Analyse de la sécurité alimentaire en Afrique de l'ouest et du centre période de 1990-2008( Télécharger le fichier original )par Bérenger KOLEGBE et Emmanuel HOUESSOU Université d'Abomey-calavi - Maitrise 2010 |
CHAPITRE II : ANALYSE DE LA SITUATION DE LA SECURITE ALIMENTAIRE EN AFRIQUE DE L'OUEST ET DU CENTRE2.1. PRESENTATION DE LA SITUATION DE LA SECURITE ALIMENTAIRE EN AFRIQUE DE L'OUESTL'Afrique de l'Ouest est une sous-région de l'Afrique. Elle regroupe 16 pays que sont : le Bénin, le Burkina Faso, le Cap Vert, la Côte d'Ivoire, le Ghana, la Gambie, la Guinée, la Guinée Bissau, le Libéria, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Nigeria, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo. La situation alimentaire en Afrique de l'Ouest reste encore précaire malgré les efforts entrepris par les Etats. En effet,la proportion de personnes sous-alimentées dans cette partie de l'Afrique, bien qu'en baisse, n'est pas négligeable puisque le premier objectif du millénaire pour le développement (OMD) a prévu une réduction de moitié de la proportion de la population qui souffre de faim au plus tard en 2015. Comme nous le révèle le tableau N°3 (cf. annexe n°1), les pays de l'Afrique de l'ouest, à l'exception du Cap Vert et de la Guinée Bissau dont les données ne sont pas disponibles, connaissent en moyenne une légère décroissance de la proportion de personnes sous alimentées passant de 20% (1990-1992) à 14% (2003-2005) en passant par 16% entre 1995 et 1997. Le graphique n°1 présente les variations de la proportion de sous-alimentation dans chacun de ces pays. En considérant le taux moyen de la proportion des sous-alimentés en Afrique de l'Ouest qui est de 14%, on remarque que cinq pays sont en dessous de cette moyenne pendant que les autres sont largement au dessus sauf la Côte d'Ivoire qui a un taux égal à la moyenne. Si les cinq pays, à savoir Burkina Faso, Ghana, Mali, Mauritanie et Nigeria ont réussi à réduire la sous-alimentation au sein de leurs populations, c'est parce qu'ils ont su mener à bien les politiques de la promotion des activités agricoles qui ont augmenté considérablement la production alimentaire dans leurs pays. Source : Réalisé à partir des données du Tableau n° 3 en annexe n°1 En examinant le taux de croissance de la production alimentaire dans les pays de l'Afrique de l'Ouest, à partir du graphique n°2, sur la période de 1990 à 2004, on constate les efforts faits par le Bénin, le Burkina Faso et le Ghana en matière de production alimentaire car le taux de croissance de la production alimentaire est en moyenne de 2,5 % pour ces pays. Comme on peut l'observer sur le graphique n°2, le taux de croissance de la production alimentaire dans les pays comme le Nigéria, le Niger, le Mali, la Guinée et la Côte d'ivoire a faiblement crû en moyenne de 0,5%. Cependant,la Mauritanie enregistre un taux négatif de - 6,6%. C'est-à- dire qu'au lieu de produire, ce pays importe les aliments à hauteur de 6,6% pour satisfaire sa population sur le plan alimentaire. Cela explique bien le taux de sous-alimentés au sein de ce pays qui n'est que de 8 % entre 2003 et 2005 (Cf. Tableau n°3). Aussi, le taux de production alimentaire est négatif pour la Sierra Léone (-2,5%) et le Togo (- 0,4 %). Si la proportion des sous alimentés en Afrique de l'Ouest atteint son maximum en Sierra Léone (47%) , l'une des raisons est donc que ce pays a des déficits en matière de production alimentaire et importe très peu (27,5%)19(*). A l'image de la Sierra Léone, le Togo a connu un taux négatif. Il est le deuxième après la Mauritanie. Ce taux négatif signifie que dans ces pays la production alimentaire est en baisse sur la période 1990-2004. Source : construit à base du tableau N°4 Somme toute, en Afrique de l'Ouest, le taux de croissance de la production alimentaire est faible sur la période 2003-2005. (car on a au total trois pays qui ont un taux négatif, quatre qui ont un taux positif mais faible et trois qui ont un taux positif moyen). Ainsi, la plupart des pays a un taux de croissance de production alimentaire positif mais faible pendant que la proportion des personnes sous-alimentées reste élevée. Cherchons à comprendre pourquoi les choses en sont ainsi sachant que l'Afrique est un continent à vocation agricole. Pour cela, examinons comment évoluent les taux de population rurale (TPRU) et les taux de population urbaine (TPUR) en Afrique de l'Ouest. Sources : construit à partir du tableau n°5 Le graphique n°3 nous permet de comparer le taux de la population urbaine et le taux de la population rurale dans chaque pays. Il montre que presque tous les pays de l'Afrique de l'Ouest possèdent un fort potentiel rural. En effet, le taux de la population rurale est quasiment au dessus du taux de la population urbaine dans presque tous les pays de l'Afrique de l'Ouest. Malgré cette prédominance de la population rurale, on note une forte poussée de l'urbanisation dans les pays comme le Bénin, le Cap-Vert, la Côte d'Ivoire, la Gambie, le Ghana, le Libéria, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal et le Togo ( au total 10 pays sur 16). Cette forte urbanisation en Afrique de l'ouest pourrait entraîner un niveau élevé de la proportion des personnes sous-alimentées. A l'instar de la population rurale majoritaire, la production devrait être aussi élevée de manière à pouvoir nourrir dans chaque pays toute la population. Donc l'Afrique de l'Ouest ne devrait plus compter de personnes sous alimentées au sein de sa population. Mais la proportion des sous alimentés observées dans cette région montre bien que l'Afrique de l'Ouest ne fait pas usage de ce fort potentiel rural qu'il détient. En effet la majorité de la population rurale, peut s'adonner à quatre types d'activités à savoir : l'agriculture, l'élevage, la pêche, et les activités forestières. En dépit de ces quatre types d'activités, la production alimentaire rurale demeure faible. L'Afrique de l'Ouest a donc du mal à nourrir sa population avec sa propre production. Cette situation laisse à croire que l'Afrique importe beaucoup pour satisfaire sa population en matière d'alimentation. Qu'en est-il réellement ? Source : Construit à partir du tableau n° 6 (annexe n°1) Le graphique n°4 ci-dessus présente le taux d'importation alimentaire comparé à la proportion des sous alimentés pour tous les pays de l'Afrique de l'Ouest. On y remarque la prépondérance du taux d'importation des produits alimentaires sur la proportion des sous-alimentés de cette sous-région. Aussi constate-t-on que, la proportion de personnes sous-alimentées est élevée mais reste inférieure au taux d'importation (TIAL). En effet, plus la proportion de personnes sous-alimentées est forte au sein d'un pays, plus le pays importe des produits alimentaires. En général, en Afrique de l'Ouest, où la majorité des pays sont agricoles, les pays importent beaucoup pour compenser le manque de disponibilité alimentaire. Cette situation est paradoxale du moment où l'Afrique de l'Ouest dispose d'une forte population rurale. Qu'est ce qui se passe donc réellement pour que le taux des sous-alimentés demeure à ce niveau ? Comparons pour ce faire le taux de croissance du PIB et le taux de croissance démographique. Source : construit à partir du tableau n°7 (Cf. annexe n°1) On observe sur le graphique N°7 que la Côte d'Ivoire, la Guinée Bissau, le Niger, la Sierra Leone et le Togo ont tous un taux de croissance du PIB négatif alors que leurs taux de croissance démographique est normalement positif. La plupart des autres pays a un taux de croissance du PIB inférieur au taux de croissance démographique sauf le Cap-Vert et le Ghana. Donc le taux de croissance démographique en Afrique de l'Ouest est resté supérieur au taux de croissance du PIB qui est négatif par endroits. Cela signifie que le niveau de vie des populations dans cette sous région africaine se dégrade. Ainsi, la proportion de personnes sous-alimentées constatée en Afrique de l'ouest viendrait de la disparité qui existe entre le TPIB et le TDEM. C'est à dire que l'Afrique de l'Ouest ne disposerait donc pas d'un revenu suffisant pour faire face à cette poussée démographique. En effet les pays de l'Afrique de l'ouest sont des pays à revenu faibles (Banque Mondiale 2008 : 390). Donc les populations de cette sous région africaine n'ont pas un revenu adéquat et elles ne pourront pas se procurer les biens alimentaires (même si les disponibilités alimentaire sont abondantes) compte tenu de la hausse des prix constatée dans ces pays. Les populations sont alors vulnérables à l'insécurité alimentaire et ne pourront manger ni en quantité, ni en qualité afin de pouvoir mener une vie saine et active. En résumé, la région de l'Afrique de l'Ouest est une zone à fort potentiel rural mais ce potentiel n'est pas utilisé à bon escient. Le taux de production alimentaire dans cette région est croissant mais pas assez robuste pour nourrir toute la population. C'est une sous-région où la population croît plus vite que l'économie. Tous ces différents facteurs expliquent les taux de sous-alimentation moyen (14% entre 2003-2005) observés dans cette région et pourtant le premier objectif des OMD, consiste à la réduction de moitié de la pauvreté et de la faim d'ici 2015. * 19 Taux d'importation alimentaire de la sierra léone en 2004-2006(cf. Fao : profil de pays Sierra Léone) |
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