A - La mise en oeuvre du principe de
précaution
Le principe de précaution est apparu à propos de
problèmes liés à l'environnement de façon explicite
vers 1980 et a connu depuis lors un développement fulgurant.
Après avoir reçu une consécration publique à la
conférence de Rio en 1992, il fut, la même année inscrit
dans le traité de Maastricht et fut, en 1995, son entrée dans le
droit français. Le principe de précaution est désormais
une référence incontournable dans tous les domaines relatifs aux
risques. Il a largement débordé le champ du droit de
l'environnement. Il est devenu le guide d'action en matière d'OGM, de
santé des consommateurs et de sécurité
alimentaire40.
Le principe de précaution est réaffirmé
dans le préambule du protocole, dans l'énoncé de
l'objectif (avec une référence au principe 15 de la
Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement) et
dans les dispositions relatives à la prise de décisions par une
partie importatrice concernant l'importation d'un organisme vivant
modifié :
« L'absence de certitude
scientifique due à l'insuffisance des informations et connaissances
scientifiques pertinentes concernant l'étendue des effets
défavorables potentiels d'un organisme vivant modifié sur la
conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique dans la
partie importatrice, compte tenu également des risques pour la
santé humaine, n'empêche pas cette partie de prendre comme il
convient une décision concernant l'importation de l'organisme vivant
modifié en question pour éviter ou réduire au minimum ces
effets défavorables potentiels. »
Le principe de précaution est exprimé de
manière positive dans le traité de l'Union Européenne
depuis la réforme par le traité de
Maastricht41 et dans les lois nationales comme la
loi française du 02 Février sur le renforcement de la protection
de l'environnement, dite loi Barnier qui stipule que « l'absence de
certitude, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment,
ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées
visant à prévenir un risque de dommages graves et
irréversibles à l'environnement à un coût
économiquement acceptable »
Depuis, il a débordé les questions qui touchent
à l'environnement à propos desquelles il avait été
conçu pour englober les problèmes relatifs à
l'alimentation et à la santé.
39. Voir le site
ww2.creaweb.fr/bv/ogm/risques.html
40. Cf Michel PRIEUR opcit, page 154
41. Article 130 R du traité de Rome
tel que modifié par le traité de Maastricht
L'une des principales applications touchant à
l'activité agricole est relative aux plantes et OGM. Ainsi, la
conférence sur la biosécurité qui s'est tenue en
Août 1998 exprime les positions suivantes : `'Notant que
conformément au principe de précaution, l'absence de preuves
scientifiques irréfutables ne devrait pas être invoquée
pour reporter la prise de mesures nécessaires pour éviter ou
réduire au maximum les risques, lorsqu'ils existent, posés par
les organismes vivants modifiés résultant de la biotechnologie.
Considérant aussi que malgré les connaissances
considérables accumulées, il reste une part importante d'inconnu,
en particulier s'agissant de l'interaction entre l'environnement et les
organismes vivants modifiés issus de la biotechnologie moderne''.
Greenpeace s'oppose, au nom du principe de
précaution, à la dissémination d'organismes
génétiquement modifiés dans l'environnement,
« car les conséquences à moyen et à long terme
sont totalement inconnues »42
Le principe de précaution permet donc
permet de :
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Traduire en fait un principe inscrit en droit
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Définir un seuil d'acceptabilité du risque
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Distribuer la responsabilité
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Compenser en procédures le manque de certitudes
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Inscrire la décision dans une démarche d'assurance
qualité en réorganisant l'expertise sur les risques
(transparence, traçabilité, ...)
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B- Les mesures susceptibles d'être prises par
les Parties à l'échelon national
Dans le cadre d'accords pour l'environnement, la convention
sur la diversité biologique, les pays sont convenus de prendre des
mesures visant à protéger la biodiversité et le protocole
de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques fournit un
cadre réglementaire international au mouvement transfrontière des
OGM. Les pays ont accepté de coopérer, dans le cadre du Codex
Alimentarus, de la convention international pour la protection des
végétaux et de l'office internationale des épizooties,
pour la protection de la santé des êtres humains, des
végétaux et des animaux respectivement.
