WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'Initiative PPTE et la lutte contre la pauvreté au Cameroun: une analyse sociologique

( Télécharger le fichier original )
par Sosthène Hervé MOUAFO NGATOM
Université de Yaoundé 1,Cameroun - DEA 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

II.4. La lutte contre la pauvreté au Cameroun : un fait social, un fait social total et un problème de changement social.

Les déconvenues de la politique de lutte contre le sous-développement ont favorisé un gain d'intérêt pour la politique de lutte contre la pauvreté. Cette politique qui bénéficie à la fois d'une volonté politique internationale et nationale a fait de la lutte contre la pauvreté un fait social au Cameroun. Mais sa pratique pose un problème de changement social.

II.4.1. La lutte contre la pauvreté au Cameroun : un fait social, un fait social total.

Face à la situation de pauvreté engendrée par la crise économique et à l'urgence d'y faire face, la lutte contre la pauvreté est devenue au Cameroun un « fait social ». Des instances étatiques (gouvernement) au bas peuple, passant par la société civile, la lutte contre la pauvreté mobilise l'attention et les efforts des camerounais. Elle est également un « fait social total ». Du politique au social, passant par l'économique, la lutte contre la pauvreté se déploie au Cameroun.

Après plusieurs mesures prises en réaction contre la crise économique, lesquelles mesures (ajustement interne, Programmes d'ajustement structurel conclu avec le FMI) se sont soldées par un échec conduisant à une paupérisation croissante des populations, le gouvernement a entamé, dans le cadre de la mise en oeuvre du programme triennal engagé en juillet 1997, la correction de la profonde dégradation enregistrée à travers l'ensemble du pays. Cette correction s'est orientée vers l'infrastructure sociale et la prestation des services sociaux. Le gouvernement a ainsi concentré ses efforts sur l'appui aux secteurs sociaux de l'éducation, de la santé et sur la mise en oeuvre d'un programme d'entretien routier privilégiant les routes rurales reliant les zones de production aux centres de consommations. Bien que toutes ces mesures soient prises dans la perspective de la lutte contre la pauvreté, cette lutte va véritablement prendre de l'ampleur avec l'Initiative PPTE. Avec l'admission du Cameroun à cette Initiative, la lutte contre la pauvreté est devenue le credo de toutes les actions gouvernementales. A travers les discours et autres formes de communication, le gouvernement convie les populations à oeuvrer dans cette perspective. La lutte contre la pauvreté est également au centre des préoccupations de la société civile camerounaise.

Apparue au Cameroun sous la contrainte de la rue exprimant ses réactions face à la profonde crise économique et politique de la fin des années 1980, la société civile est un acteur majeur de la lutte contre la pauvreté au Cameroun.

Au regard de l'ampleur et de la profondeur de la pauvreté au Cameroun et face à « l'insuffisance manifestée par l'Etat dans la recherche des solutions concrètes et durables aux problèmes des populations », il s'est développé, dans un cadre non gouvernemental, des initiatives pour faire face à la pauvreté dans laquelle se trouve englué le pays. C'est dans ce contexte que la société civile est devenue une référence obligée des discours et actions de lutte contre la pauvreté au Cameroun. Sa réponse à la pauvreté au Cameroun s'exprime non seulement par la forte densité de la société civile, mais aussi par leur importance dans la lutte contre la pauvreté à travers les domaines de l'éducation, de la santé, l'environnement, le genre, l'agriculture. Les organisations de la société civile s'investissent également dans l'approvisionnement en eau potable, un grand nombre s'est engagé dans le domaine de la production agricole en apportant leur appui aux agriculteurs, les aidant à améliorer leur productivité, à introduire de nouvelles cultures et à améliorer leurs capacités de commercialisation. La lutte contre la pauvreté est également au centre des efforts des populations, des bas peuples, des pauvres.

Les populations sont de véritables actrices de lutte contre la pauvreté au Cameroun. Les premières stratégies anti-pauvreté après la crise économique ont été observées à leur niveau. L'Enquête camerounaise auprès des ménages de 1996 relève un certain nombre de stratégies adoptées par les populations pour faire face à la pauvreté au Cameroun. Ces stratégies vont de la modification des habitudes de consommation à l'éveil de l'esprit d'initiative.

