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L'influence des facteurs culturels sur le choix d'investissement

( Télécharger le fichier original )
par Ghazwan ALI
Bordeaux IV - DEA en Sciences de Gestion 2003
  

Disponible en mode multipage

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    Université Montesquieu Bordeaux IV

    Institut d'administration des entreprises

    L'influence des facteurs culturels sur le choix d'investissement

    Mémoire pour l'obtention

    Du Diplôme d'Etudes Approfondies en Sciences de Gestion

    Elaboré par : Directeur du mémoire :

    Ghazwan ALI Professeur Gérard HIRIGOYEN

    Année universitaire : 2003/2004

    DEDICACE

    A ma chère mère qui est toujours pour moi une source de motivation, d'inspiration et qui a su me fournir les meilleures conditions de réussite,

    à toute ma famille,

    à tous mes amis

    et

    à tous ceux qui m'ont aidé.......

    REMERCIEMENTS

    Je tiens à remercier tout particulièrement le professeur Gérard HIRIGOYEN de m'avoir admis dans le cycle de D.E.A de sciences de gestion, de m'avoir initié à une discipline si riche et si proche de la réalité qui est la finance organisationnelle et enfin d'avoir accepté d'encadrer mon mémoire dont le sujet a fait l'objet d'un consentement mutuel.

    Je remercie aussi les professeurs et les maîtres de conférences qui ont assuré les cours de D.E.A de l'année universitaire 2003- 2004, qui ont chacun d'entre eux, contribué à sa façon et avec ses savoirs à enrichir mes connaissances en matière de sciences de gestion.

    Enfin, je remercie tout le personnel de l'infothèque de l'IAE pour leur travail qui m'a été fort utile pour retrouver la documentation nécessaire pour la rédaction de ce mémoire.

    FICHE D'ANALYSE DU MEMOIRE

    Titre : L'influence des facteurs culturels sur le choix d'investissement

    Auteur : ALI Ghazwan

    Directeur de recherche : HIRIGOYEN Gérard

    Date de parution : 30 JUIN 2004

    Editeur : Université Montesquieu - Bordeaux IV , Institut Régionale de gestion et d'administration des entreprises(IRGAE)

    RESUME

    Dans un monde qui se développe rapidement, l'entreprise est appelée davantage à intégrer plus de facteurs qualitatifs dans ses décisions en particulier la décision d'investissement qui est la décision la plus importante pour la survie de l'entreprise. Parmi ces facteurs non financiers, les facteurs culturels occupent la première place.

    L'univers des différences culturelles paraît souvent aux entreprises déroutant, inépuisable de complexité, insaisissable. Il n'est guère visible au premier abord, tant en apparence la technique est partout la même et les pratiques de gestion standardisées à l'échelle de la planète. Plus l'internationalisation devient réalité, plus il est claire que les cultures demeurent.

    Ce travail de recherche est focalisé sur la décision d'investissement dans ses dimensions culturelles et sur la contribution de ces dernières dans la limitation de la rationalité du décideur. L'objectif essentiel est donc de démontrer l'influence des variables culturelles sur la décision d'investissement au sein de l'entreprise. Le dirigeant qui est le décideur principal dans l'entreprise ne se limite jamais à un technicien des critères mathématiques financiers de la décision d'investissement. Il prend souvent ses décisions selon des représentations subjectives de la réalité.

    Mots clés : Théorie des coûts de transaction, théorie de l'agence, décision d'investissement, culture de l'entreprise, culture nationale, rationalité limitée, dirigeant, schéma mental, biais cognitif, gouvernement et gouvernance de l'entreprise, choix d'entrée, confiance, distance hiérarchique, contrôle de l'incertitude, temps, rapport à l'argent, religion.

    PLAN DU MEMOIRE

    Introduction générale

    Partie(1) : L'évolution de la culture à travers les théories économiques et organisationnelles

    Chapitre I. La place du facteur culturel dans les théories économiques et organisationnelles

    Section I. L'absence de la culture dans la théorie économique classique

    1. Les hypothèses de la théorie économique classique

    2. La firme point technico- économique : conceptions mécanistes de Taylor à Fayol

    3. Inefficience de la notion de culture dans cette perspective

    Section II. La remise en cause processive des hypothèses de la théorie standard et ses conséquences sur la théorie des organisations

    1. L'Ecole des Relations humaines et la contingence culturelle

    2. L'approche béhavioriste de l'organisation et la culture

    3. Les approches contingentes de l'organisation et la culture

    4. L'approche systémique et la culture

    Chapitre II. La notion de culture et les approches institutionnalistes

    Section I. Le facteur culturel dans l'ancien- institutionnalisme

    1. L'approche de Veblen

    2. L'approche de Commons

    3. L'approche de Mitchell

    Section II. Le facteur culturel dans la perspective de la Nouvelle Economie Institutionnaliste

    1. La théorie des coûts d'agence et référent culturel

    1-1. La problématique et les coûts d'agence

    1-2. L'impact de la culture sur les coûts d'agence

    2. La théorie des coûts de transaction et le référent culturel

    2-1. Les hypothèses qui fondent l'émergence de coûts de transaction

    2-2. Impact de la culture sur les coûts de transaction et le choix des structures de gouvernance

    Partie (2) : Les facteurs culturels comme un filtre des choix d'investissements

    Chapitre I. La rationalité culturellement limitée et la décision d'investissement

    Section I. Les principales caractéristiques du concept de culture d'entreprise

    1. Le concept de culture d'entreprise

    2. De la culture de l'entreprise à la culture dans l'entreprise

    3. La culture et les conditions de l'efficacité de l'entreprise.

    Section II. La formulation des relations entre la rationalité et la culture

    1. La « rationalité limitée » et les « frontières à la rationalité »

    2. L'apprentissage et l'adaptation à long terme.

    3. La culture et la possibilité de prendre la décision d'investissement

    A. La prise de décision sur la base d'une représentation subjective de la réalité

    B. Le biais cognitif comme alternative aux hypothèses d'enracinement du dirigeant

    Chapitre II. L'influence de la culture nationale des entreprises sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers

    Section 1. La culture comme facteur d'inertie de l'évolution des systèmes des gouvernements des entreprises(( étude comparative))

    1. Le modèle japonais 

    2. L e modèle allemand

    3. L e modèle anglo- américain

    4. Le modèle français

    Section II. Les éléments de la différenciation culturelle des pays et leur impact sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers

    1. le mode d'intensification et d'appartenance des individus

    1-1. Appartenance monochrone ou polychrone

    1-2. Le support de l'appartenance

    2. Le positionnement des individus les uns par rapport aux autres

    2-1. La présomption de confiance ou de méfiance

    2-2. La distance hiérarchique

    3. le positionnement des individus par apport aux éléments naturels dont particulier le temps et la religion

    3-1. la maîtrise des éléments naturels et le contrôle de l'incertitude

    3-2. L'intégration du temps dans les calculs de la valeur de l'investissement

    4. les objectifs économiques des individus 

    4-1. Le rapport à l'argent (les dimensions matérielles, spirituelles et intellectuelles)

    4-2. La création ou la distribution de richesse

    4-3.L'obtention d'un capital relationnel ou d'une rémunération

    Conclusion générale et perspective de recherche
    Bibliographie

    Introduction générale

    1. Présentation et originalité du sujet

    La décision financière dans l'entreprise se compose de trois décisions principales à savoir : la décision d'investissement, la décision de financement et la politique de dividende. La décision d'investissement qui est influencée par les deux autres composants de la décision financière (la décision de financement et la politique de dividende) occupe une place centrale dans l'entreprise. Pour maintenir, voir développer sa prospérité à long terme, l'entreprise se doit généralement d'investir (M. Cornick et PH. Dardenne, 2000). La plupart des auteurs en gestion financière considèrent d'ailleurs que les décisions d'investissement constituent les décisions les plus importantes dans l'entreprise (M. Harris et A. Raviv, 1996, p.1139). Elles permettent en fait aux dirigeants d'influencer la composition future des actifs de l'entreprise et de peser sur les orientations stratégiques de celle- ci (E. Segelod, 1995, p.15)1(*). Dès lors, il importe d'étudier et d'essayer de mieux comprendre le processus dans lequel l'entreprise prend ces décisions.

    G. Charreaux (2001) montre que les thèmes de la création de la valeur et du développement durable reçoivent un écho croissant, que se soit dans la grande presse ou dans la littérature académique alors que celui de l'investissement semble apparemment délaissé, bien qu'il est au centre de la création de valeur.

    De fait, l'approche dominante de la gouvernance de l'entreprise, inscrite dans la perspective financière traditionnelle, se préoccupe principalement de la mesure de la valeur créée par les sociétés cotées dans une perspective actionnariale et admet implicitement que le mécanisme fondamental de la création de valeur réside dans la discipline des dirigeants. Dans cette vision idyllique, à aucun moment, on ne s'interroge sur l'origine des projets d'investissement : l'ensemble des projets émerge de façon exogène et seuls les conflits d'intérêts opposant les actionnaires aux dirigeant peuvent conduire à une politique d'investissement sous optimale en raison de l'existence d'une asymétrie d'information, traitée d'une façon très naïve. Selon cette perspective, d'ailleurs, la question de l'investissement se résume à l'évaluation, c'est- à- dire à l'actualisation d'une chronique de flux anticipés.

    Mais, dans la réalité, le choix d'investissement ne se réduit pas à l'application mécanique d'un critère d'évaluation. Comme le fait remarquer A.V. Thakor (1993, p.135) : « les firmes ne réalisent pas toujours l'ensemble des projets disponibles à VAN positive ; dans certains cas, elles rationnent leur capital. Les firmes accordent une grande attention à la façon dont les décisions d'investissement sont prises (.....). Et la manière dont le projet est financé a des implications importantes. Cette préoccupation d'expliquer les décisions d'investissement telles qu'elles se prennent en réalité ne faisait finalement que rendre les conclusions établies par Bower dès 19702(*). Or, comme le notent également et plus récemment M. Harris et A. Raviv (1996, p.1143), on trouve étonnamment peu de travaux théoriques sur les processus d'investissement3(*).

    De même, Les critères de la décision d'investissement ne sont pas universels. Des critères adaptés pour une organisation particulière dans un environnement donné peuvent se révéler non pertinents dans d'autres types d'organisation et d'environnement. Au delà des caractères qui permettent de décrire objectivement ce dernier (par exemple les règles légales, les réseaux financiers, les accords de réseaux....), la représentation cognitive, subjective, que s'en fait le dirigeant conditionnent également le processus d'investissement (G. Charreaux, 2001).

    Un grand nombre des études ont été effectué dans l'objectif de comparer les pratiques des entreprises en matière de leur choix d'investissement. Dans ce cadre, M. Cornick et PH. Dardenne(2000) montrent, dans leur article ayant pour thème « La décision d'investissement :une comparaison des pratiques aux Etats- Unis et en Europe », qu'il y a, dans toutes les grandes entreprises, américaines et européennes, une certaines standardisation des pratiques d'évaluation qui échappent aux barrages culturels nationaux. Mais ils découvrent aussi plusieurs facteurs de différences, démontrant une plus grande sophistication de l'évaluation menée outre- Atlantique. Les auteurs montrent aussi que si l'importance accordée par les dirigeants américains aux critères comptables et financiers est moindre, il se peut que d'autres critères( en particulier des critères qualitatifs et non financiers) aient plus de poids dans la décision d'investissement.

    Dans les travaux de gouvernance comparée sur le plan international (notamment, R. La Porta et ali. 1997b, 1998b), on s'interroge, en particulier sur le rôle des contraintes légales pour préserver les investissements des actionnaires. Ainsi R. La Porta et ali. (1998b) concluent que la meilleure protection est offerte par les pays anglo- saxons de common law. Inversement, la protection serait particulièrement 4(*)médiocre dans les pays ayant adopté le système français, les pays germaniques et scandinaves se situant dans une position intermédiaire. On peut cependant prétendre que la protection des investisseurs repose également sur le respect volontaire des engagements pris, donc sur les mécanismes de confiance, les relations entre mécanismes formels et informels pouvant être de complémentarité ou de substitution. Selon F. Fukuyama (1994), les mécanismes de confiance joueraient également très différemment selon les pays, ce qui est corroboré par les résultats de l'étude de R. La Porta et ali. (1997c) : les pays dominés par des systèmes organisationnels religieux à fort pouvoir hiérarchique (le catholicisme, par exemple) seraient également défavorisés5(*).

    Les cultures nationales ne sont pas sans effet, et sont d'ailleurs en partie liées aux cultures et aux fonctions principalement mobilisées dans l'entreprise. Y. Lu et R. Heard (1996) constatent qu'en Grande Bretagne les financiers jouent un rôle de premier plan dans la représentation des projets et dans l'évaluation de leur rentabilité, alors qu'en Chine ce sont les ingénieurs qui sont au premier plan dans ces parties du processus de décision. D'une manière générale, les cultures agissent comme filtres cognitifs et les différences culturelles créent des difficultés de communication informelle (A. Desreumaux et P. Romelaer, 2001).

