L'agriruralité, entre rêves et réalités( Télécharger le fichier original )par Marie-Laure SOULIER Université Lyon II Lumière - Master 2 Aménagement et Développement Rural 2010 |
Ce sont également ces éléments humains qui peuvent être attractifs pour des porteurs de projets. Lors des entretiens réalisés auprès des porteurs de projets agriruraux, nombreux sont ceux qui avouent chercher un territoire qui favorise le lien social, beaucoup recherchent un lieu d'installation où d'autres créateurs d'entreprises sont installés et sont dans une dynamique du partage. L'idée de ces porteurs de projets étant d'ajouter à la dynamique locale leurs compétences et leur envie de faire. Cela peut passer par des formes variées : mise en place d'une activité particulière, création d'un marché local en circuit court, organisation de festivals ou de concert, création d'un atelier théâtre...
De plus, tous les créateurs d'entreprises et tous les porteurs de projets rencontrés souhaitent lier leurs activités à des projets locaux de développement. En dialoguant avec le créateur d'entreprise on se rend bien compte que l'enjeu qui consiste à ouvrir l'exploitation au public par l'agritourisme (ferme pédagogique, vente directe, goûter a la ferme...) voire par des activités culturelles plus larges (concerts de jazz, atelier théâtre, résidence d'artistes...) est importante pour le créateur d'entreprise à deux niveaux : elle permet tout d'abord au créateur de réaliser une activité qu'il affectionne dans des espaces ruraux où les loisirs ne sont pas nombreux : c'est notamment ce que nous a confié J.P. DUSSUPT de la ferme du Phaux24 qui organise avec ses associés des concerts de Jazz par goût et pour créer des loisirs au niveau local, elle permet ensuite au créateur de se faire connaître et de s'intégrer dans la société locale. Le tout permet de créer une dynamique culturelle au niveau local. Si l'on poursuit cette réflexion on se rend compte qu'il ne faut pas négliger ces dynamiques culturelles car bien qu'elles ne produisent pas forcément des richesses au départ elles permettent de faciliter l'intégration des créateurs d'entreprises dans un premier temps. Dans un second temps elles peuvent rendre le territoire attractif. A terme, ces dynamiques peuvent constituer un terreau favorable pour l'établissement sur le territoire d'activités culturelles et sociales génératrices d'emplois et de revenus. Figure 14 : Programmation culturelle organisée par la ferme du Phaux (Noirétable) Source : La ferme du Phaux - 2010 Notons toutefois que ces dynamiques culturelles n'interviennent bien souvent qu'en bout de course, une fois que l'exploitation est structurée autour d'une production agricole qui se tient car il s'agit bien souvent de développer les activités de façon systémique dans le temps. A la suite des entretiens réalisés on se rend compte que l'agriruralité tend vers l'innovation en matière de développement des activités. Bien souvent les agriruraux développent des activités qui ont été oubliées ou abandonnées du fait qu'elles n'étaient plus rentables, ils les redécouvrent et les remettent au goût du jour. 24Voir le relevé d'entretien en annexe 6. Combiner plusieurs activités atypiques ou non, pour un développement systémique de l'exploitation agrirurale dans le tempsPar agriruralité, on pense tout d'abord aux "productions atypiques" par rapport au modèle agricole dominant. Cela peut concerner l'élevage de races anciennes ou la culture de variétés locales. Cela peut également faire référence à des productions « de niche », peu répandues à l'échelle territoriale, régionale ou nationale comme par exemple l'élevage de chèvres angora pour la production de mohair, l'héliciculture, la production de safran et de plantes médicinales, la lombriculture, etc. > L'agriruralité n'est pas synonyme d'atypicité Toutefois, si l'atypicité semble liée au concept d'agriruralité, on constate que dans les faits, très peu d'entreprise classées comme agrirurales ont pour activité agricole principale ces filières atypiques. La plupart des entreprises agrirurales le sont en raison de la mise en place d'un système qui peut également être considérée comme atypique dès lors que les activités mises en oeuvre sortent du cadre de la production spécialisée insérée dans l'économie de filière. Globalement, cela correspond aux pratiques de diversification des productions, des activités, ou à la pluriactivité par les pratiques de valorisation de la production (circuits courts, transformation, agritourisme) et de l'outil de production. Par pratiques de valorisation de l'outil de production, on entend toute activité ayant pour support les facteurs de production (travail, matériel, bâtiments, animaux) mais n'entrant pas dans la fonction de production de denrées alimentaires (accueil, travail en réseau, entraide, travail sur l'histoire régionale à partir de l'élevage de races anciennes,...). On fait également référence à la mise en oeuvre de systèmes intégrés d'affectation des ressources disponibles et des ressources produites peu reconnues (biodynamie, auto construction, autoconsommation, troc). On considérera les pratiques d'autoconsommation et de troc comme atypiques, ces pratiques n'étant pas tant atypiques par rapport à l'agriculture elle-même, mais plutôt par rapport à la société de consommation. > La conception du projet agrirural Il est très intéressant également de voir comment est-ce que les créateurs d'entreprises agrirurales envisagent leur projet entre la première fois où celui-ci a été pensé et sa réalisation. On s'aperçoit lors des entretiens auprès des créateurs d'entreprises, qu'ils ont une vision globale du projet dés son commencement qui est associée à une notion de développement entendu dans le sens d'un progrès. En définitive on se rend compte qu'un projet agrirural partage beaucoup de similitude avec le "développement local". Un projet agrirural parallèlement au développement local suppose d'élargir le champs des possibles afin de rechercher des potentiels exploitables dans le but de créer des dynamiques sur un territoire. Ensuite un projet agrirural, tout comme le développement local, comprend la possibilité d'un changement en direction d'un état final mais aussi une capacité à diriger ce processus vers un but. Enfin, on pourrait presque aller jusqu'à postuler qu'une mobilisation des potentialités et des acteurs endogènes est à même d'orienter, au moins partiellement, les dynamiques socio-économiques. Notons également qu'un projet agrirural peut être envisagé selon un développement systémique de l'exploitation et du projet de vie du créateur dans le temps. Si l'on en croit les créateurs d'entreprises agrirurales rencontrés, on s'aperçoit qu'un projet agrirural se structure toujours autour d'une production agricole qui devient le noyau de l'exploitation ; viennent ensuite s'y greffer d'autres activités, selon les potentiels du territoire, selon les compétences et les envies du créateur, selon le contexte économique mais aussi selon le temps dont dispose le créateur. Figure 15 : Exemple de complémentarité des activités ajoutées à une production agricole Source : Photographies : La Ferme du Phaux - Auteur du schéma : SOULIER ML - aout 2010 En effet, si l'on prend l'exemple de la ferme du Phaux (voir la figure 15), ils ont tout d'abord développé une production agricole de petits fruits ; n'arrivant pas à tout commercialiser avant que les fruits ne pourrissent, ils les ont valorisés et transformés en confitures, sorbets, nectars, ect. Profitant dans les années 1990 d'un immobilier à bas prix, ils ont acheté une vieille bâtisse aux alentours de la ferme et n'ayant pas beaucoup d'activités l'hiver ils ont rénové la bâtisse pour en faire des gîtes, de fil en aguille avec la venue de touristes sur la ferme, une nouvelle activité s'est greffée : les goûters à la ferme. Ainsi l'exploitation fait aujourd'hui système, les activités rajoutées peu à peu sont complémentaires les unes aux autres ; dans ce système la production est optimisée, rien ne se perd tout est valorisé. La boucle est bouclée tant au niveau professionnel que personnel puisque les créateurs ont réinvesti dans ce projet leurs compétences, tout en alliant projet de vie et projet professionnel. La construction d'une activité agrirurale se fait ainsi de façon progressive en saisissant et en réagissant aux instants clés du moment (opportunités ou difficultés) ; elle mêle souvent projet de vie personnel du créateur et projet économique professionnel.
Au regard de ces éléments précités, l'agriruralité apparait comme une opportunité pour les territoires de moyennes montagnes. Tout l'enjeu consiste maintenant à voir quels sont les atouts des Monts du Forez. D. Un territoire rural de moyennes montagnes au coeur du Massif central dont les conditions géographiques, économiques, sociales et sociétales conditionnent la construction d'offres d'activités Situé en interface entre la région Auvergne et la région Rhône-Alpes, les Monts du Forez sont un territoire de moyennes montagnes, dont les conditions géographiques et socio-économiques peuvent conditionner l'attractivité des porteurs de projets et la construction d'offres d'activités. 1. Les caractéristiques physiques d'un espace bien desservi par les réseaux de transports Pour commencer, il convient de remarquer empiriquement que le fait de se situer en moyennes montagnes peut être un atout pour certaines productions, comme la production de petits fruits ou de plantes médicinales par exemple. En effet, le fait de se situer à une altitude plus élevée permet d'une part de disposer d'une diversité florale plus importante, et permet d'autre part : cela autorise d'obtenir des marges financières plus importantes, d'autant que la demande est toujours importante et que l'offre est plus réduite. Les Monts du Forez sont, en effet, deux versants bien distincts en façades est du Massif Central. Marqués par un héritage glaciaire omniprésent ; il y a plus de 2000 ans, au Würm, une calotte de 60 km2 de glace recouvre les hautes chaumes et alimente des langues de glace coulant lentement dans les vallées en contrebas25. La glace modèle le relief ; les parois parfois en auge, les vallées suspendues tombant en cascade et les paysages en cirques témoignent de cette action. Figure 16: Carte du relief dans le périmètre d'intervention de la Maison des Services Source : Google relief - août 2010 Les Monts constituent, ainsi, une barrière naturelle entre la Loire et le Puy-de-Dôme allant du Pilat (au sud) aux Monts de la Madeleine (au nord). Ainsi, comme l'indique Jean-Paul MAZIOUX26, érudit local, Noirétable est devenu un passage obligé pour rejoindre Lyon ou Clermont-Ferrand depuis une ancienne voie romaine comme en atteste la toponymie même du bourg de Noirétable. Noirétable vient, en effet, du vocable : Nigrum Stabulum, donné par des populations qui parlaient latin. Il ne pouvait s'agir que des Romains qui après la conquête des Gaules par César, vers les premiers siècles de notre ère, avaient tracé la route de Lyon - Clermont-Ferrand et avaient établis le relais de "l'Hostellerie Noire", noire pour des voyageurs romains qui venaient des plaines ensoleillées d'Italie et découvraient un pays couvert de noires forêts de sapins. Aujourd'hui bien desservis, les cantons de Boën, Noirétable et St George en Couzan sont traversés d'une part par l'autoroute Saint-Etienne - Clermont-Ferrand (A72) ainsi que par la N 89 et d'autre part par la ligne de chemin de fer Saint-Etienne - Clermont-Ferrand. Ces cantons n'incluent 25 SEMA Forez conservatoire Rhône-Alpes des espaces naturels, Les monts du Forez, guide du patrimoine naturel de la région Rhône-Alpes n°14 26 MAZIOUX J.P., Le pays de Noirétable, essai d'histoire locale, imprimerie Dumas, 151p. pas de grosses agglomération, toutefois ils se trouvent à équidistance de Clermont Ferrand (40 minutes) et de Saint-Étienne (50 minutes). Figure 17 : Carte des voies de communication Source : SOULIER Marie-Laure - août 2010 - MapInfo 7.5 Il convient de remarquer que les sept créateurs d'entreprises rencontrés sont conscients des réalités géographiques et temporelles quant à la desserte des marchés depuis leur lieu de production. Le positionnement géographique des Monts du Forez est pour eux un atout non négligeable car l'accessibilité du territoire leur permet de commercialiser plus facilement leurs produits et leurs services. En effet, le territoire ne souffre pas de l'enclavement ; cependant les contraintes géographiques (escarpement, vallées) accroissent les difficultés de communications internes, en particulier pour le canton de Saint-Georges-en-Couzan. Le relatif éloignement des pôles d'activité économique a valu a ces cantons d'être classés par l'INSEE dans le rural isolé. Notons également que le passage de l'autoroute dans les Monts du Forez favorise non seulement l'accessibilité du territoire pour les producteurs mais elle participe également à faire connaître au grand public (au moins de nom) cet espace. Figure 18 : Photographie yaourts des Monts du Forez Source : www.fermedechapt.fr - Photo : Elise TURLAN & Olivier BREAL Cet aspect représente un autre atout pour les créateurs d'entreprises qui lient leurs produits au territoire et utilisent l'image avec une connotation positive de moyennes montagnes comme stratégie marketing.
Ainsi, le territoire des Monts du Forez a un véritable rôle a jouer dans la création d'activités autant par ses aspects géographiques que par ses aspects sociologiques. 2. Un territoire en transition qui bénéficie d'une image à connotation positive Figure 19 : Carte typologique des campagnes dans la Loire Source : SOULIER Marie-Laure - août 2010 - MapInfo 7.5 Comme l'indique la carte de la typologie des campagnes de la Loire, le périmètre d'étude de la Maison des Services est classé dans le rural en transition. > Les aménités du territoire Les anciens cantons agricoles fortement boisés et parfois escarpés de ce territoire furent affectés par l'exode rural, désormais cette région se tourne vers une économie à la fois plus résidentielle et plus tertiaire. Si l'on en croit cette carte, les Monts du Forez représentent des espaces dans lesquels plusieurs futurs seraient encore possibles, grâce un contexte de densification lié à une attractivité renouvelée du foncier. Les Monts du Forez seraient donc séduisants et favoriseraient l'établissement d'activité rurale. En effet, si l'on en croit les porteurs de projets rencontrés, ainsi que le notaire de Noirétable, le foncier reste très abordable dans les Monts du Forez. Ce facteur explique que de nombreux candidats à l'installation regardent du coté des moyennes montagnes pour s'y établir ; toutefois, le foncier y est également rare et difficile d'accès pour quelqu'un qui n'est pas du milieu agricole. Figure 20 :Les Monts du Forez Figure 21 : La maison Forezienne Source : Photographie personnelle - mai 2010 - Saint George en Couzan Source : Photographie personnelle - mai 2010 Sauvain Les Monts du Forez séduisent également pour leurs paysages vallonnés et leur habitat spécifiques ; la maison avec la galerie Forézienne est typique des Monts du Forez ; autrefois, elle permettait de faire sécher les vivres (haricots...). > ~ qui permettent une inversion des tendances au niveau démographique Au regard de ces éléments, nous ne sommes pas surpris de constater que les cantons de Boën, Noirétable et Saint-Georges-en-Couzan connaissent des évolutions démographiques positives, bien que la densité de population reste faible par rapport au département de la Loire (25 habitant/km2 contre 155 pour le département de la Loire). Tableau 1 : Situations démographiques
Source : INSEE, RGP 1982-2007 En effet, on observe, entre 1982 et 2007, un arrêt de la baisse régulière et continue de la population du canton de Boën depuis le début du xxème siècle. Cette reprise de la croissance s'explique par un solde migratoire positif et en progression depuis 1982. La politique municipale d'amélioration de l'image de la ville (réfection de la place, rénovation de certaines façades...) semble expliquer ce regain d'attractivité. La proximité de la plaine du Forez et de ses pôles économiques, des routes nationales Boën - Feurs et Boën - Montbrison ainsi que le pôle d'activités que constitue la ville de Boën semblent contribuer à ce phénomène. Toutefois, l'évolution démographique est inégale selon les communes : si les communes davantage situées dans les Monts perdent de la population (soldes naturels et migratoires négatifs), les communes situées le long des axes routiers ou bien à proximité des villes de Montbrison et de Feurs ont tendance à accroître leur population. Concernant l'arrivée de nouvelles populations, on peut distinguer notamment : - Une population pratiquant des migrations journalières en direction des pôles d'emploi de la plaine du Forez vers Saint-Etienne, Saint-Galmier, Montbrison, Saint-Just-Saint-Rambert... (phénomène de périurbanisation). - Un public en difficulté, socialement et professionnellement, posant les questions de son intégration locale. Concernant le canton de Noirétable, la baisse régulière et continue du depuis 1901 se ralentit. Cela est lié au solde migratoire, devenu positif sur la période 1990-2007, mais qui ne suffit pas à compenser l'effet d'un solde naturel négatif . Ce schéma s'observe sur la quasi-totalité des communes du canton. Le canton de Noirétable accueille des habitants, par exemple sur les 26 % de la population recensés dans le canton en 1999 qui n'habitaient pas la même commune en 1990, 47 % provenaient d'un département différent. La proximité du Puy-de-Dôme participe à l'explication de ce phénomène. Cette attractivité du canton de Noirétable concerne notamment : - Des couples de retraités, dont au moins une des deux personnes est native de la région. Il s'agit de personnes relativement aisées constituant un vivier de compétences éventuellement mobilisables. - Un public en difficulté. D'ores et déjà une dizaine de familles, en provenance du Puy-de- Dôme (Clermont-Ferrand) qui nécessite une action d'ordre social, bénéficient de mesures d'accompagnement. Quant-au canton de Saint-Georges-en-Couzan, la
démographie semble se stabiliser entre 1999 et 1911. Le faible développement tertiaire de ce canton et la baisse des emplois agricoles expliquent cette évolution toutefois le canton attire des touristes du fait du domaine skiable de Chalmazel et des villages médiévaux. Cependant, bien que l'on note un regain démographique dans les Monts du Forez, on constate également que la population est vieillissante. Conformément à ce qui se passe dans le département de la Loire et dans l'arrondissement de Montbrison, la proportion des plus de 60 ans dans la population totale augmente et figure parmi les plus élevés du département. Parallèlement, la part des moins de 20 ans ne cesse de diminuer depuis 1982, du fait de la baisse des naissances dans ces cantons. Ces évolutions expliquent le déficit du solde naturel rencontré dans de nombreuses communes. Les montagnes ont toujours présenté des particularités économiques et démographiques en raison des caractéristiques naturelles ; les évolutions importantes qu'elles ont connues ces dernières décennies n'ont pas effacé ces originalités. En passant d'une économie agro-pastorale à une économie touristique, les Monts du Forez sont devenus attractifs ; les activités et les systèmes d'emplois demeurent toutefois marqués par la prédominance de petites entreprises et par la pluriactivité. Cette réalité économique et sociale s'écarte plus ou moins fortement des grands schémas d'analyse utilisés pour l'ensemble de l'économie nationale, d'autant plus que nous sommes en présence d'un espace rural en transition où le secteur primaire est encore très présent. 3. Une économie Forezienne où le secteur agricole est encore très présent Comme le rappelle J. PERRET27, il faut remarquer que l'économie de montagne, a toujours été plus ou moins confondue avec l'économie agricole, le recensement agricole restant l'outil de référence pour connaître la vitalité rurale. > L'élevage : un système dominant dans les monts du Forez Les Monts du Forez restent un territoire marqué par l'agriculture. En effet, les 776 exploitations recensées en 2000 représentent encore 15% des emplois de ces cantons (866 emplois), malgré une forte chute de leur nombre (- 350 entre 1988 et 2000) due aux crises, à la faiblesse des installations et à la forte concurrence des exploitations pour les terres laissées libres. Toutefois, les départs à la pré-retraite et les fortes incitations à l'installations des jeunes dans le département de la Loire, dés 1992, ont été à l'origine d'un rajeunissement de la population agricole dans les années 2000. Ainsi, selon de recensement général agricole de 2000, la part des plus de 55 ans avait reculé de 41 à 28% des agriculteurs et celle des moins de 40 ans était passée de 25% à 29% ce qui situé le Forez au dessus de la moyenne nationale située à 25%. La profession agricole est particulièrement organisée dans les Monts du Forez. Impliqués dans la vie locale, les agriculteurs sont représentés dans les travaux de réflexion sur les documents d'urbanisme et les projets d'aménagement.
27 Sous la direction de MATHIEU N., L'emploi rural, une vitalité cachée, L'Hermattan, Paris, 1995, 186p. De nombreuses structures rapprochent les producteurs et facilitent les installations agricoles : les groupements, Coopérative d'Utilisation de Matériel Agricole (CUMA), comités de développement agricole animés par les techniciens de la Chambre d'Agriculture, réseau accueil à la ferme (association "Bienvenue à la ferme" et "accueil paysans"), réseau de fermes écoles et fermes pédagogiques (association Sildéa). En revanche, la concertation sur la mise en marché des produits semble encore peu développée. Les Cuma ont fait la preuve que, même si la mécanisation parait nécessaire au développement économique des exploitations, elle n'est pas toujours nécessaire en possession individuelle. Les Cuma permettent d'utiliser en commun un matériel spécialisé et polyvalent a moindre frais. Mais comprendre le mouvement Cuma par la simple réduction des charges est extrêmement réducteur. Elles permettent également de fidéliser une main d'oeuvre compétente. Les Cuma offrent enfin une certaine forme de sociabilité : elles constituent un groupe où les agriculteurs peuvent se rencontrer, discuter, échanger leurs points de vue... La formule Cuma a connu un véritable succès qui s'explique par l'héritage de la JAC, la volonté de se moderniser, le dynamisme de certains hommes... Mais la Cuma n'est pas une panacée. Pour la croissance du nombre de Cuma, le développement de certaines activités de la fédération départementale va être capital, particulièrement en ce qui concerne l'animation et l'appui au groupe, les services de comptabilité des Cuma, et la création de nouvelles activités. Elle apporte des services et appuie les Cuma au quotidien. Le réseau a développé en son sein depuis le début de véritables réseaux techniques qui aident les agriculteurs dans la modernisation et la mécanisation de leur exploitation. Ces réseaux techniques se sont développés parce que la formule Cuma est mobilisée par les agriculteurs lorsque leur projet nécessite l'acquisition d'équipements spécifique mais aussi parce que les responsables fédératifs ont affiché dès le début leur intention de participer a la mise en place d'une véritable coopération au sein du mouvement. Le réseau joue un rôle d'éducation populaire, ce qui explique la capacité des Cuma a s'engager dans des actions innovantes (motorisation, ensilage, environnement...). A partir d'un champ relativement limité, celui du machinisme, le mouvement s'est constitué comme une organisation avec des valeurs politiques et sociales. Les Cuma posent avec acuité et précocité quelques-unes des questions essentielles de la société (productivité, environnement...). Mémoire M2 recherche par Solen Billon : DEVELOPPEMENT D'UN MOUVEMENT COOPERATIF POUR AFFRONTER LA MODERNISATION AGRICOLE : De la Cuma a la fédération départementale d'Ille et Vilaine (1945-1970) Les Monts du Forez apparaissent également comme un territoire herbagé dominé par l'élevage bovin lait ou viande. 86% de la SAU est constituée d'espace herbagé. Pays herbagé le Forez est d'abord tourné vers l'élevage bovin avec une dominante lait qui a tendance à diminuer au profit de la viande. La nombre de vaches allaitantes progresse fortement entre 1988 et 2000, les éleveurs laitier utilisant le bourse d'échange pour convertir leurs quotas lait en Primes Vaches Allaitantes (PMTVA) ; aujourd'hui les choses se calment car il est plus difficile d'obtenir des PMTVA sur le département de la Loire. A noter également : la valorisation du lait avec l'AOC Fourme de Montbison sur les cantons de Montbrison, Saint-Georges-en Couzan et Noirétable. Figure 22 : Carte des productions agricoles en Rhône-Alpes Source : Agreste, RGA 2000 En effet, deux Appellations d'Origines Contrôlées (AOC) sont présentes sur le territoire : La Fourme de Montbrison et le vignoble des Côtes du Forez qui doit son développement à l'action de la cave des Vigneron Forezien en 1961. Elles apparaissent toutefois peu dynamiques du fait d'une promotion insuffisante et d'une commercialisation limitée en dehors du Forez. Marqués par des systèmes bovins dominants, les autres systèmes de productions se développent peu, si ce n'est la production équine (le Forez est la deuxième région de France pour l'élevage de chevaux de trot) et la production de volaille ; particulièrement importante sur Boën et Feurs, elle se diversifie pour s'orienter vers le poulet de chair, les dindes et les canards. Parallèlement à l'agriculture, le territoire dispose d'entreprises motrices héritées d'une tradition industrielle. > Les autres secteurs économiques du territoire La métallurgie et le travail des métaux dans la mouvance de Saint-Etienne et de la coutellerie thiernoise ont structuré l'emploi et l'activité de ces cantons. Ces secteurs ont été durement touchés par la crise économique provoquant des licenciements, des fermetures, une réorganisation des activités (processus d'externalisation...) et une baisse de la population. Aujourd'hui, l'industrie représente 1 560 emplois soit 27 % des emplois du territoire. Notons également une progression du secteur tertiaire. Il représente la moitié des emplois de ces cantons (2 775 emplois). Ces emplois se trouvent principalement dans l'éducation, la santé, l'action sociale, l'administration et les services aux particuliers. Le tourisme et la filière bois représentent deux activités à fort potentiel pour le territoire. Ces deux activités semblent offrir des perspectives de création d'activités importantes, liées au patrimoine naturel et culturel du territoire. De plus, un tissu artisanal et commercial dynamique est en renouvellement sur le territoire . En 1997, 773 entreprises artisanales et commerciales y étaient implantées dans ce territoire. Elles composent la majorité du tissu économique local. En effet, 90% des entreprises28 ont moins de 10 salariés. Ces entreprises sont principalement concentrées dans les bourg-centres. L'activité artisanale reste dynamique malgré des difficultés de reprise des entreprises et de recrutement. La dynamique commerciale est a nuancer selon le type d'activité et les cantons. De nombreux commerces ont disparu dans l'alimentation générale, les bureaux de tabac, les boulangeriespâtisseries, les boucheries-charcuteries. Toutefois, les multiples crises sociétales auxquelles nous sommes confrontés pourraient peut être favoriser le renouveau démographique ainsi que le maintien et le développement de l'activité commerciale. E. Les crises envisagées comme des éléments moteurs pour les espaces ruraux fragiles? Les diverses crises que traverse notre société sont sources d'interrogation sur nos méthodes de production mais aussi sur nos façons de consommer. Toute la question est de savoir si ces crises peuvent elles ou non influencer la création d'activités nouvelles sur les territoires en réaction à ce que nous vivons. 1. Une société Française marquée par des crises agricoles, sanitaires, économiques et sociales A l'heure où la société attache de plus en plus d'importance à la production ainsi qu'à la commercialisation des productions agricoles, il semble important de revenir sur les crises traversées par le monde agricole. > Des crises agricoles et sanitaires... Depuis trente-cinq ans, les agriculteurs doivent se battre pour valoriser au maximum les productions afin de compenser la baisse des cours. C'est une course permanente à la productivité, à la spécialisation, à la modernisation et aux rendements. Les orientations régionales traduisent un équilibre fragile et sans cesse recomposé entre la taille des exploitations, le choix des produits et le niveau des prix. Jusqu'en 1985, ces équilibres ont été maintenus dans l'ensemble grâce à l'expansion des marchés et au rôle des financements communautaires. Depuis cette date, la Politique Agricole Commune (PAC) est dans l'impasse, l'agriculture Française est en première ligne de cette affaire. Tout commence avec le lait qui est alors le meilleur moyen de valoriser la production de la petite exploitation, fut le premier à connaître le régime des quotas en 1984 ; les rendements des vaches laitières ont fait des progrès énormes, le marché communautaire est saturé et sans possibilité d'exportation. L'agriculture se trouve depuis placée au coeur des débats de société. Le productivisme a atteint ses limites. Les réformes de la PAC témoignent surtout de l'impasse globale dans laquelle elle s'est enferrée et ce dans le domaine économique, social et écologique. De ce dernier point de vue, la situation est paradoxale puisque l'agriculteur est à la fois le gardien du terroir, dans le même temps on l'incite à polluer pour produire plus. Plus généralement, les logiques du marché imposent la recherche d'une rentabilité par la quantité. Ce sont ces éléments qui font que le monde agricole est parfois montré du doigt par la société. De plus, la situation sociale du monde agricole est affectée d'une précarité croissante. En attendant une réforme fondamentale de la PAC, les subventions européennes et nationales continuent d'aller aux exploitations les plus "productivistes", au 28 Entreprises cotisant aux Assedic en 1999 détriment des exploitations familiales, petites ou moyennes qui cherchent la qualité car c'est pour elles le seul moyen de tirer leur épingle du jeu. Dans le même temps, l'agriculture est frappée par diverses crises sanitaires qui vont vers une remise en cause du modèle. La crise de la vache folle a commencé en 1995 au Royaume-Uni par l'apparition de dix cas de la maladie de Creuztfeld-Jacob atypique, transmise a l'homme par la viande bovine. En 1998, les recherches montrent que ce sont les farines animales insuffisamment chauffées qui sont le vecteur de la maladie qui se transmet par le prion. La crise de la vache folle s'est immédiatement répercutée sur la consommation de la viande bovine. La consommation s'est reportée sur la viande ovine, les volailles, le poisson. Au printemps 2001, l'épidémie de fièvre aphteuse a fait chuter la consommation de viande ovine. Les prix a la production ont baissé, entrainant une rétention du cheptel qui devait être commercialisé. Paradoxalement, les prix a la consommation se sont élevés, la demande se reportant sur les viandes de qualité supérieure et sur le bétail offrant toutes les garanties de traçabilité. De nombreux éleveurs ont fait les frais de cette crise. Ces crises sanitaires a répétition et le débat sur les organismes génétiquement modifiés (OGM), ont abouti a la mise en cause du modèle productiviste agricole et contribué a nourrir les réflexions sur le développement d'une agriculture durable, respectueuse de l'environnement, des paysages et des sociétés. La demande en produits issus de "l'agriculture biologique" a augmenté rapidement. > A la recherche d'une alimentation saine Le retour a la terre et les produits provenant directement de la ferme constituent une nouvelle tendance dans le domaine de l'agroalimentaire. Que l'on soit en France ou en Amérique du Nord29 le consommateur demande de plus en plus une agriculture alternative, a taille humaine. En effet, on assiste a un engouement sans précédent pour les aliments biologiques : aux États-Unis ; selon une enquête de ZINS BEAUCHESNE et associés, effectuée auprès de 600 consommateurs québécois, 84,6% d'entre eux achètent au moins occasionnellement des produits biologiques, et environ un cinquième des ménages prévoient d'augmenter leur consommation de produits biologiques au cours des prochains mois. Les consommateurs développent une curiosité accrue au sujet de la provenance et des méthodes de fabrication des produits. Le vieillissement de la population, l'augmentation du niveau de scolarité, une plus grande diffusion de l'information, l'accroissement du taux d'obésité chez les jeunes, les reportages a sensation (p. ex. : «Pièces a conviction sur France 3»), le phénomène de "malbouffe" ainsi que les scandales liés a la sécurité et a la salubrité des aliments ont largement contribué a cette tendance qui progresse dans la société vers la recherche d'une alimentation plus saine. Par ailleurs, le mouvement croissant du «slow food» (par opposition au «fast food» et a la production de masse industrielle) a contribué a promouvoir les produits frais et locaux, les productions artisanales, l'agriculture durable et le plaisir de cuisiner et de prendre son temps pour manger. Ce courant ne peut qu'être bénéfique aux tendances agricoles qui souhaitent se dégager des modèles dominants. Les consommateurs sont de plus en plus conscients du rôle majeur d'une alimentation saine dans l'amélioration de leur santé et celle de leur famille. Dans cette optique, ils ont de plus en plus tendance a se méfier des produits de masse, a rechercher davantage les produits "santé", frais et de meilleure qualité. Dans un tel contexte, l'agriruralité a travers l'agrotourisme peut saisir cette 29 Mémoire Master 1 géographie et aménagement par Marie-Laure SOULIER, La valorisation des productions agricoles locales, les circuits courts de distribution et le développement de l'offre agrotouristique dans la région Centre-duQuébec , 2009 opportunité pour se positionner comme une alternative crédible qui pourrait répondre aux besoins et attentes des consommateurs. Paradoxalement, le phénomène de mondialisation qui s'est intensifié au cours des dernières décennies et la consommation de masse qui en a découlé, ont contribué a accentuer l'intérêt des consommateurs envers les produits plus authentiques, spécialisés et personnalisés : les produits régionaux et du terroir qui impliquent le travail d'un artisan (ou artisan-producteur) répondent à des besoins d'authenticité, de tradition, de qualité, de spécificité et de provenance. Notons également que les porteurs de projets agriruraux actuels sont des consommateurs et des citoyens qui sont sensibilisés à ces questions. Nombre d'entre eux, sont grandement motivés pour s'installer sur une exploitation qui combine des activités respectant des pratiques durables. Ainsi, les candidats à l'installation sont bien conscient qu'ils devront utiliser les ressources locales, les protéger et les utiliser afin de tendre vers des productions de qualité et qu'ils devront utiliser d'autres canaux de commercialisation s'ils souhaitent réussir. L'économie des ressources est une composante importante de l'agriruralité. L'agriruralité est bien souvent synonyme d'agriculture biologique, d'agriculture biodynamique, d'agriculture intégrée, d'agriculture à bas niveau d'intrants, ect. Si l'on cherche encore à obtenir une production maximale par unité de surface, l'agriruralité rime avec réduction des impacts négatifs pour l'environnement. La mise en valeur du territoire est un des rôles des activités agrirurales, elle est une nécessité pour la conservation du patrimoine et des ressources locales. La valorisation des ressources locales, par l'utilisation de sources d'énergies disponibles sur place, ou la culture et/ou l'élevage de variétés et races anciennes permet non seulement de valoriser les ressources disponibles au niveau local, mais également de les conserver pour les transmettre aux générations futures. Il s'agit d'éviter l'abandon de territoires menacés par l'enfrichement, de permettre que les paysages restent diversifiés et de sauvegarder les milieux favorables à une faune et à une flore sauvage dont la survie dépend du maintien de l'activité humaine. De même, la mise en place de pratiques de valorisation de l'environnement, la restauration de savoir-faire anciens, ou la réhabilitation d'un patrimoine local (au travers de l'agrotourisme par exemple) peuvent présenter des atouts non négligeables pour le territoire d'installation, et permettre d'établir des partenariats avec d'autres acteurs locaux. Les pouvoirs publics semblent se préoccuper de la gestion et de l'utilisation du territoire puisque le loi du 4 février 1994 sur l'aménagement du territoire prévoit la "protection des écosystèmes, des zones humides, la restauration des réseaux de haies pour améliorer l'insertion paysagère des bâtiments agricoles, la prévention contre les incendies, l'entretien des zones naturelles d'expansion des crues de rivières". L'agriruralité a peut être un rôle a jouer dans la participation à ce que l'on pourrait appeler la création d'une richesse collective, elle pourrait être à ce titre rétribuée par la puissance publique ou le consommateur. C'est l'idée que développe au Kyrgyzstan, dans les montagnes qui dominent le lac Issyk-Kul, le Centre Environnemental Régional pour l'Asie Centrale en Franssouski. Il s'agit d'un projet de protection d'un bassin versant et de gestion durable des milieux agricoles qui démarre actuellement. Il s'agit de mettre en place une méthode pour gérer le bassin versant en implantant un système de paiement pour services environnementaux. L'idée part du principe que les agriculteurs et les forestiers, en ayant une utilisation raisonnable du sol dans les zones d'amont du bassin versant, produisent des services dont vont bénéficier les populations d'aval : eau de bonne qualité, diminution de l'érosion, ressource en eau plus stable pour l'irrigation. Il s'agit ainsi de lutter contre les problèmes de surpâturage et de surexploitation de la forêt en amont en créant un contrat qui va lier les populations d'amont et d'aval : celles d'aval fournissent une rémunération a celles d'amont, qui changent leurs pratiques pour en adopter de nouvelles plus soutenables, et ainsi d'alimenter de nouveaux services environnementaux. L'agriruralité s'inscrit ainsi dans la transformation de l'espace agricole en espace rural ; cette tendance s'inscrit dans la continuité des concepts de la multifonctionnalité, de la pluriactivité et de la diversification. 2. La figure agricole de moins en moins présente dans les espaces ruraux B. KAYSER30 montre que s'il est vrai que les agriculteurs sont devenus minoritaires dans les campagnes, cela n'empêche aucunement le maintien de formes renouvelées de la ruralité qui s'expriment sous "la forme d'un rapport de la société à l'espace". Avec la monté de l'individualisme dans la société Française et la diminution du nombre d'agriculteur dans les campagnes, la figure agricole s'est effacée ; elle a été diluées. Des concepts clés pour le développement agricole actuel ont été développés et introduits dans la PAC dans les années 1990. Les concepts de multifonctionnalité, de diversification et de pluriactivité sont utiles à la compréhension de l'émergence des exploitations agrirurales car l'agriruralité est la résultante de ces concepts. > La multifonctionnalitéLa notion de multifonctionnalité de l'agriculture est apparue au sein des textes français dans la Loi d'Orientation Agricole de 1999. Elle prend en compte le fait que les activités mises en oeuvre dans un système d'activités agricoles ont un impact sur le tissu économique et social rural ainsi que sur l'environnement. La multifonctionnalité de l'agriculture fait appel aux rôles multiples que l'activité agricole peut jouer en milieu rural ou péri-urbain. Les dernières versions de la PAC accordent de plus en plus d'importance à la notion de multifonctionnalité, dans le but que se développe une agriculture qui soit créatrice d'aménités rurales31, et qui participe au maintien ou à la création d'un tissu social et économique indispensable à la survie des zones rurales. Ce concept se pose en opposition à la fonction essentielle de production qui a été l'axe du développement agricole depuis la 2ème Guerre Mondiale. D'une manière plus générale, les conséquences d'un tel schéma ont été la structuration de la profession, la spécialisation des exploitations, l'artificialisation des milieux, causant parfois des dégâts environnementaux, et une insertion sociale des agriculteurs qui ne se fait plus localement dans le voisinage, mais dans la profession qui devient la communauté de référence.32 La mise en avant de la multifonctionnalité, qui s'est réalisée notamment en réponse à une demande sociale au niveau européen, permet de prendre en compte les impacts que peut avoir l'activité agricole sur le territoire par la production de biens et services, marchands ou non marchands, économiques, sociaux, environnementaux ou culturels. > La diversification L'idée de multifonctionnalité appelle directement l'idée de diversification des systèmes agricoles. La diversification peut être appréhendée sous deux angles différents. Cela peut correspondre d'abord à la diversification des cultures, qui peut avoir des avantages environnementaux par la pratique de rotations permettant une utilisation moindre d'intrants, et par la diversification des milieux. Cela peut correspondre également à la diversification des ateliers, et à l'intégration d'activités de valorisation de la production (vente directe), de l'outil de production (ferme pédagogique), ou du territoire (agrotourisme). Dans ce second cas, un système diversifié met en avant la multifonctionnalité de l'agriculture grâce à la prise en main de l'impact qu'il peut avoir sur l'environnement économique, social et naturel local. 30 KAYSER B., la renaissance rurale, Armand Colin, 1990 31 Les aménités rurales, dans ce cas, sont des conséquences secondaires de l'activité agricole qui ont un effet positif sur l'environnement naturel et socio-économique (exemple : maintien d'un paysage bocager) 32 MÜLLER, P., 1991 > La pluriactivitéLa notion de diversification est souvent proche de celle de pluriactivité, tant dans les esprits que dans les textes. En effet, il est parfois difficile de savoir si les personnes qui travaillent sur un système diversifié sont pluriactifs ou monoactifs, car leur système est souvent basé sur la mise en oeuvre d'activités relevant de plusieurs métiers différents (par exemple maraîchage, vente directe et accueil pédagogique). Par rapport aux deux concepts précédents, l'idée de pluriactivité est plus en relation avec le statut fiscal et social des exploitants, ainsi qu'avec la constitution du revenu des ménages agricoles (voir tableau 3). Depuis les années 60, les revenus des ménages agricoles intègrent une part de plus en plus importante de Revenu Non Agricole (RNA)33 : on parlera alors de personne ou de ménage pluriactif. Malheureusement, il n'existe pas de définition statistique ou officielle du RNA. Globalement, on peut dire qu'il correspond aux revenus perçus d'activités extérieures à l'exploitation (par l'exploitant principal ou son conjoint), de diverses prestations sociales accordée au ménage, et d'activités para agricoles (entreprise de travaux agricoles, entretien de chemins communaux, accueil) soumises à des régimes d'imposition différents de celui du bénéfice agricole34. C'est depuis les années 80 que les lois d'orientation agricole commencent à évoquer les effets bénéfiques de la pluriactivité pour le maintien d'un tissu économique et social rural. La création des EARL35 et l'extension en 1988 de la définition juridique de l'activité agricole36 va dans le sens d'un développement de ce type d'activités. De même, les dernières versions de la PAC qui vont dans le sens du soutien à la multifonctionnalité et a la pluriactivité en tant que travail a l'extérieur de la ferme (entretien de chemins, ...) avec notamment le découplage des aides par rapport a la production afin de favoriser la production de biens collectifs. Cependant il serait faux d'affirmer que la pluriactivité est une tendance « nouvelle » de l'agriculture : la pluriactivité n'était pas rare dans les fermes du XIXèmè siècle où les acteurs du « collectif » (les exploitations regroupant souvent au delà du cercle familial) étaient amenés à pratiquer diverses activités pour la pérennisation du système37. Avec la vague de modernisation et de mécanisation de l'agriculture, la pluriactivité a beaucoup diminué chez les agriculteurs. Toutefois comme le précise A. Simon38, les montagnes Françaises représentent un cadre privilégié pour le développement des pratiques pluriactives, la saisonnalité permettant aux agriculteurs d'occuper leurs temps morts par un autre emploi. Aujourd'hui, la profession agricole n'est pas forcément en accord avec cette vision de l'agriculture : les pluriactifs sont parfois vus comme "inaptes à répondre aux critères d'excellence technique caractérisant une agriculture moderne", ou exerçant "un cumul inacceptable de revenus qui spolie les "vrais" agriculteurs du foncier agricole dont ils ont besoin et du bénéfice des mesures de soutien à l'agriculture" 39. Les pluriactifs rencontrent alors des difficultés à s'installer et à exercer leurs activités : ils ne bénéficient pas de reconnaissance professionnelle, ni de de statut adapté à leurs activités. C'est ce problème de reconnaissance par la profession, ainsi que le fait que ces 33 BRANGEON ; JEGOUZO, 1992 34 Sont soumises au régime du bénéfice agricole les activités entrant dans le cadre de la définition de la loi 88- 1202 du 30- 12-88, ou les activités n'entrant pas dans cette définition représentant moins de 30% du chiffre d'affaires total, et moins de 50000€. 35 Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée, statut de société permettant de séparer le patrimoine familial de celui de l'entreprise atypique. On parlera d'exploitations professionnelles avec l'idée qu'une exploitation dite « classique » remplit uniquement la fonction de production et valorise sa production au travers de filières longues uniquement. 36 op. cit Loi 88-1202 du 30-12-88, code rural 37 JL Mayaud, 2007 38 SIMON A. La pluriactivité dans l'agriculture des montagnes françaises,Presse universitaires Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, 2002, 515p. 39 LAURENT, C. ; MOURIAUX, M.-F., 1999, p.193 systèmes soient basés sur la mise en oeuvre d'activités diverses nées en opposition au modèle dominant que représente une agriculture spécialisée qui fait que l'on parle aujourd'hui d'activités atypiques. En un sens, la définition même de la production agricole présente deux aspects contradictoires : d'un coté, la production de masse des céréales, du lait, et d'autres denrées, etc. nécessite beaucoup d'énergie et subit beaucoup de transformation pour être livrée au consommateur. D'un autre coté, l'agriculteur vend ses légumes, ses oeufs, ses volailles en vente directe. Un pas de plus est franchi lorsque l'exploitant ajoute à cela une activité agrotouristique. La boucle est bouclée lorsque les agriruraux élèvent des chèvres, fabriquent du fromage, le vendent au marché, accueillent sur la ferme des touristes, tout en exerçant durant les temps libres quelques petits métiers de bricolage ou d'affouage. Les équilibres entre ces structures sont différents selon la production agricole, l'autoconsommation et les revenus monétaires. Ces activités permettent en réalité à de très nombreux ménages de mieux vivre, de rester à la campagne, de construire eux-mêmes leur maison et de ne pas grossir le nombre de chômeurs. A travers les entretiens menés, on remarque également que ces activités apparaissent comme une opportunité aux yeux des personnes qui ont perdu leur emploi en ville et qui victimes de la crise économique que nous traversons, souhaitent s'établir en milieu rural afin de vivre et avoir un statut dans la société.
L'agriruralité s'inscrit dans ce lent processus de remise en question de l'agriculture conventionnelle avec ses systèmes bovins dominants ; elle s'inscrit également dans l'évolution des mentalités dans les campagnes. 3. De l'évolution des mentalités dans les campagnes vers l'agriruralité La mutation de l'agriculture ne peut pas être isolée des autres mutations de la société Française. > De la citadinisation des campagnes... Dans le dernier demi-siècle, le mode de vie urbain, quelqu'en soient les formes s'est imposé partout jusque dans le rural profond. On assiste aujourd'hui a une citadinisation de l'espace rural40. L'étalement périurbain s'étend de plus en plus loin, si bien que les cantons de Boën, Noirétable et 40 BODIGUEL M., Le rural en question, L'Harmattan, Paris, 1986 Saint-Georges-en-Couzan, classés dans le rural en transition, apparaissent dans la troisième couronne de Saint Etienne et Clermont-Ferrand et regagnent au cours des dernières décennies progressivement des habitants : dans les années 1980 pour la canton de Boën ; dans les années 1990 pour celui de Noirétable, alors que la tendance commence seulement à s'inverser pour le canton de St George-en-Couzan comme nous l'avons déjà noté. Cette tendance s'explique par trois facteurs : d'une part l'utilisation de la voiture dans les déplacements quotidiens de liaisons entre le domicile et le travail ; d'autre part, le moindre coût du logement en fonction de l'éloignement des centres-villes ; il s'y ajoute pour certains, la recherche d'une "qualité de vie", d'autant plus que l'on peut aujourd'hui jouir à la campagne des mêmes avantages qu'en ville. Cette remarque peut sembler banale, elle est pourtant un élément essentiel de la ruralité car par la modernisation des équipements et des modes de vie (eau courante, électricité, utilisation des énergies vertes, nouvelles technologies de l'information et des communication -NTIC), les campagnes ont bénéficié d'un regain d'intérêt. La "conquête" de l'espace rural par le tourisme est également un élément qui doit être pris en compte dans notre analyse. Le développement des résidences secondaires est un des aspects les plus sensibles de ce mouvement de récupération par les citadins, de l'espace rural, qui prend luimême différentes formes. Les citadins se rendent possesseurs de l'habitat rural abandonné par les exploitants qui en agrandissant leurs exploitations, construisent des stabulations et abandonnent le bâti ancien, vétuste et signe d'un passé dont ils ont honte. On assiste alors à un changement de fonction de l'architecture rurale. Le cadre bâti reste à peu près le même mais son usage est tout autre puisqu'il est transformé en maisons de vacances ou de retraite par les utilisateurs. La résidence secondaire devient un moyen de préservation du paysage, puisqu'elle contribue à la conservation de bâtiments qui tomberaient en ruine s'ils étaient laissés à l'abandon. Sur le périmètre d'intervention de la Maison des Services, seul le canton de Saint-Georgesen-Couzan, connait une proportion de résidences secondaires en augmentation. En revanche, dans ceux de Boën et de Noirétable, la proportion de résidences principales augmente, même si elle reste inférieure à la moyenne départementale. Tableau 2 : Résidences secondaires et logements occasionnels sur le périmètre d'intervention
Sources : Insee, RP1968 à 1990 dénombrements - RP1999 et RP2007 exploitations principales En fait, dans les trois cantons, la part des résidences secondaires est supérieure à la moyenne départementale ; ils sont attractifs (paysage, cadre de vie) pour des résidents secondaires. Il y a la marque du "tourisme vert" qui exprime le besoin des citadins de retrouver les origines rurales familiales. Outre que ce tourisme est moins onéreux que sous ses autres formes. D'une façon générale, l'extension du tourisme rural a entrainé la hausse du prix des terres agricoles. Ces répercussions économiques ont rendu nécessaire l'établissement de règles d'urbanisme. Tel fut l'un des objets de la Loi d'orientation foncière de 1969 qui fait obligation aux communes rurales d'établir un plan d'occupation des sols (POS) spécifiant les zones susceptibles d'être loties et les zones agricoles qu'il s'agit de protéger ; depuis 2001 le plan local d'urbanisme (PLU) remplace le POS. > A la recomposition des pratiques et des activités Cette population urbaine ou d'anciens "néoruraux" amalgamée à l'ancienne population rurale, fait de l'espace rural un lieu de résidence et un lieu d'activité qui doit assumer ses héritages. Une société rurale se constitue, qui n'est plus une société paysanne et qui modèle l'espace à son image. Au regard des entretiens menés et des lectures41 faites sur le sujet on se rend compte que généralement, les jeunes issus du milieu urbain connaissent le milieu rural par des séjours de vacances (tourisme vert, vacances au ski), ils retiennent de ce cadre la qualité de vie et la possibilité d'emploi plus facile qu'en ville, d'autres sont issus du monde rural mais pas forcément du monde agricole. Ils reviennent généralement une fois que la structure familiale est créée, ils ont des enfants et souhaitent concrétiser un projet qui leur tient a coeur depuis longtemps. C'est ce que nous explique un couple de porteurs de projets :
Etablis sur le territoire, ils ont des réseaux de connaissance, de patrimoine et de formation qui leur permettent de s'intégrer. Ils cherchent donc à se rendre indépendant en créant leur propre emploi ; ils recourent à un minimum d'investissement de départ, en utilisant un éventuel petit pécule mis de coté durant leur emploi salarié, et surtout ils utilisent leurs formations initiales ou leurs expériences professionnelles comme force d'adaptation. Ils suivent une formation spécialisée en agriculture pour en retirer les dotations jeunes agriculteurs (DJA), mais aussi pour apprendre les rudiments du métier d'agriculteur et de cette façon être reconnus par la société rurale. Ils savent que les premières années seront difficiles et que la rentabilité de leur affaire ne sera pas tout de suite au rendez-vous. Deux jeunes femmes porteuses de projets nous expliquent cela : 41 MATHIEU N., l'emploi rural une vitalité cachée, L'Harmattan, Paris, 1995, 185p. - KAYSER B., BRUN A., CAVAILHES J., LACOMBE P., Pour une ruralité choisie, Datar, édition de l'aube, Paris, 1994, 139p.
La survie sera souvent assurée grâce au salaire du conjoint. S'ils maintiennent plusieurs activités, ce sera dans des professions qui valorisent au mieux les formations initiales et qui s'articulent avec le projet global, en vue d'arriver à un développement faisant système au niveau de l'exploitation, comme nous l'avons vu plus haut. Si l'affaire réussit et devient ancienne, ils ne seront pas pour autant reconnus comme étant d'ici, ils seront toujours des étrangers. En revanche ils peuvent devenir des exemples de réussite et être perçus comme des éléments dynamiques et intéressants pour la société, au point d'être élus au conseil municipal, voire d'en devenir le leader. C'est le cas par exemple de M. TURLAN, de la ferme du Chapt sur la commune des Salles ; installé depuis 1984, élu de sa commune, il n'est pourtant toujours pas considéré comme "étant du pays".
L'installation en montagne d'une population active extérieure a de tout temps été problématique, notamment parce qu'elle a provoqué de la part des montagnards un réflexe de survie et de protection de leurs rente. Elle n'est acceptée que dans la mesure où elle ne remet pas en cause le fonctionnement et la reproduction du système économique local. Enfin, face à la perte des savoir-faire locaux dans la société paysanne ancienne, l'agriruralité se pose comme une alternative entre la remise au gout du jour de pratiques oubliées, comme les fermes pédagogiques qui comme le précise Nadine COUTURIER de l'EARL du Champ Vert à Saint Etienne le Molard étaient une pratique utilisée déjà dans les années 1930, et l'utilisation de techniques résolument modernes tournées vers l'innovation afin d'adapter des productions atypiques en montagne malgré les contraintes climatiques. C'est notamment le pari qu'ont fait les producteurs du Groupement d'intérêt Economique (GIE) des Perles Rouges du Velay, en implantant il y a vingt ans des fraises, des framboises, des groseilles et aujourd'hui des cerises en altitude. Figure 23 : Logo Perles Rouges des Monts du Velay Source : http://www.perles-rouges-du-velay.com/histo1.htm A travers l'agriruralité, il ne s'agit de revenir à l'agriculture de nos grands-parents, il s'agit d'optimiser au mieux les systèmes économiques et d'utiliser pour la partie agricole les pratiques héritées du passé en les combinant aux techniques agricoles nouvelles tout en misant sur l'avenir. En effet, qui aurait cru il y a trente ans que dans les zones de montagnes, on produirait à grande échelle des petits fruits de bonne qualité? C'est pourtant le cas aujourd'hui, parce que les producteurs se sont organisés, ont changé la façon de produire et ont tiré parti du milieu montagnard ; ils ont su adapter les plants et utiliser des techniques plus respectueuses de l'environnement, et aller jusqu'à créer une nouvelle filière agricole. En pleine expansion, le GIE des Perles Rouges des Monts du Velay recherche actuellement des producteurs jusque dans la Loire. Profitant des dynamiques en place, cette piste peut constituer une opportunité et un atouts pour l'agriruralité dans les Monts du Forez. Ces Monts du Forez qui au regard des éléments ci-dessus, apparaissent comme un territoire favorable pour le développement de l'agriruralité ; toutefois, jusqu'à présent, les activités agrirurales se sont peu répandues. Il s'agit dés lors de mieux cerner quels sont les obstacles qui limitent l'émergence de l'agriruralité dans les Monts du Forez. II. Quels obstacles et quels inconvénients limitent l'émergence de l'agriruralité dans les monts du Forez ? Les obstacles limitant la création d'activités agrirurales sont multiples. Il y a tout d'abord des inconvénients contextuels qui peuvent débouter des candidats à l'installation. A. Des inconvénients contextuels qui peuvent débouter certains candidats à l'installation Si le paysage agraire fournit des indices qui permettent d'étudier le contexte agricole des monts du Forez, il ne révèle pas forcément tous les éléments de contexte liés aux structures agricoles42 . 1. L'accès difficile aux structures agricoles L'accès aux structures agricoles constitue souvent le premier frein à l'établissement de porteurs de projets agriruraux. > La propriété foncière La propriété tout d'abord est un terme chargé d'affectivité et de passion : la terre est à la fois un outil de travail indispensable à l'exploitant mais aussi un patrimoine objet de convoitise recherché par des propriétaires non-agriculteurs. Théoriquement le propriétaire peut "user et abuser de son bien", l'exploiter, le louer, le vendre, le laisser en friche si bon lui semble. L'étude de la propriété est donc fondamentale si l'on veut appréhender l'agriculture du territoire. C'est tout l'objet de l'étude que l'ADASEA a mené sur les monts du Forez au printemps 2010 afin de connaître qui sont les exploitants et les propriétaires et quelle est la taille des structures agricoles. Il apparait ainsi que si le foncier est abordable au niveau du prix (1 500€ par hectare), il est très difficile d'accès. Cependant, au vu des entretiens réalisés avec les créateurs d'entreprises agrirurales (voir le tableau ci-contre) on constate que si le foncier apparait comme un frein, ce dernier n'est pas insurmontable. Au contraire, certains entrepreneurs ont adapté leur entreprise à la problématique foncière qu'ils rencontraient, c'est notamment le cas d'une créatrice d'entreprise agrirurales qui avait hérité de trois hectares de terre et qui souhaitait les valoriser. Pour cela, elle a développé une production d'élevage d'escargots et a créé son emploi en milieu rural. 42 Jean-Paul Diry la définit ainsi : "on entend par structure agraire étudier la propriété, l'exploitation et les modes de fairevaloir qui entretiennent d'étroit rapports entre eux et forment une structure, toute modification de l'un des éléments ayant des répercutions immédiates sur les autres. A l'inverse du système agricole elle est relativement stable. Tableau 3 : L'accès au foncier par les créateurs d'entreprises agrirurales
Source : Entretiens CreActE - SOULIER ML - juillet 2010 Les problèmes liés au foncier concernent essentiellement les projets ayant un besoin "important" en terres agricoles (le plus souvent entre quinze et vingt-cinq hectares). Les raisons majeures de ces difficultés sont la pression foncière qui existe dans certaines zones à cause de la volonté d'agrandissement de beaucoup d'agriculteurs. En ce qui concerne les projets agricoles avec des surfaces faibles, les reprises sont difficiles car les exploitations de petite taille partent souvent à l'agrandissement, elles ne sont pas forcément inscrites au répertoire départemental à l'installation (RDI) des ADASEA43. Les choix du cédant agricole et du propriétaire sont donc décisifs dans la transmission, agricole. Si l'on ne prend pas en compte ce facteur et si l'on ne sensibilise pas les cédants agricoles à la transmission on ne peut pas agir. Le fonds régional d'avance au fermage vise a inciter les exploitants et leurs propriétaires à louer à des jeunes qui s'installent avec les DJA en contrepartie d'un bail écrit respectant les tarifs préfectoraux du fermage. Notons également le problème suivant : les exploitants sont très majoritairement propriétaires des bâtiments, leur lieu d'habitat se trouve également dans la majorité des cas à proximité de l'exploitation. La plupart des cédants ayant vécu toute leur vie sur le siège d'exploitation ne souhaitent pas quitter ce lieu à la retraite. Cela ne facilite pas les installations, surtout si aucune possibilité de logement n'apparait, d'autant plus que les résidences principales dans les cantons de Noirétable, Boën et Saint-George-en-Couzan sont occupées à hauteur de 70 % des logements par des gens qui en sont propriétaires. Le parc locatif se caractérise ainsi par une faiblesse des logements collectifs44, une faiblesse du nombre de locataires et des difficultés pour trouver des logements locatifs de bonne qualité. Le dispositif des Aides à la Transmission d'Exploitation (ATE) vise cet objectif. Présenté aux cédants, il offre des possibilités d'aides à l'exploitant qui libère son habitation. Ainsi, afin de pouvoir concrétiser leur projet, de nombreux candidats à l'installation agrirurale ayant des projets nécessitant peu de terres (deux-trois hectares) font aujourd'hui appel à des agences immobilières pour trouver une bâtisse ancienne et le bien foncier nécessaire à leur installation. Ces nouvelles tendances se trouvent en dehors des canaux de l'agriculture traditionnelle. Un autre frein concernant l'accès aux structures foncières concernent le prix des structures. > Le problème du prix des structures agricoles Si un certain nombre d'exploitations agricoles ne sont pas reprenables en l'état sur les Monts du Forez, elles constituent néanmoins un potentiel important pour la construction d'offres d'activité agrirurale car elles peuvent composer la base d'un projet agrirural rentable économiquement grâce à l'adjonction d'autres activités économiques. L'avantage principal de ces structures est qu'elles sont abordables financièrement par des porteurs de projets agriruraux contrairement aux exploitations reprenables en l'état qui nécessitent des capitaux importants. En effet, les exploitations non 43 SAUNIE G., SOULIER M.L., Les ADASEA : un outil de promotion de l'agriculture et de proximité entre les acteurs du monde rural, janvier 2010, université Lyon 2, M2 ADR. 44 10% de logement collectif contre 50% au niveau départemental reprenables en l'état, moins chères car non adaptés aux normes actuelles, permettent dans un premier temps d'avoir financièrement accès à une structure dans un second temps elles permettent aux porteurs de projets d'avancer dans la restructuration de l'exploitation petit à petit ; enfin, elles permettent dés le commencement d'adapter le projet à la structure, alors que l'accès à une exploitation reprenable en l'état nécessitera des capitaux lourds et nécessitera dans un second temps une reconversion destinée à changer de production (exemple : passage du système bovin lait au système caprin, vente de la salle de traite, ect.). Toutefois, certains créateurs d'entreprises agrirurales ont des perspectives pour la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement :
Le premier frein sur le chemin du porteur de projets concerne donc l'accès au foncier ; toutefois, une fois la production définie, le candidat à l'installation devra également étudier la façon dont il commercialisera ses produits. Cet élément constitue une donnée essentielle du projet. 2. La question de la viabilité du projet envisagée sous l'angle de l'accès aux marchés Nous l'avons vu plus haut, les Monts du Forez ont une agriculture peu diversifiée ; on compte notamment peu de cultures délicates, maraichères ou florales, ce phénomène peut s'expliquer par l'éloignement relatif du territoire vis-à-vis des centres urbains. Figure 24 : Le modèle de Von Thünen On peut adapter en partie le modèle de VON THÜNEN réalisé au début du XIXème siècle, à la réalité actuelle bien que la majorité des hypothèses initiales soient désormais anachroniques. Von Thünen montre que le revenu à l'unité de surface varie en fonction de la distance à la ville. La spécialisation agricole s'organiserait alors en aires concentriques, pour cela il part de l'hypothèse abstraite suivante : l'existence d'une ville isolée, vivant d'autosuffisance, dans un rapport de complémentarité avec la campagne proche. La réalité, notamment dans notre étude de cas, semble se conformer au modèle. On note, en effet, dans les espaces proches des villes, la présence de ceintures maraichères, la concurrence du foncier urbain imposant des cultures dégageant de forts bénéfices, et en marge des villes, dans le rural isolé, la présence massive de l'agriculture repose sur l'élevage. Dans les Monts du Forez, on compte notamment très peu d'exploitations agricoles dont les produits soient périssables rapidement. En effet, produire des cultures délicates dans les montagnes implique de lourds investissements, car la distance empêche souvent un accès quotidien au marché. Ainsi, les producteurs doivent transformer les produits frais en produits à forte valeur ajoutée (petits fruits en confitures, escargots conditionnés...). Cela nécessitera souvent de réaliser de lourds investissements (installation frigorifique de grande envergure, séchoir de plantes, atelier de transformation...) pour "tenir" les produits périssables plus longtemps. Les Monts du Forez sont marqués par des productions de qualité pour ceux qui ont su s'adapter à l'éloignement relatif des marchés en misant sur des produits finis à forte valeur ajoutée et non périssable ; toutefois, l'éloignement relatif vis-à-vis des marchés a des répercutions sur les prix des produits : cet aspect peut renforcer les difficultés économiques des producteurs agriruraux qui devront alors rechercher une clientèle aisée pour écouler leurs produits. Cependant cet aspect ne semble pas gêner les créateurs d'entreprises agrirurales rencontrés. Tous reconnaissent que le territoire bénéficie d'un positionnement stratégique vis-à-vis des centres urbains où se trouvent les marchés, c'est que nous montre le tableau suivant. Tableau 4 : Les caractéristiques géographiques du territoire selon les créateurs d'entreprises agrirurales
Source : entretiens CreActE - SOULIER ML - juillet 2010 En effet, le territoire des Monts du Forez constitue une "place centrale" vis-à-vis de St Etienne et de Clermont-Ferrand, car elle bénéficie d'un positionnement géographique stratégique, en étant situé à mi-chemin entre ces deux grandes agglomérations. Il faut toutefois considérer ce que Christaller et Auguste Lösch appellent la "distance économique". Il s'agit du coût relatif de l'accès à un bien ou un service central. Pour comprendre cela, imaginons une région dans laquelle vivent des habitants aux revenus identiques ; ils sont régulièrement répartis, sauf à l'endroit où la population a tendance à s'agréger. Supposons qu'un magasin de producteurs ou qu'un marché s'installe au centre : tout le monde ne sera pas placé à la même enseigne, puisque les producteurs qui habitent loin devront ajouter le prix du transport et le prix des investissements (afin de garder les produits frais) à leurs produits ainsi que le temps pour arriver au marché. La loi du marché, selon Christaller, pourrait expliquer d'éventuelles difficultés pour les producteurs à trouver des débouchés et ainsi expliquer que peu de productions agricoles autres que l'élevage s'implantent dans des espaces éloignés des villes. Effectivement, dans un contexte de libre marché, chaque habitant produit ou consomme en fonction de la maximalisation de son revenu. Le producteur a intérêt à se placer au centre d'une aire de marché afin de diminuer au maximum la distance économique de la clientèle potentielle. Toutefois, dans le cas de productions particulières (escargots, savons au lait de chèvre, confiture aux plantes...), étant donné qu'il ne s'agit pas de produit de consommation courante mais de produits de luxe ou à offrir, on comprend l'intérêt des producteurs à se situer dans une place centrale à deux agglomérations, cela permet ainsi de toucher un maximum de clients potentiellement aisés, les petits marchés locaux ne leur offrent pas de débouchés suffisant pour les producteurs, c'est ce que nous explique une créatrice d'entreprise agrirurale :
Lors du montage d'un dossier d'installation, il est également nécessaire de vérifier si les aspirations du porteur de projets vont de pair avec les caractéristiques du territoire ; en effet, si les moyennes montagnes ont des aménités attractives, on dit parfois "qu'il faut y être né pour y vivre". 3. La question de la viabilité envisagée sous l'angle de l'insertion au territoire La viabilité est ici évaluée par rapport à des questions sociales d'insertion dans le territoire. > L'insertion sociale L'insertion sociale est un facteur essentiel pour le bien être du porteur de projet, et donc pour le bon fonctionnement de son système. Cependant, un autre frein met en cause les conflits d'intérêts et d'usages. En effet, des conflits d'usages agricoles éclatent parfois, ils sont souvent le fait de concurrence de demandes d'autorisation d'exploiter. Obligatoires, elles sont examinées chaque mois en commission départementale d'orientation agricole (CDOA). L'ADASEA de la Loire doit souvent intervenir sur demande de la CDOA au cours de la médiation foncière afin de gérer au mieux les conflits. Si aucun accord local n'est trouvé lors des réunions de concertation organisées par l'ADASEA, la CDOA s'appuie alors sur les priorités définies dans l'arrêté préfectoral établissant le Schéma Directeur Départemental des Structures Agricole, pour accorder ou refuser les demandes d'autorisation. L'étude du contexte relationnel et humain entre agriculteurs doit être menée lors de l'installation d'un porteur de projets. L'insertion territoriale conditionne ainsi la réussite d'un projet ; cette insertion peut être sociale mais aussi géographique. > L'isolement géographique L'isolement géographique peut être une entrave importante pour la réalisation d'un projet. La diversité des activités et des services dans les communes bourg-centres est un élément incontournable pour l'accueil de nouvelles populations et surtout pour le maintien de la population locale. 49 % des communes du périmètre d'intervention de la Maison des Services disposent de moins de cinq équipements. Le niveau moyen d'équipement de ces cantons reste toutefois inférieur à celui de Rhône-Alpes ; le développement de ce secteur s'inscrit, aujourd'hui, dans un cadre intercommunal. La distance entre le lieu d'activité et le lieu d'habitation doit être analysée selon les activités qui requièrent une présence fréquente, voire permanente sur le lieu d'activités (animaux, serres, accueil, vente à la ferme, ...), mais également en tenant compte de la famille (main d'oeuvre familiale occasionnelle, et temps de vie familiale). Boën et Noirétable sont deux bourg-centres, chefs-lieux de canton et concentrent la majorité des infrastructures socio-économiques (Collèges, Lycées, salles des sports, médiathèques...). La situation géographique et démographique de Saint-Georges ne lui permet pas d'assurer son rôle de chef-lieu de canton en terme d'équipements. L'éloignement du bourg peut être évalué en fonction des questions pratiques (trajets, école, services), et de la disponibilité de moyens de locomotion. L'appréciation de cet indicateur pourra se faire notamment en comptabilisant le nombre approximatif de voyages quotidiens à effectuer (école, travail du/de la conjoint(e), ...). L'éloignement du voisinage et du bourg peut, à long terme, avoir des conséquences sur le sentiment d'isolement, que celui-ci soit recherché ou non. Il est ainsi nécessaire lors du montage de projet ou de la recherche d'un candidat dans la construction d'offre agrirurale, de mettre en adéquation le projet de vie et le projet professionnel du candidat. Joël FORTUNIER, de la ferme de la Gilbernie exprime très bien cela :
De plus, dans les zones de montagnes il est également nécessaire que le porteur de projets prenne en compte les contraintes climatiques. Les monts du Forez constituent une barrière aux grands flux d'ouest, porteurs d'humidité. Les nuages s'accrochent et sans prévenir la pluie ou l'épais brouillard apparaissent très vite. Figure 25 : Photographie du col de la loge eneigé Sources : http://www.monts-du-forez.org/news/index.php/General L'isolement hivernal constitue notamment un élément important à prendre en compte. Tout au long de l'hiver, les anciens cirques glaciaires sont comblés par la neige emportée des sommets par le vent de nord-ouest. La présence de cette neige sur ces secteurs dure en moyenne six à huit mois par an. Nous l'avons vu, il y a des freins contextuels à l'établissement des activités agrirurales ; il y a également des freins liés à la représentation même du concept d'agriruralité. B. Une perception de l'agriruralité qui ne facilite pas la levée des obstacles L'agriruralité est un concept méconnu du grand public. Lorsque que l'on utilise ce terme, on se rend compte que de nombreux acteurs s'en méfient car au premier abord il peut sembler "pompeux". Cette perception de l'agriruralité ne facilite pas la levée des obstacles pour les porteurs de projets. 1. Des organismes professionnels agricoles qui ont du mal à s'ouvrir à la ruralité L'une des difficultés majeures rencontrées par les créateurs d'entreprise est l'hostilité ou l'indifférences du milieu agricole vis-à-vis de l'agriruralité. > L'isolement professionnel Comme nous l'avons vu les créateurs d'entreprises agrirurales parce qu'ils combinent plusieurs activités, se situent au marges de différents métiers. Ils recomposent des systèmes professionnels oi se mêlent artisanat, agriculture, commerce, services... En raison de la recomposition de ces petites structures, les agriruraux ne sont pas considérés comme agriculteur par la profession, c'est ce que nous a confié Corinne, créatrice d'entreprise agrirurale : "on a pas de liens avec les agriculteurs, les gens sont surpris que l'on soit agriculteurs. En général, ils nous voient plus comme des artisans, on a pas de stabulation donc je ne vais pas aller défendre les problèmes du lait avec les agriculteurs, je ne fais pas parti de syndicat agricole. En fait, on fait parti du monde agricole mais on est à part. Quand on va dans le groupement des agriculteurs, on a peu de relations, sauf quand on a besoin d'un coup de main mais je ne pense pas qu'ils nous considèrent comme faisant partie de la famille des agriculteurs". Entretien avec une créatrice d'entreprise agrirurale - Champoly - le20 mai 2010 Les entrepreneurs agriruraux souffrent ainsi d'un isolement professionnel. Le fait qu'ils soient pionniers et donc plutôt solitaires à l'écart des grands systèmes professionnels explique sans doute en partie ce phénomène. Beaucoup de créateurs d'entreprises pionniers qui ont aujourd'hui réussi dans la profession affirment que lorsqu'ils se sont lancés personne ne croyait à leurs projets, ces derniers apparaissaient comme marginaux, cet aspect est souligné dans le tableau ci-contre. Tableau 5 : Aides et soutiens à l'installation agrirurale
Source : Entretiens CreActE - SOULIER ML - juillet 2010 En guise de soutien, ces créateurs d'entreprises se sont rattachés à leur motivation aux réseaux familiaux et amicaux. Les réseaux qui sont apparus aux cours des entretiens sont, ainsi, de deux types. On trouve d'une part les réseaux de type familial ou amical et d'autre part les réseaux qui s'établissent sur le territoire autour de mode de vie ou de centres d'intérêts (groupe d'amis néo-ruraux par exemple). Les projets agriruraux font souvent peur parce que l'on a pas de référence sur des productions atypiques, ce qui constitue un obstacle quant-à la confiance à accorder au projet.
Généralement mal à l'aise avec la profession agricole ils sont en recherche de contacts avec des personnes qui ont conduit des expériences semblable à la leur. Il leur manque cependant une reconnaissance plus officielle. > La méfiance des locaux envers les agriruraux A ces écueils, s'ajoute l'attitude souvent méfiante des locaux, notamment celle des propriétaires fonciers, vis-à-vis de ces nouveaux habitants qui s'installent à la campagne. Beaucoup de porteurs de projets agriruraux rencontrent des difficultés d'insertion et de crédibilité, face aux cédants, du fait de leur origine non-agricole, de plus leurs projets sont parfois être jugés "farfelus". Les créateurs d'entreprises agrirurales doivent faire leurs preuves à travers leurs travaux :
Il est également intéressant de faire un rapprochement entre les projets agriruraux et une citation de G. RIST (1996) : "Si le moteur du développement, c'est la croissance, le moteur de la croissance, c'est la croyance." En effet, sur les sept entretiens réalisés auprès des créateurs d'entreprises agrirurales, quatre ont affirmé que personne ne croyait en leur projet au départ et que s'ils ne l'avaient pas portée, cette croyance en leur projet, était en fait leur croyance dans leur entreprise. Le témoignage de Corinne, créatrice d'entreprise agrirurale est révélateur de cet état :
Le manque de crédibilité rend également difficile la recherche de financements. 2. Un manque de crédibilité qui rend difficile la recherche de financements La question de la construction du projet est directement liée à la recherche de financement. > Les critères officiels de viabilité C'est une étape primordiale du projet, durant laquelle le porteur de projet devra démontrer la viabilité et la pérennité économique de son projet à ses interlocuteurs. Le manque de références, "l'originalité" des projets et parfois le "manque de pragmatisme" des porteurs de projet viennent augmenter les risques attachés à ces projets. Ces aléas sont d'autant plus important qu'il s'agit de créations. Plus le projet est risqué et flou, plus l'obtention de financement est difficile. L'analyse des projets tourne alors beaucoup autour de la personne, et des capacités mises en oeuvre pour la réalisation du chiffre d'affaires. Les causes essentielles des difficultés rencontrées pour l'installation par les porteurs de projet innovants sont le manque de crédibilité, l'absence de compréhension et les incertitudes sur le projet. L'évaluation de projets se fait souvent essentiellement en rapport avec sa viabilité économique qui est étudiée au travers du revenu prévisionnel dégagé par les activités envisagées. Il existe dans l'agriculture des critères officiels pour évaluer la viabilité des projets d'installation. En effet, pour l'attribution de la DJA, « le candidat doit s'installer sur un fonds dont l'importance lui permet [...] d'atteindre la viabilité économique requise. »45 La viabilité des exploitations agricoles est alors déterminée selon des circulaires préfectorales qui fixent les critères de viabilité des exploitations agricoles. De plus, pour l'attribution des aides, la CDOA va se baser sur les pourcentages projet agricole départemental (PAD) pour vérifier la viabilité économique des projets. Le pourcentage PAD est le rapport en pour-cent entre la taille du projet, et la taille d'une exploitation de référence correspondant au seuil Exploitation à Dimension Economique Insuffisante (EDEI) fixé dans le projet agricole départemental. Le seuil EDEI correspond à des exploitations de référence selon des productions pratiquées, qui permettent de dégager un revenu supérieur au revenu moyen départemental (moyenne du revenu net des exploitations agricoles des 3 années précédentes), et compris entre 1 et 1,5 SMIC. Enfin, d'autres critères seront vérifiés pour l'attribution des aides, qui sont : -) la capacité agricole, validée par un diplôme qualifiant (au moins égal au bac professionnel ou au Brevet de Technicien Agricole) et la réalisation d'un stage de 6 mois hors de l'exploitation familiale ; -) la réalisation d'un stage de préparation de l'installation de 40 heures pour mettre au point l'EPI : c'est-à-dire l'étude prévisionnelle d'installation, faisant ressortir les capacités techniques et financières de l'exploitation. 45 CIRCULAIRE DGFAR/SDEA/007-5007 du 13 février 2007 Ces critères sont complétés par des critères d'âge (avoir entre 18 et 40 ans à l'installation), de nationalité (française), de statut (première installation en tant qu'agriculteur à titre principal) et d'engagement (être agriculteur pendant au moins 5 ans). Mais ces critères paraissent trop discriminants car 85% des installations non aidées poursuivent leur activité au bout de 10 ans46, ce qui représente environ le même pourcentage que les installations aidées. La raison d'un âge supérieur à 40 ans se traduit par l'absence de dotations jeunes agriculteurs ; ces critères excluent souvent des systèmes qui sont pérennes économiquement. Parce que les exploitations agrirurales touchent à plusieurs activités, elles posent la question des statuts lors du montage de dossier. > Les statuts C'est la question des statuts qui pose problème, nous l'avons vu, pour les porteurs de projet pluriactifs au sens ou leur activité dépendra de la mise en oeuvre de plusieurs métiers différents. En effet, la complexité des règles de définition des statuts, tant sociaux que fiscaux, rend parfois difficile la détermination pour le système envisagé. Pour les systèmes à dominante agricole, la question des statuts est directement liée à la question du foncier. En effet, l'attribution du statut d'agriculteur à titre principal, et l'affiliation au régime de la Mutualité Sociale Agricole (MSA), sont soumis à l'exploitation d'une demi-surface minimum d'installation (SMI), ou à la réalisation de 1200 heures annuelles de travail dans l'activité agricole si l'importance ne peut être évaluée en termes de SMI47. Cependant, le critère de la demi-SMI ne prend pas en compte la valorisation qui est faite des produits, et le nombre d'heures annuelles effectuées doit être démontré par le porteur de projet. Ainsi certains porteurs de projet innovants ne peuvent pas obtenir le statut d'exploitant principal, notamment à cause de la diversification des activités mises en place. Ceci est un handicap car le statut d'agriculteur à titre principal donne droit à une couverture sociale, et se trouve quasiment indispensable pour obtenir des financements, ainsi que l'autorisation d'exploiter de la CDOA structures. La question des statuts se pose également, lorsqu'il s'agit d'installation progressive : c'est un mode d'installation qui est bien vu, car il permet au porteur de projet de démarrer sur des investissements faibles, tout en se faisant une expérience et en développant une expertise de son propre système. Cependant il n'existe pas de statut pour les personnes qui sont dans ce cas, et cela limite ce mode d'installation. La question des statuts est à la fois un vrai et un faux problème. Il est vrai que les formules sont compliquées et qu'elles sont avant tout pensées pour des entreprises qui entrent dans un schéma. Rien n'est simple pour l'entrepreneur personnel, toutefois de nombreuses combinaisons sont possibles, il s'agit d'être informé et bien conseillé. On peut cependant se demander si ce débat ne cache pas une question plus profonde concernant les aides aux entreprises. En étant agriculteur et en répondant aux exigences de ce statut, l'entrepreneur peut bénéficier de dotations à l'installation et de prêts bonifiés, chose qui sera moins favorable avec un autre statut. Les éléments que nous venons d'aborder expliquent pourquoi de nombreux porteurs de projets souhaitent suivre une formation spécialisée avant de monter leur projet, il en va de la reconnaissance professionnelle et de l'éligibilité aux financements agricoles. 3. L'importance de la professionnalisation du métier d'agriculteur Lors des entretiens menés, des créateurs d'entreprises ont soulevé la question de la professionnalisation du métier d'agriculteur, cette dernière passe le plus souvent par la formation spécialisée. 46 TRÉHET, C., 2007 47 Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, 2004. > La formation Le fait de suivre une formation spécialisée est très important pour les porteurs de projets ; cela leur permet d'une part de connaître les aspects techniques du métier d'agriculteur, d'autre part cela leur permet d'obtenir une reconnaissance professionnelle plus large que le simple diplôme. Comme en atteste le tableau suivant, sur les sept créateurs d'entreprises agrirurales tous ont suivi une formation agricole. Tableau 6 : Formation suivie par les créateurs d'entreprises agrirurales
Source : SOULIER ML - juillet 2010 Il s'agit d'une reconnaissance morale de l'ensemble de la profession qui permet d'entrer dans le monde agricole. "Le projet de ferme pédagogique a été très très difficile ; c'était la première sur la Loire. En agriculture à l'époque, c'était difficile il y avait un manque d'ouverture, le monde agricole s'est ouvert avec des épouses qui n'étaient pas de ce milieu, et ces femmes ont proposé des solutions en fonction du vécu de leurs expériences... Je n'étais pas du monde agricole, c'est un monde très très fermé qu'il a fallu découvrir et comprendre mais les agriculteurs ne se rendent pas compte qu'ils parlent technique, ils se font comprendre de leur congénère mais pour le reste... Je tenais à découvrir cet univers. J'ai donc réalisé une formation agricole. " Entretien avec une créatrice d'entreprise agrirurale - le 2 juin 2010 Les créateurs d'entreprise agrirurales recommandent également aux porteurs de projets de se former et de maîtriser la production qu'ils souhaitent conduire, afin notamment d'éviter les échecs. "-quels conseils vous donneriez à quelqu'un qui voudrait s'installer? -De bien se former déjà, de connaître le métier et puis de ne pas trop se laisser influencer par la politique agricole du moment. Mieux se former et être ouvert. Il faut aller voir les gens dans la réalité." Entretien avec un créateur d'entreprise agrirural - Noirétable - 10 juin 2010 En effet, les échecs pèsent lourds dans la représentation mentale que les gens se font de l'agriruralité. Les locaux retiennent plus facilement les "ratés" que les réussites, or ces échecs pèsent sur l'ensemble des entrepreneurs agriruraux. A travers cela, on sent la volonté des entrepreneurs ruraux de prouver leur réussite, ainsi que leur volonté de ne pas être marginalisés. > Eviter la marginalitéPour beaucoup d'entrepreneurs agriruraux, il s'agit par la professionnalisation, de montrer qu'ils exercent un métier et qu'ils ont un statut. En bref, il s'agit pour eux de prouver à travers la réussite de leur entreprise qu'ils ne sont pas des marginaux. Cette notion est très importante : les créateurs d'entreprises agrirurales même s'ils créent des systèmes atypiques, ne souhaitent pas sortir de la société ; au contraire, ils souhaitent être au coeur de la société locale en créant des dynamiques, en participants aux évènements locaux ou en raccordant leurs activités à des projets de développement. Les acteurs impliqués dans l'accompagnement des porteurs de projets sont nombreux sur les Monts du Forez pourtant on note peu d'installation agrirurales. C. De nombreux acteurs présents sur le territoire des Monts du Forez pour peu d'installations agrirurales Le territoire agit sur l'acteur de la même façon que par ses agissements l'acteur agit sur le territoire par ses actions. Tout le problème consiste à comprendre comment se construit cette influence territoriale et à saisir les stratégies de ceux qui détiennent les "clefs de démarrage" des activités agrirurales. La première chose que l'on note en étudiant le territoire des Monts du Forez, c'est le nombre et la diversité des organismes agissant dans l'accompagnement des porteurs de projet ; si ce jeu d'acteur est organisé il manque toutefois de coordination. 1. Un jeu d'acteur bien organisé au niveau agricole mais qui manque de coordination avec le monde rural Concevoir un "territoire organisation cognitive"48 passe par la mobilisation et la coordination des acteurs ainsi que par le développement des approches stratégiques et par la construction de partenariats. Le jeu d'acteurs, se doit donc d'être bien organiser afin de favorisé le développement de l'économie externe. > Du territoire structurant au territoire actif Selon la formule de J.L. Guigou (1995) "le rôle des institutions est de produire de l'organisation". Il s'agit de l'aptitude à faire coopérer des acteurs, de coordonner des moyens et des méthodes pour atteindre des buts préalablement arrêtés. Il s'agit ainsi de passer d'un territoire structurant, qui canalise, ralentit et appauvrit la circulation de l'information à un territoire d'organisation cognitive, conçu comme un système de collecte, de traitement et de diffusion de renseignements, afin que les informations puissent devenir actions. Là est tout l'enjeu du dispositif Créafil mis en place au niveau du Pays Loire-Forez qui vise justement à créer un lien entre les acteurs qui oeuvrent dans l'accompagnement des porteurs de projets afin qu'ils se connaissent et coordonnent leur actions entre eux. Cette démarche est apparue sur le territoire, suite au dispositif Créafil Rhône-Alpes qui est né en 2006 de l'initiative des organismes régionaux d'appui a la création d'entreprise pour mieux accompagner les créateurs d'entreprise dans leur parcours ; depuis 2009, cette démarche régionale a essaimé sur les territoires de Rhône-Alpes en deux temps :
Au regard de l'importance de l'agriculture sur le territoire, le dispositif Créafil au niveau du Pays Loire-Forez a une particularité par rapport au dispositif Créafil Rhône-Alpes, il intègre des 48 JAMBES J.P., Territoires apprenants, esquisses pour le développement local du XXIè Siècle, L'Harmattan, Paris, 2001, 250p. organismes professionnels agricoles. Confronter le dispositif Créafil Loire-Forez et les entretiens menés lors du stage, permet d'analyser le types d'acteurs et leurs types d'actions. > Les acteurs et leurs interventions Le tableau suivant met en lumière plusieurs éléments : Tableau 7 : Tableau des acteurs
Source : SOULIER Marie-Laure - juillet 2010 Tout d'abord les acteurs impliqués dans l'accompagnement et qui oeuvrent sur le territoire des Monts du Forez sont nombreux. Il apparait, notamment, deux catégories d'acteurs impliqués dans l'accompagnement des entrepreneurs ruraux, les acteurs liés au monde agricole, les organismes agricoles professionnels (OPA) et les acteurs liés au monde rural de façon plus large. Les acteurs non impliqués dans l'accompagnement ou la création d'offres d'activités rurales ne doivent pas être oubliés car ils jouent un rôle a un moment donné du montage de dossier ou du développement de l'entreprise ; certains, comme les notaires ont également un rôle de conseils juridiques ; toutefois ils sont très peu écoutés par les acteurs impliqués. Les actions des acteurs non impliqués restent limitées à l'apprentissage pour les centres de formation, à la rédaction d'actes juridiques pour les notaires et à l'appui moral pour les élus non impliqués. Enfin, on se rend compte que le concept d'acteurs recouvre une notion relativement large. Est acteur celui qui agit qui n'est pas passif. Ainsi, on peut être acteur à plusieurs niveaux d'intervention. Un créateur d'entreprise est un acteur en soit ; un porteur de projet l'est également, les deux sont, en fait, la structure même de la création des dynamiques locales. En creusant un peu plus, on se rend compte qu'il existe des liens entre les acteurs du monde agricole oeuvrant pour l'installation agricole et les acteurs du monde rural oeuvrant pour la construction d'offres d'activités ; mais dans la réalité le nombre de ces derniers est maigre. > Des acteurs du monde agricole et des acteurs du monde rural : deux approches différentes Les acteurs impliqués dans l'accompagnement du monde agricole et les acteurs impliqués dans l'accompagnement du monde rural ont deux conceptions différentes de la création d'activités. Les premiers ont une approche purement agricole :ils considèrent qu'ils doivent contribuer à l'installation de chefs d'exploitations et protéger les agriculteurs des agressions extérieures (urbanisation...) ; quant aux seconds, ils ont une approche économique plus large car ils considèrent qu'ils doivent accompagner l'établissement d'activités économiques en milieu rural et favoriser les dynamiques locales. Figure 26 : Les différentes approches des acteurs vis-à-vis de la construction d'offres Source : SOULIER Marie-Laure - juillet 2010 Les ADASEA font le lien entre ces deux approches parce qu'elles font parti des acteurs techniques agricoles et parce que depuis plusieurs années elles ont su s'ouvrir à la ruralité49. On note également en toile de fond l'influence des syndicats agricoles qui influencent depuis plusieurs années ces conceptions. En marge de ces mouvements, on rencontre les acteurs non impliqués qui ne tiennent pas compte de ces conceptions. En effet, leurs actions sont régies par d'autres logiques, tant 49 SAUNIE G., SOULIER M.L., Les ADASEA : un outil de promotion de l'agriculture et de proximité entre les acteurs du monde rural, janvier 2010, université Lyon 2, M2 ADR. économiques que juridiques. Ces éléments peuvent expliquer pourquoi les activités agrirurales se développent peu sur les Monts du Forez alors que les acteurs présents sur ce territoire sont nombreux. Toutefois, produire de l'économie externe est un des objectifs que partagent tous les acteurs impliqués dans des stratégies territoriales. 2. Une volonté commune, des stratégies différentes Comme le précise A. MOINE50, le territoire est avant tout un système dans lequel il faut replacer des acteurs qui ont des stratégies "personnelles" bien que toutes souhaitent contribuer au développement du territoire. > Une volonté commune aux acteurs : agir pour produire de l'économie externe sur le territoire Il s'agit pour tous les acteurs recensés, de procurer à travers des formes de proximité organisées des avantages significatifs, tant pour l'entreprise que pour les institutions et le citoyen ; en cela ces structures ont l'obligation de travailler en partenariat ou au moins en tenant compte les unes des autres. Parce que les acteurs ont des missions parfois contigües, ils doivent travailler entre eux afin de maximaliser leur efficacité ; chaque acteur insère, ainsi, ses actions dans un système afin de produire sur le territoire une économie externe. Voici comment nous pouvons représenter le système d'acteurs agrirural dans les Monts du Forez : Figure 27 : Graphe d'acteurs Source : SOULIER Marie-Laure - juillet 2010 Ce graphe laisse apparaitre de nombreux liens de partenariat ou de convention entre les structures. On remarque notamment que le réseau des acteurs liés au monde agricole c'est-à-dire 50 MOINE A., Le territoire: comment observer un système complexe, L'Harmattan, itinéraire géographique 1, Paris, 2007, 176p. les organisations professionnelles agricoles est très bien organisé, les structures se connaissent et travaillent entre elles. Cela s'explique par le fait que le secteur primaire depuis seconde mutation agricole a été refondé entièrement et a été réfléchi en une filière coordonnée de l'installation à la transmission des exploitations agricoles. Les acteurs du monde agricole sont donc très bien organisés pour le montage de projets purement agricole ; les démarches et les actions entre les diverses structures sont claires. En revanche, on remarque également que ces OPA ont bien moins l'habitude de travailler avec d'autres structures oeuvrant dans la construction d'offres d'activités rurales. En cela, le réseau des OPA apparait comme un monde clos peu enclin à la construction d'offres d'activités agrirurales. Les ADASEA font figure d'exception dans ce domaine car elles apparaissent comme un trait d'union entre les OPA et les acteurs du monde rural. Les ADASEA, de par leurs missions de services publics, sont intégrées au réseau des OPA ; toutefois afin de se financer les ADASEA sont allées de plus en plus vers un élargissement de leurs compétences, recherchant même auprès d'autres acteurs ruraux, des sources de financements (diagnostic, étude foncière...). Cela a permis de créer des relations de type commercial entre le monde agricole et le monde rural d'autant plus que les structures de type Etablissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) s'inquiètent de plus en plus du devenir de l'agriculture. De même que les ADASEA apparaissent comme la structure qui fait le lien entre des acteurs du monde agricole et le monde rural, la Maison des Services grâce aux partenariats qu'elle développe, fait elle aussi le lien, de façon plus large, entre les acteurs de la création économique. Au travers ce graphe, on remarque également que certains liens établis entre les structures ne sont pas consentis : ils sont de nature juridique. C'est le cas notamment lors d'une mutation a titre onéreux d'un bien a vocation agricole, les notaires doivent préalablement à la signature définitive de l'acte de vente présenter, au nom du vendeur, un imprimé informant la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) compétente de l'opération envisagée afin de connaitre sa position sur la vente. En effet, les SAFER, disposent d'un droit de préemption qui leur permet d'acheter les biens agricoles mis sur le marché, a la place de l'acquéreur initial et au prix de vente convenu. C'est le cas également pour les groupements professionnels agricoles qui sont représentées dans les Chambres d'Agriculture, les SAFER et les ADASEA (art. R 511-6 et R 511-7 du code rural51). Enfin, ce graphe laisse aussi apparaitre que des structures n'ont pas encore de lien partenarial avec les acteurs du monde agricole, mais qu'elles bénéficient tout de même d'une reconnaissance morale (charte de reconnaissance entre la SAFER et Terre de Liens par exemple). Ainsi, si l'ensemble des partenaires partagent une volonté commune : créer des richesses externes, ces acteurs ont cependant des stratégies différentes et cela conditionne leur implication dans l'agriruralité. > Des stratégies différentes selon les acteurs impliquant des implications variées dans l'agriruralitéComme le rappelle G. Di MEO52, les acteurs disposent de "compétences". Ce sont les marges de manoeuvres dont ils disposent au sein des systèmes
d'actions. L'acteur, en effet, est doté d'une 51 AUDIER J., Droit rural, droit forestier, économica, CNFPT, collectivité territoriale, Paris, 1996, 357p. 52 DI MEO G, BULEON P., l'espace social, lecture géographique des sociétés, Armand Colin, Paris, 2005, 303p. chaque acteur demeure en grande part imprévisible. Le système est donc parfois inscrit dans l'incertitude et dans la complexité. Ainsi, si les acteurs ont des stratégies, ils ont aussi une compréhension de l'agriruralité différente ; celle-ci peut dépendre nous l'avons vu plus haut de certaines conceptions mentales ou structurelles ; dans tous les cas, cette compréhension conditionne l'engagement et l'implication des acteurs dans la construction d'offres d'activités agrirurales. Ainsi que nous l'avons déjà dit, les accompagnateurs ont une volonté commune de générer des richesses sur un territoire, volonté qui passe souvent par l'objectif de la réussite du porteur de projet. Généralement, ils n'ont pas d'intérêt économique dans le projet lui-même, toutefois, ils sont sollicités non seulement pour ce qui concerne l'approche économique, mais aussi en fonction de leurs compétences pour des questions techniques, juridiques ou pratiques selon leurs compétences. Le graphe ci-dessous met en lumière l'implication des acteurs en fonction de leur compréhension de l'agriruralité mais aussi et surtout en fonction des stratégies qui leurs sont propres. Figure 28 : Représentation de l'implication et
de la compréhension de l'agriruralité par les acteurs, dans les
Monts du Source : SOULIER Marie-Laure - juillet 2010 Les ADASEA et la Maison de Services, en raison du partenariat que ces deux structures développent entre elles, sont au coeur de l'agriruralité tant dans l'action que dans la réflexion. En effet, la construction d'offres d'activités agrirurales est au coeur même de la Plate-Forme de Développement Rural dont fait partie la Maison des Services depuis 2005, comme nous l'avons vu dans la partie méthodologie. Cette volonté de promouvoir l'agriruralité se manifeste notamment par l'édition en 2005 du guide L'agriruralité, des combinaison d'activités pour créer des entreprises et des emplois. Pour ce qui est des ADASEA, la stratégie de diversification de leurs activités rappelle l'agriruralité. En effet, elles ont su s'appuyer sur les compétences techniques dont elles disposaient en matière agricole pour optimiser et combiner des services en lien avec leurs missions de services publics (étude foncière, remembrement...). Toutefois dans leurs missions premières elles visent à favoriser les installations et les reprises agricoles. Pour ce qui est des EPCI et des consulaires, ils s'impliquent dans la question agrirurale s'il y a un besoin ou si un porteur de projets les contacte. Cette attitude est due à leurs missions d'accompagnements et à leurs stratégies de développement économique, ils n'ont pas pour rôle de construire des offres d'activités agrirurales, en revanche, si un porteur de projet se manifeste ils accompagneront sa volonté. La chambre d'agriculture et les centres de formation, ainsi que nous l'avons mentionné plus haut, ont une approche agricole traditionnelle de l'établissement en milieu rural. Une fois cette démarche bien cadrée, on peut avoir l'impression que ces organismes se retranchent derrière des actions qu'ils savent mener, sans forcément oser s'aventurer sur de nouveaux dossiers qui ne font pas l'unanimité dans la profession agricole53. De fait, on a parfois l'impression que ces organismes ferment les yeux sur les projets atypiques, les laissant à d'autres organismes qui ont une approche agricole et rurale, qu'ils ignorent plus ou moins. Il s'agit là d'un frein mental : on préfère ne pas agir plutôt que de provoquer des réactions. C'est tout l'avantage de la Maison des Services qui n'étant pas du monde agricole échappe à l'emprise de lobby, elle peut ainsi agir en bénéficiant de l'expertise technique de l'ADASEA avec laquelle elle a un conventionnement. Ainsi, la stratégie affichée par la Maison des Services est clairement volontariste, elle vise à la création d'activités économiques génératrice de revenus dans le monde rural. Terre de Liens et l'ADEAR sont des organismes qui affichent une bonne compréhension des enjeux liés à l'agiruralité, ayant été créés il y a peu, leurs moyens sont limités, cela les freine dans leur volonté de s'impliquer dans la question agrirurale. De fait, ces acteurs ont du mal à se faire entendre et à se faire respecter dans le monde agricole. Ils ont une approche plus "civique" en rapport avec des projets qui ont souvent une dimension importante de développement local et d'utilité sociale. L'entretien que j'ai mené avec Terre de Liens Rhône-Alpes révèle que cet organisme a également des préoccupations citoyennes qui rejoignent l'économie sociale et solidaire, ils présélectionnent notamment les projets selon des aspects éthiques relevant de l'opinion (respect de l'environnement). Ils ont une plus grande tolérance d'une manière générale quant au risque lié à ces projets. On retrouve également des acteurs qui ont des stratégies économiques. En effet, l'accompagnement d'un porteur de projets peut également fournir une source de financement pour les structures qui réalisent cet accompagnement, les SAFER par exemple touchent un pourcentage du montant des transactions effectuées, ce qui peut conférer une dimension économique et "industrielle" (recherche du nombre et de la performance) à leur approche des projets. Les SAFER affichent également une stratégie de défense du foncier agricole face à l'urbanisation, ils n'ont donc pas pour stratégie directe la création d'activités. De plus, les banquiers ont pour rôle d'attribuer ou non les prêts nécessaires à la grande majorité des installations, dans le cadre de l'activité économique de la banque. Ils auront donc une approche économique et marchande, basée essentiellement sur l'évaluation économique du projet et sur la capacité à rembourser du porteur de projet. Cependant, la personnalité du porteur de projet, ses compétences et sa motivations ont 53 Voir : Partie 2, II, Une perception de l'agriruralité qui ne facilite pas la levée des obstacles également un grand rôle dans la décision d'accorder non les prêts. Nous l'avons vu, les références faisant défaut, l'évaluation de la capacité à rembourser est basée en partie sur le ressenti du conseiller sur le porteur de projet. Enfin dans ce graphe on retrouve des acteurs qui ne connaissent pas forcément la question agrirurale et qui doivent parfois recevoir des porteurs de projets ou des créateurs d'entreprises agriruraux. Ces acteurs interviennent généralement de façon cloisonnée en fin de montage de projet. Ce dernier point soulève la nécessité d'adapter l'accompagnement et les stratégies partenariales à l'agriruralité. 3. Adapter l'accompagnement à l'agriruralité Comme nous venons de le voir, les acteurs en matière d'accompagnement ne manquent pas. Pourtant, certains acteurs se trouvent exclus du système ; d'autres se trouvent ignorés par d'autres membres. Ce contexte ne fait pas le jeu de l'agriruralité qui est reléguée en marge du système, pour que l'agriruralité devienne système, il s'agit donc pour les acteurs d'adapter leurs compétences en fonction du territoire. > Constituer et mobiliser un portefeuille de ressources motrices Quand on examine le jeu d'acteurs en place dans les Monts du Forez, on constate qu'aucun organisme ne se consacre spécialement à l'agriruralité. L'agriruralité, du fait même qu'elle associe la production agricole et d'autres secteurs économiques (artisanat, commerce), fait surgir des interrogations variées auquelles un seul organisme ne peut pas répondre. Prenons l'exemple d'un paysan-boulanger, son activité dépend du régime agricole mais elle entre aussi dans l'artisanat et le commerce, ainsi ce même entrepreneur rural sera amené à voir plusieurs structures pour répondre à ses questions, par exemple : dans quelle proportion la vente de pain ne doit-elle pas dépasser l'activité agricole? Les acteurs impliqués dans l'accompagnement, qui ont l'habitude de monter des dossiers "classiques", doivent avoir des réponses sur des sujets qui sont aux marges de leurs métiers, l'artisanat ne concernant pas directement l'agriculture et réciproquement, afin que quelqu'un puisse renseigner cet entrepreneur rural. Ainsi, alors que tout semble quadrillé autant au niveau agricole qu'au niveau artisanal ou commercial, avec la combinaison d'activité on a l'impression de ne pas avoir d'interlocuteur spécialisé ; au niveau des acteurs les choses ne semblent pas coordonnées, chacun agissant dans son domaine. Il revient donc à l'entrepreneur rural de porter son projet, de se renseigner en faisant le tour des organismes afin de pouvoir monter son projet. Telle est la perception de nombreux créateurs d'entreprise :
La construction d'offre agrirurale en raison du fait qu'elle manque de référence fait l'effet d'un vide, elle nécessite d'adapter les compétences des acteurs à l'agriruralité et d'établir des partenariats entre les acteurs impliqués et les acteurs non impliqués puisqu'ils auraient aussi un rôle a jouer dans l'émergence des activités agrirurales. Tout cela pose la question du franchissement des secteurs et des limites à l'intérieur desquelles un acteurs est légitime et d'autre part, aux moyens et aux conditions de franchissement de ces limites. Le franchissement des limites permettrait notamment aux acteurs de se renseigner mutuellement en vue de pouvoir renseigner sans délais un porteur de projets ou un créateur d'entreprise car le système d'acteurs actuel ne laisse pas la parole aux acteurs non impliqués, ni aux acteurs ayant peu de moyen pour s'impliquer dans la démarche agrirurale. Enfin à l'écoute de créateurs d'entreprise on se rend compte qu'il y a un décalage entre l'accompagnement et la réalité. L'accompagnement proposé actuellement ne semble pas adapté à l'émergence des activités agrirurales. > Le manque de réalité dans l'accompagnement L'accompagnement proposé actuellement ne parait pas en adéquation avec la réalité. Tout d'abord puisque que les acteurs qui montent les projets n'ont pas de référence sur les productions atypiques, ils sont empêchés de prendre en compte certains aléas, ensuite parce que les acteurs ne prennent pas en compte certaines contraintes administratives, comme le montre ce témoignage :
Ainsi, faire intervenir des créateurs d'entreprises installés depuis quelques années dans le montage de dossier de porteurs de projets agriruraux qui souhaiteraient s'installer dans le même domaine de production, apparait comme une opportunité qui inciterait à ne pas reproduire certaines erreurs que le créateur d'entreprise "tuteur" aurait connu. SYNTHESE Parce que les contraintes géographiques et naturelles freinent le développement d'une agriculture intensive et productiviste sur les territoires de moyennes montagnes, les hommes qui y vivent ont dû diversifier leurs activités et aller chercher ailleurs des revenus complémentaires à l'agriculture. Lors de la seconde mutation agricole, après la seconde guerre mondiale, les politiques agricoles ont essayé d'imposer partout un modèle agricole basé sur la professionnalisation des actifs, la modernisation des exploitations et la technicisation des productions, dédaignant ainsi la pluriactivité et les petits rendements. Les espaces de montagnes bénéficient d'une image à connotation positive. Ils sont apparus pour des entrepreneurs ruraux comme une chance devant leur permettre de créer leur emploi en milieu rural tout en valorisant un patrimoine par la transformation et la valorisation de productions de qualité à forte valeur ajoutée. Les processus en cours sont bien ceux d'une emprise grandissante de la ville sur l'espace rural, avec l'extension progressive des zones périurbaines vers le rural isolé (dont font partis les Monts du Forez) ; ce dernier change de nature en fonction de la rapidité des évolutions économiques. La "diagonale du vide" est, ainsi, en voie de résorption. Dans ce contexte, les Monts du Forez apparaissent comme un territoire à potentiel opportunité pour l'émergence des activités agrirurales car les contraintes géographiques obligent à produire autrement, à cumuler les activités et à les optimiser afin de ne rien perdre des ressources utilisées et valorisées. Les Monts du Forez, en effet, apparaissent comme un territoire attractif pour l'établissement d'activités agrirurales en raison de plusieurs atouts. Tout d'abord le foncier y est abordable bien que peu accessible ; d'autre part les Monts du Forez, bien que relativement éloignés et isolés des centres urbains sont centraux à plusieurs agglomérations. Ils bénéficient d'un positionnement géographique stratégique se trouvant à mi-chemin de plusieurs marchés, l'aménagement autoroutier ayant, en plus, amélioré la desserte de ce territoire. En ce sens, l'agriruralité, dans les Monts du Forez, en produisant et en valorisant des productions à forte valeur ajoutée, se démarque et subsiste ; les néoruraux installés sur le secteur dans les années 1980 en sont la preuve. Les activités agrirurales permettent de créer des ressources économiques en milieu rural ainsi que des dynamiques culturelles et sociales. Elles apparaissent également comme une opportunité pour l'économie et l'agriculture dans les Monts du Forez. Les entrepreneurs agriruraux construisent ces dynamiques selon deux niveaux, de façon à former des exploitations qui font systèmes dans le temps. Au niveau de la structure agricole tout d'abord, ils développent dans un premier temps autour d'une production agricole donnée une ou deux activités, on est alors plus dans la diversification agricole au départ. Au fur et à mesure du développement de la structure, ils vont ajouter d'autres activités complémentaires et optimisées, l'exploitation va devenir un système agrirural dans le temps. Au niveau local ensuite, les entrepreneurs peuvent s'impliquer dans des associations ou vont développer en lien avec leurs exploitations, une activité de loisir en vue de valoriser des compétences qu'ils auraient acquises par le passé. Ils vont de cette manière contribuer à l'émergence de dynamiques culturelles qui seront pour eux un moyen de s'intégrer au territoire au départ et n'auront pas forcément une valeur économique, toutefois dans le temps, ces dynamiques pourraient constituer un terreau favorable à l'émergence d'activités culturelles en milieu rural, voire à l'émergence d'activités "agriculturales"... 78 Toutefois, le système d'acteurs lié à l'agiruralité est complexe, si tous partagent une volonté commune de générer des richesses externes sur le territoire, les stratégies de chacun sont variées ; pour certains leurs compétences se limitent à favoriser des installations agricoles, pour d'autres il s'agit de sauver le foncier agricole de l'urbanisation ou de la friche, d'autres considèrent que leur champ d'intervention ne concerne que la création d'activités générant des revenus. La difficulté réside notamment dans le fait que l'agriruralité se situe à la marge de plusieurs secteurs et peut toucher à de nombreux métiers. Elle nécessite de la part des acteurs, une capacité d'adaptation ainsi que l'interdiction des préjugés. En effet, aucun acteur n'a pour coeur de métier l'agriruralité. Cette dernière interdisant la reproduction d'un modèle unique, chaque installation agrirurale sera différente des autres, elle sera propre à chaque entrepreneur agrirural. L'agriruralité est une notion encore méconnue. Le terme ne fait pas l'unanimité, chacun l'interprétant selon sa vision des choses. Cette conception de l'agriruralité ne facilite pas l'émergence des activités agrirurales d'autant plus que les références dans ce domaine manquent. Parce que l'agriruralité nécessite d'ouvrir le champ des possibles, de sortir des modèles préconçus, d'élargir les compétences des acteurs et de travailler avec des acteurs impliqués et avec d'autres qui ne le sont pas, elle est déconcertante autant pour les acteurs du territoire que pour la profession agricole. Ces quelques éléments impliquent donc des actions volontaristes de la part des acteurs mais aussi la nécessité d'avoir une approche globale du territoire afin de mener à bien la construction d'offres d'activités agrirurales. L'agriruralité peut ainsi, permettre à la figure agricole de redevenir centrale, puisque l'entrepreneur agrirural en touchant à plusieurs domaines, devient incontournable ; il devient ainsi un moteur du dynamisme des campagnes. Figure 29 : La création de dynamiques culturelles et sociales par les exploitations agrirurales Auteur : SOULIER Marie-Laure - juillet 2010 PARTIE 3 : VERS DES CONSTRUCTIONS D'OFFRES
D'ACTIVITES
|
Situations à |
Sources de potentiels |
Potentiels à explorer |
Idées |
Partenariats, |
Baisse
du |
Un tissu agricole encore très présent sur le territoire |
des complémentarités |
CUMA à mobiliser pour la construction d'une d'activité |
une |
Des porteurs de projets |
circuits courts |
|||
la libération du foncier |
restructuration foncière des exploitations groupement du foncier autour des exploitations |
|||
Volonté d'accueil et |
combinaisons d'activités |
ADASEA |
||
2 exploitations proches pourraient être groupées |
mise en place d'un groupe local |
17 agriculteurs |
||
Faiblesse du création d'offres |
5 exploitations vont cesser leurs activités --> du foncier va se libérer |
des complémentarités |
une corporation d'activités |
|
volonté de la part de plusieurs de ces cédants de laisser leur exploitation à un jeune agriculteur |
tourisme/petits fruits/escargots... |
sensibiliser les |
||
Isolement professionnel des créateurs d'entreprises agrirurales |
des créateurs d'entreprises agrirurales sont prêts à échanger avec d'autres entrepreneurs agriruraux |
Oxalis est présente en Rhône-Alpes, une jeune ébéniste sur le secteur y adhère |
mise en place d'un réseau de professionnel |
Oxalis |
Source : SOULIER Marie-Laure - juin 2010
Suite à une formation suivie avec le CRDR (construire des offres d'activités), il s'est agi de réinvestir les connaissances théoriques acquises lors d'une formation suivie avec le CRDR dans le contexte local de St Didier sur Rochefort, le tableau ci-dessus et le graphe suivant visent à faire ressortir les potentiels du territoire en élargissant les approches.
Figure 30 : Repérage des potentiels dans la commune de St Didier sur Rochefort
Source : SOULIER Marie-Laure - juin 2010
Ainsi, il ressort du travail de la veille territoriale et du croisement les potentiels, les éléments suivants :
- La commune de St Didier sur Rochefort dispose encore d'un tissu agricole solide ; on note
notamment la présence d'une CUMA importante.
- Les élus affichent une volonté d'accueil vis-à-vis des porteurs de projets agriruaux, ils
manifestent également une volonté d'améliorer l'existant, en restructurant les exploitations agricoles.
- les cinq exploitations analysées ne sont pas reprenables en l'état, en termes économiques et immobiliers. Elles ne sont ni viables ni attractives pour un jeune qui s'installerait en reprise directe.
- Toutefois, il y a un potentiel foncier mobilisable ; mais la destination doit en être précisée.
L'arrêt des activités agricoles permettrait surtout de libérer du foncier dans le but de construire des offres d'activités.
Il y a en effet sur St Didier sur Rochefort un potentiel foncier conséquent en termes quantitatif comme qualitatif. 113ha seraient mobilisables dont environ 80 après restructuration, reprise de biens par certains propriétaires et soustraction des parcelles extérieures à la commune. La démarche doit notamment tenir compte des délais différents dans la libération des exploitations.
- Les bases d'activités sont limitées, avec peu de droit à produire et peut de quotas laitiers. Ainsi,
la construction d'une offre d'activité ayant pour activité principale un atelier bovin est peu
envisageable (sauf en cas d'association avec une exploitation existante) compte tenu qu'une installation nécessite d'être aux normes dans les trois ans et que l'obtention de droits à produire sous-entend une base existante (sauf pour les activités caprines et ovines). Il en reste toutefois quelques unes chez deux exploitants : une activité caprine et quelques droits à produire.
- La construction de bâtiments agricoles
neufs devra être envisagée. Beaucoup de
bâtiments
professionnels sont « coincés » au sein de
hameau. Cela limite les possibilités de réutilisation.
Le repérage des potentiels permet ainsi de définir les base de la construction d'offres
d'activités agrirurales à mettre en place sur St Didier sur Rochefort.
Nous avons donc, dans un premier temps, relevé sur le terrain tous les potentiels présents sur la commune de St Didier sur Rochefort, dans un second temps et parce que nous évoluons dans un cadre agricole particulier, il s'est agi de présenter notre volonté d'action à des personnesressources et notamment aux exploitants-cédants.
1. Présentation des potentiels aux personnes-ressources
L'acteur pivot a identifié grâce au diagnostic cédants mené par l'ADASEA, des personnesressources, notamment des exploitations non viables en l'état et dont les exploitants ont plus de 55 ans. L'idée était de se fonder sur ce type d'exploitations, afin d'éviter qu'elles ne partent a l'agrandissement et afin d'engager une réflexion sur une combinaison d'activités agrirurales générant des revenus.
A ce jour, ce travail d'identification des exploitations a abouti : cinq exploitations toutes regroupées sur la commune de St Didier sur Rochefort ont été identifiées. Cette commune dispose de plusieurs potentiels économiques que l'on peut imaginer combiner à l'agriculture, (voir le tableau 8).
Les cinq exploitants ont été rencontrés afin de connaître leurs volontés concernant la transmission de leur activité puis de considérer avec eux la façon dont ils envisagent de céder leur exploitation. Nous avons recueilli les informations suivantes :
· Deux exploitants-cédants sont voisins, ils avaient déjà réfléchi entre eux à cette question, tous deux ne souhaitent pas que leur exploitation parte à l'agrandissement, tous deux affichent une volonté commune d'installer un jeune et de le soutenir dans ses premiers pas. Leurs exploitations ne sont pas repenables en l'état toutefois la réunification de celles-ci permettrait d'obtenir une base d'activité agricole solide qui pourrait être combinée avec d'autres activités. D'autant plus qu'une des deux fermes dispose encore de quelques quotas laitiers et que le foncier des deux exploitations se jouxte.
· Un exploitant agricole est encore relativement jeune ; il souhaite attendre que ses enfants aient terminé leurs études avant de se positionner.
· Un exploitant-cédant dans un avenir proche a déjà promis ses terres à son neveu en vue de conforter son exploitation, on constate ici l'importance des relations interpersonnelles pour ce qui est de la question foncière.
· Enfin, le dernier exploitant-cédant identifié n'est pas propriétaire. De plus, si monsieur a plus de 60 ans, son épouse doit encore travailler trois ans avant de partir à la retraite. Il convient donc dans un premier temps d'attendre un peu. Il s'agit également de connaître ce que le propriétaire désire faire de son exploitation à l'avenir.
Au regard de ces éléments on constate tout d'abord que la principale difficulté réside dans le fait que ces exploitations ne sont pas viables en l'état. Il s'agit donc de les restructurer ; en outre toutes les exploitations ne se libèrent pas en même temps, ce qui complexifie le problème.
De plus, on constate également que nous sommes sur un terrain à dominante humaine, il ne s'agit pas seulement d'affaires économiques, la dimension patrimoniale liée à la terre est très présente ; il s'agit donc d'établir la confiance avec les cédants et surtout de leur montrer que l'on ne prend pas les décisions à leur place. Les personne-ressources doivent comprendre nos intentions, nous avons seulement un rôle de conseils et d'impulsion d'une dynamique.
En cela le fait de ne pas dépendre des élus et de ne pas être soumis à des lobbies est très important, cela permet d'une part de pouvoir bousculer certains a priori, et d'autre part de pouvoir agir plus aisément.
Cette étape nous a permis d'avancer à visage découvert vis-à-vis des exploitants, elle a été un pas nécessaire vers la construction d'une offre d'activité.
La rencontre avec les exploitants-cédants nous a permis dans un premier temps, d'avoir un lien avec ces personne-ressources et de connaître leur volonté d'implication dans la construction d'une offre d'activités agrirurale ; dans un second temps, ces rencontres nous ont permis d'établir des scénarios envisageables, sur lesquels pourraient reposer la construction de l'offre d'activités.
> Premières pistes envisageables
La rencontre avec les exploitants-cédants laisse apparaitre que dans deux cas, nous devons encore attendre, tout en rappelant aux futurs cédants que la transmission se prépare quelques années avant le départ à la retraite ; notre rôle est aussi de sensibiliser les propriétaires d'un fermier à la transmission agricole ; dans un cas, nous n'avons pas à intervenir ; restent deux cas pour lesquels nous pouvons agir dés à présent, en restructurant ces deux exploitations en une seule qui pourrait combiner aux quelques quotas laitiers restants d'autres activités économiques.
La confrontation avec les acteurs techniques et les réalités du terrains laissent apparaitre que l'on peut difficilement imaginer une création d'activité agrirurale reposant sur une complémentarité en bovin viande, car les droits à produire dans le département de la Loire sont quasi-inexistants et parce que nos deux exploitants ne disposent pas de PMTVA.
Dès lors, il apparait possible de compléter l'activité bovin-lait avec des activités caprines, ovines ou des activités atypiques mais aussi avec d'autres activités de type artisanal ou commercial.
Il est également possible d'envisager une association du type groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) avec un exploitant en place qui souhaiterait avoir un associé et qui souhaiterait dans le même temps diversifier les activités de sa structure. Nous tendrions alors vers l'agrandissement d'une structure qui génèrerait de l'emploi à plusieurs personnes et qui, de cette manière, diversifierait ses activités.
> Mobiliser et constituer le groupe local
La mobilisation des acteurs locaux est indispensable (élus, associations, populations, techniciens, agriculteurs...). Ils s'impliquent dans la validation de l'offre et dans l'accueil des porteurs de projets, du moment qu'ils sont informés et mobilisés dès le commencement du projet.
Le groupe local est un facilitateur, il est animé par l'acteur pivot, généralement composés entre cinq et quinze personnes-ressources, il permet d'identifier des potentiels, de valider les scénarios ; il doit être présent tout au long de la démarche.
Pour ce qui est de notre démarche de construction d'une offre d'activités agrirurale dans la commune de Saint Didier sur Rochefort, nous en sommes actuellement à cette étape de mobilisation des personnes-ressources. Toutes les personnes-ressources connaissent la démarche car nous leur avons présentées soit lors des entretiens CreActE pour les partenaires techniques, soit lors des rencontres avec les exploitants-cédants, soit encore lors des rencontres avec les élus.
Un premier groupe local devrait se réunir dans les prochains mois. Rappelons que la méthodologie de construction d'offre d'activité préconise d'organiser un groupe local pour chaque potentiel identifié. Le groupe local en question devra traiter de la construction d'une offre d'activité basée sur les deux exploitations non viables en l'état, que nous avons identifiés.
L'enjeu du groupe local est de définir, de façon collégiale, les contours de la construction de l'offre, puis de valider cette proposition afin de faire émerger de façon endogène l'offre d'activités.
En cela, il est particulièrement intéressant de rapprocher la notion de groupe local aux écrits de Jean-Pierre Jambes, "Territoires apprenants, esquisses pour le développement local", L'Harmattan, Paris,2001. On comprend alors tout rôle du groupe local dans l'action locale :
"A bien des égards, les problématiques du développement local oscillent ainsi entre rationalité située et sens pratiques traduits en prédisposition à l'action. L'un des postulats fondamentaux du développement local consiste en effet à utiliser le vecteur "proximité" ou, plus exactement, le vecteur "proxémie", pour engager un ensemble de processus individuels et collectifs. En ce sens, le local longtemps assimilé à l'espace de proximité, constitue potentiellement l'un des facteurs qui participent de la construction de la décision et de l'action. Le local produit et oriente tout d'abord des formes de rationalité."
Il convient, toutefois, de garder à l'esprit que certains auront des intérêts dans cette démarche. En effet, si l'on part de l'idée que pour construire l'offre d'activités agrirurale, on a besoin de libérer du foncier ; pour ce faire, il faudra dans le même temps améliorer les structures agricoles en place, tant par une opération de remise à plat du foncier que par le remembrement des structures.
-* Il nous conviendra alors d'être attentifs à ce que les agriculteurs en place qui participeront à la dynamique agrirurale, ne détournent pas la démarche que nous souhaitons faire émerger au profit du seul remembrement des exploitations et de l'agrandissement des structures, laissant, ainsi, aux porteurs de projets agriruraux du foncier de mauvaise qualité.
En effet, il s'agit garder à l'esprit que le monde agricole est stratégique notamment au niveau de la question foncière, il convient donc de bien comprendre les tenants et les aboutissants des actions que l'on met en place.
De plus, l'agriruralité, ainsi que nous l'avons vu dans la partie traitant du jeu d'acteurs, ne se résume pas au monde agricole : elle implique une ouverture au monde rural ; il convient donc d'intégrer dans le groupe local des acteurs qui participent aux dynamiques rurales locales afin de ne pas limiter les participants aux seuls agriculteurs, l'idée étant d'équilibrer les stratégies de chacun et de pouvoir aboutir à la construction de l'offre.
Parallèlement aux étapes d'émergence des potentiels et de repérage des candidats, la Maison des Services a également pour rôle d'accompagner les entrepreneurs ruraux dans leurs projets et dans leur intégration au territoire.
Au fur et à mesure de l'avancement du stage dans l'étape de repérage/recherche du candidat, les questions d'accompagnement du porteur de projets et de son intégration au territoire sont apparues.
Ces questions font parties intégrante de la construction du projet, elles demandent au chargé de mission de réfléchir à son rôle vis-à-vis du porteur de projets, et à se demander jusqu'où va l'accompagnement.
Il s'agit ainsi de construire des offres d'activités qui soient en lien avec le territoire ; un des moyens d'y parvenir est de permettre la rencontre des porteurs de projets avec le territoire.
Pour qu'un territoire soit attractif, il faut le faire connaître. Dans cette optique la Maison des Services cherche à faire se révéler des porteurs de projets, tout en permettant la rencontre du territoire et du candidat à l'installation.
Ces objectifs se concrétisent par deux actions :
- tout d'abord, la création de vidéos a pour objet de faire se révéler des porteurs de projets et
dans un second temps, de leur présenter les Monts du Forez ;
- la semaine de l'accueil a pour objet de confronter des porteurs de projets au territoire et à
l'entrepreneuriat rural.
Dans le cadre de l'organisation d'un forum de l'emploi local, la Maison des Services a envisagé de créer des outils vidéos : de synthèse et de présentation des opportunités locales d'emplois et d'activités existantes dans son périmètre d'intervention.
Parce qu'il s'agit d'un support dynamique, ces vidéos sont envisagées comme des outils qui doivent permettre de porter à connaissance du plus grand nombre, les occasions et les possibilités d'emplois et d'activités locales. Elles doivent permettre de faire se révéler des créateurs d'entreprises, tout en favorisant la rencontre du territoire et du porteur de projets.
Ces vidéos ont, ainsi, pour objets de :
- proposer des emplois ou des activités aux demandeurs d'emplois et favoriser la mobilité professionnelle ;
- offrir des idées et des possibilités de diversification ou de complément aux porteurs de projets et aux entreprises ;
- proposer des orientations aux étudiants, lycéens, collégiens ;
- valoriser les activités d'entreprises locales pour trouver et attirer des salariés ;
- informer les élus en vue d'alimenter les réflexions relatives aux projets de territoires ;
- faire se révéler des porteurs de projet.
Les vidéos ont été réalisées en mai-juin 2010 ; elles seront utilisées lors de manifestations extérieures telles que la foire de Limoges dans le but de présenter. Le territoire et lors de manifestations locales telles que les forums emplois local, la semaine de l'accueil mais aussi lors d'entretiens individuels de porteurs de projets à l'occasion, d'interventions collectives (formation à la création d'activités, cellule de reclassement, étudiants, collectivités locales...), ainsi que dans les dynamiques institutionnelles : CTEF, CLI..., en ligne pour une utilisation directe par les partenaires, etc.
Construites sur le modèle des vidéos "Bâtisseurs de possibles" présentés par Télé Millevaches, leur contenu permet d'une part, de démystifier l'activité en milieu rural et d'en présenter une image réelle, réaliste et attractive, et d'autre part, de présenter les opportunités actuelles et futures d'activités, les potentiels d'activités, ainsi que les avantages et les contraintes du territoire.
Les vidéos donnent la parole aux élus qui peuvent ainsi "raconter leur territoire", elles se structurent de la manière suivante :
> Une vidéo de quatre à cinq minutes de présentation du territoire et de "l'environnement d'accueil", en spécifiant la diversité des paysages, les axes routiers, la localisation stratégique du territoire, ses spécificités, les us et coutumes le territoire, les enjeux de fonds et en ouvrant sur thématiques d'activités phares. Il s'agit ainsi d'inciter au débat et d'ouvrir des perspectives.
> Des coups de projecteurs ciblés de deux à trois minutes chacun sur huit potentiels d'activités et d'emplois plus précis important dans le territoire (transmission reprise, agriruralité, métiers de la mécanique, activités autour des loisirs et du tourisme, les activités autour de la filière bois, de l'économie sociale et solidaire, les métiers de la santé, les services a la personnes).
Les vidéos présentent donc :
- les opportunités selon les secteurs d'activité vus dans leur globalité (l'enjeu de la
Transmission reprise, les problématiques agricole, le secteur de la santé, la filière bois, ...), allant du descriptif de l'offre et de la demande aux grandes évolutions du secteur .
- la typologie des potentiels d'emplois et d'activités (présentation d'une ou deux structures,
présentation des métiers que l'on peut exercer dans ces secteurs).- les conditions de réalisation et des outils mobilisables pour y arriver (validation d'acquis...).
Ces vidéos sont donc envisagées comme un outil de mobilisation des porteurs de projets, elles doivent notamment permettre de faciliter l'animation des séances de créativité, ainsi que l'animation des Semaines de l'accueil.
La "Semaine de l'accueil" dans les Monts du Forez est un évènement qui vise à recevoir sur le territoire durant trois jours, une quinzaine de porteurs de projets a la recherche d'une activité a reprendre ou à créer dans les domaines suivants : agriruralité, commerce, services, tourisme ou artisanat.
La "Semaine de l'accueil" n'est pas forcément destinée aux porteurs de projets résidant sur le territoire. Elle permet de détecter des candidats potentiels et de mettre à disposition des porteurs de projets, tous les moyens et les informations qui leur permettront de concrétiser leurs projets d'installation.
Il s'agit d'un concept que l'on appelle dans d'autres territoires "Session Jeunes Actifs57". Dans les Monts du Forez, la Semaine de l'accueil est organisée grâce à la Maison des Services. Elle offre aux porteurs de projet et a leurs conjoints l'opportunité d'un appui méthodologique et technique personnalisé ainsi que la découverte du territoire par la rencontre avec des professionnels et des élus locaux. La mise en place de tels événements passe par la structuration de l'offre territoriale ; mais elle est aussi consacrée en grande partie à l'installation de partenariats entre les acteurs locaux puisque l'opération s'appuie sur les différents outils proposés par les structures associées aux projets.
Le programme est constitué d'une présentation globale du territoire d'accueil en présence des élus, de temps d'échanges entre les porteurs de projet et des personnes ressource, de séances
57 SAUNIE G., SOULIER M.L., Les ADASEA : un outil de promotion de l'agriculture et de proximité entre les acteurs du monde
de créativité concernant les projets, de rencontres avec les consulaires et les institutions concernés et de visites des potentiels.
Ce type d'évènement est bénéfique pour tous les acteurs car les attentes sont partagées :
- pour les porteurs de projet : il s'agit de découvrir un territoire d'accueil, d'être accompagné dans la construction de son projet, d'échanger et de tisser un réseau de partenaires.
- pour le territoire : il s'agit de rencontrer des porteurs de projet, de cerner leurs besoins, de capter des projets en phase avec l'offre du territoire, de développer la culture d'accueil sur un territoire et surtout de réussir l'installation d'activités.
- pour les acteurs : il s'agit de mettre en place des partenariats entre les acteurs impliqués dans l'accompagnement. Ces actions peuvent faciliter la communication et la transmission des informations entre les acteurs ; elles sont aussi une opportunité offerte aux territoires pour que, utilisant leur rôle structurant ils passent à l'action grâce à l'installation d'activités économiques en milieu rural.
La semaine de l'accueil est un atout majeur pour le territoire, car elle permet le rapprochement des consulaires et des organismes sectoriels, du fait qu'elle les rassemble physiquement en un lieu. Adoptant la démarche inverse du parcours classique (le porteur de projet va à la rencontre individuelle des organismes), ce sont les organismes qui se rassemblent en un lieu pour un projet particulier.
De plus, la semaine de l'accueil est un lieu d'échanges, c'est une bonne façon pour les porteurs de projets de rencontrer d'autres porteurs de projets. Cela peut leur permettre de connaître d'autres personnes. Moins isolé, le porteur de projet ne fait plus face d'une façon solitaire à ses difficultés de lancement.
Réalité essentielle si l'on suit le résonnement que nous avons tenu plus haut, la semaine de l'accueil apparait ainsi comme un évènement qui permet la fusion des acteurs impliqués et non impliqués, dans une même démarche de valorisation du territoire et d'accueil des porteurs de projets. Il semble aussi que ce soit l'occasion unique de donner la parole aux acteurs non impliqués, qui nous l'avons vu plus haut ne sont pas identifiés dans les démarches d'accompagnement.
En effet, actuellement les acteurs non impliqués dans l'accompagnement des porteurs de projets agriruraux n'interviennent pas lors de la semaine de l'accueil. Seul l'EPLEFPA de RoanneChervé participe à cet évènement. On peut, toutefois, qualifier cette participation de passive, car elle se limite à faire assister des élèves à la semaine de l'accueil. Nous pourrions imaginer une participation plus active de la part de l'EPLEFPA avec par exemple une intervention en lien avec le Point Accueil Installation de la Chambre d'Agriculture concernant les formations agricoles et les modalités d'installation.
Au regard des éléments soulevés plus haut qui concernent la marginalisation des acteurs non impliqués et non identifiés, nous pourrions également imaginer impliquer plus largement les acteurs lors de cet évènement. Tel est le cas, par exemple des notaires qui pourraient intervenir sur les questions juridiques de droit rural. C'est le cas aussi des banques qui pourraient intervenir sur la question des prêts.
Enfin, ce serait également l'occasion d'offrir à des créateurs d'entreprise agrirurales la possibilité de jouer en raison de leur expérience, un rôle d'expert dans les conseils aux porteurs de projets. Nous l'avons vu ces porteurs de projets sont souvent en recherche de conseils auprès des créateurs d'entreprise, il semble que cet évènement soit l'occasion de permettre la rencontre des porteurs de projets et des créateurs d'entreprises, peut-être en vue de constituer un réseau professionnel ; car les réseaux ont un rôle a jouer dans la construction d'une offre d'activités.
Il est nécessaire de prendre en compte lors de l'étape de recherche d'un candidat, l'importance du projet de vie du porteur de projets vis-à-vis du projet professionnel.
Pour les projets agriruraux, il est en effet important que le porteur de projet identifie bien ses motivations et ses objectifs, afin de les comparer avec la réalité du territoire. Il s'agit, ainsi, de vérifier l'adéquation du porteur de projets entre ses capacités et les besoins du territoire.
Effectivement, comme cela a déjà été signalé, les activités mises en oeuvre sont souvent fortement dépendantes du contexte territorial (vente directe, accueil, ...), c'est en démontrant ses capacités à pratiquer les activités envisagées et en dévoilant le potentiel de ces activités que le porteur de projet pourra justifier de sa crédibilité face aux financeurs.
En ce qui concerne l'accompagnement, les porteurs de projet sont parfois appelés à aller chercher les informations par eux mêmes, en raison du manque de reconnaissance face auquel ils se trouvent dans les structures d'accompagnement classiques (chambres consulaires, ...). Il est clair que le porteur de projet doive véritablement porter son projet pour prouver ses motivations.
La construction d'une offre d'activité passe forcément par la recherche d'un candidat ; si son installation doit permettre de créer une activité économique sur le territoire, la pérennité du système est liée à l'intégration du candidat au territoire.
Au contact des entrepreneurs agriruraux lors des entretiens CreActE, on s'est rendu compte de l'importance que jouent les réseaux sociaux et les réseaux professionnels dans la construction d'une offre d'activité agrirurale. Les réseaux sont des facilitateurs et en cela ils conditionnent la pérennité dans le temps des offres d'activités.
Cette idée a été présente tout au long du stage car à travers la question des réseaux on aborde la question de la réduction des distances sociales immatérielles qui permettent d'innerver les sociétés locales, de favoriser la créativité, de faciliter l'accès à l'information et à la formation, tout en renforçant les capacités de négociations d'une profession.
Nous avons notamment eu a coeur de garder a l'esprit le foisonnement des actions et des dynamiques mises en place à travers le réseau Oxalis.
L'insertion dans les réseaux professionnels joue un rôle non seulement pour l'insertion sociale et la reconnaissance professionnelle, mais peut également s'avérer essentielle dans certains domaines d'activités pour se tenir au courant des évolutions techniques et réglementaires, c'est ce que nous avaient notamment confié les représentants de la coopératives d'activités et d'entrepreneurs-salariés Oxalis en mars 2010 lorsque nous les avions rencontré avec le Master ADR.
Les réseaux professionnels sont capitaux car ils permettent aux entrepreneurs d'avoir des réponses spécialisées par rapport à des questions techniques ; ils permettent aussi de trouver des formations adaptées. Cette dimension est d'autant plus capitale avec l'agriruralité puisque celle-ci touche à des activités et des métiers très variés. Cela explique la difficulté de bien s'informer sur toutes les évolutions. L'autre intérêt noté est que le réseau professionnel permet d'obtenir de la part de ses collègues une reconnaissance professionnelle, cet aspect est très important car, nous l'avons
vu, la profession agricole, enfermée dans les modèles de productions bovins ne reconnait pas les systèmes agricoles "sans terre".
Oxalis est une entreprise qui cherche à favoriser la participation du plus grand nombre aux processus de décisions dans les orientations et préoccupations de la coopérative. Cette intention est une démarche en cohérence avec la vocation première d'Oxalis qui est d'inventer des modes d'organisation oi chacun est acteur et de créer des rapports au travail respectueux des personnes (pas de lien de subordination, par exemple). Le fonctionnement d'Oxalis est régi par une charte. La démocratie participative n'est pas une fin en soi, elle est un moyen au service d'une société portée par ses membres.
Figure 31 : Logo Oxalis
Source : http://www.entrepreneur-salarie.coop
L'objectif principal d'Oxalis est, notamment, de renforcer les chances de succès de création d'activités par une action collective solidaire. Il s'agit également de respecter l'autonomie des personnes et de leurs activités ; il s'agit encore de fournir la possibilité d'échanger des compétences, du travail, des moyens techniques, juridiques et commerciaux et de créer une dynamique qui génère des potentiels plus importants pour chacun (formation, contacts, ouverture, ...) grâce au principe coopératif.
Oxalis accueille toutes les activités de production de biens ou de services ou à caractère commercial qui sont conformes à la législation et qui ne présentant pas de contraintes spécifiques liées a la réglementation (assurances, exigence de diplômes ou d'inscription a une association professionnelle, ...). Le cas échéant, la personne doit maîtriser le savoir-faire de son activité et avoir les diplômes requis. Sont refusées par principe éthique, les activités contraires au respect des personnes, de l'environnement et des règles normales de la concurrence. Notons, que les personnes exerçant des activités liées aux métiers du bâtiment sont orientées vers le réseau Cabestan58.
Ainsi, en 1987, un groupe de personnes a posé les bases des premières initiatives constituantes d'Oxalis à la ferme de Broissieux à Bellecombe-en-Bauges (Savoie), à partir d'un ancrage rural, sur le thème « vivre et travailler autrement ». Des idées et des projets d'activités nouvelles émergent : découverte a la nature, éducation a l'environnement, animation culturelle, écoconstruction, élevage et promenade en âne. Leur intention était de construire de nouveaux rapports au travail qui privilégiait la coopération, la solidarité, la mutualisation de moyens, la participation active, la créativité, l'épanouissement de la personne et le respect de l'environnement.
58Coopérative d'activités dans les métiers du bâtiment : http://www.cabestan.fr/
Le projet fédérateur prend corps avec la création d'une association constituée en 1992 sous le nom d'Oxalis puis en 1997 avec le montage de la Scop Société à responsabilité limitée du même nom pour la création et le développement de « pluriactivité » dans différents secteurs : agriculture, tourisme, formation professionnelle, artisanat et culture. La rencontre de plusieurs personnes en phase de lancement d'entreprises qui demandaient une aide au démarrage a conduit à la mise en place d'une session de formation d'entrepreneurs d'une quinzaine de participants. Au fil du temps, le projet a évolué et s'est transformé, mais l'intention de départ reste le fil directeur de l'action d'Oxalis. Ainsi, dès son démarrage, l'association a conduit différentes actions d'accompagnement de projets, et en particulier sur le massif des Bauges, destinées à favoriser le développement local.
Ce travail a abouti à une réflexion sur les meilleurs moyens à mettre en place pour apporter des réponses collectives et solidaires, a partir d'un constat réalisé sur les principaux freins à la création et à la pérennisation d'activités économiques et a partir du repérage d'un certain nombre de besoins. Avec l'aide de l'URSCOP, (union régionale des scop) Oxalis se transforme en 2001 en adoptant le fonctionnement actuel de la coopérative d'entrepreneurs salariés, passant d'un fonctionnement initial très collectif de la SCOP Oxalis (pluriactivité, polyvalence, co-gestion, mutualisation des chiffres d'affaires,...) a un fonctionnement de coopérative d'activité et d'entrepreneurs-salariés (autonomie et responsabilisation des personnes avec un fonctionnement de mutualisation et de coopération).
Depuis son origine, Oxalis a pour choix éthique de créer un autre type de relation au travail et au pouvoir (engagement, responsabilité, pas de pouvoir individuel exercé sur les autres...). Ainsi, l'une des dimensions de la coopérative repose sur la place importante accordée à la participation du plus grand nombre aux décisions. Des moyens sont mis en oeuvre pour que chacun puisse comprendre les enjeux pour participer aux prises de décision. Celles-ci font l'objet d'un processus de concertation et sont prises par consensus.
Actuellement une cinquantaine d'activités existent : sculpteur de pierre, confiseur, musicien, paysagistes jusqu'aux psychanalystes ou expert en développement durable. La plupart sont en région Rhône-Alpes mais une extension de l'activité est déjà effective en Auvergne, et le Limousin. Oxalis est d'ailleurs membre de l'association de coopératives d'activités (COPEA) qui regroupe nationalement des structures de même type.
Des groupes de travail permettent à chacun de participer à la vie de la coopérative sur des thèmes centraux : la communication (comox), la formation (formox), le développement (develox), la démarche environnementale (paradox), l'ingénierie sociale, tandem (égalité homme/femme). La gestion est dévolue au Conseil d'administration composé de personnes qui s'engagent juridiquement dans les choix de gestion. Dans chaque groupe projets, un administrateur est présent pour faire le lien entre les projets qui naissent et le budget de la coopérative. À partir de ces groupes ou à partir des séminaires naissent des projets ou des pistes d'actions qui peuvent engendrer la création de nouveaux groupes.
Oxalis est à la fois ancrée dans le massif des Bauges, participant a la création d'activités sur ce territoire rural de montagne, et est à la fois impliquée dans de nombreux réseaux associatifs nationaux et régionaux. Elle privilégie la proximité géographique et la proximité culturelle (valeurs, type d'activités...) en accueillant des personnes de tout horizon, c'est notamment ce que nous voyons sur le schéma suivant :
Figure 32 : Instance de la coopérative
Source : http://www.entrepreneur-salarie.coop/
Au niveau du fonctionnement, le principe de base repose sur "l'intelligence collective" ; bien au-delà de l'autogestion classique, chaque coopérateur participe a la vie de l'entreprise en apportant ses idées qui viennent enrichir la discussion générale avant de prendre des décisions lorsque le sujet est mûr.
En parallèle, chaque personne est responsable de la création, du développement et de la pérennisation de son activité sans pour autant être isolée. Chacun est déchargé des tâches comptables et administratives ; les entrepreneurs débutants bénéficient d'une antériorité juridique et d'une solidité économique grâce a la solidarité de la coopérative ; chaque entrepreneur bénéficie du statut social du salarié. Tous exercent leurs métiers en toute indépendance et tous sont reliés à d'autres créateurs.
A travers la question des réseaux, on aborde ainsi la question de la pérennisation des activités sur le long terme. Ce type d'organisation permet notamment aux créateurs d'entreprise de se sentir soutenus. En effet, si pour s'installer sur un territoire il est nécessaire d'avoir des affinités
avec les aménités de ce dernier, il faut reconnaitre que les réseaux humains et professionnels conditionnent bien souvent l'intégration professionnelle et sociale, et permettent de fixer les entrepreneurs ruraux sur le territoire.
Si l'aspect humain ne génère aucun revenu il parait tout de même essentiel de s'en soucier car il conditionne l'attractivité d'un territoire ainsi que l'implication des entrepreneurs dans les dynamiques locales. En cela, on peut se demander si le rôle de l'agent de développement n'est pas justement de favoriser la création de synergies locales ainsi que l'insertion territoriale, cette question nous a conduits à mettre en action notre raisonnement à travers une rencontre agrirurale.
Des entretiens CreActE réalisés auprès des créateurs d'entreprises agrirurales, il est ressorti un sentiment d'isolement de ces derniers, par rapport au reste de la profession agricole ; ils avouent que l'échange d'informations entre professionnels est nécessaire pour progresser sur leur exploitation. On ressent le même besoin du coté des porteurs de projets qui sont aussi demandeurs d'échanges sur des expériences professionnelles concrètes.
Du coté de la Maison des Services des Monts du Forez, une problématique ressortait en juin 2010, qui était de maintenir dans le temps la mobilisation des porteurs de projets rencontrés lors des entretiens CreActE et intéressés par la semaine de l'accueil en octobre.
Cette partie pose également la question du rôle que doit jouer un agent de développement généraliste. Dans la mesure où il ne peut pas forcément répondre à des questions techniques, il agit souvent comme une porte d'entrée qui ré-oriente les entrepreneurs vers les structures compétentes ; ayant une connaissance fine du territoire en raison de la veille territoriale qu'il y mène, il a aussi pour rôle d'établir des liens entre les diverses connaissances qu'il a. Dans le cadre agrirural, on peut notamment se demander s'il n'a pas pour rôle de faire du lien entre les entrepreneurs et de créer des synergies au niveau du territoire, afin de favoriser la pérennité des systèmes et l'insertion territoriale des créateurs d'entreprise. Nous l'avons vu : la mise en place de dynamiques culturelle et sociale sur un territoire n'y favorise pas forcément la création de richesses sur le court terme. Toutefois, elle est nécessaire au renforcement de l'attractivité du territoire, pour faciliter l'insertion territoriale et sociale du créateur d'entreprise agrirural et pour favoriser la pérennité du système face au mépris des locaux pour la notion d'agriruralité.
Ainsi, parce que la mise en place de telles dynamiques ne peut pas être impulsée par un seul entrepreneur rural, il sera indispensable de dynamiser les réseaux humains et professionnels en créant des synergies locales.
Ce sont ces constats et ces interrogations qui nous ont conduits à organiser une rencontre agrirurale le 1er juillet 2010 en fin de journée (de 17h30 à 20h00), à la ferme de la Gilbernie (commune de Noirétable).
L'idée était d'aménager un temps d'échange convivial et productif autour d'un goûter à la ferme, dans le but de travailler deux points :
- La confortation d'un "réseau technique relationnel" entre porteurs de projets et les créateurs d'entreprises agrirurales ;
- Le repérage des besoins des porteurs de projets agriruraux, en vue d'adapter le programme de la semaine de l'accueil.
Pour ce faire, il s'agissait de mobiliser :
- Cinq porteurs de projets qui se sont montrés intéressés par la semaine de l'accueil ;
- Trois ou quatre créateurs d'entreprises nouvellement installés ;
- L'ADASEA du Puy de Dôme afin d'identifier des porteurs de projets limitrophes qui sont dans des
démarches d'installation ;
- Le PNR Livradois Forez afin de mettre en évidence des créateurs d'entreprises limitrophes ;
- Quelques étudiants de Roanne Chervé.
La rencontre agrirurale s'est déroulée comme suit :
Tableau 9 : Déroulement de la journée agriruale
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Source : Lucile REBOUL - David COMMEAT - juin 2010
David COMMEAT a animé le temps d'échange, Lucile REBOUL et Marie-Laure SOULIER ont encadré la rencontre.
Au travers cet échange, il s'agissait de réinvestir les outils d'animation et de présentation du territoire (vidéos du territoire) que nous avons vu plus haut. Il s'agissait aussi de créer une miniature de la Semaine de l'accueil spécialisée sur l'agiruralité pour permettre la rencontre des entrepreneurs agriruraux et favoriser la création de dynamiques locales.
Il faut reconnaitre que ce temps de partage d'idées n'a pas permis d'atteindre tous les objectifs fixés. Lors de la mobilisation des entrepreneurs agriruraux pour cette rencontre, cinq entrepreneurs s'étaient engagés à être présents, en revanche seuls deux d'entre eux avaient répondu favorablement à notre invitation, les autres étaient pris par diverses activités agrirurales liées à la saison (organisation de diners agriruraux, livraisons...). Au final, deux créateurs d'entreprises agrirurales ont participé à la rencontre alors qu'un seul porteur de projets agrirural avait fait le déplacement. Par la suite, seul un couple s'est excusé de n'avoir pu assister à la rencontre en raison d'un empêchement personnel.
Ainsi, cette rencontre décevante, laisse apparaitre le fait que les créateurs d'entreprises sont très consciencieux et intéressés par ce type d'initiatives toutefois, leur temps est compté
notamment en période estivale. En revanche, en ce qui concerne les candidats à l'installation, étant donné que leurs projets sont encore flous et qu'ils ne connaissent pas encore le lieu de leur implantation, ils ont moins tendance à s'impliquer dans des initiatives locales.
Ce constat autorise à poser la question suivante : faut-il, au final, véritablement tout faire pour lever les freins à l'installation et faciliter l'intégration des porteurs de projets?
En effet, on peut se demander si finalement les freins que rencontrent les porteurs de projets, tant au niveau foncier, qu'au niveau juridique et au niveau de leur intégration ne sont pas un passage obligé pour les faire murir avant qu'ils ne deviennent des créateurs d'entreprises responsables.
La réflexion que nous avons menée dans le stage, à partir de l'observation du milieu et de l'écoute des entrepreneurs agriruraux, puis que nous avons expérimentée sur le terrain, laisse apparaitre que ces freins, notion pourtant à connotation négative, qui semblent au départ limitants pour les porteurs de projets agriruraux, sont sans doute ce qui fait la force des entrepreneurs agriruraux car ils prouvent leur motivation dans l'action.
Le territoire et son contexte, le jeu acteurs et les questions juridiques génèrent parfois des freins qui sont souvent des résistances au changement ou à l'adaptation et les handicapent le créateur d'entreprise. Toutefois ces freins sont l'occasion pour le porteur de projets de faire ses preuves. En cela les freins peuvent apparaître comme un processus de régulation.
"_ Faut-il, selon vous, lever tous les freins?
_ C'est vrai que l'on a un climat rude, la vie est plus facile au quotidien quand on a pas à déblayer la neige pour amener les enfants à l'école. Moi je trouve que c'est un avantage parce que ça sélectionne un peu les gens et puis ça a son charme en même temps c'est pas évident, on a vu des gens arriver avec des petits projets, ils restent un hiver ou deux et partent quand ils n'arrivent pas à chauffer la maison."
Entretien avec un créateur d'entreprise agrirural - Noirétable - 10 juin 2010
Face à cela, le candidat à l'installation doit porter son projet et doit redoubler d'efforts, cette démarche est la première preuve de motivation qu'apporte le futur créateur d'entreprise, par là, il prouve sa capacité à être un entrepreneur rural. C'est tout à fait dans cet esprit que plusieurs créateurs d'entreprises agrirurales nous ont confié : "au départ, personne ne croyait à notre projet, il faut avoir des tripes pour se battre!"
L'esprit d'entreprise est une notion difficile à cerner de manière rigoureuse. Au regard de l'étude que nous menons, des éléments ressortent tout de même, le gout d'entreprendre, de prendre des risques apparaissent comme un "individualisme dans le partage". Les entrepreneurs sont prêts à partager leurs expériences, toutefois ils ne veulent pas des contraintes d'une association ou bien d'un réseau trop structuré, trop formel.
Il est marquant de constater également que ces créateurs d'entreprises agrirurales sont des individus qui développent une stratégie souvent surprenante qui va à l'encontre de ce que la société à l'habitude de voir : cela leur donne bien évidemment leur aspect atypique. Toutefois, un paradoxe apparait, ces entrepreneurs agriruraux font reposer leurs projets sur certaines valeurs traditionnelles (la famille, le travail, ...) : ils souhaitent être dans la norme sociale, ils ne recherchent pas la marginalité, pourtant ce sont des individus qui à travers la mise en avant des qualités personnelles et
de la réussite individuelle cheminent dans un sens contraire aux normes fondamentales des sociétés locales.
L'entrepreneur rural apparait au yeux des autres comme immodeste ; de ce fait, il suscite souvent les jalousies et se heurte à la sensibilité collective de son groupe d'appartenance parce qu'il remet en cause l'exigence de la conformité qu'imposent les sociétés locales.
Au final, on pourrait décrire l'entrepreneur rural comme un individu qui assume ses choix face aux autres avec le dessein de développer et faire fructifier son patrimoine dans un contexte social qui est toutefois plus ouvert et plus fluide qu'auparavant. Cependant, cet esprit est nécessaire pour que le porteur de projets défende son projet face à des acteurs qui n'y croient pas. En surmontant les freins qui sont sur son parcours à l'installation il prouve qu'il est capable d'affronter l'adversité ; pour l'entrepreneur rural il n'y a pas de problème, il n'y a que des solutions.
La notion même d'agriruralité a besoin de ces entrepreneurs car ils sont la preuve que des individus peuvent s'en sortir financièrement en assumant ce mode de développement. En effet, l'agiruralité se construit à partir des entrepreneurs agriruraux, ce sont eux qui peuvent par leurs actions habiliter ce concept dans la profession car celle-ci apporte sa reconnaissance à ceux qui savent soit contourner les freins, soit dépasser les obstacles.
De même qu'une crise permet de remettre à plat un système en vue de mieux le relancer, un frein peut constituer une opportunité pour le développement d'un projet, voire en être le moteur.
En effet, dans le cas d'une "installation sans frein", il n'y a pas forcément d'innovation, alors qu'une offre d'activités qui a dû surmonter plusieurs freins à l'installation sera beaucoup plus forte et plus créative. Le contournement ou le dépassement des freins nécessite de la ruse, de la pugnacité voire de la créativité, de la part du porteur de projets.
Le schéma ci-dessous représente l'idée selon laquelle un frein permet une phase d'émergence de la créativité jusqu'à ce que l'idée de contournement se mette en place. Une fois le frein levé, l'entrepreneur est plus confiant en lui-même.
Figure 33 : Le rôle des freins dans la construction d'offre d'activités
Source : Marie-Laure SOULIER - août 2010
Effectivement, on constate qu'une fois le ralentissement effacé, on aura une accélération du projet car le freinage aura pu être source de réflexion et de créativité et il aura fourni plus de force au porteur de projets car il aura prouvé qu'il était capable de passer outre la difficulté.
Prenons l'exemple d'une créatrice d'entreprise agrirurale ayant un système de production hélicole ; cette jeune femme souhaitait créer son emploi en milieu rural, elle s'est orientée vers
l'agriruralité seulement elle ne disposait que de deux à trois hectares de terres. La question du foncier lui est apparue au premier abord comme un frein ; puis, faisant preuve d'originalité, elle a rapidement su s'adapter à la contrainte en mettant en place un élevage d'escargots, qu'elle valorise avec des visites à la ferme, de la vente directe et des dîners à la ferme.
Ce qui au départ été un frein à l'installation a permis d'innover dans l'offre d'activités. Il a notamment permis de dépasser les limites de la normalité.
C'est ce constat qui nous amène au postulat suivant : les freins peuvent être des facteurs favorables pour la construction d'offre d'activités agrirurales car d'une part ils permettent de réguler le nombre de porteurs de projets et d'autre part, ils sucitent le dépassement des idées afin de construire, du projet à la réalité, des offres d'activités agrirurales rentables.
Les entrepreneurs agriruraux s'insèrent ainsi de la construction de leur rêve à la réalisation de leur projet dans un système territorial constitué de "filtres".
La boucle est bouclée, lorsque que l'on fait le lien entre le programme de recherche CreActE et le travail de terrain que nous avons mené dans les Monts du Forez.
En effet, on s'aperçoit que le porteur de projets qui a suivi le parcours à l'installation agrirural pour devenir un créateur d'entreprise, s'insère dans un système territorial et contribue à son dynamisme. La figure suivante a pour dessein d'expliquer ce fait :
Figure 34 : Encastrement de l'entrepreneur agrirural dans le territoire
Source : SOULIER Marie-Laure - août 2010
Cette figure représente à partir du travail que nous avons conduit dans les Monts du Forez, un système dans lequel s'insèrent les aménités du territoire (paysage, accessibilité, l'accueil, le
foncier, ...), les acteurs ainsi que le cheminement que suit le porteur de projet avant de devenir un créateur d'entreprise.
Dans ce système, le territoire et les acteurs sont considérés tels "des filtres" qui vont soit réguler le nombre de porteurs de projets par les freins qu'ils engendrent (contraintes climatiques, freins institutionnels, pessimisme sur l'agriruralité, ...) soit au contraire créer une émulation et un dépassement chez l'entrepreneur agrirural.
Attiré par le territoire, son potentiel et ses attraits, le porteur de projet va restituer de l'énergie à ce territoire par ses actions créatrices de dynamiques, lesquelles dynamiques contribueront ultérieurement à l'attractivité du territoire ainsi qu'à la construction d'offres d'activités.
S'il y a des potentiels dans tous les territoires, tous ne sont pas valorisés de la même façon en cela les acteurs du territoire jouent un grand rôle, ils ont pour mission de créer sur le territoire de la vitalité, du mouvement, de l'émulation, en soutenant et en accompagnant des projets, des porteurs de projets et en contribuant à la construction d'offres d'activités.
Il en va du système en lui-même, sans acteur un territoire ne vit pas ; sans dynamique et sans fluctuations, le système est immobile. Si le territoire "physique" peut contribuer à attirer des personnes et peut contribuer à leur installation, l'aspect humain a un grand rôle à jouer dans l'accueil et dans la présentation du territoire.
SYNTHESE
Nous l'avons vu, des dispositifs financiers et visant à favoriser l'accès au foncier existent, tous cherchent à faciliter les installations agricoles. Ils constituent des solutions aux freins que peuvent rencontrer les candidats à l'installation. Toutefois au regard de l'étude menée, on peut se demander s'il est pertinent de chercher à effacer les freins à l'installation car ils permettent, au contraire, de faire murir les porteurs de projets et de les emmener plus loin dans leurs réflexions.
Finalement, nous pouvons nous demander si le rôle de l'acteur impliqué dans l'accompagnement n'est pas plutôt de suivre, de soutenir et de conseiller le porteur de projet dans les turbulences qu'il traverse pour l'amener à dépasser par lui-même les freins qu'il rencontre.
A travers cette partie on comprend que le territoire est un système en action qui véhicule des images grâce aux acteurs qui y vivent ou y travaillent. On comprend mieux alors la stratégie actionniste des Sites de Proximité car sans actions le territoire est inerte.
La construction d'offre d'activités agrirurales contribue, en effet, au dynamisme du territoire car elle fixe des habitants sur un espace et contribue à créer des activités économiques en milieu rural.
Ainsi, tout l'enjeu du stage fut, ainsi, d'articuler le travail de recherche concernant l'encastrement territorial et les facteurs favorisant la création d'activités avec le travail professionnel de construction d'offres d'activités. Le figuré suivant récapitule les actions conduites au regard de la méthodologie de la construction d'offre d'activité.
Précisons que l'étape d'émergence va s'achever à l'automne, avec la constitution du groupe local, les éléments permettant la construction d'une offre d'activités étant repérés. Parallèlement à cela, la recherche du candidat est déjà bien avancée, avec le repérage des porteurs de projets.
Auteur : Marie-Laure SOULIER - août 2010
Figure 35 : Synthèse du travail mené
Le parcours du porteur de projets, avant qu'il puisse devenir un créateur d'entreprise agrirural est semé d'embûches, il doit surmonter les freins qui se présentent sur son chemin et prouver qu'il est un entrepreneur rural capable de gérer une entreprise.
Si les difficultés sont déjà nombreuses pour un candidat à l'installation agricole du fait du contexte local, nous y reviendrons avec le schéma de l'encastrement territorial, ci-dessous, les difficultés pour un porteur de projet agrirural sont renforcées du fait de la notion même d'agriruralité. En effet, cette dernière est peu connue dans le détail et elle est surtout non reconnue par le milieu professionnel agricole qui l'assimile à une marginalité bien que dans le contexte agricole actuel, transpercé par des crises économiques et sanitaires successives, place les logiques de combinaisons d'activités comme porteuses d'avenir.
La combinaison d'activités semble encore écartée par les acteurs impliqués dans l'accompagnement, parce qu'elle ne répond pas à un modèle de développement unique et parce qu'elle nécessite de maîtriser plusieurs savoir-faire. Ainsi, elle transgresse les logiques professionnelles traditionnelles, en se situant au frontières de plusieurs métiers. C'est cela qui explique aussi l'écartement des acteurs non impliqués vis-à-vis du montage de projets agriruraux.
Pourtant, la modernité de la combinaison d'activités se trouve dans la manière de les combiner et d'échanger sur ces activités ; il ne s'agit pas aujourd'hui de revenir à la combinaison d'activités qui était pratiquée dans les campagnes françaises avant 1950. Il s'agit, en fait, de produire autrement des richesses en misant sur la qualité des produits, en utilisant des techniques modernes et en échangeant sur ces pratiques (dialogue, retour d'expériences, comparaison des territoires).
Au vu des entretiens menés on se rend compte qu'une exploitation agriruale constitue un système qui se bâtit dans le temps, cependant, l'activité agricole n'est pas forcément de petite taille, tout dépend du nombre de personne qui travaille sur l'exploitation. Il convient plutôt d'affirmer que les activités sont adaptées aux unités de travail humain qu'il y a sur l'exploitation.
L'agiruralité est une forme d'entreprise rurale qui permet de produire des richesses économiques, tout en favorisant l'épanouissement du créateur d'entreprise qui peut en développant plusieurs activités, orienter certaines d'entre elles vers ses passions (théâtre, résidence d'artiste, gouter-café jazz...). L'entrepeneur agrirural peut ainsi s'adonner a elles ou réinvestir une expérience passée à travers les activités qu'il développe tout en travaillant. On note ainsi que souvent il n'y a pas de coupure entre une expérience professionnelle antérieure et le projet développé, le créateur d'entreprise réinvestit ses compétences dans son projet.
D'autre part, une entreprise agrirurale permet de créer des dynamiques sociales ou culturelles au niveau local. Si ces dernières ne génèrent pas de revenus dans l'immédiat, il convient toutefois de s'en soucier car elles permettent au porteur de projets de s'investir dans la vie locale afin d'y être intégré ; elle peut à terme être source d'attractivité pour le territoire, où il sera peut être possible sur le long terme de construire une offre d'activité culturelle reposant sur les bases établies par les agriruraux. En cela, les systèmes agriruraux optimisent les potentiels locaux parce qu'ils sont fondés sur la valorisation des ressources locales et parce qu'ils permettent de créer du lien social.
A travers cette étude nous avons, mis en lumière deux systèmes :
-) Le système territorial (voir le schéma de l'encastrement territorial dans les Monts du Forez cidessous) :
Figure 36 : Schéma CreActE de l'encastrement territorial
Source : SOULIER Marie-Laure - juillet 2010
-) Le système de l'exploitation agrirurale qui s'insère dans le système territorial. L'exploitation agrirurale commence ainsi par le développement d'une production agricole et une diversification des activités (diversification agricole, artisanale et agro-touristique), puis au fil du développement de l'entreprise viennent se greffer d'autres activités commerciales et d'animations. Il s'agit d'un développement systémique dans le temps.
L'agriruralité doit faire ses preuves mais envisagée ainsi, elle peut permettre de réinsérer au coeur de la ruralité, la figure de l'agriculteur longtemps mise de coté, car enfermée dans un rôle unique de production. En effet, en créant des dynamiques culturelles et sociales et en produisant des matières premières, l'entrepreneur agrirural est au centre de la ruralité ; il convient ainsi d'élargir l'agriculture au monde rural. Les entrepreneurs agriruraux qui ont réussi à exploiter les ressources locales (et il y en a dans les Monts du Forez), sont les symboles de l'opportunité que représente l'agriruralité pour les territoires.
Nous noterons également l'absence ou la rareté de références homogènes et argumentées concernant les projets agriruraux, de plus, bien souvent les acteurs du milieu retiennent les échecs et non les réussites. Cela est préjudiciable aux porteurs de projets, à la fois pour le pilotage de leur
projet et pour l'accès a des ressources indispensables (foncier, finances,...), afin que leur rêve devienne réalité.
Ainsi, le porteur de projets qui développe un rêve au commencement de son projet va passer différents filtres qui vont générer des freins, ces freins sont les régulateurs du système. S'ils peuvent être des obstacles pour les candidats à l'installation, ils peuvent également leur permettre de se dépasser dans la construction de leur offre d'activités.
L'acteur impliqué dans l'accompagnement se doit d'être objectif et honnête pour aider le porteur de projets agrirural à clarifier ses réflexions. Il se doit également de s'adapter à chaque projet et à chaque entrepreneur rural, sans chercher à reproduire de modèle. Il a un rôle de mise en lien avec les autres acteurs du territoire et avec d'autres créateurs d'entreprises pour proposer des retours d'expériences.
Toutefois, on ne pas tout attendre du développement spontané du territoire ; il est parfois nécessaire de pousser le destin et d'initier le développement par des actions volontaristes. Le travail de construction d'offres d'activités agrirurales sur la commune de St Didier sur Rochefort vise cet objectif. Il s'agit "d'amorcer la pompe agrirurale" à travers cette étude de cas avant de pouvoir reproduire l'exemple ailleurs. Pour commencer ce travail de construction d'une offre d'activités agrirurales, nous avons choisi des exploitations agricoles non viables et non reprenables en l'état. Effectivement, si la question de la transmission et de l'agrandissement des exploitations est déjà importante à l'heure actuelle (en témoignera sous peu le futur recensement agricole), avec des problématiques financières importantes car une exploitation viable est actuellement inabordable pour un jeune, cette question sera d'autant plus cruciale dans quelques années avec le départ à la retraite de nombreux agriculteurs.
Il s'agit donc aujourd'hui de sensibiliser les futurs cédants à la question de la transmission, et de remobiliser les agriculteurs pour qu'ils favorisent les installations agricoles ; ces derniers ayant un grand rôle à jouer dans cette problématique, notamment à travers la question de l'entraide (CUMA) et de l'insertion dans les réseaux. Il conviendra toutefois pour l'avenir de la construction d'offres d'activités de rester prudent par rapport aux stratégies qu'entretiennent ces acteurs vis-à-vis de la question foncière.
Pour finir, revenons sur le concept "d'agriruralité", il s'agit bien d'un néologisme puisque ce mot n'existe pas officiellement dans la langue française. Les projets agriruraux traduisent une nouvelle vision de l'agriculture mais aussi une nouvelle vision de son rôle dans la société et le monde rural. Elle est apparue dans le cadre d'un changement de paradigme amorcé par l'introduction de concepts nouveaux (multifonctionnalité, développement durable) mais sur le terrain elle s'est réalisée grâce à des opportunité (immobilier peu onéreux dans les années 1990 et du temps durant l'hiver pour rénover les vieilles bâtisses en gîte par exemple). Les réflexions suggérées par de tels concepts se placent dans une vision à long terme des impacts que peut avoir l'activité agricole dans le monde rural et périurbain, notamment à travers la question de la commercialisation des produits et de l'accessibilité au territoire. La vulgarisation et l'application de cette notion n'en est qu'à ses débuts et doit encore faire ses preuves mais elle est peut-être la chance qui permettra le regain des espaces ruraux isolés.
4 Ouvrages et références à caractères méthodologique et technique :
· AUDIER Jacques, Droit rural, droit forestier, Collectivités Territoriales, 3ème édition, Economica, Paris, 1996
· BEAUD Stéphane, WEBER Florence, guide de l'enquête de terrain, Produire et analyser des données ethnographiques, Broché, La découverte
· BEGUIN Michèle, PUMAIN Denise, La représentation des données géographiques, statistique et cartographie, Cursus, Armand Colin, 2009, Paris
· C.R.D.R., La construction d'offres d'activité des espaces ruraux : Concept-démarche méthodologique-outils. Die : sans éd., février 2002.- livret outil : 107 p., livret concept : 5 p., livret démarches méthodologique : 24 p.
· C.R.D.R., L'agriruralité, des combinaisons d'activités pour créer des entreprises et des emplois, Die : sans éd., 2005, 22p. - CD
· DATAR, Quelle France rurale pour 2020 ?, La Documentation Française, Paris, 2003
· GUMUCHIAN Hervé, MAROIS Claude, FEVRE Véronique, Initiation à la géographie rurale : aménagement, développement, territorial, environnement, Pum, Anthropos, 2000, Paris
· KAYSER Bernard, Les sciences sociales face au monde rural, méthodes et moyens, Presse universitaire du Mirail, amphi 7, sociologie, Toulouse, 1989
· MOINE A., Comment observer un système complexe, L'Harmattan, Paris, 2007, 176 p. 4 Usuel de géographie :
· DAMETTE Félix et SCHEIBLING Jacques, Le territoire Français, carré géographie, Hachette supérieur, Paris, 2007
· DI MEO Guy, BULEON Pascal, L'espace social lecture géographique des sociétés, Armand Colin, collection U, 2005
· MERENNE-SCHOUMAKER Bernadette, Analyser les territoire, savoirs et outils, DIDACT géographie, mars 2005
· MERENNE-SCHOUMAKER Bernadette, Géographie des services et des commerces, DIDACT géographie; PUR, presse universitaire de Rennes, 2008
· SCHEIBLING Jacques, Qu'est-ce que la géographie, carré géographie, Hachette Supérieur, 2000
4 Ouvrages thématiques sur les territoires et les acteurs :
· CAVAILLE F., MILIAN J., (coord.), Mobiliser la notion d'acteur en géographie, Géodoc n°55, 2008, 126 p.
· CROZIER M., FRIEDDBERG E., L'acteur et le système : les contraintes de l'action collectives, le seuil, Paris, 1977
· FERRARY M., PESQUEUX Y., L'organisation en réseau, Mythes et réalités, PUF, La politique éclatée, Paris, 2004
· GRANDJEAN Pernette, Construction identitaire et espace, L'Harmattan, Paris, 2009, 204 p.
· JAMBES J-P., Territoires apprenants , L'Harmattan., Paris, 2001
4 Ouvrages thématiques sur l'espace rural et l'agriculture :
· AUBERT F., PIVETEAU V., SCHMITT B., Politiques agricoles et territoires, éd. Quae, 2009
· BICHE Brigitte, GERBAUX Françoise, MONNIER Le Jean, PERRET Jacques, Créer son emploi en milieu rural, les chemins de traverse de la pluriactivité, Ed. l'Harmattan, 1996.
· DIRY Jean-Paul, les espaces ruraux, Campus, Armand Colin, 2006, Paris
· CERAMAC, Commerces et services dans les campagnes fragiles, région intérieures française et ibérique, avril 2001, presses universitaire Blaise-Pascal
· Groupe de Bruges-préface PISANI E., HERVIEU, B., Agriculture un tournant nécessaire, Editions de l'aube, Paris, 1996
· KAYSER Bernard, Ils ont choisi la campagne, essai, l'aube poche, 1996, St Etienne
· KAYSER Bernard, Pour une ruralité choisie, monde en cours, datar, édition de l'aube, 1994
· MATHIEU N., L'emploi rural, une vitalité cachée, L'Harmattan, Paris,1995
· MENDRAS Henri, Sociétés paysannes, A. Colin, Coll. U, Paris, 1976.
· MULLER P., FAURE A., GERBAUX F., Les entrepreneurs ruraux - agriculteurs, artisans, commerçants, élus locaux, Ed. l'Harmattan, 1989.
· SIMON Anthony, La pluriactivité dans l'agriculture des montagnes françaises, CERAMAC, Presses Universitaires Blaise Pascal, Clermont Ferrand, 2002
4 Ouvrages et références locales :
· MAZIOU Jean-Paul, le Pays de Noirétable, essai d'histoire locale, impressions Dumas, St Etienne, 1992
· SEMA Forez, Les monts du Forez, guide du patrimoine naturel de la région Rhône-Alpes n°14, conservatoire Rhône-Alpes des espaces naturels
- Articles scientifiques, rapports et mémoires universitaires :
· BIHEL Céline, Facteurs d'émergence et organisations collectives favorisant la création d'activités agrirurales, 2009.
· BURK M. C., Les changements qualitatifs dans l'alimentation et leurs répercussions sur l'agriculture s l'expérience des Etats-Unis. Économie rurale 66, 1965
· GERBAUX F., Entrepreneurs et créateurs d'activités en milieu rural. Économie rurale 238, 1997
· GUERINGER Alain, "Systèmes fonciers locaux" : une approche de la question foncière à partir d'études de cas en moyenne montagne française, Géocarrefour, Vol. 83/4, 2008
· MAURICE Nils, AGRICULTURE ET TERRITOIRE : Les perspectives locales pour l'agriruralité, Septembre 2006
· MUNDLER Patrick, La multifonctionnalité de l'agriculture : une nouvelle façon d'appréhender le rôle de l'agriculture dans l'espace rural, ISARA, non daté
· SALEILLES S., les entrepreneurs néo-ruraux : un ancrage territorial atypique, in les mondes ruraux à l'épreuve des sciences sociales, Dijon
· SAUNIE Gaël & SOULIER Marie-Laure, Les ADASEA : un outil de promotion de l'agriculture et de proximité avec les acteurs du monde rural, 2010
· Accompagner des porteurs de projets agri-ruraux. Dossier Transrural Initiatives II, n° 337 - Site internet :
· www.agreste.agriculture.gouv.fr
· www.cybergeo.presse.fr/revgeo.htm· www.entrepreneur-salarie.coop
· www.geographiques.com/exos/promonet.htm
4 Videos :
· Maison des Services, Les monts du Forez, 2010
· Télémille Vaches, Bâtisseurs de possibles - DVD.
TABLE DES FIGURES
Figure 1 : Déroulement du stage dans le temps 9
Figure 2 : Le triptyque de la création d'activités 10
Figure 3 : Schéma de l'encastrement territorial 11
Figure 4 : Les missions de la Maison des Services 12
Figure 5 : Carte de localisation du périmètre d'intervention de la Maison des Services des Monts du Forez 13
Figure 6 : Carte des acteurs rencontrés 22
Figure 7 : Installation agrirurale de 1995 à 2010 dans la Loire 24
Figure 8 : Schéma méthodologique général 27
Figure 9 : Carte des communes sur lesquelles la Maison des Services intervient 29
Figure 10 : Photographie illustrant la place de la forêt dans le paysage 30
Figure 11 : Carte de la Surface Agricole Utile dans le périmètre d'intervention de la Maison de Services 31
Figure 12 : Evolution de l'âge des exploitants agricoles sur le périmètre d'étude 32
Figure 13 : Filière longue de production 32
Figure 14 : Programmation culturelle organisée par la ferme du Phaux (Noirétable) 36
Figure 15 : Exemple de complémentarité des activités ajoutées à une production agricole 38
Figure 16: Carte du relief dans le périmètre d'intervention de la Maison des Services 39
Figure 17 : Carte des voies de communication 40
Figure 18 : Photographie yaourts des Monts du Forez 40
Figure 19 : Carte typologique des campagnes dans la Loire 41
Figure 20 :Les Monts du Forez Figure 21 : La maison Forezienne 42
Figure 22 : Carte des productions agricoles en Rhône-Alpes 46
Figure 23 : Logo Perles Rouges des Monts du Velay 56
Figure 24 : Le modèle de Von Thünen 59
Figure 25 : Photographie du col de la loge eneigé 62
Figure 26 : Les différentes approches des acteurs vis-à-vis de la construction d'offres 70
Figure 27 : Graphe d'acteurs 71
Figure 28 : Représentation de l'implication et de la compréhension de l'agriruralité par les acteurs, dans les
Monts du Forez 73
Figure 29 : La création de dynamiques culturelles et sociales par les exploitations agrirurales 78
Figure 30 : Repérage des potentiels dans la commune de St Didier sur Rochefort 89
Figure 31 : Logo Oxalis 97
Figure 32 : Instance de la coopérative 99
Figure 33 : Le rôle des freins dans la construction d'offre d'activités 103
Figure 34 : Encastrement de l'entrepreneur agrirural dans le territoire 104
Figure 35 : Synthèse du travail mené 107
Figure 36 : Schéma CreActE de l'encastrement territorial 109
TABLE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Situations démographiques 43
Tableau 2 : Résidences secondaires et logements occasionnels sur le périmètre d'intervention 53
Tableau 3 : L'accès au foncier par les créateurs d'entreprises agrirurales 58
Tableau 4 : Les caractéristiques géographiques du territoire selon les créateurs d'entreprises agrirurales 60
Tableau 5 : Aides et soutiens à l'installation agrirurale 63
Tableau 6 : Formation suivie par les créateurs d'entreprises agrirurales 67
Tableau 7 : Tableau des acteurs 69
Tableau 8 : Potentiels détectés sur St Didier sur Rochefort 88
Tableau 9 : Déroulement de la journée agriruale 101
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS 2
SOMMAIRE 3
ABREVIATION ET SIGLES 5
INTRODUCTION 6
PARTIE 1 : METHODOLOGIE ET DEROULEMENT DU STAGE 9
I. Mise en contexte du sujet pour une appropriation des missions du stage 9
A. La formalisation des facteurs d'émergence des activités agrirurales : un des éléments du PSDR CreActE 10
B. Le périmètre d'intervention de la Maison des Services des Monts du Forez, territoire pilote
pour l'émergence d'offres d'activités agrirurales C. La professionnalisation par le stage de fin d'études : entre actions, recherches, complémentarité et réciprocité |
12 |
||
II. |
Recherche et acquisition des données |
19 |
|
A. |
Recherche documentaire |
19 |
|
B. |
Le travail de terrain |
20 |
|
III. |
La problématisation du sujet |
25 |
|
A. |
Une démarche itérative |
25 |
|
B. |
Apports pédagogiques du stage |
26 |
|
SYNTHESE |
27 |
PARTIE 2 : FACTEURS ET FREINS A L'EMERGENCE DES ACTIVITES AGRIRURALES DANS LES MONTS DU FOREZ 29
I. Quels avantages et quels atouts pour l'agriruralité dans les Monts du Forez ? 29
A. L'agriruralité : une opportunité pour le maintien de l'agriculture et le développement des
activités dans les territoires de moyennes montagnes ? 30
B. Un territoire rural de moyennes montagnes au coeur du Massif central dont les conditions géographiques, économiques, sociales et sociétales conditionnent la construction d'offres d'activités 38
C. Les crises envisagées comme des éléments moteurs pour les espaces ruraux fragiles? 47
II. Quels obstacles et quels inconvénients limitent l'émergence de l'agriruralité dans les monts
du Forez ? 57
A. Des inconvénients contextuels qui peuvent débouter certains candidats à l'installation .... 57
C. De nombreux acteurs présents sur le territoire des Monts du Forez pour peu d'installations agrirurales 68
SYNTHESE 77
PARTIE 3 : VERS DES CONSTRUCTIONS D'OFFRES D'ACTIVITES AGRICOLES ET RURALES 79
I. Retour sur les freins à la construction d'offres agrirurales et préconisations 79
A. La question du foncier et de la transmission 79
B. Se regrouper pour faciliter la création d'activités 81
C. La construction et le financement du projet 83
II. Construire des offres d'activités agrirurales : application de la méthodologie de construction
de l'offre d'activités dans la commune de Saint Didier sur Rochefort 85
A. La méthodologie de construction d'offres d'activités appliquée à l'agriruralité 85
B. L'étape d'émergence : détecter des potentiels, croiser et élargir les champs des possibles 86
C. Définir les bases de la construction d'offres d'activités agrirurales 90
III. Accompagner les entrepreneurs ruraux dans leurs projets et dans leur intégration au
territoire 93
A. Favoriser la construction d'offres d'activités en permettant la rencontre de porteurs de projets accompagnés avec le territoire 93
B. Favoriser la pérennité des offres d'activités par le développement de réseaux sociaux et
professionnels 96
C. Les freins à l'installation : des éléments régulateurs permettant la solidité de l'offre
d'activités? 102
SYNTHESE 106
CONCLUSION 108
BIBLIOGRAPHIE 111
TABLE DES FIGURES 115
TABLE DES TABLEAUX 116
TABLE DES MATIERES 117
TABLE DES ANNEXES 119
ANNEXES 120
TABLE DES ANNEXES
Annexe 1 : Cahier des charges II
Annexe 2 : Guide du "Qui sommes-nous?" X
Annexe 3 : Exemple de relevé de conclusions XII
Annexe 4 : Guide des entretiens XVII
Annexe 5 : Liste des personnes rencontrées XXVII
Annexe 6 : Grille d'analyse des acteurs impliqués XXX
Annexe 7 : Grille d'analyse des acteurs non impliqués XXXIV
Annexe 8 : Grille d'analyse des créateurs d'entreprises XXXVI
Annexe 9 : Grille d'analyse des porteurs de projets XXXIX
Annexe 10 : Les entretiens tapés avec les porteurs de projets XLII
Annexe 11 : Les entretiens tapés avec les créateurs d'entreprises agrirurales LXIII
Annexe 12 : Les entretiens tapés avec les acteurs de l'accompagnement LXXX