Contre histoire de la philosophie / le laboratoire de la philosophie vivante chez Michel Onfray( Télécharger le fichier original )par Rania Kassir Universite Libanaise - DEA 2008 |
Chapitre V : Bioéthique prométhéenne :A. Hapax existentiel : « Tumeur raconte d'où vient le livre qui suit. »591(*)Tout commence avec le jour où Marie-Claude Ruel, sa compagne, lui annonce qu'elle a une tumeur au sein. Une série de souffrances corrélatives a gagné les deux compagnons. Michel Onfray était en pleine liquéfaction ; il constatait en lui des déclins progressifs au niveau de la mémoire, de l'envie de travailler, du désir de lire... Il a même envisagé un jour le suicide comme une solution valable pour ne pas laisser la bien-aimée partir seule. Quant à la compagne, elle a enduré des douleurs intenses. Elle a connu l'épreuve de la chimiothérapie, des vomissements, des nausées, de l'ablation du sein, de la perte des cheveux... Et puis, la maladie terminée, l'opération réussie. La possibilité d'une vie après la tumeur devient réelle. Sous le coup de cette expérience (de ce corps qui souffre), Michel Onfray est résolu à élaborer une « bioéthique prométhéenne » qui donne naissance à un « post-humain », un « homme faustien » ou ce qu'on appelle encore un « corps élargi ».592(*) Ces trois expressions réclament le dépassement de la nature par son artificialisation. L'« homme faustien » (ou le corps faustien) c'est donc l'homme de la culture. Mais ceci ne veut pas dire qu'il est antinature puisqu'il s'éloigne de la nature, de la nécessité biologique pour la rendre plus subtile. De même, le « post-humain » est moins celui qui signale la fin de l'humain (l'inhumain ou le surhumain) que celui qui dépasse le vieux-humain longtemps soumis à l'autorité de la nature. Le post-humain appelle l'intelligence humaine, l'artifice pour mettre en oeuvre un corps de moins en moins objet et de plus en plus sujet ; un « corps élargi ».593(*) La « bioéthique prométhéenne » voulait alors s'appuyer sur les avancées scientifiques ; cette « substance prométhéenne » pour réaliser le plus grand plaisir possible pour le plus grand nombre. Gardant en mémoire le cas Marie-Claude, Onfray revendique un élargissement du corps pour tout malade et pour toute maladie (pas seulement la tumeur). En revanche, cette expansion du progrès, vu par l'oeil optimiste d'Onfray, se voit adresser les plus sévères reproches. C'est particulièrement le cas des Comits d'éthiques français qui ont accru le débat sur le statut de la science et les moyens exigés pour limiter son pouvoir. * 591 Cf. Féeries anatomiques, op.cit., pp.23-75 * 592 Ibid., p.81 * 593 Cf. La puissance d'exister, op.cit., p.183 ; p.184 |
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