Contre histoire de la philosophie / le laboratoire de la philosophie vivante chez Michel Onfray( Télécharger le fichier original )par Rania Kassir Universite Libanaise - DEA 2008 |
E. Le talent pour l'oubli :543(*)Michel Onfray relate tout d'abord un état de fait : Il n'est pas d'être humain doté uniquement de qualités et exempt de défauts. Tôt ou tard, chacun de nous découvre les faiblesses d'autrui qui, à son tour, découvre les nôtres. Dans cette première étape, chacun de nous doit faire preuve de longanimité devant les fredaines et les frasques d'autrui. Mais au moment où la somme des déplaisirs, qui nous provient d'autrui, de notre partenaire éthique, excède la somme des déplaisirs, on doit réclamer la rupture ou l'oubli définitif. Le pardon exigé du peuple par les détenteurs du pouvoir dans le christianisme ne serait efficace car, au dire d'Onfray, il dépouille l'homme réel de sa substance. Pour reprendre notre souveraineté et pour éviter cette atteinte à notre personne chère au christianisme, Michel Onfray propose un seul remède ; l'oubli. Toutefois, il est nécessaire de séparer entre l'oubli et le ressentiment qui tous deux participent à l'« éviction » d'autrui. Pour ce faire, nous soulignons les bienfaits de l'oubli et les méfaits du ressentiment. Michel Onfray a beau jeu de montrer que l'oubli, cette première forme d'éviction est une recherche systématique du plaisir. Sans l'oubli, nous vivons tout le temps dans le souvenir des douleurs et des chagrins, donc des pulsions mortifères. Grâce à lui, on opère en nous une véritable catharsis. Il est un talent pour la dépense (voir deuxième partie, chapitre I) donc pour la vie tansfigurée et la force car en visant la purification (philosophie) il nous libère des expériences douloureuses avec autrui (vie). Si l'oubli permet de recouvrer la santé, il en va tout autrement avec le ressentiment ; cette autre forme d' « éviction ». Au lieu de la dépense philosophique, on assiste ici à la « rumination ». L'homme du ressentiment se nourrit de mépris et de vengeance. Il est incapable de pousser ce mal vers l'extérieur. Néanmoins, il ne faut pas entendre par cette expression, que l'homme du ressentiment doit se venger des autres hommes. En ce cas, on est bien loin de la dépense positive de l'oubli, de la force qui crée la philosophie et on est plus proche de la dépense négative, de la violence qui détruit. La dépense revendiquée de l'homme du ressentiment c'est la libération de l'auto-empoisonnement de soi. D'autant que Michel Onfray nous fait remarquer que l'homme de la rancune est un homme masochiste, qui est dans l'incapacité de se venger ici et maintenant. Cette vengeance différée ou cet espoir de vengeance travaille son âme et le pousse à diriger sa violence contre soi-même, à haïr sa personne en plus du monde. Le jouir et le faire jouir, le langage incarné et honnête, le triomphe des passions, du plaisir et du désir, l'art de la bonne distance en matière d'intersubjectivité sexuée définit « l'érotique solaire ». * 543 Ibid., pp.136-143 |
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