INTRODUCTION
Notre pratique professionnelle en qualité d'Educatrice
Spécialisée au service de prévention du Conseil
Général de la Guadeloupe nous conduit à accompagner des
familles dont la problématique des conduites addictives est souvent
présente, soit au niveau des parents soit au niveau des jeunes.
Le cannabis représente la substance psycho-active
illicite la plus utilisée en Guadeloupe.
En 2003, les usages d'alcool, de tabac et de cannabis sont
à la hausse par rapport à 2002 ; l'usage régulier du
cannabis augmente de 4 points (ESCAPAD 2003, OFDT).
Département français d'outre mer, l'archipel
guadeloupéen composé de plusieurs îles (la Guadeloupe, les
Saintes, Marie-Galante, Désirade, Saint Martin et Saint
Barthélémy) est situé dans le bassin caribéen.
Le chapelet d'îles que constitue l'Arc Antillais
favorise le trafic illicite de cannabis en provenance des îles
anglophones (Dominique, Sainte Lucie, etc...) peu éloignées les
unes des autres. L'approvisionnement local se fait facilement d'îles en
îles.
Par sa position géographique, la Guadeloupe
n'échappe pas au trafic de produits illicites dont le cannabis. En 2006,
lors du dernier recensement, la Guadeloupe compte 458 000 habitants, les
jeunes représentent 31,7 % de cette population.
La consommation de cannabis souvent associée à
l'alcool est révélatrice du mal être de bon nombre de
jeunes Guadeloupéens quel que soit leur milieu social.
Interpellés par des parents en détresse qui
attendent des professionnels des réponses à leurs
problèmes, nous les orientons vers les structures
spécialisées.
Les consultations cannabis constituent les
structures les mieux adaptées à ce type de public. Passerelle
entre la prévention et le soin, elles répondent partiellement ou
totalement au besoin des jeunes de faire le point sur leur consommation et de
prendre conscience des risques sanitaires encourus. Les parents y trouvent un
lieu d'écoute et de conseil.
Des échanges avec les professionnels du réseau
et nos observations personnelles nous amènent à constater que les
mères s'impliquaient plus fortement que les pères dans la prise
en charge de leurs enfants consommateurs de cannabis.
Par ailleurs, les mères, souvent à l'origine de
la démarche de consultation accompagnent les jeunes, faisant état
de leurs inquiétudes quant à une éventuelle
dépendance et déchéance physique et mentale de leurs
enfants.
Nos observations révèlent bien souvent que la
présence du père n'est pas systématique auprès de
la mère lors du premier entretien d'accueil. Le père n'est pas
habituellement à l'origine de la demande d'aide et de soin. Absent,
celui-ci l'est trop souvent physiquement, mais également dans le
discours de la mère. Son évocation par cette dernière est
généralement négative et péjorative, son image
dénigrée.
Cette attitude et cette verbalisation mettent en exergue une
réalité de l'organisation familiale aux Antilles où la
place et le statut du père sont désignés par des
qualificatifs tels que : père absent, irresponsable, immature...
Le jeune dans ce contexte historique familial et social
développe une représentation en adéquation avec le
discours de la mère, cependant l'expression émotionnelle du lien
enfant-père oscille de façon ambivalente entre la mise à
distance du père et le désir de sa présence.
La consultation cannabis constitue un espace d'accueil et
d'écoute permettant de renouer les liens avec les jeunes et de pointer
les éventuels dysfonctionnements de la dynamique familiale.
· Partant du constat que dans cette consultation, lieu de
thérapie brève des jeunes consommateurs, le travail avec la
famille est primordial,
· Observant en général la non
présence du père à cette consultation,
nous posons la question de savoir s'il s'agit d'un marqueur
significatif des dysfonctionnements familiaux ?
L'hypothèse suivante est donc formulée:
L'implication du père des jeunes
consommateurs de cannabis lors des consultations cannabis constitue-t-elle un
facteur déterminant de la prise en charge du jeune
consommateur ?
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