    D'où l'originalité de cette recherche est d'essayer, d'une part, de trouver, parmi les facteurs qualitatifs et non financiers, des variables culturelles ayant l'influence sur le choix d'investissement. Et d'autre part, d'analyser la décision de l'investisseur étranger qui préfère sous l'influence de la distance culturelle certains pays à d'autres, même si l'évaluation financière est compatible pour les deux pays. Sachant que malgré l'existence d'un grand nombre de travaux théoriques sur la culture et la culture de l'entreprise en tant qu'un facteur de performance, la décision d'investissement n'était pas traitée dans sa dimension culturelle.

    2. L'intérêt théorique du sujet

    En partant des théories organisationnelles(l'école des relations humaines, les approches béhavioristes de l'organisation, les approches contingentes de l'organisation et l'approche systémique) qui ont remis en cause les théories économiques classiques et en se focalisant ensuite sur la théorie de l'agence(M.C. Jensen et W.H Meckling, 1976) et celle de transaction(R.H Coase,1937 et O. Williamson, 1985), nous essayerons de proposer, à partir des développements déjà existants sur le processus de décision d'investissement, un modèle susceptible de refléter davantage l'influence des facteurs culturels.

    La question de maîtriser cette influence et des méthodes pour y parvenir exige de comprendre l'évolution de la notion de la culture au sein des théories économiques et organisationnelles étant donné que la théorie financière, en matière de choix d'investissement, s'est limitée sur des critères objectifs (absence des facteurs culturels) tels que la VAN et le TRI.

    A partir de là, il serait judicieux de montrer la place des facteurs culturels dans le choix d'investissement et comment ces facteurs peuvent être considérés comme un filtre des choix d'investissement.

    Cette réflexion ouvre de nouvelles perspectives de recherche sur le processus d'investissement au sein de l'entreprise sachant que concevoir l'organisation comme un modèle non linéaire remet en cause les modalités traditionnelles de la décision d'investissement. Mais cette recherche pose aussi la question de savoir, si dans un environnement incertain, il est rationnel de vouloir maîtriser et intégrer ces facteurs dans le processus de décision.

    3. L'intérêt pratique du sujet

    Dans un contexte de mondialisation, le concept de la culture prend de plus en plus d'ampleur dans la décision financière de l'entreprise, en particulier le choix d'investissement dont les raison, les types, les étapes et les critères varient d'une culture à l'autre.

    La prise en compte de la dimension culturelle de la gestion financière a pour objectif de lui donner du sens, et part conséquent de la vigueur au rite, et un commencement de tribu (E.M.Hernandez, 2000, p.58).

    De même, l'intégration des facteurs culturels dans le processus de la décision d'investissement permet de prendre en compte la personnalité du décideur, son schéma mental, ses expériences son histoire et son contexte social. Elle permet aussi de prendre en considération la distance culturelle entre les partenaires et ses conséquences sur les coûts de transaction, d'agence et d'opportunité. Une intégration de ces facteurs dans la décision d'investissement peut constituer une solution pour l'entreprise.

    On remarque une certaine faiblesse au niveau de la recherche empirique alors que l'intérêt théorique nous amène forcement au traitement empirique afin d'éclaircir ce phénomène et s'approcher le plus possible de la réalité de l'entreprise contemporaine.

    Nous entendons par l'élaboration de telle étude de préparer la piste pour des recherches ultérieures en particulier la thèse en vue de traiter le problème de la création d'une entreprise en joint Venture en Syrie. Cette forme organisationnelle qui a été souvent élaborée par les investisseurs étrangers comme un mode de pénétration dans un contexte culturellement différent.

    4. La problématique

    On prend normalement la décision d'investissement selon des critères financiers telles que la VAN et le TRI qui sont des critères objectifs quantitatifs. Mais dans certains cas, on trouve que la décision d'investissement ne est pas prise même si les critères financières sont compatibles. Ce qui nous conduit à chercher d'autres critères subjectifs qualitatifs influençant la décision d'investissement au sein de l'entreprise.

    De ce fait, est- ce que les facteurs culturels influencent la décision d'investissement ?

    Si oui, comment et jusqu'à quel point cette décision sera influencée par ces facteurs ?et quelle est l'importance relative de chaque variable culturelle dans la décision d'investissement ?

    Est - ce que les critères financiers de la décision d'investissement sont les mêmes dans toutes les cultures?

    G.Charreaux(2001) montre que l'asymétrie d'information est considérée habituellement comme la source principale de conflit d'intérêt entre les parties prenantes. Cette asymétrie d'information est, selon l'auteur, susceptible de créer des distorsions en matière d'investissement.

    La question qui se pose, est - ce que la différence culturelle provoque une asymétrie d'information entre les partenaires ? cette différence peut-elle expliquer le mauvais choix d' investissement ?

    Dans ce cadre se pose aussi la question de l'homogénéité culturelle de groupe qui entoure le dirigeant et qui participe à la prise de décision. Est- ce que cette homogénéité culturelle contribue à expliquer le mauvais choix d'investissement du dirigeant ?

    Enfin, La culture nationale du pays d'origine influence le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers(U. Mayrhofer, 2002). L'analyse effectuée par l'auteur confirme la nécessité d'intégrer la variable culturelle dans les modèles explicatifs du mode d'entrée. Dans ce cadre, est- ce que la création d'une entreprise en Joint Venture International est considérée comme mode d'entrée dans un pays culturellement diffèrent ?

    5. L'objectif poursuivi

    Nous analyserons, dans ce travail, la décision d'investissement dans sa dimension culturelle et nous montrerons que le dirigeant peut, sous l'influence des facteurs culturels, choisir le mauvais choix d'investissement, tout en refusant le bon.

    Après avoir montré la place des facteurs culturels dans les théories économiques et organisationnelles (partie (1)), nous aurons essentiellement deux objectifs à poursuivre (partie (2)):

    1-) Comment la culture est- elle considérée comme un filtre de choix d'investissement ?

    2-) Quelle est l'influence de la culture nationale des entreprises sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers ?

    Dans le premier objectif, nous analyserons la culture de l'entreprise en tant que facteur de stabilité et de performance de celle- ci, mais aussi en tant qu'un facteur de limitation de la rationalité de la décision, en particulier la décision d'investissement. Dans ce cadre, nous montrerons que le dirigeant est influencé par son contexte social, ses expériences, son histoire, sa formation initiale ....etc. Ce qui nous conduira à dire que sa décision sera prise selon des représentations subjectives de la réalité dans lesquelles interviennent les facteurs culturels .

    Dans le deuxième objectif, nous montrons que la culture est un facteur d'inertie de l'évolution des systèmes des gouvernements des entreprises et que la variation de ces systèmes a des racines socioculturelles. Ce qui nous conduira à préciser les éléments de la différenciation culturelle des pays et leur impact sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers.

    Partie(1) : L'évolution de la culture à travers les théories économiques et organisationnelles

    Dans la théorie économique classique, l'entreprise était une boîte noire ou une fonction de production à laquelle s'impose de toute façon le marché. L'individu Homo oeconomicus est considéré comme unité de décision autonome. Les individus agissent indépendamment de toute contrainte sociale ou culturelle. Le critère de la décision était le profit. La firme est ainsi conçue comme un acteur individuel en ce qu'elle est considérée comme une unité de décision rationnelle dont l'objectif est de maximiser le profit sous des contraintes technologiques.

    Dans les théories organisationnelles qui ont remis en cause les hypothèses de la théorie économique classique, la dimension humaine et culturelle a été prise en considération dans les décisions effectuées au sein de l'entreprise. Dans la théorie des relations humaines, on trouve, selon Mayo, que le profit n'est pas la motivation ultime et unique des acteurs des organisations. L'objectif de maximisation est remis en cause et celui de satisfaction lui est substitué dans les approches béhavioriste de Cyert et March. Lawrence et Lorsch conçoivent, dans leur approche contingente, l'organisation comme un système ouvert composé de trois sous systèmes scientifique, commercial et techno- économique qui ont chacun des caractéristiques structurelles telles que la nature de leurs objectifs, leur orientation temporelle, leur mode relationnel et leur degré de formalisation. Enfin, dans la systémique, Fons Trompenaars a considéré l'organisation comme système socioculturel dont les membres sont dotés d'objectifs propres.

    Mais, dans l'économie institutionnelle, la notion de la culture semble plus claire. Or, dans l'ancien institutionnalisme, la culture était comme une synthèse d'institutions dont chacune couvre son propre domaine et sa propre fonction (Walton H. Haamilton,1932). Mais, la perspective néo- institutionnelle va plus loin dans l'analyse de son impact sur les coûts de transaction, d'agence et de la sélection des structures de gouvernance.

    Ainsi, pour montrer l'évolution de la culture à travers les théories économiques et organisationnelles, nous analyserons, dans un premier chapitre, la place du facteur culturel dans ces théories et nous montrerons, dans un deuxième chapitre, le rôle de ce facteur selon les approches institutionnelles.

    Chapitre I. La place du facteur culturel dans les théories économiques et organisationnelles

    Après avoir constaté, en premier lieu, l'absence de la prise en compte de la variable culturelle ou institutionnelle dans les théories classiques, nous passerons, en deuxième lieu, rapidement en revue l'évolution des théories de l'organisation à travers les principales révisions qu'elles opèrent sur les hypothèses qui fondent l'économie standard. Nous tenterons alors d'éclairer ces révisions avec la perspective culturelle et les éléments de contingence supplémentaire qu'elle propose au modèle standard.

    Section I. L'absence de la culture dans la théorie économique classique

    Dans un contexte économique de plus en plus international et multiculturel, il est surprenant de constater que le facteur culturel n'a que très peu été intégré dans les théories économiques et organisationnelles. Celles-ci, quoiqu'elles constituent le cadre conceptuel de base, reposent sur des hypothèses restrictives, et développent une conception limitée de la firme.

    1. Les hypothèses de la théorie économique classique

    Dès le XVIIIème siècle, Adam Smith donnait les prémisses de la micro- économie traditionnelle en suggérant que la poursuite des intérêts égoïstes devait conduire à la réalisation de l'intérêt général. Cette proposition est fondée sur l'hypothèse d'une ''mains invisible'' qui ferait avancer l'individu égoïste ''vers une fin qui ne fait point partir de son intention.[....] En poursuivant son propre intérêt il fait souvent avancer celui de la société plus efficacement que s'il y visait vraiment''.6(*)

    La micro- économie traditionnelle développe et formalise en effet cette proposition en posant l'échange marchand comme le moyen plus efficace de l'allocation des ressources dans un contexte de la concurrence parfaite dans lequel l'Etat ne doit intervenir que pour assurer ses fonctions régaliennes.

    Les hypothèses avancées par la micro- économie traditionnelle visent alors la maximisation du profit, commun à tous les acteurs économiques qui tendent à poursuivre leur propre intérêt . L'individu ou Homo oeconomicus  constitue donc une ''unité de décision autonome'', qui est aussi ''maximisateur'' de sa propre satisfaction(P. Cahuc, 1993).

    Elles établissent ensuite le principe de la rationalité de l'individu qui a la capacité étant données les contraintes qui s'imposent à lui, d'avoir accès à l'information puis la volonté d'utiliser au mieux les ressources dont il dispose dans la poursuite de son objectif.

    Le marché est quant à lui considéré dans un contexte de concurrence parfaite. Cette organisation se traduit au travers de quatre hypothèses :

    v Les échanges individuelles sont négligeables par apport à l'ensemble des échanges.

    v Les produits sont homogènes de sorte que les acheteurs sont indifférents à l'identité des vendeurs.

    v L'entrée du marché est libre de sorte qu'il n'a pas de collusion.

    v Et enfin, la transparence de l'information est de fait supposée telle que les acteurs économiques sont informés à tout moment de la qualité et du prix des produits.

    La théorie micro- économique étudie donc le fonctionnement de l'échange marchand entre des acteurs rationnels maximisateurs en situation de concurrence parfaite. Dans cette perspective, les individus agissent donc indépendamment de toute contrainte sociale ou culturelle.

    Le modèle walrasien7(*) décrit ainsi le mécanisme de la formations des prix par le jeu qui s'instaure entre l'offre et la demande. Le marché permet ainsi en situation de concurrence parfaite d'atteindre un équilibre caractérisé par une utilisation efficace des ressources dans lesquelles la satisfaction des acteurs est maximisée(équilibre de Paréto).

    Cet équilibre n'est cependant atteint que sous certaines conditions concernant notamment la préférence des consommateurs, la technologie des firmes et l'organisation des marchés qui nécessite l'absence de monopoles, de biens indivisibles ou encore les coûts de transactions. Les hypothèses de fonctionnement de l'équilibre walrasien sont donc très restrictives et s'avèrent peu efficaces dans leur confrontation avec la réalité de l'économie.

