(c) Roman féminin et quête
de l'harmonie culturelle
La Réunion vit un désir de retour aux sources.
Elle apparaît comme un puzzle car divers groupes ethniques, comme on l'a
vu, composent la société réunionnaise. Comment faut-il
concevoir dès lors la créolité ? Efface-t-elle les
particularismes de tel ou tel groupe pour aboutir à un
melting-pot ? Doit-elle au contraire renforcer les particularismes au
détriment des points communs, au risque de créer des
carcans ? Doit-elle gérer, sur fond de respect de l'Autre, des
différences qui font l'originalité des mondes
créoles ? C'est ce que le roman féminin réunionnais
tend à définir, avec des auteurs tels que Joëlle Cadet,
Rose-May Nicole, Marie-hélène Payet ou encore Eliette
Vellement.
La voie transculturelle dans le roman
féminin
Dans l'écriture des romancières
réunionnaises le créole n'est jamais absent mais il est
diversement utilisé en restant fidèle à la situation
sociolinguistique du moment. Elles montrent un certain réalisme qui se
fonde sur la continuité entre le français et le créole.
Chaque langue a fait un pas vers l'autre pour permettre la compréhension
de tout un chacun, francophone ou créolophone. L'écriture n'est
alors ni le créole, ni le français. Elle n'est pas pour autant
une langue métisse car les éléments ne fusionnent pas, ils
vont à la rencontre ou sont proches l'un de l'autre. On y voit par
exemple une possibilité de cohabitation entre les Blancs et les Noirs et
donc la possibilité de passer d'une culture à une autre.
En bref, les romancières veulent dire la richesse du
monde réunionnais, se battent pour que tous y aient leur place. Toute la
Réunion telle qu'elles la rêvent est présente dans leurs
romans. Mais l'écriture laisse paraître la difficulté de
dire un monde réunionnais harmonieux, et la rencontre avec l'Autre
s'avère toujours problématique.
Une rencontre difficile avec
« l'Autre »
Le métissage biologique
rejeté
Pour qu'il y ait rencontre avec l'Autre, il faut d'abord qu'il
y ait reconnaissance de celui-ci. C'est une peur qui hante les romans
féminins, peur du métissage qu'on peut appréhender selon
les différents ouvrages. Cette peur peut révéler
l'angoisse d'une perte identitaire. « La peur du Noir n'est pas
seulement la peur de l'Autre ressentie par un Blanc, elle est aussi la peur
d'un Moi que l'on considère comme étranger à soi :
c'est la conscience qu'a le Noir, le Cafre, d'être inférieur au
Blanc, associé au désir de « blanchiment »
souvent évoqué en dérision par la formule créole
« gingn la koulèr », c'est-à-dire
« devenir blanc ». (Albert Ramassamy La Réunion,
décolonisation et intégration).
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