En effet, la convention sur la diversité biologique
vise à préserver la diversité biologique, favoriser une
exploitation rationnelle des éléments qui la composent et
encourager un partage équitable des bénéfices tirés
de l'utilisation des ressources génétiques. Son protocole de
Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques dispose que
les produits agricoles susceptibles de contenir des OGM et destinés
à l'exportation doivent impérativement être clairement
identifiés comme tels et autorise les Etats à déclarer
s'ils sont disposés ou non à accepter leur
importation43.
Ce protocole prévoit que chaque pays ait
élaboré une réglementation au sujet des OGM avant de se
lancer dans une expérimentation. L'Autriche et la Nouvelle
Zélande ont été parmis les premiers à créer
leur propre programme de biosécurité. Le ministère de
l'agriculture et des forêts de la Nouvelle Zélande a mis en place
la « biosecurity authority » en juillet 1999 afin de
protéger la biodiversité unique de la Nouvelle Zélande et
faciliter des exportations en gérant les risques pour la santé
des végétaux et des animaux.
42. www.greenpeace.org
43. ABC des Nations Unies, New York, 2001
page 305
En Autriche, le département de l'agriculture, des
pêches et des forêts a créé une unité
« biosecurity » en octobre 2000 afin d'évaluer les
risques de quarantaine associés aux importations des produits et de
mener des négociations techniques sur les questions d'accès aux
marchés d'exportation avec les organismes de contrepartie à
l'étranger44. La Côte d'Ivoire s'y
était attelée, mais son effort a été stoppé
par le coup d'état de décembre 1999. Le Mali et le Burkina y
travaillent à travers leur comité de
biosécurité45.
Le protocole offre aux pays la possibilité d'obtenir
des informations avant de consentir à l'importation d'organismes issus
de la biotechnologie. Il reconnaît à chaque Etat le droit de
réglementer ces organismes, en accord avec ses obligations
internationales. En outre, il crée un cadre propice à
l'amélioration des capacités des pays en développement en
ce qui concerne la protection de la biodiversité.
Un pays peut, conformément à son cadre
réglementaire national et dans la mesure où cela est compatible
avec l'objectif du protocole, décider de soumettre certains types d'OGM
à une évaluation des risques ou à d'autres exigences
Le Togo a signé ce protocole le 24 Mai 2000 et se doit
donc de prendre des mesures adéquates pour la prévention des
risques biotechnologiques. Le projet biosécurité est l'une de ces
mesures. Il devra aboutir à la mise en place du cadre national de
biosécurité. Il s'agira d'un ensemble de systèmes
législatif, administratif et décisionnel incluant
l'évaluation et la gestion des risques, de même qu'un
mécanisme de participation et d'information
publique46.
La mise en place du cadre national de
biosécurité permettra au pays de :
· Etre en mesure de faire un choix, dont il aura
informé les parties concernées, sur la possibilité
d'importer, d'utiliser ou non les OGM ;
· Mettre en place le moyen qui l'aidera à
estimer, évaluer et gérer un éventuel effet pervers
lié aux mouvements transfrontières, au transit, à la
manipulation et à l'utilisation des OGM ;
· Donner l'occasion à tous les centres de
décision de s'exprimer ;
· Renforcer ses capacités humaines et
institutionnelles pour les aspects techniques et l'évaluation des
risques ;
· Prendre des décisions durables relatives
à l'utilisation des OGM ;
· Etre en conformité avec les dispositions du
protocole de Cartagena
44. voir le site www.fao.org/ag/fr/magazine/01031.htm)
45 .FAUJAS (Alain) jeune afrique l'intelligent
précité page 68
46. source Togo presse no 6674 du 12 déc 2003 page 4
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