Dans le premier cas, la fréquence et la qualité des repas ont connu une réduction, les biens et les services aussi. Les populations ont réorienté leur consommation vers les produits de bas de gamme. C'est dans ce contexte que les produits nationaux ont été revalorisés. Cette réorientation concerne aussi bien les domaines du sanitaire, du vestimentaire que ceux des infrastructures. On assiste ici à un repli vers les produits locaux, du fait de leurs prix relativement accessibles.

Dans le second cas, on observe une diversification/multiplication des sources de revenus, sans distinction de secteurs d'activités. C'est ainsi que les employés de la fonction publique en viennent, eux aussi , à se discuter le secteur informel avec les chômeurs et sans qualifications. Ils investissent également dans l'agriculture de subsistance et même dans la commercialisation, question « d'arrondir les fins de mois ». Ces stratégies anti-pauvreté qui se sont amplifiés de nos jours comme le témoigne aussi le développement à outrance du secteur informel, traduisent le déploiement des populations contre la pauvreté au Cameroun. La lutte contre la pauvreté est au centre des préoccupations des différentes composantes de la configuration de l'Etat camerounais : gouvernement, société civile et populations. Cette lutte est également menée dans tous les secteurs.

La lutte contre la pauvreté au Cameroun se déploie dans tous les secteurs de la vie de la nation. Elle intègre à la fois le politique, l'économique et le social.

Sur le champ du politique, elle est orientée vers la mise en oeuvre de la bonne gouvernance, de la démocratie, de la décentralisation, de l'amélioration du cadre juridique et économique, vers la lutte contre la corruption.

Sur le champ de l'économie, elle est orientée vers la quête d'une croissance forte, durable et de qualité, vers la quête de la stabilisation des équilibres macroéconomiques, vers la diversification de la production et des sources de revenus.

Sur le champ du social, elle est orientée vers le renforcement des ressources humaines et du secteur social, notamment l'éducation et la formation, la santé, l'emploi et l'insertion des groupes défavorisés dans les circuits économiques.

Le déploiement des différentes composantes de l'Etat camerounais sus-évoqué s'opère dans ces champs.

Il apparaît, à travers l'exploration de ces différentes composantes en rapport avec la lutte contre la pauvreté, que cette dernière est au centre des préoccupations des camerounais sans exclusive. Mieux, elle structure leurs pensées et leurs actions.

Compte tenu de ce qui précède, la lutte contre la pauvreté au Cameroun peut être perçue comme un ensemble de manières de faire, fixées ou non, susceptibles d'exercer sur les acteurs sociaux une contrainte extérieure. Elle se déploie dans plusieurs domaines de la vie de la nation camerounaise. Elle est un fait social et un fait social total. En même temps, elle pose un problème de changement social.

II.4.2. La lutte contre la pauvreté au Cameroun : un problème de changement social

Le changement social renvoie à toute transformation qui affecte le fonctionnement et la structure de l'organisation d'une collectivité. La politique de lutte contre la pauvreté met l'accent sur la promotion et l'instauration du processus participatif dans les initiatives de développement. Elle suppose un changement à la fois dans son contenu par rapport aux politiques précédentes, et dans sa mise en oeuvre.

La politique de lutte contre le sous-développement ayant laissé sur les rivages une proportion élevée des populations, du fait de son approche peu socialisante, il s'agit pour la politique de lutte contre la pauvreté de promouvoir et d'instaurer une approche participative et socialisante dans les initiatives de développement. Ainsi, cette politique consacre le passage d'une conception du développement privilégiant presque exclusivement les infrastructures matérielles à une autre qui réserverait une place aux structures sociales, de même que l'abandon progressif des modèles occidentaux ethnocentriques de développement au profit du respect des cultures locales.