    2. La firme point technico- économique : conceptions mécanistes de Taylor à Fayol

    Dans le contexte de la micro- économie ainsi décrite, la firme n'est alors qu'une composante de la théorie des prix et de l'allocation des ressources. Elle se réduit alors selon l'expression de (B. Coriat et O. Weinstein,1995) à une ''firme point'' ou ''une boîte noire''8(*). La firme en tant qu'outil de production est ainsi réduite à une ''firme automate'' qui transforme des ressources en s'adaptant mécaniquement à son environnement.

    En l'absence de progrès techniques, sa fonction se borne à une fonction de production. Elle a certes aussi la possibilité de choisir certaines variables d'actions, parmi celles qui sont à sa disposition, mais celles- ci sont déterminées par le marché qui s'impose de toute façon à elle. Ce processus s'opère alors sous l'hypothèse que la firme a elle aussi une rationalité parfaite, une connaissance et une maîtrise des techniques optimales, et un accès transparent aux prix donnés par un marché ''simple et inerte''9(*). La firme est ainsi conçue comme un acteur individuel en ce qu'elle est considérée comme une unité de décision rationnelle dont l'objectif est aussi la maximisation du profit sous des contraintes technologiques. L'école classique du management initiée par Henri Fayol(1814-1925) et frederick Taylor(1856-1915) participent à cette approche mécaniste et rationnelle de l'économie du point de vue de l'entreprise.

    Le premier a jeté les bases de la théorie administrative en détaillant six groupes d'opérations dans l'entreprise qu'il qualifie de techniques, commerciales, financières, comptables, administratives et enfin celles qui sont liées à la sécurité. Il s'est surtout intéressé aux problèmes de direction, correspondant aux opérations administratives, qu'il considère comme décisives pour l'entreprise. Ces opérations administratives se déclinent alors en cinq types d'actions que sont celles de ''prévoir'', ''organiser'', ''commander'' et ''contrôler''. Les principes qui permettent alors à l'entreprise conçue comme un ''corps social'' de bien fonctionner sont au nombre de quatorze : la division du travail, l'autorité, la discipline, l'unité de commandement, l'unité de direction, la subordination des intérêts particuliers à l'intérêt général, la rémunération, la centralisation, la hiérarchie, l'ordre, l'équité, la stabilité du personnel, l'initiative et l'union du personnel(P. Morain,1999).

    Cette théorie conserve donc une approche mécaniste maximixatrice de l'efficacité de l'entreprise. La contingence humaine prise en compte concerne l'autorité du chef qui n'est pas seulement statutaire mais dépend de la capacité du chef à se faire obéir. Outre cette dimension contingente, l'efficience de l'organisation repose avant tout sur des règles de fonctionnement normatives. M.Weber10(*) a aussi proposé dans le cadre de son oeuvre une théorie des organisations. Il s'intéresse à l'exercice de l'autorité et étudie le modèle de l'armée prussienne. Analysant la structuration de cette organisation en bureaux, il qualifie son modèle de bureaucratique par opposition aux systèmes qui l'ont précédé. Dans la même volonté d'améliorer le fonctionnement de l'entreprise et plus particulièrement de la productivité afin toujours de mieux satisfaire l'objectif de maximiser du profit, Fredrick Taylor s'est quant à lui intéressé avec Babbage, Gantt et Gilbreth à développer une ''organisation scientifique du travail''11(*). Selon lui, l'amélioration de la productivité passe par l'accroissement du rendement du travail de l'ouvrier qui n'est selon lui qu'une question de méthode. Il développe donc une méthode par laquelle les tâches des employés et ouvriers sont étudiées, préparées et fractionnées réduisant ainsi l'initiative de ceux- ci en augmentant leur rendement. Certes, cette organisation s'accompagne d'un système de rémunération de sanction et de promotion librement consenti entre la direction et le personnel (F. Vatin,1990). Pour Taylor, la prospérité des employeurs et celles des employés vont de pair :le profit pour l'entreprise, la hausse des salaires pour les employés grâce à l'augmentation de la productivité (J.P. Helfer, M. Kalika et J.Orsoni, 2002).

    Reste que les individus sont encore considérés comme des éléments passifs qui s'insèrent mécaniquement dans une organisation du travail rationalisée. La seule motivation pour l'homme était l'argent. Non seulement l'homme est interchangeable mais dans l'organigramme il se réduit à sa fonction(J. Rojot,2003).

    Ces théories administratives et scientifiques du travail ont certes été à l'origine d'une meilleure compréhension du fonctionnement de l'entreprise mais elles sont avant tout normatives et n'expliquent ni l'émergence de la firme dans le marché, ni ne prennent en compte les contingences humaines, institutionnelles ou environnementales de son fonctionnement et de son évolution. L'organisation est conçue comme un outil mécanique(organon) dont l'objectif est la réalisation d'objectifs organisationnels de nature technique et économique. Selon Bernard de Montmorillon et Jean Pierre Pitol- Belin Dans l'approche classique du management, ''tout se passe comme si les hommes qui composent l'organisation abandonnaient leurs valeurs, leurs croyances en pénétrant dans l'entreprise''12(*). L'homme est assimilé à un animal- machine qui avance avec une carotte et que l'on sanctionne à l'aide d'un bâton. L'homme ne souhaite qu'une chose :travailler et ne pas penser, donc accomplir la tâche la plus simple possible(J.P. Helfer, M. Kalika et J.Orsoni, 2002).En outre cette approche ignore les interrelations entre l'entreprise et son environnement.[....].Les problèmes de spécificité, l'adaptation de l'entreprise aux contraintes de l'environnement, en particulier par le biais de la structure, semble absents du discours classique. L'entreprise apparaît comme un système clos fonctionnant selon des règles préétablies.13(*)

    La théorie économique des investissements a été influencée par le paradigme classique dominant et s'est développée, selon (M. Nussenbaun,1978), dans deux directions : une théorie descriptive, définie au niveau des groupes d'entreprises et de l'économie nationale, qui cherche l'explications des montants d'investissements au niveau des branches et des structures et une théorie normative qui propose à l'entreprise des méthodes rationnelles de choix d'investissements.

    La conception de la firme dans les premiers modèles est la même que la théorie micro-économique, enrichie par des développements de la théorie financière. L'explication de l'investissement au niveau des groupes d'entreprises fait intervenir des variables globales comme le taux d'intérêt, et des variables caractéristiques des entreprises, mais dérivées des théories globales telles que les variables d'accélération. La confrontation avec la réalité et la nécessité d'aboutir à des modèles prévisionnels, ont conduit les auteurs à introduire également les variables caractéristiques de la structures des actifs financiers des firmes et du risque de leurs activités. Ces données, de nature comptable, sont publiées par les firmes ayant une structure juridique de société anonyme. Ces modèles sont le plus souvent de nature déterministe par suite des difficultés de prise en compte de l'incertitude.

    Les théories normatives reposent elles aussi sur des concepts et des hypothèses micro-économiques. La firme y est rationnelle et maximise un seul objectif : le profit. Elle s'est définie par une fonction de production à laquelle est rattachée la loi des rendements décroissants ; le milieu dans lequel elle se trouve est donné par la fonction de demande et se ramène le plus souvent à la concurrence parfaite. Les modèles sont de nature déterministe ou bien s'y ramènent par la définition d'équivalents certains, comme l'espérance mathématique. L'information est supposée gratuite et la décision est fondée sur la maximisation du profit pour un ensemble de choix donné.

    3. Inefficience de la notion de culture dans cette perspective

    La question se pose dès lors de la pertinence qu'offre la présentation du marché et de la firme proposée par la théorie économique standard si l'on considère l'impact des cultures nationales ou régionales sur l'organisation.

    La visualisation mécanique et déterministe du marché et de la firme repose en effet sur des hypothèses de rationalité et de concurrence parfaite ainsi que sur celle de maximisation du profit. Ces hypothèses évacuent de fait les imperfections avérées du marché de même que l'introduction de toute dynamique économique liée aux comportements des individus ou de la collectivité, à leur capacité collective et individuelle à générer de nouvelles règles, à l'adaptation des formes institutionnelles à la réalité industrielle, et au jeu qui s'instaure entre les interactions effectives qui prennent place entre les individus et leurs représentations.

    Or, la culture est, selon (D. Bollinger., G. Hofstede,1992), une programmation mentale qui détermine les comportements et les objectifs des individus. Elle constitue aussi le référent de leur rationalité du fait que la culture est considérée comme des frontières à la rationalité. Ainsi, si nous considérons que la culture varie d'un groupe à l'autre, leur rationalité varie aussi (E. Delavallée,1995).. Cette rationalité culturellement limitée est considérée, comme nous le verrons dans la deuxième partie, un filtre de choix d'investissement. Par ailleurs, la notion de la concurrence parfaite qui s'appuie sur la transparence de l'information peut être remise en question dans le cas de situations interculturelles du fait que la distance culturelle, selon (J. Engelhart., S. Eckert, 1999)14(*), augmente l'incertitude entre les acteurs. Enfin, l'objectif économique premier avancé par la micro- économie traditionnelle peut lui même être nuancé par l'interprétation que les individus ont de leurs intérêts individuels et collectifs, lequel n'est seulement la maximisation du profit individuel mais peut être influencé par leur référent culturel. Les activités économiques sont influencés par le contexte social dans lequel elles sont imbriquées (U. Mayrhofer., F. Roth,1999).

    Si les hypothèses de la théorie économique des investissements sont acceptables dans le cadre d'un modèle explicatif du comportement d'un groupe d'entreprises pour lequel les interactions entre firmes éliminent les caractéristiques individuelles, elles ne le sont plus lorsqu'il s'agit de fournir un outil de décision à une entreprise particulière. En effet, une entreprise est le plus souvent en situation d'incertitude et n'est pas un centre de décision unique maximisant le profit, mais plutôt une organisation sociale dont les différents éléments poursuivent des objectifs qui ne sont pas toujours compatibles. De plus, les dirigeants ne prennent généralement pas leurs décisions sur un ensemble de choix potentiels optimaux, mais sur un ensemble déjà tiré par les échelons hiérarchiques inférieurs (M. Nussenbaun,1978).

    La décision d'investissement ne peut plus alors être considérée comme un événement ponctuel, mais comme un processus qui se découle dans le temps. Il commence par la prise de conscience d'un problème posé à l'organisation, il se poursuivit par l'élaboration de l'ensemble de choix proprement dit et s'achève par la décision finale. En conséquence, l'optimisation des choix d'investissement suppose non seulement de l'emplois des critères de choix optimaux, mais également la connaissance du processus d'élaboration de l'ensemble de choix. Il implique donc l'étude du processus de décision lui même.

    Un modèle complet de la décision d'investissement doit alors traiter non seulement de la décision finale, mais aussi des différentes étapes qui y ont conduit. Sachant que les critères, les étapes, les raisons et les types varient d'une culture à l'autre (L'hermitte, 1999).

    Par ailleurs, les hypothèses de la micro- économie traditionnelle ont été progressivement remises en cause non seulement par les institutionnalistes comme nous le développerons dans le deuxième chapitre de cette partie, mais aussi par les chercheurs en économie et en théorie des organisations. En effet, les dysfonctionnements observés entre cette théorie et la réalité du fonctionnement économique les ont déjà conduits à cette révision. Nous allons donc dans un premier temps reprendre rapidement ces différentes révisions que nous enrichirons de la perspective culturelle avant de nous concentrer plus particulièrement sur les approches contractuelles puisque la variation du référent culturel qui influence les transactions entre individus peut en effet apporter un éclairage intéressant à la notion de transaction, au coeur des théories contractuelles.

    Section II. La remise en cause progressive des hypothèses de la théorie standard et ses conséquences sur la théorie des organisations

    La remise en cause de certaines hypothèses fondatrices de la micro- économie standard ont en effet progressivement permis de complexifier et d'enrichir la visibilité du fonctionnement des échanges ainsi que celui de la firme.

    1. L'Ecole des Relations humaines et la contingence culturelle

    Dans la construction classique, un aspect apparaît complètement ignoré :celui des relations entre les individus. C'est sur cette base que l'école des relations humaines va se développer (J.P. Helfer, M. Kalika et J.Orsoni, 2002). Certes, les auteurs de ce courant ont permis d'assouplir le modèle de la firme ''point'' ou celui de marché ''mécanique'' en introduisant une contingence liée à la nature de l'individu. Cependant, ils ont souvent considéré cette contingence de la manière encore trop mécanique en considérant des règles universelles du jeu social ou humain. Tout le contexte hors d'entreprise, familiale, personnel, politique est écarté. Dans ces cas, les promesses implicites de la théorie sont trompeuses (J. Rojot,2003).

    Les travaux que E Mayo(1949)15(*) a conduits à Hawthorne, dans l'usine de la société Western Electric, lui ont permis de montrer que ce n'était pas seulement les conditions matérielles de travail qui permettaient d'influer sur la productivité mais aussi les conditions psychiques du travail. L'observation des chercheurs s'est faite en interaction avec le personnel qui s'est trouvé motivé par cette expérience et a augmenté son rendement. Il a considéré que la recherche unique du profit n'étaient pas la motivation ultime et unique des acteurs des organisations. Il a alors mis en avant l'importance pour le rendement de la participation, de la coopération et de la discussion au sein des groupes de travail. Ce faisant, Mayo touche à l'une des hypothèses majeurs de la micro- économie standard, à savoir, l'existence d'individus maximisateurs ayant pour seul objectif le profit. Il introduit une contingence quant aux motivations des individus au travail.

    Le profit n'est alors pas la seule motivation. On trouve dans les travaux de Bollinger, et Hofstede (1992) d'autres motivations au travail tel que la motivation par les performances, la motivation par la sécurité, les besoins de socialisation dans des relations chaleureuses et les besoins de se distinguer. Selon ces auteurs, les motivations varient d'une culture féminine à une culture masculine.

    A.H. Maslow(1954)16(*) approfondit encore l'analyse de Mayo relative à la motivation des individus dans l'organisation en mettant en place une pyramide qui hiérarchise les besoins humains des plus fondamentaux aux plus élaborés. Il commence ainsi par énoncer les besoins physiologiques qu'il fait suivre par les besoins de sécurité, d'appartenance d'estime et enfin d'accomplissement. Si la définition d'une échelle de besoins permet d'introduire un facteur humain et non plus seulement mécaniste dans la performance organisationnelle, la question de l'universalité de sa hiérarchisation peut être alors remise en cause par la perspective culturelle, particulièrement aux niveaux les plus élaborés (Bollinger D et Hofstede G (1992), Hofstede G,(1980)).

    Selon ces auteurs, cette pyramide des besoins humains montre une structure culturelle sous- jacent qui est la suivante : à la base, et tout d'abord, les pays doivent avoir un faible degré de contrôle de l'incertitude (n'avoir peur de l'avenir), puis pour réussir selon la hiérarchie, il faut un fort degré de masculinité et enfin, pour arriver au sommet, posséder un individualisme forcené : n'est- ce pas la mentalité américaine ?

    Ainsi la force du besoin d'appartenance dans un contexte culturel collectiviste polychrone est certainement susceptible de passer avant les besoins d'accomplissement sinon d'estime alors que l'on peut constater l'inverse dans un environnement culturel individualiste monochrone (USA). Outre leur intensité, ces besoins peuvent aussi prendre des formes différentes, l'appartenance se manifestant par rapport à la référence familiale restreinte dans certains contextes culturels, ou à la référence familiale élargie dans certains autres.

    De même, K. Lewin(1951)17(*) introduit aussi l'acteur individuel au centre de l'organisation en montrant que le comportement du groupe est induit par le chef et que par conséquent le style de direction (leadership) est déterminant pour le fonctionnement et l'efficacité de l'organisation.

    Dans le prolongement de ces travaux, R. Likert(1961)18(*)essaie d'établir un nouveau type d'organisation plus performant. Celle-ci doit être centrée sur le groupe au travail et non plus sur l'individu et intègre les valeurs individuelles de chacun. Il oppose le système participatif par groupe aux systèmes autoritaires, exploiteurs, paternalistes et consultatifs. L'articulation se fait par l'appartenance de chaque membre de la hiérarchie à deux groupes(le linking pin, récemment redécouvert).

    G. Hofstede(1987) montre qu'en France et en Belgique, les subordonnés, en règle générale, refusent de participer. Ils attendent que leurs dirigeants se conduisent en autocrates, en sorte que, par leur conduite, ils rendent difficile à leur dirigeants toute autre type de conduite. La direction participative est très rare en France et en Belgique. Mais, la société est en même temps collectiviste, il peut exister pour les subordonnés des moyens qui leurs permettent d'influer sur leur chef en tant que groupe. Cela est aussi vrai pour tous les pays d'Asie

    Enfin, en gardant toujours l'axe de motivation au travail, McGregor(1960)19(*) prend l'hypothèse que l'homme est naturellement paresseux et éprouve une aversion congénitale pour le travail qu'il n'effectue que sous l'influence de sanctions. Il n'a alors ni ambition, ni initiative et préfère être en ce sens dirigé en optant pour la sécurité. Le but pour la direction est alors de produire des conditions de travail qui favorisent la réalisation des objectifs de l'individu tout en faisant converger leurs objectifs vers ceux de la firme. Reste que la perception de l'attitude naturelle de l'homme par apport au travail est ainsi considérée comme une hypothèse universelle par McGregor. Celui- ci n'envisage ainsi nullement qu'elle peut être culturellement variable ainsi que le montre Adler ou Hofstede pour qui les cultures valorisent différemment le travail, certains intégrant plutôt la formule du ''travail au service de la vie'', tandis que d'autres lui préfèrent celle de ''la vie au service du travail''.

    Dans la lignée de McGregor, F. Herzberg et ali.(1959)20(*) avance alors que les conditions de travail optimales pour réaliser les objectifs de l'entreprise s'obtiennent dans la mesure où l'individu s'épanouit en se valorisant. Ce résultat peut être obtenu en prenant en compte cinq facteurs de satisfaction au travail que sont l'accomplissement de ses capacités, la reconnaissance par les auteurs des résultats obtenus, la nature et l'intérêt du travail effectué, la responsabilité de l'individu, sa promotion et enfin la possibilité de développement. De même, il établit plusieurs facteurs de mécontentement ou d'ambiance qui inhibent la motivation des individus et qui sont la politique et l'administration de l'entreprise, le profit de supérieur, la rémunération, les relations entre personnes, les conditions de travail, la sécurité de l'emploi, la vie privée et finalement le prestige.

    Cette dernière approche est intéressante car elle permet comme les autres approches de l'école des relations humaines, de mettre en place des facteurs humains de variabilité de la performance des individus et donc l'organisation. Elle ne pousse cependant pas l'analyse jusqu'à considérer les causes de cette hiérarchisation des conditions énoncées. Ainsi, les cinq facteurs de satisfaction au travail peuvent être pondérés et déclinés différemment d'une culture à l'autre de même que les facteurs de mécontentement.

    L'Ecole des Relations Humaines a donc contribué à faire évoluer la conception mécanique de la firme vers une conception plus organique en introduisant une contingence de type humaine. En effet, elle a l'avantage de replacer l'individu, l'homme, au centre de l'organisation. Elle a mis en évidence l'importance des relations dans les groupes et entre les groupes (J. Rojot,2003).Mais elle a aussi indirectement contribué à ouvrir la voie d'une contingence de type culturel dans la mesure où elle questionne les motivations et donc les attitudes et valeurs des individus au travail.

    En résumé, cette brève revue des analyses proposées par l'Ecole des Relations Humaines est particulièrement intéressante dans la perspective de l'approche culturelle car elle introduit, à travers la variabilité des motivations des individus au travail, l'impact des valeurs et des comportements individuelles ou collectifs sur la performance des organisations. Elle ne va cependant ni jusqu'à analyser la potentielle variation des facteurs de motivations selon les cultures, ni à considérer le jeu interactif et dynamique d'influence qui peut se produire entre les valeurs culturelles et l'évolution des formes organisationnelles.

    2. L'approche béhavioriste de l'organisation et la culture

    Une autre remise en cause importante des hypothèses classiques concernant l'individu a été amorcée par Simon puis développée par Cyert et March(1963). Le premier introduit la notion de rationalité limitée des individus dont la capacité à recevoir, stocker et traiter les informations est physiquement limitée. March et Simon considèrent que dans une situation donnée, le choix est toujours exercé au regard d'un schéma simplifié, limité et approximatif de la situation réelle. Cette simplification provient de l'incapacité humaine à formuler et à résoudre des problèmes complexes Dès lors, l'objectif de maximisation est aussi remise en cause et celui de satisfaction lui est substitué. L'entrepreneur ne maximise plus son profit mais recherche un niveau de satisfaction laquelle est liée au niveau subjectif de ses aspirations. Sa connaissance des prix et des coûts est incomplète et, il ne peut prendre en compte qu'un nombre limité d'hypothèses afin de formuler ses choix. Cette perspective permet alors d'introduire la culture comme cadre de référence et donc de limitation de la rationalité des acteurs. De ce fait la rationalité est culturellement limitée (E. Delavallée,1995). Cette hypothèse est très importante pour la suite de notre développement dans la mesure où cette référence culturelle limite le choix d'investissement.

    L'école béhavioriste, essentiellement mise en place par Cyert et March remet alors en cause la conception d'une organisation prise comme un acteur économique doté d'objectifs propres afin de la considérer comme ''coalition interactive de différents groupes d'individus aux objectifs conflictuels''21(*).

    Les deux auteurs considèrent qu'il est tout d'abord nécessaire d'élaborer des théories élémentaires qui expliquent comment l'entreprise établit ses objectifs, ses prévisions et fait ses choix. Ils peuvent ensuite analyser comment les firmes résolvent leurs problèmes et font leur apprentissage en tirant les leçons de l'entreprise.

    Les principaux objectifs étudiés sont la production, les ventes, les stocks, la part de marché et le profit. L'étude des objectifs consiste à déterminer comment ils forment et évoluent dans le temps. L'organisation étant définie comme coalition d'individus ou de sous- groupes, les objectifs de la coalition sont ceux de ces membres ; la théorie de Cyert et March ne suppose pas qu'il y ait, à l'intérieur de la coalition, un accord sur les objectifs, mais uniquement une volonté de réaliser pour chacun d'eux, une performance(niveau d'aspiration). Cyert et March caractérisent le processus par lequel les objectifs de l'organisation se modifient lorsque de nouveaux participants entrent dans la coalition ou lorsque des anciens membres la quittent. Les objectifs n'étant évoqués qu'à propos de problèmes particuliers, on peut considérer qu'ils se révèlent lorsque l'organisation examine un problème et non à priori.

    Les niveaux d'aspiration relatifs à chacun des objectifs dépendent de l'objectif passé de l'organisation, de son mode de fonctionnement passé et de la façon dont fonctionnent des organisations comparables. Les objectifs ne sont pas satisfaits simultanément, mais de manière séquentielle. Les risques d'éclatement de la coalition qui peuvent survenir à la suite de la non satisfaction de certains d'entre eux sont atténués par l'existence dans l'organisation de ce que Cyert et March appellent un excédent organisationnel. Celui- ci apparaît lorsque le total des avantages (rémunérations et avantages non monétaires)dépasse le minimum requis pour le maintien des membres dans la coalition. Cet excédent est réduit pendant les périodes difficiles de la vie des organisations. Ainsi, grâce à l'excédent organisationnel, les conflits entre les membres de la coalition, sont maintenus à un niveau acceptable par l'organisation.

    Les prévisions dépendent des informations recherchées par la firme et donc, de son système d'information. L'excédent organisationnel agit sur l'intensité de cette recherche et par là même, sur son mode. La procédure la plus couramment employée pour effectuer ces prévisions est l'extrapolation linéaire qui ne prend en compte que le passé.

    Dans cette perspective, il devient essentiel de prendre en compte la stratégie des acteurs et des coalitions d'acteurs et pour cela de définir des intérêts des groupes en jeu ainsi que le processus de résolution de conflit qui doit se mettre en place entre ces groupes afin de réaliser la prise de décision.

    Une fois encore dans cette perspective, la firme point disparaît pour faire apparaître le jeu des acteurs et donc la référence culturelle à partir de laquelle ils définissent leurs objectifs et agissent. Ainsi, le mode et la force de l'appartenance à un groupe influencent la mise en place des coalitions et leurs niveaux d'objectifs de même que les modes d'interactions et de résolution de conflit entre les acteurs et les coalitions d'acteurs.

    La dernière théorie élémentaire concerne les choix. Ils sont considérés par les auteurs comme des réponses à des problèmes perçus par l'organisation. Cette perspective dépend des règles de fonctionnement de l'organisation, face à un environnement incertain. Le processus de choix est lié à l'excédent organisationnel et à l'expérience qui intervient directement pour déterminer les éventualités prises en compte. La résolution du problème se fait à l'aide de procédures standard et de règles ad hoc. La plus part du temps, la première solution satisfaisant aux niveaux minima d'acceptabilité pour l'ensemble des critères est retenue.

    Les objectifs, les prévisions et les choix sont désignés par Cyert et March du nom de variables organisationnelles. Après les avoir définies, les auteurs peuvent étudier des processus qu'ils appellent relations, mettant en jeu ces variables.

    La première concerne la résolution du conflit. Les objectifs de la coalition ne pouvant tous être atteints simultanément, le conflit subsiste en son sein, au moins partiellement. Les procédures employées ne réduisent pas tous les objectifs à une seul dimension et ne permettant pas d'atteindre un niveau satisfaisant de compatibilité interne. Cyert et March désignent cette solution de quasi résolution du conflit. Elle correspond à une prise en compte séquentielle des différents objectifs avec une rationalité partielle et des règles arbitraires quant à l'acceptabilité des décisions. En examinant ces problèmes successivement et non simultanément, l'organisation peut ainsi résoudre les conflits les plus urgeants, laissant cependant les autres grâce à l'excédent organisationnel.

