement de l'institution même du Ministère public : est-il le représentant de l'exécutif ou celui de la société auprès des juridictions ? La réponse à cette interrogation est fondamentale pour la justification de l'organisation du Ministère public d'une part, celle du statut de ses magistrats d'autre part, deux aspects pouvant être considérés comme les garanties essentielles de l'efficacité de sa mission.

    A cette interrogation, la doctrine dans sa grande majorité240, décline pour la thèse selon laquelle le Ministère public serait un corps de « magistrats-fonctionnaires »241. C'est cette vision qu'a également le législateur camerounais lorsqu'il prévoit dans le statut de la magistrature que « les magistrats du parquet (...) relèvent administrativement de la seule autorité du Garde des Sceaux »242. On peut dire avec M-L RASSAT que cette dualité de nature est difficilement conciliable. Cela est d'ailleurs perceptible au Cameroun et susceptible de compromettre grandement l'indépendance de la justice et partant, la garantie de l'Etat de droit.

    197. Le législateur de 2005, dans le souci de concilier les impératifs de protection de l'ordre public et de sauvegarde des droits et libertés des citoyens, a modifié considérablement les attributions du Ministère public. S'il l'a fait en lui confiant la charge de veiller au respect des droits et libertés du citoyen dans la phase policière du procès, en le dessaisissant de la qualité de magistrat instructeur ou enfin, en accentuant son action dans les phases de jugement et de l'exécution des décisions de justice par le renforcement du caractère accusatoire du procès, il faut souligner qu'il a également manifesté le désir de faire du Garde des Sceaux, le véritable titulaire de l'action publique et le maître du procès pénal.

    Le législateur a en effet, non seulement gardé un silence aberrant sur l'ordre du

    240 M-L RASSAT, le Ministère public entre son passé et son avenir, Paris, LGDJ 1967 p.247

    241 Cette doctrine avançait au soutien de son point de vue que ces fonctions ne s'exercent jamais simultanément mais toujours successivement : les officiers du Ministère public seraient uniquement fonctionnaires dans leurs parquets, et magistrats à l'audience.

    242 Art. 3 Décret n° 95/ du 8 mars 1995 portant statut de la magistrature.

    Ministre de la justice au Ministère public d'engager ou non les poursuites, mais aussi renforcé la subordination hiérarchique entre parquets et a conféré au Ministère public la possibilité d'arrêter les poursuites à tout stade de la procédure sur autorisation du Garde des Sceaux. Ce qui, dans un système de liberté243 comme celui du Cameroun, signifie que le Garde des Sceaux jouit d'une totale liberté en ce qui concerne l'ordre d'engager ou non les poursuites et qu'il a également une totale maîtrise de l'action publique du fait de la hiérarchie qui le place au dessus des parquets.

    198. Si la subordination hiérarchique constitue une garantie pour le gouvernement de veiller au respect de la politique par lui définie, il convient de dire que cette subordination hiérarchique devrait être limitée pour permettre aux magistrats du parquet de remplir également leurs fonctions judiciaires en toute quiétude. Or ces limites au Cameroun souffrent d'une fragilité plutôt injustifiable. En effet, si la liberté de parole à l'audience est compromise par les dispositions de l'article 3, al. 3 du Décret de 1995244, le pouvoir propre des chefs des parquets quant à lui, ne pourrait être mis en oeuvre que par les magistrats jaloux d'une certaine éthique professionnelle245 et assez audacieux, au regard du régime disciplinaire auquel ils sont soumis et de l'amovibilité qui les caractérise.

    199. Les freins à l'indépendance des magistrats du parquet et l'influence possible de l'exécutif sur le procès et donc sur la justice pénale sont susceptibles des mêmes conséquences en matière civile, domaine où le rôle du Ministère public est par ailleurs caractérisé par un manque de systématisation criarde.

    200. Il conviendrait à notre avis, pour la garantie de l'efficacité du rôle du Ministère public, de faire de lui un corps de magistrats, « représentants de la société auprès des tribunaux chargés simplement de tenir compte du point de vue du gouvernement 246». Ces magistrats bénéficieraient ainsi de l'inamovibilité réelle et d'un régime disciplinaire qui leur permettrait d'être moins soumis à l'exécutif comme c'est le cas aujourd'hui. On pourrait créer au sein du Conseil Supérieur de la magistrature, qui serait lui-même reconfiguré dans sa composition, un organe spécial qui prendrait des sanctions disciplinaires à l'égard des

    243 On sait qu'un système de liberté est celui dans lequel tout ce qui n'est pas proscrit est permis. Il est opposé au système d'interdiction c'est-à-dire celui dans lequel tout ce qui n'est pas permis est interdit.

