L'identité et le spectacle vivant à La Réunion( Télécharger le fichier original )par Virginie Verbaere Université Aix-Marseille III - Administration des Institutions Culturelles 2004 |
II. L'identité culturelle réunionnaise : Pluralité ou unité ?A. Groupes ethniques : Peut-on parler de pluralité ?La question de l'identité culturelle est d'autant plus importante à La Réunion que celle-ci devient complexe par rapport au caractère pluriel des groupes composant la communauté réunionnaise et de pratiques spécifiques dépendantes du processus transculturel. La connaissance de phénomènes culturels est déterminante dans le destin individuel et collectif des populations. Peut-on parler à La Réunion de pluralité ethnique et en quels termes rendre compte de cette pluralité ? Dans quelle mesure cette éventuelle pluralité est-elle synonyme de pluralité culturelle ? Existe-t-il une culture réunionnaise qui souderait les diversités ethniques et religieuses ? avec quel contenu ? Le colloque dirigé sur l'espoir transculturel à La Réunion8(*) peut nous guider pour répondre à ces interrogations. Dès l'origine, la société réunionnaise est complexe et multiculturelle. Ses membres partagent cependant un territoire9(*), une île, et une histoire spécifique. En ce sens elle se distingue des autres sociétés. Vivre dans un contexte de pluralisme culturel n'est plus étonnant aujourd'hui car les sociétés « simples », comme le disent les ethnologues, sont de plus en plus rares. Un problème se pose étant donné le brassage ethnique très important au cours de l'histoire de La Réunion. Ainsi, si l'on considère que les Métis constituent un groupe important, la catégorisation et l'évaluation numérique de ce groupe se révèle difficile. En fait, ce qui importe, c'est la perception qu'un individu se fait de son identité. Il ne s'agit pas donc de quantifier les groupes ethniques mais de comprendre leur place et leur fonctionnement au sein de la société réunionnaise. Il faut analyser la dynamique sociale où les groupes sont en interaction en fonction de leurs systèmes de valeurs qui sont déterminés grâce à leurs appartenances socio-culturelles. 1) La dualité : population blanche et population noire(a) Les « zoreils » ou métropolitainsIls sont entre quatre-vingt dix et cent vingt mille. Les Français venus de la métropole pour s'installer sur l'île sont appelés Les "Zoreils" ou "Métros". En créole réunionnais ces termes désignent un étranger. Pour l'anecdote, l'origine du mot est très discutée. Un étranger ne comprend pas quand on parle créole. On dit alors qu'il ne "zoreil" rien du tout. Par extension, celui qui ne "zoreil" pas ce qu'on dit est un "zoreil". On explique aussi que, du temps de l'esclavage, le "zoreil" était le propriétaire. Les esclaves évitaient de trop parler d'évasion quand les zoreils étaient dans les parages. Enfin, aujourd'hui ce mot désigne des métropolitains sans qu'il y ait quoi que ce soit de péjoratif. Certains métropolitains sont installés dans l'île depuis longtemps et sont devenus au fil des ans aussi Réunionnais que les natifs du département. D'autres, en revanche, fonctionnaires pour la plupart, ne sont que de passage. Par ailleurs cette immigration métropolitaine aura eu des conséquences sociales et humaines non négligeables sur une population dont la mentalité est loin d'être tout à fait occidentale. Mais notons que la spécificité de La Réunion est d'être une des rares colonies françaises à avoir comporté deux groupes distincts : un noyau dominant qui a détenu les rênes du pouvoir « les Gros blancs » dans la société de plantation et un prolétariat constitué de « Petits Blancs ». Cette spécificité qui met les « Blancs » à tous les niveaux de l'échelle sociale et d'intégration économique va favoriser le lien entre cette communauté et les autres. La comparaison avec les autres colonies françaises et les autres Départements d'Outre Mer (DOM) révèle ainsi, de par cette spécificité, qu'il y ait eu plus de métissage à La Réunion qu'ailleurs où les européens étaient et sont encore parfois très mal intégrés. * 8 REVERZY J.F., MARIMOUTOU J.C., 1990 : L'espoir transculturel, Université de la Réunion, Collection indianocéanique, Edition L'Harmattan, Paris. * 9 Cf. Annexe 1 : Carte de La Réunion |
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