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Interaction Hommes/Animaux chez les Gisir Gabon

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par Bipikila Moukani Mambou
Université Omar Bongo - Maîtrise 2008
  

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3.12 Les causes socioculturelles et naturelles

Les relations entre les humains et les éléphants sont très complexes. Les éléphants dévastent les champs de cultures et tuent parfois les personnes. Ils sont pour cette raison, à la fois craints et détestés. Cependant malgré les dégâts qu'ils causent aux hommes, les éléphants sont étrangement attirés par l'homme. Pour Akogo-Mvogo G. (1994 cité dans Elie Hakizumwami, 2005), les Bakwele, les Bagombo, les Pygmés Baka du Cameroun et les Pygmés Aka de la République Centrafricaine croient que les personnes peuvent se transformer en éléphants. En effet, un facteur culturel important existe dans les conflits homme-éléphants : la superstition. Beaucoup des gens croient que les hommes se transforment en éléphants nuisants. Dans notre zone d'étude, cette idée est énormément répandue. Nos informateurs à Mandji à l'exemple de Mboula Yakouya Adolphe (corpus n°13 séquence n°3) y compris les administratifs en particulier, le préfet de Mandji (corpus n°16 séquence n° 2) ont reconnu qu'il y a des gens qui se transforment en éléphants pour détruire les champs de culture des autres. C'est à ce titre que nous rejoignons Elie Hakizumwami (2005) qui disait que « Certaines communautés humaine croient que certaines personnes se réincarnent en éléphant. Ainsi, le problème des dévastations des champs agricoles prend une dimension supérieure, les gens étant persuadés que la destruction des récoltes serait le résultat d'une malveillance à l'égard de tel ou tel fermier »195(*).

A Mandji, cette destruction des cultures d'autrui, par des personnes qui se transformeraient en éléphant est le fait parfois des sentiments de jalousie et de haine que les uns nourrissent à l'égard des autres. Cependant, pour Mboumba Camille, il ne s'agirait pas d'emblée de jalousie, de haine ou de malveillance mais plutôt de l'incapacité des détenteurs (maîtres) des "éléphants du village" à les nourrir. Dans l'univers culturel gisir, l'éléphant occupe une place de choix dans les pratiques liées à la protection contre les attaques mystiques et celles de la chasse à l'éléphant mais également dans les méthodes de protection des cultures vivrières. Ces pratiques donnent lieu à la détention d'un éléphant à qui l'on va confier un certain nombre de missions. Cependant, ces "éléphants du village" sont comme tous les autres éléphants naturels. Ils aspirent aux mêmes besoins notamment celui de se nourrir. Selon Nicolas Manlius et Pierre Pfeffer (1999), un éléphant consomme quotidiennement 150 à 280 kg de matière végétale. Et la difficulté éprouvée par les propriétaires de ces "éléphants du village" est celle de pouvoir les nourrir à l'échelle individuelle sachant qu'ils doivent se nourrir eux-mêmes ainsi que leurs familles.