    244 Art. 3 al. 3 « leur liberté de parole ne s'exerce à l'audience, lorsque des instructions leur ont été données, qu'à condition qu'il aient préalablement et en temps utile, informé leur chef hiérarchique direct de leur intention de s'écarter oralement des réquisitions ou conclusions écrites déposées conformément aux instructions reçues ».

    245 Ethique dont on peut légitimement douter au regard des réalités sociales camerounaises. Notamment les fraudes souvent enregistrées au concours d'entrée à l'Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature (88 candidats au concours d'entrée au cycle "B" de l'Ecole pour l'année académique en cours, convaincus de fraude ont été suspendus pour trois ans de toute présentation audit concours par Le conseil académique de cette institution, réuni le 20 juillet 2007.)Et la corruption qui nous a valu, il y a quelques années une couronne mondiale.

    246 M-L RASSAT, le Ministère public entre son passé et son avenir, op. Cit. p.247

    magistrats du parquet. Ce qui constituerait une certaine unification des régimes disciplinaires des magistrats du parquet et du siège.

    201. Par ailleurs, la modicité des moyens du parquet rend parfois son rôle ineffectif au point de compromettre la défense de l'ordre public et la sauvegarde des droits et libertés des citoyens. Il conviendrait donc de doter les parquets de moyens humains, matériels et financiers suffisants pour remédier à ce problème. Bien que l'ineffectivité de la couverture du territoire national par les tribunaux soit conjoncturelle, il serait tout à fait judicieux que les pouvoirs publics tiennent compte de cette question pour mettre fin au cumul de compétence et permettre au droit existant de se réaliser, cette « réalisation qui est la vie du droit et qui est le droit luimême » puisque « ce qui ne se passe point dans la réalité, ce qui n'existe que sur du papier n'est qu'un fantôme du droit, ce ne sont que des mots »247.

    247 IHERIN, cité par R DEMOGUE, les notions fondamentales du droit, p. 8

    INDEX ALPHABETIQUE

    A

    abrogation
    · 40

    accusateur
    · 48, 49, 50

    accusation
    · 2, 5, 33, 38, 48, 49, 51

    accusé
    · 38, 40, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 66

    acquittement
    · 22, 49, 55 action civile
    · 43, 45

    action en recherche de paternité
    · 76

    action publique
    · 5, 10, 24, 35, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44,

    45, 46, 47, 49, 53, 59, 60, 61, 97

    administration légale
    · 70, 82, 83

    administration pénitentiaire
    · 56, 57

    adoption
    · 72, 82, 83, 88 amendes
    · 2, 9, 58, 59, 61 amendes forfaitaires
    · 58 amnistie
    · 40

    amovibilité
    · 4, 5, 98

    auditions
    · 13, 26, 38

    autorisation
    · 12, 13, 14, 19, 20, 34, 98

    C

    causes communicables
    · 78 cessation des paiements
    · 87, 88

    chambre de contrôle de l'instruction
    · 33, 47, 66 changement de nom
    · 72

    chose jugée
    · 40, 55

    citation directe
    · 40, 43, 44, 47 classement sans suite
    · 40, 42 commission rogatoire
    · 10, 30 communication facultative
    · 73 communication judiciaire
    · 73 communication légale
    · 65, 66 consignation
    · 45

    contradiction
    · 54, 72, 74, 75, 76, 77, 79 correctionnalisation
    · 39

    crimes
    · 5, 23, 28, 35, 40, 46 cross-examination
    · 50

    culpabilité
    · 10, 48, 49, 50 curatelle
    · 84

    D

    demandeur
    · 64, 66, 69, 85,

     

    86,

    95

     

    dessaisissement
    · 10,

    11,

    29,

    31

     

    détention préventive
    ·

    27

     
     
     

    détention provisoire
    ·

    21,

    26,

    27, 28,

    29, 35

    dossier de l'instruction
    · 25, 26

    douanes
    · 45

    double degré d'instruction
    · 32

    droits de la défense
    · 14, 19, 27, 34, 50 droits et libertés individuelles
    · 6, 17, 22, 60

    E

    eaux et forets
    · 45

    effet suspensif
    · 52, 54

    enquête préliminaire
    · 10, 11, 14, 15, 18, 19, 23, 29, 61 état civil
    · 68, 69, 80, 85, 86, 90

    examen médical
    · 21

    examination-in-chief
    · 50

    exercice de l'action publique
    · 38 extra petita
    · 75

    F

    filiation
    · 44, 68, 69, 82, 91, 92, 93

    fisc
    · 45

    flagrant délit
    · 20, 35, 40, 47 frais de justice
    · 6, 58, 61 frais de procédure
    · 6, 65

