III / DECLARATION SUR LES CRITERES POUR DES ELECTIONS
LIBRES ET REGULIERES Adoptée à l'unanimité par le
Conseil interparlementaire lors de sa 154ème session (Paris, 26 mars
1994)
Le Conseil interparlementaire,
réaffirmant l'importance de la
Déclaration universelle des droits de l'homme et du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, dans lesquels il est établi que
l'autorité des pouvoirs publics doit reposer sur la volonté du
peuple et que cette volonté doit s'exprimer par des élections
honnêtes qui doivent avoir lieu périodiquement,
approuvant et faisant siens les principes
fondamentaux qui régissent les élections périodiques
libres et régulières, reconnus par les Etats dans les instruments
universels et régionaux relatifs aux droits de l'homme, en particulier
le droit de toute personne à prendre part à la direction des
affaires publiques de son pays, soit directement, soit indirectement par
l'intermédiaire de représentants librement choisis, de voter et
d'être élue à la faveur de telles élections tenues
au scrutin secret, de présenter, dans des conditions
d'égalité, sa candidature aux élections et d'exprimer ses
vues politiques, seule ou avec d'autres,
conscient du fait que chaque Etat a le droit
souverain de choisir et de déterminer librement, conformément
à la volonté de sa population, ses propres systèmes
politique, social, économique et culturel, sans l'ingérence
d'autres Etats dans le strict respect de la Charte des Nations Unies.
soucieux de promouvoir l'instauration de
régimes démocratiques, pluralistes et représentatifs dans
le monde entier,
reconnaissant que la mise en place et le
renforcement des processus et des institutions démocratiques
relève de la responsabilité commune du gouvernement, du corps
électoral et des forces politiques organisées, que des
élections honnêtes et périodiques constituent une
composante nécessaire et indispensable des efforts sans cesse
déployés pour protéger les droits et les
intérêts de ceux qui sont gouvernés et que,
concrètement, le droit de tous à prendre part à la
direction des affaires publiques de leur pays constitue un facteur
déterminant pour que tous bénéficient effectivement des
droits de l'homme et libertés fondamentales,
se félicitant du rôle croissant que
remplissent les Nations Unies, l'Union interparlementaire, les organisations et
les assemblées parlementaires régionales, ainsi que des
organisations internationales et non gouvernementales, nationales et
internationales, pour apporter une assistance électorale à la
demande des gouvernements,
adopte en conséquence la
Déclaration suivante sur les élections libres et
régulières et invite instamment les
gouvernements et les parlements du monde entier à s'inspirer des
principes et des normes qu'elle énonce :
1. Elections libres et régulières
Dans tout Etat, l'autorité des pouvoirs publics ne peut
être fondée que sur la volonté du peuple exprimée
à la faveur d'élections sincères, libres et
régulières, tenues périodiquement au suffrage universel,
égal et secret.
2. Droits relatifs au vote et à
l'élection
1) Tout citoyen majeur a le droit de voter aux élections,
sur une base non discriminatoire.
2) Tout citoyen majeur a le droit d'accès à une
procédure d'inscription des électeurs qui soit efficace,
impartiale et non discriminatoire.
3) Aucun citoyen remplissant les conditions requises ne se verra
refuser le droit de voter ou de s'inscrire en qualité d'électeur,
si ce n'est en vertu de critères fixés par la loi, qui doivent
être objectivement vérifiables et conformes aux obligations
contractées par l'Etat au regard du droit international.
4) Tout individu privé du droit de voter ou de s'inscrire
en qualité d'électeur a le droit de faire appel d'une telle
décision devant une juridiction compétente pour examiner celle-ci
et corriger les erreurs promptement et efficacement.
5) Tout électeur a le droit à un accès
véritable, dans des conditions d'égalité, à un
bureau de vote où exercer son droit.
6) Tout électeur a le droit d'exercer son droit dans des
conditions d'égalité avec autrui et à voir son vote
bénéficier du même poids que celui d'autrui.