Dans sa pratique, cette politique pose le problème de l'adéquation de son contenu à la réduction effective de la pauvreté. En effet, la reconduction des orientations des politiques antérieures (reformes économiques : libéralisation) dans le contenu de la politique de lutte contre la pauvreté témoigne de l'existence de fortes résistances face à une nécessaire remise en question de ces orientations. Bien que l'adoption de la nouvelle politique constitue implicitement un aveu d'échec des politiques antérieures, des plaidoyers en faveur des IBW continuent à attribuer la responsabilité principale de l'échec de l'ajustement structurel aux défaillances des pays en développement dans leur mise en oeuvre, plutôt qu'à celles de leur contenu. Compte tenu de cette reconduction dans le contenu de la politique de lutte contre la pauvreté d'une part, et de la déresponsabilisation du contenu des politiques précédentes dans l'échec des Programmes d'ajustement structurel d'autre part, ne faut-il pas penser, comme la « gauche », que les IBW n'auraient adopté le slogan de lutte contre la pauvreté que pour mieux faire accepter la poursuite de leur politique de libéralisation ? Et dans ce cas, la politique de lutte contre la pauvreté n'est-elle pas vouée aux mêmes résultats que les précédentes ? Il se pose donc le problème de l'adéquation du contenu de cette politique à la réduction effective de la pauvreté

La politique de lutte contre la pauvreté pose également le problème de son appropriation par les populations bénéficiaires. Sa mise en oeuvre entraîne un changement de la configuration des acteurs sociaux de développement. De la configuration classique constituée des Institutions de développement, notamment des IBW et l'Etat, on est passé à une configuration rénovée dans laquelle devrait s'établir une plate-forme de concertation entre tous les acteurs du développement (Institutions de développement : Etat, société civile, populations). Ce changement est favorisé par le principe de participation promu par cette politique, lequel principe prône la participation des différents acteurs sociaux aux programmes de développement. A la faveur de ce principe, la société civile a fait une entrée remarquable au sein de la communauté des acteurs sociaux de développement. Elle est ainsi devenue un acteur incontournable dans la mise en oeuvre des programmes de développement et surtout un canal d'acheminement de l'aide au développement, l'objectif pour les donateurs étant dans ce dernier cas, de contourner les canaux étatiques faits de lourdeurs bureaucratiques et improductifs pour toucher les populations à la base.

Le principe de participation ainsi promu ouvre de nouvelles perspectives quant à la gestion des affaires nationales ; elle est également supposée renforcer les capacités et le pouvoir des acteurs intermédiaires (société civile) et ceux de la base (populations bénéficiaires) dans l'élaboration, le suivi, le contrôle, l'évaluation et la réorientation des stratégies.

Mais, sa mise en oeuvre et par ricochet celle de la politique de lutte contre la pauvreté pose le problème de l'appropriation des programmes de développement par les populations bénéficiaires. Du fait de l'exclusion traditionnelle des populations des sphères de décisions, le principe de participation pose le problème de l'adaptation de celles-ci à ces nouvelles perspectives. Le principe de participation pose également le problème de son application effective, car les IBW et l'Etat n'en font qu'un processus consultatif. Or, la participation suppose non seulement que les populations bénéficiaires soient impliquées, mais aussi que leurs préoccupations soient prises en compte dans les programmes de développement engagés dans leurs communautés.

En définitive, le processus participatif promu par la politique de lutte contre la pauvreté implique un changement d'attitudes et de comportements des acteurs sociaux de développement pour autant que sa logique remet en cause le fonctionnement habituel des institutions dites représentatives de notre pays/gouvernement.

Ce chapitre consacré à la pauvreté et la problématique de lutte contre la pauvreté au Cameroun nous a conduit à des esquisses de réponses aux questions soulevées par les concepts de pauvreté de lutte contre la pauvreté au Cameroun. Il en ressort que la pauvreté est une réalité aux contours multiples, et que le recours à la politique en vue de sa réduction est désormais établi. Il ne se pose plus alors que le problème de son application effective. Une application qui ne peut véritablement être examinée qu'à travers les mécanismes de mise en oeuvre de l'instrument principal de cette politique, l'Initiative PPTE.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire