Partie préliminaire Introduction du sujet
Durant l'année 2007, 330 600 incendies(1) se
sont déclarés sur le territoire national occasionnant près
de 800 décès.
Les progrès actuels, associés à une forte
implication des pouvoirs publics en matière de règlementation et
de contrôle dans les établissements recevant du public (ERP) et
les immeubles de grande hauteur (IGH), ont permis de limiter le nombre
d'incendies dans ce type d'établissements. Le respect des
libertés individuelles, relevant d'un droit fondamental, ne permet pas
d'imposer certaines dispositions réglementaires et surtout d'en
contrôler la bonne exécution pour ce qui concerne le domaine de
l'habitation. Une majeure partie de ces sinistres entraînant des
décès ou blessures graves trouvent leurs causes dans des
comportements de négligence, d'imprudence ou de défaut de
vigilance.
Dans le domaine de l'habitation, ce nombre élevé
de victimes et notamment de décès trouve principalement sa cause
par un phénomène d'asphyxie, ces sinistres se produisant
principalement en période nocturne. Pourtant depuis de nombreuses
années, la proposition visant à imposer l'installation de
détecteurs avertisseurs autonomes de fumée (DAAF) a
été formulée par de nombreux acteurs, tant par des
associations de grands brûlés que par les pouvoirs
publics(2) qui malgré leurs effort n'ont pu faire aboutir une
réglementation. L'intérêt d'un tel équipement est sa
réaction instantanée à la perception de fumée et/ou
de gaz de combustion et l'émission d'un signal sonore permettant ainsi
le réveil des occupants et leur évacuation du lieu.
La Recherche des Causes et des Circonstances des Incendies
(RCCI) est une discipline que l'on retrouve couramment dans de nombreux pays
étrangers. Dans les pays Anglo-Saxon (Etats-Unis, Québec,
Angleterre...) l'investigation des scènes d'incendie est
effectuée par des services spécialisés (le commissariat
aux incendies pour la ville de Québec et les Fire Marshall pour les
Etats-Unis) ou directement par les services de lutte contre l'incendie. A
l'exemple de la province de Québec, dans la Loi contre l'incendie, les
sapeurs pompiers ont l'obligation d'investiguer tous les feux à
l'exclusion de ceux qui sont manifestement d'origine criminelle ou pour
lesquels il y a une victime de décédée. Dans ce dernier
cas, ce sont les enquêteurs de la sûreté du Québec
qui prennent le relais(3).
En France, pour les services d'incendie et de secours, cette
discipline, es qualité, est encore dans un concept de découverte
et de réflexion cherchant à initier une possible
réalisation d'organisation structurée.
Cependant, l'on peut considérer qu'une certaine forme
d'investigation post incendie est déjà réalisée par
les compagnies d'assurances dans le cadre de leurs obligations en
matière d'analyse des risques à couvrir mais aussi envers celles
de prévention. Pour les autres actions, elles relèvent du
caractère d'expertise de justice ordonnées par les juridictions
civiles, pénales ou administratives.
(1) Statistiques des services d'incendie et de secours 2008, site
du ministère de l'intérieur. Ces chiffres doivent être
abordés à titre indicatif car des variations sont notables selon
les critères d'enquête. Une comparaison doit être
portée avec les indications de l'institut de veille sanitaire.
(2)Elaboration d'un rapport parlementaire de Mr
Pierre MORANGE et Mr Damien MESLOT, proposition de Loi ayant fait l'objet de
trois navettes parlementaire (ce qui est une situation exceptionnelle) puis
intégration d'un article (art 48) dans la Loi numéro 2009-323
dite « Loi BOUTIN ayant été censurée par le conseil
constitutionnel pour absence de lien avec l'objet de la dite Loi.
(3) Art 43 et 45 de la Loi contre l'incendie du Québec
Outre la recherche de la manifestation de la
vérité scientifique, la RCCI peut être un véritable
outil en matière de prévention visant à faire
évoluer la sécurité contre les risques d'incendie. Les
données concrètes recensées suites aux différentes
constations et/ou investigations réalisées permettraient
d'analyser des situations plus ou moins similaires offrant la
possibilité de conduire des travaux de réflexion dont les deux
principales orientations pourraient être l'évolution des
règlementations et l'information du public au travers de campagnes
d'information.
Certains SDIS ont identifié deux axes majeurs
d'intérêt dans la mise en oeuvre d'une procédure de RCCI
complémentairement aux compétences des autres acteurs
institutionnels.
Le premier, par des constatations objectives et factuelles,
permet de sécuriser juridiquement l'établissement public
administratif soumis de plus en plus à des recherches en
responsabilité, majoritairement infondées, pour aggravation des
dommages en conséquence d'un manquement du service dans la lutte contre
l'incendie.
Le second est celui, par l'exploitation des données
collectées, permettant de dégager des recoupements de situations
similaires ou de phénomènes pouvant conduirent à des
études spécifiques, des modifications de matériels par les
industriels ou des campagnes d'information grand public.
Pour cela, il convient de définir, au préalable,
les conditions d'exercice des différents intervenants. En aucun cas, la
RCCI ne doit se substituer aux missions de la justice ou de celle de ses
collaborateurs occasionnels que sont les experts de justice.
L'exclusivité de compétences en matière
de lutte contre l'incendie confère aux sapeurs pompiers une
légitimité à intervenir en matière de RCCI mais
cela impose une formation adaptée, répondant aux objectifs
recherchés.
Si l'action première des intervenants reste les
sauvetages et l'extinction, l'évolution des matériels et des
techniques opérationnelles peut permettre une amélioration pour
limiter l'altération de la zone de sinistre et ainsi assurer la
préservation d'un maximum d'indices. Ce comportement opérationnel
devrait se poursuivre dans la phase ultime qu'est celle du déblai.
C'est par la dispense d'une véritable culture de corps
départemental que ces objectifs ambitieux pourront être satisfaits
mais surtout s'inscriront dans le naturel opérationnel. L'on peut
également évoquer un intérêt, pouvant paraître
secondaire mais peut être essentiel pour les sinistrés, que sont
les récupérations de biens ou d'effets à valeurs
affectives qui auraient pue disparaître avec l'évacuation globale
du déblai
A travers cette réflexion, deux parties majeures seront
abordées, la première portera un regard sur la place que peuvent
prendre les différents acteurs sapeurs pompiers impliqués dans la
Recherche des Causes et des Circonstances d'Incendie.
La seconde partie abordera l'impact que peut engendrer cette
nouvelle discipline dans les méthodologies opérationnelles
déployées par les SDIS et proposera des perspectives
d'évolution.
Présentation de l'établissement public
administratif « Service Départemental d'Incendie et de Secours
»
Le Service départemental d'Incendie et de Secours du
Val D'Oise (SDIS 95) est un établissement public administratif. Il
détient une compétence exclusive en matière de lutte
contre l'incendie et concourt, avec les autres services et professionnels
concernés (SAMU, Police, EDF/GDF...), à la protection et à
la lutte contre les accidents, sinistres et catastrophes, à
l'évaluation et à la prévention des risques technologiques
ou naturels ainsi qu'aux secours d'urgence.
Dans le cadre de ses compétences, il exerce les missions
suivantes :
1° La prévention et l'évaluation des risques
de sécurité civile,
2° La préparation des mesures de sauvegarde et
l'organisation des moyens de secours, 3° La protection des personnes, des
biens et de l'environnement,
4° Les secours d'urgence aux personnes victimes
d'accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur
évacuation(4).
Le SDIS 95 présente une particularité notoire
dans sa constitution et son histoire. En effet, il découle de la refonte
de l'ancienne Seine et Oise décomposée le 1er janvier
1968 pour former les départements du Val D'Oise, de l'Essonne et des
Yvelines. Quelques-unes de ses communes ont également contribué
à la formation d'une partie des Hauts-de-Seine (9 communes), de la
Seine-Saint-Denis (16 communes) et du Val-de-Marne (18 communes).
Le SDIS du Val D'Oise est le premier service d'incendie et de
secours français à avoir été
départementalisé suite à l'arrêté du
1er janvier 1972 relatif à la création du corps
départemental de sapeurs pompiers du Val D'Oise. L'objectif était
de pouvoir garantir à l'ensemble des habitants du département une
égalité dans la distribution des secours et ce en tout point du
département. Cet arrêté a mis définitivement fin
à l'histoire des corps de sapeurs pompiers communaux dans le
département(5).
L'établissement public administratif SDIS 95 est
administré par un conseil d'administration. Il est placé sous la
double autorité du Président du Conseil Général qui
préside le conseil d'administration et du préfet, membre de droit
et responsable de la mise en oeuvre opérationnelle des moyens de secours
sur le département (article L1424-3 du CGCT) nonobstant la
compétence des maires de chaque commune en matière de
sécurité sur leur territoire.
Le conseil d'administration du SDIS (CASDIS) est
composé de représentants du département, des communes et
des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI)
compétents en matière de secours et de lutte contre l'incendie.
Le CASDIS est présidé de droit par le Président du Conseil
Général qui peut néanmoins en déléguer sa
présidence. Son fonctionnement est régi par l'article R1424-16 du
CGCT.
La direction du SDIS est assurée par le directeur
départemental (DDSIS), officier supérieur de sapeur-pompier. Il
est placé sous l'autorité du Président du Conseil
d'Administration pour la gestion administrative et financière de
l'établissement et sous celle du préfet, notamment pour la
gestion opérationnelle et la prévention.
(4)Voir article L1424-2 du CGCT
(5)Suite à un entretien avec
le Col (e.r.) Pierre Grenier Directeur Départemental et chef du corps
départemental de sapeurs pompiers du Val D'Oise de 1972 à 2004,
auteur de la mise en place du service d'incendie et de secours en sa forme
actuelle.
L'organigramme s'articule autour d'une équipe de
direction, de trois groupements territoriaux, d'un service de santé et
de secours médical (SSSM), de centres de secours principaux (CSP), de
centres d'incendie et de secours (CIS) et de centres de première
intervention (CPI).
L'organisation administrative et opérationnelle du service
s'appuie sur des règlements qui sont :
> L'arrêté d'organisation du SDIS,
> L'arrêté portant sur le règlement
opérationnel,
> L'arrêté portant sur le classement des
centres,
> Le Schéma Départemental d'analyse et de
couverture des risques (SDACR), > Le règlement intérieur avec
ses annexes,
> Les règlements des instances
délibératives et représentatives.
Si les services d'incendie et de secours présentent une
spécificité au regard de l'ensemble des autres administrations,
celle-ci peut principalement se caractériser par le fait que :
> Le corps départemental est constitué de
sapeurs pompiers professionnels (SPP), fonctionnaires territoriaux et de
sapeurs pompiers volontaires (SPV), citoyens ayant une activité
professionnelle et souscrivant un engagement de cinq ans renouvelable.
> Leur mode d'intervention est caractérisé par
des contextes d'urgence, fréquemment en milieu hostile et intervenant en
tout temps et tout lieu du département, voire même dans le cadre
de missions aussi bien extra départementales qu'internationales.
Sa constitution structurelle est élaborée sur la
base du SDACR, outil permettant de dimensionner la réponse
opérationnelle à prévoir, en fonction des risques courants
et particuliers existants sur le département.
Ce document, réactualisé tout les cinq ans et
élaboré par le SDIS est arrêté par le préfet
après avis conforme du conseil d'administration du SDIS.
Le corps départemental de sapeurs pompiers du Val
D'Oise se compose de 40 centres de secours dont trois sont associés
à des centres de commandement de groupement (Osny pour le groupement 1,
Eaubonne pour le groupement 2 et Villiers le Bel pour le groupement 3),
permettant de couvrir 1 246 Km2 et d'assurer la
sécurité de 1.157.057 habitants.
La direction départementale, siège
administratif, est localisée géographiquement à Neuville
sur Oise. Elle comporte, outre le siége administratif du service, le
centre de traitement de l'alerte où sont centralisées les
demandes de secours de l'ensemble du département, le centre
opérationnel départemental d'incendie et de secours (CODIS 95) et
un centre d'incendie et de secours.
En 2007 le SDIS du Val D'Oise a effectué 114 386 sorties
de secours dont 6 898 incendies.
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