7) Le droit de voter dans le secret est absolu et ne peut en
aucune façon être restreint.
3. Droits et responsabilités relatifs à la
candidature, au parti et à la campagne
1) Tout individu a le droit de prendre part à la direction
des affaires publiques de son pays et de présenter, dans des conditions
d'égalité, sa candidature à des élections. Les
critères régissant la participation aux affaires publiques sont
déterminés conformément à la Constitution et
à la législation nationale et ne doivent pas être
contraires aux obligations internationales de l'Etat.
2) Tout individu a le droit d'adhérer à, ou avec
d'autres, de créer un parti ou une organisation politique en vue
d'être candidat à une élection.
3) Tout individu a le droit, seul ou avec d'autres :
· d'exprimer librement des opinions politiques;
· de rechercher, de recevoir et de transmettre des
informations ainsi que de faire un choix éclairé;
· de circuler librement dans le pays pour mener une campagne
électorale;
· de faire campagne dans les mêmes conditions que les
autres partis politiques, y compris celui du gouvernement en place.
4) Tout candidat à une élection et tout parti
politique doit avoir la possibilité d'accéder dans des conditions
d'égalité aux médias, en particulier aux médias de
communication de masse, pour faire connaître leurs vues politiques.
5) Le droit des candidats à la sécurité en
ce qui concerne leur vie et leurs biens doit être reconnu et
protégé.
6) Tout individu et tout parti politique a le droit à la
protection de la loi et à une voie de recours en cas de violation des
droits politiques et électoraux.
7) Les droits énoncés ci-dessus ne peuvent faire
l'objet que de restrictions de caractère exceptionnel qui sont conformes
à la loi et raisonnablement nécessaires dans une
société démocratique pour garantir la
sécurité nationale ou l'ordre public, la protection de la
santé et de la moralité publiques ou la protection des droits et
libertés d'autrui, à condition qu'elles ne soient pas contraires
aux obligations contractées par l'Etat en vertu du droit international.
Les restrictions dont peuvent faire l'objet les droits relatifs à la
candidature, à la création et à l'activité des
partis politiques et à la campagne ne doivent pas violer le principe de
la non-discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la
langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions,
l'origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre
situation.
8) Tout individu ou parti politique dont les droits relatifs
à la candidature, au parti ou à la campagne sont niés ou
restreints a le droit de faire appel devant une juridiction compétente
pour réviser la décision et corriger les erreurs promptement et
efficacement.
9) Les droits relatifs à la candidature, au parti et
à la campagne entraînent des responsabilités à
l'égard de la collectivité. En particulier, aucun individu ou
parti politique ne peut se livrer à des actes de violence.
10) Tout candidat et tout parti politique participant à
une élection doit respecter les droits et libertés d'autrui.
11) Tout candidat et tout parti politique participant à
une élection doit accepter les résultats d'élections
libres et régulières.
4. Droits et responsabilités de
l'Etat
1) L'Etat doit adopter, conformément à sa
procédure constitutionnelle, les dispositions législatives et
autres mesures nécessaires pour garantir les droits et le cadre
institutionnel permettant la tenue, à intervalles réguliers,
d'élections honnêtes, libres et régulières, en
conformité avec les obligations contractées en vertu du droit
international. L'Etat doit en particulier :
· établir une procédure d'inscription des
électeurs qui soit impartiale et non discriminatoire;
· définir clairement les conditions requises pour
être électeur, par exemple celles qui ont trait à
l'âge, à la citoyenneté et à la résidence, et
veiller à ce que ces dispositions soient appliquées sans
distinction d'aucune sorte;
· prendre des dispositions pour la création et libre
activité des partis politiques, réglementer le cas
échéant le financement des partis politiques et des campagnes
électorales, garantir la séparation de l'Etat et des partis et
établir des conditions équitables de concurrence pour les
élections législatives;
· mettre sur pied des programmes nationaux d'instruction
civique ou en favoriser la réalisation, pour assurer que la population
soit au courant des procédures électorales et des enjeux des
élections.