    G

    garde à vue
    · 13, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 61 Garde des Sceaux
    · 5, 41, 42, 97, 98

    greffier
    · 26, 47, 52, 53, 56, 58, 66, 67, 74, 79

    H

    huissier de justice
    · 44 hypothèque légale
    · 82, 83

    I

    impartialité
    · 71

    inamovibilité
    · 98

    incarcération
    · 56, 59, 60

    incrimination
    · 39

    inculpation
    · 27, 29, 30, 34, 35 inculpé
    · 26, 27, 28, 29, 31, 40 indépendance
    · 3, 4, 31, 73, 93, 97, 98 indices
    · 16, 19

    indivisibilité
    · 4, 54, 60, 71 infra petita
    · 75

    instruction préparatoire
    · 24, 30, 31, 38

    interception des communications
    · 13 intérêt de la justice
    · 6, 68, 71

    intérêt général
    · 23, 57, 95 interrogatoire
    · 13, 35, 48, 50, 53 irrecevabilité
    · 52, 54

    irrécusabilité
    · 4

    irrécusable
    · 6

    irresponsabilité
    · 4, 5, 71

    J

    juge d'instruction
    · 3, 10, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 33,

    34, 35, 36, 38, 40, 44, 45, 46, 47

    juge d'instruction
    · 10, 24, 30, 33, 36

    jugements avant dire droit
    · 53

    jugements définitifs
    · 53

    juridictions
    · 3, 4, 5, 43, 47, 54, 65, 68, 69, 71, 73, 77, 97

    L

    légalité des délits et des peines
    · 39

    légitimation
    · 72

    légitime défense
    · 50

    l'enquête de flagrance
    · 11, 16 liquidation judiciaire
    · 88

    M

    magistrat instructeur
    · 24 magistrats du siège.
    · 4, 54 mandat
    · 3, 12, 13, 17, 59 mariage
    · 68, 69, 80, 82, 84, 85, 90, 91, 93

    mémoire ampliatif
    · 66 mémoire en réplique
    · 66 mémoire en réponse
    · 66 mineurs
    · 24, 35, 43, 65, 70, 80, 82, 95

    N

    nationalité
    · 68, 69, 80, 85, non lieu
    · 22, 25, 33, 36 notifications
    · 6

    nullité
    · 13, 14, 15, 18, 21, 91, 92

    86,

    33,

    91,

    34,

    92,

    44,

    93
    47,

    52,

    77,

    79,

    84,

    O

    opportunité
    · 6, 11, 39, 40,

    41,

    42,

    46,

    61,

    73,

    90,

    93

     

    opposition
    · 6, 13, 52, 53, 54, 66, 70, 72, 86, 90 ordonnance
    · 3, 5, 10, 16, 21, 25, 28, 33, 45, 47, 59, 82, 84

    ordre public
    · 6, 7, 14, 15, 41, 61, 62, 64, 65, 68, 72, 76,

    77, 79, 80, 85, 87, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 97, 99

    P

    paix publique
    · 34

    partie civile
    · 6, 42, 43, 44, 45, 47, 48, 49, 50, 51, 58, 59, 77

    partie jointe
    · 4, 6, 7, 63, 64, 65, 66, 71, 76, 77, 79, 85, 89, 95, 97

    perquisitions
    · 12, 15, 17, 29

    pièces à conviction
    · 14, 15

    plainte avec constitution de partie civile
    · 24, 34, 43, 44, 46

    plumitif
    · 48

    police administrative
    · 11

    police judiciaire
    · 10, 11, 12, 14, 15, 17, 18, 19, 20, 21,

    22, 23, 24, 29, 36, 38, 51, 53, 58

    pourvoi dans l'intérêt de la loi
    · 6, 55

    pourvoi en cassation
    · 6, 52, 54, 79

    prescription
    · 40, 42, 59, 77

    présomption d'innocence
    · 9, 10, 18, 27, 38, 47, 48, 50, 60

    preuve de la communication
    · 78, 79

    preuves
    · 11, 17, 18, 48, 50, 51, 60

    prévenu
    · 28, 38, 40, 44, 47, 48, 49, 50, 51, 60 principe dispositif
    · 74, 75, 76, 79

