INTRODUCTION GENERALE
Conçu et édifié pour limiter les
souffrances en période de conflit armé, le droit international
humanitaire revêt la forme d'une série d'obligations. C'est
l'ensemble des règles qui, en temps de conflit armé, visent d'une
part à protéger les personnes qui ne participent pas ou qui ne
participent plus au conflit et d'autre part, Il limite les méthodes et
moyens de faire la guerre1(*). Il permet certains actes militaires, pourvu qu'ils
n'infligent pas de maux superflus aux civils. Les parties aux conflits ne
respectant pas très souvent ces règles de droit international
humanitaire, les dégâts sont presque toujours aussi
énormes tant en vies humaines que sur le plan matériel. Dans ce
cas, l'intervention du personnel humanitaire ne peut être que louable
dans la mesure où celui-ci apporte aux populations civiles ainsi qu'aux
soldats une assistance. Ce personnel dans l'exercice de cette mission est
confronté à de nombreux problèmes qui peuvent aller des
menaces verbales à l'élimination physique. L'actualité
récente fait état d'un nombre assez important de personnels
humanitaires tués au cours des conflits armés internationaux et
non internationaux. Au vu de cette actualité et au regard de tous les
instruments juridiques traitant de la protection dont doit jouir le personnel
humanitaire, il paraît pertinent de mener une réflexion sur la
problématique de la protection juridique du personnel humanitaire en
situation de conflit armé non international . Notre étude
portera sur la protection juridique du personnel humanitaire de manière
générale. Il s'agira des organisations non gouvernementales
à vocation humanitaire, des organismes humanitaires internationaux, de
l'organisme humanitaire de l'union européenne encore appelé ECHO,
ainsi que du bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA)
qui réunit sous la direction de son coordonnateur les agences des
Nations Unies (l'UNICEF, le HCR, le PAM, FAO, OMS).
I- Contexte de l'étude
L'après guerre froide va connaître un
sérieux bouleversement au niveau mondial. Les conflits ne vont plus
opposer des Etats entre eux, mais se déroulent désormais au sein
d'un territoire. A partir des années 90, le continent africain va
connaître un grand bouleversement politique et économique.
Sur le plan politique, le vent de la démocratie va
traverser la plupart des Etats africains, occasionnant des revendications de
divers ordres à savoir : la liberté d'expression, le
multipartisme, la conférence nationale souveraine etc. Le processus
démocratique va être engagé sur le continent, mais
freiné par des gouvernants aux ambitions égoïstes
manifestées par la mise en oeuvre de diverses manoeuvres en vue de
confisquer le pouvoir. Les biens publics sont gérés par une
fraction de personnes au détriment des populations. L'Afrique va
être minée de guerres civiles (Angola, somalie, soudan, Tchad,
Congo, Namibie, RDC, Mozambique etc.) occasionnant des violations massives et
successives des droits de l'homme et du droit international humanitaire.
Le démarrage économique tarde à
être effectif, l'industrialisation demeure limitée,
l'économie reste rentière, le taux de chômage croissant
avec une dette publique galopante. En plus de cela, la volonté manifeste
de certaines puissances occidentales à contrôler les ressources
minières contribue à la déstabilisation des régimes
politiques.
Le contexte social n'est guère mieux, une misère
progressante, des maladies telles que le paludisme, le VIH-sida
déciment les populations, des écoles sans instituteurs et sans
infrastructures, des salaires modiques et souvent impayés (RCA). Les
revendications sont faites à plusieurs niveaux, les étudiants
revendiquent le paiement et l'amélioration de leurs bourses, de leurs
conditions de vie et d'études.
Les fonctionnaires réclament de meilleures conditions
de travail. La population civile est laissée pour compte. Las de ne
pouvoir se faire entendre, elle va opter pour la voix des soulèvements
armés ou rébellion , au mépris des règles relatives
au déroulement des conflits armés.
Par ailleurs, on assiste à une montée des
particularismes et des revendications identitaires. Ces comportements
s'appuient sur la peur de l'autre pour déboucher sur le rejet de
l'autre, sur l'exclusion et le tribalisme. Ce phénomène touche
à des degrés différents presque tous les pays africains et
débouche à des manifestations virulentes2(*).
Sur un plan juridique, ces conflits ne sont pas sans
conséquence dans la mesure où, ils font apparaître de
nouveaux acteurs jusqu'ici pas très connus. Il s'agit des civils qui
désormais ne subissent plus passivement les affres de la guerre mais y
prennent part. Dans ce contexte, il devient difficile de respecter la
réglementation relative à la gestion des conflits. On doit
dès lors s'interroger sur la mise en oeuvre des règles du droit
international humanitaire dans ces nouveaux types de conflits.
II- Délimitation de l'étude
Nous délimiterons notre étude au
continent africain, plus particulièrement à l'Afrique
subsaharienne. Cette partie du continent est depuis quelques années le
théâtre de nombreux conflits internes ayant occasionné de
violation graves du droit international humanitaire. Nous nous attarderons sur
les cas de conflit du Rwanda, de la République Démocratique du
Congo, du Libéria, la Sierra Léone, la République
Centrafricaine, la Cote d'Ivoire, le Darfour.
III- Définition des concepts
Il s'agit ici au regard des concepts suivant de voir en quels
termes faut-il finalement comprendre le sujet.
Le dictionnaire du droit international des conflits
armés3(*)
définit la protection comme un ensemble de
mesures destinées à protéger certaines personnes. Il
s'agit de mettre à l'abri d'un danger, d'un incident. Nous pouvons en
déduire que, protéger c'est garantir la sécurité
d'un individu vis a vis d'un autre individu, d'une chose. Ceci de part le mal
que peut lui causer ledit individu ou ladite chose. La protection juridique
concerne toutes les mesures concrètes qui permettent de faire
bénéficier les personnes en danger des droits et des secours
prévus pour elles par les conventions internationales
L'expression personnel humanitaire
désigne des personnes exclusivement affectées de
manière temporaire ou permanente à des taches humanitaires. Dans
la pratique, on les retrouve généralement exerçant sous
l'égide d'une organisation non gouvernementale (ONG), d'une organisation
internationale, ou alors comme fonctionnaires à l'Organisation des
Nations Unies4(*). L'action
humanitaire dans un contexte de conflit armé est mise en oeuvre par ce
personnel dont le statut juridique varie ainsi que la protection qui leur est
due
Les ONG5(*) sont des associations de volontaires ou de
bénévoles agissant généralement à but non
lucratif. Elles exercent dans une large variété de
domaines : protection de l'environnement, défense des droits de
l'homme, aide humanitaire. Leur but est la défense et la protection de
la société civile en général.
Les organisations internationales sont
créées par plusieurs états sur la base d'un traité
ou de conventions internationales ou transnationales. Elles ont pour but de
défendre ou alors d'organiser la mise en oeuvre de ce traité ou
de ces conventions. Selon Patricia BUIRETTE, Les
conflits armés internes sont : « des
affrontements armés qui se déroulent dans les limites du
territoire d'un seul Etat où les combats opposent le gouvernement et les
insurgés armés »6(*)
La protection juridique du personnel humanitaire repose en
droit international sur le principe fondamental selon lequel il faut toujours
établir une distinction entre les combattants et les non
combattants ; principe clairement établi par les conventions de
Genève de 1949.
Les premiers sont définis par le protocole additionnel
I comme étant « les membres des forces armées d'une
partie à un conflit »7(*) . Les non combattants quant à eux constituent
la catégorie dite des personnes protégées. Il s'agit des
populations civiles, ainsi que des militaires blessés qui ont
cessé de combattre.
IV- Intérêt de
l'étude
Nous avons porté notre choix sur le thème
« protection juridique du personnel humanitaire en situation de
conflit armé non international » pour plusieurs raisons.
En effet, divers instruments juridiques internationaux sont
prévus pour réglementer la pratique de la guerre. Cependant,
face à l'émergence de nouveaux types de conflit mettant aux
prises des acteurs aux ambitions et motivations diverses, on s'est
demandé si les règles du droit international humanitaire peuvent
encore humaniser la guerre. Par ailleurs, certaines dérives des
pratiques d'assistance humanitaire, ont suscité en nous une
réflexion quant à l'éthique humanitaire. Enfin, il a
été constaté dans la pratique que certaines ONG
humanitaires se créent à l'occasion de certains
évènements bien précis et sitôt ces
évènements passés, elles disparaissent. Dans ces
conditions, on s'est interrogé sur le sort du personnel humanitaire
employé par de telle ONG en cas de dommage corporel grave.
Sur un plan personnel, étudier la protection juridique
du personnel humanitaire est un avantage certain. En effet, ayant pour ambition
de faire carrière dans l'assistance humanitaire il est important pour
nous de voir quelles sont les garanties juridiques qui entourent une telle
fonction.
V- Revue de littérature
La protection juridique du personnel humanitaire en zone de
conflit armé interne est une préoccupation majeure sur le plan
international. Les attaques délibérées contre le
personnel participant à une mission de l'ONU ainsi que contre le
personnel humanitaire compromettent gravement leurs activités dans les
régions du monde. Il en va de même pour le nombre grandissant de
personnels humanitaires tués ces dernières années dans les
zones de conflit8(*). Cette
protection a été traitée en droit international ainsi que
par d'autres instruments juridiques de protection. C'est le cas des conventions
de Genève, de la convention sur la sécurité du personnel
de l'ONU et du personnel associé, adoptée par le conseil de
sécurité de l'ONU le 09decembre1994 et entrée en vigueur
le 30septembre1997.
Pour EVERT Maréchal9(*) et son homologue canadien ANDRAS
VASMOS GOLDMAN, la première responsabilité
quant à la sécurité du personnel humanitaire de l'ONU et
du personnel associé incombe à l'Etat accueillant une mission de
l'ONU ou une puissance occupante10(*). Cependant l'on pense que la sécurité
du personnel humanitaire ne saurait être à la charge des seuls
Etats. Conformément aux conventions de Genève de
194911(*)
les parties au conflit sont tenues de respecter
scrupuleusement les règles et principes du droit international relatifs
à la protection des civils en général et du personnel
apportant assistance en particulier.
Alors il revient aux Etats de respecter et de faire respecter
les règles du droit international humanitaire. Tel est le sens de
l'article premier des conventions de Genève et des protocoles
additionnels. Mais, l'on se rend compte au regard de la pratique actuelle que,
ce principe fondamental du droit international humanitaire qui demande que les
différents belligérants fassent une distinction
particulière entre civils et combattants est de plus en plus
violé. Les tirs ne sont plus portés seulement sur des objectifs
militaires. C'est ce que Cornnelio SOMMARUGA a
appelé de
« criminalisation »12(*) de la guerre. D'après
lui, l'évolution de la nature des conflits armés dans les
relations internationales a ébranlé la pratique du CICR ainsi
que celles des autres organismes humanitaires. Les défis majeurs que
devraient relever les humanitaires sont de connaître et comprendre
l'enjeu de tel ou tel conflit.
Mais la question que nous pouvons nous poser est celle de
savoir si la maîtrise de l'enjeu du conflit peut résoudre le
problème de la sécurité du personnel humanitaire. Dans la
mesure où, la criminalisation dont parle SOMMARUGA laisserait
plutôt entrevoir une méconnaissance des règles du droit
humanitaire. Ces personnes qui se transforment en prédateurs des
populations civiles et du personnel humanitaire ne sont pas à même
de mesurer la gravité des actes qu'ils posent. Les conflits de nos jours
étant devenus des conflits déstructurés, ne
répondent plus toujours aux normes ordinaires et classiques des conflits
armés tels qu'il a toujours été observés dans la
pratique des guerres. C'est en ce sens que Jean-Daniel TAUXE, parle des :
« guerriers ayants pris la place des
soldats »13(*). Pour décrire le fait que, les chaînes
de commandements attributs des armées traditionnelles sont
remplacées par des structures décisionnelles beaucoup plus
difficiles à identifier. Le résultat est que l'on se retrouve
face à une certaine anarchie c'est la raison pou laquelle, le Conseil
de Sécurité de l'ONU en juillet 1999 a décidé en
RDC de mettre sur pied un mécanisme en vue de désarmer toutes les
milices et les groupes armés car cet état de chose ne pouvait
que rendre précaire la situation des humanitaires agissant sur un tel
terrain. Dans la mesure où c'est chaque groupe armé qui fait
désormais sa loi, au détriment des règles reconnues et
consacrées par le droit international humanitaire. L'illustration
parfaite est celle des types de conflits de plus en plus observés en
Afrique tels que les guerres de libération nationale, les
génocides, les conflits dits identitaires où, la population
civile devient un objectif militaire, l'ennemi à abattre.
Mary B. ANDERSON14(*), se fonde beaucoup plus sur le profil des forces en
présences. Il apparaît que, les conflits armés de nos jours
font intervenir un certain nombre d'acteurs mal identifiés tels que
les milices, les jeunes gens recrutés dans le tas et n'ayant aucune
notion de respect des droits de l'homme, les civils devenant eux mêmes
acteurs au conflit15(*).
La pertinence de ce propos tient du fait que, ce n'est qu'une suite logique du
caractère dit déstructuré des
« nouveaux » conflits. Ces jeunes gens qu'on retrouve au
sein de ces factions armées sont généralement
recrutés dans l'informel. Ce sont des « militaires »
de circonstance, recrutés pour une situation ponctuelle. Le fait qu'ils
n'aient jamais reçu des enseignements sur les règles devant
régir un conflit armé, ne peut que rendre précaire la
sécurité des civils en général et du personnel
humanitaire en particulier. C'est en ce sens par exemple que le but de la
résolution 155616(*) de l'ONU était de procéder au
désarmement des milices et groupes armés au Soudan. Certes,
l'article 3 commun aux quatre conventions de Genève de 1949 demande
à chaque partie au conflit de respecter scrupuleusement les
règles de droit international humanitaire. Mais il n'en demeure pas
moins que le fait que ces groupes armés ne soient pas reconnus sur le
plan international pose un réel problème. C'est le cas du Rwanda
où Roméo DALLAIRE17(*) fait part de l'existence au sein des populations d'un
pouvoir parallèle dû au fait que les milices s'étaient
infiltrées au sein des populations civiles. Ce qui, non seulement semait
une confusion totale mais aussi permettait à ces milices
d'opérer en toute quiétude. Il est évident qu'une telle
opération est de nature à compromettre gravement la
sécurité des populations civiles ainsi que celle du personnel
humanitaire exerçant sur le terrain car le droit international exige
que, les porteurs d'armes ainsi que les forces régulières
puissent s'identifier à travers des signes.
Ralph ZACKLIN au cours du cinquième sommet de l'ONU
sur la sécurité du personnel humanitaire affirmait
que: « Les pays où le personnel humanitaire court
souvent les plus grands risques sont ceux qui ne sont pas parties ni au statut
de Rome, ni à la convention de 1994, ces parties n'ayant pas
d'obligations juridiques vis à vis des instruments internationaux
existants » 18(*). L'on dira que, le fait pour les pays de ratifier les
textes internationaux ne constitue en aucun cas une garantie de
sécurité pour le personnel humanitaire. Le personnel humanitaire
est pris pour cible même dans les pays ayant ratifié les
conventions de Genève. Nous en voulons pour preuve les cas du Darfour,
de l'Irak, de l'Afghanistan et de la Côte d'Ivoire. Mais, il n'en demeure
pas moins vrai qu'en matière de sécurité du personnel
humanitaire, l'Etat détient un rôle primordial. Le fait cependant
pour un Etat de ratifier ces textes marque une volonté certaine
d'assurer leur mise en oeuvre.
Pour ce qui est de la Résolution
150219(*)
du conseil de sécurité en vertu de laquelle celui-ci se
déclare résolu à prendre les mesures requises pour assurer
la sécurité du personnel humanitaire ainsi que du personnel des
Nations Unies et du personnel associé, elle souligne les efforts
antérieurs déployés par ledit conseil pour attirer
l'attention sur les engagements que doivent prendre les parties à un
conflit relativement a la sécurité du personnel humanitaire.
Il ressort de cette analyse que la question de la
sécurité du personnel humanitaire constitue une réelle
préoccupation à l'échelle internationale. C'est la raison
pour laquelle toute attaque délibérée portée contre
le personnel humanitaire est constitutive de crime de guerre20(*). Par ailleurs, la
création de la Cour pénale internationale est
une initiative louable en matière de sécurité du personnel
humanitaire. Dans la mesure où, comme l'a si bien relevé
Kofi ANNAN : « il est
particulièrement troublant que si peu d'auteurs de crimes aient
été traduits en justice pour les crimes commis contre le
personnel de l'ONU. L'application rapide de la justice pourrait avoir un effet
de dissuasion réel contre une telle impunité »21(*).
Il serait cependant utile de souligner que, la seule mise sur
pieds de cette Cour ne suffit pas. Les Etats devraient par la suite veiller
à ce que toute menace proférée ou tout acte de violence
commis à l'encontre du personnel humanitaire opérant sur leur
territoire fasse l'objet d'une enquête approfondie. Après quoi,
ces Etats devront prendre toutes les dispositions voulues, conformément
au droit international et à la législation nationale, pour que
les auteurs de tels actes soient poursuivis. Pour empêcher tout risque
d'instauration d'impunité, il revient impérativement aux Etats de
reprendre les dispositions des textes internationaux en matière de crime
de guerre. Ainsi, ils pourront prévoir les mécanismes permettant
de juger les personnes coupables ainsi que les peines et sanctions y
afférentes. Edwige AVICE parle « d'une
meilleure organisation ainsi que d'une forte mobilisation des
Etats » 22(*) car aucune
mesure de sécurité ne peut être efficace sans
l'entière participation des Etats.
Alors, la sécurité du personnel humanitaire est
un travail de longue haleine. Elle doit être considérée
aussi bien en temps de paix qu'en temps de guerre car comme l'a si bien fait
remarquer Marie José DOMESTICI -MET traitant de la question de l'aide
humanitaire : « Il ne s'agit donc pas d'une sorte
d'immunité diplomatique mais de faire respecter leur travail et leur
intégrité physique par tous les moyens
utiles. » 23(*) C'est la raison pour laquelle, on assiste de plus en
plus au cours des conflits armés à des situations d'assistance
physique. C'est le cas de l'assistance militaro humanitaire, où les
humanitaires font recours aux forces armées question de protéger
leur intégrité physique. L'auteur précité parle du
passage du couplet « assistance juridique- protection
concrète » à celui de « protection
physique- assistance ». C'est une conséquence logique du
non-respect par les belligérants de leurs obligations d'accorder
protection aux non combattants comme aux combattants mis hors de combat. Cet
état de choses ne peut que dénaturer le fondement même de
la mission des humanitaires qui ne devraient en principe pas travailler avec
des armes. C'est dans le même sens que Koffi ANNAN a affirmé que,
« lorsqu'on ajoute une assistance humanitaire à une
opération militaire, on modifie la nature de la
mission »24(*).
Il faut dire que, l'aide humanitaire s'est
avérée quelque fois être à l'origine de la
fragilisation de la sécurité du personnel humanitaire. Pierre
KRAHENBUEL affirme à ce propos que l'insécurité du
personnel du CICR serait une conséquence de la politisation et de
« l'instrumentalisation »25(*) de l'aide humanitaire. Alors que celle ci devrait
être complémentaire à l'action politique et ne saurait en
aucun cas s'y substituer. Contrairement à cet auteur, nous pensons
plutôt que, l'aide humanitaire pourrait avoir un impact sur le conflit en
présence mais pas vraiment sur la sécurité du personnel
humanitaire. Ceci dans la mesure où, le problème de l'aide
humanitaire a souvent été cette tendance à alimenter le
conflit. Bien plus, on lui a souvent reproché son inadaptation aux
réalités locales ainsi que le fait qu'elle constitue une sorte de
fuite de responsabilité des Etats par rapport aux tâches qui leur
incombent.
Par ailleurs, l'on doit tout de même admettre le fait
que, de manière indirecte, l'aide humanitaire soit source
d'insécurité du personnel humanitaire. Il s'agit ici des
situations où ceux ci cherchant à s'opposer à des pilleurs
trouvent la mort suite à des tirs. Mais, Jacob
KELLENBERGER par contre parle plutôt de la polarisation et de la
radicalisation26(*) qui
font en sorte que certains les assimilent au monde occidental qu'ils rejettent.
C'est notamment le cas en IRAK où, tout porte à croire que le
malheur des humanitaires serait lié au fait que ceux -ci sont
assimilés aux américains par les populations locales. Il se pose
donc à ce niveau un réel problème de sensibilisation et
d'information quant à l'action humanitaire, Il serait indiqué
pour le personnel humanitaire en général de procéder
pendant leurs interventions à un sérieux travail d'écoute
et de persuasion. Expliquer aux populations et aux forces en présence le
bien fondé de leurs missions qui consiste à oeuvrer pour leur
mieux être car comme l'a si bien souligné Jean Luc
BLONDEL : « l'humanitaire ne concerne pas des
actions particulières mais le souci de mettre le bien de l'homme et la
préservation de sa dignité au coeur de toute
action » 27(*).
En somme, il convient de rappeler que la protection juridique
du personnel humanitaire, est une protection fonctionnelle28(*) en ce sens que les
différentes conventions de GENEVE s'appliquent exclusivement en temps de
guerre. Il s'agit donc d'une protection qui ne couvre pas le personnel de
façon permanente et absolue, mais seulement dès qu'il est
engagé dans les opérations de secours.
VI Problématique
Des efforts considérables sont faits en vue de garantir
la sécurité du personnel humanitaire. Les principaux
instruments prévus à cet effet en droit international
humanitaire sont les conventions de Genève de 1949, ainsi que les
protocoles additionnels de 1977. L'autre instrument prévu pour la
protection du personnel humanitaire est la convention des Nations Unies de 1994
sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel
associé. Il faut ajouter à tout cela l'existence des
modalités de protection tels que la création et la
sécurisation des zones humanitaires, ainsi que des sanctions
éventuelles et des réparations qu'offrent les textes nationaux et
internationaux.
Il apparaît clairement que, le personnel humanitaire
jouit d'une protection essentiellement consacrée par les textes. La
dense littérature sur la question nous montre que certes ils exercent
tous sous la couverture du droit international humanitaire, mais il existe
aussi d'autres mesures de protection telles les résolutions des Nations
Unies portant sur la protection du personnel des organismes humanitaires en
général. Alors, malgré toutes ces différentes
mesures de protection, le personnel humanitaire continu d'être pris pour
cible sur les terrains de conflits armés. L'actualité
récente nous montre que, ces dernières années ont
été particulièrement meurtrières pour l'ensemble du
personnel humanitaire actif sur le terrain des conflits armés.
Les enlèvements et les attaques ciblés du
personnel humanitaire sont devenus des habitudes inquiétantes dans de
nombreux endroits du globe. Au Burundi en 1996, 3
délégués du CICR ont trouvé la mort29(*) suite à des tirs
ouverts sur la voiture qui les transportait. Le 06 septembre 2002, Carlos
CANCERERES, l'un des 3 agents de l'ONU envoyé au Timor Oriental30(*) avait été
assassiné. Le 30mars de la même année, un ingénieur
du CICR est tué en Afghanistan31(*) par un groupe d'assaillants non identifiés
alors qu'il aidait des citoyens démunis. En un an, 21 fonctionnaires
des Nations Unies ont trouvé la mort32(*) ; en Irak Médecins Sans Frontières
a été obligé de se retirer après
l'enlèvement suivi de l'assassinat de la représentante de l'ONG
CARE ainsi que de la mort de cinq employés de médecins sans
frontières. Entre janvier 1994 et octobre 2002, 74 incidents33(*) sont survenus impliquant la
prise d'otage ou l'enlèvement de 262 personnels34(*). Jusqu'à ce jour, 69
personnels35(*) sont
toujours détenus dans diverses régions du monde. L'aspect nouveau
et particulièrement choquant des tragédies de ces
dernières années est que ces personnes ont été
délibérément tuées bien qu'ayant été
reconnues et identifiées en tant que membres du personnel des
organisations humanitaires.
Certes par leurs activités, les acteurs humanitaires
ont toujours été et seront toujours exposés à des
incidents de sécurité. Mais, la récurrence de ces
incidents meurtriers perpétrés à l'encontre du personnel
humanitaire et la volonté manifeste des commanditaires de ces actes de
barbaries à poursuivre leurs oeuvres nous emmène à nous
interroger : Les textes protégeant le personnel humanitaire
sont -ils encore efficaces et pertinents au regard de l'évolution de la
nature des conflits ? Il sera question pour nous de voir si ces
instruments juridiques sont adaptés à la nouvelle donne de
conflits dits déstructurés tels que ceux de plus en plus
observés en Afrique, conflits mettant aux prises de multiples factions
rivales dont les objectifs politiques divergent et les chaînes de
commandement sont brouillées. Ces conflits donnent lieu à un
combat total où personne n'est toléré, car la logique
consiste à détruire tous ceux qui ne sont pas des partenaires.
Il en est de même pour l'émergence de nouveaux acteurs au conflit
tels, les factions armées, des groupes de milices, des rebelles.
Bien que l'article 3 commun aux 4 conventions de Genève
de 1949 et le protocole II de 1977 demandent à toute partie prenant
part au conflit de respecter les règles du droit international
humanitaire, on se demande tout de même comment ces groupes armés
peuvent être liés par des traités auxquels ils ne sont pas
parties. Par ailleurs, l'application de cet article 3 ne leur confère
aucune reconnaissance sur le plan international ; ce qui pose tout de
même un réel problème en cas de poursuite devant les
juridictions internationales.
VII -Hypothèses
Pour répondre au problème
précédemment posé, nous émettons les
hypothèses suivantes :
1)-Hypothèse principale :
Les instruments juridiques assurant la protection du personnel
humanitaire sont inadaptés et ne sont plus à même de
garantir leur sécurité au regard de l'évolution actuelle
de la nature des conflits armés.
2)-Hypothèses secondaires :
-L'émergence des nouveaux acteurs au conflit (milices)
vivant dans des conditions misérables rend difficile le respect du
principe de droit international humanitaire selon lequel les personnes
apportant secours ne doivent pas faire l'objet d'une attaque.
-Enfin, le côté ostentatoire et rutilant du
matériel des missions d'assistance humanitaire, est de nature à
attirer sur ces derniers la convoitise de ces types d'acteurs affamés et
manipulés qui se transforment en criminels
VIII- Processus
méthodologique
L'approche que nous donnerons à ce travail sera une
approche à la fois juridique et sociologique. Elle est juridique parce
que nous nous attèlerons à analyser les différents textes
internationaux qui traitent de la protection juridique du personnel
humanitaire, ainsi que des rapports des ONG et organisations humanitaires. Nous
allons essayer de confronter ces textes aux réalités sur le
terrain afin de voir si réellement ils produisent l'effet
escompté à savoir garantir de manière efficace la
sécurité de ces derniers.
Ensuite, dans le cadre de l'approche sociologique que nous
entendons donner à ce travail, nous utiliserons essentiellement deux
grilles d'analyses. Il s'agit de l'analyse stratégique de CROZIER et
FRIEDBERG36(*) et de
l'individualisme méthodologique de Raymond BOUDON37(*).
Selon Michel CROZER et Erhard FRIEDBERG, il existe dans chaque
organisme des relations de pouvoir auxquelles les individus sont largement
impliqués. Les individus afin de tirer un bénéfice au sein
de l'institution élaborent des stratégies en fonction de leurs
moyens d'action ainsi que de leur liberté. Cette grille d'analyse nous
permettra de saisir les stratégies des différents acteurs
impliqués dans les conflits armés non internationaux. Elle nous
permettra également de percevoir l'ensemble des comportements des
acteurs qui affectent l'efficacité des instruments juridiques de la
protection du personnel humanitaire.
Quant à la seconde grille, qui vient compléter
la première, elle ne se contente pas de décrire le jeu entre les
acteurs. Mais vient en complément à l'analyse stratégique
qui décrit par contre le comportement des acteurs. Elle se propose
d'examiner comment se composent les comportements, de même que les
conséquences qu'ils produisent sur le système global.
Selon Raymond BOUDON, le principe de l'individualisme
méthodologique énonce que pour expliquer un
phénomène social quelconque, il est indispensable de construire
les motivations des individus concernés par le phénomène
en question (il faut noter que dans un phénomène, les motivations
des individus ne sont pas les mêmes).
Pour cet auteur il faut appréhender le
phénomène comme le résultat de l'agrégation des
comportements individuels dictés par les motivations des uns et des
autres.
Alors ce processus méthodologique nous aidera à
comprendre comment l'agrégation des attitudes des différents
acteurs ainsi que leurs intérêts divergents peuvent être
à l'origine de l'échec une fois de plus des instruments
juridiques de protection du personnel humanitaire dans la pratique.
Dans la collecte des données, nous ne nous contenterons
pas seulement de la recherche documentaire nous procéderons aussi
à des entretiens. A cet effet nous utiliserons le guide d'entretien
semis directif. Ceci afin de recueillir des informations chez les acteurs qui
sont souvent impliqués dans les conflits. Nous interrogerons deux
catégories de personnes. A savoir des membres de forces armés
afin d'avoir une idée sur leur niveau de connaissance en matière
de droit international humanitaire et de droit de l'homme. Par ailleurs, nous
analyserons les programmes de formation de ces combattants afin de jauger si le
volume horaire des enseignements de DIH est de nature à les
prémunir contre tout risque de violation à l'égard du
personnel humanitaire. Enfin, au niveau des humanitaires auprès
desquels nous passerons des entretiens, il sera question de voir quelles sont
les difficultés auxquelles ils sont confrontés au quotidien et
quelles sont les actions personnelles qu'ils mettent sur pied pour y faire
face.
IX- Articulation et justification du
plan
Notre travail s'organise en deux parties et vise à
établir un point de la situation : une première partie plus
juridique présente les instruments juridiques qui assurent la
protection du personnel humanitaire. En effet, divers instruments juridiques
consacrent la protection du personnel humanitaire tant sur le plan national
qu'international. Par ailleurs, l'organisation de la répression des
infractions commises à l'égard de ces derniers est possible au
niveau international et sur le plan interne.
La deuxième partie, essentiellement analytique consiste
à montrer le caractère relatif de l'efficacité de la
protection dans la pratique. En effet des éléments
émanant tant de l'évolution de la nature des conflits que de
l'appareil judicaire démontrent que cette protection mérite
d'être affinée. Ce qui nous a amené à faire des
suggestions en vue de l'améliorer.
Première partie
Une protection effectivement consacrée
Deuxième partie
Une protection mitigée et perfectible
I ère PARTIE : UNE PROTECTION EFFECTIVEMENT
CONSACREE
L'existence des normes sur la protection du personnel
humanitaire ne fait l'ombre d'aucun doute. Depuis l'adoption des quatre
conventions de Genève (textes fondateurs du droit international
humanitaire), plusieurs autres textes internationaux viennent affirmer cette
consécration (chapitre I). Par ailleurs, leur violation engage la
responsabilité pénale de celui qui est mis en cause et peut
l'obliger à indemniser la victime (chapitre II).
CHAPITRE I : NORMES ET MODALITÉS DE LA
PROTECTION
Les dangers et risques de sécurité auxquels le
personnel des organismes humanitaires sont exposés, n'ont
malheureusement pas cessé de croître au cours de ces
dernières années. C'est pourquoi la question de leur protection
est devenue une préoccupation majeure tant sur le plan national qu'au
niveau international. Il existe sur le plan international des traités
qui fondent juridiquement cette protection. En plus de ces traités, il
a été mis sur pied certaines modalités qui, de
manière pratique tentent de garantir à ces agents
dévoués un surcroît de sécurité. Il nous
reviendra dans les sections qui suivent de montrer que la question de la
protection juridique du personnel humanitaire est une réalité.
Ceci de par sa consécration au travers des conventions internationales,
des traités, des résolutions et autres textes adoptés dans
le cadre des Nations Unies, ainsi que d'autres mesures à même de
promouvoir cette protection (Section I). Enfin de par la mise sur pied de
certaines modalités de protection (Section II)
Section I : Les normes de protection du personnel
humanitaire
Différents textes internationaux consacrent la
protection du personnel humanitaire dans un contexte de conflit armé. Il
est utile de savoir que, ces textes organisant la protection juridique des
missions humanitaires ont force juridique en fonction de l'organe qui les a
édictés. Certaines normes ont une valeur coutumière. C'est
le cas pour celles prévues par le droit international humanitaire.
Paragraphe I : Les stipulations du droit
international humanitaire
Le principe fondamental du droit international humanitaire
selon lequel il faut toujours faire une distinction entre les combattants et
les non combattants est à la base de la protection juridique du
personnel des organisations humanitaires. En d'autres termes, les civils ne
doivent en aucun cas être des objectifs militaires. Cette protection est
consacrée de manière générale par le droit
international humanitaire et les conventions de Genève de 1949(A) qui en
plus de la protection générale qu'elle confère, comporte
aussi certaines mesures de protection spécifiques à certaines
organisations. C'est le cas de l'emblème (B) ainsi que la convention des
Nations Unies sur l'interdiction et la limitation de l'utilisation de certaines
armes classiques(C)
A- Les conventions de Genève et les protocoles
additionnels
Normes internationales fondamentales du droit international
humanitaire, elles ont un caractère universel et obligatoire. Les
situations de conflits armés internes sont régies par
l'application de l'article 3 commun aux quatre conventions encore appelé
convention en miniature. Elle regorge le minimum de règles applicables
en cas de conflit ne présentant pas un caractère international.
Aux termes des dispositions conventionnelles, les personnes qui ne participent
pas aux actions de secours, les organismes civils de protection civile, ainsi
que leurs personnels et leurs biens doivent être respectés et
protégés contre les effets des opérations militaires. Il
est interdit de porter atteinte à leur vie, à leur santé
et à leur intégrité corporelle et mentale. Il faut noter
que, les dispositions de cet article ne constituent que le minimum que
devraient observer les parties au conflit. D'où le sens de
« ...chacune des parties au conflit sera tenue d'appliquer au
moins les dispositions suivantes... »38(*). Par ailleurs, ce même article permet aux
organismes humanitaires d'offrir leurs services aux parties au conflit. Dans un
contexte de guerre, les actes tels que le pillage, le vol, le viol ainsi que le
ciblage sont prohibés à l'égard du personnel conduisant
une mission d'aide humanitaire. Les normes de protection par le droit
international humanitaire et les conventions de Genève sont vastes. De
manière générale, elle couvre les besoins de protection de
tous les civils ne participant pas au conflit. Elle protège les
nombreuses organisations humanitaires, non gouvernementales et organisations
internationales humanitaires présentes sur le terrain dans un contexte
de guerre civile. Elle ne se traduit pas par un signe protecteur permettant de
les identifier, mais se limite en la consécration dans les textes des
actes prohibés à l'égard de ces personnes encore
appelées personnes « protégées »
L'article 71 du protocole additionnel I prescrit explicitement
que ce personnel ainsi que leurs matériels doivent être
respectés et protégé. Certes ce protocole régit les
conflits armés internationaux, mais il faut souligner que, que l'on soit
dans un contexte de conflit armé international ou non international, les
dégâts humanitaires sont pareils.
B- Les insignes particuliers de
certains organismes
Il s'agit ici de la question de
l'emblème de la Croix Rouge, des couleurs utilisées par certains
organismes afin de se distinguer des autres, ainsi que des logos.
Consacrée et instituée par les conventions de
Genève de 1949, la protection que confère l'emblème a un
champ d'application assez limité. Elle est uniquement
réservée à une catégorie clairement définie
par les traités conventionnels. Ce sont le personnel sanitaire et
religieux, les unités sanitaires des forces armées, ainsi que les
unités et moyens de transport sanitaires civils, tels les hôpitaux
et les ambulances. Le personnel de secours non rattaché au Mouvement de
la Croix-Rouge et du Croissant Rouge ne bénéficie pas du droit
d'usage de l'emblème. C'est en ce sens que le protocole additionnel II
dispose que : « sous le contrôle de
l'autorité compétente concernée, le signe distinctif de la
croix rouge, du croissant rouge ou du lion et soleil rouge sur fond blanc, sera
arboré par le personnel sanitaire et religieux, les unités et
moyens de transports sanitaires. Il doit être respecté en toute
circonstance. Il ne doit pas être employé
abusivement. »39(*) L'utilisation de l'emblème est soumise
à un régime juridique très strict. C'est un signe
très apparent qui permet rapidement d'identifier le personnel qui en
jouit.
L'usage de l'emblème sans autorisation expresse de la
loi constitue un abus et par la même occasion un crime de guerre en droit
international humanitaire. Constituent aussi un abus, l'imitation, l'usurpation
ainsi que la perfidie exercée sur l'emblème. A cet effet, les
hautes parties aux conventions de Genève dans la mise en oeuvre du droit
international humanitaire se sont engagées à adopter dans leurs
législations nationales des dispositions récriminant
l'utilisation abusive de l'emblème, tant en temps de paix qu'en
situation de guerre40(*).
En plus de l'emblème des sociétés de la
croix rouge et du croissant rouge, l'on rencontre aussi l'emblème ou
logo du personnel des Nations Unies. Certes il n'est pas fortement
règlementé comme celui des sociétés de la croix
rouge et du croissant rouge, mais il n'en demeure pas moins qu'il est
exclusivement réservé au seul personnel des Nations Unies.
Toutes les mesures de protection ne sont pas soumises à
un régime juridique aussi strict c'est le cas de la convention sur la
limitation et l'interdiction de certaines armes classiques dont
bénéficient toutes les organisations humanitaires.
C- Protocole additionnel II (à la convention des
Nations Unies du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de
certaines armes) révisé le 3 mai 1996
Ce protocole en son article 8 demande aux Etats de prendre des
mesures adéquates pour assurer la protection du personnel humanitaire de
l'ONU, du comité international de la croix rouge, du croissant rouge,
ainsi que de tous les autres organismes humanitaires contre les effets des
mines. Cette convention se démarque des normes conventionnelles de
Genève du fait que, contrairement aux conventions de Genève dans
lesquelles le personnel des organismes humanitaires jouit de manière
générale de la protection due aux civils, cette convention les
cite explicitement.
Ainsi, chaque partie à un conflit armé
international ou interne a l'obligation de protéger, dans toute zone
placée sous son contrôle, le personnel humanitaire contre les
effets des mines, pièges et autres dispositifs. La pertinence de ce
texte tient au fait qu'il protège le personnel d'organisation
humanitaire de par leur statut d'agents humanitaires et non en tant que
population civile ne participant pas aux hostilités. En plus de ces
textes du droit international humanitaire qui consacrent la protection de ce
personnel, il existe aussi d'autres mesures visant à renforcer cette
protection.
Paragraphe II- Les autres mesures de
protection
En plus de la protection conférée par les
dispositions des conventions de Genève, le personnel humanitaire
bénéficie d'autres mesures de protection. Il s'agit des mesures
autres que celles du DIH. Ce sont le statut de la Cour Pénale
Internationale (A), la convention du personnel de l'ONU de 1994 (B), les
Résolutions prises par le conseil de Sécurité et
l'Assemblée Générale des Nations Unies(C), et enfin des
accords de sièges qui sont souvent signés entre des Etats et des
ONG ou entre certaines ONG et l'ONU(E)
A- Le statut de la Cour pénale
internationale
Le statut de Rome du 17juillet 1998 qualifie de crime de
guerre41(*) et punissable
par la Cour pénale internationale le fait de lancer des attaques
délibérées contre le personnel, les installations et le
matériel des missions d'aides humanitaires ou de maintien de la paix
conformément à la charte des Nations Unies. Cette disposition va
plus loin en mentionnant « ce pour autant qu'ils aient droit
à la protection que le DIH garantit aux civils et aux biens de
caractère civils. » Le statut de cette juridiction
internationale protège le personnel humanitaire ainsi que leurs biens de
manière claire et explicite dans un contexte de conflit armé
tant international que non international. Tel est le sens du paragraphe 2 du
même article qui dispose qu'il s'applique aux conflits armés qui
opposent de manière prolongée sur le territoire d'un Etat les
autorités du gouvernement de cet Etat et les groupes armés
organisés ou des groupes armés organisés entre eux.
B -La convention sur la protection du personnel des
Nations Unies et associés de 1994
Adoptée le 9 décembre 1994
par l'assemblée générale des Nations Unies, cette
convention vient répondre aux problèmes complexes liés
à la question de la sécurité du personnel des Nations Unie
sur le terrain dans un contexte de guerre. Elle érige en infraction tous
les actes de violence perpétrés à l'égard du
personnel des Nations Unies42(*). Elle établit un cadre juridique donnant aux
pays le pouvoir de sanctionner toute attaque perpétrée contre le
personnel de l'ONU ou le personnel associé, ou lui cause du tort. Cette
Convention parle explicitement de crimes tels que le meurtre,
l'enlèvement et les attaques contre les bâtiments officiels, et
elle énonce les sanctions appropriées.
Le personnel associé au sens de cette convention est
tout personnel affecté à une mission de l'ONU. Son application
reste limitée aux seuls personnels exerçant sous l'égide
des Nations Unies ainsi qu'aux organismes associés à une mission
de cette institution. Pareille aux conventions de Genève ainsi
qu'à leurs protocoles additionnels, la convention sur la protection du
personnel onusien engage tous les Etats qui l'ont ratifiée. Cette
convention ne s'applique pas à toutes les opérations
d'intervention du personnel des Nations Unies. C'est pourquoi la Nouvelle
Zélande et le Canada se sont se sont joints à la recommandation
du Secrétaire Général concernant l'élaboration d'un
protocole à la Convention qui prévoirait un mécanisme
automatique de mise en oeuvre et inclurait un plus vaste éventail
d'opérations des Nations Unies que celles qui ne sont couvertes
actuellement43(*).
