II-2 L'avis des employés de la compagnie de bus
publics :
-Description et organisation de la profession
:
Photo 13 : Le receveur de bus
Interroger des chauffeurs de pus public est difficile,
dès leur arrivé le matin au dépôt de bus, pas une
minutes n'est perdue pour prendre son service, et le soir après avoir
effectué leur journée il est difficile d'obtenir un moment pour
un entretien. C'est donc pendant les trajets même, tout en roulant, que
nous avons questionné les employés de la compagnie des bus
publics. Pas de crainte à avoir sur une quelconque dispersion du
chauffeur dans sa conduite puisque c'est le receveur, son binôme dans le
bus, qui nous répondait la plupart du temps. Les chauffeurs effectuent
en effet toujours leur service en paire avec un autre employé dont le
rôle est de
rabattre les usagers en leur signalant la destination du bus,
de valider et de vendre les titres de
transports, et de superviser les arrêts du bus.
Le receveur est indispensable à la bonne marche du
véhicule puisque la signalisation des destinations des bus n'est pas
toujours claire, à cause de la vétusté du cadran frontal,
de plus sa place à l'arrière du bus près d'une des sorties
lui permet d'avoir une vue idéale des passagers et ainsi de signaler
idéalement les arrêts et les redémarrages au chauffeur.
Pour se faire une petite sonnette est située à coté de son
siège, bien souvent remplacé par une tape sur la carrosserie
lorsque l'installation n'est plus en état de marche.
Nous avons interrogé 3 couples chauffeur/receveur, qui
ont répondus à un questionnaire rapide, bien vite
transformé en entretien, dès que le bus était rempli et
les billets payés, les enquêtés étant bien souvent
ravis d'avoir l'occasion de s'exprimer sur les défaillances de leur
profession et peut être aussi assurément de s'accorder une pause
dans la journée.
Ces enquêtes ont été réalisées
sur les lignes 5A (Tambaram est/T-Nagar), M2 (Saidapet/Medavakkam) et M 15
(Saidapet/Medavakkam).
Il est possible de décrire sommairement une
journée-type des binômes : ceux-ci ont une heure fixe de
début de service ou ils se rendent au dépôt de Saidapet,
qui est celui ou se trouvent majoritairement les bus desservants Medavakkam.
Il n'existe pas d'horaires réguliers de présence
aux différents arrêts jalonnant le parcours mais une fourchette
horaire des arrivées aux terminus.
Les chauffeurs tiennent en fait essentiellement en compte le
fait qu'ils se doivent d'effectuer huit allers-retours en une journée,
dont la durée est contractuellement de huit heures mais où les
heures supplémentaires n'existent pas en cas de retard sur les 16
trajets quotidiens.
Ces huit heures quotidiennes avec une journée de
congé par semaine sont rémunérées 4440 rp pour le
chauffeur et 4410 pour le receveur par mois.
Auparavant ce salaire était de 3650 rp pour le
chauffeur et 3620 pour le receveur, néanmoins après des
revendications syndicales importantes depuis une dizaine d'années,
ceux-ci ont pu augmenter. Les neufs enquêtés appartiennent
à la South Indian Surface Transport Employees Union1 ,
affiliée à la CITU , un syndicat puissant qui compte 30 000
membres dans toutes les branches de métiers. Ce syndicat permet aux
employés une protection en ce qui concerne le remboursement des
assurances en cas d'accident. De plus, comme nous venons de le voir, il met en
place des lobbies afin d'influer sur la régulation des salaires. Il faut
signaler qu'en ce qui concerne les chauffeurs de bus, celui-ci est inferieur au
Gouvernment Basic Salary2. L'affiliation à la SISTEU est donc
très suivie du côté des chauffeurs3.
-Des problèmes liés à la profession
révélateurs de la faiblesse des bus publics :
Dans un second temps, après avoir questionnés
les employés sur les désagréments perçues dans leur
métier, nous leurs avons demandé de fournir un ordre d'importance
aux différentes situations rapportées.
Celui-ci est rapporté dans le tableau 13.
1 SISTEU
2 Salaire minimum Indien
3 Nous allons voir par la suite que l'affiliation
à ce syndicat concerne aussi les autres catégories de chauffeurs
dans notre chapitre sur le secteur privé
Tableau 13 : Désagréments
rencontrés par les employés des bus publics, par
ordre d'importance :
3
Mauvais état
des chaussées
4
Confrontations avec
les usagers
5
État de marche
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Confrontations
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du moteur
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avec la police
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1
Trafic
2
(De 1 à 5, 1 étant le désagrément
le plus important)
Source : Auteur
D'après le tableau, le problème majeur que
rencontrent les employés lors de l'exercice de leur profession est
l'état de marche du moteur. Il apparaît que l'apparence de
décrépitude
Photo 13 : L'état des bus de ville
extérieure des engins utilisés est en accord avec
leur santé mécanique. Tous les employés interrogés
ont mentionné la forte fréquence des problèmes de moteurs.
Ces problèmes sont fortement handicapants lorsqu'ils surviennent au
milieu du service car ils contraignent les
binômes à faire appel aux mécaniciens de la
compagnie et à attendre leur venue et la réparation tout en
prenant un retard croissant sur les huit allers-retours obligatoires. Pour
parer à ces soucis qui sont fréquents, les employés,
connaissant mieux leur engin de pannes en pannes, réparent même
parfois eux-mêmes lorsque ils en sont capables.
Le principal problème de ces défaillances
mécanique est donc l'allongement pénible des journées de
travail.
Le rallongement des journées de travail est aussi
crée par le second facteur de désagréments pour les
employés : le trafic.
Comme nous l'avons montré dans la première
partie de notre rapport, le trafic est encore un fléau à Chennai,
et les chauffeurs de bus sont parmi les premiers à en pâtir du
fait de leur incapacité à se faufiler dans la circulation comme
les deux-roues et les rickshaws.
Le troisième facteur mérite quant à lui une
explication, il s'agit des confrontations avec la police.
Un problème récurent en Inde est le fléau
de la corruption, et en ce qui nous intéresse, comment les
fonctionnaires de police profitent de leur autorité sur les citoyens
pour leur soutirer de l'argent.
Unanimement, tout les binômes ont fait part de la forte
propension de la police à leur soutirer des bakchichs pour de multiples
raisons, qui dans le cadre de la législation ne font souvent même
pas l'objet de contraventions.
C'est le cas des arrêts au stations signalée par des
panneaux de la compagnie, mais pour lesquels s'ils veulent repartir les
employés doivent parfois payer.
Ces abus se produisent cependant majoritairement devant de
réels manquements au code de la route comme effectuer un demi-tour sur
la chaussée. Il n'est toutefois pas concevable de régler ces
situations de la sorte, d'autant plus que bien souvent les bus à leurs
terminus ne disposent pas d'aménagements de chaussée permettant
le demi-tour sans traverser la voie.
Vient ensuite le mauvais état de chaussées
abordées dans la première partie du rapport traitant des
infrastructures.
Encore une fois ce facteur est important pour les chauffeurs
et les receveurs, un bus pouvant difficilement manoeuvrer entre des
ornières. Cependant, pour tous, ce facteur est en voie
d'amélioration avec l'accomplissement de travaux sur la Velachery
Road.
Enfin viennent les confrontations avec les usagers même des
bus, dus à l'ivresse de certains, à la fraude et aux autres
diverses incivilités.
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