    prise à partie
    · 71, 95

    procès équitable
    · 9

    procureurs du roi
    · 2

    puissance paternelle
    · 69, 70, 82

    R

    récidive
    · 57

    recouvrement
    · 9, 58, 60, 61, 62

    récusation
    · 31, 71, 83, 95

    redressement judiciaire
    · 80, 86, 87, 88 re-examination
    · 50

    règlement de juges
    · 71

    renvoi
    · 25, 28, 33, 47, 71, 88

    réquisitoire définitif
    · 36

    réquisitoire introductif
    · 24, 34, 40, 47

    réquisitoire supplétif
    · 34

    responsabilité
    · 4, 15, 21, 27, 28, 43, 45, 59, 71 rétractation du consentement
    · 15

    retrait de la plainte
    · 40

    S

    saisies
    · 12, 13, 15, 17, 29, 71 saisine
    · 24, 33, 45, 66, 88

    sanctions disciplinaires
    · 22, 99 sécurité juridique
    · 39, 88

    séparation des fonctions de justice répressive
    · 10, 46,

    61, 73

    subordination
    · 4, 5, 31, 41, 42, 98 subordination hiérarchique
    · 4, 5, 41, 42, 98

    surveillance judiciaire
    · 26, 28, 29

    suspect
    · 10, 12, 15, 16, 18, 19, 20, 21, 27, 32, 35, 40, 49, 60, 61

    T

    témoins
    · 12, 27, 46, 48, 50, 53, 60 transaction
    · 40

    U

    ultra petita
    · 75

    V

    visites domiciliaires
    · 12, 15, 29

    voies d'exécution
    · 62

    voies de recours
    · 6, 38, 51, 52, 54, 55, 61, 80

    BIBLIOGRAPHIE : Législation :

    · Constitution Camerounaise du 18 janvier 1996 ;

    · Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples ;

    · Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 ;

    · Code civil ;

    · Code de Procédure Civile et Commerciale, éd. Minos 1995;

    · Code de Procédure pénale du Cameroun, Loi n° 2005/007 du 27 juillet 2005

    · Code d'Instruction Criminelle

    · Code Pénal du Cameroun ;

    · Loi n° 68-LF-3 du 11 Juin 1968 portant code de la nationalité au Cameroun ;

    · Loi n° 69 -LF - 3 du 14 juin 1969 portant réglementation de l'usage des noms, prénoms et pseudonymes ;

    · Loi n° 82/14 du 26 novembre 1982 fixant l'organisation et le fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature, modifiée par la Loi n° 89/016 du 28 juillet 1989 ;

    · Loi n°92/008 DU14 Août 1992 fixant certaines dispositions relatives à l'exécution des décisions de justice modifiée par la Loi n°97/08 du 7 Août 1997 ;

    · Loi n° 2006 / 015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire ;

    · Nouveau code de Procédure Civile Français ;

    · Criminal Procedure Ordinance ;

    · Ordonnance n°72 /4 du 26 Août 1972 portant organisation judiciaire modifiée par les ordonnances : n°72/21 du19 Octobre 1972 ; n°73/3du 25 avril 1973 ; n°74/9 du 25 Juillet 1974 ;n°76/17 du 8 Juillet 1976 ;n°89/019 du29 Décembre 1989 ;n°90/58 DU 19 Décembre 1990 ;n°98:/008du14 Avril 1998 ;

    · Décret 95/048 du 08 mars 1995 portant statut de la Magistrature, modifié par celui n° 2000/310 du 03 novembre 2000 ;

    · Décret n° 2004 du 13 avril 2004 modifiant certaines dispositions du Décret n° 95/048 du 08 mars 1995 portant statut de la magistrature

    · Décret n°68-DF-478 du 16 décembre 1968 fixant les modalités d'application du code de nationalité

    · Avant projet du code camerounais des personnes et de la famille;

    · La justice camerounaise et ses nouvelles institutions (collection des textes usuels) Ydé, PUA, 2007

    Ouvrages :

    Généraux :

    · BORINCAUD (J) et SIMON (A.M), droit pénal : procédure pénale, SIREY, Paris 2002

    · HERON (J), droit judiciaire privé, Paris Montchrestien, 2ème édition, Paris 2002

    · LARGUIER (J), procédure pénale, Dalloz, 18ème édition, Paris 2005

    · PERROT(R), institutions judiciaires, Paris Montchrestien, 7ème édition, 1995, 8ème édition, Paris 1998 et 10ème édition, Paris 2002

    · SOLUS et PERROT, droit judiciaire privé, tome 1, paris 1961.