C-Les Résolutions du Conseil de
Sécurité et de l'Assemblée
Générale
des Nations Unies
La question de la sécurité du personnel
humanitaire ainsi que du personnel des Nations Unies et associé a
été au centre de plusieurs Résolutions44(*) de l'ONU. Nous nous
limiterons, dans le cadre de notre travail, à commenter quelques
résolutions que nous avons jugées particulièrement
pertinentes. C'est le cas de la Résolution 1502 adoptée par le
conseil de Sécurité de l'ONU à sa 481eme séance en
date du 26 août 2003, en vertu de la quelle les Nations Unies se disent
plus déterminés que jamais à prendre à coeur la
question de la protection du personnel des organisations humanitaires. Dans
cette Résolution, le Conseil de Sécurité interpelle la
responsabilité des Etats en ce qui concerne la question de la
sécurité de ces organisations. Ainsi, conformément
à cette Résolution, il est du devoir des Etats de veiller sur la
sécurité du personnel humanitaire dans un contexte de guerre.
Dans le même sens, ces Etats ont l'obligation de poursuivre et de
traduire en justice les auteurs d'attaques ciblées à l'endroit du
personnel humanitaire de l'ONU ou de toute autre organisation à vocation
humanitaire.
Certaines Déclarations du Président du
conseil de Sécurité à propos de la sécurité
des humanitaires, sans toutefois être des Résolutions
méritent d'être évoquées. C'est le cas de la
déclaration S/PRST d'avril 2000 sur la question de la
Sécurité du personnel humanitaire et du personnel des Nations
Unies. Cette Résolution stipule que, même le fait de travailler
sous la bannière des Nations Unies ne constitue plus une garantie pour
la sécurité du personnel humanitaire. Il en ressort que,
même le personnel de l'ONU se trouve être plus menacé que
jamais. Cette déclaration exhorte la communauté internationale
à prendre très au sérieux le problème de la
protection du personnel de l'ONU ainsi que des autres organismes humanitaires.
Par ailleurs certaines Résolutions ont
été prises sur la question de la Sécurité du
personnel humanitaire mais contrairement aux précédentes, celles
ci ont été adoptées dans le cadre de l'Assemblée
Générale.
Il s'agit entre autres de la Résolution 57/28
intitulée « portée de la protection juridique offerte
par la convention sur la Sécurité du personnel des Nations Unies
et personnel associé. »45(*) Elle fait part de ce que, le personnel de l'ONU plus
que jamais est l'objet des attaques ciblées au cours de leurs missions.
Elle exige un plus grand engagement de la part de la communauté
internationale pour assurer la sécurité de ces travailleurs et
traduire en justice les auteurs de ces actes. Elle réitère la
part de responsabilité des Etats en ce qui concerne la
Sécurité du personnel humanitaire. C'est pourquoi elle exige de
ceux-ci (des Etats) une plus grande participation ainsi qu'un véritable
engagement en ce qui concerne l'aspect sécuritaire des missions d'aides
humanitaires.
Il en est de même de la Résolution 57/155 de
l'Assemblée Générale portant sur la Sécurité
du personnel humanitaire et la protection du personnel de l'ONU46(*). Cette Résolution
mentionne qu'il est du devoir du Conseil de sécurité de veiller
à la sécurité du personnel humanitaire, du personnel des
agences, de tous ceux qui participent de près ou de loin à
l'exécution d'une opération décidée par le Conseil
de sécurité.
Il apparaît que, la Sécurité du personnel
humanitaire a été au centre de plusieurs Résolutions du
Conseil de Sécurité de l'ONU ainsi que de l'Assemblée
Générale. Notons que ces Résolutions ne portent pas
seulement sur le personnel des Nations Unies mais concernent toutes les
organisations humanitaires en générale.
Contrairement aux Résolution prises par le Conseil de
Sécurité qui ont une valeur obligatoire, celles adoptées
dans le cadre de l'Assemblée Générale sont juste des
recommandations qui ont valeur déclarative47(*). Ceci se justifiant par la
qualité de l'organe qui les a édictés. De ce point de
vue, aucun procès ne peut être intenté contre un individu
sur la base d'une Résolution prise au cour de l'Assemblée
Générale. Elles viennent juste en appui aux normes
conventionnelles internationales que sont les conventions de Genève
ainsi que les autres textes protégeant les droits de l'Homme dans un
contexte de guerre. Il convient de mentionner ici le fait que, le conseil de
Sécurité a quelques fois autorisé à travers ses
résolutions, au recours aux forces armées pour assurer la
sécurité des convois de missions humanitaires, elle a souvent
sommé les parties d'assurer aux missions humanitaire des conditions
sécuritaire en vue du bon déroulement de leurs missions. C'est
pourquoi l'on ne pourra contester l'impacte de ces résolutions sur la
question de la sécurité du personnel humanitaire surtout
lorsqu'on sait quelle est la valeur juridique d'un acte unilatéral
émanant du Conseil de Sécurité et quelles peuvent
être les conséquences pour un Etat en cas d'inexécution.
D- Les accords de siège
Un accord de siège48(*) est une convention qui définie la situation
juridique d'une organisation ou d'une ONG internationale et de ses
différentes installations. Elle se conclue entre l'organisation et
l'Etat qui accueille, elle énonce les droits que l'Etat hôte
reconnaît à l'organisation, en particulier l'étendue de son
droit de se doter de ses propres textes règlementaires à mettre
en oeuvre au sein de ses installations ; ainsi que les privilèges
et immunités qui lui sont accordés.
Ces accords de siège sont importants en ce qu'ils
mettent la responsabilité de l'organisation en question entre les mains
de cet Etat. Dès lors celui-ci a pour mission de veiller à ce que
rien ne porte atteinte à la sécurité des agents de cette
organisation. C'est le cas du HCR qui depuis 1982 a passé un accord de
siège avec le Cameroun49(*). Cet accord a été favorisé par
l'arrivée massive des milliers de ressortissants
équato-guinéens en 1978, fuyant le régime de dictature de
Macias NGUEMA.
Il en est de même pour l'accord passé entre le
comité international de la Croix Rouge et le conseil
fédéral Suisse50(*) qui reconnaît au CICR une personnalité
juridique tout en accordant certains privilèges et immunités tels
que la liberté d'action, l'inviolabilité de ses locaux, de ses
archives et une immunité de juridiction et d'exécution.
Ces accords de siège ne se font pas seulement entre
un Etat et une organisation humanitaire. Ils se concluent également
entre certaines ONG humanitaires et des institutions. Tel est le cas de
l'accord passé entre l'office de coordination des affaires humanitaires
des Nations Unies (UNOCHA) et la commission des communautés
européennes concernant leur coopération dans le cadre des mesures
à prendre en cas d'interventions simultanées dans un
pays51(*). Il en est de
même de l'accord du 05mai 1999 passé entre l'organisation des
Nations Unies et le gouvernement indonésien sur la question de violation
du droit international humanitaire au Timor52(*).
Section II : Les modalités de la protection
L'environnement dans lequel le personnel des organisations
humanitaires intervient les expose à de nombreux risques liés au
contexte dans lequel se déroule leurs missions. Cela se perçoit
au niveau de la définition que certains auteurs donnent à cette
action : « L'action humanitaire est une assistance fournie
par un seul ou une conjonction d'acteurs, s'insérant à des
niveaux variés dans un dispositif international de l'aide, régie
par un certain nombre de principes, et de mise en oeuvre (au nom de valeurs
considérées comme universelles), au profit de populations dont
les conditions d'existence du fait de la nature (catastrophe) ou de l'action
des autres hommes ( conflits internes ou internationaux) sont
bouleversées et l'intégrité physique atteinte, voir la
survie même compromise. »53(*) Il va donc sans dire que, l'action humanitaire se
déroule presque toujours dans des contextes de drame. C'est pourquoi,
cette périlleuse mission connaît aujourd'hui dans sa pratique la
mise sur pied de certaines modalités qui passent de la
délimitation de leur périmètre d'action (I) à
l'accompagnement de leurs actions par des éléments d'un autre
corps (II).
Paragraphe I- La sanctuarisation des
théâtres d'opérations humanitaires
Les humanitaires sur le terrain accomplissent à
l'égard des populations un travail remarquable qui coûte la vie
à beaucoup d'entre eux. La sanctuarisation des théâtres
d'opérations humanitaires consiste en la création des espaces
encore appelés « zones ou couloirs humanitaires »
qui permettent aux acteurs d'agir avec un minimum de sécurité et
dans le respect des principes humanitaires (A). Cependant ces couloirs
humanitaires ne garantissent pas toujours la sécurité des
humanitaires (B).
A-La créations des zones humanitaires
Considérés comme une modalité de
protection, ces couloirs humanitaires ont été crées par
l'Assemblée Générale de l'ONU par la Résolution
45/100 adoptée le 14 décembre 1990, repris par la suite par de
nombreuses Résolution du Conseil de Sécurité54(*). Ces couloirs sont en
principe à l'abri de tout objectif militaire. De manière
pratique, ils sont mis sur pied en vue de soustraire les populations civiles
des dangers liés à la guerre. Ils garantissent un
surcroît de sécurité au personnel humanitaire dans la
mesure où ceux ci y exercent leurs missions humanitaires en principe
à l'abri de toute attaque armée. Ces espaces
délimités et protégés par des forces militaires en
vue de permettre aux missions d'aide humanitaire d'être à l'abri
de ciblage, de pillage ou de viol sont de véritables « zones
franches humanitaires ».
Cependant, il faut relever que les couloirs humanitaires
soulèvent paradoxalement dans la pratique un certain nombre de
problèmes liés aux questions d'ordre sécuritaire.
B - Le paradoxe des zones humanitaires
Les zones humanitaires au lieu de servir de couloirs de
sécurité sont de plus en plus considérées
aujourd'hui comme des couloirs de morts. Cela a été
constaté à GOMA, au KIVU. Ces zones ne garantissent pas toujours
la sécurité escomptée des humanitaires. En effet, il a
été constaté que l'assistance humanitaire apportée
dans ces camps permettait aux différents belligérants de pouvoir
se reconstruire et de renforcer l'emprise de leur pouvoir sur les civils. Ce
fut le cas au Rwanda où, les militaires ont harcelé humanitaires
et populations à l'intérieur de ces zones55(*). Il a été
reproché aux ONG humanitaires de porter une part de
responsabilité dans le génocide rwandais en ce sens qu'au nom de
l'assistance humanitaire elles ont contribué directement à
alimenter un appareil criminel offensif56(*).
Les réalités sur le terrain ont montré
que les zones humanitaires abritaient à la fois les victimes de la
guerre et leurs bourreaux. Les cas de la RDC et du RWANDA suscités sont
des exemples assez illustratifs de la question. Au Rwanda en 1994, parmi les
civils qui vivaient dans les camps humanitaires se trouvaient à la fois
les instigateurs du génocide, les différents groupes
armés, les milices, la gendarmerie et la garde présidentielle qui
avaient perpétré des tueries. Alors, au nom du principe de non-
la discrimination et d'humanité, le personnel humanitaire apportait de
l'aide aussi bien à ces criminels de guerre qu'aux victimes du conflit.
Aussi paradoxal et choquant que cela puisse paraître, les humanitaires se
sont retrouvés en train de participer finalement au conflit. Les zones
humanitaires au Rwanda étaient devenues des zones stratégiques
où s'organisaient représailles et trafics de divers ordres par
des factions armées. Ce fut également le cas de
l'opération « turquoise » qui a
précédé à la création des zones dites
« zones humanitaires sûres » au sein desquelles se
sont poursuivis les massacres des tutsis57(*).
De part sa nature et ses principes, l'assistance humanitaire
certes se doit d'être impartiale et non discriminante. Mais il serait
tout à fait compréhensible de transcender ces principes lorsque
cette assistance est apportée aux milices qui commettent des tueries.
En effet, le coté pervers de ces zones humanitaires
c'est bien le fait que, ces espaces soient accessibles à tout le monde.
Les populations en détresse y ont accès ainsi que ceux là
même qui leur causent du tort. Ce qui constitue un grand risque pour les
agents humanitaires qui quelques fois y trouvent la mort et sont dès
lors obligés d'avoir recours aux forces armées pour assurer la
sécurité dans ces lieux.
Les zones humanitaires ont servi grandement au Rwanda de lieu
de repos pour les milices ainsi que pour les organisateurs du génocide.
Ces derniers se réfugiaient dans les zones en question afin de mieux
préparer leurs stratégies de combat. Il était difficile
d'établir une distinction entre les réfugiés et les
populations civiles que les humanitaires étaient sensés aider.
Sur un plan purement textuel, il est urgent pour la
communauté internationale de repenser une forte réglementation en
ce qui concerne l'accès à ces zones dites humanitaires, surtout
dans un contexte de conflit armé interne. A cet effet, les agents
humanitaires à leur tour doivent pouvoir faire la part des choses afin
de mettre fin à cette manière indirecte de participer au conflit
sous le simple prétexte du principe de non-discrimination qui guide leur
mission. Il va falloir user de moyens pouvant permettre de distinguer les
civils des porteurs d'armes afin de proscrire l'accès aux zones
humanitaires à ces derniers ainsi qu'à tous ceux qui peuvent
avoir des liens avec le conflit. La communauté internationale doit
tirer de bonnes leçons des cas de Goma et du Bukavu en RDC et au Rwanda
où de sérieux trafics se sont déroulés dans les
couloirs humanitaires ainsi que des tueries.
Dès lors, il y a nécessité d'initier
une réglementation appropriée sur l'accès et la gestion de
ces zones humanitaires qui constituent une modalité pratique de
protection au même titre que l'accompagnement militaro humanitaire.
Paragraphe -II L'accompagnement militaire de
l'assistance humanitaire
La question qu'on peut de prime à bord se poser quand
on évoque cette fusion du militaire et de l'humanitaire est de savoir
si des professionnels entraînés et formés aux actions de
guerre que sont les militaires peuvent être à mesure de mener une
action humanitaire ; Ceci dans la mesure où, ces
deux logiques sont fondamentalement opposées58(*). Nul ne saurait cependant
contester les effets positifs de la fusion militaro humanitaire au service de
la préservation de nombreuses vies. Les exemples de l'ex Yougoslavie,
du Rwanda et de la Somalie sont assez illustratifs à ce propos.
Certaines ONG, lorsqu'elles sont impuissantes devant les violations massives et
répétées des droits de l'Homme pendant un conflit, quand
le contexte est devenu très dangereux rendant toute action impossible
ont souvent fait recours à une telle intervention.
Il n'en demeure pas moins que, la logique du
militaire ne pourra jamais se confondre à l'idéologie
humanitaire ; S'ils peuvent certes se retrouver sur un terrain
d'intervention, les premiers servant de boucliers aux seconds, il faut tout de
même relever que, leurs finalités demeurent distinctes.
A -L'évolution de la pratique
Avant l'effondrement de l'empire soviétique, les
interventions militaro humanitaires étaient proscrites de peur de
créer des tensions Nord-Sud. Mais après l'effondrement du bloc
communiste, ce type d'intervention a connu un regain de popularité. Les
raisons d'expansion de cette fusion militaire- humanitaire sont entre autres,
la multiplication des conflits internes, c'est en ce sens que O WEBBER a
parlé de : « la tribalisation du conflit avec pour
corollaire une implication de plus en plus grande des
civils »59(*), notamment dans le tiers monde.
Généralement, au cours de ces conflits, les agents
d'organisations humanitaires sont victimes de pillages et de ciblages de toutes
sortes. Désormais, certaines ONG recourent aux services des forces
armées pour assurer leur sécurité pendant les
opérations d'assistance humanitaire. Depuis la Somalie en 1992, le
Rwanda en 1994, le Kosovo en 1999, les militaires sont dorénavant
présents dans la gestion humanitaire du conflit. D'autres raisons sont
le fait que, les humanitaires n'ont pas toujours les moyens logistiques pour
assurer leur propre sécurité. C'est pourquoi ils sollicitent
l'intervention des militaires surtout dans un contexte où sans ce
recours toute assistance s'avère impossible.
Cette fusion militaire humanitaire ne fait pas
l'unanimité au sein des humanitaires. En effet, certaines organisations
humanitaires à l'instar du CICR pensent que, la seule présence
des militaires aux cotés d'une mission humanitaire suffit à
dénaturer l'essence de l'action humanitaire qui se veut affranchie de
toute action militaire60(*), c'est dans cette logique que Meinrad STUDER affirme
que : « les activités du CICR doivent être
indépendantes de tout objectif et considération politique ou
militaire, avec pour seul critère les besoins des
victimes »61(*). Pour le CICR, l'action humanitaire consiste à
apporter protection et assistance aux victimes de conflit armé en
respectant un certain nombre de règles indépendamment des
objectifs politiques et militaires. Cela se justifiant par le fait que, pour
cette institution, ces principes constituent des outils de travail ; c'est
en ce sens que qu'il affirme que : « l'action humanitaire
doit être perçue comme un modus opérendis
... »62(*)
D'autres par contre trouvent que le caractère dangereux de certaines
interventions nécessite absolument une présence militaire afin
d'assurer leur sécurité. Cette pratique a certes souvent
porté des fruits mais il n'en demeure pas moins qu'elle engendre des
effets pervers.
B- Les effets pervers de cette pratique
L'assistance militaro-humanitaire constitue en elle-même
la violation du principe qui veut que l'intervention humanitaire soit
affranchie de toute action militaire. Bien plus, elle est une remise en
question de l'idéal idéologique de neutralité de l'action
humanitaire. D'un point de vue juridique et éthique, la
neutralité des militaires n'est jamais acquise lors d'une intervention.
Peut-on vraiment espérer une compatibilité entre action militaire
et humanitaire ? L'actualité nous fait montre de ce que l'adjectif
humanitaire est de plus en plus utilisé pour se garantir le soutien des
opinions publiques et légitimer ainsi des décisions
d'intervention63(*). Toute
intervention militaire sur un terrain d'action humanitaire est portée
à de très grands risques de dérapage. Les militaires ne
sont pas conçus dans leurs aspects tant logistiques que
hiérarchiques pour des missions d'aide humanitaire, surtout dans des
situations complexes où respect de la logique d'impartialité,
créativité et adaptabilité valent mieux qu'infrastructure
lourde.
Cette pratique constitue à l'égard des agents
humanitaires un grand risque pour leur propre sécurité en ce sens
que, les populations peuvent voir dans cette intervention militaro humanitaire
son seul aspect militaire64(*). Par ailleurs il n'est pas exclu qu'une fois sur le
terrain, cette intervention militaro humanitaire serve plutôt des causes
autres qu'humanitaires. En aucun cas, les principes humanitaires ne peuvent se
confondre aux principes militaires. Comment comprendre que ceux qui sont
formés pour tuer puissent du jour au lendemain se convertir dans des
missions qui sont radicalement opposées à celles pour lesquelles
ils ont été formés ? L'assistance militaro humanitaire
certes à certains égards a souvent porté des fruits quant
à la sécurité des missions d'aide humanitaire mais il
reste que c'est une pratique qui a plus d'effets néfastes que positifs.
Les risques de dérives sont grands aussi bien à l'égard
des populations civiles que des missions d'aide humanitaire65(*). La présence des
militaires sur le terrain de l'aide humanitaire ne peut que contribuer à
traumatiser davantage une population déjà
séquestrée par la guerre. Cette situation loin d'être
à l'avantage des missions d'aide humanitaire participe plutôt
à installer dans la tête des populations un climat de suspicion et
un sérieux risque de confusion quant à la nature effective de ces
différents acteurs.
Par ailleurs, dans la pratique, l'intervention humanitaire est
toujours initiée par les puissances occidentales. En Afrique
particulièrement, ces interventions sont souvent plus colorées
par des intérêts économiques, géostratégiques
qu'humanitaires proprement dits. Ces dernières peuvent entre autres
intervenir en vue de renverser un régime afin de prêter main forte
à un autre qui soit en même de mieux veiller sur leurs
intérêts sur le territoire. L'Afrique, étant la chasse
gardée des puissances européennes, ces puissances
n'hésitent pas à dicter aux africains les modèles de
gouvernement qu'ils préfèrent, c'est -à -dire qu'ils
peuvent manipuler à leur guise66(*). La question d'ingérence humanitaire est
devenue très stratégique dans les pays ayant de grandes
réserves de ressources naturelles. Les causes d'une intervention
militaro humanitaire sont multiples et varient en fonction des
intérêts propres de toute puissance interventionniste. Ce qui
reste vrai c'est que, les opérations extérieures ne poursuivent
pas toujours des objectifs humanitaires.
Toute opération militaire obéit à des
intérêts précis, et les Etats ne sont jamais animés
par le seul souci d'alléger les souffrances humaines. Selon
J.B.HEHIR :« L'intervention est trop coûteuse et
imprévisible pour être guidée par la compassion ou, par le
respect des buts normatifs qui sont rarement atteints ou atteignables dans le
jeu des relations entre Etats ; l'intervention n'a de sens qu'au nom de
ses intérêts propres et non en tant qu'instruments pour atteindre
des objectifs ou des valeurs universelles. »67(*) Le mobile de
l'humanitaire est devenu de nos jours l'instrument substantiel et
privilégié de toute intervention militaire68(*).
Toutes les interventions militaro humanitaires
soulèvent des problèmes mais à des degrés
différents ; en ce sens que, comme nous l'avons dit plus haut, les
interventions militaro humanitaires sont presque toujours guidées par
des élans intéressés. Les interventions telles que celles
des forces Onusiennes peuvent toute fois être dénuées de
toute idée de partialité. Il n'en demeure pas moins que
l'intérêt est devenu le leitmotiv de toute intervention
humanitaire.
En somme, la protection du personnel humanitaire au regard
des différents textes internationaux, des Résolutions des Nations
Unies est une réalité. Ces agents sont protégés par
les textes aussi bien dans des contextes de conflit armé international
que non international. Certes les textes conventionnels régissant les
situations de guerre interne sont moins élaborés que ceux des
textes de Genève sur les guerres inter-Etatiques, mais il existe
d'autres instruments juridiques qui viennent compléter sinon renforcer
les dispositions du droit international humanitaire en ce qui concerne les
situations de guerre civile.
Par ailleurs, il faut aussi souligner que, bien que ces agents
humanitaires poursuivent les même objectifs à savoir limiter les
dégâts causés par la guerre, ceux ci ne sont pas pour
autant soumis à un régime juridique de protection unique. Il a
été constaté dans le cadre de ce chapitre que bien qu'ils
soient tous protégés de manière générale par
les conventions de Genève, certaines organisations
bénéficient de manière particulière à
d'autres mesures de protection propre à leur institution. Mais il n'en
demeure pas moins que, le droit international humanitaire accorde une
protection effective à ces agents dévoués aux souffrances
humaines ; protection qui interdit de porter à leur endroit et sur
leurs biens et locaux certains actes clairement définis par les
traités internationaux.
C'est en ce sens que, tout contrevenant à ces
dispositions qui se serait livré à des actes prohibés
à l'encontre du personnel humanitaire se verra pénalement
sanctionné.
CHAPITRE II : LA RÉPRESSION DES ATTEINTES
AU PERSONNEL HUMANITAIRE
Le droit international humanitaire prévoit la
répression des crimes graves à l'article 3 commun aux conventions
et au protocole additionnel II à deux niveaux. Elle se fait sur le
plan international par le moyen d'une juridiction internationale. A
l'échelon local, la règle de la compétence universelle
ainsi qu'une bonne adéquation des lois nationales aux normes
conventionnelles la rend possible. Mais il faut souligner que son organisation
nécessite au préalable certaines conditions qui rendent possible
sa mise en oeuvre (section I). Par ailleurs, lorsqu'elle est engagée,
elle peut engager la responsabilité civile de l'auteur de l'infraction
(Section II).
Section I : L'organisation de la répression
La répression consiste à faire sanctionner au
moyen d'une juridiction pénale tout acte juridiquement prohibé.
Paragraphe I- Les conditions de la
répression
Au regard du droit international humanitaire, toute personne
responsable d'un cas de violation des dispositions des conventions de
Genève doit être poursuivie et punie. Elle peut l'être aussi
bien sur le plan national qu'international. Ceci indépendamment de sa
nationalité ou du lieu de commission du crime. Mais la règle en
droit pénal exige certaines conditions sans lesquelles cette
répression ne peut être possible.
A -L'élément intentionnel de
l'infraction
C'est l'intention qu'a l'auteur de poser un acte
prohibé par la loi, son état d'esprit ou psychologique. Jean
Claude SPYER la décrit comme étant : «
La volonté qui se tend vers un acte illicite, l'accomplissement de
l'infraction »69(*). L'élément déterminant
c'est la volonté manifeste de l'auteur de l'infraction c'est à
dire avoir posé l'acte en toute âme et conscience tout en sachant
que c'est un comportement interdit et sanctionné. Conformément
à cette règle de droit, le fait pour tout belligérant,
milice ou même une personne civile de porter une attaque à
l'intégrité physique ou aux biens du personnel humanitaire
constitue une infraction grave au droit international humanitaire. Ceci
même dans le cas où le résultat escompté ne serait
pas atteint. La volonté de poser cet acte constitue en elle-même
l'élément intentionnel de l'infraction qualifiée par les
conventions de Genève de crimes de guerre.
Il faut noter que les tirs accidentels ne peuvent en principe
pas être considérés comme infraction au sens du droit
international. C'est pourquoi l'expression appropriée et couramment
utilisée est le <<ciblage du personnel humanitaire>>
car la volonté de nuire doit pouvoir être perceptible.
B- L'élément matériel de
l'infraction
Il se traduit par un fait ou une omission, et varie en
fonction des infractions. En effet, la classification et l'incrimination en
droit pénal se fondent sur le mode matériel d'exécution de
chaque infraction. C'est en ce sens qu'un auteur dit :
<<L'élément matériel de l'infraction se
déduit pour chaque infraction du texte incriminateur qui existe
nécessairement...>>70(*).
Au terme de l'articles 3 commun aux quatre conventions de
Genève de 1949, de l'articles 4 du titre II du protocole additionnel II
de 1977, ainsi que de l'article 8 du statut de la Cour Pénale
internationale du 17 juillet 1998, il est interdit de porter certains actes
à l'égard du personnel humanitaire encore appelé
« personne protégée ».
Il s'agit particulièrement en ce qui concerne le
personnel humanitaire, des actes tels que le pillage, les prises d'otage, les
actes de torture, les atteintes à la dignité de la personne
telles que les traitements humiliants et dégradants, le viol. Tous ces
faits portés à l'endroit du personnel humanitaire constituent aux
termes des conventions de Genève et du Statut de la Cour Pénale
Internationale des actes matériels, éléments constitutifs
de crimes de guerre.
C- L'élément légal de
l'infraction
L'article 8 du statut de la Cour Pénale Internationale
du 17 juillet 1998 qualifie de crime de guerre le fait de diriger
intentionnellement des attaques contre le personnel, les installations, le
matériel les unités ou les véhicules employés dans
le cadre d'une mission d'aide humanitaire ou de maintien de la paix. Au regard
de cet article, les attaques à l'endroit des humanitaires sont
conformément audit statut qualifiées de crimes de guerre et font
l'objet d'une poursuite devant ladite Cour. Il en est de même pour
l'article 3 commun aux quatre conventions qui interdit toute atteinte à
l'égard du personnel humanitaire. La violation de ces textes donne lieu
à la mise en oeuvre de la responsabilité pénale de
l'auteur de cette atteinte.
Paragraphe II- la mise en oeuvre de la
répression des atteintes au personnel humanitaire
Comme toute infraction au droit international humanitaire, les
atteintes portées contre le personnel humanitaire sont punies aussi bien
dans un contexte de conflit armé international que celui d'un conflit
armé non international. L'effectivité de cette répression
est assurée sur le plan international par la Cour Pénale
Internationale et au plan interne au titre de certaines règles reconnues
et consacrées en droit Pénal.
A- L'organisation de la répression au niveau
international
Les atteintes portées à l'endroit du personnel
humanitaire constituent des infractions graves au droit international qui
affectent l'humanité toute entière. Dès lors, elles
s'inscrivent dans le cadre d'une justice pénale internationale et
rentrent dans le champ de compétence des instances internationales.
Certes les juridictions telles que les tribunaux ad hoc peuvent
connaître de ces infractions dites crimes de guerre. Mais il est à
noter que, ces juridictions ont une compétence temporelle et
territoriale limitée à des conflits précis. Reste donc la
Cour Pénale Internationale qui jouit d'une compétence
générale et permanente. Etant donné que son statut
consacre non seulement la protection du personnel humanitaire mais
également leur participation devant la Cour, les modalités
procédurales méritent d'être étudiées.
1) La compétence de la CPI
La Cour pénale internationale est compétente
à l'égard des crimes de génocide, crimes contre
l'humanité, crimes de guerre et crimes d'agression, à condition
que ces crimes aient été commis sur le territoire d'un Etat
partie au Statut ou que le crime ait été commis par le
ressortissant d'un Etat partie au Statut71(*). La Cour est aussi compétente si un Etat
n'ayant pas ratifié le statut fait une déclaration par laquelle
il reconnaît la compétence de la Cour. Enfin elle est
compétente pour ce qui concerne les crimes mettant en danger la paix et
la sécurité internationale ou y portant atteinte, et dont le C.S
la lui défère.
2) Les modalités procédurales de
saisine
Le Statut de Rome prévoit trois moyen de saisine de la
Cour : Le Conseil de sécurité72(*) de l'Organisation des Nations Unies peut renvoyer une
situation devant la cour en vertu du chapitre VII de la Charte (a), le
Procureur peut ouvrir une enquête en vertu de l'article 1573(*) (b).Un Etat partie peut
saisir le procureur de la CPI d'une situation dans laquelle un ou plusieurs des
crimes visés à l'article 5 semblent avoir été
commis(c).
a) La saisine de la Cour par le Conseil de
Sécurité
Organe suprême sur le plan international, le Conseil de
Sécurité de l'ONU conformément aux buts et principes de
l'ONU peut saisir la Cour aux fins de l'ouverture d'une enquête en cas de
crimes de guerre ou d'atteintes portées à l'égard du
personnel humanitaire.
Cette saisine se fait par le biais d'une Résolution
adoptée conformément à la Charte des Nations Unies en son
chapitre VII. Notons cependant que, aucune poursuite ne peut être
engagée pendant les douze mois qui suivent la date à laquelle le
CS a saisi la Cour.
b) La saisine par le procureur proprio
motu
Le statut de Rome prévoit que le procureur peut
personnellement prendre l'initiative d'ouvrir une enquête concernant les
crimes dont la cour a compétence. Indépendant, il peut ouvrir une
information sur la base de renseignements obtenus non seulement d'Etats,
d'Organisations internationales et intergouvernementales, mais encore
d'Organisations non gouvernementales74(*). Pour ouvrir une enquête le procureur doit
préalablement obtenir une autorisation de la Chambre.
Cette demande d'autorisation est faite par écrit et
se doit d'être « motivée »75(*). Le procureur communique
à ladite chambre toutes les informations qu'il détient de
l'affaire. Ceci conformément à la règle 5376(*) du texte sur le
Règlement de procédure et de preuve.
A la fin de l'enquête, la chambre préliminaire
tient une audience pour confirmer les charges sur lesquelles le procureur
entend se fonder77(*).
L'audience se déroule en présence de l'intéressé
qui dans notre cas est un membre d'une organisation humanitaire victime et du
procureur.
Notons cependant que les raisons pour lesquelles le procureur
peut s'auto saisir sont multiples. Il peut notamment s'agir de la mauvaise
volonté manifeste d'un Etat à poursuivre un de ses ressortissants
qui a commis à l'égard d'un humanitaire une infraction78(*). Cette situation est courante
lorsqu'il s'agit des exactions commises par des éléments de
forces armées et polices pendant un conflit.
Il faut souligner ici que, lorsque le procureur prend
l'initiative de s'autosaisir d'une affaire, il notifie tous les Etats parties
au dit statut79(*). Cette
notification peut se faire selon les cas à titre confidentiel ou pas.
Cette notification se justifie par le fait que, les Etats
parties au statut pourraient normalement être compétents pour
connaître de ces crimes. Alors, afin d'éviter toute violation de
la règle non bis in idem stipulée par l'article
2080(*) dudit statut, le
procureur leur informe par écrit que ladite affaire fait
déjà l'objet d'une enquête devant la Cour.
c) La saisine de la Cour par un Etat partie au statut
de Rome
Tout Etat partie au statut de Rome peut conformément
à l'article 14 saisir la Cour afin qu'elle puisse ouvrir une
enquête sur des atteintes à l'égard du personnel
humanitaire. A cet effet, cet Etat devra mettre à la disposition de la
Cour des éléments de preuves tels qu'énoncés
à la règle 63 du règlement de procédure et de
preuves et à l'article 69 du statut ; éléments de
preuves qui pourront attester de la pertinence de la situation. Par ailleurs,
cet Etat devra notifier la Cour afin que celle-ci ne puisse pas à son
tour se saisir de la même affaire. Ceci peut être l'oeuvre de tout
Etat partie au statut ou alors d'un Etat tiers au statut de la Cour
Pénale Internationale. Au cas où l'affaire est
déférée devant le procureur par un Etat non partie,
celui-ci dépose auprès du greffier une déclaration
manifeste de son désir de jouir de la compétence de cette
juridiction81(*).
Soulignons enfin que deux voies de recours sont prévues devant la Cour.
Il s'agit de l'appel et de la révision
Il demeure néanmoins vrai que, lorsque l'affaire est
saisie par une juridiction des Etats précités, il s'agit d'un
contentieux interne de la répression, les règles n'étant
pas les mêmes qu'à l'échelon international.
B - L'organisation de la répression au niveau
national
Les tribunaux nationaux sont le lieu par excellence où
s'exerce la répression des crimes de guerres. Ceci en ce sens que, comme
nous l'avons dit plus haut, la Cour pénale internationale a une
compétence complémentaire à l'égard des
juridictions nationales. Celles-ci jouent un rôle
prépondérant dans la poursuite des criminels de guerre.
Les Etats doivent poursuivre les personnes accusées de
crimes de guerre devant leurs propres tribunaux ou procéder à
leur extradition82(*). Ils
se doivent de dénoncer avec la plus grande fermeté toute
atteinte portée à l'égard du personnel humanitaire et
envisager des mesures adéquates pour obtenir d'acteurs au conflit le
respect du personnel humanitaire. C'est en ce sens que, les juridictions
internes peuvent connaître des atteintes ou infractions à
l'égard du personnel humanitaire sur la base de trois types de
compétence83(*) : la compétence territoriale, la
compétence personnelle et la compétence universelle.
1) Au titre de la compétence
universelle
Il s'agit d'un système de compétence encore
appelé « universalité du droit de
punir »84(*). Il
donne à la juridiction du lieu d'arrestation vocation à juger
les infractions commises sans distinction du lieu de commission et sans
égard à la nationalité de l'auteur ou de la
victime85(*).
En application de cette règle, tout Etat ayant
voté une loi sur la compétence universelle peut poursuivre tout
auteur d'infraction à l'égard du personnel humanitaire qu'il soit
ou non son ressortissant.
C'est en ce sens que, le droit positif camerounais par exemple
dispose que, la loi de la république est compétente pour
connaître de ces infractions, quel que soit le lieu de
commission86(*). Cette
disposition du code pénal camerounais constitue une certaine garantie
quant à la répression des crimes internationaux. En effet vu
l'instabilité qui sévit au sein de certains Etats du continent,
étant donné que, le personnel humanitaire est appelé de
part sa mission à y intervenir, cette loi permet aux juges camerounais
s'il est saisi pour des cas d'exactions, de connaître de l'affaire.
2) Au titre de la compétence pénale
traditionnelle
Toute infraction commise à l'endroit du personnel
humanitaire peut être réprimée devant les juridictions
nationales du lieu de commission de l'infraction. Il s'agit là du
critère de la territorialité ou compétence territoriale.
a- Le critère de la territorialité
Ce principe suppose que, seuls les tribunaux de l'Etat sur le
territoire duquel le crime a été commis ont compétence
pour le connaître87(*).
Certains arguments sont généralement
cités en faveur de la compétence territoriale. On estime que
l'enquête est plus facile à faire sur les lieux même du
crime car on y retrouve les traces ainsi que les éléments de
preuve. Enfin, c'est dans le lieu de commission de l'infraction que les buts
d'intimidation et de sauvegarde sociale de la peine doivent être atteint.
Autrement dit, la satisfaction à donner l'opinion publique par le
châtiment des coupables ne se produira pleinement que si celui ci a lieu
précisément là où le crime a été
commis. Cette justification est assez pertinente. En effet, concernant la
situation des humanitaires, il serait plus facile de mettre la main sur
l'auteur de l'infraction lorsqu'on se trouve sur les lieux du crime. Par
ailleurs, il serait plus indiqué de poursuivre les coupables au lieu de
commission dans la mesure où l'audition des témoins peut aider
à reconstituer les faits et à mettre la main sur le coupable.
De ce point de vue, il revient aux autorités d'un pays
en situation de guerre interne de poursuivre devant ses juridictions tout acte
prohibé à l'encontre des missions d'assistance humanitaire.
Notons qu'en droit français, point n'est besoin que l'acte tout entier
ait été commis sur ce territoire pour être de la
compétence du juge pénal français. Dès lors qu'un
seul de ses faits constitutifs a eu lieu sur ledit territoire, le droit
pénal français est applicable à l'affaire88(*).
b- Le critère de la
personnalité
C'est un système dans lequel la loi pénale
s'attache aux personnes et les suit partout où elles vont. Ces personnes
peuvent être soit des délinquants, soit des victimes. Dans le
premier cas, il s'agit de la compétence ou personnalité active.
Dans le second cas, c'est la compétence ou personnalité
passive.
-Le système de la personnalité active rend
compétente la juridiction du délinquant c'est à dire celui
qui a commis une infraction contre le personnel humanitaire. Il sera
jugé et condamné par le droit pénal de son pays. En
d'autres termes, la compétence active consiste à ce que chacun
soit jugé d'après sa loi d'origine.
-Le système de la personnalité passive par
contre est celui qui consiste à appliquer sur une victime la
législation de son pays d'origine. En effet, le but d'une loi
pénale étant de protéger les intérêts publics
et privés, l'on pourrait dire que la loi pénale de la victime
soit celle en même de mieux la protéger. C'est le cas par exemple
d'un membre de MSF- France qui est victime d'une agression en Cote d'Ivoire et
dont on parvient à mettre la main sur le coupable. La France pourra en
toute légalité se saisir de l'affaire et jugé devant les
juridictions françaises. Rappelons à cet effet qu'elle est l'un
des pays à avoir voté la loi sur la compétence passive.
En effet, la France a adopté ce système en vu
d'assurer la protection de ses nationaux à l'étranger89(*). Notons que cette règle
s'applique aussi à titre principal à un Etat lorsqu'il est
victime d'une infraction. Dans ce cas là, on parle plutôt de
« principe de réalité ».
Ce principe n'est pas sans critique. En effet, le risque
d'assister à un procès inéquitable est grand. Le juge
étant donné la nationalité de la victime pourra trancher
partiellement c'est-à-dire en toute subjectivité.
Section II : La réparation civile, une
conséquence de l'action répressive
Le droit à la réparation pour les victimes d'une
violation est un principe bien établi du droit international. Depuis la
fin de la guerre froide, l'obligation d'offrir réparation aux victimes
de violation des droits de l'homme et du droit international a
été réaffirmée par un grand nombre de
traités et déclarations internationales.
La réparation a été décrite en
droit international public général comme ayant "pour but de
soulager la douleur et de rendre justice aux victimes en supprimant ou
réparant dans la mesure du possible les conséquences de l'acte
dommageable. La recherche de la réparation est perçue par
beaucoup d'experts comme revêtant des avantages thérapeutiques et
psychologiques assez significatifs pour la victime. Cette obligation est
consacrée et reconnue en droit international. L'octroie des dommages
intérêts est important pour la réhabilitation de la victime
individuelle et a une valeur compensatrice aux yeux de celle-ci et de la
société.
Cependant, tout préjudice ne donnant pas lieu à
réparation, pour qu'une action en réparation soit recevable, il
faudrait que certaines conditions aient été remplies.
Paragraphe I- Les conditions de la
réparation
L'action en réparation suppose l'existence d'une faute
(A), d'un préjudice ou dommage (B) un lien de causalité (C) et
l'imputabilité de la faute (D)
A - Un fait dommageable : la
faute90(*)
Elle est à la fois une des conditions de la
responsabilité civile et son fondement. Elle peut être un fait ou
une omission, un fait illicite imputable à son auteur91(*). Ces actes délictuels
ont été qualifiés en droit international humanitaire de
crimes de guerre. On entend par « crimes de guerre » les infractions
graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir
des actes visant des personnes ou des biens protégés par les
dispositions de ces Conventions et autres textes internationaux.
Il s'agit des violations du droit international humanitaire
énoncées au Protocole II ainsi que ceux du statut de la Cour
Pénale Internationale. A savoir le fait de lancer des attaques
délibérées contre la population civile en
général, et en particulier contre le personnel apportant secours
au personnel humanitaire, les bâtiments, le matériel, les
unités et moyens de transport sanitaires, le personnel utilisant les
emblèmes distinctifs de la Croix-Rouge ou du Croissant Rouge, contre les
missions d'aide humanitaire ou de maintien de la paix des Nations Unies.
La commission de tous ces actes, quel que soit leur auteur
constitue une infraction grave en droit international humanitaire. Les victimes
seront donc fondées à demander réparation. Mais retenons
que la faute certes est le fondement de l'action civile mais elle est
cumulative à d'autres conditions.
B- La nécessité d'un
préjudice
A la différence de l'action pénale, l'action
civile n'est pas une punition mais une réparation. La première
diffère de la seconde à bien des égards, ceci tant au
niveau de la source, de la sanction que du résultat. Le délit
civil répond à la règle « pas
d'intérêt pas d'action. »
Elle aboutit au paiement d'une indemnisation encore
appelée dommages -intérêts à la victime. En plus
d'exister, le préjudice doit être certain, réel et actuel.
L'on ne saurait demander réparation pour un préjudice qu'on
projette subir dans le futur. Par ailleurs, l'on ne pourra non plus obtenir
réparation suite à un préjudice imaginaire. La
réalité du préjudice doit pouvoir être perceptible.
Il doit pouvoir être établi que l'acte posé a
réellement été préjudiciable au plaignant (victime)
et que celui-ci mérite réparation.
A cet effet, les victimes de crimes graves aux conventions de
Genève ou crimes de guerre recevront des dommages et
intérêt de par le préjudice92(*) que leur aura causé soit un des
belligérants ou alors un civil.
C-le lien de causalité
Il s'agit en effet du lien de cause à effet entre
la faute d'une personne ou le rôle d'une chose et le préjudice
subi par un tiers93(*). Le
dommage subi doit pouvoir être imputé à son auteur. Il
établit la relation entre la cause et le dommage. Dans le cadre d'une
atteinte causée à l'endroit d'un humanitaire, il est
nécessaire d'établir que le fait d'un individu est à
l'origine de cette atteinte dont est victime l'agent en question. C'est le
lien entre l'infraction et le mal qu'a subi la victime. Pour que la
responsabilité de l'auteur du dommage soit engagée, il faut qu'il
y ait entre la faute et le dommage un rapport direct de causalité dont
la cause incombe au demandeur.
D- L'imputabilité de la faute
En droit international coutumier, il a
été admis que, les actes des personnes, groupes ou organisations
peuvent être imputés à un Etat lorsqu'ils agissent en tant
qu'organe de facto de cet Etat. Tel est le sens de cette disposition du projet
de commission du droit international : « Le comportement de
tout organe de l'Etat est considéré comme un fait de l'Etat
d'après le droit international que cet organe exerce des fonctions
législatives exécutives judiciaires ou autres quelle que soit la
position qu'il occupe dans l'organisation de l'Etat et quelle que soit sa
nature en tant qu'organe du gouvernement central de cet Etat94(*) ». Il s'agit
du résultat d'un processus intellectuel nécessaire pour combler
l'écart entre l'infraction de l'organe ou du responsable et
l'attribution de la violation et de la responsabilité de l'Etat.
Grosso modo, ce sont les hypothèses où, les
actes des particuliers sont attribués à l'Etat. En particulier
dans les cas où ces individus peuvent être qualifiés
fonctionnaires de facto.
Mais il convient de relever ici qu'il ne suffit pas que ces
derniers agissent au compte de l'Etat pour que ces actes lui soient imputables.
Il faudrait qu'il soit établi qu'il y avait de la part de cet Etat un
pouvoir de direction ainsi qu'un lien effectif de subordination. C'est en ce
sens que pour l'espèce activités militaires et
paramilitaires au Nicaragua,95(*) il avait été
établit que les Etats Unis d'Amérique avaient effectivement eu le
contrôle des activités militaires et paramilitaires qui avaient
conduit aux violations en question. L'effectivité de ce contrôle
suffisait donc à établir la responsabilité des Etats Unis
d'Amérique.
Tout Etat dont la responsabilité est établie de
par les actes d'une organisation émanant de son pouvoir verra sa
responsabilité civile engagée et se devra de réparer tout
préjudice causé par un ou tous les membres de cette organisation.
Paragraphe II- La mise en oeuvre de la
responsabilité civile en cas d'infraction contre le personnel
humanitaire
La réparation civile en matière pénale
répond à certaines exigences. En ce sens que, porté devant
le juge pénal, la victime n'a pas l'opportunité des poursuites.
Elle ne pourra déclencher le procès que par une plainte avec
constitution de la partie civile. Ce qui se trouve être anormal lorsqu'on
sait que « l'obligation de répondre est aussi obligation
de réparer le dommage causé par l'infraction à la victime
personnelle et directe de l'infraction »96(*). De ce point de vue,
l'humanitaire victime d'une atteinte n'est certes pas admis à demander
directement réparation devant le juge pénal, mais pourra intenter
une action civile à des fins « répressives97(*). »
Il pourra obtenir réparation selon les cas en fonction
de l'institution ou de l'instance face à laquelle elle se trouve.
A- La réparation prévue par les
textes
Que le procès ait été porté
devant une juridiction interne ou internationale, la victime jouit d'un droit
à la réparation du préjudice qu'il a subi. Sur le plan
national, celle ci pourra se fonder sur la responsabilité du fait
d'autrui pour les cas où l'acte a été commis par un
individu isolé, ou alors sur la responsabilité du commettant du
fait de son préposé pour les cas où l'acte
émanerait d'un membre de l'armée. Par ailleurs, en divers textes
internationaux pourraient aussi fonder l'octroi d'une indemnisation devant la
CPI.
1- Le code civil
Le code civil en ses article 1382 et suivant prévoit
la responsabilité civile non seulement pour les dommage qu'on a
causé soit même, mais aussi pour ceux qui sont causés par
les personnes dont on a la charge.
a) l'article 1382 : la réparation du fait
personnel
Toute personne victime a le droit d'obtenir du responsable,
réparation du préjudice qu'elle a subi. Tel est le sens de
l'article 1382 qui dispose : « Tout fait quelconque de
l'homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel
il est arrivé de le réparer »98(*). Toute personne qui commet une
infraction à l'égard du personnel humanitaire se doit de
réparer. Le juge qui condamne le responsable à réparer
ne le frappe pas d'une peine mais l'oblige à réparer le dommage.
Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi
exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de
replacer la victime aux dépens du responsable dans la situation
où elle se serrait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu
lieu. La réparation octroyée au personnel humanitaire ne peut
cependant pas le replacer dans sa position initiale, à moins qu'elle
n'émane d'une atteinte portée sur un bien matériel.
Lorsque le préjudice causé au personnel humanitaire est physique,
la réparation dans ce cas servira juste à compenser le
préjudice.
b) l'article 1384 : la responsabilité du
commettant du fait de son préposé
L'Etat est civilement responsable des exactions commises par
les membres de ses troupes armées. L'article 1384 du code civil dispose
que l'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son
propre fait, mais aussi de celui qui est causé par le fait des
personnes dont on répond, ou des choses que l'on a sous sa
garde. Il s'agit là de la responsabilité du commettant du
fait de son préposé. Alors l'Etat se doit de réparer tout
dommage causé à un personnel humanitaire par un membre de son
armé. Ceci se justifie par le fait que, lorsqu'une armée est sur
un champ de bataille, elle représente une Nation. Alors toutes les
exactions qu'elle commettra seront imputables à leur Etat. Il faut aussi
noter que la responsabilité civile de l'Etat peut aussi être
engagée dans le cadre des actions d'une milice. C'est l'hypothèse
où, Il a été constaté que cet Etat a soutenu
l'action de la milice. Alors, l'Etat sera tenu de réparer tout dommage
causé à un humanitaire par cette milice.
2- Le Statut de la Cour pénale internationale et
le Règlement de Procédure et de Preuve
Le Statut de la Cour Pénale Internationale
prévoit la réparation aux victimes des infractions qui sont de sa
compétence. Son règlement donne une ouverture de la notion de
victime et la décrit comme étant : « une
personne physique qui a subi un préjudice du fait de la commission d'un
crime relevant de la compétence de la Cour.»99(*) Il confère aux victimes
la possibilité de participer aux procédures100(*) et d'obtenir
réparation, tout en établissant les principes applicables. Il
s'agit selon les cas d'une indemnisation, de la restitution, ou de la
réhabilitation101(*). Le statut de la Cour dispose en effet que, la Cour
pourra rendre contre une personne condamnée une ordonnance indiquant la
réparation qu'il convient d'accorder aux victimes102(*) ; cette
réparation s'octroie en tenant compte du préjudice103(*).
a) Le principe du restitutio in
intégrum
Fondamentalement, la restitution en droit international avait
pour but de remettre la chose en l'état où elle était
avant le dommage. La restitution de ce dont la victime avait
été indûment privée. Il pouvait s'agir de la remise
en liberté, de la réinsertion de la victime dans à son
emploi ou encore la garantie de non répétition.
Cependant, dans le cadre d'une atteinte portée sur un
personnel humanitaire, il serait difficile de pouvoir appliquer ce principe de
restitutio in intégrum. En ce sens que, lorsque le dommage est physique
on ne peut pas ramener l'humanitaire dans son état initial. C'est
pourquoi, la réparation se fait au travers de l'allocation des dommages
et intérêt en compensation du préjudice. Vue que le dommage
subi par la victime (mort ou atteinte à l'intégrité
physique) ne peut être restitué. Mais par contre pour le cas de
l'enlèvement d'un personnel humanitaire comme c'est très souvent
le cas, la restitution peut consister pour l'auteur de l'infraction à
libérer la victime. Mais de manière générale
l'application du principe restitutio in intégrum demeure complexe en ce
qui concerne les infractions commises sur le personnel humanitaire. C'est la
raison pour laquelle la réparation va consister en l'octroi d'une
compensation pécuniaire et dans certain cas à un traitement en
vue de rétablir l'équilibre psychique de la victime.
b) La réhabilitation psychologique ou traitement
post traumatique
Les guerres traditionnelles entre Etats ont cédé
la place à une augmentation des conflits régionaux et à la
diversification des types de belligérants, rendant par ce fait les
conditions de travail difficiles pour les travailleurs humanitaires. Sur le
terrain, ils sont de plus en plus la cible de différents types
d'agression : actes terroristes, viols, prises d'otages, voire mort de
compagnons de travail104(*). Ils sont soumis par là même à
un stress psychique105(*) et physique auxquels s'ajoutent des conditions de
vie pénibles, allant parfois jusqu'à l'insupportable et à
des situations traumatiques aux conséquences souvent
irréversibles. Alors, la charge, individuelle et collective, des
émotions et des réactions de stress, qui pèse sur leurs
épaules, est lourde. Pour protéger leur santé, ils
doivent être pris en charge aux fins d'une réhabilitation
psychologique. Elle consiste au traitement des blessures psychiques dont
souffrent les intervenants humanitaire suite aux différentes
épreuves auxquelles ils font face durant les missions d'assistance
humanitaire. C'est une reconnaissance de la réalité d'une
blessure psychique supportée dans la douleur, l'impuissance et
l'horreur. Généralement, c'est l'oeuvre de l'employeur106(*), l'organisation ou la
société, non directement touchés par
l'événement ou des proches de la victime. Les personnes à
charge de ce traitement doivent écouter attentivement la victime, passer
du temps avec elle, lui offrir une assistance ainsi qu'une oreille
attentive107(*).
3- La déclaration des principes fondamentaux de
justice relatifs aux victimes de la criminalité et d'abus de pouvoir de
1985
Elle a été adoptée par
l'Assemblée Générale des Nations Unies en 1985. Elle
recommande aux Etats de prendre des mesures appropriées sur le plan
national, sous régional et international afin de soulager la
détresse des victimes. Elle leur demande explicitement d'octroyer
réparation aux victimes même pour les cas où la faute ne
leur est pas imputable. Cette déclaration recommande également
aux Etats de mettre sur pied des fonds nationaux d'indemnisation des victimes
afin de prévoir les cas où le pays dont la victime est
ressortissante ne peut pas le faire. Il convient de noter que cette
déclaration est une annexe à la Résolution 40/34
adoptée par l'Assemblée Générale en date du 29
novembre 1985.
4- Les principes fondamentaux et les directives sur le
droit au recours et à réparation des victimes du droit
international humanitaire adoptés par la Commission des droits de
l'Homme en avril 2000
Ces principes concernent le droit à un recours et
à la réparation des victimes de violation des droits de l'homme
et du droit humanitaire. Ils imposent aux Etats une adéquation de la
législation interne aux normes internationales ; les obligent
à assurer réparation aux victimes pour les violations du droit
international humanitaire causées par eux (les Etats). Aider les
victimes à obtenir indemnisation des auteurs d'infractions graves au
droit humanitaire. Ces principes les convient également à assurer
la réparation des violations dont ils ne sont pas à
l'origine ; ceci lorsque l'auteur de l'infraction ne peut pas indemniser
ou alors refuse de le faire.
B- Les réparations émanant d'une
convention passée par le personnel humanitaire
Il s'agit ici des autres types d'indemnisation dont peut
bénéficier le personnel humanitaire de part son statut de
travailleur ou suite à son contrat d'assurance.
1- L'indemnisation suite à la souscription d'un
contrat d'assurance
Le contrat d'assurance vie est un lien juridique qui oblige
l'assureur à garantir le risque et le souscripteur à payer la
prime108(*). Il permet
à celui qui le souscrit de donner aux siens, dans une certaine mesure la
sécurité que son décès risquerait de compromettre.
C'est un contrat consensuel, il est réputé conclu dès
l'accord verbal des parties. Un écrit n'est exigé qu'à
titre de preuve. Il est aléatoire en ce sens que seul le risque
incertain peut être assuré. Alors, le personnel, étant
donné le contexte dangereux dans lequel ils opèrent, souscrit
généralement auprès des compagnies un contrat d'assurance
sur leur vie. En cas de sinistre corporel ou de décès, ces
compagnies se chargent d'indemniser soit les ayants droit de l'assuré ou
alors le concerné au cas où le dommage n'a pas porté
atteinte à sa vie.
Mail il faut souligné que cette couverture d'assurance
n'est pas toujours automatique et connaît quelque fois certains
problèmes. L'illustration est celle d'un membre du personnel d'une ONG
américaine qui avait été grièvement blessé
en Somalie par une mine occasionnant par là la perte de sa jambe. Mais,
en dépit du fait que cette ONG était assurée contre les
risques de guerre, la compagnie d'assurance a nié sa
responsabilité sous prétexte que ce dernier ayant subi cet
accident en plein travail devait se faire indemniser par la compagnie
d'assurance américaine qui rembourse les frais occasionnés par
l'accident de travail. Face à ce type de situation, l'agence des
Etats-Unis pour le développement international (USAID) a mis sur pied un
programme spécial d'indemnisation en vue de combler l'écart des
couvertures d'assurances109(*).
2-L'indemnisation due par l'organisme employeur
conformément au droit du travail
De manière générale, tout travailleur
dispose en vertu du droit de travail d'un contrat qui le lie à son
institution ou son organisme de fonction. Ce contrat de travail est un
élément essentiel dans la vie professionnelle de l'employé
en ce qu'il crée un lien juridique entre l'employé et son
employeur. Le législateur camerounais le définit dans l'article
23 du code du travail comme suit : « le contrat de
travail est une convention par laquelle un travailleur s'engage à mettre
son activité professionnelle sous l'autorité et la direction d'un
employeur en contrepartie d'une
rémunération »110(*). Ce contrat de travail confère à
chacune des parties au contrat des droits ainsi que des obligations de l'un
envers l'autre.
En vertu des règles régissant le droit du
travail, est considéré comme accident de travail et obligeant
l'employeur à verser une indemnisation, tout accident survenu à
un travailleur entre autres par le fait ou non à l'occasion de son
travail111(*). Sur la
base de cette disposition fondamentale du droit du travail, le personnel
humanitaire, qui dans l'exercice de ses fonctions subit des dommages corporels
pourra légitimement bénéficier d'une indemnisation
calculée selon que son contrat de travail soit à durée
déterminée ou indéterminé, en fonction aussi de son
indice d'ancienneté. Dans tous les cas étant donné que
l'accident ou alors le décès de ce personnel est survenu alors
qu'il était en pleine mission d'assistance humanitaire, l'ONG ou alors
l'institution spécialisée qui l'emploie se chargera de
l'indemniser à juste titre.
3- L'indemnisation en cas d'accord passé entre
l'organisme employeur et une institution
en cas d'accord passé entre un organisme humanitaire
et une autre institution ou un autre organisme, il est souvent question de
savoir qui se chargera de l'indemnisation en cas de dommage. La
définition que nous avons donnée précédemment du
contrat de travail met en exergue trois éléments. Il s'agit de la
prestation, du salaire et du lien de subordination. Ce dernier
élément constitue la base même du contrat de travail. Il
traduit le fait que le salarié effectue son travail sous la direction de
l'employeur dont les ordres doivent être respectés, et crée
une dépendance juridique entre ces derniers112(*). En nous inspirant de cette
règle juridique, l'on pourra dire que, lorsque certains personnels de
cette ONG vont travailler aux cotés des Nations Unies ou d'une
institution spécialisée de cet organe, le lien juridique de
subordination demeure avec son personnel. Il en est de même pour le
contrat de travail car le fait qu'il passe un accord avec une autre institution
ne rompt pas les contrats qu'ils avaient conclus antérieurement avec
leur organisation. Alors logiquement, en cas de problème le personnel de
cette ONG bien que travaillant aux cotés d'une autre institution se
retournera légitimement contre son employeur initial car c'est avec elle
qu'il a signé le contrat de travail.
Mais il est tout de même à relever que, dans
certains cas, l'institution avec qui l'ONG a passé l'accord peut se
charger en cas de problème d'indemniser le personnel. Mais ils doivent
au préalable l'avoir explicitement prévu dans les clauses de
l'accord. C'est ce qui ressort de l'article 7 de l'accord cadre passé
entre le Nicaragua et la Suisse113(*). En effet, en application de cet accord, les deux
parties engagent respectivement leurs responsabilités pour des
prétentions liées directement à des dommages
résultant directement des actes commis au cours des réalisations.
Le Nicaragua exonère le personnel suisse de toute responsabilité
envers lui et vice versa.
En somme, nous dirons en guise de conclusion à ce
chapitre qu'en plus d'être protégé, par les textes, le
personnel humanitaire dispose d'un arsenal d'institutions en même de
réprimer les atteintes portées à leur égard ou sur
leurs biens. Les moyens sont mis à leurs dispositions tant à
l'échelon national qu'international pour assurer le respect de leurs
droits. Au niveau national, le juge pénal peut être saisi de
l'affaire au titre de trois grands principes du droit pénal. A savoir en
vertu de la règle de la territorialité, de la personnalité
passive ou active et enfin de la loi sur la compétence universelle. Sur
le plan international, la Cour Pénale Internationale, au moyen de ses
modalités procédurales élaborées dans le texte de
règlement de procédure et de preuve fait de la répression
des infractions à l'égard du personnel humanitaire une
réalité. Cette répression qu'elle soit sur le plan
national ou international peut déboucher à l'octroie des dommages
intérêts à la victime. Ces dommages-intérêts
sont prévus par les textes et peuvent être octroyés devant
le juge local ou international. Il existe également d'autres mesures de
réparation qui sans être prévues par les textes permettent
tout de même de réconforter l'humanitaire victime
Il apparaît clairement que la protection juridique du
personnel humanitaire est effective. En amont, elle est fortement
consacrée par des textes et traités internationaux. En aval, par
des institutions qui assurent la sanction des éventuels
délinquants en cas d'atteintes. Mais malgré cette forte
consécration juridique, il se trouve malheureusement que, ces derniers
dans l'exercice de leurs missions font toujours l'objet des attaques
ciblées. Ce qui sur un plan purement pratique remet un peu en question
l'efficacité de cette protection.
DEUXIEME PARTIE : UNE PROTECTION MITIGEE ET
PERFECTIBLE
La protection juridique du personnel humanitaire est
affirmée par une forte consécration textuelle. Mais, au regard
des faits, certains éléments nous montrent que cette protection
est d'une efficacité relative (chapitre III). Dès lors elle
mérite d'être affinée (chapitre IV).
CHAPITRE III : LES FACTEURS D'UNE PROTECTION
LIMITEE
La protection juridique du personnel humanitaire dans la
pratique demeure relative. Cette relativité est due à un
certain nombre de facteurs qui sont liés tant à la nature des
conflits (section I) qu'aux procédures juridictionnelles (Section II)
Section I- Les facteurs liés aux conflits.
La prolifération de guerres civiles ou conflits
internes particulièrement meurtriers menacent la paix et la
sécurité internationale et causent des souffrances terribles aux
populations civiles et aux organisations humanitaires.
Depuis la fin de la guerre froide, l'on est passé des
guerres inter-étatiques aux guerres infra étatiques114(*). Le cas du continent
africain est assez révélateur à ce propos. Les conflits
internes ou guerres civiles sont devenues l'apanage des pays du tiers monde.
Certes certains pays de l'Europe à l'instar de l'Ex Yougoslavie en
Europe de l'Est ont connu ce type de conflit mais il n'en demeure pas moins
qu'ils sont devenus le propre des Etats africains. Génocides, conflits
identitaires, rébellions et autres sont de plus en plus observables au
sur ce continent.
Ces types de conflits mettent aux prises des acteurs aux
logiques de guerre différentes des schémas classiques que l'on
avait déjà des conflits armés. En effet ces acteurs
opèrent au mépris des règles élémentaires du
droit international humanitaire. Dans un tel contexte, la
sécurité des populations civiles est plus que jamais
menacée et particulièrement celle des missions d'assistance
humanitaire qui y oeuvrent pour le soulagement des populations en
détresse.
Paragraphe I -L'évolution de la nature des
conflits
La nature des conflits dont les missions d'aide humanitaire
doivent s'occuper a radicalement changé. La zone de conflit est mal
définie, et correspond souvent à l'ensemble du territoire d'un
pays. Dans ces situations de conflits identitaires, les acteurs sont
animés par une haine atroce. Les causes de ces conflits sont de divers
ordres et varient en fonction des pays. C'est ainsi que l'on observe des causes
d'ordre politique (A) c'est à dire en rapport très direct avec le
gouvernement en place et sa politique de gestion, et les causes typiquement
liées à l'aspect économique (B)
A- Les causes politiques
L'on remarque dans la pratique que ces conflits et
particulièrement en Afrique sont la conséquence logique des
pouvoirs dépourvus de toute légitimité. Il se trouve que
l'Etat en Afrique a perdu le sens de ses fonctions régaliennes. Le
régime même lorsqu'il se prétend démocratique, viole
de manière flagrante tous les grands principes gouvernant ce type de
gouvernement. La fragilisation de l'Etat en Afrique a pour corollaire
l'émergence de ces nouveaux types de conflit.
Il est clair que, plus un régime est autoritaire,
moins il y a des possibilités pour les peuples de se faire entendre.
Dès lors il y a rupture de dialogue et la seule voie qui reste est celle
du recours à la violence qui se fait par le biais des armes. Le pouvoir
est privatisé par une faction de gouvernants qui détiennent tous
les moyens de l'Etat et les usent à leur gré au détriment
des populations.
Pour se maintenir au pouvoir ces gouvernants recourent
à la terreur pour asseoir leur légitimité. La
conséquence d'une telle gestion du pouvoir est que les populations
opprimées ne pouvant pas continuer à vivre dans ces conditions
prennent le chemin de la rébellion et se constituent en milices donnant
ainsi naissance à des guerres civiles (rébellion, conflits
identitaires) au cours desquelles périssent des millions de
personnes.
Tout régime autoritaire est un régime
tyrannique, où les libertés individuelles des peuples sont
bafouées. La démocratie y est la chose la moins partagée.
Le peuple n'exerce aucunement sa souveraineté.
La terreur et la misère dans lesquelles vivent les
populations suffisent à légitimer dans la tête des milices
toutes les atrocités qu'ils peuvent commettre pendant la guerre.
B- Les causes économiques
La non répartition des biens publics, le chômage,
la pauvreté, et bien d'autres motifs encore sont les raisons qui
poussent les peuples à remettre en cause la légitimité du
pouvoir des gouvernants africains.
Les frustrations socio-économiques sont l'apanage des
peuples africains. Ces derniers sont emprunt à un quotidien fait de
pauvreté. Les situations d'inégalité économique
sont criardes. Les biens publics sont répartis entre une
catégorie privilégiée. L'Etat ne dispose plus de devoirs
envers ses populations. Face à une telle situation, la
légitimité du pouvoir central ne peut être que
contestée et dès lors, la seule chose raisonnable à l'avis
de ces peuples lésés serait inévitablement le recours aux
armes.
Dans un tel contexte, comment espérer que soit
accueilli favorablement l'organisme qui vient «plaider la cause
humanitaire»115(*) l'insécurité devient dès lors
le lot non seulement des seules victimes, mais elle atteint aussi le personnel
humanitaire qui ne demande qu'à soulager les désastres de la
guerre.
Il convient de mentionner que, certaines guerres en Afrique
sont soutenues et appuyées par des compagnies minières
transnationales, ainsi que par certains pays du Nord. Ces pays et organisations
transnationales organisent des rébellions pour fragiliser le pouvoir
central en vue d'asseoir leurs négociations de ressources
minières telles le pétrole, le diamant, le bois, le cobalt le
manganèse, l'uranium116(*). Ceci se justifie par le fait que, plus le pays
connaît une instabilité, plus prompt elle est à brader ses
ressources naturelles.
Les exemples qui illustrent bien ces cas sont ceux que nous
offrent les guerres au Congo Brazzaville, en Angola, en RDC, au Libéria,
au Soudan.
Au Congo Brazzaville cela a valu au président Pascal
LISSOUBA un coup d'Etat. En effet, ce dernier s'est vu expulsé du
pouvoir suite à une exigence de sa part des termes plus convenables en
ce qui concernait l'exploitation du pétrole congolais. Cette exigence
à l'égard de la société pétrolière
Elf Aquitaine a valu le renversement de son régime117(*).
Certes les ressources naturelles sont devenues de graves
sources de délabrement des Etats africains, mais il reste tout de
même que les puissances occidentales y contribuent
énormément car chacun veut y puiser, puissances
extérieures ou intérieures. D'où les conflits permanents
qui en réalité ne sont que de simples guerres
d'intérêts, chacun voulant (même au détriment de
pertes en vies humaines) sa part de « gâteau ». Ce
combat laisse apparaître des acteurs qui auparavant étaient
très peu connus sur la scène internationale mais qui depuis
quelques années ont presque ravi la vedette aux armées
régulières des pays.
Paragraphe II- L'émergence de nouveaux acteurs aux
conflits
Le schéma classique que l'on a toujours eu des parties
à un conflit est généralement une guerre mettant aux
prises des armées régulières de deux ou plusieurs Etats.
Mais de plus en plus avec la nouvelle donne des conflits tels que ceux
observables en Afrique, le tableau est tout autre.
Les acteurs au conflit aujourd'hui sont des factions
armées aux logiques d'actions assez étranges et bien
différentes des pratiques ordinaires de combat. De manière
générale ces factions ont très souvent des objectifs
autres que ceux des gouvernants. Ne visant pas forcement la conquête du
pouvoir, leur but est soit de se faire entendre ou, alors de mettre fin
à une situation qu'ils jugent anormale.
A- Le défaut de sensibilisation au DIH et aux
DH
Le phénomène milicien met en
présence des groupes de personnes qui ignorent les principes
fondamentaux d'un conflit armé à savoir le fait que les
populations civiles ne doivent en aucun cas faire l'objet d'une attaque. Les
réalités du Sud Soudan et du Rwanda sont en même de nous
donner un aperçu du profil de ces acteurs. Ce sont des jeunes gens qui
ont été enlevés de leurs familles pour servir de
« chair à canon118(*) ». Ceux ci avant de rentrer dans les
milices ont été violentés, violés, drogués,
victimes de sévisses sexuels et poussés à la haine et au
désir de vengeance.
En 1998 en RDC, le Président KABILA avait jeté
son dévolu sur des jeunes enfants désoeuvrés qu'on
appelait kadogo (petits enfants). Manipulés par les
coéquipiers de la rébellion de ce dernier, ces pauvres enfants
sont rentrés dans des milices. Ces délinquants avaient des
pratiques assez traumatisantes consistant à
« effacer » tous ceux qu'on leur présentait comme
étant des ennemis, détruisant ainsi tout sur leur passage.
La cruauté de ces miliciens se manifeste à
travers la perversité avec laquelle ils traitent les corps des victimes
qu'ils tuent. Dépeçages, retranchements des organes
génitaux, et autres pratiques sadiques. C'est des guerriers sans foi ni
loi qui se livrent à des actes de barbarie déstabilisants
résultant souvent de certains rites d'initiation car selon le
CICR : « certaines tribus en Afrique seraient purement
guerrières et considèreraient que tuer est une forme de
bravoure. »119(*)
Le respect de la personne humaine n'est aucunement un souci
pour ces derniers et pire encore le respect de ceux-là mêmes qui
viennent soulager les souffrances qu'ils causent.
Ils violent, kidnappent les agents des organisations
humanitaires, détournent l'aide humanitaire, ils sont plus des
malfaiteurs que des parties à un combat. Ces jeunes enfants compte tenu
des circonstances dans lesquelles ils sont recrutés, n'ont aucune
connaissance des notions de droits de l'homme et droit international
humanitaire cette méconnaissance est d'autant plus vrai qu'il a
été constaté que : « (...) de
nombreux belligérants dans le monde de l'après guerre froide
n'ont jamais entendu parler des conventions de Genève, ne connaissent
pas le CICR ni les emblèmes de la croix rouge et du croissant rouge, ou
considèrent la mort et la souffrance des civils comme des moyens
d'atteindre leurs objectifs personnels et politiques »120(*). Pour ces derniers la guerre
consiste à tuer tous ceux qui à priori ont une divergence
ethnique, religieuse ou alors raciale. Le fait qu'ils n'aient reçu de
formation sur les règles devant régir un conflit armé les
amène à criminaliser la guerre. Ces groupes
armés sans idéologie ont leurs propres logiques de guerre qui
ne s'apparentent aucunement aux logiques et règles de guerre telles
qu'enseignées aux membres des armées régulières.
B- Les conditions de vie misérable
Ces jeunes enfants recrutés dans la rue sont
généralement issus de familles très pauvres. Ce sont des
personnes qui cohabitent au quotidien avec la misère et dès lors
sont près à tout pour sortir de ces conditions de vie. Alors,
pour le moindre sou, ils se livrent à toutes sortes
d'opérations criminelles.
Dès lors, les populations civiles en
général et le personnel humanitaire en particulier en paie les
frais. Pillages, grand banditisme, kidnapping, viol et tout autres pratiques
illicites sont pour eux des moyens légitimes de combat pour pouvoir
atteindre leur but. En outre, la logistique des missions d'aides humanitaires
fait de ces derniers des cibles légitimes121(*) aux yeux des milices.
Roulant dans de grosses voitures et équipés de matériels
sophistiqués de communication (radio émetteur et autres), les
agents humanitaires sont perçus par les miliciens africains comme des
riches.
Tout ce tableau fait en sorte que ces groupes armés,
vivant dans des conditions précaires, ne peuvent pas manquer de s'en
prendre à eux (humanitaires) pour s'accaparer de leurs biens. De fait,
ces milices identifient de plus en plus les humanitaires au monde occidental
riche ; ce qui contribue à la multiplication des enlèvements
de ces derniers. En effet, les miliciens organisent des kidnappings de ces
agents humanitaires parce qu'ils espèrent obtenir en contrepartie des
rançons leur permettant de s'équiper en armement pour poursuivre
les combats.
Faute de moyens, ces derniers se transforment en
véritables prédateurs afin de s'approvisionner car ils ne
disposent pas souvent des moyens (alimentaires) nécessaires pour mener
à bien le conflit, sauf exceptionnellement lorsque ces milices sont
soutenues par une puissance étrangère, et comme l'a si bien dit
François BUIGNON : «l'économie de guerre
devient l'économie de prédation »122(*)en ce sens que les objectifs
politiques de la lutte cèdent la place aux crimes et pillages.
Mais de manière générale, le constat
dans la pratique montre que ces individus sont issus des couches sociales aux
conditions de vie très précaires, Ce qui justifie en partie cet
acharnement sur la personne des agents humanitaires.
Mais il faut relever que ces missions humanitaires ont une
part de responsabilité sur le délabrement de leurs conditions
sécuritaires ; responsabilité découlant très
souvent des attitudes suspectes qu'ils peuvent avoir sur le terrain.
Paragraphe III- L'évolution des démarches
humanitaires sur le terrain
Parmi les facteurs contribuant à mettre en mal la
protection du personnel humanitaire, l'on doit relever le fait que, ces
derniers ont quelques fois été à l'origine de
l'insécurité dont ils sont victimes. Il s'agit des situations
où le personnel humanitaire, très équipé
matériellement, fait l'objet des convoitises des groupes armés en
place (A) ; de plus, certains comportements des humanitaires sont de
nature à discréditer leur image aux yeux des combattants (B).
A- Le coté ostentatoire et rutilant des
missions humanitaires
Ces dernières années, la
pratique des missions humanitaires a beaucoup changé. Le
« paraître » prend le pas sur les missions
essentielles mêmes de l'action humanitaire. L'action humanitaire, en
plus de son coté humaniste connaît un grand essor pour des
penchants matériels. L'on pourrait pousser plus loin la
réflexion en disant que l'action humanitaire aujourd'hui est devenue une
industrie, voire un marché123(*). Elle se trouve de plus en plus guidée par
des tendances marketistes. Certains humanitaires aujourd'hui réduisent
l'action humanitaire au seul tapage médiatique qui leur permet de
recueillir des fonds auprès des bailleurs de fonds internationaux.
L'humanitaire est devenu une affaire de publicité et d'argent, ses
agents se livrant à des compétitions de tous genres entre
eux124(*). Ceci
explique l'expansion exponentielle des ONG sur les terrains de catastrophe
naturelle ou de conflit. C'est dans cette optique que Sylvie BRUNEL affirmait
que : « Les ONG humanitaires sont passées en
vingt ans du camion au satellite »125(*).
Les humanitaires dans ce nouvel élan se soucient plus
de répondre aux besoins ponctuels et présents que de prendre le
temps de réfléchir et de créer de réelles actions
durables. Ce qui suscite de vives critiques de la part de la communauté
internationale qui trouve que, l'action humanitaire ne devrait pas se limiter
à réunir des moyens pour atténuer des souffrances
ponctuelles, mais devraient plutôt mettre sur place de véritables
programmes de relais126(*).
Les humanitaires au lieu de fournir continuellement des
vivres aux populations en détresse, feraient mieux par exemple de
mettre à leur disposition des moyens de production pour que ces derniers
puissent eux même se prendre en charge. C'est ainsi que le CICR à
Kinshasa en République Démocratique du Congo a distribué
aux populations locales du matériel de jardinage en vue de
développer des activités maraîchères.
Ces dérives humanitaires sont perceptibles tant au
niveau des méthodes d'action que de leurs attitudes sur le terrain.
B- Les conduites équivoques
Il est coutume aujourd'hui de rencontrer dans la pratique des
opérations d'aides humanitaires certaines attitudes déviantes
allant catégoriquement à l'encontre des principes qui gouvernent
l'action humanitaire. C'est le cas des infiltrations au sein de certaines ONG
humanitaires par des personnes étrangères au corps qui se livrent
à des actes « extra humanitaires ». Au Rwanda en
1994, il a été constaté la présence de certaines
personnes au sein des ONG humanitaires qui se livraient à des pratiques
d'espionnage127(*) ainsi
qu'à des collectes d'information pour servir au camp adverse.128(*) Tout ceci se
déroulait sous le regard des responsables de ces organisations.
Bien plus, il a été remarqué sur le
terrain que certains logos d'organismes humanitaires ont été
utilisés abusivement en vue de transporter des armes devant servir au
conflit129(*). C'est le
cas en République Démocratique du Congo où le logo de
l'ONU ainsi que de certaines ONG étaient utilisés abusivement
pour fournir des armes à des forces armées devant entrer au
Zaïre130(*).
Toutes ces pratiques loin de garantir la crédibilité et par la
même occasion la sécurité du personnel humanitaire, sont
plutôt de nature à fragiliser la protection qui leur est
consacrée par les textes. Le drame cependant demeure le fait que,
lorsqu'une organisation humanitaire se livre à de telles pratiques, elle
met en cause la sécurité de toutes les autres organisations
humanitaires dans la mesure où, les parties au conflit auront tendance
à les identifier au corps des humanitaires tout entier.
Comme le disait si bien Cornnelio SOMMARUGA en ce qui concerne
les causes de violation du droit international humanitaire :
« [...] Ce ne sont pas les principes humanitaires qui sont remis
en cause par les belligérants. Mais d'autres facteurs interviennent qui
les amènent à ne pas se conformer »131(*) Il en ressort que, il y
a des pratiques qui très souvent emmènent les différents
belligérants à violer consciemment les règles de droit
international humanitaire. Les comportements contraires aux principes du DIH
de certains humanitaires sont de nature à pousser les groupes
armés à violer les règles et normes internationales sur la
protection du personnel humanitaire. C'est pourquoi au regard de tout ce qui
précède l'on pourrait s'accorder avec le Dr Alain Didier OLINGA
lorsqu'il déclare que : « l'humanitaire a perdu
de son innocence »132(*).
Section II - Les limites d'ordre procédural
Il est indéniable que la protection du personnel
humanitaire est effectivement consacrée par des textes. Cependant ces
dispositions textuelles ne sont pas toujours respectées à la
lettre. Par conséquent, en cas de violation de ces textes, le personnel
humanitaire se doit d'intenter une action devant les juridictions
compétentes afin que les responsables des violations soient punis. La
mise en oeuvre de cette action connaît certaines entraves qui ne sont pas
de nature à encourager ces humanitaires à aller faire valoir
leurs droits. En effet ces obstacles se situent à deux niveaux. Il
s'agit d'une part des problèmes internes aux juridictions (Paragraphe
I) et d'autres part des problèmes externes à l'instance
judiciaire (Paragraphe II).
Para I - Les facteurs internes à la justice
Ces problèmes sont notamment l'impartialité
douteuse de certains juges (A) les classements sans suite (B), le refus de
qualifier au regard de la loi(C) l'engorgement des tribunaux (D) la corruption
(E)
A- L'impartialité douteuse de certains juges
En Afrique, la tendance générale est à la
politisation de la justice. C'est en ce sens que Jean P. MASSARON a
dit : « quels que soient les principes constitutionnels et
idéologiques, il y'a en Afrique une tendance manifeste à
politiser la justice. »133(*) Le principe de séparation des pouvoirs n'est
pas la chose la mieux respectée sur le continent africain. Le judiciaire
est subordonné à l'exécutif, ce qui entrave gravement
l'application d'une bonne justice. Les issues des procès qui ont un lien
avec le pouvoir central (ou lorsque ses intérêts sont directement
mis en cause) sont souvent connues d'avance. Les juges usent de tous les moyens
pour que l'image de l'Etat ne soit pas ternie. La justice en Afrique est un
instrument au service des politiques en place134(*). C'est pour pallier à ce problème que,
les avocats au Tribunal Pénal International pour le Rwanda ont fait
valoir que les membres du Front Patriotique Rwandais actuellement au pouvoir au
Rwanda, étant conformément aux dispositions du statut du
Tribunal, des justiciables potentiels de ladite juridiction, ne devaient pas
faire partie du TPIR de peur de porter atteinte à l'impartialité
dont doit faire preuve cette juridiction.
Dans ces conditions, il est difficile pour un personnel d'une
organisation humanitaire porté devant un juge interne de jouir de
l'administration d'une justice équitable. Surtout s'il s'agit de la
juridiction de l'auteur de l'infraction et que les autorités veulent
disculper.
B- Les classements sans suite
C'est un procédé judiciaire par lequel, le
ministère public en vertu du principe de l'opportunité des
poursuites décide d'abandonner la poursuite d'une affaire dont il est
saisi. C'est l'oeuvre du procureur de la république. Comme l'a si bien
relevé le Dr Nicole Claire NDOKO : « cette
procédure constitue dans son essence une source d'injustice et
d'abus. »135(*) Ce système est
généralement visible dans des procès où la
responsabilité d'un membre des forces armées est engagée
pour avoir commis un crime ou un délit. Alors, c'est un moyen
utilisé par les tribunaux pour disculper certains auteurs de crimes.
Cela pose un réel problème lorsqu'on sait que dans certains pays,
l'opportunité des poursuites devant le tribunal militaire est reconnue
au seul ministère public. C'est le cas en Belgique où, la loi du
16 juin 1993 relative à la répression des infractions graves au
droit international humanitaire est venue à juste titre permettre de
déroger à cette règle. Elle permet dorénavant aux
victimes de mettre en oeuvre l'action publique par une plainte en se
constituant partie civile devant le tribunal militaire. Le classement sans
suite certes rend service aux juridictions en ce qu'il permet de les
désengorger, mais il n'en demeure pas moins que c'est une entrave
à la revendication des droits des justiciables car elle étouffe
la mise en oeuvre de leurs actions.
C-le refus de qualifier les faits au regard de la
loi
Le rôle principal de tout juge au cour de sa mission
c'est de dire le droit c'est -à -dire de trancher les litiges au regard
des textes de loi. Mais la pratique ne se conforme pas toujours à cette
règle. En effet, lorsqu'un juge veut soustraire un accusé des
griffes de la justice surtout en ce qui concerne les infractions du droit
international humanitaire, Il procèdera à une
interprétation restrictive desdites dispositions pour qualifier ou alors
refusera de qualifier les faits au regard des dispositions conventionnelles
réprimant les atteintes au droit des conflits armés.
Généralement, cette technique est observable lorsqu'il s'agit
des infractions commises par des agents de l'Etat ; surtout dans les Etats
qui procèdent au niveau national à la méthode
d'incrimination par renvoi aux textes. Ce système laisse la
liberté aux juges nationaux d'apprécier du caractère
directement applicable aux conventions. Alors, le juge pourra par exemple
qualifier des attaques ciblées contre un humanitaire soit de voies de
faits ou alors de coups et blessures tout en sachant que, les sanctions ne
peuvent pas être aussi grave que si ça avait été
qualifié d'infractions graves au droit international humanitaire.
D -L'engorgement des tribunaux
Ce phénomène est surtout visible dans les
juridictions internes qui croupissent sous le poids des dossiers
accumulés depuis des années. Un procès peut
s'étaler sur dix ans sans issue. Cette situation, loin d'inciter les
victimes à y recourir pour revendiquer que justice soit faite quand ils
estiment que leurs droits sont lésés est plutôt de nature
à les décourager.
Certes avec la règle de la compétence
universelle, ainsi que le caractère complémentaire de la Cour
Pénale Internationale ce problème ne devrait plus se poser. Mais,
relevons que, conformément à la règle non bis in
idem telle qu'énoncée dans le statut de la Cour, une victime
ne pourra plus saisir une juridiction pour une infraction dont elle est victime
si l'affaire et déjà portée devant une autre juridiction.
Ce qui veut dire que, si un tribunal se saisi d'un cas, et passe des
années sans statuer, la victime ne pourra pas saisir une autre
juridiction.
E -La corruption
Beaucoup plus présente à l'échelon
national, la corruption est un mal qui sévit au sein des juridictions
africaines ; le cas du Cameroun est à cet égard assez
patent136(*). La justice
est devenue « une affaire d'argent » en ce sens que, le
pauvre n'y a pas accès. Les raisons qui pourraient justifier ce
fléau sont à géométrie variable. Certains parlent
de la misère dans laquelle vivent les magistrats avec leurs salaires
insignifiants. D'autres par contre trouvent que c'est un moyen pour eux de
récupérer les fonds qu'ils ont eu à débourser pour
rentrer dans la majestueuse institution qui les a formé.
Mais quelle que soit la raison énoncée, la
corruption est un phénomène qui met à mal l'image des
institutions judiciaires aujourd'hui. Il suffit d'être nanti pour gagner
tous les procès, même ceux dont les preuves vous condamnant sont
tangibles. De telles pratiques dégradent considérablement l'image
des institutions judiciaires dans les Etats africains. Le prétexte d'un
salaire minable ne devrait en aucun cas justifier l'atteinte à l'image
d'une institution comme la justice qui se veut noble et crédible aux
yeux des justiciables.
Relevons qu'en plus des entraves d'ordre purement judiciaires,
l'humanitaire est aussi souvent confronté, lorsqu'il attrait son
bourreau en justice, à des obstacles externes à la justice qui
très souvent sont d'ordre politique.
Paragraphe II- Les facteurs externes à l'appareil
judiciaire
Les défaillances d'un appareil judiciaire peuvent avoir
plusieurs origines. C'est le cas de la mauvaise volonté de certains
Etats en matière de coopération judiciaire (A) du refus de
certains Etats de ratifier le Statut de Rome(B) et de certaines clauses
émises par certains Etats lors de la ratification du statut de Rome
(C)
A-Le refus par certains Etats de toute
coopération judiciaire
La mise en oeuvre d'une répression efficace des crimes
graves aux conventions de Genève nécessite une coopération
entre les Etats. L'exemple du Cameroun à ce propos est à suivre.
En effet, saisi par une demande d'extradition émanant des
autorités de Kigali et une demande de transfert provenant du TPIR,
d'Arusha en Tanzanie, le Cameroun a choisi par un décret
présidentiel de transférer ces génocidaires entre les
mains du TPIR après que la cour d'appel de Yaoundé ait
rejeté la demande d'extradition envoyée par le gouvernement
Central de Kigali137(*).
Cet acte du gouvernement camerounais a été remarquable car il a
contribué à travers ce décret à l'évolution
de la justice internationale et particulièrement à la lutte
contre l'impunité.
Tous les Pays ne sont malheureusement pas ouverts à
cette coopération judiciaire internationale. Une des causes majeures en
est sans doute le lien étroit qui existe entre les pouvoirs politiques
et le fonctionnement de la justice internationale. De plus, la question de
l'indépendance des juges par rapport aux procureurs et à leurs
États respectifs reste à ce niveau un réel souci quant
à l'impartialité de ces derniers.
Les cas du Soudan et du Kenya sont des exemples de refus de
toute coopération judiciaire internationale. Le gouvernement soudanais
jusqu'ici est resté fermé à toute coopération avec
la Cour Pénale internationale. Cette situation constitue un réel
frein pour une meilleure avancé de la justice internationale qui
nécessite une coopération internationale pour la mise en oeuvre
effective de la lutte contre l'impunité. C'est pourquoi le Conseil
de Sécurité de l'ONU après les attentats
perpétrés contre le bureau de l'ONU à Bagdad a
demandé instamment « que s'organise une coopération
internationale en vue de traduire en justice les auteurs, les organisateurs et
les commanditaires d'actes odieux sur le personnel
humanitaire. »138(*) La coopération judiciaire entre pays
permettra de mieux mener les enquêtes, recueillir les
éléments de preuve, arrêter les suspects, protéger
les témoins. Ce refus de coopération rend évidemment
défaillante la justice internationale. Il en est de même pour les
Etats qui jusqu'à ce jour refusent de ratifier le statut de la Cour
Pénale Internationale.
B- Le refus de certains Etats de ratifier le Statut de
Rome
Le traité de Rome est un texte important en droit
international en ce qu'il réprime toutes les infractions graves aux
conventions de Genève en son article 8. Par ailleurs, dans un des
alinéas de cet article 8 il dispose clairement que le personnel
humanitaire doit être protégé et ne doit aucunement et sous
aucun prétexte faire l'objet d'une attaque. Ce qui signifie que tous les
Etats parties à ce traité ont pour mission de veiller à la
Sécurité du personnel humanitaire.
Le fait que certains pays tels que les Etats Unis
d'Amérique, la Russie, la Chine et Israël ne soient pas partis
à ce traité pose un sérieux problème. Le cas
américain précisément nécessite réflexion
car ces derniers ne se contentent pas seulement de refuser d'être parties
à ce traité mais ils établissent également des
accords bilatéraux avec les États signataires garantissant que
les Américains qui seraient amenés à répondre de
leurs actes devant la CPI soient rapatriés aux États-Unis. C'est
le cas de la loi Jesse HELMS et Tom DELAY du 22 août 2002 encore
appelée loi HR 4775 « Américan Service Members'
Protection Act » 139(*) (ASPA) relative à la doctrine
américaine contre la CPI140(*)
Ces accords bien évidemment mettent les citoyens
américains au-dessus des conventions et traités internationaux.
Ce qui constitue une sérieuse entrave à l'évolution du
droit international humanitaire lorsqu'on sait combien les troupes
armées américaines sont répandues dans les coins du monde.
Entrave en ce que ces troupes ne sont pas à l'abri d'exactions à
l'égard des humanitaires. Alors au regard de leur situation juridique
par rapport au traité de Rome on se demande quelle juridiction sera
saisie étant donné que, la CPI ne peut être
compétente que si l'accusé est ressortissant d'un Etat parti au
dit statut ou alors lorsque cet accusé bien que n'étant pas
ressortissant d'un Etat parti accepte d'être jugé par cette Cour.
L'on comprend donc que les mobiles qui conduisent les Américains
à s'opposer à toute ratification sont liés à cette
forte présence de leurs troupes à l'Etranger. Il en est de
même pour certaines clauses émises par certains Etats lors de la
ratification de ce traité.
C- Les réserves émises par certains Etats :
le cas de la France
Il s'agit des clauses émises par des Etats en vue de
disculper leurs ressortissants pour les crimes rentrants dans la
compétence de la Cour.
C'est le cas de la France qui en ratifiant le statut de Rome a
émis une clause stipulant que ses ressortissants ne seraient pas
poursuivis par cette juridiction les sept années qui suivront la mise
sur pied de ladite Cour. Ce genre de comportement est de nature à
encourager l'impunité et à affaiblir la protection juridique du
personnel humanitaire. En effet à supposer que des troupes armées
françaises commettent des exactions sur un personnel humanitaire,
conformément à cette clause, la Cour Pénale Internationale
ne pourra pas les poursuivre. Ce qui se trouve être anormal- lorsqu'on
sait que cette instance au niveau international jouit d'une compétence
générale et permanente.
En définitive, il apparaît que la protection du
personnel humanitaire est limitée dans la pratique. Les facteurs qui
concourent à affaiblir cette protection sont liés tant à
la nature des conflits qu'aux procédures devant les juridictions.
En ce qui concerne les conflits, les nouveaux acteurs au
conflit que sont les milices se trouvent être à l'origine du
malheur des organisations humanitaires. Malheur en ce que qu'ils se
transforment en prédateurs de ces derniers.
Par ailleurs, les multiples entraves liées à
l'action judiciaire sont également des éléments qui
contribuent à relativiser l'effectivité de cette protection dans
la pratique.
C'est pourquoi il est important au terme de ce travail et au
regard de ces quelques éléments recensés de proposer
quelques pistes de réflexions en vue de renforcer l'efficacité de
la protection juridique du personnel humanitaire.
CHAPITRE 4 : LES VOIES DE REFORME POUR UNE
EFFICACITE RENFORCEE
Plusieurs raisons ont été évoquées
pour expliquer la détérioration des conditions de
sécurité des missions d'aide humanitaire. Le véritable
problème réside donc au niveau de la gestion des nouveaux types
de conflits de plus en plus observés en Afrique, ainsi que des acteurs
que ces conflits font intervenir. La question à laquelle on est
emmené à répondre est celle de savoir comment aborder de
manière pratique les énormes défis découlant de ces
types de conflits dits déstructurés. Relever les défis de
ces nouvelles guerres revient à adopter des mesures à même
d'y faire face de manière efficace.
Les mesures à prendre devront dès lors
être l'oeuvre des différents acteurs en présence que sont
les États, les parties au conflit ainsi que les organisations
humanitaires elles-mêmes. Mais au niveau des textes le renforcement de
cette protection peut être rendu possible à travers quelques
suggestions (Section I) et certaines recommandations en dehors des textes
(Section II).
Section I- Suggestions au niveau des textes
Il serait prétentieux d'affirmer que les textes
protégeant le personnel humanitaire sont totalement efficaces ou ne le
sont pas. Ce sont des textes qui ont une histoire et qui ont su rendre service
depuis leur consécration à la communauté internationale.
Ces derniers comme tout instrument juridique peuvent connaître (et c'est
le cas ici) une certaine dégradation avec l'effet du temps ainsi que du
fait de l'évolution du monde. Etant donné que, le droit s'adapte
chaque fois qu'il y a une nouvelle situation, il est urgent pour les
instruments juridiques internationaux protégeant le personnel
humanitaire de s'adapter aux nouvelles formes de guerre qu'ils sont
dorénavant appelés à régir. C'est dans cette
optique que nous nous permettons de suggérer une harmonisation au niveau
du régime juridique de protection (Paragraphe I). Il faut ensuite
renforcer la répression des infractions commises sur le personnel
humanitaire en vue de dissuader les éventuels délinquants
(Paragraphe II) ; de plus les humanitaires se doivent de
reconsidérer les grands principes gouvernant l'action humanitaire
(Paragraphe III)
Paragraphe I- le régime juridique de protection
Les normes de protection du personnel humanitaire sont
dispersées et inégales. En effet, l'on retrouve la protection
générale conférée par le droit international
humanitaire de par les conventions de Genève, la protection
conférée par l'emblème ainsi que la convention de 1994 sur
la protection du personnel des Nations Unies. Le caractère éparse
de cette protection n'est pas de nature à garantir à tous ces
agents un surcroît de sécurité en ce sens que comme l'a dit
le CICR, il y a risque de confusion141(*). Il crée une certaine hiérarchisation
dans l'esprit des populations qui tendent à mettre certains agents
au-dessus des autres. C'est le cas des missions humanitaires de l'ONU qui
visiblement ont plus de considération sur le terrain grâce
à la notoriété de l'institution sur le plan international.
De ce fait, lorsqu'un personnel de l'ONU trouve la mort lors d'une mission
d'aide humanitaire, cela n'aura pas l'impact qu'aurait eu la mort d'un
personnel d'une quelconque ONG humanitaire. Cette considération est
également apparente chez les belligérants en ce sens que les
convois des Nations Unies inspirent plus de crédibilité et de
crainte à leurs yeux. Il en est de même pour le personnel
jouissant de la protection de l'emblème de la croix rouge. L'on est
porté à croire que, si cet emblème est quelque fois
utilisé de manière abusive par des personnes qui ne sont pas en
droit d'en user, c'est certainement parce qu'ils auraient remarqué qu'il
y'avait plus d'intérêt à être protégé
par cet emblème que par les autres instruments de protection
générale.
Para II- enquêtes et poursuites pénale
Dans le rapport du CICR142(*) traitant des mesures à prendre en vue de
renforcer la sécurité du personnel humanitaire, il est
préconiser qu'à la suite des attaques ou de violations de
l'intégrité du personnel d'organisations humanitaires, il est
crucial que les belligérants ouvrent sans tarder une enquête
approfondie et prennent les mesures nécessaires pour rechercher les
responsables.
Mais il faut dire par rapport à cette recommandation
que, le contexte dans lequel ces violations se passent ne permet pas de la
mettre en oeuvre dans la mesure où, les belligérants ont une
seule préoccupation qui consiste à remporter le combat. Alors il
serait plutôt indiqué que se soit le personnel victime ou alors
l'agence dont le personnel a subi des atteintes, de porter à la
connaissance de la communauté internationale ces cas de violation.
C'est pourquoi nous convenons avec l'une des mesures pratiques
suggérée au CICR qui à la suite d'un incident sur son
personnel lui demande instamment d'adopter une position ferme et exiger que
toute la lumière soit faite au niveau interne et externe143(*). Alors, comme suggestion
nous pourrions plutôt dire qu'il faudrait inciter les humanitaires
à porter plainte. Les agents humanitaires devront porter à la
connaissance des juridictions compétentes toutes les atteintes dont ils
sont victimes. Certes les médias se chargent souvent d'annoncer des cas
de ciblage des agents humanitaires sur le terrain des conflits armés.
Mais soulignons que, le plus important ne consiste pas juste à
annoncer mais de pouvoir poursuivre les auteurs, c'est ce qui ressort aussi de
la 55eme session de l'Assemblée Générale144(*). Les États parties
aux Conventions de Genève, même s'ils ne sont pas parties au
conflit armé, se sont engagés à faire respecter le droit
international humanitaire. La communauté internationale doit se
mettre dans le combat effectif en cas de violations graves des Conventions que
sont les atteintes contre le personnel humanitaire. Elle devra agir pour y
mettre fin, tant conjointement que séparément, en
coopération avec l'Organisation des Nations Unies ceci
conformément à l'article 89 du Protocole additionnel I aux
conventions de Genève de 1949. Ce combat consisterait par exemple au cas
où il serait signalé que des humanitaires auraient trouvé
la mort dans une région suite à des tirs ciblés,
d'annoncer officiellement que des forces militaires seraient envoyées
dans cette région afin d'éclaircir une telle situation. Cette
mesure à coup sûr pourrait faire frémir les populations ou
les miliciens ou même les forces réglementaires qui auraient
commis ces actes.
Il est capital de la part des États de la
communauté internationale que ceux-ci dénoncent avec la plus
grande fermeté toutes atteintes physiques ou morales portées
à l'égard du personnel d'organisations humanitaires145(*) ou de leurs biens et mettent
sur pied des dispositions adéquates pour obtenir des acteurs au conflit
le respect du personnel humanitaire et au besoin les sanctionner
sévèrement en cas de violation.
Le plus important demeure donc la dénonciation et la
plainte devant les juridictions car la protection juridique dont jouissent les
humanitaires doit permettre à ceux-ci de s'y appuyer et de se
défendre de manière concrète. Faute de quoi ils
contribueront à affaiblir ce cadre de protection juridique prévu
à leur égard.
De ce point de vue, les organisations humanitaires doivent
connaître et respecter les droits qui leurs sont conférés
par le droit international humanitaire et rendre impérativement compte
des violations dont ils sont sujets au cours de leurs missions.
Paragraphe III- La reconsidération de
l'éthique ainsi que des grands principes gouvernant l'action humanitaire
Le respect des principes gouvernant l'action humanitaire est
primordial en vu de garantir la sécurité de ces derniers pendant
leurs missions d'assistance humanitaire. Comme le relève le CICR,
« la sécurité du personnel humanitaire sera
améliorée si celui-ci respecte les principes d'humanité,
d'impartialité et de neutralité dans son comportement au
quotidien. »146(*) La remise en cause d'un de ces principes par l'un
des belligérants constitue pour les humanitaires une source
d'insécurité dans la mesure où, va s'installer une perte
de confiance et suivra l'instauration d'un climat de suspicion qui mettra en
péril leur vie. La confusion des mandats et la diversité des
comportements au sein des organisations représentent pour le personnel
humanitaire un facteur à risque147(*). Les humanitaires ne doivent pas perdre de vue le
fait que ce sont ces principes qui sont garants de leur sécurité
aux yeux des parties au conflit. Ceux-ci s'efforceront donc au cours de leurs
missions d'aides humanitaires de procéder à un sérieux
travail de sensibilisation et d'écoute à l'égard des
populations. Ils doivent expliquer à ces derniers qu'ils sont là
pour eux et qu'ils viennent les soulager de leurs souffrances. Ils doivent
mettre les populations en confiance et au besoin, sélectionner des
personnes sur le plan local qui pourront les accompagner dans leurs missions.
Ces citoyens locaux se chargeront de leur faire connaître la
région et serviront d'intermédiaires entre les agents
humanitaires étrangers et les populations locales, ce qui selon le CICR
permet d'atténuer les dissensions et les malentendus148(*). La compréhension de
ces principes et leurs mises en application dans le cadre des opérations
constitue la meilleure garantie de sécurité. Ils doivent à
tous les niveaux faire preuve d'impartialité dans le traitement des
populations et des combattants blessés. Aucune discrimination ne doit
être manifeste, ils se devront selon les principes d'impartialité
qui gouverne leurs actions de traiter toutes les populations pareillement.
Dans le même sens, ces derniers se doivent d'éviter toute
ingérence même de manière indirecte au conflit. Tout geste
susceptible d'être interprété et d'instaurer un climat de
suspicion légitime quant à leurs motivations exclusivement
humanitaires, ils ne doivent en aucun cas intervenir dans les controverses de
quelle nature que ce soit liées au conflit149(*). Ceci étant, en
dehors des rapports d'humanité, ils ne doivent entretenir aucun autre
rapport avec les parties au conflit au risque d'attirer sur eux la foudre de la
partie adverse. Leurs missions doivent se limiter à traiter les
combattants blessés qui ne participent plus au combat. Notons à
ce propos que, la sécurité de toute organisation humanitaire est
largement fonction des standards d'éthique et professionnels avec
lesquels elle fonctionne. C'est en ce sens que le Mouvement international de la
Croix-Rouge et du Croissant Rouge considère que la meilleure garantie
d'une sécurité contre le ciblage des agents réside dans
une attitude reflétant de manière très fidèle les
principes de l'action humanitaire que sont l'humanité,
l'impartialité, la neutralité et l'indépendance. Il
demeure également convaincu que : « (...)la
sécurité du personnel humanitaire est avant tout une question
d'acceptation, de perception de l'organisation, de comportement individuel et
de capacité d'écouter, de communiquer et de projeter une image
stable et cohérente à tous les acteurs engagés dans un
conflit. »150(*)
Par ailleurs, les missions humanitaires doivent trouver des
techniques appropriées pour dissimuler le matériel jugé
très coûteux et susceptible d'attirer la convoitise des bandits. A
ce propos, ils doivent privilégier l'image sobre qu'était celle
des missions humanitaires pendant la guerre froide. Garder à l'esprit le
fait qu'à trop se parer d'un matériel d'apparence très
coûteuse, ils contribuent par ce fait à précariser leur
sécurité.
Section II- Les autres éléments d'une
efficacité renforcée
Diverses causes ont été retenues quant à
la fragilisation de la protection juridique du personnel humanitaire dans un
contexte de conflit armé interne. Certes quelques suggestions ont
été faites plus haut au niveau des textes mais nous nous
permettrons de donner aussi quelques autres pistes de réflexion. Il
serait important de mettre l'accent sur une sensibilisation accrue des
populations en générale car les milices faisant partie de celles
ci, il est nécessaire de sensibiliser toutes les populations en ce
disant qu'on a affaire à des potentielles milices (Para I) enfin, il
revient aux gouvernants africains de voir la question de rébellion et
des milices. L'éradication de ces phénomènes passera
incontestablement par la prise en compte des problèmes des populations
ainsi que la promotion de la paix et d'une culture sociale (Para II)
Para I- la sensibilisation générale des
populations civiles aux questions du droit international humanitaire
Les normes de droit international humanitaire doivent au
maximum être portées à la connaissance des peuples ;
nous nous accordons avec Marie José DOMESTICI-MET lorsqu'elle di
que : « La révolution humanitaire engagée
au XIX eme siècle auprès des combattants en uniformes est
à faire aujourd'hui au près des combattants
occasionnel »151(*) Des campagnes de sensibilisation
générale des populations doivent être menées, dans
tous les milieux sociaux. Ces campagnes peuvent se faire à travers
l'organisation des séminaires, des colloques, ainsi que des
journées portes ouvertes sur les questions relatives au droit
international humanitaire. Certes le CICR fait déjà un travail
remarquable en ce qui concerne la diffusion des règles du droit
international humanitaire. Mais ces efforts doivent être
redoublés, et ceci beaucoup plus en temps de paix. Toutes les
organisations non gouvernementales doivent participer à la diffusion et
la à vulgarisation des règles fondamentales du droit
international humanitaire dans tous les pays où elles sont
représentées. Les sociétés nationales des croix
rouges doivent participer activement à cette vulgarisation, les
organisations d'aides humanitaires doivent garder à l'esprit le fait
que, la garantie d'une meilleure protection passe par un travail de
sensibilisation qui doit se faire en temps de paix, il ne faudrait pas attendre
qu'un pays soit en pleine guerre civile pour qu'on aille leur dire qu'il ne
faut pas porter des attaques contre le personnel civil en général
et contre les missions d'aides humanitaires en particulier. Certes cette
sensibilisation ne saurait à elle seule garantir aux agents de missions
d'aides humanitaires une sécurité totale en cas de guerre. Mais
il est clair qu'une population suffisamment sensibilisée sur une
question est tout de même différente de celle qui n'a jamais eu de
notions concernant ces questions.
Cette question de sensibilisation ne se pose pas avec
acuité chez les forces de l'ordre et particulièrement chez les
gendarmes car, ceux ci au cours de leur formation et une fois même ayant
intégré le corps reçoivent des enseignements de droit
international humanitaire et de droits de l'homme. Si l'on se fie aux propos
recueillis auprès d'un membre de la gendarmerie152(*), un accent sérieux
est mis sur l'assimilation de ces questions. Militaires du rang153(*), sous officier ou officier,
tous sont imprégnés de ces notions et règles
régissant le droit des conflits armés. Soulignons à ce
sujet que, moins ils sont gradés plus large est le volume horaire des
cours de DIH qui leurs sont dispensés. C'est ainsi que les cours et
séminaires de recyclage varient de deux à six mois avec
projection de bandes sur les conflits armés suivi de la phase de
questions réponses à un agent du CICR au cours de laquelle ces
derniers sont suffisamment éclairés sur les points d'ombre. Mais
chez les milices, les réalités sont toutes autres dans la mesure
où ce ne sont pas des forces réglementaires et
régulières et dès lors ne sont pas facilement
repérables. Ne pouvant pas leur dispenser ces enseignements, ce qui
reste à faire sera de procéder à des campagnes de
sensibilisation générale vu que les milices sont des personnes
civiles qui se soulèvent par rapport à une situation
donnée. Par ailleurs, les Etats devront encourager la création
des associations comme celles de défense des droits de l'Homme en vue
d'une promotion des règles fondamentales du droit international
humanitaire en temps de paix.
Para II- La promotion de l'esprit humanitaire dans la
société
Les milices naissent généralement suite à
des revendications restées muettes alors, l'un des moyens qui pourrait
permettre efficacement de lutter contre ce phénomène c'est
d'éviter qu'il ne se crée. C'est pourquoi les solutions doivent
être recherchées dès l'amont ; les gouvernants se
doivent de miser sur une promotion effective de la paix et de l'esprit
humanitaire au sein des groupements et communautés. Cette promotion
passe par la prise en compte des revendications des populations, la quête
de leur bien-être ainsi que la mise sur pied d'un régime
démocratique effectif en vu de garantir au mieux les droits sociaux,
civiques et politiques des citoyens. Le fonctionnement des pays de l'occident
nous montre que, les milices et les guerres civiles sont des
réalités typiquement africaines. Aucun pays occidental n'a connu
de guerre civiles ces dernières années, encore moins le
phénomène de milices qui y est lié, alors que ces types de
guerres sont devenues l'apanage des Etats africains.
Alors, les chefs d'Etats conjointement aux
sociétés nationales de la Croix Rouge doivent selon le CICR,
« coopérer et prendre des initiatives en vue de promouvoir
au sein des populations la tolérance, la non violence et le respect de
la dignité humaine... »154(*) ajouté à cela un système de
gestion de pouvoir dans lequel les populations ne se sentiront pas
lésées. Ainsi à ces conditions l'on pourra être
sûr d'être à l'abri des mouvements rebelles qui en
réalité sont pour ces peuples des manières d'exprimer
leurs mécontentements. Le cas du Congo Zaïre à ce propos est
suffisamment révélateur. Après des décennies
passées aux prises d'un régime tyrannique qu'était celui
du Maréchal MOBUTU, l'arrivée de la rébellion n'a
été que salutaire pour des populations qui voyaient en elle
(cette rébellion) des envoyés divins venus les délivrer
des mains d'un dictateur.
Par ailleurs, les Etats doivent aussi et par la même
occasion montrer à leurs communautés combien la guerre est
destructrice et quels peuvent en être les dégâts tant sur le
plan matériel qu'humain. C'est dans le même sens que,
l'Assemblée générale des Nations Unies invite tous les
Etats à « promouvoir au sein de leurs pays un climat de
respect de la sécurité du personnel
humanitaire »155(*).
CONCLUSION GENERALE
Parti de la question de savoir quel était le
degré d'efficacité des instruments juridiques protégeant
le personnel humanitaire en situation de conflit armé non international,
nous avons tout au long de notre travail analysé les textes juridiques
prévus à cet effet. Après une analyse documentaire et des
entretiens avec des personnes ressources, il ressort que la protection
juridique du personnel humanitaire est assurée par divers textes
internationaux.
La sanction des violations de ces textes est garantie tant sur
le plan international que national. Sur le plan international, la mise en
oeuvre de cette répression se fait par la Cour Pénale
Internationale. Ses modalités de saisine sont élaborées
par le texte sur le règlement de procédure et de preuve de juin
2000. Conformément aux dispositions de ce texte ainsi que ceux du Statut
de la Cour Pénale Internationale, la Cour peut être saisi par le
Conseil de Sécurité, par un Etat partie ou enfin par le procureur
proprio motus. Sur le plan national, trois types de compétence
permettent de mettre en oeuvre la responsabilité pénale de tout
auteur d'une infraction à l'égard du personnel humanitaire. Il
s'agit de la compétence universelle, de la compétence
territoriale et enfin de la compétence personnelle. Le
déclenchement de cette responsabilité pénale peut, en plus
des peines privatives de libertés dont l'auteur peut être
frappé, l'obliger aussi à réparer le dommage
causé. Divers textes sont prévus à cet effet. Il peut
s'agir d'une réparation fondée sur les articles 1382 et suivant
du code civil, en ce sens qu'on peut être face à un individu
isolé ou alors qui a un certain lien avec le pouvoir central d'un pays.
Il s'agira donc dans ces cas d'une responsabilité du fait personnel et
de la responsabilité du commettant du fait de son préposé.
En plus des dispositions du code civil sur lesquelles peut se fonder un juge
interne, d'autres textes et principes fondent l'indemnisation dont peut jouir
un personnel humanitaire victime. C'est le cas des dispositions du Statut de
la Cour Pénale Internationale ainsi que du texte sur le Règlement
de procédure et de preuve. Ces deux textes admettent la
réparation pour les victimes de crimes de guerre et leur donnent le
droit de participer aux procédures devant la Cour. La déclaration
des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la
criminalité et d'abus de pouvoir de 1989 reconnaît un droit
à la réparation à toutes les victimes de crimes de droit
international. Il en est de même pour les principes fondamentaux et des
directives sur le droit au recours et à la réparation des
victimes du droit international humanitaire adoptés en avril 2000. Ces
textes offre aux victimes de crimes internationaux, le droit d'être
indemnisé soit par l'auteur de l'infraction ou alors par l'Etat.
En dehors de ces cas de réparation prévus par
les textes, le personnel humanitaire victime d'une infraction peut aussi jouir
d'une indemnisation qui peut émaner d'une convention passée avec
un tiers. Elle peut découler d'un contrat d'assurance ou alors du
contrat de travail de la victime. Il faut ajouter à tout ceci la
réhabilitation psychologique ou traitement post traumatique de la
victime qui consiste à traiter les blessures psychologiques du personnel
humanitaire. Il ressort donc de cette première partie de notre travail
que le personnel humanitaire jouit d'une protection qui va de
l'élaboration des règles visant le respect de son statut
à la sanction des cas de violation de ces règles et l'octroi des
dommages- intérêts.
Mais il s'avère que dans la pratique, certains facteurs
contribuent à mettre à mal cette protection juridique
conférée au personnel humanitaire. Il s'agit des facteurs
liés au conflit ainsi que des éléments relatifs à
l'appareil judiciaire. Concernant les conflits, il se pose que, les conflits
inter étatiques ont cédé la place aux guerres civiles. Ce
type de conflits fait apparaître de nouveaux acteurs aux pratiques
déroutantes vivant dans des conditions de vie très
précaires. Ces derniers constituent un danger réel pour le
personnel humanitaire en ce sens qu'ils (ces acteurs) en font de
véritables proies.
Par ailleurs, l'évolution des démarches
humanitaires constitue aussi une entrave quant à l'efficacité de
cette protection car le matériel avec lequel ils travaillent fait d'eux
des cibles privilégiées pour ces acteurs affamés et
manipulés. Sur le plan judiciaire, des maux tels que les classements
sans suite, les engorgements des tribunaux et dans une certaine mesure la
corruption sont de nature à fragiliser d'avantage les instruments
juridiques de protection. Il en va de même pour des attitudes telles que
le manque de volonté de certains Etats à toute
coopération judiciaire, le refus de ratifier le statut de Rome et les
réserves émises par certains Etats lors de la ratification dudit
statut ne sont pas de nature à assurer une bonne mise en oeuvre de la
répression des infractions sur le personnel humanitaire.
Au terme de notre étude, nous avons
constaté que notre hypothèse principale est
vérifiée car les instruments assurant la protection juridique du
personnel humanitaire sont inadaptés. Notre première
hypothèse secondaire est aussi vérifiée. Mais la
deuxième quant à, elle est vérifiée
partiellement.
En somme, l'on dira que le phénomène milicien
est à la base de l'inefficacité des instruments juridiques
assurant la protection du personnel humanitaire. Mais il convient de souligner
que la principale cause est liée au contexte dans lequel ces textes sont
appliqués. La sécurité sociale en Afrique relève de
l'utopie, les peuples africains vivent dans des conditions de vie
déplorables. Dans un tel environnement, les questions de sensibilisation
au droit international humanitaire ou de droits de l'homme ne peuvent
qu'être de vains mots aux oreilles des populations
désespérées. Le dicton selon lequel « ventre
affamé n'a point d'oreilles » sied pertinemment à cet
état de choses. Il serait en effet illusoire d'espérer que des
gens qui combattent au quotidien avec la misère puissent se soucier des
principes théoriques que sont les règles de droit humanitaire.
Alors, ce ne serait pas faire preuve de défaitisme si
l'on déclare que le continent africain est un continent à risque
pour le personnel humanitaire. En effet, comme nous l'avons
développé dans les pages précédentes le pouvoir en
Afrique est entre les mains d'une poignée de personnes au
détriment des populations qui restent vouées à la
misère.
Au terme de ce travail, nous ne saurions omettre les obstacles
que nous avons rencontrés. Nous avons éprouvé
d'énormes difficultés quant à l'application pratique de la
méthode des sciences sociales. En effet, venant d'une faculté de
droit, nous n'avons pas été initié aux instruments
d'analyses sociologiques.
* 1 M.TORELLI, Le Droit
international humanitaire, PUF, « que sais je ?»,
n° 2211, Paris, 1985.
* 2 F. BUGNION, «Le droit
international humanitaire à l'épreuve des conflits de notre
temps », in RICR n° 835 septembre 1999, pp. 487-498.
* 3 P.VERRI, Dictionnaire
du droit international des conflits armés, CICR, Genève,
1988.147p.
* 4 Il s'agit ici des
organes humanitaires spécialisés de l'ONU, des ONG humanitaires
locales, des organisations humanitaires internationales et de l'organisme
humanitaire de l'union Européenne (ECHO).
* 5 ONU, « Les
organisations non gouvernementales et le département de l'information de
l'ONU » in
www.un.org (consulté le
21novembre 2005)
* 6 P.BUIRETTE, le droit
international humanitaire, édition la découverte, paris,
1996, p.65.
* 7Art 43 al 2 protocole n0 I
de 1977 aux quatre conventions de Genève de 1949.
* 8 Site Internet
www.cicr.org document
préparatoire du CICR pour la 1ere réunion périodique sur
le droit international humanitaire. (Consulté le 14decembre 2004 a 9h
20mns)
* 9 Premier secrétaire
de la mission permanente de la Belgique au nom de l'union européenne.
Allocution prononcée le 09octobre 2001 lors de la 6eme commission de
l'ONU
* 10ONU, Assemblée
Générale, Résolution 57/155,
« Sécurité du personnel humanitaire et protection du
personnel des Nations Unies » le 26 Août 2003 Cf. site
Internet
www.un.org . (Consulté le 19
décembre 2004)
* 11 4eme convention de
Genève du 12 août 1949 relative à la protection des
populations civiles contre les effets de la guerre.
* 12 C.
SOMMARUGA « Réflexion sur l'humanitaire aujourd'hui et
demain » in Revue internationale de la croix rouge
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* 13 J. D. TAUXE,
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* 14 M. B. ANDERSON,
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* 15 F.GRUNEWALD,
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www.urd.org consulté le 20/05/05
à 9H)
* 16 ONU, Conseil de
Sécurité, Résolution 1556, « L'instauration de
l'embargo sur les armes à destination des 3 Etats du
Darfour », adoptée le 30juillet 2005. (
www.un.org consulté le 19
décembre 2004)
* 17 R. DALLAIRE,
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* 18 ONU, Assemblée
Générale, Résolution 52/167, « La
sûreté et la sécurité du personnel
humanitaire » adoptée le 16 Décembre 1997 (
www.un.org consulté le 19
décembre 2004)
* 19ONU, Conseil de
Sécurité, Résolution 1502, « La protection du
personnel de l'ONU dans les zones de conflits » adoptée le 26
août 2003 (
www.un.org consulté le 19
décembre 2004)
* 20 Résolution 1502
op. cit. Paragraphe 5.
* 21Koffi ANNAN, Rapport du
millénaire à l'Assemblée générale de
l'ONU, 2000.
* 22 Edwige AVICE,
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humanitaire », in L'humanitaire en échec? Actes du
colloque organisé par le CICR dans le cadre du cinquantenaire des
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* 23 M. j. DOMESTICI -MET,
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* 27 J.L. BLONDEL,
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* 30 Communiqué de
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sécurité du personnel humanitaire
* 31 C. NUCHHI op.cit
* 32 Idem
* 33 Idem
* 34 Idem
* 35 Idem
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* 41 Article 8 du Statut de
la CPI
* 42Article 2 de la
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* 52 ONU, Conseil de
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septembre 1999.
* 53 P. RYFMAN, la
question humanitaire : histoire, problématique et enjeux de l'aide
humanitaire internationale ellipses, Paris, 1999, p.17.
* 54 A l'instar de la
Résolution 688 du Conseil de Sécurité adoptée le
05 avril 1994 dans laquelle le C.S demande instamment à l'Irak de
permettre un accès des organisations humanitaires à tous ceux qui
ont besoin d'assistance dans tout l'Irak.
* 55 R. BRAUMAN
« Les dilemmes de l'action humanitaire dans les camps de
réfugiés et les transferts de population » in des
choix difficiles op. Cit. , pp 233-256.
* 56 R. BRAUMAN
op.cit., p.254.
* 57P.RYFMAN op. cit.,
p.162.
* 58 M. STUDER, « Le
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situation de conflit armé », in RICR n° 842juin
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* 59 O. WEBBER,
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l'action humanitaire et l'action politique, économique et
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* 61 M. STUDER op. cit.
* 62 C.SOMMARUGA, La
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* 64 P. RYFMAN op.cit.,
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* 65 C.GIROD, A. GNAEDINGER,
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* 66 J. KIZ-ERBO, A
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* 68 F. BUIGNION,
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* 69 J-C SOYER, Droit
pénal et procédure pénale, LGDJ, paris, 2002,
p.94.
* 70 J-C SOYER, op. cit.,
p.79.
* 71 Article 12 du Statut de
la CPI
* 72 Article 13 (b) du
Statut de la CPI
* 73 L'article 15 du Statut
de la CPI dispose que, le procureur peut ouvrir une enquête de sa propre
initiative ou vu des renseignements concernant des crimes relevant de la
compétence de la Cour.
* 74 Règle 104 du
texte sur le Règlement de procédure et de preuve, juin 2000.
* 75 Règle 54 1) du
texte sur le Règlement de procédures et de preuve, juin 2000.
* 76 La règle 53 du
texte sur le Règlement de procédures et de preuves prévoit
que, l'Etat qui défère une situation au procureur de la CPI en
vertu du paragraphe 2 de l'article 18 du statut de Rome doit le faire par
écrit et fournir des renseignements sur les enquêtes qu'il
mène en tenant compte dudit paragraphe.
* 77 Règle 55 du
texte sur le Règlement de procédure et de preuve, juin 2000.
* 78Article 17 a) du statut
de la C.P.I
* 79 Règle 52 1)
Règlement de procédure et de preuve, juin 2000.
* 80 L'article 20 2) du
Statut de la Cour pénale internationale dispose que, nul ne peut
être jugé par une autre juridiction pour un crime visé
à l'article 5 pour lequel il a déjà été
condamné ou acquitté par la Cour.
* 81 Règle 44 du
texte sur le Règlement de procédure et de preuve.
* 82 E. DAVID, principes
de droit des conflits armés, Bruxelles, Bruylant, 1999, p.701.
* 83 Articles 7, 8, et 9 du
code pénal camerounais
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* 86 Article 11(2) du code
pénal camerounais.
* 87 A.BULLIER,
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2001.
* 88 Article 113-3, al 2 du
code pénal français.
* 89 Article 113-6 du code
pénal français op. cit.
* 90 Nous ne mentionnerons
ici que les actes qui sont commis sur le personnel humanitaire constituent des
fautes. Nous ne mentionnerons pas toutes les infractions telles
qu'énoncées par le droit humanitaire mais juste celles qui
peuvent concerner les humanitaires.
* 91H. MAZEAUD, J. MAZEAUD,
F. MAZEAUD, CHABAS. Leçons de droit civil, tome II,
Montchrestien Paris, 1991,1355p.
* 92 H.MAZEAUD op. Cit., p.
332
* 93 S. GUILLIEN et
J.VINCENT, Lexique des termes juridiques, 13ème édition,
Dalloz, 1999.
* 94 cf. article 4(1) du
projet d la commission du droit international humanitaire.
* 95 Affaire des
activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci, arrêt du 27 juin 1986, C.I.J. Recueil 1986, par. 220 et
255.
* 96 M. DELMAS MARTY, Le
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* 97 F.BOULAN,
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juridictions répressives » in, JCP, 1973.
* 98 Article 1382 du code
civil camerounais.
* 99 Règle 85 du
Règlement de procédure et de preuve
* 100 Article 19(3) du
statut de la CPI
* 101 Règle 94 (1)
du Règlement de procédure et de preuve
* 102 Article 75 paragraphe
2 du statut de la CPI
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niveau, palais des Nations Genève- 31 mars 2004
* 151 M.J. DOMESTICI-MET,
« Cent ans après la Haye, cinquante ans après
Genève : le droit international humanitaire au temps de la guerre
civile. », in RICR n°834, pp. 277 - 301.
* 152 Entretien
passé au près du lieutenant TOUNDE André, chef de service
de la logistique et technique du commandement des écoles du centre
d'instructions de la gendarmerie Nationale.
* 153 Terme employé
dans le jargon de la gendarmerie pour désigner les gendarmes de
1er grade
* 154 CICR, « Plan
d'action pour les années 2002-2003 » in RICR
n°836, pp. 852-869.
* 155 Résolution
A/56/L64 op.Cit
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