    La rationalité partielle consiste, à la suite de la division du travail, à séparer les problèmes globaux en sous- problèmes, et à résoudre chacun de ces problèmes en satisfaisant aux niveaux d'aspiration minima. Ces décisions locales ne sont pas toujours entièrement compatibles. L'organisation accepte cette situation qui est inhérente à son processus de résolution des problèmes. Les décisions qui en résultent ne constituent cependant pas un optimum global. Elles sont admissibles grâce à l'excédent organisationnel qui permet de ne pas exiger le maximum du milieu environnant.

    Les auteurs étudient ensuite la limitation de l'incertitude. L'organisation ne considère pas son milieu environnant comme une donnée exogène, elle s'efforcent d'agir sur lui pour réduire son degré d'incertitude. En abordant les problèmes de manière séquentielle, l'organisation privilégie les informations à court terme et résout le problème dans ce cadre. Ainsi pour une décision de production, plutôt que de prévoir les ventes futures, l'organisation privilégiera les données provenant des ventes récentes et des stocks. Cette attitude, a priori peu rationnelle, permettra le plus souvent de satisfaire les demandes de ces coalitions.

    Toujours afin de réduire l'incertitude, l'organisation va tenter de contrôler son environnement, tant externe qu'interne. Sur le plan externe, cette attitude conduira à mettre en place des pratiques conventionnelles standardisées. Celles- ci concernent notamment le mode de fixation des prix de vente par l'intermédiaire d'un taux de marque unique. Lorsqu'il est accepté par les firmes de la branche, chacune d'elles n'a plus à prévoir l'attitude de ses concurrents. Ce comportement n'entraîne généralement pas la maximisation du profit. Sur le plan interne, la mise en place d'un système de planification comme le contrôle budgétaire réduit l'incertitude entre les différents services, chacun d'eux connaissant ainsi, à l'aide du plan, les objectifs assignés aux autres.

    Les auteurs étudient ensuite la façon dont l'organisation résout les problèmes qui se posent à elle. Cette recherche de solution présente trois aspects principaux. Elle est premièrement motivée, parce qu'elle est déclenchée lorsque des objectifs ne sont pas satisfaits et poursuivie jusqu'à ce qu'une solution soit trouvée qui satisfasse aux niveaux minima d'aspiration qui pourront d'ailleurs être abaissés durant le processus. Elle est deuxièmement naïve, les règles de recherche sont simples. La recherche de solutions est enfin partiale pour les raisons suivantes :les différences entre les fonctions et l'expérience des différentes parties de l'organisation, l'influence inévitable des souhaits sur les prévisions et enfin, les conflits internes non résolus.

    Enfin, Cyert et March ont étudié l'apprentissage de l'organisation. Cet apprentissage concerne les objectifs de l'organisation, ses domaines d'intérêt et ses méthodes de résolution des problèmes. Ils ont résumé le processus de décision étape par étape et afin de donner un contenu concret à cette théorie, les auteurs l'ont appliquée à des décisions courantes de l'entreprise, notamment à la fixation des prix dans un grand magasin. E. Carter(1971)22(*) a montré qu'on pouvait employer utilement ces concepts de Cyert et March pour expliquer le processus de choix d'investissement, à condition de les modifier partiellement pour tenir compte des structures hiérarchiques. Y. Aharoni(1966)23(*) utilise également ces concepts pour analyser la décision de s'implanter à l'étranger d'un certain nombre d'entreprises américaines. Les notions définies par Cyert et March lui semblent indispensables pour décrire le processus, mais il faut leur en joindre d'autres qui caractérisent les systèmes d'autorité de l'entreprise et les motivations des décideurs.

    En résumé, on trouve que cette perspective permet alors d'introduire la référence culturelle comme cadre de référence et donc de limitation de la rationalité des acteurs. Cela est très important pour la suite de notre développement dans la mesure où la culture est un filtre des choix d'investissement.

    3. Les approches contingentes de l'organisation et la culture

    Outre la remise en cause des hypothèses relatives aux individus ''rationnels'' et ''maximisateurs'', d'outres courants de la théories des organisations ont aussi remis en cause la passivité et la transparence de l'environnement de l'organisation. Les approches contingentes ont ainsi insisté sur la variabilité de l'environnement de l'entreprise et les adaptations que les organisations doivent nécessairement opérer pour maximiser leurs performances. Dans cette perspective, le mécanisme d'ajustement se fait par l'entreprise et non plus seulement par le marché. Plusieurs types de contingence ont été analysés. En 1965, sur la base d'une enquête menée auprès de cent entreprises du secteur manufacturier anglais, Joan Woodwoard(1965)24(*) définit ainsi une relation entre le degré de complexité technologique des entreprises et leur structure organisationnelle. Les entreprises ayant des systèmes de production semblables ont globalement des modes d'organisation semblables. A travers ses recherches, elle distingue trois modes d'organisation de la production à travers la technologie(la production unitaire ou de petites séries, la production en grande série et le processus contenu de production). En gardant l'hypothèse de la maximisation du profit de l'entreprise par celle de sa compétitivité, elle montre ainsi une contingence de la structure à la technologie.

    Les travaux de Joan Woodwoard, une des rares des théoriciennes des organisations, s'inscrivent dans la lignée de la théorie de la contingence structurelle. Elle développe bien l'idée que l'on ne peut pas dire qu'il existe une structure qui soit la plus performante pour toutes les organisations(J.M. Plane, 2003).

    L'approche contingente de Lawrence et Lorsch(1967) est plus générale en ce que les facteurs qu'ils avancent sont plus complexes. Ils conçoivent l'organisation comme un système ouvert composé de trois sous systèmes scientifique, commercial et techno- économique qui ont chacun des caractéristiques structurelles telles que la nature de leurs objectifs, leur orientation temporelle, leur mode relationnel et leur degré de formalisation. Ces sous- systèmes ont chacun un environnement qui leur est propre et que les acteurs cernent au moyen d'une variable spécifique : Le degré de stabilité technique des processus de production caractérise ainsi l'environnement commercial et enfin la formalisation des tâches de production ou d'administration caractérise l'environnement technico- économique. Lawrence et Lorsch avancent alors que la structure de chaque sous- système s'adapte à l'incertitude de son propre environnement et que cette adaptation ainsi que la qualité d'intégration des sous- systèmes conditionnent la performance de l'entreprise.

    Ces approches contingentes ont l'avantage de mettre en avant la caractère actif de l'organisation qui réagit par rapport à un environnement et sélectionne la structure la mieux adaptée à la maximisation de la performance de l'entreprise. Cependant, son degré de liberté reste restreint en ce que son action se réduit à adapter mécaniquement sa structure en réponse à des stimuli particuliers de l'environnement et non pas à constituer sa propre dynamique d'évolution et d'adaptation structurelle.

    Les travaux de recherche de Lawrence et Lorsch ont eu un énorme retentissement, car ils ont le mérite de démonter ce que beaucoup de praticiens sentaient intuitivement. Une forme d'organisation est bien contingente à des données externes et internes qui peuvent varier mais elle n'est pas homogène et à un moment donné, l'environnement peut présenter des facettes différentes à divers parties ou départements de la structure (J.M. Plane, 2003).

    A ce stade, l'organisation n'est déjà plus une donnée fixe et prédéterminée mais entre dans la subjectivité construite des acteurs. Cette perspective permet donc d'introduire encore l'importance de la culture comme référent d'interprétation nécessaire au repérage et à l'action des individus. Les acteurs prennent leurs décisions selon des représentation subjective de la réalité (P. Wirtz, 2002).

    En gardant le cadre conceptuel de la rationalité limitée, l'approche cognitive développe le caractère psychologiquement construit de l'environnement de l'acteur. Dans cette perspective, l'acteur construit son propre environnement par ses actions, lesquelles dépendent de la représentation qu'il s'en fait. Il sélectionne les informations qu'il reçoit et prend ses décisions en foction de construction mentale qu'il opère par apport à son environnement. Cette représentation est certes influencée par la structure objective de l'organisation mais aussi par le propre référent conceptuel de l'acteur dont, en l'occurrence, sa culture.

    En résumé, la théorie contingente de Lawrence et Lorsch a le grand mérite de rompre avec les deux courants de pensée, celui de la théorie traditionnelle des organisations de Taylor et Fayol, qui postule l'existence d'une structure optimale associée à la taille et au stade d'évolution de la firme, et le courant de Cyert et March qui analyse les processus de décision en dehors des variables économiques caractéristiques de l'environnement.

    4. L'approche systémique et la culture

    Elle a été élaborée par L. Von bertalanffy (1968)25(*). Elle étudie des phénomènes complexes aux composantes interalliées dont les composants sont apparemment orientés vers un but. L'approche systémique a contribué aussi à substituer à la notion d'organisation objective et fixe celle d'un ensemble d'interrelations entre les éléments constitutifs de l'organisations (J.P. Helfer, M. Kalika et J.Orsoni, 2002). Dans cette perspective, les relations qui unissent les parties pour former un tout ont autant d'importance sur le comportement du tout que leur composition ; bref le tout est plus que les parties, en ce sens qu'il dépend à la fois des parties et de l'ensemble des relations qui les ordonnent.

    La relation entre les acteurs est aussi importante que la structure formelle de l'organisation. La culture, en tant qu'élément déterminant de la relation entre les individus devient donc un facteur opérationnel de l'étude des organisations ainsi que le montre l'analyse de Fons Trompenaars26(*) qui met en relation la structure organisationnelle et la culture.

    Fons Trompenaars synthétise l'évolution de ces approches de la théorie des organisations par trois phases qu'il qualifie de mécaniste, organique puis systémique. L'approche mécanique caractérise les définitions classiques et normatives de l'organisation telle qu'elle est conçue par l'économie standard et les analyses de Fayol ou de Taylor.

    L'approche organique permet de considérer la dépendance mutuelle des parties de l'organisation et l'objectif de maintenance de sa structure. Si l'organisation est toujours conçue comme un tout doté d'objectifs qui restent ceux de l'économie classique- le profit -, l'individu comme élément constitutif de l'organisation doté de besoins propres ainsi que l'environnement et son incertitude sont enfin considérés comme déterminants par apport à la formalisation et le fonctionnement de l'organisation. Fons Trompenaars regroupe dans cette approche théorique tant l'école des Relations Humaines que les fonctionnalistes et les tenants de la théorie contingente.

    Enfin, l'approche systémique lui permet de considérer l'organisation comme un système socioculturel dont les éléments constitutifs sont des acteurs dotés d'objectifs propres et dont les relations sont constituées par les changes d'informations, reposant sur un système symbolique commun d'interprétations. Reprenant en fait la démarche cognitiviste, il définit l'action de l'individu comme le résultat d'une interprétation de son environnement et non pas comme la réponse mécanique à un stimulus. La stabilité du système socioculturel est atteinte dans la mesure où les individus qui y prennent part développent un mode d'interprétation commun ou pour reprendre les termes de Buckley, une co- orientation qui, selon Fons Trompenaars fait directement référence à la culture. Dans cette perspective, la structure organisationnelle n'est alors pas une donnée objective mais un construit culturel, un instrument que les acteurs utilisent pour réguler leurs interactions dans la poursuite d'objectifs collectifs avec un besoin minimum de coopération.

    Cette démarche lui permet alors de distinguer deux conceptions extrêmes de la structure organisationnelle qui sont directement mises en relation avec deux configurations culturelles différentes. Pour les définir il utilise l'analogie aux différentes fonctions des hémisphères droit et gauche du cerveau. La première conception de la structure organisationnelle, analogique aux fonctions de l'hémisphère gauche, est constituée par un ensemble de relations caractérisées par leur nature rationnelle fonctionnellement spécifique et instrumentale. La seconde conception extrême de la structure organisationnelle, analogique donc aux fonctions de l'hémisphère droit, est constituée quant à elle par un ensemble de relations de nature affective diffuse et intrinsèque.

    Puis il met en relation ces conceptions de la structure organisationnelle avec des variables de configuration culturelle que nous développerons dans la deuxième partie, et qui concernent l'orientation relationnelle des individus, leur relation au temps et leur relation à la nature.

    En résumé, L'approche systémique de l'organisation qui prend en compte les individus comme des agents dotés d'objectifs propres et les relations d'information qu'ils entretiennent à la base de chacune de leurs actions permet ainsi à Fons Trompenaars d'introduire l'impact de la configuration culturelle sur l'organisation et plus spécifiquement sur la structure de l'organisation.

    Chapitre II. La notion de culture et les approches institutionnalistes

    Nous partirons d'abord de l'intérêt renouvelé par l'ancien institutionnalisme pour la place et le rôle des institutions et donc la culture, dans la dynamique des phénomènes économiques. Nous montrerons ensuite que l'approche économique néo- institutionnelle nous permettra d'induire de façon plus opérationnelle la contingence culturelle dans le choix d'investissement en prenant appui sur l'analyse des transactions économiques.