    · SOYER (J.C), droit pénal et procédure pénale, LGDJ, 16ème édition, Paris 2002

    · TERRE (F), LEQUETTE (Y), les grands arrêts de la jurisprudence civile, 11e éd. Dalloz, Paris 2000 t. 1.


    · VINCENT (J) et GUINCHARD(S), procédure civile, Dalloz 24ème édition, Paris 1996

    Spéciaux :

    · ANGIBAUD (B), le parquet, PUF, Que sais-je ? Paris 1999

    · DZEUKOU (G.B), code de procédure pénale annoté et commenté, t. 1 éd. Juridiques camerounaises, Ydé 2007

    · EYIKE (V), l'audition en procédure pénale camerounaise, Ydé, PUA, 2007.

    · MESTRE (L) et PAUSIER (F.J), le Procureur de la république, Que sais-je ? PUF, Paris 1998

    · RASSAT (M.L), le Ministère public entre son passé et son avenir, LGDJ, Paris 1967

    · VOLFT (J), le Ministère public, PUF, QUE SAIS-JE, Paris 1998

    Thèses et Mémoires

    Thèses :

    · ANOUKAHA (F), Le magistrat instructeur dans la procédure pénale camerounaise, Thèse dactylographiée de Doctorat 3ème cycle Droit privé, UY, 1982, 528 P.

    · GOUDEM (J), L'organisation juridictionnelle du Cameroun, Thèse dactylographiée de Doctorat 3ème cycle en Droit privé, UY, 557 P

    · LAM BIDJECK (L), La police judiciaire générale au Cameroun, Thèse de Doctorat 3ème CYCLE Droit privé UY

    · MIKALEF-TOUDIC (V), le Ministère public, partie principale dans le procès civil, Thèse dactylographiée, CAEN, décembre 1997,

    · NKOLLO (P), La recherche et la production des preuves dans l'avant projet du code de procédure pénale camerounais, Thèse dactylographiée de Doctorat 3ème cycle en Droit privé, UY, 390 P.

    Mémoires :

    · DICKY NDOUMBE, L e parquet dans la procédure pénale camerounaise, Mémoire de maîtrise en Droit privé, UY 1987-1988

    · ELOUNDOU ELOUNDOU (A), le rôle du Ministère public dans les procès civils, Mémoire de Maîtrise en Droit privé, FDSE U.Y 1989-1990, 66 pages

    dactylographiées

    · NGO PEKBA (N), le Ministère public et l'opportunité des poursuites en droit
    camerounais,
    Mémoire de Maîtrise en Droit privé, FDSE U.Y, 1988-1989

    · SANY (F.B), le Ministère public au Cameroun, Mémoire de Licence, FDSE U.Y, 1975-1976, 68 pages dactylographiées

    · WANDJI KAMGA (A.D), procès civil et droits de l'Homme, Mémoire de Maîtrise en Droit privé, FSJP U.Y II, 2001-2002, 90, pages saisies

    ARTICLES ET NOTES DE JURISPRUDENCE :

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    · ANOUKAHA (F), le Procureur de la République, « Janus » de la magistrature camerounaise, in Pénant, n° 787, Ydé, 1985, pp. 115 et s.

    · BELL HAGBE (J.J) la fin du viens ici, Cahiers de mutation n°038, Ydé Juillet 2006

    · BOKALLI (V-E), La protection du suspect dans le code de procédure pénale in RASJ, V 4, n°1, Ydé 2007, pp 9 et s.

    · DORWLING-CARTIER (M) faut-il supprimer le juge d'instruction ? semaine juridique, Paris 1990, doctrine, 3458


    · FOURNIER BLAIS (M.D) la transmission des extraits de condamnation au juge
    d'application des peines par le Ministère public G.P, Paris 1990 Doctrine 3474

    · JACQUES-HENRI (R) De la nécessite d'un Ministère public l'office du juge : part de souveraineté ou puissance nulle, études rassemblées par CAYLA (O), RENOUX-ZAGAME (M-F) BRUYANT LGDJ 2001.

    · LARGUIER (J) l'action publique menacée Dalloz Paris 1958 chron. IV P6

    · MARTIN (R) principes directeurs du procès, Recueil Dalloz V° procédure civile Mai, Paris 2000

    · MEBU NCHIMI (J.C), le Procureur de la République « décoiffé » de sa casquette de magistrat instructeur (A propos de la séparation des fonctions de justice répressive dans le code de procédure pénale camerounais), Les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, PUA, Ydé 2007, pp. 241et s.

    · MICHAUD (J), Le Janus de la magistrature, RSC, Paris 1974, PP. 660 et s.

    · MOLINS (F) le Ministère public Paris Recueil Dalloz V° procédure pénale, Paris juillet 2001

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    · OHANDJA ELOUNDOU (A), Un revenant : Le juge d'instruction, Juridis périodique, n° 65, Ydé, 2006, pp 91 et s.

    · POUGOUE (P-G), Les figures de la sécurité juridique in RASJ, V4, n° 1, Ydé, 2007, pp 1à 8

    · SOLUS, La jurisprudence contemporaine et le droit du Ministère public d'agir en justice au service de l'ordre public in Mélanges Capitant, Paris 1939, pp. 769 et s.

    · SOUTTON (G) la communication au Ministère public G.P, Paris, 1973 I doctrine 342

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    · TCHOKOMAKOUA (V) du code d'instruction criminelle au nouveau code Cahiers de mutation, n°038, Ydé, juillet 2006 p 3

    · TJOUEN (A. D) l'exécution des décisions de justice en droit camerounais, revue internationale de droit comparé, Paris 2000, pp 429 à 442

    · VINCENT (J) la procédure civile et l'ordre public, Mélanges en l'honneur de Paul ROUBIER, Paris 1961, p 303

    WEBOGRAPHIE

    · BERLIOZ (J.C) impartialité et objectivité du Ministère public google

    · MARIN (J.C) le Ministère public dans les affaires civiles et commerciales, google

    · WWW.SPM.GOV.CM

    TABLE DES MATIERES.

    AVERTISSEMENTS I

    DEDICACES ..II

    REMERCIEMENTS ........III

    TABLES DES ABREVIATIONS .IV

    SOMMAIRE ..VI

    RESUME ..VII

    ABSTRACT .VIII

    INTRODUCTION GENERALE 0

    PREMIERE PARTIE : LE MINISTRE PUBLIC, PARTIE PRINCIPALE AU PROCES PENAL 16

    CHAPITRE 1 : LE REAMENAGEMENT DES FONCTIONS DU MINISTERE PUBLIC DANS LES PHASES PREPARATOIRES DU PROCES 18

    SECTION 1 : LE MINISTERE PUBLIC, AUTORITE DES POURSUITES 18

    PARAGRAPHE I : LA DIRECTION DES ENQUETES DE POLICE JUDICIAIRE 19

    A. Le Procureur de la République, régulateur .des actes de l'enquête préliminaire 19

    I. La réglementation des actes de l'enquête préliminaire 19

    a. Les actes sur les biens 20

    b. Les actes sur les personnes 21

    II. Les sanctions des irrégularités 22

    a. La sanction des actes irréguliers 22

    b. La responsabilité des auteurs des actes irréguliers 23

    B. Le pragmatisme de l'enquête de flagrance 24

    I. Les hypothèses de flagrance dans le code de procédure pénale 24

    a. Les cas de flagrance et le cas assimilé 24

    b. L'appréciation critique des hypothèses de Flagrance 24

    II. Les pouvoirs exorbitants reconnus aux autorités de police judiciaire et aux populations 25

    PARAGRAPHE II : LE CONTROLE DE LA POLICE JUDICIAIRE PAR LE MINISTERE PUBLIC 26

    A. Le contrôle de La garde à vue par le paquet 26

    I. La réglementation de la garde à vue 27

    a. Les conditions de la garde à vue 27

    1. Les conditions de l'ouverture de la garde à vue 27

    2. La durée de la garde à vue 27

    b. Les droits reconnus aux suspects pendant la garde à vue 28

    II. Les conséquences du contrôle 29

    a. La nullité des actes 29

    b. La responsabilité de l'officier de police judiciaire 29

    B. Le contrôle général effectué par le Procureur Général près la Cour d'Appel 30

    I. L'étendue du contrôle 30

    II. L'appréciation critique sur le contrôle de la police judiciaire 30

    a. Le Ministère public, garant des droits et libertés des suspects 30

    b. Les pesanteurs à la garantie 31

    SECTION 2 : LA PERTE DE LA QUALITE DE MAGISTRAT INSTRUCTEUR PAR LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE 32