De ce fait, ne pouvant pas nourrir leurs "éléphants du village", ils leur laissent la latitude d'aller se nourrir dans les champs des autres. Outre ces raisons d'ordre culturel, la déprédation des cultures à Mandji est liée aussi à des causes naturelles. D'après Jules Olago, « Il y a certaines saisons où les espèces végétales dont se nourrissent les éléphants comme le moabi ne produisent pas assez de fruits. Certaines saisons, il y a plus de fruits en forêt et d'autres pas assez donc la quantité de nourriture devient insuffisante pendant ces saisons pour les éléphants.  Le moabi par exemple, est un arbre qui donne les fruits tous les deux ans » 196(*). Or les fruits du moabi sont l'un des plus favoris des éléphants. Ce qui revient donc à dire que pendant les périodes où les moabi ne produisent pas, alors les éléphants se rabattent sur d'autres fruits et les cultures vivrières des populations locales. Par ailleurs, selon Bas « Les éléphants qui causent les dégâts sont parfois parmi les plus vieux. Lorsque l'éléphant vieilli, les cinq dents de l'arrière se détruisent parce qu'ils mangent des aliments durs. Et au bout d'un certain âge, il a mal et ne peut plus consommer des aliments durs. Donc il va développer une préférence pour les aliments doux. Et cultures vivrières constituent des aliments doux pour lui »197(*). L'un des critères de choix du site agricole est la présence des points d'eau. Cela s'explique d'ailleurs par les noms des sites agricoles comme Ovingui, Douengui, Doubandji, Mouréri, Tamba, qui sont des noms des cours d'eau. Du fait de la distance qui sépare les villages et les sites agricoles, les populations érigent toujours des campements à proximité des points d'eau afin de se désaltérer et de préparer les aliments. Selon Perrine Mawouiri198(*), « Les gens font des plantations non loin des points d'eau parce que si tu faits un campement pour venir y séjourner, tu auras besoin d'eau pour préparer et boire. Tu ne pourras pas venir travail s'il n'y a pas d'eau à proximité. L'homme ne peut rester sans eau parce que si une personne s'évanouit vas-tu le réanimer avec quoi ? Moi je fais toujours mes plantations là où il y a un peu d'eau parce que l'eau est précieuse. Dans le campement il peut arriver qu'une personne tombe malade et on ira pas au village chercher de l'eau. On a besoin d'eau pour boire et préparer. Quand on travaille on doit toujours boire l'eau même s'il y a un peu de vin. Là où nous sommes il y a des rivières et les marécages ».

Or d'après Steeve Blake (2002), « les marécages sont un habitat important pour les éléphants tout au long de l'année mais plus particulièrement durant les périodes sèches. » il y ajoute que : « à certains endroits, les éléphants sont fréquemment rencontrés en très forte concentration dans les zones de terre ferme à proximité immédiate des marécages »199(*). Donc les points d'eau sont des zones par excellence des éléphants. Les éléphants en se déplaçant à la recherche des points d'eau, peuvent rencontrer des cultures. Les dommages aux cultures sont également influencés par un type de végétation où l'on rencontre des arbres tels que le douka. Dans la recherche de certains fruits, leur découverte peut coïncider avec celle d'un champ comme le montre la photo n°11.

L'image ci-dessus a été prise également lors de nos enquêtes de terrain sur la route Mandji-Yeno. Cette photo montre la présence d'un arbre appelé douka (Piptadenia africana Hook..) que les Bisir appellent muduka, entouré d'herbes et derrière lequel, nous apercevons les branches d'un autre arbre. Au premier plan et devant ce douka, nous avons une jeune tige de manioc. A gauche de cette tige de manioc, nous observons des jeunes feuilles de manioc et à droite, nous voyons des herbes.

La présente image met en évidence certains paramètres environnementaux qui sont à l'origine de la présence des éléphants dans les champs. En effet, le douka est un arbre dont les fruits sont très appréciés par les éléphants. Cet arbre étant dans le champ, la découverte de celui-ci va amener les éléphants à s'attaquer aux les cultures qui s'y trouvent.

Photo 11 : un douka dans une plantation sur la route Mandji-Yeno.

(Cliché MOUKANIMAMBOU-BIPAKILA, le 08 mai 2007).

* 195 Elie HAKIZUMWAMI (2005), Elaboration de la stratégie régionale pour la conservation des éléphants en Afrique Centrale, WWF, p 11.

* 196 Jules Olago, corpus n°18, séquence n° 5.

* 197 Bas Huijbregts, corpus n° 20, séquence n° 4.

* 198 Perrine Mawouiri, corpus n°6, séquence n°3.

* 199 Stephen Blake (2002), cité dans BLAKE Stephen (2005), Système de surveillance à long terme de l'abattage illégal des éléphants : Forets d'Afrique Centrale : Rapport final sur les relevés démographiques d'éléphants [En ligne]. Disponible sur World Wide Web «  http://www.wcsgabon.org/Gibier/Bushmeat_Meeting/Documents/WCS_(2005)_SYSTEM_DE_SURVEILLANCE_A_LONG_TERME_DE_L_ABATTAGE_ILLEGAL_DES_ELEPHANTS.pdf »,Consulté le 26 février 2007.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault