I.4.3.2. Les dépenses publiques comme déprimant
de la croissance : effet d'éviction
Contrairement à la vision optimiste qui vient
d'être présentée, des craintes relatives aux effets des
dépenses publiques sur la croissance ont été
suggérées par certains auteurs. L'augmentation des
dépenses publiques peut venir non pas compléter, mais se
substituer à la dépense des agents privés. Autrement dit,
une augmentation des dépenses publiques peut avoir, dans ce cadre,
un effet d'éviction des investissements
privés.
Deux mécanismes sont alors en jeu :
- Le surcroît de demande globale résultant d'une
augmentation des dépenses publiques en période de plein emploi va
contribuer à l'apparition de tensions inflationnistes ;
- Si le financement de la politique budgétaire passe
par l'emprunt, l'émission de titres de dette publique va venir
concurrencer les entreprises sur le marché des capitaux, conduisant
à la hausse des taux d'intérêt et, in fine, à la
baisse des investissements privés.
BARRO (1981), dans sa conception radicalement opposée
à celle de 1990, insiste sur l'impact différencié d'une
augmentation temporaire ou permanente des dépenses de l'Etat sur
l'activité économique. L'auteur s'appuie sur la théorie
des anticipations rationnelles des agents économiques. En fait, si les
agents économiques privés sont rationnels, ils devront projeter
leurs plans de consommation et de production à LT. De ce fait, ils se
prémunissent contre un changement permanent, surtout à la hausse
du niveau de dépenses publiques qui conduisent souvent à des
prélèvements futurs d'impôts et dépriment le revenu
permanent.
En ce qui concerne l'effet néfaste des dépenses
publiques sur la production, BARRO et KING (1989) montre que les
préférences des individus sont défavorables dans le temps,
les dépenses publiques futures n'ont d'effet que sur le taux
d'intérêt mais pas sur le niveau de l'activité. Les
dépenses publiques étant en grande partie financées par
les recettes fiscales, leur influence sur la production privée,
impliquent obligatoirement que l'on doit déterminer le taux optimal des
prélèvements obligatoires sur la consommation privée qu'on
ne peut pas dépasser pour le financement de la dépense future.
Pour FRIEDMAN, une relance budgétaire ne pourra donc
exercer un effet stimulant sur la consommation qu'à condition que les
agents anticipent une hausse durable de leur revenu. Les ménages vont
réaliser progressivement qu'il s'agit d'une augmentation temporaire de
leur revenu, qui sera en outre financée ultérieurement par une
hausse des impôts. L'impulsion budgétaire se traduira par une
augmentation de l'inflation.
Le principe de l'équivalence ricardienne renforce cette
déficience à l'égard de la politique budgétaire en
affirmant que les financements directs du déficit public par l'emprunt
ou par impôt supplémentaire sont équivalents, les agents
anticipant dans le premier cas que l'Etat sera contraint d'augmenter les
prélèvements pour le financer à terme.
L'analyse des arguments en faveur de l'hypothèse des
effets néfastes de la dépense publique sur la croissance repose
sur le principe de l'éviction de la dépense publique qui se fait
au détriment de la dépense privée.
Finalement, la théorie des effets des dépenses
publiques sur la croissance reste contradictoire et non concluante. Encore
plus, nous n'avons trouvé aucun travail sur les effets des
dépenses publiques sur l'équilibre sur le marché des biens
et services, d'où l'absence des analyses ultérieures de
l'équilibre sur le marché des biens et services. Ceci nous laisse
un chemin à parcourir pour prendre la position sur l'effet des
dépenses publiques sur le différentiel d'équilibre entre
l'épargne et l'investissement, est ce, au cours du deuxième et
troisième chapitre.
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