III-2 Le prix de l'eau
Les personnes qui vivent dans des habitats précaires
sont les premières à être frappées par les maladies
liées à l'eau Souvent, le seul moyen dont disposent ces
populations pour se procurer de l'eau potable consiste à en acheter
auprès de fournisseurs privés, à un coût
jusqu'à dix fois supérieur à celui de l'eau courante.
- Les prix du réseau de la SEDAPAL :
La SEDAPAL s'occupe de plus de 1 000 000 d'usagers. Pour
effectuer l'établissement et l'application des tarifs, elle classifie
ces usagers en cinq catégories : sociale, domestique, commerciale,
industrielle, et étatique. 94% des usagers sont considérés
comme « résidentiels » et inclus dans les catégories
sociale et domestique, les 6% restant forment la catégorie non-
résidentielle.
En accord avec son cahier des charges, la SEDAPAL a
établi à Lima une politique de subvention de l'eau consistant en
théorie à faire payer plus cher aux industriels et aux
entreprises qu'aux particuliers. En effet, alors que le coût moyen pour
un mètre cube d'eau peut être chiffré à
1.5487 sol en 2002, soit 0.4407 dollar, les entreprises
commerciales et les industriels payent 3,238 soles (0,9225 dollars) et l'Etat
1,614 sol, soit 0.4598 dollar1. Les volumes d'eau consommés
par l'Etat et les particuliers sont donc subventionnés par les
industriels et les entreprises commerciales.
L'entreprise publique assure également des prix plus
modérés pour ses plus faibles consommateurs, jugés
raisonnablement comme étant les plus démunis. Ainsi à
Lima, plus on consomme d'eau, plus on paie cher le litre
supplémentaire.
La SEDAPAL pénalise ainsi les gros consommateurs au nom
de deux principes : une politique de rationnement de l'eau dans les contextes
actuels de pénurie, et une politique de subvention envers les
consommateurs les plus pauvres qui sont reliés au réseau. Les
politiques de l'entreprise fonctionnent parfaitement l'une avec l'autre mais
peuvent se révéler dangereuses pour l'entreprise
elle-même.
Ce serait le cas si ces mesures de pénalisation
financière de la surconsommation avaient un effet coercitif, le prix de
l'eau pour les plus petits consommateurs augmentant parallèlement pour
retrouver la plus-value manquante.
De plus, une autre mesure de subvention concerne cette fois ci
les consommateurs s'approvisionnant aux bornes-fontaines. Elles
bénéficient en effet d'un tarif régulier au litre quel que
soit le volume consommé. Celui-ci est équivalent au coût
des vingt premiers litres du système particulier, soit 0.894 sol.
Cependant, parallèlement à ces mesures, le prix de
l'eau à Lima connaît depuis quelques années une hausse
significative.
-Le prix des entrepreneurs privés de l'eau :
Comme nous l'avons vu lors de l'étude des
différentes modalités d'accès à l'eau, à
coté de l'approvisionnement offert par le réseau de la SEDAPAL,
on trouve aussi dans les quartiers les plus démunis, un
approvisionnement par camions-citernes issus de petites entreprises
privés.
1 Chiffres issus du Memoria 2002 de la SEDAPAL.
Photos 17 et 18 : Chargement d'un camion-citerne privé
à Ventanilla, et livraison dans l'asentamientos humanos de Lomas de
Carabayllo.
Source : Auteur.
Ceux-ci profitent du désengagement de la SEDAPAL dans des
quartiers résultants d'invasion et souvent au statut foncier
illégal, pour développer leur commerce.
Le prix ne cherche évidemment pas à être
compétitif, car les conducteurs de camion savent pertinemment qu'ils
sont la seule alternative viable.
Ces camions citernes livrent l'eau à l'échelle d'un
bidon de 200 litres au prix de 1.5 sol, à des fréquences diverses
selon les diverses situations familiales.
Etant donné que ces 200 litres équivalent
à 1/5 de mètre cube, cela signifie que ces opérateurs
privés font payer le mètre cube d'eau 7,5 soles, soit plus de 8
fois plus cher que les tarifs que propose la SEDAPAL.
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