    PARAGRAPHE I : L'INSTRUCTION PREPARATOIRE, PREROGATIVE DU JUGE D'INSTRUCTION 32

    A. Les moyens d'information du juge d'instruction 32

    I. Les moyens d'ordre formel 33

    a. Les ordonnances 33

    b. Les mandats 33

    c. Le dossier de l'instruction 34

    II. Les moyens d'ordre matériel 34

    a. Les actes sur la personne 34

    1. Les inculpations, auditions et confrontations 34

    2. La détention provisoire 35

    3. La surveillance judiciaire 36

    b. Les actes sur les biens 36

    B. Les modalités de l'instruction préparatoire 37

    I. Les commissions rogatoires aux autorités de police judiciaire 37

    II. Les commissions rogatoires aux autres juges d'instruction 37

    PARAGRAPHE II : L'APPRECIATION CRITIQUE DE LA PERTE DES POUVOIRS D'INSTRUCTION PAR LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE 38

    A. La résurgence de la séparation des fonctions de poursuite et d'instruction 38

    I. La garantie du droit à un tribunal indépendant et impartial 38

    a. Le droit à un tribunal indépendant 39

    b. Le droit à un tribunal impartial 39

    II. La garantie d'une bonne justice 40

    a. Le frein à la toute puissance du Ministère public 40

    b. Le double degré de l'instruction 40

    B. La relativisation de la séparation des fonctions de poursuite et d'instruction 41

    I. L'arrêt de l'instruction par le Ministère public via le Procureur Général près la Cour d'Appel 42

    II. L'exercice des actes d'instruction en cas de flagrance 43

    CONCLUSION DU CHAPITRE I 44

    CHAPITRE II : LE MINISTERE PUBLIC ET L'EXERCICE DE L'ACTION PUBLIQUE 45

    SECTION I : LE SOUTIEN DE L'ACCUSATION 45

    PARAGRAPHE I : LE DECLENCHEMENT PREALABLE DE L'ACTION PUBLIQUE 45

    A. L'appréciation de l'opportunité des poursuites 46

    I. Les actes préalables à l'appréciation de l'opportunité des poursuites 46

    a. La vérification de l'incrimination des faits 46

    b. La vérification des obstacles aux poursuites 46

    II. Le principe l'opportunité des poursuites 47

    a. Le fondement de l'opportunité des poursuites 47

    b. La subordination hiérarchique comme limite à la liberté du Procureur de la République 48

    B. Le déclenchement des poursuites par d'autres personnes 49

    I. Le déclenchement des poursuites par la partie civile ou victime 49

    a. Les conditions du déclenchement de l'action publique par la partie civile 49

    1. Les conditions générales de déclanchement des poursuites par la partie civile 50

    2. Les conditions particulières aux personnes morales 50

    b. Les modalités du déclenchement de l'action publique par la partie civile 50

    1. La citation directe 50

    2. La plainte avec constitution de partie civile 51

    II. Le déclenchement de l'action publique par certaines administrations 52

    III. Le déclenchement de l'action publique par les juges 53

    a. Le juge d'instruction et la mise en mouvement de l'action publique 53

    b. Le juge de jugement et le déclenchement de l'action publique 53

    PARAGRAPHE II : LE ROLE ACTIF DU MINISTERE PUBLIC AUX AUDIENCES PENALES 54

    A. La passivité relative du Ministère public en cas d'admission de sa culpabilité par la défense 54

    B. La mobilisation du Ministère public en cas de refus de culpabilité par la défense 55

    I. La production et la discussion des preuves par le Ministère public 55

    a. L'accusation, débitrice principale de la preuve 55

    b. La défense, débitrice exceptionnelle de la preuve 56

    II. La confrontation contradictoire des témoins 57

    SECTION II : L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS ET L'EXECUTION DES DECISIONS DE JUSTICE REPRESSIVE PAR LE MINISTERE PUBLIC 58

    PARAGRAPHE 1 : L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS 58

    A. Les voies de recours ordinaires 58

    I. L'opposition 58

    II. L'appel 59

    B. Les voies de recours extraordinaires 60

    I. Le pourvoi en cassation 60

    II. La révision 61

    PARAGRAPHE II : LE MINISTERE PUBLIC, AUTORITE D'EXECUTION DES DECISIONS DE JUSTICE REPRESSIVE 62

    A. L'exécution des peines privatives de liberté 62

    I. Le Ministère public, garant de la paix et de la sécurité publiques 62

    II. L'appréciation critique de l'exécution des peines privatives de liberté 63

    B. L'exécution des condamnations pécuniaires. 64

    I. Le rôle du Ministère public dans le recouvrement des amendes 64

    II. L'exécution forcée des condamnations pécuniaires 65

    CONCLUSION DU CHAPITRE II 66

    CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 68

    DEUXIEME PARTIE : LE MINISTERE PUBLIC, PARTIE JOINTE AU PROCES CIVIL 70

    CHAPITRE I : LE REGIME DES COMMUNICATIONS AU MINISTERE PUBLIC, PARTIE JOINTE 72

    SECTION I : L'INFORMATION DU MINISTERE PUBLIC : LES TYPES DE COMMUNICATION . 72
    PARAGRAPHE I : LA COMMUNICATION IMPERATIVE OU LEGALE 72

    A. La communication légale devant la Cour Suprême 73

    B. La communication dans l'intérêt de la justice et des particuliers 75

    I. La communication dans le but de la protection des intérêts étatiques 75

    a. Les questions relatives à l'état civil 75

    b. Les affaires relatives à la nationalité 76

    II. La communication pour la défense des faibles 76

    a. Les causes relatives à la tutelle, aux incapables et à la puissance paternelle 76

    b. Les causes intéressant les présumés absents 77

    III. La communication dans l'intérêt de la justice 77

    a. Les règlements des juges, les récusations et renvois pour parenté et alliance et les prises à partie 78

    b. La communication des affaires gracieuses 79

    PARAGRAPHE II : LES COMMUNICATIONS JUDICIAIRE ET FACULTATIVE 79

    A. La communication judiciaire 79

    B. La communication facultative 80

    SECTION II : LA PROCEDURE ET L'IMPACT DE LA COMMUNICATION SUR LE PROCES CIVIL 80

    PARAGRAPHE I : LA PROCEDURE DE LA COMMUNICATION 81

    A. Les modalités de la communication 81

    I. L'auteur de la communication 81

    II. Les moyens d'intervention du Ministère public 81

    B. Le cadre d'intervention du Ministère public 81

    I. L'intervention du Ministère public et le principe dispositif 82

    II. L'intervention du parquet et la contradiction 83

    PARAGRAPHE II : LA PREUVE ET LA SANCTION DE L'ABSENCE DE COMMUNICATION 84

    A. La preuve de la communication 84

    B. La sanction du manquement à la formalité de la communication 85

    CONCLUSION DU CHAPITRE I 86

    CHAPITRE II : L'EXTENSION DU ROLE DU MINISTERE PUBLIC DANS LES PROCES CIVILS : LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC PAR VOIE D'ACTION 87

    SECTION I : LE DOMAINE LEGAL DE L'INTERVENTION DU PARQUET PAR VOIE D'ACTION

    87

    PARAGRAPHE I : LES CAS LEGAUX D'INTERVENTION DU PARQUET PAR VOIE D'ACTION DANS LE PROCES CIVIL 87

    A. Le Ministère public, protecteur de la famille 87

    I. Le Ministère public, protecteur des faibles 87

    a. La protection des absents, disparus et personnes placées dans un établissement d'aliénés par le

    Ministère public 88

    b. La protection des incapables par le Ministère public 89

    1. La protection des mineurs 89

    2. La protection des incapables majeurs 91

    II. Le Ministère public, protecteur de l'institution du mariage 91

    B. Les actes d'état civil et la nationalité 92

    I. Le parquet comme partie principale dans le contentieux de la nationalité 92

    II. L'action du parquet en matière d'actes d'état civil 93

    PARAGRAPHE II : LE PARQUET ET LE REDRESSEMENT JUDICIAIRE DES ENTREPRISES 93

    A. L'action en redressement judiciaire par le Ministère public en droit étranger 94

    B. Le silence du législateur camerounais sur l'action du Ministère public en matière de redressement judiciaire

    95

    SECTION II : LA GENERALISATION CONTROVERSEE DE L'ACTION D'OFFICE DU

    PARQUET POUR LA DEFENSE DE L'ORDRE PUBLIC 96

    PARAGRAPHE I : LA CONTROVERSE DOCTRINALE ET JURISPRUDENTIELLE 96

    A. Les thèses de la controverse 96

    B. La position de la jurisprudence 97

    I. L'admission de l'action du Ministère public pour la défense de l'ordre public 97

    II. Les limites à l'action du parquet pour la défense de l'ordre public 98

    a. Les précisions restrictives relatives à l'action d'office du parquet pour la défense de l'ordre public 98

    b. Le domaine restreint de l'action d'office du Ministère public 99

    PARAGRAPHE II : LA NECESSITE D'UNE SOLUTION LEGISLATIVE 99

    A. La solution du législateur français 99

    B. L'indifférence du législateur camerounais 100

    CONCLUSION DU CHAPITRE II 100

    CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 102

    CONCLUSION GENERALE 103

    INDEX ALPHABETIQUE 107

    BIBLIOGRAPHIE : 109

    TABLE DES MATIERES. 112






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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle