II. Le cadre légal de l'application de
l'injection en
Dans l'exercice infirmier, chaque intervention est
témoin d'une compétence professionnelle
spécifique.
Dans ce contexte, l'infirmier occupe un statut
d'exécutant, responsable de la réalisation des prescriptions. Il
met en jeu le savoir faire infirmier et engage par conséquent les
valeurs éthiques qui orientent ses conduites
professionnelles.
Le fondement légal des actes effectués par
l'infirmier(ère) est l'ensemble des réglementations de l'exercice
de la profession d'infirmier dans le secteur public (code de la santé
public) et de libre pratique, ainsi que la nomenclature des actes
professionnels.
Quatre catégories d'actes sont à
distinguer:
Les actes relevant du rôle propre de
l'infirmier.
Ceux sur prescription médicale.
Ceux sur prescription à condition qu'un
médecin puisse intervenir à tout moment.
Le médecin doit être informé avant la
réalisation du geste que l'acte va être réalisé sous
réserve de sa disponibilité à intervenir en cas de
complication. On site à titre d'exemple:
L'ablation des cathéters centraux
L'utilisation de défibrillateur
Les actes pour lesquels l'infirmier participe à la
mise en oeuvre par le médecin : 1ère injection d'une série
d'allergène. [10]
L'IM est un acte à faire sous prescription
médicale : « l'administration des médicaments injectables
sont des actes pratiqués en application d'une prescription
médicale qui, sauf urgence, est écrite, qualitative et
quantitative, datée et signée. » [14
conjugué]
La surveillance des effets des médicaments et
l'éducation du patient sont des actes de soins infirmiers relevant du
rôle propre de l'infirmier.
Il est impératif de mentionner que, quelque soit
le mode d'exercice de la profession infirmière (libéral,
privée ou public) et les compétences spécifiques qu'elle
requiert, la réglementation relative à ses conditions d'exercice
est la même. Cependant, la mise en jeu juridique de toute
responsabilité est différente selon la nature et la
gravité des faits et les modalités d'exercice. [10]
I. Matériels et méthode
:
Devis de recherche :
Il s'agit d'une étude rétrospective
à visée descriptive portant sur 4 observations, d'injection
intramusculaire ayant été à l'origine d'une plainte en
justice.
Cette étude a pour but de présenter d'une
part l'injection IM avec ses aspects techniques et son cadre légal,
d'autre part, ses implications médico-légales.
Échantillon :
Nous avons alors colligé quatre affaires
judiciaires dans la justice tunisienne ayant mis en cause l'injection IM et
ayant abouti à une condamnation du soignant.
Instrument de mesure :
Nous avons choisi de procéder avec
l'étude de cas en analysant des situations réelles ayant mis en
cause la responsabilité de l'infirmier pour des injections IM. Mes
sources sont : procès verbaux des enquêteurs, les expertises
médicales et les jugements rendus par les tribunaux.
L'enseignement tiré de ces cas avec leurs suites
judiciaires permet de mettre l'accent sur la prévention du risque
médico-légal dû à une tâche professionnelle
importante dans les prérogatives de l'infirmier.
Déroulement de l'étude :
> La collecte des données :
Pour la collecte des données, le recueil des
infos a été fait à partir de la jurisprudence
tunisienne.
Les données recueillies ont été
saisies et analysées en recourant aux données de la
littérature, tout en discutant la situation de point de vue
médical et légal.
> Difficultés et limites de l'étude
:
Durant notre étude, la difficulté majeure
était de colliger les cas et d'accéder aux jugements.
Considérations éthiques :
L'anonymat du nom de l'infirmier, de
l'établissement sanitaire et du malade a été
respecté. Tous les renseignements qui rendent possibles d'identifier les
individus ont été dissimulés.
II. Exposé des affaires :
Cette partie comprend une présentation de quatre
affaires judiciaires.
Pour chaque cas, nous présentons successivement
les faits tels qu'ils se sont déroulés, les données de
l'expertise en responsabilité et le jugement.
PREMiERE AFFAiRE juDiciAiRE : LA suRvENuE D'uN
ABcEs suiTE A uNE iNjEcTioN EN MI.
Les faits :
Monsieur MB, a l'antécédent d'une allergie
cutanée pour laquelle il était suivi dans une polyclinique de la
CNSS. Un traitement par KENACORT retard 40, en suspension injectable, lui est
prescrit par le médecin traitant.
Il bénéficiait d'une injection en IM tous
les 15 jours. L'administration du médicament était faite à
chaque fois par le même préparateur d'une pharmacie de libre
pratique.
Au mois d'avril 2003, et à la suite d'une
injection dans la fesse droite, le patient a présenté une
tuméfaction douloureuse du lieu de l'injection qui était
précédée d'une asepsie par de l'alcool blanc.
Un mois plus tard, il a été
opéré au service de chirurgie générale d'un CHU,
d'un volumineux abcès de la fesse droite compliquant un hématome
de la même région et remontant à trois semaines à la
suite d'une injection en IM. L'opération était une mise au plat
de l'abcès avec une bonne évolution.
L'examen de la boite du produit injecté avait
montré que la date de péremption était
dépassée au moment de l'injection.
Les jugements :
Une expertise médicale a évalué le
taux d'incapacité permanente partielle (IPP) à 5%. Une plainte
civile fut portée devant une justice cantonale.
L'assurance du pharmacien était condamnée
à verser comme dommages et intérêts la somme de 2000 dinars
avec 800 dinars comme frais de soins et 200 dinars comme frais de la
justice.
DEuXiEME AFFAiRE juDiciAiRE : pARALysiE suiTE A
uNE LEsioN pAR TRAuMATisME sciATiQuE.
Les faits :
Le 21 février 1976, à la suite d'une
injection intramusculaire de pénicilline prescrite par un médecin
pour traiter une angine, et pratiquée par une infirmière,
l'enfant NJ a développé une paralysie du membre
inférieur.
Une expertise médicale a évalué le
taux d'IPP à 20%.
Les jugements :
ü En première instance :
Les parents portent plainte contre l'infirmière
et le ministère de la santé publique.
Le 19 mars 1985, le tribunal de 1ère
instance considère que l'infirmière a commis une faute qu'il a
qualifiée de lourde et personnelle au sens de l'article 85 du code des
obligations et des contrats (COC). Toutefois, considérant que
l'infirmière est un agent public, il a retenu la responsabilité
de l'état.
Ont été accordés à la
victime 4000 D pour préjudice corporel et 2000 D pour préjudice
moral.
ü En appel :
Le 23/01/1986, le MSP fait appel auprès du
Tribunal Administratif.
Cinq ans plus tard, le 21/10/1991, le Tribunal
Administratif confirme la décision précédente tout en
instaurant certaines modifications :
« La législation applicable dans le cas
d'espèce est le décret BAYLICAL (DB) du 27 novembre 1988 relatif
au contentieux administratif et non l'article 85 du COC ».
« L'article premier dudit décret n'admet
pas pour engager la responsabilité de l'administration que la faute
simple. Il suffit qu'une faute soit prouvée pour que l'administration
soit débitrice de tout préjudice causé, sans droit,
à autrui.»
« La faute commise est considérée
comme une faute de service sous la responsabilité du service public, du
fait qu'elle a été commise à l'intérieur d'une
institution de santé publique, par une infirmière fonctionnaire
de l'état.»
La faute de l'infirmière a été
qualifiée par le juge d'imprudence et d'inattention, selon lui,
l'infirmière au cours de l'injection intramusculaire ne devait pas
s'occuper
d'autre chose (au cours de l'injection,
l'infirmière a eu une discussion avec des personnes pendant un certain
temps).
Sur ces données, le juge administratif
écarte la responsabilité de l'infirmière. Toutefois, il
accorde au MSP la possibilité d'intenter une action récursoire
contre son agent.
TRoisiEME AFFAiRE : pARALysiE DuE A uNE AGiTATioN
DE sujET A suBiR uNE iNjEcTioN.
L'enfant JS, âgé de 4 ans, a
bénéficié en 1994, d'une injection intramusculaire
d'Aspégic, pratiquée par une infirmière exerçant
dans un centre de santé de base. Le traitement était prescrit par
le médecin pour une fièvre.
Au cours de l'injection, d'après les
procès verbaux, l'enfant était très agité et
maintenu par sa mère. Cette dernière a déclaré que
son fils a crié très fort en raison des douleurs alors qu'il ne
l'avait jamais fait lors des injections précédentes.
Elle déclare aussi que d'emblée son enfant
n'arrivait pas à s'appuyer sur le pied droit (homolatérale
à la fesse oil a eu lieu l'injection) avec l'installation d'un fauchage
dans les jours suivants.
Les jugements :
Une plainte pénale fut portée et le juge
d'instruction a ordonné une expertise en responsabilité
médicale en désignant trois médecins experts. Les
conclusions de ces derniers étaient :
ü L'enfant âgé actuellement de 8 ans,
présente une paralysie sciatique complète du membre
inferieur.
ü On ne note pas de manquement aux obligations de
la part de l'infirmière lors de l'IM.
ü La paralysie sciatique droite constatée
après l'IM en question peut être due à une compression plus
haute due à une malformation ou à une atteinte d'un nerf
sciatique ayant un trajet anormal, passant par le quadrant oil se fait
habituellement l'IM.
Un autre collège de 3 médecins experts a
été désigné par le juge d'instruction et dont les
conclusions étaient :
ü L'imagerie par raisonnement magnétique
(IRM), ne montre pas d'anomalie lombaire malformative et de trajet anormal des
deux nerfs sciatiques.
v' L'enregistrement électromyografique EMG, montre
une dégénérescence sensitivo-motrice sévère
du membre inferieur droit due à une atteinte du nerf sciatique au niveau
de la fesse.
Les séquelles que présente l'enfant sont en
rapport direct avec l'IM qu'il a eu en 1994. Ces séquelles
déterminent chez cet enfant une IPP de 30%.
Dans son jugement le tribunal de première instance
a retenu la responsabilité de l'infirmière pour blessure
involontaire par maladresse. Une condamnation à une peine de 2 mois
d'emprisonnement avec sursis et 100 dinars d'amande fut
prononcée.
Une action civile a été portée
devant le Tribunal Administratif et des dommages et intérêt ont
été accordés à raison de 12 mille dinars comme
préjudice corporel et 4 milles dinars pour préjudice
moral.
Quatrième affaire : décès suite
à un choc
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