2) En outre, l'Etat doit adopter les dispositions politiques et
institutionnelles nécessaires pour garantir la réalisation
progressive et la consolidation des objectifs démocratiques, y compris
par l'institution d'un mécanisme neutre, impartial ou
équilibré d'administration des élections. Ce faisant, il
doit notamment :
· veiller à ce que les responsables des divers
aspects du déroulement des élections bénéficient
d'une formation et agissent de façon impartiale, et à ce que des
procédures de vote cohérentes soient établies et
portées à la connaissance de l'électorat;
· veiller à la mise en oeuvre des procédures
d'inscription des électeurs, de mise à jour des listes
électorales et de vote, au besoin avec l'aide d'observateurs nationaux
et internationaux;
· inciter les partis, les candidats et les médias
à adopter un code de conduite régissant la campagne
électorale et le scrutin proprement dit;
· assurer la régularité du scrutin par des
mesures permettant d'éviter les votes multiples ou la participation au
vote de ceux qui n'en ont pas le droit;
· assurer la régularité du décompte des
voix.
3) L'Etat doit respecter et garantir le respect des droits de
l'homme de tous les individus présents sur son territoire et relevant de
sa juridiction. En période électorale, l'Etat et ses organes doit
donc garantir :
· la liberté de mouvement, de réunion,
d'association et d'expression, en particulier dans le contexte des
rassemblements et des réunions politiques;
· que les partis et les candidats puissent faire librement
connaître leurs vues à l'électorat et qu'ils jouissent de
l'égalité d'accès aux médias officiels et du
service public;
· que les mesures nécessaires soient prises pour
assurer une couverture non partisane de la campagne dans les médias
officiels et du service public.
4) Pour que les élections soient libres et
régulières, l'Etat doit prendre les mesures nécessaires
afin de garantir que les partis et les candidats bénéficient de
possibilités raisonnables de présenter leur plate-forme
électorale.
5) L'Etat doit prendre les mesures nécessaires et
appropriées pour garantir que le principe du secret du scrutin soit
respecté et que les électeurs puissent voter librement, sans
crainte ou intimidation.
6) En outre, les autorités de l'Etat doivent veiller
à ce que le scrutin soit organisé de manière à
éviter la fraude ou toute autre forme d'irrégularité,
à ce que la sécurité et l'intégrité du
processus soient maintenus et à ce que le décompte soit
effectué par un personnel qualifié, sous surveillance et/ou fasse
l'objet d'une vérification impartiale.
7) L'Etat doit prendre toutes les mesures nécessaires et
appropriées pour garantir la transparence du processus électoral
dans son ensemble, y compris, par exemple, grâce à la
présence de représentants des partis et d'observateurs
dûment accrédités.
8) L'Etat doit prendre les mesures nécessaires pour
garantir que les partis, les candidats et les sympathisants
bénéficient de conditions de sécurité égales
et pour que les pouvoirs publics adoptent des dispositions de nature à
prévenir la violence électorale.
9) L'Etat doit veiller à ce que les violations des droits
de l'homme et les contestations relatives au processus électoral soient
traitées efficacement et promptement durant la période
électorale, par une autorité indépendante et impartiale
tels que les tribunaux ou une commission électorale.
IV/ STATUT-TYPE DE L'OPPOSITION AU
PARLEMENT Adoptée à l'unanimité par
les participants au Séminaire parlementaire sur les relations entre
partis majoritaires et minoritaires dans les parlements africains
Libreville (Gabon), 17 - 19 mai 1999
Les représentants des Parlements africains
réunis à Libreville du 17 au 19 mai 1999 dans le cadre du
Séminaire parlementaire sur les relations entre partis majoritaires et
minoritaires dans les parlements africains organisé par l'Union
interparlementaire en coopération avec le Programme des Nations Unies
pour le développement et à l'invitation du Parlement gabonais,
ont élaboré ce projet de statut-type de l'opposition au
parlement.
Ils expriment le souhait que ce statut-type, inspiré
par les principes généraux de la démocratie et des droits
de l'homme et par la pratique et l'expérience nationales des pays
représentés, puisse être complété à la
faveur de séminaires du même type dans d'autres régions du
monde en vue de la mise au point par l'Union interparlementaire d'un texte de
référence internationale sur le statut de l'opposition tant
à l'intérieur qu'à l'extérieur du parlement. Dans
cette perspective, ils demandent que ce document soit porté à
l'attention du Conseil de l'Union interparlementaire à l'occasion des
Réunions interparlementaires de Berlin, du 10 au 16 octobre 1999.
Dans l'attente de l'adoption par l'Union interparlementaire
d'un document plus complet sur le statut de l'opposition au parlement, les
participants au séminaire expriment l'espoir que les Etats, et plus
spécialement les Etats africains, s'inspireront, chacun selon ses
réalités locales, du statut ci-après pour
l'élaboration de règles régissant le fonctionnement de
leurs assemblées parlementaires.
I. INTRODUCTION
1. La démocratie est un droit fondamental du citoyen, qui
doit être exercé dans des conditions de liberté,
d'égalité, de transparence et de responsabilité, dans le
respect de la pluralité des opinions et dans l'intérêt
commun. Elle est fondée sur le droit de chacun de participer à la
gestion des affaires publiques
*.
2. La démocratie est un processus qui implique la
participation de tous les citoyens : des hommes et des femmes qui
représentent toutes les forces politiques et sociales du pays. Dans
l'arène politique, il faut par conséquent que l'opposition,
à savoir les partis ou formations politiques et individus qui ne font
pas partie de la majorité au pouvoir, soient en mesure de participer de
façon significative au processus démocratique.
3. L'Union interparlementaire devrait envisager d'élaborer
un texte de portée plus vaste sur les droits et devoirs de cette
opposition. Cette initiative doit être fondée sur les principes
consacrés par la Déclaration universelle des droits de
l'homme (Nations Unies, 1948), le Pacte international relatif aux
droits civils et politiques (Nations Unies, 1966), la
Déclaration sur les critères pour des élections libres et
régulières (Union interparlementaire, 1994) et la
Déclaration universelle sur la démocratie (Union
interparlementaire, 1997).Ce dernier instrument énonce notamment
que :
· "La démocratie vise essentiellement à
préserver et promouvoir la dignité et les droits fondamentaux de
l'individu, à assurer la justice sociale, à favoriser le
développement économique et social de la collectivité,
à renforcer la cohésion de la société ainsi que la
tranquillité nationale et à créer un climat propice
à la paix internationale. En tant que forme de gouvernement, la
démocratie est le meilleur moyen d'atteindre ces objectifs; elle est
aussi le seul système apte à se corriger lui-même"
(article 3).
· "Il ne saurait y avoir de démocratie sans un
véritable partenariat entre hommes et femmes dans la conduite des
affaires publiques, où hommes et femmes agissent dans
l'égalité et la complémentarité s'enrichissant
mutuellement de leurs différences". (article 4).
· " L'état de démocratie garantit que
les processus d'accession au pouvoir et d'exercice et d'alternance du pouvoir
permettent une libre concurrence politique et émanent d'une
participation populaire ouverte, libre et non discriminatoire, exercée
en accord avec la règle de droit, tant dans son esprit que dans sa
lettre " (article 5). " L'élément clé
de l'exercice de la démocratie est la tenue à intervalles
périodiques d'élections libres et régulières
permettant l'expression de la volonté populaire (...) "
(article 12)
· " Fondée sur le droit de chacun de
participer à la gestion des affaires publiques, la démocratie
implique l'existence d'institutions représentatives à tous les
niveaux et notamment d'un Parlement, représentatif de toutes les
composantes de la société et doté des pouvoirs ainsi que
des moyens requis pour exprimer la volonté du peuple en
légiférant et en contrôlant l'action du
gouvernement. " (article 11)
· "La vie publique, dans son ensemble, doit être
marquée du sceau de la morale et de la transparence, raison pour
laquelle il faut élaborer des normes et règles propres à
les assurer" (article 15)
· " La participation individuelle aux processus
démocratiques et à la vie publique à tous les niveaux doit
être réglementée de manière équitable et
impartiale et doit prévenir toute discrimination ainsi que le risque
d'intimidation de la part des acteurs étatiques et non
étatiques. " (article 16)
· "Pour que l'état de démocratie soit
durable, il faut un climat et une culture démocratiques constamment
nourris et enrichis par l'éducation et d'autres moyens culturels et
d'information. Une société démocratique doit dès
lors s'attacher à promouvoir l'éducation, au sens le plus large
du terme incluant, en particulier, l'éducation civique à une
citoyenneté responsable". (article 19).
· " L'état de démocratie suppose et
la liberté d'opinion et la liberté d'expression, ce qui implique
le droit de n'être pas inquiété pour ses opinions et celui
de chercher, recevoir et répandre les informations et les idées
sans considérations de frontières, par quelque moyen d'expression
que ce soit. " (article 21)
II. DE L'OPPOSITION AU PARLEMENT
4. Le Parlement est par excellence l'institution qui incarne la
société dans la diversité de ses composantes et de ses
opinions et qui relaie et canalise cette diversité dans le processus
politique. Il a pour vocation d'arbitrer les tensions et de maintenir
l'équilibre entre ces aspirations concurrentes que sont la
diversité et l'uniformité, l'individuel et le collectif, dans le
but de renforcer la cohésion et la solidarité sociales. Son
rôle est de légiférer, y compris par l'affectation des
ressources financières, et de contrôler l'action gouvernementale.
5. Dans les sociétés tant homogènes
qu'hétérogènes, le parlement doit favoriser la
participation populaire pour sauvegarder la diversité, le pluralisme et
le droit à la différence dans un climat de tolérance,
d'où l'importance de la présence en son sein de forces politiques
et d'individus représentant l'opposition. Cela exige et la
reconnaissance et le respect des droits de l'homme en général
ainsi que des droit et devoirs particuliers de cette opposition.
6. L'opposition au parlement est un rouage nécessaire et
indispensable à la démocratie. Pour que l'opposition soit en
mesure d'accomplir ses missions avec efficacité, le pouvoir ainsi que la
société dans son ensemble doivent souscrire aux fondements
essentiels de la démocratie parlementaire. L'opposition a pour fonction
principale de constituer une alternative crédible à la
majorité en place. Par ailleurs, en participant au contrôle et
à la critique de l'action du gouvernement, elle concourt à
assurer la transparence, l'intégrité et l'efficacité dans
la gestion des affaires publiques et à prévenir des abus de la
part des autorités publiques et des individus, assurant ainsi la
défense du bien public. En effet, elle peut jouer un rôle
particulièrement important dans la promotion et la défense des
droits de l'homme et des libertés fondamentales et contribue ainsi au
bon fonctionnement de la démocratie.
III. DES DROITS DE L'OPPOSITION AU PARLEMENT
7. Au même titre que les parlementaires qui font partie de
la majorité gouvernementale, les membres de l'opposition ont besoin que
leur soient reconnus des droits fondamentaux. Par exemple, ils doivent jouir du
droit à la vie et doivent, dans l'accomplissement de leurs missions
politiques, être à l'abri de toutes mesures portant atteinte
à leur intégrité et à leur sécurité
personnelle, ainsi qu'à leurs biens. Si les circonstances l'exigent, ils
doivent bénéficier de la part de l'Etat d'une protection
personnelle en égalité de conditions avec les
représentants de la majorité.
8. Dans le même ordre d'idées, le respect de la
liberté d'expression et d'information est essentiel pour les
parlementaires, notamment ceux de l'opposition, afin de leur permettre de
s'acquitter de leurs responsabilités parlementaires. Les
représentants de l'opposition doivent pouvoir dénoncer librement
au Parlement et devant l'opinion publique les abus qu'ils constatent ou qui
leur sont signalés par leurs mandants, et agir pour qu'il y soit
remédié. L'opposition doit également disposer d'un
accès équitable, dans les mêmes conditions que la
majorité, aux moyens de communication de l'Etat afin de diffuser ses
points de vue, de critiquer l'action gouvernementale et de proposer des
solutions alternatives à celles du gouvernement.
9. Ces droits et d'autres droits fondamentaux étant
consacrés par la législation, les parlementaires, notamment ceux
de l'opposition, doivent bénéficier de prérogatives
supplémentaires pour être en mesure d'oeuvrer de concert avec la
majorité gouvernementale, ainsi que de contrôler l'action du
gouvernement et de la critiquer si besoin est. Ces prérogatives,
énumérées ci-après, doivent faire l'objet d'une
codification appropriée par le biais des normes constitutionnelles et/ou
procédures parlementaires.
III.1. Faculté pour l'opposition au parlement de
contribuer au processus démocratique dans les mêmes conditions que
la majorité
· Le parlement doit être consulté par le
gouvernement sur d'importantes questions engageant la vie de la nation :
menace de paix civile, risque d'invasion étrangère ou de guerre,
interventions militaires à l'étranger, etc. Cette consultation
permet à l'opposition de participer au débat qui s'ensuit et
d'apporter une contribution effective au processus de prise de
décisions. Elle doit aussi pouvoir engager un débat sur la
Constitution aux fins de sa réforme éventuelle.
· L'opposition a le doit de dénoncer des
dysfonctionnements éventuels de la Justice ou du Pouvoir
exécutif. Elle a le droit de s'informer sur les violations
présumées des droits de l'homme et de réclamer des mesures
pour y remédier.
III.2 L'organisation des travaux parlementaires
· L'organe directeur du Parlement (Bureau) doit être
formé en s'efforçant de reproduire la composition politique de
l'assemblée. S'il existe des vice-présidences de
l'assemblée, une proportion équitable d'entre elles doivent
revenir à des élus de l'opposition, qui, en alternance avec des
élus de la majorité, président les séances de
l'assemblée.
· Les groupes politiques (parlementaires) doivent être
à même de se constituer librement, à partir du nombre
minimum de membres prévu par la loi. Chaque groupe parlementaire, de la
majorité comme de l'opposition, doit disposer, aux mêmes
conditions, de crédits lui permettant de recruter des collaborateurs qui
lui soient propres et d'utiliser des locaux de réunion au Parlement.
· L'opposition a le droit d'être
représentée, proportionnellement à ses effectifs, au sein
de chaque commission et sous-commission parlementaire.
· L'opposition a droit à occuper un nombre de
présidences de commissions permanentes proportionnel à ses
effectifs. La présidence de la commission compétente en
matière de budget revient de droit à l'opposition.
· L'opposition doit être représentée
dans toute commission restreinte compétente pour exercer un
contrôle sur des activités de caractère secret, quelle
qu'en soit la nature.
III.3 Fonctionnement du Parlement
· Pour assurer une égalité de traitement des
membres de la majorité comme de l'opposition, le/la Président(e)
du parlement doit faire preuve d'impartialité dans l'exercice de ses
fonctions.
· Tous les parlementaires, de la majorité ou de
l'opposition, ont un droit égal à obtenir, en temps opportun, la
même information de la part du gouvernement, à l'exception des
informations relatives aux questions ayant trait à la vie interne des
partis politiques.
· Par ailleurs, tous les parlementaires, de la
majorité comme de l'opposition, doivent avoir accès, à
leur demande, aux informations dispensées par le service d'information
et d'études mis en place à cet effet.
· Tout parlementaire a le droit de déposer des
propositions de loi et des amendements.
· Tous les parlementaires ont un droit égal à
adresser des questions écrites et orales aux membres du gouvernement et
à recevoir une réponse à ces questions. L'opposition a
droit à un temps de parole correspondant à ses effectifs lors des
séances réservées aux questions orales.
· L'ordre du jour d'un nombre préalablement
défini de séances pendant la session parlementaire est, de droit,
choisi librement par l'assemblée elle-même. En son sein, la
décision appartient, de droit, à chaque groupe parlementaire,
à tour de rôle.
· Chaque groupe parlementaire doit disposer d'un droit
d'obtenir, selon une périodicité arrêtée
après concertation, la constitution d'une commission d'enquête sur
le sujet de son choix. Dans ce cas, l'opposition y est
représentée.
· L'opposition est habilitée à saisir, si elle
existe, la juridiction chargée d'apprécier la conformité
des lois à la Constitution.
III.4 Moyens matériels
· Lorsque le financement des partis politiques par l'Etat
est possible, l'opposition doit en bénéficier aux mêmes
conditions que la majorité, sans discrimination aucune.
· L'opposition doit avoir droit à l'égal
accès aux moyens matériels, techniques et autres facilités
mis à la disposition du parlement pour l'accomplissement de ses
missions.
III.5 Irresponsabilité et immunités
parlementaires
· L'irresponsabilité parlementaire doit être
définie et consacrée par la loi. En garantissant aux
parlementaires une protection absolue contre des poursuites pour les actes
accomplis dans le cadre de leur fonction parlementaire et pour tous propos
tenus prononcés et votes émis au Parlement, elle assure aux
parlementaires, de la majorité comme de l'opposition, la capacité
de remplir le mandat qui leur a été confié par leurs
électeurs sans avoir à craindre des mesures de rétorsion
pour leurs prises de position.
· Si le système parlementaire en vigueur les
prévoit, les immunités parlementaires doivent être
clairement établies par la loi. Ces immunités ne sont pas
destinées à soustraire les parlementaires aux sanctions
prévues par la loi, mais à préserver les parlementaires de
toutes poursuites ou accusations pouvant être politiquement
motivées. Les motifs et conditions de leur levée doivent
être clairement précisés par la loi de sorte que la
levée ne puisse avoir lieu que par suite d'une décision prise par
l'organe compétent et sur une base non partisane.
IV. DES DEVOIRS DE L'OPPOSITION
10. L'opposition au sein du parlement a le devoir d'offrir une
alternative crédible à la majorité en place pour rendre
cette dernière responsable. Pour offrir cette alternative, elle doit se
préparer elle-même à l'exercice durable des
responsabilités auxquelles elle aspire. En d'autres termes, elle doit
avoir un projet de société. En démocratie, la vie
politique s'enrichit de la libre concurrence entre de véritables projets
politiques. Elle s'appauvrit par les simples rivalités d'ambitions
personnelles qui la disqualifient aux yeux de l'opinion publique.
11. Par ailleurs, l'opposition au parlement doit se monter
responsable et doit être en mesure d'agir dans l'intérêt
supérieur de la nation. Elle doit pratiquer une opposition constructive
et responsable en faisant des contre-propositions. Dans son action,
l'opposition doit veiller à ne pas entraver inutilement l'action du
gouvernement et s'efforcer plutôt de l'amener à l'améliorer
dans l'intérêt général.
12. De par leur caractère, les devoirs de l'opposition
obéissent à des règles politiques et de comportements; ils
ne relèvent pas de définitions juridiques figurant dans des
textes constitutionnels ou parlementaires. Par conséquent, ils n'exigent
pas de codification mais exigent plutôt que les membres de l'opposition,
à l'instar de tous les parlementaires, exercent leurs
responsabilités dans le respect de la Constitution et des lois en
vigueur. L'opposition doit s'abstenir de prôner la violence comme moyen
d'expression politique et renoncer à tous agissements
anticonstitutionnels. Son action doit s'inscrire dans un esprit de
tolérance mutuelle et de recherche du dialogue et de la concertation.
* Déclaration universelle sur la
démocratie, Article 1er et 11, Union interparlementaire, 1997
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