REPUBLIQUE TOGOLAISE
ROYAUME DES PAYS BAS
UNIVERSITE DE LOME
UNIVERSITE DE MAASTRICHT
FACULTE DE DROIT
FACULTE DE DROIT
(FDD)
REPUBLLIQUE DU BENIN
ROYAUME DE BELGIQUE
UNIVERSITE D'ABOMEY CALAVI
UNIVERSITE DE LIEGE
FACULTE DE DROIT ET DES
FACULTE DE DROIT
SCIENCES POLITIQUES
(FDSP)
Année Universitaire 2002-2003
THEME :
LA BIOSECURITE DANS
LE PROTOCOLE DE CARTAGENA
MEMOIRE
DE TROISIEME CYCLE POUR L'OBTENTION
DU DIPLOME D'ETUDES APPROFONDIES (DEA) EN DROIT
Option : Droit et politique de l'environnement
Présenté et soutenu
Sous la direction de
Publiquement par :
M. VIGNON
YAO
KOUNTE ALASSANI
Maître de
Conférence
Agrégé à la
Faculté de droit de
l'université de Lomé
DEDICACE
A Dieu, Le Tout Puissant.
Pour sa protection qui ne m'a
Jamais fait défaut.
A ma Grande Mère
Pour les sacrifices consentis depuis tant d'années
A mes Frères et Soeurs
Pour leur soutien.
REMERCIEMENTS
La rédaction d'un mémoire requiert
généralement la coopération et le soutien de nombreuses
personnes. Nous remercions grandement Monsieur VIGNON Yao
d'avoir accepté de diriger notre mémoire et de nous guider avec
patience et abnégation. ; grâce à cette contribution,
ce mémoire peut mieux répondre aux besoins de la population
à laquelle il s'adresse.
Nous ne passerons pas sous silence le grand travail abattu par
les Universités de Liège (BELGIQUE) et de Maastricht (HOLLANDE)
pour la documentation qui nous a permis de cerner le contenu de ce travail.
Nous n'oublierons pas le grand travail abattu par Monsieur FAURE
M. dans la réalisation du projet DEA-Droit et Politique de
l'environnement à la faculté de Droit de l'Université de
Lomé
Nous avons aussi apprécié les conseils et le
soutien de Monsieur AHADZI-NONOU Koffi.
Nous n'oublions pas non plus les encouragements et l'aide
offerts par Monsieur SAPARAPA Souleymane, Directeur
Générale de la SOTOSUR.
Nous tenons aussi à remercier nos collègues et la
direction de la faculté de droit pour leur encouragement et leur
soutien. Sans les efforts et le dévouement de Mlle AKAKPO
Affi, qui a tapé le manuscrit nous n'aurions pas pu respecter
les échéances.
Notre reconnaissance va aussi à toutes les personnes
et amis qui nous ont, d'une manière ou d'une autre, aidé pour la
réalisation de ce document. Nous pensons particulièrement
à Madame JOHANNE Huppé du secrétariat
pour la biosécurité, Monsieur KODZO
Koudadjé, coordonnateur national de la
biosécurité, Monsieur NADIO Namory, Inspecteur
des douanes, Monsieur MIKOTAKATOLA Gninkouba, chargé
des relations publiques à la SOTOSUR.
Finalement nous sommes tout particulièrement
reconnaissants à nos familles qui ont dû composer avec nos
horaires surchargées et notre moins disponibilité ; leur
soutien et leur amour ont fait toute la différence.
Les Universités précitées (cf.
page de garde ) n'entendent donner aucune approbation ni improbation aux
opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent être
considérées propres à son auteur.
PLAN GENERAL DU MEMOIRE
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE
La protection de l'environnement par un renforcement de la
sécurité des mouvements transfrontaliers
Chapitre I. Le dispositif de
sécurité prévu par le protocole
Section 1 : Les principales dispositions de
sécurité en matière de mouvements transfrontaliers
Paragraphe 1 : Un mécanisme de
sécurité basé sur le mouvement transfrontalier des OVM
A : L'objectif du protocole
B : Le champ d'application du
protocole
Paragraphe 2 : Les instances chargées des missions
de sécurité
A : La réglementation
s'appliquant aux mouvements transfrontaliers des OVM
B : Les procédures pour un accord
préalable donné en connaissance de cause
Section 2 : Les instances chargées des
missions de sécurité
Paragraphe 1 : L'institution d'instances
spécifiques
A: Les instances
B : Les mesures de
sécurité à prendre
Paragraphe 2 : La répartition des
responsabilités
A : L'évaluation des risques
B : La responsabilisation des acteurs
Chapitre II : La recherche d'une protection plus
efficace de la diversité biologique
Section 1 : Une protection fondée sur le
principe de précaution
Paragraphe 1 : La biotechnologie : un domaine en
proie aux incertitudes scientifiques
A : L'absence de certitude scientifique
absolue
B : Une incertitude scientifique dans la
préservation de la biodiversité
Paragraphe 2 : La nécessité de
réduire toutes les menaces potentielles à la diversité
biologique
A : Une obligation de prudence et de
vigilance
B : Une anticipation des drames
écologiques
Section 2 : La nécessité d'une
protection durable de la diversité biologique
Paragraphe 1 : La prise en compte des risques liés
aux organismes vivants modifiés
A : D'éventuels périls pour
l'environnement
B : La pollution génétique
Paragraphe 2 : L'exigence de règles
prévisibles et sûres
A : La mise en oeuvre du principe de
précaution
B : Les mesures susceptibles d'être
prises par les Parties à l'échelon national
DEUXIEME PARTIE
La protection de la santé humaine par un contrôle
des mouvements des OVM susceptibles d'avoir un effet nocif sur la santé
humaine
Chapitre 1 : La reconnaissance par le protocole des
avantages de la biotechnologie moderne
Section 1 : Les enjeux de la biotechnologie moderne
Paragraphe 1 : Les enjeux sociaux
A : Les OGM : une solution à
la faim
B : L'utilisation pharmaceutique des
OGM
Paragraphe 2: Les enjeux agricoles et environnementaux
A : Les enjeux agricoles
B : Les enjeux environnementaux
Section 2 : Les impacts des OGM sur la santé
humaine
Paragraphe 1 : Un probable risque de dommages graves et
irréversibles sur la santé humaine
A : Des risques considérables
B : D'éventuels périls
pour la santé humaine
Paragraphe 2 : Les débats autour de la question
A : La divergence des points de vue
B : L'ESB et le principe de
précaution
Chapitre 2 : L'application du principe de
précaution dans le domaine de la biotechnologie
moderne
Section 1 : Les OVM et le principe de précaution
Paragraphe 1 : La sécurité alimentaire
A : La nécessité d'une
sécurité alimentaire
B : La multiplication des mesures de
protection face aux risques sanitaires
Paragraphe 2 : La prévention des risques
biotechnologiques
A : La nécessité d'une
biosécurité
B : La nécessité d'une
sécurité alimentaire durable
Section 2 : La réglementation des produits GM par le
protocole
Paragraphe 1 : Les techniques de contrôle
A : La traçabilité
B : La mise en place d'un centre
d'échange pour la prévention des risques biotechnologiques
Paragraphe 2 : La prise en compte des risques liés
aux produits GM
A : Le renforcement des capacités
et finances
B: Sensibilisation et formation du public
CONCLUSION
GENERALE
SIGLES ET ABBREVIATIONS
ADN : Acide désoxyribonucléique
APC : Accord Préalable en
Connaissance de cause
CDB : Convention sur la
Diversité Biologique
CDI : Commission de Droit
International
CIJ : Cour International de
Justice
CJCE : Cour de Justice des
Communautés Européennes
CNUED : Conférence des
Nations Unies sur l'Environnement et le Développement
DEA : Diplôme d'Etudes
Approfondies
ESB : Encéphalopathie
Spongiforme Bovine
FAO : Organisation des Nations
Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture
GM : Génétiquement
Modifié
OGM : Organisme
Génétiquement Modifié
OIE : Organisation Internationale
des Epizooties
OMC : Organisation Mondiale du
Commerce
ONG : Organisation
Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations
Unies
OVM : Organisme Vivant
Modifié
PNUE : Programme des Nations Unies
pour l'Environnement
UE : Union Européenne
INTRODUCTION
Il est aussi bien connu que « chat
échaudé craint l'eau froide » ; ce proverbe
à lui seul explique toute la mobilisation provoquée par le
génie génétique1.Rarement
technique nouvelle fut accueillie avec autant de suspicion. Plusieurs pays ont
même empêché l'importation de produits provenant d'animaux
ou de végétaux modifiés génétiquement.
L'Autriche et le Luxembourg sont opposés à
l'utilisation de semence, de maïs
transgénique2 et il a fallu l'intervention
de la Commission Européenne pour obtenir la levée de cet
interdit. L'ampleur de la polémique a obligé la Suisse à
organiser un référendum en 1998 aux fins d'interdire toute
manipulation génétique sur le territoire de la
confédération helvétique.
Pourtant il y a 3 ou 4 décennies, l'application de
nouvelles techniques comme le spatial, le nucléaire, ou l'informatique
était accueillie dans le monde entier comme des progrès
scientifiques indéniables, avec les conséquences positives sur la
qualité de la vie et l'emploi. Cet enthousiasme d'antan contraste
sévèrement avec le rejet actuel du génie
génétique. Ceci s'explique par les désillusions techniques
spectaculaires vécues par les générations actuelles. On
peut citer entre autres, les événements relatifs à
l'Amoco-Cadiz, Bhopal3,
Seveso4et la profonde psychose de
Tchernobyl5, alors que les scientifiques se
voulaient rassurants. En Europe, la suspicion du génie
génétique a été accentuée par les affaires
du sang contaminé et de la vache folle.
Pourtant la manipulation génétique ne date pas
d'hier. Depuis des millénaires, les paysans se servent de la
reproduction sélective et de la fertilisation croisée pour
modifier des espèces végétales et animales, et favoriser
des traits et caractéristiques propres à améliorer la
production alimentaire d'autres besoins humains. Des artisans ont
exploité les techniques de fermentation traditionnelles pour transformer
des céréales en pain et en bière, et du lait en fromage.
Ces modifications intentionnelles du monde naturel ont apporté une
contribution de taille au bien-être de l'homme.
Toutefois, depuis une trentaine d'années la
biotechnologie6 moderne révolutionne notre
capacité à transformer le vivant. Des scientifiques ont appris
à extraire et à transférer d'une espèce à
l'autre des chaînes d'ADN7 et des
gènes8 complets contenant les instructions
biochimiques qui déterminent le mode de développement d'un
organisme vivant. Grâce à des techniques très complexes,
ils manipulent avec précision la structure génétique
complexe de cellules vivantes individuelles. Ils sont, par exemple, capables
d'intégrer des gènes de poisson d'eau froide dans une tomate pour
créer une plante résistante au gel, ou d'utiliser des
gènes bactériens pour produire du maïs tolérant les
herbicides. Le résultat de ces manipulations est appelé organisme
vivant modifié (OVM) ou, plus communément, organisme
génétiquement modifié (OGM)
1. le génie génétique
c'est l'ensemble des techniques permettant d'introduire dans une cellule un
gène qu'elle ne possède pas ou de modifier l'expression d'un
gène déjà présent dans les cellules d'un
organisme.
2. Qui comporte dans son patrimoine
génétique, un transgène
3. Explosion à Bhopal (Inde) en
Déc. 1984 d'une unité de production d'insecticide de l'entreprise
Union Carbide, filiale d'une multinationale américaine faisant 2500
morts et 250.000 blessés.
4. Il s'agit des accidents causés dans
le domaine de la chimie par l'explosion des fûts de dioxine le 10 Juillet
1976 à Seveso en Italie.
5. C'est la catastrophe la plus
meurtrière qui avait eu lieu dans le domaine nucléaire le 26
Avril 1986 à Tchernobyl en Ukraine, Journal Officiel des
Communautés Européennes (JOCE) n°175 DU 5 Juillet 1986
p.40
6. La biotechnologie c'est l'ensemble des
techniques qui utilisent des micro-organismes, des cellules animales,
végétales ou leurs constituants pour produire des substances
utiles à l'Homme.
7. (Acide
désoxyribonucléique) : molécule en double
hélice, l'ADN est le support physique de l'information
héréditaire, qui est transmis d'une génération
à la suivante.
8. Fragment de l'ADN comportant les
informations nécessaires à la fabrication d'une protéine.
Chaque gène correspond à un caractère
héréditaire particulier et constitue donc une unité
d'information génétique.
En effet, un OGM est un organisme dont le
génome9 a été modifié
par génie génétique. Les cellules reproductrices de
l'organisme possédant la modification, celle-ci est transmissible
à la descendance. Bien que n'étant pas mentionné dans le
protocole de Cartagena, le terme OGM peut différer en sens selon
l'utilisateur. Les OGM regroupent les OVM au sens du Protocole mais on appelle
aussi couramment «OGM» des produits génétiquement
modifiés prêts à la consommation qui ne sont plus vivants
et ne disposent plus de leur capacité à se reproduire, par
exemple la farine ou les aliments cuisinés issus d'OVM. Ces derniers ne
sont pas des OVM suivant la définition du Protocole, et ne sont donc pas
couverts par le Protocole. Par ailleurs, en Europe, un OGM est défini
comme «un organisme dont le matériel génétique a
été modifié d'une manière qui ne s'effectue pas
naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle»
(Directive 90/220). Le Codex Alimentarius, un organisme des Nations
Unies, fait aussi référence aux OGM dans un sens semblable.
Ainsi, selon l'endroit où ils sont utilisés, OGM et OVM peuvent
être ou non des synonymes.
Bref, un organisme vivant modifié(OVM) est un
organisme vivant possédant une nouvelle combinaison de matériaux
génétiques obtenus des biotechnologies modernes. C'est un
organisme issu des techniques du génie génétique,
c'est-à-dire dans lequel l'Homme a introduit des gènes
porteurs d'un caractère d'intérêt, gènes
provenant d'un autre organisme. Les cellules10 de
cet organisme sont dès lors dotées de ce gène nouveau (dit
transgène), et peuvent produire une
protéine11 spécifique.
Pour les partisans des modifications génétiques,
la biotechnologie contribuera à accroître la
sécurité alimentaire et le rendement durable des cultures, et
sera bénéfique à l'environnement car elle permettra de
réduire les superficies cultivées, les quantités de
pesticides et l'irrigation, et permettra de produire des traitements
médicaux, des vaccins, des biens industriels, des fibres et des
combustibles plus efficaces.
Toutefois, ces avancées rapides de la science suscitent
aussi nombre de préoccupations liées à l'éthique,
l'environnement, la santé et la société. Nombre de
personnes estiment que la biotechnologie moderne est trop récente pour
savoir vraiment comment ces produits vont se comporter et évoluer, et
quelles interactions ils auront avec les autres espèces. Par exemple la
capacité de tolérer les herbicides ne risque-t-elle pas de passer
des cultures transgéniques aux espèces sauvages
apparentées ? Les plantes qui ont été
génétiquement modifiées pour repousser les insectes ne
risquent-elles pas de nuire à des insectes
bénéfiques ? La compétitivité accrue d'un OGM
ne risque-t-elle pas de porter atteinte à des écosystèmes
riches en biodiversité ?
Toutes ces préoccupations expliquent que les OGM
continuent à faire les grands titres de l'actualité.
Ce débat a, fort heureusement, débouché
sur un vaste consensus, à savoir que la biotechnologie moderne offre un
potentiel considérable pourvu qu'elle soit développée et
utilisée dans des conditions de sécurité satisfaisantes,
notamment pour l'environnement. Les pays dotés d'industries
biotechnologiques puissantes possèdent une législation nationale
et des systèmes de gestion des risques. Cependant, nombre de pays en
développement intéressés par la biotechnologie moderne et
ses produits en sont encore à rédiger leur
réglementation. Des règles internationales sont également
nécessaires, étant donné que la biotechnologie est une
industrie mondiale et que les OGM font l'objet d'un commerce international.
9. Le patrimoine génétique
d'un être vivant, c'est-à-dire l'ensemble des informations
génétiques de cet organisme.
10. Animales ou végétales,
elles forment les tissus des organismes pluricellulaires. Chaque type de
cellule a un rôle spécifique.
11. Ces molécules forment la
matière première dont les êtres vivants sont
constitués. Elles sont codées par les gènes (un
gène code une protéine)
En 1995, les Parties à la convention sur la
diversité biologique ont réagi à ce défi en
entamant des négociations sur un accord ayant force de loi et portant
sur les risques potentiels que présentent les OGM. Ces discussions ont
abouti, en janvier 2000, à l'adoption du protocole de Cartagena sur la
prévention des risques biotechnologiques. L'adoption
d'un texte officiel est l'étape qui a été franchie
à Montréal le 29 janvier 2000 où plus de 130 pays ont
convenu d'un texte légal précisant la portée du Protocole
de Cartagena. La signature du Protocole indique l'intention
d'un pays (ou Partie à la Convention sur la diversité biologique)
de considérer la ratification éventuelle sans que le pays ne soit
précisément lié sur le plan des obligations du Protocole.
La troisième étape de la ratification lie le
pays par une loi internationale, et exige que des mesures légales
nationales soient en place pour mettre en oeuvre le Protocole. Ce sont ces
mesures légales qui s'appliqueraient au pays, et non le Protocole
lui-même, et qui toucheraient directement les divers intervenants.
Ce protocole, qui doit son nom à la ville colombienne
où a été lancée la dernière série de
pourparlers, établit pour la première fois un système
réglementaire complet visant à assurer le transfert, la
manipulation et l'utilisation sans danger des OGM faisant l'objet de mouvements
transfrontières.
Le protocole de Cartagena s'inscrit donc dans le cadre de la
convention sur la diversité biologique adoptée le 22 Mai 1992 au
cours de la conférence des Nations Unies pour l'environnement et le
développement (CNUED) ou « sommet de la terre » de
Rio de Janeiro(Brésil). Elle est entrée en vigueur le 29
Septembre 1994 .Cette convention répondait au projet et au souci
très ambitieux de protéger la diversité biologique dans
toutes ses composantes, en établissant un cadre commun destiné
à servir de référence aux politiques nationales. Cette
convention apparaît comme un instrument nouveau à double
titre : sa globalité et le droit à l'exploitation des
ressources naturelles. D'une part, elle est le signe d'une volonté de
protection générale qui ne se limite pas à certaines
espèces ou à certains secteurs biologiques. D'autre part, elle
rompt avec la thèse développée dans les années 1970
et 1980, des ressources biologiques considérées comme le
patrimoine commun de l'humanité. Elle reconnaît à chaque
Etat le droit souverain d'exploiter les ressources biologiques mais dans une
perspective de développement durable c'est-à-dire dans le sens du
rapport Brundtland12 .
Or la convention sur la diversité biologique offre la
possibilité de conclure des protocoles pour en préciser certains
aspects. C'est cette opportunité prévue à l'article 19
paragraphe 3 qui a été saisie pour assurer la prévention
des risques biotechnologiques. Suite à la recommandation formulée
par l'article 19 paragraphe 3 de la convention, les jalons du protocole furent
posés dès sa première conférence des Parties tenue
du 28 Novembre au 09 Décembre 1994 à Nassau aux Bahamas. Cette
occasion permit de constituer un groupe d'experts sur la
biosécurité (« biosafety »). Ce groupe se
réunit pour la première fois à Madrid entre le 24 et le 28
Juillet 1995. Selon le rapport de cette réunion, plusieurs
délégations présents manifestèrent le désir
de voir élaborer un instrument juridique portant sur la
biosécurité. Sur cette base, des négociations ont
été ouvertes en 1996 et ont permis, dans le texte du protocole,
de donner un contenu juridique à 2 principes qui avaient
été émergés des débats du sommet de
Rio : « le principe du consentement
informé » et le principe de précaution.
Le protocole de Cartagena est par ailleurs , le premier
instrument international contraignant permettant de renforcer la
sécurité des mouvements transfrontières des organismes
vivants modifiés (OVM) de façon à protéger
l'environnement et la santé humaine.
12 . Le rapport porte le nom de l'ancien premier ministre de
Norvège, Mme G-H Brundtland, qui a présidé cette
commission créée par la résolution 38/161 de
l'Assemblée Générale de l'ONU du 19 décembre 1983.
La version anglaise du rapport a paru en 1987 sous le titre « Our
Common Future ». Quant à la version française, elle a
été publiée avec le soutien financier du ministère
de l'environnement du Québec sous le titre « Notre avenir
à tous », les éditions du fleuve, les publications du
Québec, Montréal, 1988, 454 p
Le rapport Brundtland définit ainsi le
développement durable : « Un développement qui répond
aux besoins du présent sans compromettre la capacité des
générations futures de répondre aux leurs. »
L'essentiel de ce nouveau traité ouvert à la
signature à partir du 15 Mai 2000 et qui est entré en vigueur le
11 Septembre 2003, concerne le contrôle de la circulation
transfrontière des OGM sur la base du principe de précaution
proclamé au principe 15 de la Déclaration de
Rio13.
Le Protocole de Cartagena sur la prévention des risques
des biotechnologies relativement à la convention sur la
biodiversité reconnaît que la biotechnologie moderne offre un
potentiel considérable pour le bien-être et la santé
humaine pourvu, qu'elle soit développée et utilisée dans
des conditions de sécurité satisfaisante pour l'environnement et
la santé humaine. Il adhère à un principe de
précaution. Il est mentionné que les accords sur le commerce et
l'environnement devraient se soutenir mutuellement en vue de l'avènement
d'un développement durable. Il conclut que l'évaluation des
risques devraient être effectuée selon des méthodes
scientifiques éprouvées et dans la transparence.
L'évaluation des risques peut tenir compte des avis techniques et
directives des organisations internationales compétentes et elle devrait
être effectuée au cas par cas. Il convient d'ajouter que le
protocole de Cartagena spécifie que les Etats ont le droit
d'émettre des réserves et de refuser l'importation d'OGM sur leur
territoire, s'ils considèrent que les évaluations scientifiques
sont insuffisantes ou douteuses.14
La convention s'inspire du modèle de la convention de
Bâle15 sur le contrôle des mouvements
transfrontaliers de déchets dangereux et leur élimination en
introduisant une procédure de notification de l'exportation et d'accord
écrit à l'importation.
Les OGM laissent rarement indifférent ! On raconte
beaucoup de choses au sujet de ces nouveaux aliments : que c'est
dangereux, ou bien que c'est bien pour l'environnement, qu'ils vont nourrir la
Terre pour faire face à l'explosion démographique.
Au sujet des organismes génétiquement
modifiés ( OGM ), il y a beaucoup d'affirmations mais aussi beaucoup
d'interrogations, et d'indécisions juridiques. Mais pourquoi ? Que
sont ces petites bêtes ? En mange-t-on ? Le profane, c'est-
à- dire les deux tiers d'entre nous ignore de quoi il s'agit. Alors
doit-on en avoir peur ?
Il est temps de savoir où nous en sommes et expliquer
pourquoi nous en sommes là. C'est pourquoi nous allons essayer
d'aborder dans une première partie, la protection de l'environnement par
un renforcement de la sécurité des mouvements transfrontaliers et
dans une deuxième partie la protection de la santé humaine par un
contrôle des mouvements des OVM susceptibles d'avoir des effets nocifs
sur la santé humaine.
13. Principe 15 de Rio : « pour
protéger l'environnement, des mesures de précaution doivent
être largement appliquées par les Etats selon leur
capacité. En cas de risque de dommages graves et irréversibles,
l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de
prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures
effectives visant la dégradation de l'environnement ».
14.
www.biodiv.org/biosafe/Protocol/Protocol.htm
15. Convention de Bâle de 1989 sur le contrôle des
mouvements transfrontaliers de déchets dangereux
PREMIERE PARTIE :
LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT PAR UN RENFORCEMENT DE
LA SECURITE DES MOUVEMENTS TRANSFRONTALIERS
Le protocole de Cartagena est le premier instrument
international contraignant permettant de renforcer la sécurité
des mouvements transfrontaliers des organismes vivants modifiés (OVM),
de façon à protéger l'environnement et la santé
humaine.
Nous allons, dans cette première partie, analyser le
dispositif de sécurité prévu par le protocole
(chapitre 1), et la recherche d'une protection plus efficace
de la diversité biologique (chapitre 2).
CHAPITRE 1: LE DISPOSITIF DE SECURITE PREVU PAR
LE PROTOCOLE
Ceci se retrouve clairement dans les principales dispositions
contenues dans le texte du protocole (Section 1) et à
travers les instances chargées des missions de sécurité
prévues par le protocole (Section 2).
SECTION 1 : LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE SECURITE
EN
MATIERE DE MOUVEMENTS
TRANSFRONTALIERS
Le Protocole de Cartagena définit
précisément son champ d'application, instaure une nouvelle
procédure permettant aux Etats importateurs d'organismes vivants
modifiés d'être pleinement informés des risques et
d'éventuellement interdire l'importation.
Cette première section traitera successivement d'un
mécanisme de sécurité basé sur le mouvement
transfrontalier des OVM (paragraphe 1) et les règles
s'appliquant aux mouvements transfrontaliers des OVM (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : Un mécanisme de
sécurité basé sur le mouvement transfrontalier des
OVM
Nous préciserons d'abord l'objectif du protocole
(A) ensuite son champ d'application (B)
A- L'objectif du protocole
De son vrai nom, le « Protocole de Cartagena sur la
prévention des risques biotechnologiques relatif à la Convention
sur la diversité biologique », il a pour objectif de
contribuer à contrôler le transport, le mouvement entre les pays
et l'utilisation d'un OVM, en assurant un degré adéquat de
protection de la diversité biologique et de prévention des
risques pour la santé humaine. Il est basé sur l'approche de
précaution
L'article premier définit l'objectif du protocole en
conformité avec l'approche de précaution : assurer un niveau
de protection adéquat pour le transfert, la manipulation et
l'utilisation sans danger d'organismes vivants modifiés qui peuvent
avoir des effets défavorables sur la diversité biologique et la
santé humaine.
En effet, l'article 1
dispose : « Conformément à l'approche de
précaution consacrée par le principe 15 de la Déclaration
de Rio sur l'environnement et le développement, l'objectif du
présent protocole est de contribuer à assurer un degré
adéquat de protection pour le transfert, la manipulation et
l'utilisation sans danger des organismes vivants modifiés
résultant de la biotechnologie moderne qui peuvent avoir des effets
défavorables sur la conservation et l'utilisation durable de la
diversité biologique, compte tenu également des risques pour la
santé humaine, en mettant plus précisément l'accent sur
les mouvements transfrontières ».
Il reconnaît que les OVM sont porteurs de risques et
méritent un traitement spécifique.
De ce fait, les parties s'engagent à prendre toutes les
mesures juridiques et administratives nécessaires à l'application
du protocole. Rien dans le protocole ne restreint le droit des Etats de prendre
des mesures plus rigoureuses, dans la mesure où elles sont compatibles
avec l'objectif et les dispositions du protocole (article 2).
L'article 3 définit le terme d'organisme vivant
modifié comme « toute entité biologique capable de
transférer ou de répliquer du matériel
génétique, y compris des organismes stériles, des virus et
des viroïdes,[...]possédant une combinaison de matériel
génétique inédite obtenue par recours à la
biotechnologie moderne ».
Au titre du protocole, la « biotechnologie
moderne » s'entend d'une part, « de l'application de
techniques in vitro aux acides nucléiques, y compris la recombinaison de
l'acide désoxyribonucléique (ADN) et l'introduction directe
d'acides nucléiques dans les cellules ou organites », et
d'autre part, « de la fusion cellulaire d'organismes n'appartenant
pas à une même famille taxonomique qui surmontent les
barrières naturelles de la physiologie de la reproduction ou de la
recombinaison ».
Il ressort de cette définition que les organismes
génétiquement modifiés (OGM) sont l'une des deux grandes
catégories d'OVM, c'est-à-dire ceux dont le matériel
génétique ou ADN a été transformé d'une
manière qui ne s'effectue pas par multiplication ou recombinaison
naturelle.
Le protocole institue un cadre réglementaire à
l'échelle internationale pour concilier les impératifs
commerciaux et la protection de l'environnement et de la santé humaine
par rapport à l'industrie de la biotechnologie qui connaît un
essor rapide.
B. Le champ d'application du
protocole
Le protocole porte essentiellement sur des OGM
destinés à être introduits directement dans l'environnement
(tels que semences et poissons) et sur les produits agricoles
génétiquement modifiés (comme le maïs et les
céréales destinés à être utilisés
directement pour l'alimentation humaine et animale, ou à être
transformés). Il ne s'applique pas aux OGM qui sont des produits
pharmaceutiques destinés à l'homme relevant d'autres accords
internationaux, ni aux produits qui sont des dérivés des OGM,
tels que l'huile de friture issue de maïs génétiquement
modifié ou le papier issu d'arbre génétiquement
modifié.
Le protocole de Cartagena s'appliquera, selon l'article 4 aux
mouvements transfrontières, au transit, à la manipulation et
à l'utilisation de tout organisme vivant modifié qui pourrait
avoir des effets défavorables sur la diversité biologique et la
santé humaine.
En effet, le protocole de distingue trois catégories
d'Organismes Vivants Modifiés :
- Les Organismes Vivants Modifiés destinés
à être utilisés en milieu confiné
- Les Organismes Vivants Modifiés destinés
à être introduits dans l'environnement(semences
transgéniques).
- Les Organismes Vivants Modifiés destinés
à être utilisés à l'alimentation ou à
être transformés (exemple lécithine de soja).
Le protocole de Cartagena n'aborde pas les questions
liées à la sécurité sanitaire des aliments.
Celles-ci sont traitées par des spécialistes associés
à d'autres mécanismes internationaux, tel le Codex
alimentarius16. Le protocole ne traite pas non plus
des produits non vivants dérivés de végétaux ou
d'animaux génétiquement modifiés, tels le maïs
usiné ou d'autres produits alimentaires transformés. Il n'exige
pas la séparation des denrées susceptibles de contenir des
organismes vivants modifiés . Les denrées ne sont pas
visées par sa procédure d'accord préalable en connaissance
de cause, laquelle aurait pour effet de perturber gravement le commerce et de
compromettre l'accès aux produits alimentaires sans avantages
proportionnels pour l'environnement.
16. La Commission du Codex Alimentarius a
été créée en 1963 par la FAO et l'OMS afin
d'élaborer des normes alimentaires, des lignes directrices et d'autres
textes, tels que des codes d'usages, dans le cadre du programme mixte
FAO/OMS sur les normes alimentaires. Les buts principaux de ce programme sont
la protection de la santé des consommateurs, la promotion de pratiques
loyales dans le commerce des aliments et la coordination de tous les travaux de
normalisation ayant trait aux aliments entrepris par des organisations aussi
bien gouvernementales que non gouvernementales.
Le protocole n'exige pas l'étiquetage des produits de
consommation. Son objectif est de faire face aux risques que les organismes
vivants modifiés pourraient présenter pour la diversité
biologique. Les questions liées aux préférences des
consommateurs ne figuraient pas à l'ordre du jour des
négociations. L'obligation prévue dans le protocole de documenter
l'identification des produits expédiés qui portent les mentions
« peuvent contenir des organismes vivants modifiés »
et « ne sont pas destinés à être introduits
intentionnellement dans l'environnement » peut être satisfaite
par la présentation des documents d'expédition.
Aux termes du protocole, l' « utilisation en
milieu confiné » s'entend de toute opération,
entreprise dans un dispositif, une installation, ou toute autre structure
physique, faisant intervenir des organismes vivants modifiés qui sont
réglementés par des mesures spécifiques qui en limitent
effectivement le contact avec le milieu extérieur, et l'impact sur ce
milieu.
Le protocole ne s'applique pas, en revanche, aux mouvements
transfrontières d'OVM qui sont des produits pharmaceutiques
destinés à l'homme relevant d'autres accords ou organismes
internationaux (article 5). Aussi, les règles du protocole ne
s'appliqueront pas à des OVM en transit sur le territoire d'un Etat, le
transit relevant de la réglementation de chaque Etat ( article 6
paragraphe 2)
Selon le Protocole, « mouvement
transfrontière » s'entend de tout mouvement d'un organisme
vivant modifié en provenance d'une Partie et à destination d'une
autre Partie, à ceci près qu'aux fins des articles 17 et 24,
``mouvement transfrontière'' s'étend aux mouvements entre Parties
et non Parties.
Paragraphe 2 : Les règles s'appliquant aux
mouvements transfrontières des OVM
Le protocole de Cartagena encourage la prévention des
risques biotechnologiques en établissant les règles pratiques et
des procédures applicables au transfert, à la manipulation et
à l'utilisation sans danger des OGM en insistant tout
particulièrement sur la réglementation des mouvements
transfrontières. Ceci nous conduit à traiter successivement dans
ce paragraphe la réglementation s'appliquant aux mouvements
transfrontaliers des OVM (A) ensuite les procédures
pour un accord préalable donné en connaissance de cause
(B).
A- La réglementation s'appliquant aux mouvements
transfrontaliers des OVM
Ce système comporte deux ensembles distincts de
procédures, l'un pour les OGM qui sont introduits intentionnellement
dans l'environnement, et l'autre pour les OGM qui sont destinés à
être utilisés directement pour l'alimentation humaine et animale,
ou à être transformés. Ces deux ensembles de
procédures visent à garantir aux pays destinataires les
informations nécessaires à une prise de décision en
connaissance de cause concernant les importations d'OGM.
Le protocole de Cartagena fixe les règles devant
s'appliquer aux mouvements transfrontaliers d'OVM en fonction de leur
utilisation : en milieu confiné, dissémination dans
l'environnement, utilisation directe dans l'alimentation humaine ou animale,
utilisation directe (transformation).
Dans le cas d'une utilisation en milieu confiné, la
partie importatrice fixe ses propres normes, mais la procédure dite
« d'accord préalable en connaissance de cause» ne
s'applique pas comme dans les autres cas (article 6 paragraphe2).
L'article 11 du présent protocole fixe la
procédure pour les organismes vivants modifiés destinés
à être utilisés directement pour l'alimentation humaine ou
animale, ou à être transformés. En effet l'article 11(1)
stipule que : « Toute Partie qui prend une décision
définitive concernant l'utilisation sur le territoire national, y
compris la mise sur le marché, d'un organisme vivant modifié qui
peut faire l'objet d'un mouvement transfrontière et qui est
destiné à être utilisé directement pour
l'alimentation humaine ou animale ou à être transformé,
doit, dans les quinze jours qui suivent, en informer les autres Parties, par
l'intermédiaire du Centre d'échange pour la prévention des
risques biotechnologiques. Cette information doit contenir au minimum les
renseignements demandés à l'annexe II. La partie fournit par
écrit une copie de cette information aux correspondants nationaux des
Parties qui ont informé d'avance le Secrétariat du fait qu'elles
n'ont pas accès au Centre d'échange pour la prévention des
risques biotechnologiques. La présente disposition ne s'applique pas aux
décisions concernant les essais sur le terrain ».
Lorsqu'un pays décide d'importer un OGM, le pays
exportateur doit veiller à ce que tous les envois soient
accompagnés des documents pertinents. Les gouvernements doivent
également adopter des mesures pour gérer tous les risques
identifiés par les évaluations, et continuer de surveiller et
contrôler les risques pouvant advenir dans le futur. Cela s'applique
aussi aux OGM faisant l'objet d'un commerce qu'aux OGM d'origine nationale.
En outre le protocole déclare que les
« mouvements transfrontières d'organismes vivants
modifiés entre parties et non-parties doivent être compatibles
avec l'objectif du protocole ». Dès lors, bien que le
protocole exige simplement que les échanges soient compatibles avec
« l'objectif », et l'objectif seulement, de celui-ci, nous
considérons que, d'un point de vue pratique, les entreprises des pays
non-parties désireuses d'exporter dans un pays partie devront se
conformer à la réglementation mise en place dans le pays partie
importateur conformément au protocole de Cartagena.
Aussi, l'absence de certitudes scientifique
.....n'empêche pas cette Partie de prendre comme il convient une
décision concernant l'importation de cet organisme vivant modifié
s'il est destiné à être utilisé directement pour
l'alimentation humaine ou animale ou à être transformé,
pour éviter ou réduire au minimum ces effets défavorables
potentiels. (article 11 paragraphe 8).
B- Les procédures pour un accord préalable
donné en connaissance de cause (APC)
Les règles et procédures les plus strictes
concernant la prévention des risques biotechnologiques s'appliquent
exclusivement aux OGM destinés à être introduits
intentionnellement dans l'environnement. Elles concernent notamment les
semences, les poissons vivants et autres organismes destinés à se
développer et possédant les qualités nécessaires
pour transmettre leurs gènes modifiés aux
générations futures.
Cette procédure oblige l'exportateur à obtenir
le consentement du pays importateur avant le premier mouvement
transfrontière d'organismes vivants modifiés destinés
à être introduits intentionnellement dans l'environnement de la
partie importatrice, tels les semences, les poissons destinés à
être lâchés et les micro-organismes libérés
dans le cadre de mesures de biorestauration.
En effet, selon l'article 7, la procédure
« d'accord préalable en connaissance de cause »
s'applique en cas d'introduction dans l'environnement et d'utilisation dans
l'alimentation ou de transformation, sauf si la Conférence des Parties
en décide autrement en raison de la faiblesse du risque.
Cette procédure se déroule selon les
étapes suivantes : la Partie exportatrice ou l'exportateur doit
adresser une notification à la Partie importatrice avant toute
exportation et engage sa responsabilité sur l'exactitude des
informations communiquées et qui sont réglementées par une
annexe spécifique (article 8).
La Partie importatrice doit alors accuser réception de
cette notification dans les 90 jours et autorise ensuite explicitement l'envoi
dans un délai de 270 jours ou motive son refus. Si elle ne le fait pas,
son silence n'équivaut pas à son consentement ( article 9). La
Partie importatrice peut alors, dans ce délai accepter l'importation, la
refuser ou demander des informations complémentaires et donc le
proroger. Ces décisions doivent être motivées. L'absence de
certitude scientifique, conformément au principe de précaution,
peut suffire pour réglementer ou interdire une importation, s'il existe
des craintes sur les effets de l'OVM dont l'importation est demandée
(article 10). La procédure d'accord préalable en connaissance de
cause garantit ainsi au destinataire la possibilité d'évaluer les
effets défavorables potentiels d'un OGM avant d'accepter son
importations.
La procédure d'APC ne s'applique qu'au premier
mouvement transfrontière intentionnel d'un OGM destiné à
être introduit dans l'environnement. Elle ne s'applique pas aux OGM en
transit dans un pays, aux OGM destinés à être
utilisés en milieu confiné (dans un laboratoire scientifique par
exemple) ou aux OGM destinés être utilisés directement pour
l'alimentation humaine et animale, ou à être transformés
(tels que maïs ou tomates).
Une procédure moins stricte s'applique pour
l'importation d'OVM destinés à l'alimentation ou à la
transformation (article 11). Cette procédure est fondée sur une
notification préalable à l'organisme chargé de centraliser
les informations sur les échanges d'OVM. Cette notification contient des
informations précises, codifiés à l'annexe II, et est
effectuée lors de l'autorisation interne de mise sur le
marché.
La catégorie la plus vaste d'OGM faisant l'objet d'un
commerce international est l'expédition en vrac de maïs, soja et
autres produits agricoles génétiquement modifiés,
destinés à être utilisés pour l'alimentation humaine
et animale, ou à être transformés.
Au lieu d'exiger l'application de la procédure d'accord
préalable en connaissance de cause pour de tels produits, le protocole
établi une procédure beaucoup plus simple. Conformément
à cette procédure, les gouvernements qui approuvent ces produits
pour une utilisation interne sont tenus de communiquer cette décision
à la communauté internationale via le centre d'échange
pour la prévention des risques biotechnologiques. Ils doivent
également fournir des informations détaillées sur leur
décision. En outre, les pays peuvent décider d'importer ces
produits conformément à leur droit interne et communiquer leur
décision d'importer ou non ces produits par le truchement du centre
d'échange pour la prévention des risques biotechnologiques.
Le protocole prévoit en outre que les Etats pourront
mettre en place une procédure simplifiée sur une base volontaire
et destinée à faciliter les échanges des OVM dont
l'innocuité aurait été démontré (article
13). Les Etats peuvent également conclure des accords bilatéraux
ou multilatéraux, mais ne conduisant pas à une protection moindre
(article 1)
SECTION 2 : LES INSTANCES CHARGEES DES MISSIONS DE
SECURITE
Le protocole de Cartagena , pour bien atteindre ses objectifs, a
institué certaines instances (paragraphe 1) et
prévu une répartition des responsabilités
(paragraphe 2).
Paragraphe 1 : L'institutions d'instances
spécifiques
Dans ce paragraphe nous étudierons successivement les
instances (A) , ensuite les missions assignées
(B)
A - Les instances
Comme traditionnellement dans ces types de protocoles
internationaux, une réunion des Parties est instituée comme
organe décisionnaire. Il s'agit ici de la Conférence des Parties
de la convention sur la diversité biologique. Seuls les Etats qui ont
ratifié le protocole participent aux décisions, mais les autres
Etats peuvent participer aux débats. En effet, d'après les
dispositions de l'article 29 alinéa 1 du présent
protocole, « La conférence des Parties siège en
tant que réunion des Parties au protocole » et l'alinéa
2 d'ajouter : «Les Parties à la convention qui ne sont pas
Parties au protocole peuvent participer en qualité d'observateur aux
travaux de toute réunion de la Conférence des Parties
siégeant en tant que Réunion des Parties au Protocole, les
décisions qui sont prises en vertu du protocole le sont seulement par
les Parties au protocole ».
Un Secrétariat permanent sera créé (
article 31). Il sera assuré par le secrétariat de la convention
sur la diversité biologique.
Afin de faciliter les échanges d'informations et
l'application des dispositions du protocole, un « Centre
d'échange pour la prévention des risques
biotechnologiques » sera créé (article 20).
B. Les règles de sécurité à
observer
Conformément à l'accord, toute partie qui prend
une décision définitive concernant l'utilisation d'un organisme
vivant modifié sur son territoire doit, dans les 15 jours qui suivent,
en informer le Centre d'échange pour la prévention des risques
biotechnologiques.
Les documents d'expédition
Le protocole précise les documents d'expédition
qui doivent être soumis en fonction du type d'organismes vivants
modifiés qui font l'objet d'un mouvement transfrontière
intentionnel. Cette obligation prendra effet quand le protocole entrera en
vigueur.
Les documents accompagnant les organismes vivants
modifiés destinés à être introduits
intentionnellement dans l'environnement de la partie importatrice, semences par
exemple, doivent indiquer qu'il s'agit d'organismes vivants modifiés,
spécifier leur identité et leurs traits et
caractéristiques pertinents ainsi que les règles de
sécurité à observer pour la manipulation, l'entreposage,
le transport et l'utilisation de ces organismes, et indiquer les
coordonnées de la personne à contacter pour tout
complément d'information, ainsi que, le cas échéant, le
nom et l'adresse de l'importateur et de l'exportateur.
Les documents accompagnant les organismes vivants
modifiés destinés à être utilisés directement
pour l'alimentation humaine et animale, ou destinés à être
transformés, doivent indiquer clairement qu'ils « peuvent
contenir » des organismes vivants modifiés et qu'ils ne sont
pas destinés à être introduits intentionnellement dans
l'environnement et elle doit donner les coordonnées des personnes ou des
organismes à contacter pour tout complément d'information. Le
protocole exige des parties qu'elles prennent une décision exposant en
détail les modalités de cette obligation, en particulier la
façon dont il faudra spécifier l'identité de ces
organismes ainsi que toute identification particulière, et ce au plus
tard dans les deux ans qui suivent l'entrée en vigueur du protocole.
Les documents accompagnant les organismes vivants
modifiés destinés à être utilisés en milieu
confiné, par exemple à des fins de recherche scientifique ou
commerciale dans des locaux en milieu clos, doivent indiquer clairement qu'il
s'agit d'organismes vivants modifiés, en spécifiant les
règles de sécurité à observer pour la manipulation,
l'entreposage, le transport et l'utilisation de ces organismes, et
préciser les coordonnées des personnes ou organismes à
contacter pour tout complément d'information, y compris le nom et
l'adresse de la personne et de l'institution auxquelles les organismes vivants
modifiés sont expédiés.
Paragraphe 2 : La répartition des
responsabilités
Le protocole met en place un système
d'évaluation des risques (A) et prévoit une
responsabilisation des acteurs (B)
A - L'EVALUATION DES
RISQUES
L'évaluation du risque est un processus fondé sur
des données scientifiques comportant les étapes
suivantes:
· L'identification du danger potentiel
· La caractérisation de ce danger
· L'évaluation de l'exposition ; et
· La caractérisation du risque.
Les dangers potentiels, et leur probabilité de
concrétisation, sont donc étudiés ainsi, et des
modèles sont élaborés pour prévoir le
risque17.
Aux fins du présent protocole, l'évaluation des
risques a pour objet de déterminer et d'évaluer les effets
défavorables potentiels des organismes vivants modifiés sur la
conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique dans le
milieu récepteur potentiel probable, en tenant compte également
des risques pour la santé humaine.
Loin de garantir le "risque zéro", l'objectif
visé par le principe de précaution est de supprimer le risque
évitable pour tendre le plus possible vers le risque le plus bas
possible. L'évaluation des risques est effectuée selon des
méthodes éprouvées, conformément à l'annexe
III. Elle peut aller au-delà des informations fournies dans la
notification, reposer sur l'exportateur et être financée par la
Partie importatrice (article 15). Dans le cadre de l'examen de la demande
d'importation, l'Etat concerné pourra prendre en compte des
considérations socio économiques (article 26). Une Partie
importatrice, sur sa propre initiative ou à la demande de la Partie
exportatrice, pourra réexaminer sa décision au vu
d'éléments scientifiques nouveaux ou d'un changement de
circonstances (article 12).
L'évaluation des risques est le domaine de l'article
15. En effet, cet article dispose : « Les
évaluations des risques entreprises en vertu du présent protocole
le sont selon des méthodes scientifiques éprouvées,
conformément à l'annexe III et en tenant compte des
méthodes d'évaluation des risques reconnues. Ces
évaluations des risques s'appuient au minimum sur les informations
fournies conformément à l'article 8 et sur d'autres preuves
scientifiques disponibles permettant de déterminer et d'évaluer
les effets défavorables potentiels des OVM sur la conservation et
l'utilisation durable de la diversité biologique, compte tenu
également des risques pour la santé humaine ».
Le protocole autorise les gouvernements à soumettre un
OGM, quel qu'il soit, à une évaluation des risques avant de
prendre une décision concernant son importation, ce aux fins de
déterminer et d'évaluer les effets défavorables potentiels
des OGM sur la conservation et l'utilisable durable de la diversité
biologique dans le milieu récepteur. Cette évaluation doit
être effectuée scientifiquement, selon des techniques
d'évaluation des risques éprouvées.
Bien que l'importateur potentiel d'un OGM soit responsable de
veiller à ce qu'une évaluation des risques soit effectuée,
il a le droit d'exiger que l'exportateur s'en charge ou en assume les frais, ce
qui n'est pas sans importance pour les pays en développement.
17. voir le site
www.fao.org/DOCREP/003/x9602f06.htm
En effet, aucune technologie n'est totalement exempte de
risque. Si on accepte les nouvelles technologies, c'est parce qu'on estime que
les avantages potentiels l'emportent sur les risques potentiels. Le protocole
demande aux Parties de gérer et maîtriser les risques
définis à l'occasion de l'évaluation des risques.
La gestion du risque, qui est distincte de l'évaluation
du risque, consiste à examiner les différentes mesures pouvant
être prises en consultation avec toutes les parties
intéressées, tout en tenant compte de l'évaluation du
risque et autres facteurs pertinents pour la protection de la santé des
consommateurs. Parmi les éléments clés d'une gestion
efficace des risques figurent les systèmes de suivi, les programmes de
recherche, la formation technique et une coordination nationale
améliorée entre les organismes et les services
gouvernementaux.
Le protocole demande en outre à chaque Partie de
consulter et de notifier aux Etats effectivement touchés ou pouvant
l'être, tout incident qui relève de sa compétence et
pouvant entraîner un mouvement transfrontière non intentionnel
d'un OGM en raison d'un commerce ou d'une libération illicites ayant eu
lieu sous sa juridiction, dès qu'elle en prend connaissance. Cela
permettra aux Parties de déterminer les interventions
nécessaires, y compris des mesures d'urgence. Les gouvernements doivent
en outre établir des points de contact officiels pour les urgences afin
d'améliorer la coordination internationale.
B- La responsabilisation des acteurs
Si la responsabilité de la Partie exportatrice est
engagée en cas de mouvement illicite, les règles
générales de la responsabilité seront définies
après l'entrée en vigueur du protocole (article 27).
En effet, il est prévu l'élaboration d'un
régime de responsabilité et de réparation pour les
dommages résultant de mouvements transfrontaliers d'OVM dans les 4 ans
suivant l'entrée en vigueur du protocole.
Aussi, l'article 34 traite du respect des obligations. Ainsi
est-il prévu l'adoption dès l'entrée en vigueur du
protocole de mécanismes institutionnels de coopération visant
à encourager le respect des obligations et à traiter les cas de
non-respect.
Plusieurs points sont en débats parmi lesquels les
procédures visant à responsabiliser les principaux acteurs en
contact avec les OVM d'où la réticence des pays exportateurs
à l'idée d'un régime propre au protocole. En
conséquence, il n'y a pas d'avancée substantielle sur la
définition d'un régime (nature et portée du régime,
imputation de la responsabilité, accès à la justice,
réparation des dommages, seuil de nocivité etc.....
Aussi, le consentement préalable informé
prévu à l'article 7 déplace la responsabilité de
l'information de l'importateur vers l'exportateur. L'exportateur s'entend de
toute personne morale ou physique, relevant de la juridiction de la Partie
importatrice, qui prend des dispositions pour qu'un organisme vivant
modifié soit importé.
Il faut noter que les questions sur les règles de
responsabilité fixées par le Protocole sont à l'ordre du
jour de la première réunion des Parties du Protocole qui se
tiendra à Kuala Lampur (Malaisie) du 23 au 27 février prochain.
On s'attend à ce que cette réunion fixe un calendrier pour
l'élaboration de telles règles en conformité avec les
dispositions de l'article 27 du Protocole.
CHAPITRE 2 :
LA RECHERCHE D'UNE PROTECTION PLUS EFFICACE DE LA
DIVERSITE BIOLOGIQUE
Dans le préambule du protocole, les Parties
réaffirment le principe de précaution comme fondement de leur
démarche (section 1).Il souligne que les accords sur le
commerce et l'environnement devraient se soutenir mutuellement en vue de
l'avènement d'un développement durable. Il s'impose donc une
nécessité d'une protection durable de la diversité
biologique (section 2)
SECTION 1 : UNE PROTECTION FONDEE SUR LE PRINCIPE DE
PRECAUTION
Pour promouvoir la prévention des risques
biotechnologiques, le protocole s'appuie sur un concept fondamental :
l'approche de précaution consacrée par le principe 15 de la
Déclaration de Rio de 1992 sur l'environnement et le
développement, qui stipule que : « en cas de risque
de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique
absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard
l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la
dégradation de l'environnement »
Le domaine du principe de précaution est celui de
l'incertitude. Nous verrons ici que la biotechnologie est un domaine en proie
aux incertitudes scientifiques (paragraphe 1) et qu'il
s'avère donc nécessaire de réduire toutes les menaces
potentielles à la diversité biologique (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : La biotechnologie : un domaine en
proie aux incertitudes scientifiques
Ceci s'explique par l'absence de certitude scientifique
absolue (A) et une incertitude scientifique dans la
préservation de la diversité biologique (B)
A- L'absence de certitude scientifique absolue
Dans le domaine de la biotechnologie moderne, il existe une
absence de certitude absolue. L'affaire Pusztai citée par Corinne
Lepage18 ``in La politique de précaution'',
illustre notre propos.
En 1998, le docteur Arpad Pusztai s'exprime à la
télévision anglaise dans ces termes : « Il
est injuste de faire tenir à nos compatriotes le rôle de
cobaye. » Ce chercheur du Rewett Research Institute d'Aberdeen a mis
en lumière les effets pervers que provoque chez les souris
l'alimentation par des pommes de terre transgéniques.
18. Corinne LEPAGE, François GUERY, la
politique de précaution, PUF, p.53 et s
Nourries durant cent dix jours, avec ces pommes de terre
transgéniques, les souris subissent des modifications de leurs
défenses immunitaires (pertes de la moitié des lymphocytes) et
des perturbations au niveau de leur cerveau. Après son interview, le
docteur Pusztai est limogé par l'Institut Rewett pour manque de
sérieux, voire malhonnêteté. Six mois plus tard, une
centaine de chercheurs lance une pétition internationale pour soutenir
Pusztai en indiquant qu'ils ont procédé aux mêmes
recherches que lui et ont observé les mêmes modifications.
A ce jour on ignore si Pusztai a tort ou a raison. Ce qui est
certain c'est qu'il était assez facile à un certain nombre
d'organismes de chercheurs publics de procéder aux mêmes
expériences et de démontrer qu'il avait tort. Or cela n'a pas
été fait. Peut-être précisément parce que
Pusztai n'avait pas tort. A ce jour en tout cas, on ne le sait pas.
La question reste donc ouverte des effets des OGM sur les
espèces animales. Est-ce que les OGM entraînent des mutations
génétiques ou des effets négatifs sur les espèces
animales ?
En effets, au sujet des OGM, si l'absence d'innocuité
ne peut pas, en tant que telle être prouvée, toutes les recherches
doivent être engagées pour tenter de démontrer si le
produit est nocif. Or, précisément, les conditions actuelles de
mise sur le marché des OGM vont directement en sens contraire puisque
les études qui pourraient prouver la nocivité ne sont pas
entreprises. D'autre part dans les faits, l'existence de pollutions
génétiques apparaît progressivement.
A cela s'ajoutent l'absence de capacités propres de
recherche, et le risque de destruction d'un des éléments
essentiels de la sécurité alimentaire, à savoir la
biodiversité19.
B- L'incertitude scientifique dans la
préservation de la biodiversité
La convention sur la diversité biologique indique la
nécessité de prévenir les causes de réduction de la
biodiversité. Dès l'alinéa premier de son
préambule, elle affirme « la valeur intrinsèque de la
diversité biologique » définie comme « la
variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre
autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres
écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont
ils font partie ; cela comprend la diversité au sein des
espèces et entre espèces ainsi que celles des
écosystèmes »20, ces
derniers étant des complexes dynamiques formés de
communautés de plantes, d'animaux et de leur environnement non-vivant
qui, par leur interaction forment une unité fonctionnelle »
(article 2).
Conformément à l'orientation donnée
dès 1982 par la Charte mondiale de la nature (résolution 37/7 de
l'Assemblée Générale), il ne s'agit plus seulement de
protéger des espèces menacées de disparition, mais
d'assurer que « la viabilité génétique de la
terre ne sera pas compromise » (principe 2).
19. Ouvrage précité page 44
20. NGUYEN Quock Dinh, Droit International
Public, 6e édition page 1277-1278
Le terme de biodiversité (diversité biologique)
est un néologisme apparut au début des années 1980 au sein
de l'Alliance Mondiale pour la Nature (UICN). Il a fallu toutefois attendre la
conférence de Rio sur l'environnement et le développement,
organisée par les Nations Unies en 1992, pour que ce terme soit
largement vulgarisé. Il désigne tout simplement « la
variété des espèces vivantes qui peuplent la
biosphère ». La biosphère peut se définir de la
façon la plus simple comme « la région de la
planète dans laquelle la vie est possible en permanence et qui renferme
l'ensemble des êtres vivants »21
Définie par le Professeur Michel PRIEUR22
comme « la diversité des
écosystèmes et des ensembles vivants », la
diversité biologique est essentielle pour la survie de
l'humanité. Elle permet le renouvellement harmonieux des ressources
animales et végétales indispensables à la vie.
Raison pour laquelle l'absence de certitude scientifique doit
être envisagée non seulement par rapport à la menace
d'extinction pesant sur les espèces sauvages de la faune et de la flore,
mais aussi sur les données biologiques des espèces elles
mêmes23.
Au niveau de la population, la biodiversité
s'évaluera par la mesure de la diversité génétique.
L'incertitude est alors appréciée par rapport
à leur capacité de survie ou de reproduction face à la
transformation de leur milieu naturel. C'est le cas dans l'affaire
Leatch24 où le juge Australien a
estimé que l'annulation de l'autorisation de construction d'une route,
en raison de ses conséquences néfastes sur 2 espèces
sauvages australiens rares, était tout à fait légal. Le
juge Stein, pour fonder sa décision, invoque l'incertitude scientifique
portant sur « la viabilité à long terme de la faune
locale menacée » et « l'ignorance concernant la
nature ou l'étendue de ses effets néfastes ».
Certaines études chez les animaux
révèlent qu'un transgène introduit dans une population de
poissons par le biais de quelques individus pourrait se diffuser à toute
la population et éradiquer en quelques générations la
population non transgénique. Les OGM pourraient donc entraîner de
ce fait un appauvrissement de la biodiversité
Paragraphe 2 : La nécessité de
réduire toutes les menaces potentielles à la diversité
biologique
Les gouvernements et la société civile, par
l'intermédiaire de la convention sur la diversité biologique,
oeuvrent de concert pour mettre fin aux dommages à grande
échelle causés par l'humanité à la nature. Les
enjeux sont de taille : bien que 40% de l'économie mondiale
dépende directement de la diversité biologique, l'humanité
continue à détruire les écosystèmes, les
espèces et les réservoirs génétiques à un
rythme jamais égalé depuis l'extinction des dinosaures, il y a 65
millions d'années25.La
nécessité de réduire toutes les menaces potentielles
à la diversité biologique implique une obligation de prudence et
de vigilance (A) et une anticipation des drames
écologiques (B).
21. Définition donnée par le
Dictionnaire encyclopédique de l'écologie et des sciences de
l'environnement, F. CHAMADE p.78 et 95
22. PRIEUR (Michel), droit de l'environnement,
3e partie : le droit de la nature p.277
23. BISSIENGOU Cyrille Séverin, principe
de précaution en droit de l'environnement, mémoire de DEA,
Université du Bénin, 2000 page 29
24. Affaire Leatch v. National Park and
Wildlife Service and shoal City council, Nov. 1993, voir article GIRAUD
(Catherine), le droit et le principe de précaution : leçon
d'Australie RJE I. 1997
25.
source :www.biodiv.org/doc/press/presskits/bs/cpbs-unep-cbd-fr.pdf
A- Une obligation de prudence et de vigilance
Face à l'irréversibilité de certaines
atteintes à l'environnement et à l'incertitude scientifique qui
affecte des dossiers complets (diminution de la couche d'ozone, centrales
nucléaires et déchets radioactifs, utilisation d'OGM), une
nouvelle forme de prévention a été imaginée pour
protéger la société contre les risques encore inconnus et
incertains26.
Concrètement, le devoir de prévention se
traduit par un certain nombre d'obligations à la charge des Etats, qui,
vagues et générales à l'origine, font l'objet de normes de
plus en plus contraignantes, regroupées sous l'appellation ambiguë
de « principe de précaution ». Parmi ces
obligations, on peut citer l'obligation de prudence et de vigilance.
Fondamentalement, il s'agit d'une règle de nature
prudentielle, en vertu de laquelle, « pour protéger
l'environnement, des mesures de précaution doivent être largement
appliquées par les Etats selon leurs capacités » (cf.
article 15 de Rio précité). La prudence implique de
réfléchir à la portée et aux conséquences de
ses actes et de prendre ses dispositions pour éviter de causer des
dommages à autrui. Inscrit dans le cadre de la prudence, le principe de
précaution exprime la demande sociale d'une diminution des risques.
Celle-ci requiert à la fois un renforcement de la prévention et
l'utilisation d'instruments appropriés pour gérer des risques
potentiellement graves et irréversibles dont les probabilités de
réalisation sont faibles et mal connues.27
Chaque année, 100 millions d'hectares d'habitants et
d'écosystèmes naturels disparaissent. En outre, plus de 31 000
espèces végétales et animales sont menacées
d'extinction ; selon l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation
et l'agriculture, au moins une race de bétail disparaît chaque
semaine. Les solutions d'urgence ne suffisent pas : seule une action en
profondeur et à grande échelle garantira aux
générations futures un monde biologique
riche28.
Adoptée en 1992 sous les auspices du Programme des
Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), la Convention sur la
diversité biologique est le premier instrument mondial à fournir
un cadre complet couvrant tous les aspects de la biodiversité
(écosystèmes, espèces, et diversité
génétique). Elle introduit en outre une nouvelle stratégie
pour faire face à la crise de la biodiversité, l'approche
écosystémique , qui vise à concilier les impératifs
de la protection de l'environnement et ceux du développement
économique. En encourageant le développement durable, la
Convention vise à empêcher que les ressources renouvelables de la
planète fassent l'objet d'une exploitation intensive empêchant
leur reconstitution.
La Convention, qui compte actuellement près de 190
gouvernement membres ( les « Parties »), poursuit trois
objectifs : la conservation de la biodiversité, et le partage juste
et équitable des avantages découlant de l'utilisation des
ressources génétiques.
En rédigeant la Convention, les gouvernement ont
reconnu que la biotechnologies modernes offrait un potentiel
considérable pour la réalisation de ces trois objectifs- pourvu
qu'elle soit développée et utilisée dans des conditions
de sécurité suffisantes pour l'environnement et la santé
humaine. Quelques années plus tard, ces gouvernements mettaient cette
conviction à exécution en établissant le protocole de
Cartagena dans le cadre de la Convention.
26. Michel PRIEUR, droit de l'environnement, 5e
édition, Dalloz 2004, page 154
27. Philipe KOURILSKY, Du bon usage du principe de
précaution, édition Odile Jacob, déc. 2001 page 49
28. Source :
www.biodiv.org/doc/press/presskits/bs/cpbs-unep-cbd-fr.pdf
B- Une anticipation des drames écologiques
Il faut faire en sorte que la vie puisse perdurer, ce qui oblige,
dans une certaine mesure, à réduire l'incertitude. L'ignorance
quant aux conséquences exactes à court ou à long terme de
certaines actions ne doit pas servir de prétexte pour remettre à
plus tard l'adoption de mesures visant à prévenir la
dégradation de l'environnement. Autrement dit, face à
l'incertitude ou à la controverse scientifique actuelle, il vaut mieux
prendre des mesures de protection sévères à titre de
précaution que de ne rien faire. C'est en réalité mettre
concrètement en oeuvre le droit à l'environnement des
générations futures29.
Le caractère souvent irréparable des dommages
causés à l'environnement impose d'en prévenir la
survenance30. Telle a été la
préoccupation fondamentale des auteurs des premières conventions
sectorielles consacrées à la préservation de certaines
espèces animales menacées ou de certains
espaces31. La place faite à la
prévention dans le droit international de l'environnement, fait de
celui-ci un droit d'anticipation.
Consacré par le principe 21 de
Stockholm32, repris par le principe 2 de Rio, le
devoir de prévention, donc d'anticipation des drames écologiques
qui incombe à tous les Etats a fait l'objet d'un projet d'articles
adopté en première lecture en 1998 par la CDI, dans le cadre du
sujet plus général relatif à la responsabilité pour
les conséquences préjudiciables des activités qui ne sont
pas interdites par le droit international33 dont
l'article 3 dispose : « Les Etats prennent toutes les
mesures appropriées pour prévenir les dommages
transfrontières significatifs et pour en réduire le risque au
minimum ».
Les mesures pour l'environnement doivent anticiper,
prévenir et combattre les causes de dégradation de
l'environnement. Ceci implique que le principe de précaution impose aux
Etats des obligations continues, dont la consistance évolue avec les
progrès des connaissances scientifiques. Ainsi dans l'affaire
précitée du Projet Gabcikovo-Nagymaros, la C.I.J. a invité
les Parties à « examiner à nouveau les effets sur
l'environnement de l'exploitation de la centrale »
hydroélectrique construite sur le Danube en application d'un
traité de 1977, à la lumière des nouvelles exigences de la
protection de l'environnement.
29. Michel PRIEUR, opcit page 154
30. Voir C.I.J , arrêt du 25 septembre 1997, projet
Gabcikovo-Nagimaros, paragraphe 140
31. NGUYEN Quoc Dinh, droit international public, page 1254
32. Conférence tenue à Stockholm le 16 juin 1972
33. Voir le rapport de la CDI sur sa 53e session,
A/53/10, p.18 s
SECTION 2 : LA NECESSITE D'UNE PROTECTION DURABLE DE
LA DIVERSITE BIOLOGIQUE
Les organismes produits à l'aide de la biotechnologie
présentent des risques pour l'Homme et pour l'environnement. Sur le plan
environnemental notamment, le développement des OGM peut conduire
à l'érosion de la base génétique du potentiel
biologique existant. Dans le cadre de la résistance aux herbicides, le
transfert des caractères de résistance aux plantes non
ciblées pourrait entraîner une prolifération inopportune de
ces plantes.
Il conviendrait donc de mettre en place un mécanisme de
régulation approprié pour s'assurer que les produits issus de la
biotechnologie moderne soient sécurisants pour l'Homme et
l'environnement.
Pour une protection durable de la diversité biologique,
il conviendrait donc de prendre en compte les risques liés aux OVM (
paragraphe 1) afin d'appliquer des règles
prévisibles et sûres (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La prise en compte des risques
liés aux organismes vivants modifiés
Toute technologie nouvelle est susceptible d'entraîner
des risques directs ou induits. Depuis plusieurs années
déjà, des plantes transgéniques sont déjà
commercialisées et cultivées en Amérique du Nord.
L'Europe, elle, a choisi d'évaluer les risques potentiels de cette
nouvelle méthode de création qu'est la transgenèse, avant
toute exploitation à grande échelle.
Nous étudierons dans ce paragraphe la pollution
génétique (A) ensuite les éventuels
périls pour l'environnement (B).
A- La pollution
génétique
Implanter une semence hors de son écosystème
peut entraîner des problèmes graves. Les OGM fabriqués pour
mieux résister aux attaques des prédateurs, disposeront d'un
avantage sélectif sur les autres plantes, qui en souffriront. Des
croisements spontanés sont aussi envisageables, les plantes
cultivées croisant leurs gènes avec des espèces sauvages
apparentées. Un colza transgénique transmettrait son gène
de résistance aux herbicides à une mauvaise herbe, qui
deviendrait ainsi une « super mauvaise herbe » insensible
aux pesticides. Cette pollution génétique est
irréversible34.
Les plantes transgéniques contiennent des gènes
qui y ont été transférés à partir
d'espèces avec lesquelles elles n'ont aucun lien de parenté. Les
gènes peuvent provenir de bactéries, de virus, d'autres plantes
ou même d'animaux. Si ces
gènes « étrangers » se
transfèrent à leur tour dans d'autres organismes, cela produit
une pollution ou une contamination du patrimoine génétique
naturel.
En effet, la transgène est radicalement
différente des procédés traditionnels de sélection
ou d'amélioration. En ce qu'elle consiste à introduire des
gènes d'un organisme vivant dans le patrimoine génétique
d'un autre organisme vivant, elle élimine les barrières entre les
espèces. Elle se traduit ainsi par la création de nouveaux
organismes, inconnus de la biosphère, sans passé évolutif
ni prédateurs naturels.
34. BASTIN (Juliette), principe de
précaution, Jeune Afrique l'Intelligent no 2196 du 09 au 15
février 2003 page 77
Une telle introduction dans l'écosystème des
gènes capables de survivre, migrer, muter et se déplacer vers des
organismes auxquels ils ne sont pas destinés représente un
redoutable saut dans l'inconnu, qui fait assurément courir de graves
risques de ``pollution génétique''35.
La contamination génétique peut se
produire dans 4 situations :
· si une plante sauvage apparentée poussant
à proximité se croise avec une plante
transgénique ;
· si une plante non-transgénique conventionnelle
ou biologique présente dans un champ voisin se croise avec une plante
transgénique ;
· si une plante transgénique survit dans
l'environnement naturel ou agricole et que se développe une population
de plantes transgéniques semi-sauvages (mauvaises herbes ou
plantes « retournées à l'état
sauvage ») .
· si des micro-organismes présents dans le sol ou
dans les intestins d'animaux ayant mangé des plantes
transgéniques acquièrent des gènes étrangers.
Contrairement à d'autres formes de pollution, la
contamination génétique est susceptible de se multiplier au fur
et à mesure que les plantes et les micro-organismes poussent et se
reproduisent. Par conséquent les dégâts écologiques
causés par les OGM ne peuvent être circonscrits à l'habitat
dans lequel ils sont originellement introduits.
En définitive, la pollution génétique est
, selon l'avocate internationale et ancien ministre de l'environnement
Français Corinne Lepage « la seule qui soit exponentielle,
c'est-à-dire qui s'auto-entretient et qui
s'augmente »36, toute pollution va
elle-même engendrer une succession de pollutions. On ne peut aller que
vers une explosion de la pollution génétique et jamais vers une
régression.
A- D'éventuels périls pour l'environnement
Sous l'angle agro environnemental, les biotechnologies posent
des problèmes de sécurité qui sont principalement de 2
ordres. Il y a ainsi d'une part, des questions qui relèvent de la
sécurité biologique, qui concernent les risques liés
à la dissémination des OGM.
Les plantes conventionnelles cultivées aujourd'hui ont
été élaborées par des générations
d'agriculteurs et de producteurs à partir d'espèces sauvages.
Dans les régions où elles ont
évolué, on trouve des espèces apparentées capables
de se croiser entre elles et de produire des hybrides.
Dans le cas des plantes transgéniques, ce croisement
peut impliquer le transfert de gènes étrangers (« flux
génétique ») vers les plantes apparentées. La
probabilité d'une hybridation dépend de la compatibilité
des deux espèces en présence et de la performance de l'hybride
(sa capacité à pousser et à se reproduire). Du fait de la
diffusion des OGM, par pollinisation et par les bactéries du sol,
progressivement, les cultures non OGM deviennent OGM. En second lieu, la
culture intensive des OGM , qui donne un avantage biologique aux
espèces OGM sur les autres, permet une diffusion, voire une destruction
des autres espèces. La Chine a proposé, le 22 Mai 2000, que les
OGM soient inclus sur la liste des espèces envahissantes lors de la
convention de la biodiversité.
35. Les industries agro-alimentaire sous la direction
deMichel PRIEUR et Soukéinatou BOURAOUI page 22
36. Corinne LEPAGE in La politique de précaution, PUF,
2001 page 38-39
La menace que le flux génétique depuis des
plantes transgéniques fait peser sur la biodiversité est
mondiale. Ainsi :
En Amérique du Sud, région d'origine du
maïs, les variétés sauvages de maïs sont en danger
En Asie, des espèces apparentées du riz
poussent à proximité des rizières
En Amérique du Nord, les espèces sauvages
apparentées de la courge sont courantes
En Europe, le colza et la betterave sucrière peuvent se
croiser avec des plantes sauvages apparentées.
Si une contamination se produisait, non seulement le
patrimoine génétique serait irrémédiablement
modifié (avec des conséquences encore inconnues), mais
l'acquisition des caractéristiques de la plante transgénique
pourrait, comme nous l'avons dit plus haut, transformer les plantes sauvages en
« super mauvaises herbes » que les agriculteurs auraient
beaucoup de mal à éradiquer. Les plantes résistantes aux
substances chimiques qui détruisent les mauvaises herbes (herbicides),
résistantes aux insectes et résistantes aux malades.
En plus de pouvoir contaminer les plantes sauvages et les
cultures non-transgéniques par croisement, les semences des plantes
transgéniques elles-mêmes peuvent poser des problèmes.
Certaines semences peuvent se répandre au moment des
moissons, rester dans le sol et germer les années suivantes. Quand les
plantes émergent dans les cultures d'autres espèces, elles
deviennent des mauvaises herbes non voulues qui doivent être
enlevées par l'agriculture.
Du colza transgénique spontané ayant acquis une
résistance à deux ou trois herbicides différents
(phénomène connu sous le nom d' «accumulation de
gènes») a été repéré au sein d'essais
expérimentaux, au Royaume-Uni, ou des cultures commerciales, au
Canada37.
C'est aujourd'hui un grand problème au Canada, des
distances de séparation de 175 mètres entre les cultures
transgéniques et non transgéniques se montrant inefficaces. Le
colza pouvant rester dormant dans le sol pendant 5 à 10 ans avant de
germer, tout problème avéré de durer très longtemps
et constituer un important problème de gestion pour les agriculteurs.
Les problèmes de contamination de cultures conventionnelles par des
cultures OGM sont la réalité. Il ne s'agit pas que d'une
contamination du produit mais aussi de l'apparition de mauvaises herbes
spontanées posant de nombreux problèmes.
Les semences peuvent aussi être
disséminées lors du transport des plantes du champ vers d'autres
parties de l'exploitation agricole, ou se planter dans le bas-côté
des routes quand elles sont transportées pour être stockées
ou transformées. Les populations sauvages de colza sont courantes et
peuvent survivre de nombreuses générations. Si ces plantes
transgéniques persistent dans l'environnement, elles ne causeront pas
seulement un problème de mauvaise herbe mais deviendront une source
perpétuelle de contamination génétique des cultures et des
plantes sauvages.
Par ailleurs, les organismes OGM vont entraîner bien
évidemment des réactions non désirées sur d'autres
espèces : transfert de gènes aux bactéries par des
abeilles, toxicité du pollen sur le papillon monarque, apparition d'une
pyrale résistante aux maïs censés la tuer, émergence
de mauvaises herbes résistantes aux herbicides totaux, voire même
repoussée de plantes non
désirées38. (cf. CL p 37-38 ou
« les OGM entrent en résistance » in Le Figaro,30
octobre 2000
37.Voir le site
www.monde-solidaire.org/article.php3 ?id_article=575
38. Voir « Les OGM entrent en
résistance » in Le Figaro, 30 Octobre 2000
En plus de ces cas de risques pour l'environnement, plusieurs
cas de figures peuvent être répertoriés . On peut
trouver des risques suivants : l'apparition d'insectes résistants
aux plantes transgéniques, l'éventuel impact sur les insectes
utiles comme l'abeille, l'impact sur la rhizosphère etc...
39
Paragraphe 2 : L'exigence de règles
prévisibles et sûres
Le modèle préventif est basé sur la
prise de conscience que certaines pollutions sont irréparables et qu'il
faut les empêcher. Notre analyse sera axée principalement sur la
mise en oeuvre du principe de précaution (A) et les
mesures susceptibles d'être prises à l'échelon national par
les Etats(B).
A - La mise en oeuvre du principe de
précaution
Le principe de précaution est apparu à propos de
problèmes liés à l'environnement de façon explicite
vers 1980 et a connu depuis lors un développement fulgurant.
Après avoir reçu une consécration publique à la
conférence de Rio en 1992, il fut, la même année inscrit
dans le traité de Maastricht et fut, en 1995, son entrée dans le
droit français. Le principe de précaution est désormais
une référence incontournable dans tous les domaines relatifs aux
risques. Il a largement débordé le champ du droit de
l'environnement. Il est devenu le guide d'action en matière d'OGM, de
santé des consommateurs et de sécurité
alimentaire40.
Le principe de précaution est réaffirmé
dans le préambule du protocole, dans l'énoncé de
l'objectif (avec une référence au principe 15 de la
Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement) et
dans les dispositions relatives à la prise de décisions par une
partie importatrice concernant l'importation d'un organisme vivant
modifié :
« L'absence de certitude
scientifique due à l'insuffisance des informations et connaissances
scientifiques pertinentes concernant l'étendue des effets
défavorables potentiels d'un organisme vivant modifié sur la
conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique dans la
partie importatrice, compte tenu également des risques pour la
santé humaine, n'empêche pas cette partie de prendre comme il
convient une décision concernant l'importation de l'organisme vivant
modifié en question pour éviter ou réduire au minimum ces
effets défavorables potentiels. »
Le principe de précaution est exprimé de
manière positive dans le traité de l'Union Européenne
depuis la réforme par le traité de
Maastricht41 et dans les lois nationales comme la
loi française du 02 Février sur le renforcement de la protection
de l'environnement, dite loi Barnier qui stipule que « l'absence de
certitude, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment,
ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées
visant à prévenir un risque de dommages graves et
irréversibles à l'environnement à un coût
économiquement acceptable »
Depuis, il a débordé les questions qui touchent
à l'environnement à propos desquelles il avait été
conçu pour englober les problèmes relatifs à
l'alimentation et à la santé.
39. Voir le site
ww2.creaweb.fr/bv/ogm/risques.html
40. Cf Michel PRIEUR opcit, page 154
41. Article 130 R du traité de Rome
tel que modifié par le traité de Maastricht
L'une des principales applications touchant à
l'activité agricole est relative aux plantes et OGM. Ainsi, la
conférence sur la biosécurité qui s'est tenue en
Août 1998 exprime les positions suivantes : `'Notant que
conformément au principe de précaution, l'absence de preuves
scientifiques irréfutables ne devrait pas être invoquée
pour reporter la prise de mesures nécessaires pour éviter ou
réduire au maximum les risques, lorsqu'ils existent, posés par
les organismes vivants modifiés résultant de la biotechnologie.
Considérant aussi que malgré les connaissances
considérables accumulées, il reste une part importante d'inconnu,
en particulier s'agissant de l'interaction entre l'environnement et les
organismes vivants modifiés issus de la biotechnologie moderne''.
Greenpeace s'oppose, au nom du principe de
précaution, à la dissémination d'organismes
génétiquement modifiés dans l'environnement,
« car les conséquences à moyen et à long terme
sont totalement inconnues »42
Le principe de précaution permet donc
permet de :
|
Traduire en fait un principe inscrit en droit
|
|
Définir un seuil d'acceptabilité du risque
|
|
Distribuer la responsabilité
|
|
Compenser en procédures le manque de certitudes
|
|
Inscrire la décision dans une démarche d'assurance
qualité en réorganisant l'expertise sur les risques
(transparence, traçabilité, ...)
|
|
B- Les mesures susceptibles d'être prises par
les Parties à l'échelon national
Dans le cadre d'accords pour l'environnement, la convention
sur la diversité biologique, les pays sont convenus de prendre des
mesures visant à protéger la biodiversité et le protocole
de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques fournit un
cadre réglementaire international au mouvement transfrontière des
OGM. Les pays ont accepté de coopérer, dans le cadre du Codex
Alimentarus, de la convention international pour la protection des
végétaux et de l'office internationale des épizooties,
pour la protection de la santé des êtres humains, des
végétaux et des animaux respectivement.
En effet, la convention sur la diversité biologique
vise à préserver la diversité biologique, favoriser une
exploitation rationnelle des éléments qui la composent et
encourager un partage équitable des bénéfices tirés
de l'utilisation des ressources génétiques. Son protocole de
Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques dispose que
les produits agricoles susceptibles de contenir des OGM et destinés
à l'exportation doivent impérativement être clairement
identifiés comme tels et autorise les Etats à déclarer
s'ils sont disposés ou non à accepter leur
importation43.
Ce protocole prévoit que chaque pays ait
élaboré une réglementation au sujet des OGM avant de se
lancer dans une expérimentation. L'Autriche et la Nouvelle
Zélande ont été parmis les premiers à créer
leur propre programme de biosécurité. Le ministère de
l'agriculture et des forêts de la Nouvelle Zélande a mis en place
la « biosecurity authority » en juillet 1999 afin de
protéger la biodiversité unique de la Nouvelle Zélande et
faciliter des exportations en gérant les risques pour la santé
des végétaux et des animaux.
42. www.greenpeace.org
43. ABC des Nations Unies, New York, 2001
page 305
En Autriche, le département de l'agriculture, des
pêches et des forêts a créé une unité
« biosecurity » en octobre 2000 afin d'évaluer les
risques de quarantaine associés aux importations des produits et de
mener des négociations techniques sur les questions d'accès aux
marchés d'exportation avec les organismes de contrepartie à
l'étranger44. La Côte d'Ivoire s'y
était attelée, mais son effort a été stoppé
par le coup d'état de décembre 1999. Le Mali et le Burkina y
travaillent à travers leur comité de
biosécurité45.
Le protocole offre aux pays la possibilité d'obtenir
des informations avant de consentir à l'importation d'organismes issus
de la biotechnologie. Il reconnaît à chaque Etat le droit de
réglementer ces organismes, en accord avec ses obligations
internationales. En outre, il crée un cadre propice à
l'amélioration des capacités des pays en développement en
ce qui concerne la protection de la biodiversité.
Un pays peut, conformément à son cadre
réglementaire national et dans la mesure où cela est compatible
avec l'objectif du protocole, décider de soumettre certains types d'OGM
à une évaluation des risques ou à d'autres exigences
Le Togo a signé ce protocole le 24 Mai 2000 et se doit
donc de prendre des mesures adéquates pour la prévention des
risques biotechnologiques. Le projet biosécurité est l'une de ces
mesures. Il devra aboutir à la mise en place du cadre national de
biosécurité. Il s'agira d'un ensemble de systèmes
législatif, administratif et décisionnel incluant
l'évaluation et la gestion des risques, de même qu'un
mécanisme de participation et d'information
publique46.
La mise en place du cadre national de
biosécurité permettra au pays de :
· Etre en mesure de faire un choix, dont il aura
informé les parties concernées, sur la possibilité
d'importer, d'utiliser ou non les OGM ;
· Mettre en place le moyen qui l'aidera à
estimer, évaluer et gérer un éventuel effet pervers
lié aux mouvements transfrontières, au transit, à la
manipulation et à l'utilisation des OGM ;
· Donner l'occasion à tous les centres de
décision de s'exprimer ;
· Renforcer ses capacités humaines et
institutionnelles pour les aspects techniques et l'évaluation des
risques ;
· Prendre des décisions durables relatives
à l'utilisation des OGM ;
· Etre en conformité avec les dispositions du
protocole de Cartagena
44. voir le site www.fao.org/ag/fr/magazine/01031.htm)
45 .FAUJAS (Alain) jeune afrique l'intelligent
précité page 68
46. source Togo presse no 6674 du 12 déc 2003 page 4
DEUXIEME PARTIE :
LA PROTECTION DE LA SANTE HUMAINE PAR UN CONTROLE DES
MOUVEMENTS DES OVM SUSCEPTIBLES D'AVOIR UN EFFET NOCIF SUR LA SANTE DE
L'HOMME.
Le protocole de Cartagena est focalisé sur le mouvement
transfrontière des organismes vivants modifiés susceptibles
d'avoir un effet nocif sur l'environnement et la santé humaine.
Ceci revient à dire que les que les OVM qui ne sont
pas susceptibles d'avoir un effet nocif ne concernent pas le protocole et
implique les avantages de la biotechnologie moderne qui fera l'objet d'un
chapitre premier.
Le chapitre 2 sera consacré à l'application du
principe de précaution dans le domaine de la
biotechnologie moderne.
CHAPITRE 1 :
LA RECONNAISSANCE PAR LE
PROTOCOLE DES AVANTAGES DE LA BIOTECHNOLOGIE MODERNE.
Dans le préambule le protocole reconnaît
que la biotechnologie moderne offre un potentiel considérable pour le
bien être de l'être humain.
En effet, les produits de la biotechnologie notamment les OGM
jouent un rôle de plus en plus important dans les domaines de la
santé, de la médecine, de l'agriculture et de l'environnement. En
même temps, les applications des techniques d'ingénierie
génétique comportent de nombreux risques potentiels sur la
santé humaine jusqu'à maintenant imprévus.
Nous allons présenter dans ce chapitre, les enjeux de
la biotechnologie moderne (Section 1) avant d'aborder dans une
deuxième section les impacts des OGM sur la santé humaine
(Section 2).
Section 1 : Les enjeux de la biotechnologie
moderne.
« La biotechnologie pourrait contribuer à la
réalisation des objectifs de la convention sur la diversité
biologique et des objectifs du Millénaire pour le développement,
à condition toutefois d'être développée
judicieusement et accompagnée de mesures de
sécurité », Kofi Annan, Secrétaire
général des Nations Unies.
La percée des biotechnologies, en particulier dans le
secteur agro-alimentaire, est l'un des faits marquants de cette fin du
millénaire. Comme tout grand phénomène de
société, leur avènement fait l'objet de débats
animés, voire passionnés, qui agitent les scientifiques et les
experts autant que les politiciens et la société
civile47. Pour les partisans des modifications
génétiques, la biotechnologie contribuera à
accroître la sécurité alimentaire et le rendement durable
des cultures, et sera bénéfique à l'environnement car elle
permettra de réduire les superficies cultivées, les
quantités de pesticides et l'irrigation, et permettra de produire des
traitements médicaux, des vaccins, des biens industriels, des fibres et
des combustibles plus efficaces48.
Nous consacrerons cette première section aux enjeux
agricoles et environnementaux (paragraphe 1) , ensuite les
enjeux sociaux (paragraphe 2)
Paragraphe 1- Les enjeux agro environnementaux
Certains pensent que les OGM peuvent être
écologiquement bénéfique, en particulier parcequ'ils
permettent, au-delà d'une meilleure compréhension des
interrelations entre les plantes, les animaux et les écosystèmes,
une lutte plus efficace contre les pathogènes, ainsi qu'une plus grande
adaptation aux conditions extrêmes de l'environnement.
47. les industries agro-alimentaires sous la direction de
Michel PRIEUR et Soukéina BOURAOUI page 44
48. . Voir le site internet
www.biodiv.org/doc/press/presskits/bs/cpbs-unep-cbd-fr.pdf
Nous traiterons successivement dans ce
paragraphe des enjeux agricoles (A) ensuite les enjeux
environnementaux (B)
A- Les enjeux agricoles
La transformation génétique des plantes vise
à améliorer les cultures en développant des
mécanismes de tolérances ou de résistances ayant pour
effet d'augmenter les rendements.
.
· Tolérances des plantes aux
herbicides
L'insertion d'un gène de tolérance à un
herbicide dans une plante d'intérêt permet, via la
résistance induite, une sélectivité du traitement vis
à vis des plantes indésirables.
Ce gène assure donc une protection de la plante contre
le principe actif de l'herbicide par une modification de la cible, une voie de
biosynthèse alternative ou un changement de perméabilité
membranaire. De nombreuses espèces végétales, comme le
colza, la betterave, le soja, le blé et le tournesol ont
déjà bénéficié de cette
technique49.
· Résistance aux conditions climatiques
extrêmes
Une grande partie de la surface de la planète est
impropre à l'agriculture du fait de condition défavorable (froid,
sécheresse, salinité...). Les biotechnologies pourront apporter
une réponse aux pays en voie de développement en créant de
nouvelles espèces adaptées à ces conditions.
· Résistance aux insectes
Les pertes occasionnées par les insectes
représentent une part non négligeable des récoltes. Les
insecticides employés jusqu'à maintenant présentent des
inconvénients : atteintes à l'environnement et apparition de
formes résistances d'insectes ayant pour conséquences l'emploi de
doses croissantes de ces produits.
Par ailleurs, la lutte biologique nécessite un suivi
poussé des cultures et une recherche approfondie ne permettant pas
d'apporter une solution économiquement viable face aux
dégâts causés par les ravageurs. La synthèse de
protéines toxiques pour ces cultures par modification
génétique de la plante constitue donc une voie majeure du
procès.
· Résistance aux maladies
Sur le même principe, les biotechnologies s'orientent
vers la lutte contre les virus, bactéries phytopatogènes,
mycoplasmes et champions. Des résultats ont déjà
été obtenus sur les plantes comme la pomme de terre, la tomate ou
la betterave.
Amélioration des conditions d'élevage
· La lutte contre des maladies
animales
La modification par génie génétique des
aliments destinés à l'élevage peut être un moyen de
lutte contre les maladies animales. Cette alimentation pourrait produire
directement des anticorps ou des vaccins« recombinants».
49. Voir le site
ww2.creaweb.fr/bv/ogm/enjeux3.html
La lutte contre ces maladies pourrait même se faire au
niveau de l'animal, par la modification transgénique des lignées
afin d'accroître leur résistance.
· L'amélioration de la nutrition
animale
L'utilisation du génie génétique pourrait
permettre d'améliorer la qualité nutritionnelle des plantes
utilisées en alimentation animale, en augmentant la teneur en certains
acides aminés (méthionine, lysine ,théonine, tryptophane).
Ces éléments, synthétisés en trop faible
quantité par ces plantes, sont actuellement amenés sous forme de
compléments nutritifs.
L'accumulation de certaines enzymes (phytase en particulier)
pourrait permettre d'améliorer la digestibilité des aliments.
Application aux industries agro-alimentaires
1. L'amélioration de la qualité des
aliments
L'introduction de nouveaux gènes peut conduire à
améliorer la qualité d'un élément : meilleure
texture, meilleure conservation, amélioration des qualités
organoleptiques...Cet enjeu se répercute principalement chez le
consommateur.
Diverses applications peuvent être
abordées :
· meilleure conservation des produits :
les recherches concernant la conservation des aliments en sont
actuellement au stade le plus avancé dans le domaine des OGM. Des
légumes transgéniques, à maturation retardée, ont
déjà été commercialisés dans les pays
anglo-saxons. Citons par exemple la célèbre tomate Flavr-Savr de
la société Calgene, qui conserve une texture ferme pendant une
durée plus longue que celle des tomates conventionnelles. Ce
contrôle de maturation des produits permet ainsi d'améliorer les
conditions de transport et de stockage, mais également d'accroître
la valeur du produit.
· Amélioration des qualités
organoleptiques : dans le cas des fruits par exemple, la
maturation se fait grâce à un ensemble de modifications
physiologiques, biochimiques et structurelles. Certains gènes impliquent
donc un changement de couleur, une augmentation de teneur en sucre, une
diminution de l'acidité, la synthèse d'arômes...
Tous ces gènes constituent donc des voies
potentielles d'amélioration. Quelques exemples :
q Le
blé : amélioration des caractéristiques requises pour
la panification,
q La pomme de terre : augmentation de teneur en amidon
pour des utilisations industrielles, (purée, fécule et frites
absorbant moins d'huile), réduction du brunissement,
q Les épinards : diminution de la teneur en
nitrate en augmentant l'expression de la nitrate-reductase.
C- Les Enjeux environnementaux
En multipliant la quantité d'engrais utilisés
par 3,6 entre 1970 et 1990 et la quantité de produits phytosanitaires
par 4,2 pendant la même période, les progrès de
l'agriculture moderne ne se sont faits sans dommage pour l'environnement.
L'utilisation de telles pratiques, notamment celles qui
concernent la protection des cultures contre les maladies et les parasite, est
impossible à poursuivre sans arriver rapidement à un
épuisement des sols50.
51. Pr. Jeff Schell, pionnier européen de la
transgenèse végétale,« Biofutur»
Les biotechnologies modernes peuvent être une
réponse à ces problèmes, en particulier par l'utilisation
de la transgenèse pour développer des résistances aux
insectes ou des tolérances aux herbicides, tout en augmentant la
productivité.
Les avantages environnementaux que l'on peut attendre des
plantes résistantes aux insectes et tolérances aux herbicides,
ainsi que des futures cultures qui résisteront à la
sécheresse et aux autres stress climatiques sont en effet les
suivants :
· diminution significative des traitements
insecticides et herbicides.
Les variétés résistantes à une
maladie peuvent permettre de réduire les mesures phytosanitaires. Le
génie génétique permet également d'améliorer
la capacité d'appropriation de la substance nutritive des plantes
(efficacité nutritive ) ce qui permet d'économiser les engrais et
de réduire le lessivage des substances nutritives dans les eaux
souterraines. La culture de variétés tolérant des
herbicides permet l'utilisation ciblée et parcimonieuse d'herbicides
à large bande respectueux de l'environnement, avec donc des
conséquences positives sur la qualité du sol, des eaux, de la
faune, mais aussi des aliments consommés,
· économie d'utilisation de l'eau pour
l'irrigation avec les transformations génétiques visant
à accroître la résistance à la sécheresse. En
effet, selon les estimations internationales51.
(sommet mondial de l'Alimentation, Rome 1996), l'eau aura tendance à se
raréfier dans les décennies à venir du fait de l'explosion
démographique. De surcroît, la tendance actuelle va vers une
augmentation de la consommation d'eau, qui à été
multipliée par trois entre 1950 et 1990,
· changement des pratiques culturales
vers une simplification du travail du sol. La résistance au glyfosate
induite par génie génétique sur des cultures de soja a
permis d'économiser l'étape du labour de 30%. Outre
économie en matériel coûteux favorable aux pays en voie de
développement, ce changement de pratique culturale permet de
réduire l'érosion du sol, et donc d'améliorer la
qualité de l'eau, de préserver la faune du sol, et de diminuer le
ruissellement de l'eau.
Par exemple, grâce au coton Bt, amélioré
génétiquement par Monsanto pour résister à
helicoverpa zea, les petits agriculteurs de la province du Kwazulu Natal en
Afrique du Sud ont réduit l'usage des pesticides de 8 à 10
pulvérisations à 1 ou 2, tandis que leur rendement augmentait de
30%, soit un gain de 30%52
Paragraphe 2 : Les enjeux sociaux
Les Organismes Génétiquement Modifiés
peuvent être considérés comme une solution à la faim
(A) ensuite l'utilisation du génie
génétique est bénéfique pour la santé de
l'homme (B).
A- Les OGM : une solution à la faim
Que peuvent les biotechnologies pour le monde quand on sait
qu'un cinquième de l'humanité ne mange pas à sa
faim ? Beaucoup, a priori , puisqu'elles permettent d'améliorer
les techniques de production et, logiquement donc, d'augmenter le volume
desdites productions. Certes, les causes premières du retard de
certains pays en matière de développement ne sont pas toutes
techniques.
51. Sommet mondial de l'Alimentation, Rome
1996
52. Jeune Afrique l'Intelligent
précité, page 64
Mais force est de constater que les méthodes actuelles
ne permettront pas d'assurer à elles seules un niveau de production
suffisant pour nourrir la population du continent. Les chiffres parlent
d'eux-mêmes : comment faire pour que les 1,7 milliards d'habitants
que comptera l'Afrique en 2050 mangent à leur faim, alors que l'on ne
peut pas, aujourd'hui, subvenir aux besoins de 750 millions de
personnes ?
Comment y parvenir alors que, sur le continent, la croissance
démographique est deux fois plus forte que celle de la production ?
Posée en ces termes, l'équation paraissait insoluble. L'enjeu
évidemment, est d'importance. D'autant que beaucoup d'économies
dépendent quasi exclusivement de l'agriculture : le secteur compte
pour 30% du produit intérieur brut (PIB) du continent, 40% de ses
exportations et emploie surtout 70% de sa population active.
Or la productivité de l'agriculture africaine reste
faible. Comptez en moyenne, 1,22 tonne à l'hectare pour les
céréales, contre 37,3 tonnes dans les pays
industrialisés.
Fait significatif : l'Afrique est la seule région
du globe où la production alimentaire par tête a baissé au
cours de ces quarante dernières années.
Résultat, la consommation y dépassait toujours
la production de 30% à la fin des années 90. Difficile dans ces
conditions, de subvenir aux besoins de tous.
Et c'est là que les plantes transgéniques font
leur apparition.
« Tous les moyens contribuant à de fortes
hausses de la productivité et de la durabilité des
systèmes de production doivent pouvoir être mobilisés et
combinés au mieux, martèle le centre de coopération
internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) ,
et les biotechnologies feront partie des outils disponibles ».Leurs
caractéristiques agronomiques améliorées permettent en
effet une plus grande résistance à un herbicide aux insectes ou
aux bactéries. Il est du coup, possible de diminuer le nombre de
traitements et les quantités de produits chimiques utilisés pour
cultiver manioc, café ou cacao. Les coût de production s'en
trouvent abaissés, et les rendements des récoltes
augmentés.
Fin septembre 2002, Monze en Zambie, les villageois
affamés de cette région d'Afrique particulièrement
touchée par la sécheresse viennent de piller des hangars
où étaient entreposés 500 sacs de maïs en provenance
de l'étranger au titre de l'aide alimentaire.
En effet, lors du sommet mondial pour le développement
durable à Johannesburg fin août 2002, Jacques Diouf, le directeur
général de la FAO, a exhorté tous les pays africains
à accepter l'aide alimentaire sous forme d'OGM.
Le Secrétaire Général de la commission
économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA), Kingsley Amoako, est
allé dans le même sens en arguant que le continent ne se
développerait que grâce aux biotechnologies et qu'il fallait
arrêter d'avoir peur des OGM. « L'UE, elle, avance le
principe de précaution, explique Kingsley Amoako, mais il y a des gens
qui meurent de faim aujourd'hui en Afrique. Ces questions de principe sont des
enjeux pour les Etats Unis et l'Europe, mais pas pour
nous »53.Chez
Monsanto54, pas d'ambiguïté : les
Américains mangent des produits Génétiquement
Modifiés depuis 15 ans, et personne n'est tombé malade. Alors
pourquoi ne pas en faire bénéficier l'Afrique ?
53. Jeune Afrique l'intelligent no 2196 du 09
au 15 février 2003 page 72
54. Firme américaine
spécialisée dans l'industrie agro alimentaire.
B - L'utilisation pharmaceutique des OGM
Des organismes génétiquement modifiés
(OGM) sont utilisés depuis plusieurs dizaines d'années pour la
production des thérapeutiques sous forme recombinante. Les techniques de
recombinaisons génétiques ont permis d'élaborer des
vaccins plus efficaces et d'envisager la production de vaccins tout à
fait nouveau.
Les micro-organismes génétiquement
modifiés sont utilisés depuis près de 20 ans pour la
production de médicaments comme l'insuline pour les diabétiques,
l'hormone de croissance, ou l'érythropoïétine qui permet de
traiter l'anémie chez un patient atteint d'un cancer ou d'une
insuffisance rénale. Les OGM servent aussi à fabriquer des
vaccins humains (contre l'hépatite B) et vétérinaires (ils
ont permis d'éradiquer la rage en Europe). Les perspectives dans ce
domaine sont immenses car les OGM peuvent être utilisés comme de
véritables fabriques de médicaments ou d'autres substances
bénéfiques pour la santé .Les plantes transgéniques
ont un avantage important : leur production à large échelle est
plus simple et beaucoup moins coûteuse que celle des produits d'origine
animale. De plus, les plantes sont naturellement exemptes de virus ou de
prions55 pathogènes pour l'homme. Des
recherches prometteuses sont en cours sur plusieurs plantes
transgéniques comme : des pommes de terre capables de délivrer un
vaccin contre l'hépatite B ou contre un virus responsable de
diarrhée, un tabac produisant une substance vaccinale contre le
cytomégalovirus, qui est un virus responsable d'infections
congénitales, une autre variété de tabac produisant du
collagène, un maïs qui produit de la lipase gastrique permettant
de lutter contre la mucoviscidose. Les OGM pourraient également
contribuer à la mise au point de substances permettant de remplacer les
transfusions sanguines. Tous ces travaux contribuent aussi à mieux
connaître les gènes et par là même à mieux
comprendre le fonctionnement des êtres vivants. La
transgénèse est un outil récent au service de
l'agriculture et de la médecine56.
Les techniques du génie génétique
permettent de faire produire par des bactéries ou dans des cellules de
levure au génome modifié de grandes quantités de
protéines vaccinantes comme cela a été pour les
protéines de l'enveloppe des virus de la fièvre aphteuse, de la
rage, de l'hépatite B, de l'herpès et de la
grippe57. Au cours des dernières
années, plusieurs protéines d'intérêt pharmaceutique
ont été produites avec des plantes transgéniques.
Les chercheurs ambitionnent, dans la foulée,
d'améliorer la qualité nutritionnelle des aliments en modifiant
la composition et de permettre ainsi, par exemple, qu'ils soient mieux
digérés.
Et puis il y a les «alicaments», ces aliments qui
soignent, purs produits des biotechnologies. Parmi eux, le riz doré
dont on a modifié la teneur en vitamine A pour lutter contre la
cécité des enfants liés à la malnutrition
: dans le cas du riz, il est possible d'inhiber l'expression de la
protéine responsable des allergies alimentaires. Autres applications
rêvées (et encore utopiques) dans le domaine de la
santé : les pommes de terre ou les bananes contenant des vaccins.
Directement consommables, elles permettraient la vaccination à faible
coût des populations des pays en
développement58.
55. Le prion est une glycoprotéine,
qui existe normalement dans le cerveau de l'homme. Cette protéine existe
sous une forme normale et une forme pathologique.
56.
http://www.ogm-debats.com/presse/documents/bibliotheque/DEBAGUIDEPATIENT.pdf
57. Albert SASSON, Quelles biotechnologies
pour les pays en développement ? Biofutur/UNESCO édition,
imprimerie Marcel Bon-70.000 Vessoul, juin 1986, page 86
58. Jeune Afrique précité page
67
Le premier vaccin utilisable chez l'Homme et fabriqué
à l'aide des techniques de recombinaison génétique sera le
vaccin antihépatite B : une première forme de ce vaccin sera
constituée par le même antigène, produit par des cellules
animales au génome modifié. Le génie
génétique permet par exemple de modifier la composition des
huiles en acide gras en vue de diminuer le risque d'accident
cardio-vasculaire.
La mise au point d'un vaccin contre le SIDA, maladie mortelle
transmissible par voie sanguine ou sexuelle, qui a pris depuis le début
des années 1980 l'allure d'une épidémie mondiale, reposera
vraisemblablement des techniques issues du génie
génétique. Aussi, les plantes aromatiques qui sont parfois aussi
des plantes médicinales, peuvent devenir, à la suite de
l'application des biotechnologies, des sources importantes des produits de
grande valeur pour la fabrication des parfums, des cosmétiques, des
arômes et des additifs alimentaires59.
En 2000 la Commission de l'Office International des
épizooties (OIE) sur les normes a publié le Manuel des normes
relatives aux tests de diagnostique et aux vaccins. Certains tests et vaccins
décrits sont issus du génie génétique.
D'ailleurs le Protocole de Cartagena ne s'applique pas aux
mouvements transfrontières d'organismes vivants modifiés qui sont
des produits pharmaceutiques destinés à l'homme relevant d'autres
accords ou organismes internationaux pertinents (article 5).
Comme nous pouvons le constater, les OVM représentent
une avancée scientifique notable ; cependant, les manipulations
génétiques ne sont pas anodines. Elles constitueraient des
risques sérieux pour la santé humaine et animale.
.
Section 2 : Les impacts des OGM sur la santé
humaine
Les opposants aux OGM s'inquiètent
particulièrement des risques environnementaux et pour la
biodiversité, des possibilités d'augmentation des allergies
à cause de la présence de nouvelles protéines, du
développement de résistance aux antibiotiques chez les
micro-organismes, des monopoles industriels et la dépendance des
agriculteurs face à ces dernières et de la brevetabilité
du vivant.
Les risques environnementaux étant abordés dans
le chapitre 2 de notre première partie, nous allons consacrer cette
section au risque probable de dommages graves et irréversibles sur la
santé humaine (paragraphe 1) et les débats
autour de la question des OGM dans un (paragraphe 2)
Paragraphe 1 : Un probable risque de dommages graves
et irréversibles sur la
santé humaine
Les dommages graves et irréversibles ne se limitent
pas essentiellement au biotope ou aux facteurs physico-chimiques, ils touchent
aussi souvent la santé humaine. Nombre de personnes estiment que la
biotechnologie moderne est trop récente pour savoir vraiment comment ces
produits vont se comporter et évoluer, et quelles interactions ils
auront avec les autres espèces.
La biotechnologie présente des risques
considérables (A) et peut constituer d'éventuels
périls pour la santé humaine (B)
59. . Ouvrage d'Albert SASSON
précité, page 86 et 131
A- Des risques considérables.
On a pratiquement épuisé la chimie. Il va falloir
passer à la manipulation génétique, or c'est un
problème majeur, car quand on va commencer à toucher
génétiquement à l'homme, on va tomber dans l'inconnu.
C'est un risque environnemental majeur.
En effet, le risque peut être défini comme
étant :
Risque =Mesure du danger * Fréquence
d'exposition au danger
Le risque doit être distingué du danger. Le
danger est ce qui « menace ou compromet la sûreté,
l'existence d'une personne ou d'une chose ». Le risque est un
« danger éventuel plus ou moins prévisible »
selon le dictionnaire Robert. Un risque n'est pas un aléa, un
aléa est un événement imprévisible qui n'est pas
connoté par un jugement de valeur. L'éventualité qu'un
gène soit transféré d'une plante transgénique
à une voisine non transgénique est un aléa et non un
risque tant que n'ont pas été énoncés les dangers,
réels ou hypothétiques auxquels il est fait
référence
En réalité, on peut distinguer deux dimensions
à cette notion de risque :
|
La dimension technique : C'est le risque
objectif, rationnel (tel que l'on peut le concevoir scientifiquement),
c'est à dire la mesure du « véritable danger
encouru ». On tente de l' évaluer à l'aide d'expertises
scientifiques.
|
|
La dimension politique : C'est le risque
tel que l'individu se l'imagine c'est à dire en tant que
représentation mentale du danger. Elle est construite à partir
d'un mélange confus de connaissances objectives,
préjugés, craintes, doutes, ... qui conduit parfois à la
psychose.
|
A l'heure de la mondialisation, l'émergence de
nouvelles technologies, l'apparition de nouveaux modes de vie et de
consommation ont grandement contribué à l'augmentation du nombre
de risques encourus, mais surtout considérablement accru
l'échelle de leurs répercussions. Grâce à
l'acquisition de connaissances scientifiques de plus en plus vastes, ces
risques ont pu être identités ou au moins soulevés.
Face à cette course folle au progrès, à
la productivité (qui sous-tend d'importants enjeux économiques),
les exigences du public en matière de sécurité se font de
plus en plus pressantes. C'est pourquoi l'attitude du "We succeed now we pay
later" est devenu totalement irresponsable et inconcevable.
L'évaluation des risques de consommation d'OGM chez
l'Homme reste théorique dans la mesure où il n'existe aucun recul
du fait du caractère récent de cette consommation.
Cependant, de nombreuses recherches tentent de recenser les
risques potentiels dans la limite d'un laboratoire. Cette recherche
limitée et sans aucun recul ne peut suffire à rassurer le
consommateur touché récemment par la maladie de Kreutzfeld
Jacob60qui serait en relation avec
l'encéphalopathie bovine spongiforme (maladie de la vache folle).
La consommation d'OGM revêt un caractère
dangereux pour 63% des personnes questionnées à ce
sujet61.
60. La maladie de Creutzfeld-Jacob ou encéphalopathie
spongiforme subaiguë, est une encéphalopathie à prion. Elle
débute par des troubles psychiques évoluant rapidement vers la
démence. La consommation de viande de bovins atteints pourrait provoquer
la maladie chez l'homme.
61. Sondage AC Nielson, Courrier
International no 381 du 19-20 février 1998
Dans ce contexte de peur où les scientifiques sont
affublés du nom d'apprenti sorcier, il est primordial que les recherches
s'accélèrent afin d'évaluer les risques. La
communauté scientifique tente de minimiser les effets que pourraient
avoir les OGM sur la santé humaine dans la mesure où chacun est
conscient que le risque zéro n'existe pas. La liste de ces risques
n'est donc pas exhaustive car la consommation d'aliments issus directement ou
indirectement du génie génétique est susceptible
d'entraîner, comme toutes modifications alimentaires, des risques
nouveaux inconnus pour la santé humaine62.
B -D'éventuels périls pour la
santé humaine
L'ingestion de produits contenant des OVM ou
dérivés comporte de nombreux risques dont les risques
toxicologiques te allergiques.
· Risques toxicologiques
Il est à remarquer que la plupart des OVM
commercialisés sont des plantes pesticides :elles produisent un
insecticide ou sont tolérantes à un herbicide. Ainsi deux tiers
des OVM ont vu leur métabolisme modifié afin de ne plus mourir en
absorbant le glyphosate dans le Roundup et le glufosinate dans le Blasta et le
Liberty. Selon le département de santé publique de
l'Université de Californie, le glyphosate serait la troisième
cause de maladie liée aux pesticides parmi les agriculteurs
américains.
Dans certains cas, les pesticides miment des hormones ou des
neurotransmetteurs, l'accumulation dans l'organisme humain ou animal des
résidus de ces pesticides pourrait provoquer à terme des maladies
très graves chez les consommateurs.
Un des herbicides de Bt , peut in vitro,
détériorer les globules rouges humains. Les mécanismes
d'action de l'herbicide du maïs Bt est encore incertain chez les
insectes : il troue les parois cellulaires, et son récepteur n'est
pas encore complètement caractérisé et continue à
faire l'objet d'études.
De plus, les métabolites, qui sont formés dans
l'organisme à partir des herbicides associés aux OVM, tel le
Roundup, peuvent en se liant à l'ADN des mammifères après
ingestion, se concentrer dans la chaîne alimentaire, et avoir des effets
secondaires sur la régulation des gènes introduits.
· Risques d'allergie
Beaucoup de transgènes insérés viennent de
plantes, de micro-organisme, ou d'animaux, que l'homme n'a pas d'habitude
d'ingérer : gène de scorpion dans du maïs, ou de
pétunia, etc. .,ce qui est susceptible de provoquer des allergies
aux consommateurs. En effet des études réalisées sur le
soja transgénique enrichi en acides aminés contenant en
gène de la noix du Brésil ont permis de démontrer
l'existences des effets allergisants.
Par ailleurs, 44 patients se sont plaints aux USA au cours de
l'année 2000, de réaction allergiques à un maïs
génétiquement modifié ayant contaminé
illégalement la nourriture63.
Des spécialistes préconisent la création
d'un réseau d'allergo-vigilance compte tenu de la multiplicité
des cas d'allergies alimentaires graves, et parfois mortelles constatée
aujourd'hui.
62. Source :www.creaweb.fr/bv/ogm/risques2.htm
63. Source : Rapport provisoire sur le projet
« Cadre National de Biosécurité » (No
GF/2716-02-4387)
· Risque de résistance aux
antibiotiques
Lorsque l'homme consomme des animaux ayant mangé des OVM
résistants aux antibiotiques, cette résistance pourrait
s'introduire dans ses intestins sous forme de bactéries, avec des
conséquences pour la santé. En effet, dans certains cas où
des gènes de résistance aux antibiotiques qui ont permis la
sélection des transgènes ne sont ni éliminés ni
inactivés, on peut craindre de voir apparaître dans l'organisme
humain, des bactéries devenues résistantes aux antibiotiques.
Dès 1997, le Comité de la prévention et de la
précaution en France, avait préconisé de ne pas utiliser
ce type de gène dans les OVM.
Les facteurs favorisant la présence des risques pour la
santé ne sont donc pas tous connus, cela suffit à justifier les
craintes des consommateurs.
· Risque de modification de l'expression des
gènes
L'insertion du transgène peut provoquer une
modification de l'expression habituelle des gènes. De telles mutations
favoriseraient la production de certaines substances nocives pour l'organisme.
Déjà on signale que des pommes de terre expérimentales
transgéniques provoquent des effets inattendus : les rats ayant
consommé ces pommes de terre ont vu leur croissance, leur
immunité et même leur cerveau gravement perturbé. Les
risques sont donc grands et doivent inciter à la prudence.
Ainsi, le moins que l'on puisse dire est qu'aujourd'hui
lorsqu'il est affirmé que les OGM sont sans aucun danger pour la
santé, cette affirmation n'est le fait que du refus des firmes
agrochimiques et de l'incapacité des Etats d'imposer des recherches
sérieuses sur le point de savoir si, effectivement, il est des effets
négatifs ou non pour la santé. Si on ne cherche pas, on est
évidemment certain de ne jamais trouver.
Paragraphe 2 : Les débats autour de la question
des OGM.
Au sujet des OGM, il y a une divergence des points de vue entre
pays pauvres et pays riches(A) ensuite nous allons aborder la
jurisprudence de la CJCE en matière d'ESB (B)
A- La divergence des points de vue
Jamais avant la Conférence sur la
biosécurité de Cartagena (Colombie, février 1999), on
avait réalisé l'envergure des enjeux environnementaux et
socio-économiques de la biotechnologie.
Juste avant les négociations de Cartagena,
l'unité du tiers-monde a éclaté. Le Chili, l'Argentine et
l'Uruguay ont formé le "groupe de Miami" avec les Etats-Unis, le Canada
et l'Australie. Rappelons que l'Argentine et les deux géants
nord-américains sont les principaux exportateurs de produits agricoles.
Ils cultivent actuellement des plantes transgéniques, en particulier le
soja, le maïs, le maïs et le colza sur de larges
superficies64.
64. . Surface totale (OGM/non OGM) de ces 4 cultures = 271
millions ha. Sur ces 271 millions ha, 21% de surfaces sont OGM soit
l'équivalent de 5% de la superficie des Etats-Unis ; soja OGM = 51%
des surfaces de soja, coton OGM = 20% des surfaces de coton, colza OGM = 12%
des surfaces de colza, maïs OGM = 9% des surfaces de maïs
Les récoltes de ces OGM ne sont pas stockées
séparément, mais au contraire mélangées à
celles des cultures traditionnelles. Ces exportateurs craignent que le
protocole ne soit utilisé pour entraver le commerce des produits
agricoles transgéniques vers certains pays. Ces craintes ne sont pas
seulement théoriques, car entre temps, l'absence de décision
européenne approuvant des variétés de maïs
transgénique et de colza, d'origines américaine et canadienne, a
entraîné d'importantes pertes de marché. A Cartagena, le
groupe de Miami a affirmé que les produits transgéniques tels que
les graines sont destinés à être consommés et
transformés, et non à être libérés dans
l'environnement, de sorte qu'ils n'affecteront pas la biodiversité.
Selon eux, ils devraient être exclus de la procédure d'accord
préalable. Mais ils ne disent rien de leurs conséquences sur la
santé des consommateurs.
L'Union Européenne était mal à l'aise,
entre la position du groupe de Miami et la prudence du Tiers-Monde. Elle tente
de négocier un compromis, malgré des discordances entre ses
membres. Selon King (1999), à propos des OGM servant de matières
premières (les graines génétiquement modifiées
commercialisées pour l'alimentation humaine et animale), l'UE est
forcée d'insister sur leur inclusion dans le protocole puisque la
directive 90/220 du 23 avril 199065 encadre
l'importation de tous les OGM vivants. Selon la même source, les groupes
environnementalistes se sont plaints de ce que l'UE n'était pas
suffisamment ferme sur ce point durant les négociations, et de ce que le
"texte du président" du Groupe de Travail, le Danois Veit Koester, qui a
été finalement adopté par le groupe puis transmis à
la Conférence des Parties, exclut cette catégorie d'OGM du
protocole et donc de la procédure de l'accord préalable.
Cependant, à la fin de la conférence, l'UE a indiqué que
les matières premières devaient être incluses dans le
traité. Mais d'aucuns précisent que la position européenne
est flexible.
D'autres différends ont été
débattus à Cartagena. Par exemple, les pays industrialisés
ont affirmé que les produits transformés à partir des OGM
("produits dérivés"), qui ne sont pas eux-mêmes vivants,
doivent être exclus du protocole. S'agissant du principe de
précaution, il a été largement cité dans la
réglementation internationale sur l'environnement, en particulier dans
la déclaration de Rio.
Il énonce que les gouvernements devraient agir pour
protéger l'environnement, même lorsqu'ils ne possèdent pas
de preuves scientifiques de la nocivité de la menace. Le texte du
président du Groupe de Travail spécial à composition non
limité sur la prévention des risques biotechnologiques
permettrait d'appliquer le principe de précaution aux procédures
d'évaluation du risque utilisé pour l'accord préalable.
Par ailleurs, beaucoup de pays du Tiers-Monde, et surtout les
pays africains, affirment que l'importation d'OGM devrait prendre en compte les
conséquences socio-économiques de ces produits, et leurs effets
directs sur la biodiversité.
Selon eux, puisque la diversité biologique est
principalement conservée par les cultivateurs traditionnels et les
peuples autochtones, tout impact négatif sur ces derniers serait par
contrecoup néfaste pour la biodiversité.
Le groupe de Miami et l'Union européenne s'opposent
à cette vision ; ils considèrent qu'elle introduit des arguments
"subjectifs" qui pourraient être utilisés pour bloquer la
commercialisation d'OGM inoffensifs. En revanche, l'UE se distingue du groupe
de Miami sur la question de savoir si le protocole doit être
subordonné aux règles de l'Organisation Mondiale du Commerce
(OMC).
65. Directive 90/220/CEE relative à la
dissémination volontaire d'organismes génétiquement
modifiés dans l'environnement
L'UE affirme que le protocole est avant tout une
législation environnementale découlant de la Convention sur la
Diversité Biologique et qu'il doit donc avoir le même statut que
les autres lois internationales. De même, les positions divergent quant
à la question de la responsabilité et des réparations des
préjudices découlant du transport international d'OGM, que les
pays du Tiers-Monde considèrent comme cruciale. Finalement, les
Etats-Unis et leurs alliés ont été largement
accusés d'avoir torpillé les négociations de Cartagena.
B- L'ESB et le principe de précaution
dans la jurisprudence de la CJCE
C'est dans une affaire d'agriculture et de police sanitaire
(l'affaire de la vache folle) que la Cour de Justice des Communautés en
a précisé la portée et fait
application64.Dans deux arrêts du 5 Juillet
1998, la Cour devait apprécier la validité d'une décision
de la Commission Européenne « relative à certaines
mesures d'urgence en matière de protection contre
l'encéphalopathie spongiforme bovine » (ESB) qui interdisait
au Royaume-Uni d'expédier des bovins, des viandes bovines et divers
produits vers les autres Etats membres ou des pays tiers. La question
posée était de savoir si cette mesure était suffisamment
justifiée car elle avait été prise dans un contexte de
risque incertain de transmission de la maladie de la vache folle à
l'homme.
En réponse à un moyen pris de la violation du
principe de proportionnalité, la Cour
décide : « A l'époque de l'adoption de la
décision attaquée, il existait une grande incertitude quant aux
risques présentés par les animaux vivants, la viande bovine ou
les produits dérivés. Or, il doit être admis que lorsque
les incertitudes subsistent quant à l'existence ou à la
portée de risques pour la santé des personnes, les institutions
peuvent prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la
réalité et la gravité de ces risques soient pleinement
démontrées.
Cette approche est corroborée par l'article 130 R,
paragraphe 1, du traité CE, selon lequel la protection de la
santé des personnes relève des objectifs de la politique de la
Communauté dans le domaine de l'environnement. Le paragraphe 2 du
même article prévoit que cette politique, visant un niveau de
protection élevé, se fonde notamment sur les principes de
précaution et d'action préventive et que les exigences en
matière de protection l'environnement doivent être
intégrées dans la définition et la mise en oeuvre des
autres politiques de la Communauté
»65.
La démarche de précaution est donc
légitime dans le droit communautaire, à tout le moins lorsqu'il y
va de la santé et de l'environnement68.
66. Droit et Environnement, Bulletin du
Réseau « Droit de l'Environnement », Agence
Universitaire de la Francophonie AUPELF-UREF , juin 2001 no 8 page 1
67. Arrêts publiés sur le site
http://europa.eu.int/cj/fr/index.htm
68. Michel PAQUES , chronique : la
CJCE et le principe de précaution, l'ESB et l'OGM, droit et
environnement, bulletin du Réseau « Droit de
l'Environnement » Agence Universitaire de la Francophonie AUPELF-UREF
page 2.
Telle est également la lecture du droit communautaire
que propose la Commission des Communautés : « La
Commission considère [...] que le principe de précaution est un
principe d'application générale qui doit être notamment
pris en compte dans les domaines de la protection de l'environnement, son champ
d'application est beaucoup plus large. Il couvre les circonstances
particulières où les données scientifiques, peu
concluantes ou incertaines, mais où, selon des indications
découlant d'une évaluation scientifique objective et
préliminaire, il y a des motifs raisonnables de s'inquiéter que
les effets potentiellement dangereux sur l'environnement et la santé
humaine, animale ou végétale soient incompatibles avec le niveau
choisi de protection 67»
.
69. Voir le site
http://europa.eu.int/eurlex/fr/com/pdf/2000/com20000001fr01.pdf.sp.p.9
Chapitre 2 : L'application du principe de
précaution dans le domaine de la biotechnologie moderne
Le principe de précaution propose, en situation
d'incertitude de considérer le risque encore hypothétique comme
avéré et de prendre des mesures de protection à son
égard. Il efface ainsi le retard entraîné, dans la
démarche classique par le délai d'établissement de la
preuve. Indissociable des 3 autres principes de gestion (principe d'action
préventive, de
« pollueur-payeur70 » et de
participation), le principe de précaution défini par la loi
Barnier (1995) dit en substance que l'absence de certitudes nous impose la
précaution mais tout en considérant son coût.
Ce deuxième chapitre sera donc consacré aux OVM
et le principe de précaution (section 1) et à la
réglementation des produits génétiquement modifiés
par le protocole (section 2).
SECTION 1 : LES OVM ET LE PRINCIPE DE PRECAUTION
Nous verrons successivement dans cette première section
la sécurité alimentaire (paragraphe 1) ensuite
la prévention des risques biotechnologiques (paragraphe
2)
Paragraphe 1 : La sécurité
alimentaire
Face à la multiplication des drames sanitaires, la
sécurité alimentaire s'avère nécessaire
(A) aussi, il importe de multiplier les mesures de protection
(B)
A : La nécessité d'une
sécurité alimentaire
« Que pouvons nous encore manger ? »
Une préoccupation souvent entendue lors des crises de la vache folle en
1996 en 2000 et encore aujourd'hui avec l'apparition de cette maladie aux
USA.
Avec la crise de la vache folle, sécurité
alimentaire, principe de précaution et communication de risques sont
devenus des maîtres mots. Deux crises majeures ont jalonné
l'histoire de la vache folle : en 1996, lorsqu'on apprenait que la maladie
pouvait se transmettre à l'homme et en 2000, lorsque l'Union
européenne prenait conscience qu'elle était aussi amplement
touchée par la vache folle. Le consommateur se découvrait des
angoisses alimentaires et s'interrogeait sur l'intégrité des
aliments. Avec la crise de la vache folle, l'image bucolique de la vache
paissant stoïquement l'herbe fraîche en regardant passer les trains
a pris du plomb dans l'aile.
Plus personne ne conteste aujourd'hui la
nécessité d'une sécurité alimentaire
intégrale, « de l'étable à la table », sur toute
la filière alimentaire. La sécurité alimentaire commence
par l'alimentation animale et se poursuit à la ferme. L'exemple de la
vache folle, mais aussi les autres scandales alimentaires comme le poulet
à la dioxine, nous le montre: si l'on veut obtenir des denrées
alimentaires de qualité, la production primaire dans ses multiples
aspects (alimentation des animaux, conditions de vie, hygiène de
l'étable, utilisation de médicaments, etc.) doit être
optimale.
70. Dans son orientation
générale, il s'agit d'un principe simple selon lequel
l'opérateur d'une activité dangereuse qui cause un dommage
à l'environnement doit réparer les conséquences de
celui-ci.
Garantir la sécurité alimentaire n'est pas
toujours chose aisée. La vache folle en est l'exemple par excellence. On
ne connaissait presque rien des maladies à prions lorsque le premier cas
de vache folle est apparu en Grande-Bretagne en 1986. Depuis, des
progrès énormes ont été faits dans la
compréhension de la maladie. Toutefois, malgré ces
progrès, la vache folle reste toujours entourée d'énigmes
dont une de taille : quel est le risque exact encouru par l'homme ? Certains
l'estiment minime, d'autres sont plus alarmistes.
Bien que le protocole de Cartagena sur la prévention
des risques biotechnologiques soit le seul instrument international
consacré exclusivement aux OGM, il n'existe pas dans le
« vide ». La convention sur la diversité biologique,
à laquelle est rattachée le protocole, demande elle-même
aux gouvernements de mettre en place des moyens pour réglementer,
gérer ou maîtriser les risques associés à
l'utilisation et à la libération d'OGM. Il existe en outre
plusieurs instruments internationaux et processus d'établissement des
normes traitant de divers aspects de la prévention des risques
biotechnologiques.
Il s'agit notamment des instruments suivants :
La commission du Codex Alimentarius, qui
traite des problèmes de sécurité alimentaire et de
santé du consommateur. Cette commission a établi une
équipe de travail intergouvernementale spéciale sur les aliments
dérivés des biotechnologies, chargée d'élaborer des
normes et des lignes directrices pour les produits alimentaires issus du
génie génétique. La commission s'intéresse aussi
à l'étiquetage de ces aliments pour permettre au consommateur de
faire un choix éclairé.
La convention internationale pour la protection des
végétaux, qui a pour mandat de protéger la
santé des plantes en évaluant et en gérant les risques
phytosanitaires. Cette convention est en train d'établir des normes
relatives aux risques phytosanitaires associés aux OGM et aux
espèces envahissantes. Tout OGM susceptible d'être
considéré comme ravageur est couvert par cet instrument.
L'office international des épizooties
(OIE), qui élabore des normes et des lignes directrices pour
prévenir l'introduction d'agents infectieux et de maladies dans le pays
importateur lors de mouvements commerciaux transfrontières d'animaux, de
matériel génétique animal et de produits animaux..
En réaction contre la sécurité
alimentaire, Philipe KOURILSKY dans son ouvrage « Du bon usage du
principe de précaution » précité p142-144,
écrit : « la question de la sécurité
alimentaire relève plus de fantasmagorie que de la
réalité. Des centaines de millions de personnes ont aux USA, en
Chine et ailleurs consommé pendant des années et consomment
toujours, des OGM sans qu'aucune incidence sanitaire ait été
relevée. En outre, il n'existe aucune base logique ou scientifique qui
légitime l'interrogation »71.
La nécessité d'une sécurité
alimentaire aboutit à une multiplication des mesures de
précaution qui fera l'objet ne notre (B).
71. Philipe KOURILSKY, du bon usage du
principe de précaution précité p142-144
B- La multiplication des mesures de protection face aux
risques sanitaires
En effet, comment gérer un risque que l'on ne
connaît pas et est-ce nécessaire de prendre des mesures sans
évidence scientifique ?
« Dans le doute, abstiens-toi ! » Toutes les mesures
prises pour lutter contre la vache folle vont à l'encontre de cet adage.
Ici, on agit, on adopte des mesures de prévention même si les
connaissances scientifiques ne sont pas complètes. On applique ce qu'on
appelle le principe de précaution devant des risques que l'on ne peut
pas quantifier avec exactitude, mais que l'on ne veut pas courir.
Le principe de précaution n'est pas toujours simple
à appliquer. Prendre des mesures malgré l'absence de preuve ou
malgré le manque de connaissances, c'est accepter de ne pas avoir la
solution ; c'est accepter d'agir, malgré une situation truffée de
points d'interrogation. Reste une question : appliquons-nous trop le principe
de précaution ou pas assez ?
Les autorités suisses ont pris la vache folle
très au sérieux. Dès le premier cas en 1990, les
premières mesures pour la protection des consommateurs ont
été prises et cela bien avant que l'on sache que la vache folle
pouvait se transmettre à l'homme. L'objectif de ces mesures est de ne
laisser aucune chance aux prions pathogènes d'entrer dans les
denrées alimentaires et les biens de consommation.
De même le maïs transgénique offert par les
Nations Unies pour prévenir les risques de famine en Zambie a
été refusé par le Président Zambien Levy Mwanawasa.
Bien que près de 30 % des 10,2 millions d'habitants de la Zambie soient
menacés par la famine, le Gouvernement du Président Levy
Mwanawasa a cédé à la peur des modifications
génétiques et a refusé d'autoriser l'importation de
céréales GM. Le Président lui-même a
réitéré son refus d'administrer à ses compatriotes
un "poison" pouvant avoir des effets à long terme, tant qu'il ne
disposerait pas de données suffisantes et crédibles pour le
convaincre du contraire.
« En raison de notre faible capacité
scientifique et technologique, a expliqué le président Levy
Mwanawasa, nous ne sommes pas en mesure d'évaluer le risque
présenté par les OGM. » Donc la prudence s'impose et le
pays ne veut pas entendre parler d'OGM pour sa population, tout affamée
qu'elle soit. Les autorités zambiennes ont exprimé leur intention
de s'en tenir au "principe de prudence", qui stipule qu'en cas d'incertitude
scientifique, un pays doit s'abstenir d'adopter des mesures qui risquent de
compromettre la santé humaine ou animale ou de nuire à
l'environnement. "Je ne permettrai jamais que les Zambiens servent de cobayes,
quelle que soit l'ampleur de la crise alimentaire", déclara le
Président Zambien. Le Ministre de l'agriculture et des
coopératives, Mundia Sikatana, a opiné : "Nous aurons de bons
produits alimentaires pour nos concitoyens, qu'il nous sera possible de
garantir. On ne devrait pas être forcés d'accepter quoi que ce
soit72 ''
Après des mois de bagarre, le Programme alimentaire
mondial (FAO) a accepté de retirer les 15.000 tonnes de maïs
génétiquement modifié destinés à Lusaka, et
de les remplacer par des céréales plus classiques. Dans le
même temps, l'Union Européenne débloquait 28 millions
d'euros pour aider le pays à acheter le maïs traditionnel.
Même si en Afrique, le concept de sécurité
alimentaire concerne plus souvent la régularité des
approvisionnements que leur innocuité, le cas Zambien prouve que les
Africains peuvent aussi se soucier de la qualité du contenu de leur
assiette73.
72. source Afrique Relance, disponible sur le
site :
http://www.un.org/french/ecosocdev/geninfo/afrec
73 . .Source :Jeune Afrique
l'intelligent page 65-67
Suite aux dangers que constituent les OGM en l'absence d'un
code d'hygiène alimentaire, la réglementation togolaise dans
cette matière obéit à la loi française du
1er Août 1905 sur les falsifications en matière de
produits. Elle est relative à la falsification, au
préconditionnement des aliments et à la
distribution74.
Paragraphe 2 : La prévention des risques
biotechnologiques
Le concept de la prévention des risques
biotechnologiques recouvre un vaste évantail de mesures, de politiques
et de procédure destinées à réduire au minimum ou
à éliminer les risques potentiels que la biotechnologie pourrait
comporter pour l'environnement et la santé humaine. Il est essentiel
que des mesures de protection crédibles et efficaces soient prises
concernant les OGM, afin de tirer le maximum du potentiel de la biotechnologie
tout en réduisant les risques possibles.
Dans ce volet, nous étudierons la
nécessité d'une biosécurité (A)
ensuite la nécessité d'une sécurité alimentaire
durable (B)
A. La nécessité d'une
biosécurité
Les biotechnologies cherchent, par des méthodes faisant
appel au génie génétique et à diverses techniques
biologiques, à augmenter les rendements (production et
productivité) et à améliorer l'efficacité des
produits utilisés dans le domaine de l'agriculture, l'agro-alimentaire,
l'élevage, la santé animale, la médecine humaine, la
dépollution, etc. La biotechnologie crée et modifie
génétiquement les organismes vivant pour des raisons
essentiellement économiques. Toute modification génétique
d'une espèce fait d'elle une espèce étrangère
même dans son écosystème d'origine.
En effet, la biosécurité apparaît comme
l'une des questions les plus urgentes qui se pose à la communauté
internationale et concerne la prévention des risques biotechnologiques.
Elle vise également le contrôle des nouvelles introductions
d'espèces ou de gènes dans des milieux qui leurs sont
étrangers. Il s'agit essentiellement de la ``gestion des risques de type
biologique et environnemental associés à l'alimentation et
à l'agriculture, y compris les forêts et les pêches'', un
secteur qui couvre la sécurité sanitaire des aliments ainsi que
la vie et la santé des végétaux et des animaux qui ont
introduit comme l'érosion de la biodiversité, la propagation
des maladies transfrontières, du bétail, les armes de guerre
à action toxique et la maladie de la vache folle.
Le nombre considérable d'accords internationaux, de
lois non directives et d'organes intergouvernementaux qui ont été
établis pour traiter de la biosécurité témoignent
de l'ampleur de la complexité du sujet.
Le besoin de biosécurité alimentaire et agricole
s'est accru avec la mondialisation de l'économie, le
développement rapide des communications, des transports et du commerce,
les progrès technologiques et la sensibilisation accrue aux questions
touchant à la biodiversité et à l'environnement. Au plan
international c'est l'Accord sur l'application des mesures sanitaires et
phytosanitaires (ou accord SPS) de l'OMC qui fournit la couverture la plus
complète à cet égard.
74. La protection de l'hygiène
alimentaire au Togo, mémoire de DEA, AKOMA-POATHY Noël, UB, 2000,
page 14
La nécessité d'une biosécurité
implique, selon Michel PRIEUR, une «application rationnelle d'une
combinaison de mesures biologiques, biotechniques, chimiques, physiques,
culturales ou intéressant la sélection des végétaux
dans laquelle l'emploi de produits chimiques phyto pharmaceutiques est
limité au strict nécessaire pour maintenir la présence des
organismes nuisibles en dessous du seuil à partir duquel apparaissent
les dommages ou une perte économique
inacceptable »75.
Au Togo, en effet, le cadre juridique national se
caractérise par une absence de législation nationale
spécifique à la prévention des risques biotechnologiques.
Seule une large interprétation de l'article 80 de la loi no 88-14 du 03
novembre 1988 portant code de l'environnement permettrait au Togo de soumettre
l'introduction d'OVM à une autorisation « sans
préjudice de la législation phytosanitaire, l'introduction au
Togo de toute espèce animale ou végétale nouvelle est
soumise à l'autorisation du ministre chargé de l'environnement.
Cette autorisation sera refusée, dès lors qu'il y a lieu de
craindre que la prolifération de l'espèce
considérée nuise aux populations des espèces
indigènes et aux équilibres naturels ».
Néanmoins l'adhésion aux ententes
internationales relatives à la gestion des risques biotechnologiques et
l'existence de législations connexes ou voisines méritent
d'être évoquées. Le Togo a adhéré à
plusieurs ententes relatives à la sécurité en
biotechnologie. En juin 1992, à Rio de Janeiro, a été
adopté l'Agenda 21.
Le cinquième programme de son chapitre 16 traite de
l'établissement de mécanismes pour le développement des
biotechnologies et leur application dans le respect de
l'environnement76, (la reconnaissance par la
communauté internationale des risques potentiels de l'utilisation de la
biotechnologie moderne, a entraîné l'adoption d'une approche
prudentielle. Ainsi les membres de la communauté internationale se sont
convenus de la nécessité d'assurer la sécurité dans
la mise au point, l'application, les échanges et le transfert des
biotechnologies au moyen d'un accord international sur les principes à
appliquer en matière d'évaluation et de gestion des risques)
Pour une biosécurité nous envisageons que les
mesures et les actions suivantes soient menées par le ministère
de l'environnement notamment :
Mesures préconisées
La mise en place d'un système de quarantaine au niveau
du Ministère de l'environnement Un contrôle des produits
alimentaires produit localement ou entrant dans le territoire national sera
pratiqué par la Délégation du Ministère de
l'Environnement (Cuisses de poulets, croupions d'Inde,etc....), Un
contrôle de qualité des aliments et de l'eau de consommation doit
être effectué par le Centre national d'hygiène.
75. L'agriculture biologique une agriculture
durable ? Sous la direction de Michel PRIEUR, droit comparé de
l'environnement, 1996, page120
76. L'agenda 21 consacre son chapitre 16
à la « gestion écologiquement rationnelle des
biotechnologies ».
Actions envisagées
Adoption d'un Cadre national sur la
biosécurité comprenant la création d'une Commission
nationale sur la biosécurité ayant pour tâches de:
- Coordonner les activités des promoteurs privés
et des centres de recherche par la tenue d'ateliers et de réunions de
sensibilisation et de formation qui regrouperont les différents
partenaires. - Mener des études pour mettre en relief les lacunes
et les priorités en matière de biotechnologies et de
biosécurité - Renforcer les capacités nationales en
cette matière.
- Coordonner les activités dans le domaine de la
sécurité dans les biotechnologies et le contrôle des
produits biotechnologiques locaux et importés
- Développer et encourager la coopération sous
régionale dans le domaine
- Promouvoir un mécanisme de participation efficace du
public au processus de décision relatif à la gestion des risques
biotechnologiques.
B- La nécessité d'une
sécurité alimentaire durable
Régulièrement mis en accusation, le semencier
américain Monsanto a publié une charte dans laquelle il promet de
« faire bénéficier les agriculteurs sans ressources du
Tiers Monde de la connaissance et des avantages de toutes les formes
d'agriculture, afin de contribuer à la sécurité
alimentaire et à la protection de l'environnement ».
Comme il n'est pas évident pour le consommateur
Ewé ou Kabyè de connaître la composition de ce qu'il mange
et de savoir si cela est conforme aux prescriptions alimentaires de sa
religion, Monsanto déclare « respecter les
préoccupations d'ordre religieux, culturel et éthique dans le
monde en n'utilisant pas de gènes issus de l'homme ou de l'animal dans
ses produits agricoles destinés à l'alimentation humaine et
animale »77.
Les documents accompagnant les organismes vivants
modifiés destinés à être introduits
intentionnellement dans l'environnement de la partie importatrice, semences par
exemple, doivent indiquer qu'il s'agit d'organismes vivants modifiés,
spécifier leur identité et leurs traits et
caractéristiques pertinents ainsi que les règles de
sécurité à observer pour la manipulation, l'entreposage,
le transport et l'utilisation de ces organismes, et indiquer les
coordonnées de la personne à contacter pour tout
complément d'information, ainsi que, le cas échéant, le
nom et l'adresse de l'importateur et de l'exportateur.
Les documents accompagnant les organismes vivants
modifiés destinés à être utilisés directement
pour l'alimentation humaine et animale, ou destinés à être
transformés, doivent indiquer clairement qu'ils « peuvent
contenir » des organismes vivants modifiés et qu'ils ne sont
pas destinés à être introduits intentionnellement dans
l'environnement et elle doit donner les coordonnées des personnes ou des
organismes à contacter pour tout complément d'information. Le
protocole exige des parties qu'elles prennent une décision exposant en
détail les modalités de cette obligation, en particulier la
façon dont il faudra spécifier l'identité de ces
organismes ainsi que toute identification particulière, et ce au plus
tard dans les deux ans qui suivent l'entrée en vigueur du protocole.
77. . Jeune Afrique l'Intelligent précité, page
68
Les documents accompagnant les organismes vivants
modifiés destinés à être utilisés en milieu
confiné, par exemple à des fins de recherche scientifique ou
commerciale dans des locaux en milieu clos, doivent indiquer clairement qu'il
s'agit d'organismes vivants modifiés, en spécifiant les
règles de sécurité à observer pour la manipulation,
l'entreposage, le transport et l'utilisation de ces organismes, et
préciser les coordonnées des personnes ou organismes à
contacter pour tout complément d'information, y compris le nom et
l'adresse de la personne et de l'institution auxquelles les organismes vivants
modifiés sont expédiés.
Face à la demande croissante des consommateurs en
matière d'amélioration de la sécurité sanitaire des
aliments dans le monde, l'Organisation Internationale des Epizooties (OIE) a
reconnu la nécessité d'étendre ses activités
normatives et scientifiques à la « sécurité
sanitaire des aliments d'origine animale en phase de production ».
Dans le cadre de ce nouveau domaine d'action, l'OIE collaborera avec d'autres
organisations compétentes à la réduction des risques de
santé publique liés aux aliments du fait de dangers provenant des
animaux, étant entendu comme danger tout agent biologique, chimique ou
physique y compris les OGM , présent dans un aliment pouvant avoir un
effet nocif sur la santé.
Le programme de travail de l'OIE pour la période
2001-2005 recommande que « l'OIE joue un rôle plus actif dans
le domaine de la santé publique et de la protection du
consommateur » et précise que cette participation doit
concerner « les zoonoses et les maladies transmissibles à
l'homme par l'intermédiaire des aliments, que les animaux soient ou non
touchés par ces maladies ». Le rôle de l'OIE
s'était traditionnellement limité à la prévention
de la transmission des maladies animales aux autres animaux et à
l'homme. Le Directeur général de l'OIE a constitué un
Groupe ad hoc sur la sécurité sanitaire des aliments dont les
recommandations ont été soumises pour approbation au
Comité international de l'OIE et adoptées par celui-ci en 2002.
Un groupe de travail permanent sur la sécurité des aliments a
été constitué en vue d'assurer la coordination des
activités de l'OIE liées à la salubrité des
aliments. Ce groupe de travail, dont font partie plusieurs experts de la
Commission du Codex Alimentarius et des Comités du Codex,
bénéficie d'une large représentation géographique.
Il accordera une attention particulière aux besoins des pays en
développement.
Lors de ces différents travaux, l'OIE rendra à
la fois service au pays importateur en prévenant la diffusion de
maladies et au pays exportateur en prévenant la diffusion de maladies et
au pays exportateur en contribuant à la sécurité sanitaire
de l'ensemble de la chaîne, « du producteur au
consommateur ». L'élaboration des normes de santé
publique et de santé animale préalablement à l'abattage
des animaux contribuera par exemple à restaurer la confiance des
consommateurs dans les denrées alimentaires.
Enfin, l'implication de l'OIE renforcera la protection du
consommateur en termes de sécurité sanitaire et se traduira par
une amélioration globale de la santé animale et de la
santé publique78.
En définitive, pour une sécurité
alimentaire durable, nous devons oeuvrer pour une « application
rationnelle d'une combinaison de mesures biologique, biotechnique, chimique,
physique, culturale ou intéressant la sélection des
végétaux dans laquelle l'emploi de produits chimiques phyto
pharmaceutique est limité au strict nécessaire pour maintenir la
présence des organismes nuisibles en dessous du seuil à partir
duquel apparaissent les dommages ou une perte économique
inacceptable.»79
78. source :
www.oie.int/fr/secu_sanitaire/fr_introduction.htm
79. l'agriculture biologique une agriculture durable ?
Sous la direction de Michel PRIEUR, droit comparé de l'environnement
1996, page 362
SECTION 2 : LA REGLEMENTATION DES PRODUITS GM PAR LE
PROTOCOLE
Nous allons traiter dans cette section des
techniques de contrôle (Paragraphe 1) ensuite la prise
en compte des produits GM par le protocole (Paragraphe 2)
Paragraphe 1 : Les techniques de contrôle
Nous mettrons l'accent particulièrement sur la
traçabilité (A) et le centre de
prévention des risques biotechnologiques (B)
A- La traçabilité
L'article 18 du protocole traite des procédures visant
à garantir la transparence et la traçabilité des OVM.
En effet la traçabilité est une organisation qui
permet de relier tous les stades de la filière agro-alimentaire, de
l'agriculteur au produit fini présenté aux consommateurs.
Elle doit retracer, dans la transparence l'origine du produit,
son historique, ses composants.
La traçabilité doit en plus permettre de donner
une réponse immédiate à toute question provenant du
consommateur concernant un risque alimentaire réel ou fictif relatif au
produit commercialisé.
En effet, la traçabilité obéit
à certaines modalités :
La première étape, où
l'on doit tracer les gènes introduits, correspondra à la sortie
du laboratoire du semencier jusqu'à la commercialisation des semences
génétiques modifiées. En effet, il serait
nécessaire d'identifier le ou les gènes introduits par
attribution d'un numéro d'immatriculation. Cette codification doit
suivre les grains tout au long de la chaîne : aussi bien au niveau
des laboratoires de sélection, de la production au sein des usines et
sur les sacs de semences.
Il sera aussi nécessaire d'évaluer la
faisabilité de ce système pour les producteurs qui assurent leur
mise en culture sans s'approvisionner sur le marché des matières
premières.
La seconde étape concernera les
producteurs de matières premières qui seront à la
codification (vue dans la première étape) de garantir la nature
de leur culture.
Mais même en misant sur la discipline des producteurs,
qui ont déjà l'habitude de séparer leurs récoltes
dans différents silos, la séparation des
filières « avec» et sans« OGM» supposerait la
mise en place de deux équipements entiers de collecte ; un pour les
plantes conventionnelles un pour les plantes modifiées, sans quoi les
risques de contamination croisée seraient possibles.
Une deuxième difficulté serait de savoir comment
le producteur de culture «sans OGM» pourra-t-il assurer la non
contamination de ses cultures si un champ voisin contient des OGM ?
Une solution serait une organisation efficace des cultures en
éloignant le plus possible les champs contenant les même
espèces végétales, évitant ainsi par la distance
les pollinisations interespèces(distance de sécurité entre
parcelles).
Un autre problème concernerait les
végétaux pour lesquels nous sommes en grande partie liés
à d'autres pays par importation. C'est l'exemple concret du
importé des USA. La question qui se pose est : « Comment dans
ce cas là peut-on avoir un pouvoir de pression assez grand pour obliger
dans d'autres pays la séparation des filières ? » . Il
est vrai que vis à vis des coûts induits, les pratiques de
stockage et de transport outre atlantique par bateau empêchent toute
séparation.
La dernière étape est la
production industrielle qui implique la matière première dans un
processus visant à aboutir à un produit fini commercialisable.
C'est la fin de la chaîne agro-alimentaire et tout ce qui concerne donc
la séparation des filières et industrie est forcement lié
à la traçabilité des matières premières. On
pourrait retrouver ici un système de suivi par code barre.
Autrement dit, la création d'une filière
d'agriculture labellisée «sans OGM», sur le modèle de
la filière« agriculture biologique» se développera
certainement. Mais elle ne sera pas facile à mettre en place d'autant
plus que cette traçabilité rencontrera une complexité
croissante au fur et à mesure que l'on avance dans la chaîne
agro-alimentaire. Il ne suffit alors pas d'intéresser les agriculteurs
mais aussi les courtiers, les transporteurs et les transformateurs qui devront
tous assurer l'origine, l'historique, la nature du produit et ainsi garantir sa
non contamination.
C'est finalement l'installation d'une gigantesque
filière «parallèle» qui serait nécessaire et
impliquerait donc un contrôle et un suivi des matières
premières de leur semence à leur transformation finale. Pour cela
il faudrait :
· Des semences certifiées «sans OGM» ,
· Des champs séparés pour assurer la non
pollinisation,
· Des moyens de récoltes, de transport et de
stockage spécifiques
· Des industries ayant des lignes
protégées et dédiées,
Tout cela avec une communication rigoureuse et un esprit de
confiant.
Une solution serait peut être une production assez
localisée c'est à dire que les récoltes de matières
premières et transformations devraient rester en territoire proche pour
être bien suivi.
Cette séparation des filières apporteraient bien
sûr une forte augmentation des produits «sans OGM» en
comparaison un peu avec «les produits bio »
B- La mise en place d'un centre d'échanges
pour la prévention des risques biotechnologiques
Il s'agit de l'une des pierres angulaires du régime
international de prévention des risques biotechnologiques. Ce centre est
destiné à faciliter l'échange d'informations et la
transparence indispensables à un système mondial dynamique et
efficace de prévention des risques biotechnologiques. Le centre
d'échange pour la prévention des risques biotechnologiques, qui
permet aux gouvernements de s'informer mutuellement de leur décision
finale concernant l'importation ou la libération d'OGM, détient
des informations sur les lois, les réglementations et les lignes
directrices nationales visant l'application du protocole.
Le centre d'échange pour la prévention des
risques biotechnologiques détient en outre des informations soumises en
vertu de la procédure d'APC, des résumés des
évaluations des risques, ainsi que les études et des
traités bilatéraux et multilatéraux sur l'environnement,
des rapports sur les mesures d'application du protocole, et d'autres
données scientifiques, juridiques, environnementales et techniques. Un
format commun est utilisé pour assurer la comparabilité des
informations provenant des différents pays.
En effet, la communication du risque est l'échange
interactif d'informations et d'idées entre les évaluateurs, les
gestionnaires du risque, les consommateurs, l'industrie, la communauté
universitaire et d'autres parties intéressées par l'entremise du
processus d'analyse du risque. L'échange d'informations concerne les
facteurs liés au risque, ainsi que les façons dont celui-ci est
perçu, et inclut la présentation des conclusions de
l'évaluation du risque et l'explication des raisons sur lesquelles sont
fondées les décisions en matière de gestion du risque. La
communication établie avec le public au sujet du risque doit absolument
venir de sources crédibles et inspirant confiance.
Le centre d'échange pour la prévention des
risques biotechnologiques est largement accessible sur l'Internet, à
http://bch.biodiv.org
Le protocole prévoit la création sur l'Internet
d'un centre d'échange pour la prévention des risques
biotechnologiques en vue d'aider les pays à se communiquer des
informations scientifiques, techniques, environnementales et juridiques au
sujet des organismes vivants modifiés.
Chaque pays communique au Centre d'échange les lois
nationales en vigueur, un résumé des évaluations des
risques, ses décisions finales concernant l'importation ou la
libération d'OVM (article 20). Conformément à l'accord,
toute partie qui prend une décision définitive concernant
l'utilisation d'un organisme vivant modifié sur son territoire doit,
dans les 15 jours qui suivent, en informer le Centre d'échange pour la
prévention des risques biotechnologiques. Il est envisagé la
création des centres régionaux.
Des informations sont déjà accessibles en la
matière sur les lois en vigueur sur le site
http://bch.biodiv.org/Pilot/Home.asp ?lg=french
Il exige que les organismes vivants modifiés, maïs
ou soja, par exemple, qui sont destinés à être
utilisés directement pour l'alimentation humaine et animale, ou
destinés à être transformés, doivent être
accompagnés de documents d'expédition indiquant clairement que
ces produits « peuvent contenir » des organismes
génétiquement modifiés et qu'ils « ne sont pas
destinés à être introduits intentionnellement dans
l'environnement ». À cet égard, le protocole
précise le cadre dans lequel il convient d'examiner comment il y aura
lieu de spécifier l'identification des organismes vivants
modifiés, documents à l'appui.
En outre, il indique les informations à inclure dans
les documents d'expédition accompagnant les organismes vivants
modifiés destinés à être utilisés en milieu
confiné, notamment pour ce qui touche aux règles à
observer en matière de manipulation et aux coordonnées des
personnes ou organismes à contacter pour tout renseignement
complémentaire, coordonnées du destinataire y compris.
Allant dans le même sens que le protocole de Cartagena,
il a été proposé dans un rapport de la FAO pour son
comité de l'agriculture de créer un ``système
d'échange d'informations sur la biosécurité'' qui
s'appuierait sur les informations officielles provenant des pays, des
programmes de la FAO sur la biosécurité, ainsi que d'autres
organisations et accords internationaux
pertinents80.
Paragraphe 2 : La prise en compte des risques
liés aux produits GM
Afin d'assurer sa propre efficacité
à long terme, le protocole comporte également un certain nombre
de dispositions « habilitantes », y compris le renforcement
des capacités et un mécanisme financier (A), la
sensibilisation et la participation du public(B)
80. source
www.fao.org/fr/magazine/0103sp1.htm
A- Renforcement des capacités et
finance.
Les importateurs d'OGM doivent avoir la capacité de
mettre en oeuvre le protocole. Il leur faut des compétences, du
matériel, des cadres réglementaires et des procédures pour
pouvoir évaluer les risques, prendre des décisions
éclairées, et gérer ou éviter tout effet
défavorable potentiel des OGM sur les organismes naturels
apparentés. Les gouvernements qui ne possèdent pas encore de
cadre réglementaire nationale de prévention des risques
technologiques doivent en instaurer un le plus rapidement possible.
Le protocole encourage vivement la coopération
internationale à la création, dans les pays en
développement et les pays en économie en transition, des
capacités humaines et institutionnelles nécessaires à la
prévention des risques biotechnologiques. Cette coopération
recouvre notamment la formation scientifique et technique, le transfert de
technologie et de savoir-faire, et la mise à disposition de ressources
financières.
Les analyses de détection des OVM font appel à
des méthodes de haute technologie, ceci nécessite la formation de
techniciens compétents capables d'assurer le contrôle de tous les
produits alimentaires.
Selon les dispositions du protocole de Cartagena, les
activités de prévention des risques biotechnologiques sont
susceptibles d'être subventionnées par le Fonds pour
l'environnement mondial (un Fonds international établi pour aider les
pays en développement à protéger l'environnement
mondial). Les gouvernement sont également supposés encourager la
participation du secteur privé à la création du
capacités.
Afin d'aider les pays en développement et les pays en
transition économique, le rapport de la FAO précité
propose la réunion d'une consultation sur la biosécurité
alimentaire et agricole en vue de susciter une prise de conscience mondiale des
nouvelles notions et perspectives dans le domaine de la
biosécurité, ainsi que l'élaboration de guides et
directives pour l'application des principes de l'analyse des risques à
la sécurité sanitaire des aliments, l'organisations des
réunions régionales et de sensibilisation et la fourniture de
conseils en matière de politique législative et
réglementaire. Le rapport recommande une approche globale vis à
vis de la biosécurité, et demande que soit apportée une
assistance technique aux pays en développement afin de leur permettre de
créer, de rationaliser et d'optimiser les capacités de leur pays
dans ce domaine.
B- Sensibilisation et participation du
public
L'une des conditions de mise en oeuvre du principe de
précaution est la lisibilité. Pour remplir cette condition, tous
les acteurs devront être informés. L'information du public est la
substance même de cette approche. L'autorité compétente
devra être tenue de porter à la connaissance du public les
informations sur l'introduction, la manipulation et l'utilisation des OGM sur
le territoire national. L'utilisation des OGM aura probablement des incidences
sur l'économie nationale, sur la santé et l'environnement. Le bon
sens voudrait donc que tout le monde contribue à la prise de
décision en connaissance de cause. Celle-ci doit porter à la fois
sur les cultures, l'utilisation dans l'alimentation, les effets et les risques
pour la santé, l'agriculture, l'environnement etc.....81
81. Cf. Rapport provisoire, projet cadre
national de biosécurité (No GF/2716-02-4387) page 43
La participation du public dans la gestion des OGM implique pour
l'autorité nationale compétente, l'obligation d'informer le
public sur toutes les données qui lui sont communiquées dans le
cadre de la notification.
Il est évident que la décision finale concernant
l'utilisation des OGM doit incomber aux citoyens de chaque pays. Le protocole
appelle donc les Parties à coopérer pour encourager la
sensibilisation du public au transfert, à la manipulation et à
l'utilisation sans danger des OGM. Il souligne l'importance de
l'éducation qui devra de plus en plus s'intéresser aux OGM
à mesure que la biotechnologie pénétrera dans notre
quotidien.
De plus, le protocole invite les Parties à consulter
activement le public sur les OGM et la prévention des risques
biotechnologiques. Les citoyens, les communautés et les organisations
non gouvernementales devraient continuer à s'intéresser de
très près à cette question complexe. Cela permettra
à chacun de réagir aux décisions finales prises par les
gouvernements, favorisant ainsi la transparence et la prise de décision
en toute connaissance de cause.
C'est le domaine de l'article 23 du protocole qui vise
à encourager l'éducation et la participation du public, la
consultation du public concernant des décisions relatives aux OVM.
En effet, selon les dispositions de cet article, les Parties
« encouragent et facilitent la sensibilisation, l'éducation et
la participation du public concernant le transfert, la manipulation et
l'utilisation sans danger d'OVM en vue de la conservation et de l'utilisation
durable de la diversité biologique... »
Nombre de citoyens manifestent le souhait d'être
davantage et mieux associés aux décisions publiques. Ce voeu
s'exprime de façon particulièrement vigoureuse à propos
des situations qui sont perçues comme présentant des risques.
Tout cela est compréhensible : on consent difficilement à
encourir des risques dont on n'a pas été au préalable
averti, que l'on n'a pas acceptés ou qui n'ont pas été
débattus de façon démocratique. La demande d'information
tend ainsi à se transformer en droit à l'information.
C'est dans cette perspective que le ministère de
l'environnement et des ressources forestières a organisé le
mercredi 10 décembre 2003 à l'université de Lomé,
une table ronde à l'intention de la communauté universitaire en
vue de la sensibiliser sur le projet dénommé « mise en
place du cadre national de biosécurité ».
Aussi, la caravanne des peuples conduit, en novembre 2000, des
dizaines de paysans en Inde, au Bangladesh, aux Philippines pour sensibiliser
les populations rurales aux risques des OGM82.
82. Cf. Philipe KOURILSKY, opcit page 17 et
43
Nous encourageons la participation de la collectivité
au débat entourant le génie génétique et son
incidence sur l'environnement, la santé et la société. En
effet, le débat dépasse largement les OGM, ce sont toutes les
nouvelles biotechnologies qui sont remises en question. Néanmoins, nous
demandons l'étiquetage obligatoire des aliments
génétiquement modifiés. Nous réclamons
également un accroissement des fonds publiques destinés aux
études d'impact sur les OGM et la création d'une taxe ou d'un
impôt pour les entreprises oeuvrant dans le génie
génétique afin de financer ces études. Nous demandons le
financement publique de débats sur l'orientation sociale, éthique
et économique de la science et de son contenu.
CONCLUSION GENERALE
Le protocole de Cartagena ne peut véritablement
garantir l'utilisation sans danger de la biotechnologie à travers le
monde que si chaque pays encourage activement la prévention des risques
biotechnologiques au niveau national.
Les décideurs et les législateurs nationaux ont
un rôle essentiel à jouer à cet égard, en
renforçant ou en établissant des lois et des normes pour
réduire les risques potentiels que présentent les OGM. En vertu
du protocole, c'est aux gouvernements qu'il incombe, en dernier ressort, de
prévenir les mouvements transfrontières illicites et la
libération accidentelle d'OGM, de gérer les risques et les
urgences, et de réglementer les industries biotechnologiques
nationales.
Mais les gouvernements ne peuvent, à eux seuls, assurer
la prévention des risques biotechnologiques : ils doivent pouvoir
compter sur la participation et la coopération active des autres
acteurs, notamment de l'industrie biotechnologique. Les entreprises
biotechnologiques possèdent les connaissances, les ressources et les
incitations nécessaires pour garantir l'innocuité de leur
industrie et de ses produits. Quant à la société civile,
aux citoyens et aux organisations non gouvernementales, ils doivent comprendre
les problèmes et pouvoir exprimer clairement leur point de vue aux
décideurs et à l'industrie. Les médias ont eux aussi, un
rôle clé à jouer, celui de « chien de
garde ».
La biotechnologie est une science révolutionnaire, et
est devenue une industrie si puissante qu'elle peut transformer le monde qui
nous entoure. Elle est déjà en train de changer l'agriculture et
une grande partie de nos aliments. Toute erreur risque d'entraîner des
changements catastrophiques, voire permanents dans le milieu naturel. Pour
toutes ces raisons, les générations futures, en pensant à
notre époque, vont soit nous remercier, soit nous maudire pour ce que
nous auront fait - ou pas fait- afin de prévenir les risques
biotechnologiques.
Agir correctement n'est pas simple. Nos efforts actuels sont
compliqués par le nombre considérable d'acteurs, y compris les
Etats. Les valeurs et les attentes des personnes engagées dans la
prévention des risques biotechnologiques sont souvent très
différentes. Seul un débat permanent et transparent, respectueux
et intense peut garantir un résultat final reflétant tous les
points de vue.
Etant donné la complexité des problèmes
et l'ampleur des enjeux, il est rassurant que la communauté mondiale ait
déjà accepté une sécurité
réglementaire dans le développement de la biotechnologie moderne.
La science continue à progresser à grands pas et pour que le
régime de prévention des risques biotechnologiques ne se laisse
pas distancer, il a été décidé que les
gouvernements procéderaient, tous les cinq ans, à une
évaluation formelle de l'efficacité du protocole et de ses
procédures, en vue d'une révision ou d'une amélioration
éventuelles.
Il ne fait aucun doute que la prévention des risques
biotechnologiques restera longtemps encore une question prioritaire du
programme d'action international pour l'environnement.
En effet, le protocole de Cartagena constitue le premier
instrument multilatéral contraignant traitant des organismes vivants
modifiés et de sécurité environnementale. Il est pour
l'instant le seul socle juridique sur lequel l'on doit bâtir des normes
internationales fondées sur le principe de précaution dans ce
domaine. Il fournit la première définition juridique
internationale des OVM et permet aux Etats de se protéger en raison
même de l'incertitude scientifique entourant ces nouveaux organismes. Il
met également en place des mesures de traçabilité, de
sécurité et de gestion commune des risques.
Le protocole de Cartagena est destiné à
créer un contexte favorable à l'utilisation sensée des
biotechnologies et respectueusement de l'environnement. Il vise à
assurer un degré adéquat de protection pour le transfert, la
manipulation et l'utilisation sans danger des OGM.
Face à la diffusion rapide des OGM et à la
multiplication de cas de contamination génétique (aide
alimentaire...), l'urgence de la ratification et de la mise en oeuvre de
l'accord s'impose.
En outre, ce protocole constitue un accord fondamental pour
les pays ne disposant pas de législations nationales sur la
biosécurité car il permet d'avoir accès à
l'information, à des normes techniques et à l'expertise
nécessaires pour effectuer une évaluation satisfaisante des
risques préalables à l'utilisation et l'importation d'OVM.
La ratification permettra à nos pays d'obtenir des
gardes fous pour une prise de décision concernant le mouvement des
Organismes Vivants Modifiés (OVM).
Sur 103 pays signataires dont 28 pays africains, le Togo est
le 78e à le ratifier et ceci lui permettra d'assister
à la première réunion des Parties qui se tiendra en
Février 2004 à Kuala Lampur en
Malaisie83.
Même si la compatibilité du protocole de
Cartagena avec les règles internationales de l'OMC n'est pas sans se
poser de problèmes, il semble évident que la ratification de ce
protocole par une très large majorité des Etats fera
évoluer significativement le caractère juridiquement contraignant
de l'approche de précaution.
C'est pourquoi, sous le bénéfice de ces
observations, nous proposons la ratification de ce protocole par tous les pays
signataires.
83. Source : Togo Presse Magazine no 6679 du 19
Décembre 2003 page 3
ANNEXE
BIBLIOGRAPHIE
I- Ouvrages
1. Albert SASSON, Quelles biotechnologies pour les pays en
développement ? Biofutur/UNESCO édition, imprimerie Marcel
Bon-70.000 Vessoul, juin 1986, 200 pages
2. Corinne LEPAGE, François GUERY, La politique de
précaution, PUF, 2001, 378 pages
3. Denis DUCLOS, Les industries et les risques pour
l'environnement, collection « Environnement », l'Harmattan,
1991, 239 pages
4. François EWALD, Christian GOLLIER , Nicolas DE
SADELER, Le principe de précaution Que sais-je ? PUF, nov. 2001,
127 pages
5. Philipe KOURILSKY, Du bon usage du principe de
précaution, éditions Odile Jacob, déc. 2001, 174 pages
6. Les industries agro alimentaires et la protection de
l'environnement sous la direction de Soukéina BOURAOUI et Michel PRIEUR,
Actualités Scientifiques, éd. AUPELF-UREF, 2001, 410 pages
7. L'agriculture biologique, une agriculture durable ?
Sous la direction de Michel PRIEUR, droit comparé de l'environnement,
1996, 362 pages.
II- Revues et autres publications
1. Droit et environnement, bulletin du réseau
« droit de l'environnement » Agence Universitaire de la
Francophonie, AUPELF-UREF no 8
2. ABC des Nations Unies, New York, 2001, 391 pages
III- Mémoires
1. Cyrille Séverin BISSIENGOU, Le principe de
précaution en droit de l'environnement, mémoire de DEA,
Université du Bénin (UB), 2000, 75 pages.
2. Noël AKOMA-POATHY, La protection de l'hygiène
alimentaire au Togo, mémoire de DEA, 2000, UB, 77 pages
IV- Les textes juridiques
1. La Convention de Stockholm
2. La convention sur la diversité biologique
V- Quotidiens
1. Jeune Afrique l'Intelligent
2. Togo Presse
VI- Documentation électronique
1.
www.creaweb.fr/bv/ogm/risques2.htm
2.
www.biodiv.org
3.
www.biosafety.org
4.
www.biodiv.org/doc/press/presskits/bs/cpbs-unep-cbd-fr.pdf
5.
www.fao.org/ag/fr/magazine/0103sp1.htm
6.
www.codexalimentarus.net/index-fr.stm
7. www.monde-solidaire.org/article.php3 ?id_article=575
8.
www.greenpeace.org
9. www.oie.int/fr/secu_sanitaire/fr_introduction.htm
10. ww2.creaweb.fr/bv/ogm/enjeux3.html
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