La garantie des droits fondamentaux au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Zbigniew Paul DIME LI NLEP Université Abomey-Calavi, Bénin - DEA en Droit international des Droits de l'Homme 2004 |
B.- Les limites à l'activité de la Commission nationale des droits de l'homme et des libertésLa CNDHL est héritière de l'ex Comité. A ce titre et pendant la période transitoire, celle qui précède effectivement la mise en place de la CNDHL, elle peut hériter des obstacles qui ont grevé l'activité de l'ancienne institution. Ils peuvent consister en des obstacles opérationnels d'une part et en des obstacles statutaires, d'autre part. Les limites opérationnelles surviennent au cours du fonctionnement de l'institution lorsqu'elle est en pleine activité sur le terrain de la protection des droits fondamentaux. Tandis que les limites statutaires sont celles découlant même de la structure de l'institution telle qu'élaborée par le législateur. L'une des premières difficultés que pose la CNDHL est la centralisation de l'institution dans la seule capitale politique. Cette tare a affecté l'ex Comité et si des mesures adéquates ne sont pas prises, la déconcentration de l'institution dans la majorité des localités de la République ne restera jamais qu'au stade de l'utopie. L'existence de la CNDHL pourra même être ignorée de certains citoyens éloignés de la capitale et le traitement des requêtes en provenance de lieux autres que la capitale pourra éventuellement connaître de grandes difficultés. Il est donc nécessaire que soient créées, dès la mise en place effective de la CNDHL, les antennes locales prévues à l'article 5 de la loi n° 2004-16. Doit aussi être considéré le problème de l'insuffisance des moyens en personnel dont hérite la CNDHL. A propos de l'ex Comité, Mme ETONGUE MAYER constate que « malgré l'importance de la mission de protection (...), le Comité national des droits de l'homme et des libertés continue de souffrir d'une insuffisance chronique en ressources humaines »323(*). Il est crucial qu'eu égard à cet obstacle, la désignation des 30 membres de la CNDHL soit au plus vite faite, afin que les instances dirigeantes nouvellement installées puissent à leur tour désigner avec célérité le personnel d'appui de l'institution324(*). En héritant du personnel de l'ex Comité, la CNDHL obtient, numériquement, d'un personnel insuffisant et qui en plus ne correspond pas aux critères de désignation prescrits par la nouvelle législation. La nécessité de prises de mesures par les autorités compétentes est donc urgente et mérite d'être exacerbée pour aboutir à une véritable protection des droits fondamentaux par la nouvelle institution nationale compétente dans ce domaine sensible. Il y va du traitement des requêtes qu'elle sera amenée à connaître et des cas de son auto-saisine. La volonté des pouvoirs publics est, à cette fin, le garant de la mise en place effective de la CNDHL. Une volonté qui a été critiquée à bien des égards, vu le manque d'initiative des interpellés et le manque de considération affiché à l'égard des membres de l'ex Comité. Ces derniers en accomplissement de leurs attributions visant à solliciter des autorités administratives des présentations de documents ou à visiter des lieux de détention, se sont souvent vus opposer des fins de non-recevoir. Un exemple est donné par Mme ETONGUE MAYER de la séquestration de membres de l'ex Comité par des éléments de la gendarmerie du Lac, un quartier administratif de Yaoundé, la capitale camerounaise. On en vient à se demander si de telles pratiques disparaîtront avec la substitution de plein droit opérée entre l'ex Comité et la CNDHL. Les pouvoirs publics et les individus au sein de la société camerounaise auront-ils plus de considération pour les membres de la CNDHL ? On ne peut qu'appeler de nos voeux une plus grande implication des pouvoirs publics dans l'activité de l'institution nationale de protection des droits fondamentaux, ce qui conduira inévitablement à une collaboration plus efficace entre ces différents acteurs de la protection des droits dans l'ordre juridique camerounais. La période transitoire sera aussi une période test de l'autonomie financière de la CNDHL. Si avec l'ex Comité on a pu décrier la dépendance créée par les pouvoirs publics, cette période permettra de scruter les agissements, les décisions prises en vue d'allouer les ressources matérielles nécessaires au fonctionnement de la CNDHL. La célérité dans la mise en place des différents organes de la CNDHL est le gage que les pouvoirs publics peuvent donner d'une véritable et irrévocable volonté de faire protéger les droits par cette institution conformément aux Principes de Paris. Or, quand on pose le constat que dans l'ordre juridique camerounais nombre d'institutions ont souvent été mises en place de façon très tardive, on est en droit d'être inquiet pour la CNDHL. En sus de cette institution, d'autres mécanismes non juridictionnels participent également à cette dynamique de protection des droits au Cameroun. Mais, ils se singularisent en ceci qu'il leur est attribué un secteur de la vie sociale dans lequel ils se doivent de protéger les droits. Ce sont les mécanismes de portée sectorielle. * 323 E. J. ETONGUE MAYER, ibid., p. 249. * 324 Art. 26, al. 1, in J.O.R.C., op. cit., p. 11. |
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