    Section I. Le facteur culturel dans l'ancien- institutionnalisme

    Les institutions avaient traditionnellement le statut de données fixes et exogènes pour les théories économiques standard et étaient de fait exclues de l'analyse(T. Corei, 1999). Or l'institution définie par W.H. Hamilton(1932)comme ''un mode de pensée ou d'action prévalent et permanent, qui s'incarne dans les habitudes d'un groupe ou les coutumes d'un peuple''27(*) peut être mise en relation avec la notion de la culture. Cet auteur définit en effet la culture comme ''une synthèses- ou au moins une agrégation- d'institutions, dont chacune couvre son propre domaine et sa propre fonction''28(*).

    Le renouvellement de l'attention portée aux institutions dans l'étude des transactions économiques nous permet donc d'inférer la culture comme une variable pertinente du champ de la recherche économique.

    Selon V. Dutraive (1995), l'institution renvoie à un état social des individus, à quelque chose qui représente une autorité par rapport à leur intérêt ou leur préférence. Elle suggère un ensemble d'éléments a priori aussi divers que, dans un premier registre la famille, l'église, l'Etat ; dans un autre le syndicat, l'entreprise ; dans un autre encore l'interdiction de l'inceste ou du crime, l'interdiction ou l'obligation de vengeance(vendetta) ; ou encore le mariage, les droits de propriété ;[....]. De cette énumération il ressort que l'institution est un terme générique en résonance avec les notions d'organisation, de communauté, de groupement, de collectif, de règles morales religieuses, laïques ; de valeurs, de conventions, de normes. La culture, peut alors être considérée comme la synthèse informelle des institutions.

    La recherche néo- classique qui veut intégrer dans le champ de l'analyse économique, les distorsions qui perturbent le fonctionnement des modèles de base, font souvent appel à ''l'institution'' comme la solution au problème de non- opportunité du marché. Il en est ainsi de l'approche économique néo- institutionnelle illustrée par les travaux de Coase et Williamson lesquels font de la firme, une institution alternative au marché qui se justifie lorsque les coûts de transaction sont trop élevés (T. Corei, 1999).

    De même, la théorie des jeux, dans un contexte d'indétermination, a souvent recours à des procédures de sélection qui font figure d'institution ou en expliquant la genèse. Ainsi, l'institution peut déterminer la solution qui correspond à l'état optimal ; elle peut aussi prendre la forme d'un critère de sélection lorsque plusieurs solutions se présentent. Elle peut aussi comme le souligne V. Dutraive (1995), émerger des procédures d'apprentissage, de sélection ou auto- renforcement à travers une certaine régularité des comportements. Enfin, la théorie des jeux fait appel aux croyances des individus, voire leur culture qui sont dans cette perspective considérées comme des institutions (B. Walliser,1989).

    Cette éclairage des institutions en tant que modalités efficaces de régulation de coordination leur donne une dimension fonctionnelle dans la mesure où elles apportent de l'ordre dans les actions de leurs membres et les relations qu'ils entretiennent - les transactions, au sens de Commons (T. Corei,1999).

    Synthèse des instituions, la culture tient aussi de ces dernières les mêmes fonctionnalités : La culture peut à ce titre être considérée comme un instrument de coordination ex post des actions, à travers les préférences et les valeurs des individus. La caractérisation des institutions qu'effectue Veblen T(1898) peut être appliquée à la culture, à savoir non seulement des habitudes de faire, des routines, mais aussi ''des habitudes de pensées établies, communes à la plupart des hommes'' et, dans la perspective culturelle, commune à une culture donnée.

    La culture, en amont des institutions joue alors ce rôle fédérateur de régulation et de coordination en procurant aux individus des anticipations stables et réciproques ainsi que la connaissance plus ou moins formalisée des devoirs et droits de chacun afin de leur permettre de décider et d'agir.

    Cependant, si la sociologie durkheimienne insiste sur le caractère contraignant des règles du jeu proposées par la culture et les institutions, les économistes institutionnalistes américains insistent parallèlement sur le jeu( au sens d'espace de liberté) qu'elles ouvrent en libérant et étendant le champs de l'action individuelle selon les termes de Commons(R. Boudon,1986) .

    Dans ce qui suivre, nous présentons les approches des fondateurs de l'ancien- institutionnalisme américain à savoir : Thorstein Veblen, John Rogers Commons et Wesley Clair Mitchell. Les deux premiers ont élaboré relativement indépendamment leurs concepts, de telle sorte qu'il est habituel de prétendre qu'ils sont à l'origine de deux voies alternatives de l'institutionnalisme.

    1. L'approche de Veblen

    La conception évolutionniste de l'économie que Veblen propose, se fonde sur l'opposition qu'il relève dans les dynamiques différenciées des institutions et des fondements de l'activité industrielle.

    Veblen pose les institutions en tant qu'objet de la sciences économique évolutionniste et les définit comme un ensemble d'idées, de modes de pensée communs à un ensemble d'individus, incluant les usages, les coutumes, les façons de se comporter et surtout des façons de concevoir l'organisation des droits de propriété. Cependant le contenu des institutions est relatif en ce qu'il n'y a pas, pour Veblen, l'identité entre les déterminants matériels d'une époque et les représentations, c'est- à- dire les institutions qui caractérisent les modes de pensée et d'action de cette époque.

    Il existe en effet une inertie qui fait que les modes de pensée ne s'ajustent pas immédiatement aux réalités matérielles. L'origine de décalage entre les dynamiques matérielles et institutionnelles ou plus largement culturelles doit alors être étudiée à travers le processus d'évolution sociale(T. Corei, 1999).

    L'évolution sociale est, selon Veblen, « un processus d'adaptation sélective du tempérament et des façons de pensée ; ce sont les conditions de vie qui poussent les hommes à s'adapter. L'adaptation des façons de pensée, c'est le développement mêmes des institutions ». [......]. Cependant si les ethnologues contemporains ont étudié la sélection qui permet l'adaptation des hommes à leur environnement matériel et aboutit à l'apparition de types, ces auteurs n'ont pas prêté assez attention à l'inévitable variation des types eux- mêmes(T. Corei, 1999). Ainsi, aussi comme le souligne V. Dutraive (1995), le processus de l'évolution sociale rend- il compte à la fois de sélection progressive des institutions et de la variation des habitudes de pensée et donc de celle de la culture.

    Cette approche évolutionniste de Veblen fait de l'institution et donc la culture à la fois l'objet et le facteur de sélection dans la mesure où si d'une part, le changement institutionnel conduit à la sélection d'actions qui répondent au mieux aux nouvelles normes institutionnelles, l'adaptation des habitudes à l'évolution de l'environnement est d'autre part à l'origine de la formation de nouvelles institutions et d'évolution culturelle(T. Corei, 1999).

    La dynamique des institutions est alors double en ce qu'elle est d'abord externe - les habitudes de pensée et d'action sont confrontées à des changements technologiques ou de variations des conditions d'exercice de l'activité industrielle porteuses de nouvelles institutions, même si la concrétisation de ce processus demande un délai pour que l'adaptation s'effectue -, mais aussi interne - les institutions évoluent vers leur raffinement progressif par un processus d'auto-renforcement et d'approfondissement déconnecté de la réalité matérielle-.

    Il existe alors une tension entre d'une part la dynamique interne des institutions qui tend à renforcer l'inertie et la cohésion interne, et d'autre part leur dynamique externe qui est due à l'adaptation nécessaire des représentations à la réalité expérimentée. Les institutions entrent dans une compétition dans laquelle les représentations en accord avec la réalité industrielle s'imposent progressivement aux anciennes. Le jeu dynamique qui s'instaure ainsi fait que les institutions et donc la culture, créatrices de représentations, déterminent les actions sur la réalité matérielle qui à son tour agit sur les institutions et la culture par les biais des représentations elles- mêmes.

    Dans cette perspective, d'une part Veblen réfute l'approche statique de l'économie standard et emprunte à l'évolutionnisme darwinien la perspective d'une causalité complexe à l'origine à la dynamique économique, laquelle repose sur l'adéquation ou l'opposition entre d'une part les forces technologiques à la base de l'existence matérielle des hommes et d'autre part, les forces culturelles incluant les représentations et les pratiques cérémonielles ou, selon ses termes, les habitudes de pensée ou institutions.

    Selon lui, l'économie politique pré- darwinienne repose en premier lieu sur des préconceptions qui sont ancrées dans les circonstances particulières d'une époque. Leur approche est donc selon Veblen, statique et téléologique. Le pragmatisme qu'il préconise exige une approche dynamique de la réalité que la formule de James peut ainsi résumer : la signification d'un concept peut toujours être trouvée, sinon dans quelque réalité sensible particulière qu'il sert à désigner rendra vraie. Dans cette perspective, les phénomènes doivent être analysés en relation avec leur évolution, et la théorie qui en est tirée est nécessairement dynamique et contingente.

    D'autre part, l'institutionnalisme de Veblen refuse l'hédonisme comme le seul moteur de l'action. Il prend appui sur les caractères culturelles et collectifs des institutions de façon incompatible avec l'individualisme méthodologique caractéristique du corpus de la Nouvelle Economie Institutionnelle. A l'individualisme méthodologique et la vision de l'homo oeconomicus animé par seul intérêt personnel et hédoniste, Veblen oppose ainsi un homme qui est davantage une structure cohérente de propension et d'habitudes qui cherchent réalisation et expression dans une activité.

    Cependant l'exercice de la volonté des individus est aussi prise en compte dans le choix des règles et plus généralement dans la dynamique institutionnelle. Ainsi que le souligne V. Dutraive (1995), les volontés se confrontent dans le cadre d'une action collective, action qui transforme les préférences, les intérêts privés ou collectifs et finalement les règles. Il y a ainsi place dans l'analyse économique, pour les conflits et les rapports de force. L'entreprise elle- même est conçue comme le lieu de l'interaction et de la confrontation d'institutions, par exemple les habitudes de pensée propres aux affaires contre celles plus instrumentales des ingénieurs pour Veblen.

    2. L'approche de Commons

    Commons dont l'oeuvre caractérise aussi la branche pragmatiste du courant institutionnaliste, pose aussi l'évolution économique au centre de sa réflexion. Cependant, sa démarche part de l'analyse de transaction qui lui permet d'analyser le processus de création démocratique des règles et la régulation des relations sociales.

    A l'analyse classique et néo- classique de l'économie fondée sur l'action individuelle et les supports de l'homme à la nature, Commons substitue en effet une analyse fondée sur la transaction, c'est- à- dire les relations entre les hommes.

    Selon lui, l'économie politique classique s'est en effet construite sur la catégorie de marchandise, sur l'action individuelle rationnelle et l'hypothèse que le marché engendre toujours un équilibre, en sous- estimant par ailleurs le jeu des interactions sociales. Mais cette approche ne permet pas, selon lui, de distinguer la chose matérielle (riches sociale par exemple) de la propriété de cette chose, excluant ainsi de fait de l'analyse le rôle de l'institution de la propriété.

    Commons définit alors la transaction comme une ''unité institutionnelle élémentaire'', une ''activité représentant le lien social, les relations entre individus'', qui intègre ainsi les trois constituants de toute relation sociale à savoir l'unité d'intérêt en conflit, [......] d'intérêt mutuellement dépendant [.....], dont les participants attendent la répétition dans l'avenir. En effet, les conflits entre individus émergent de la rareté des opportunités due à la propriété, mais ces mêmes individus ont besoin de coopérer pour créer des richesses. Enfin, dans un monde incertain et complexe, les individus recherchent aussi une sécurité des anticipations, c'est- à- dire la répétition attendue des transactions. Ainsi, la combinaison des impératifs contradictoires que sont la rareté(conflits) et l'efficience(l'interdépendance) nécessite la mise en place d'un ordre lequel est assuré par des règles collectives.

    Pour Commons, le problème central de l'économie est alors de comprendre la formation d'un ordre à partir des conflits. De ce fait, il élargit le champs d'analyse économique à la question de la régulation, comprise comme le processus de production des règles qui permettent de créer, maintenir voire même transformer un ordre social. L'instrument de cette régulation est alors pour Commons l'institution en ce qu'elle apporte une certaine régularité aux comportements et devient le siège d'un réseau de transactions régulées dans lequel l'individu est pris en même temps qu'il est acteur.

    En plaçant les facteurs institutionnels au centre de l'analyse économique, Commons s'oppose alors à la conception économique classique, laquelle pose son analyse en termes d'interactions mécaniques. Commons considère au contraire que les règles qui régissent les transactions et les actions des individus priment sur le comportement individuel dont elles sont un facteur explicatif.

    Concernant les comportement des individus, Commons critique les fondements hédonistes et individualistes de l'économies classiques en considérant que toute transaction est une situation de négociation où jouent conjointement la volonté et les forces économiques et sociales qui contraignent et organisent le processus de choix. Dans ce contexte, l'unité sociale n'est pas l'individu cherchant son propre plaisir mais les transactions entre les individus qui interagissent les uns avec les autres dans le cadre de règles existantes.

    L'action individuelle, conçue comme une action volontaire mais aussi routinière en ce qu'elle obéit aussi à certaines règles, caractérise alors une conception institutionnaliste de l'acteur qui, selon V. Dutraive (1995), s'avère être ''une théorie avant la lettre d'une rationalité limitée''.

    Dans ce contexte, les institutions apportent une certaine régularité aux comportements, elles conditionnent ainsi l'exercice de l'action et de la coopération dans un monde incertain et conflictuel. Les règles qui s'expriment au travers des institutions ne sont pas seulement des contraintes mais aussi des modèles de comportement attendus qui spécifient plus ou moins ce qu'un individu peut faire ou ne pas faire, doit ou ne doit pas faire, a le droit ou n'a pas le droit de faire tant de point du vue du droit que celui de la coutume. Ce faisant, les institutions rendent prévisibles les comportements des autres et contiennent temporairement les conflits. C'est en ce sens que Commons définit l'institution comme une action collective dans le contrôle, la libération et l'expansion de l'action individuelle.

    Selon lui, il existe cependant deux types d'institutions dont l'une est informelle ou non organisée- il s'agit des coutumes qui induisent des règles générales de conduite issus des pratiques et qui conditionnent, par l'apprentissage, les habitudes individuelles et que l'on peut apparenter à la culture. Les institutions formelles telles que l'entreprise sont le lieu des processus de coopération organisée où les transactions sont fonctionnellement interdépendantes dans la création des richesses.

    Par ailleurs, la conception de Commons relativement à la genèse des institutions ne participe pas d'un ordre naturel et intemporel à l'opposé de l'approche d'Adam Smith qui décrit le marché comme le mécanisme de coordination des décisions individuelles parfaitement efficace en tous lieux et en tous temps. Commons rejoint en ce sens Veblen dans cette approche évolutionniste des institutions lesquelles sont considérées à la fois comme unité et facteurs de sélection. Commons se démarque cependant de Veblen en insistant sur le caractère artificiel de cette évolution générée par l'introduction des volontés individuelles et collectives : les individus organisés, s'ils sont déterminés par les institutions dans lesquels ils interviennent, ont, en retour, un certain pouvoir sur elles. Ainsi, les décideurs politiques et économiques qui participent au processus de création et réparation des richesses ainsi qu'aux décisions collectives sur les objectifs économiques, ont une capacité d'orientation significative du processus institutionnelle.

    En éclairant les phénomènes économiques par les relations entre hommes et non plus les relations entre l'hommes et la nature, Commons rompt avec l'économie classique qui établit sa loi en dehors des dimensions morales et juridiques. Cette démarche lui permet de s'inspirer de la pratique jurisprudentielle anglo- saxonne de Common Law. Dans ce cadre, les décisions de justice sont prises en fonction du critère de la valeur raisonnable qui émerge de la négociation entre les parties, laquelle est fondée sur la conciliation de l'intérêt public, des pratiques moyennes les plus courantes, et d'une égalité de traitement des parties en désaccord. Commons extrapole la problématique des valeurs raisonnables à l'analyse de la régulation courante des conflits ainsi qu'à celle des transformations progressiste des règles de l'économie capitaliste.

    3. L'approche de Mitchell

    Au- delà de certaines disparités caractérisant le courant institutionnaliste( Veblen est ''radical'' au sens américain du terme tandis que Commons est réformateur), la mouvance institutionnaliste bâtit sa cohésion sur l'exigence de théories plus réalistes et la nécessité d'élaborer une analyse dynamique conduisant à adopter une conception particulière de l'institution comme médiation entre les dimensions économiques, politique et culturelle de la société (Maucourant, 1994). Pour Mitchell en particulier, l'institutionnalisme ne consiste pas à rejeter tous les fondements orthodoxes mais plutôt à reconsidérer ceux-ci à la lumière des progrès de la psychologie et des matériaux statistiques.

    Mitchell refuse le postulat irréaliste de l'homo oeconomicus : l'action humain ne relève pas d'une pure mécanique rationnelle de l'intérêt personnel. Cette action est infléchie dans ses modalités et ses finalités par des forces qui sont l'inscription du social dans l'individu : les institutions(Maucourant, 1994). Celles-ci, modifiées continûment par l'évolution sociale, peuvent se définir comme un complexe de pulsions et d'habitudes collectives coercitives. Finalement, ce complexe producteur de routines joue un rôle essentiel dans la vie économique.

    C'est pourquoi Mitchell récuse l'approche de Fisher et de Davenport, qui réduit la science économique à la seule science des prix, et fait valoir l'exigence d'un lien plus étroit avec anthropologie et l'histoire afin de saisir l'origine de l'évolution des concepts de monnaie, d'échange et de propriété privée. Selon lui, Marx serait donc à l'origine de l'économie institutionnaliste qui est science du comportement humain.

    Ainsi, cette introspective est refusée. Il en va de même du calcul des plaisirs et des peines de Bentham, parce qu'un tel calcul est fondé sur le recours à une psychologie grossière. Les approches dites réelles car excluant a priori la monnaie, méconnaissent le caractère spécifique de la société moderne au sein de laquelle l'accès aux biens est subordonné à l'acquisition de monnaie. Pour Mitchell, les institutions forgent et renforcent la prégnance de la logique pécuniaire, produisant ainsi la rationalité. Celle- ci n'est pas donnée de la nature humaine mais tende à se construire dans un processus complexe.

    Entre l'impératif de reproduction du tout social et l'action d'individus plus ou moins rationnels s'inscrivent les institutions, dont il faut expliquer la genèse, le fonctionnement et l'évolution. Vecteur par l'excellence de la socialisation des agents, l'institution monétaire est une création historique qui présuppose notamment un lien singulier, la confiance, comme l'illustre l'expérience américaine des Greenbaks.

    Mitchell observe que le traitement de la monnaie est révélateur des difficultés éprouvées par l'économie orthodoxe, pour laquelle l'argent est simplement considéré comme l'instrument de mesure des plaisirs et des peines. L'institution de la monnaie devrait plutôt être envisagée comme l'ensemble des représentations collectives qui rendent possible la commensurabilité des plaisirs et des peines. Dans la mesure où la monnaie tend à normaliser l'ensemble des comportements individuels, celle- ci est bien ce ''fait social'', selon la célèbre formule énoncée par Mauss à la même époque. Conformément à son projet anthropologique, Mitchell veut donc appréhender l'économie moderne comme état d'emblée monétaire et récuser la fiction d'une économie non monétaire dont il conteste les vertus heuristiques.

    En résumé, malgré leurs divergences quant à l'identification des moteurs de l'évolution institutionnelle et les poids différents qu'ils accordent d'une part à la technologie et d'autre part à la volonté individuelle et collective, les analyses de Commons et Veblen permettent de consolider la démarche que nous voulons mettre en oeuvre dans cette recherche. En effet, tous les deux insistent sur le rôle des institutions, formelle et informelle, et donc la culture en tant que matrice fédératrice de ces institutions, dans la dynamique économique. Mitchell définit, à son tour, l'institution comme un complexe de pulsions et d'habitudes collectives coercitives. Selon lui, ce complexe producteur de routine joue un rôle essentiel dans la vie économique.

    Section II. Le facteur culturel dans la perspective de la Nouvelle Economie Institutionnaliste

    La remise en cause des hypothèses de l'économie classique a progressivement conduit à l'émergence des théories contractuelles de l'organisation à travers le courant de la ''Nouvelle Economie Institutionnelle'' illustré par l'économie des coûts de transaction et la théorie de l'agence. Si l'objectif premier de la maximisation du profit n'est pas réellement remise en cause par ces approches, certaines des hypothèses de la micro- économie traditionnelle sont critiquées, permettant ainsi de concevoir les activités économiques et plus spécifiquement celles de la firme sous un éclairage nouveau. Ainsi, l'individu est d'une part appréhendé comme ayant une rationalité limitée notamment dans son appréhension de l'information. D'autre part, l'imperfection de l'information et l'inégalité de sa distribution conduisent les individus à adopter des comportements opportunistes dans un environnement jugé incertain. En outre, le point commun de ces approches consiste surtout à considérer la transaction comme un unité de base de l'action économique aussi bien sur le marché qu'au sein de l'organisation.

    La perspective néo- institutionnelle nous permet d'aller plus loin dans l'analyse de l'impact de la culture sur les coûts de transaction et la sélection des structures de gouvernance, ce qui dépasse les approches de l'ancien- institutionnalisme qui réduisent la culture à une synthèse des institutions qui participent à la dynamique économique.

    1. La théorie des coûts d'agence et référent culturel

    Le référent culturel occupe une grande place dans la théorie des organisations du fait que la distance culturelle augmente, comme nous le verrons dans la théorie des coûts de transaction, les coûts des transactions et entraîne des comportements jugés opportunistes, ce qui nous conduit à se poser la question suivante : est ce que la distance culturelle augmente le coût de l'agence ?

    1-1. La problématique et les coûts d'agence

    Bien que la séparation entre les différentes théories contractuelles des organisations soit de moins en moins tranchée, chacun des grands courants prétend inclure l'autre. L'idée qui sous tend cette théorie est d'une simplicité extrême. En raison des divergences d'intérêts entre individus ou organisations, les relations de coopération s'accompagnent nécessairement de conflits inducteurs de coûts qui réduisent les gains potentiels issus de la coopération. La théorie de l'agence cherche, soit à expliquer les formes organisationnelles comme mode de résolution de ces conflits ou, plus exactement, de réduction des coûts induits- théorie « positive »de l'agence -, soit à proposer des mécanismes qui permettent de réduire le coût de ces conflits- théorie « normative » de l'agence (G.Charreaux,1999).

    Complémentaire de la théories des droits de propriété, l'étude de la relation d'agence a été initiée par Adam Smith qui a d'abord souligné inefficacité des sociétés par actions, dont la direction confiée à un agent non propriétaire n'incitent a priori pas celui- ci optimiser la gestion de l'entreprise. Plus tard, M.C. Jensen et W.H. Meckling(1976)ont défini la relation d'agence comme un contrat par lequel une ou plusieurs personnes(le principal) engage une autre personne(l'agent) pour exécuter en son nom une tâche quelconque qui implique une délégation d'un certain pouvoir de décision à l'agent. Puis ils ont entendu la notion d'agence à toute relation entre deux individus telle que la situation de l'un dépende d'une action de l'autre et donc à toute relation contractuelle.

    L'approche de M.C. Jensen et W.H. Meckling ne vise pas en fait à remettre en cause l'hypothèse de la rationalité des acteurs ni de leurs objectifs de maximiser du profit. Elle cache plutôt à démontrer l'efficience des formes d'organisation économiques et financières du capitalisme en mettant en avant, selon (B. Coriat et O. Weinstein,1995), la supériorité des systèmes contractuels libres censés conduire spontanément à la sélection des formes organisationnelles les plus efficientes.

    Dans cette perspective, contrairement à l'analyse de Coase, la firme ne s'oppose pas au marché. Elle est plutôt comme un noeud de contrats(B. Coriat et O. Weinstein,1995), un ensemble contractuel spécifique entre les détendeurs de facteurs de production et les clients. En ce sens, elle n'a pas existence véritable. Ainsi, les liens contractuels internes et externes à la firme ne sont pas dissociables. Il n'y a alors pas de distinction majeure entre une relation de marché et un relation hiérarchique à l'intérieure de la firme telle que la décrit Coase.

    Cette notion de l'organisation en tant qu'un noeud de contrats représente un élargissement de l'analyse relationnelle à l'ensemble des parties prenantes. Cet élargissement consiste à passer de la relation principal- agent, qui permet d'expliquer les mécanismes organisationnels comme moyens d'aligner le comportement de l'agent sur les intérêts du principal, à la relation dyadique qui conduit à justifier ces mêmes mécanismes comme moyens de maximiser la rente associée à la relation de coopération. Selon G. Charreaux(1997), la participation, par exemple, des salariés dans le conseil d'administration leur permet de préserver leur intérêt et de contribuer à minimiser les coûts liés à leur investissement spécifiques.

    Le caractère dynamique, s'il permet de proposer une modélisation plus productive des phénomènes organisationnels, reste cependant insuffisant pour expliquer les formes organisationnelles réelles les plus complexes ; on dispose, au mieux, d'une explication partielle. Par exemple, pour expliquer que le conseil d'administration inclut simultanément des représentants des dirigeants, des actionnaires, des salariés, des banquiers, voire de certains clients ou fournisseurs, on est obligé de supposer que ces administrateurs ne sont présents que pour résoudre les conflits entre les actionnaires et les dirigeants. Or, dans une perspective plus large et plus convaincante, leur présence au conseil peut également se justifier, en considérant que le conseil peut également se justifier, en considérant que le conseil d'administration permet aussi de réduire les coûts de coopération avec les catégories représentées par ces administrateurs. Le constat de Caby et Hirigoyen(2001) contredit l'hypothèse, notamment formulée par Hart(198329(*)), selon laquelle le conseil d'administration, en tant que système d'alignement des intérêts, ne jouerait qu'un rôle marginal par apport au marché.

    Cette remarque conduit à proposer deux explications concurrentes, de la présence de ces autres parties prenantes. Soit un mécanisme organisationnel émerge de façon à gérer simultanément, sur le mode centralisé, plusieurs relations dyadiques, par exemple, entre les actionnaires et les dirigeants et entre les dirigeants et les salariés. Soit la relation de coopération actionnaires/ dirigeants a des effets externes, c'est- à- dire qu'elle a une influence sur le bien-être d'autres agents, d'autres parties prenantes, au sens du terme  « stakeholders »30(*).Ainsi, les décisions prises par les dirigeants en faveur des actionnaires peuvent entrer en conflits avec les intérêts des salariés ou des consommateurs. Il y a imbrication entre les intérêts. Ces deux explications, non seulement, ne sont pas exclusives, mais peuvent être complémentaires. La centralisation peut faciliter la gestion des intérêts conflictuels multiples (G.Charreaux,1999).

    La relation d'agence s'applique donc aux rapports avec les clients, les fournisseurs, les banques, les salariés...etc. L'objectif est alors d'optimiser ces relations en minimisant les coûts d'agence.

    Selon G. Charreaux(1999), la problématique de l'agence recouvre en fait toute relation contractuelle entre individus et elle se manifeste lorsque les intérêts des deux parties peuvent diverger et lorsqu'il y a information imparfaite, relativement à l'état de la nature et aux comportements des agents, ainsi qu'une asymétrie d'information entre les parties.

    Les dirigeants disposent d'avantage d'informations que les autres contractants. Ces derniers, supportent un risque de sélection adverse qui trouve son origine dans l'occultation probable de certaines informations défavorables par le dirigeant et un risque de hasard moral faisant référence à éventuels comportements négligents ou opportunistes du dirigeant(attribution d'un salaire de complaisance, investissement à VAN négative, revente d'actifs sous- évolués à des firmes qu'il contrôle ....(Shleifer et Vishny,1997))31(*).

    Quant aux coûts d'agence, B. Coriat et O. Weinstein (1995) soulignent les conséquences de la relation d'agence, à savoir d'une part, que le contrat est nécessairement incomplet et, d'autres part, que le principal n'a pas les moyens de contrôler parfaitement et sans coût l'action de l'argent. Il en déduit que les questions qui se posent dans la relation d'agence concernant d'abord les moyens à mettre en place par le principal pour inciter l'agent à maximiser l'utilité du principal, pour le surveiller mais aussi pour approcher au maximum l'efficience obtenue en information parfaite par les mécanismes du marché décrit par la micro- économie standard. M.C. Jensen et W.H. Meckling(1976) distingue alors trois types de coûts d'agence que sont :

    1. Les ''dépenses de surveillance et l'incitation'' supportées par le principal, qui lui permettent ainsi d'orienter et contrôler l'agent.

    2. Les ''coûts d'obligation'', supportés par l'agent, qui lui permettent de démontrer au principal qu'il suit bien ses directives ou pour le dédommager le cas contraire.

    3. ''La perte résiduelle'' qui peut être assimilée à un coût d'opportunité et qui représente l'écart entre le résultat effectif de l'action de l'agent et celui qu'il aurai obtenu s'il avait maximisé comme pour lui même.

    La transaction se retrouve donc encore dans la théorie de l'agence, à la base de toute activité économique que ce soit dans les échanges marchands ou au sein de la firme. Par ailleurs, les hypothèses relatives aux relations d'agences et à leurs coûts rejoignent celles énoncées sur deux points par O.E Williamson, à savoir l'imperfection et surtout l'asymétrie d'information ainsi que les comportements opportunistes que celles- ci génèrent.

    1-2. L'impact de la culture sur les coûts d'agence

    Ainsi que nous venons de le voir, le premier type de coûts d'agence fait référence aux dépenses liées au système que le mandant doit mettre en place pour contrôler et motiver l'agent. Un système doit être pertinent afin d'être en mesure de fournir des indications précises quant à la performance réelle de l'agent et d'autre part, afin d'inciter l'agent à fournir le meilleur de lui même. Or, en situation interculturelle, l'efficacité des outils de contrôle peut être entamée du fait que les points de repère entre le mandat et l'agent peuvent être différents(L'hermitte, 1999).Par exemple, dans le cadre d'une Joint Venture Internationale, la culture influence la façon dont sont formulés les objectifs de l'entreprise, les critères de décision, la priorisation des démarches à suivre dans le cadre de la décision d'investissement.. etc. Elle pose un problème réel du fait que les partenaires ont des buts et des valeurs différents(S.C. Kim, 1996 ; A.T. Shao et P. Herbig,1995).

    On considère souvent que les Japonais ont plus réussi que les Américains en Chine. Leur succès est due aux avantages suivants : leur similarité culturelle avec celle des Chinois (T. Thurwachter, 1990) et leur compréhension de ces derniers (J. Irland, 1991, D. Diamond- Kim, 1986) et leur proximité géographique de la Chine (T. Thurwachter,1990). Si ces avantages contribuent aux succès des japonais en Chine, personne ne sait cependant à quel degré, chacun y contribue.

    Dans cette perpective, les comportements des individus sont dictés par les valeurs culturelles ou par l'appartenance à une classe sociale (G. Charreaux,1999). Les normes sociales constituent selon M.C. Jensen et W.H. Meckling(1994) « un procédé de mémoire externe qui facilite le stockage du savoir concernant le comportement optimal et présente un atout majeur pour enseigner, apprendre, discipliner et récompenser les membres d'un groupes, d'une organisation ou de la société » et sont censées aussi évoluer en fonction des modifications de l'environnement et les connaissances qui transforment les calculs des individus et influencent leurs actions en modifiant l'ensemble d'opportunités et les coûts et les gains associés aux actions. Ces normes sociales sont supposées évoluer lorsqu'elles imposent des coûts trop élevés dans le nouvel environnement, mais le mécanisme qui commande leurs processus d'évolution n'est pas étudié(G. Charreaux,1999).

    En ce sens, dans le cadre d'un partenariat, les mécanismes de contrôle de la performance mis en oeuvre par l'une des parties peuvent donner des résultats qui ne correspondent pas à la réalité de la performance telle que perçue par son partenaire de la nationalité différente. Comme nous le verrons dans la deuxième partie de ce travail, le système de gouvernement de l'entreprise défini par G. Charreaux(1997) comme un ensemble des mécanismes qui ont pour effet de délimiter les pouvoirs et d'influencer les décisions des dirigeants, n'est le même dans tous les pays, il varie de l'un à l'autre(P.C. Oman, H.D. Brooks, 1997)et cette variation a des racines socioculturelles(P. Wirtz, 2002).Par exemple, les modalités de composition d'un conseil d'administration considérées comme optimales dans une relation d'agence particulière ,entre certains actionnaires et un dirigeant, ne le sont peut- être plus par apport à celles qui ont été élaborées dans une autre société et qui pourrait procurer des gains(G. Charreaux,1999).

    En bref, un système de contrôle efficace dans une culture ne l'est pas forcément dans une autre ainsi en situation interculturelle, le travail que le principal doit effectuer afin adapter son système de contrôle est source de coûts d'agence supplémentaire(L'hermitte, 1999).

    En outre, ainsi que nous l'avons rapidement évoqué précédemment, les facteurs de motivation peuvent varier d'une culture à l'autre. Pour une culture féminine par exemple, la motivation peut se caractériser par la qualité des relations humaines alors que dans une culture masculine, la motivation peut se caractériser par l'obtention de la richesse(D. Bollinger., G. Hofstede., 1992). Les dirigeants des entreprises internationales doivent donc confronter un effet culturel dans la communauté des affaires internationales. Les questions de la culture influencent directement les pratiques directoriales. Un effet positif dans une culture peut, au contraire, avoir un effet négatif dans une autre(S.Rosen, 1986).

    Enfin, de même que pour les coûts de transaction, les coûts d'agence qui émergent des situations interculturelles peuvent être atténués par l'apprentissage culturel qui permet d'une part au principal de mieux contrôler l'agent et sa perte résiduelle, et à l'agent de mieux s'investir dans la relation. Cet apprentissage, qui doit être réciproque peut alors être source de synergies et d'une meilleure performance (L'hermitte, 1999).

    2. La théorie des coûts de transaction et le référent culturel

    La théorie des coûts de transaction, inspirée de R.H Coase (1937) et développée par Williamson à partir des années 1970, introduit une nouvelle conception de la firme à partir de la notion de transaction et des coûts qui lui sont afférents.

    2-1. Les hypothèses qui fondent l'émergence de coûts de transaction

    Coase commence par opérer une rupture avec la théorie économique traditionnelle en interrogeant les fondements de la raison d'être et la nature de la firme. Il constate d'abord que sur les marchés, les ajustements s'affectent de manière inconsciente par le système de prix alors que dans l'entreprise, la coordination est organisée par l'entrepreneur. Puis il définit la firme comme une forme particulière de coordination économique, alternative à celle du marché, laquelle permet de diminuer les coûts de transaction.

    Dans ce contexte, la raison de la substitution du marché par la firme s'explique par le fait que le recours au mécanisme d'ajustement par les prix du marché entraîne des coûts spécifiques de transaction que la coordination administrative permet quant à elle de réduire.

    Par ailleurs la question se pose alors quant à la répartition des transactions marchandes et internes. La substitution totale du marché par la firme n'est en effet pas non plus possible en ce que la capacité de la direction administrative à coordonner un nombre croissant de transaction est limitée. Un choix doit donc être effectué à tout moment entre la coordination par le marché ou par la hiérarchie. Cet arbitrage dépend alors du coût de la transaction supplémentaire effectuée par le marché comparé à celui de cette même transaction effectuée en interne, par la firme.

    O. E Williamson commence par approfondir la nature des coûts de transactions définis par Coase. L'originalité de la théorie de Williamson repose sur la prise en compte, à travers l'idée de transaction, de la durée de l'échange contractuel qui distingue une période ante et une période post- contractuelle. Les coûts de transaction ex ante interviennent lors l'établissement des clauses destinées à être validées à la signature du contrat tandis que les coûts ex post suivent la signature du contrat (G. Hirigoyen et J.P. Pichard- Stamford, 2003).

    En fait, si les économistes néoclassiques se sont intéressés aux coûts de production, ils n'ont en contrepartie pas intégrée dans leur analyse les coûts de transactions qui constituent, selon O.E. Williamson « l'équivalant économique des friction dans les systèmes physique ».32(*) Il distingue alors les coûts de transaction de type ex ante de ceux de type ex post.

    Les premiers coûts de type ex ante sont associés à la rédaction, la négociation et la garantie d'un accord.33(*) Les garanties peuvent se traduire par la réalisation de documents complexes qui prévoit les diverses contingences qui peuvent survenir lors de la réalisation du contrat. L'environnement étant incertain et la rationalité des parties limitée, ces documents sont nécessairement incomplets et conduisent les parties à régler les problèmes au fur et à mesure qu'ils se présentent. Certes, le recours aux tribunaux résout théoriquement les problèmes mais il accroît les coûts respectifs des parties en présence et est souvent, dans la réalité, remplacé par un accord à l'amiable. Une autre forme de garantie se conçoit à travers la substitution du marché par une organisation interne. D'autres garanties telle que l'intervention d'un tiers, autre que le tribunal, peuvent être considérées.

    Les seconds coûts de transaction de type ex post énoncés par O.E Williamson34(*) sont selon lui,  apparentés - tout en étant totalement différents -, à ce que Michael Jensen et William Meckling appellent les coûts d'agence. Ils concernent pour Williamson, d'une part les coûts de marchandage occasionnés si des efforts bilatéraux sont faits pour corriger des divergences ex post, les coûts d'organisation et de fonctionnement associés aux structures de gouvernance qui ne sont pas les tribunaux auxquels les conflits s'adressent, et enfin les coûts d'établissement d'engagement sûrs.

    O.E Williamson avance alors deux hypothèses de comportement des agents, fondatrices de l'économie des coûts de transaction. La première, s'appuyant sur les travaux de H. Simon, est relative à la rationalité limitée des agents économiques. Dans ce contexte, les contrats sont nécessairement incomplets dans la mesure où les partenaires ne peuvent pas prévoir toutes les configurations ex post de l'évolution du contrat après sa signature.

    La seconde hypothèse avancée par Williamson est donc relative à l'incertitude et plus particulièrement l'incertitude comportementale, c'est- à- dire l'opportunisme dont font preuve les individus dans un contexte d'information imparfaite.

    Tjalling Koopmans(1957) distingue deux formes d'incertitude, primaire et secondaire. La première naît de la contingence( aléas de la nature ou changements imprévisibles des comportements des consommateurs par exemple). La seconde est relative à la difficulté qu'éprouvent par exemple des dirigeants à démasquer les décisions ou les stratégies de ses concurrents. L'incertitude comportementale qui correspond à l'incertitude secondaire ne fait cependant référence à quelque refus stratégique de divulguer une information ou de diffuser à des fins tactiques une information trompeuse. Elle ne suggère pas que les parties font des plans les unes en fonction des autres, ce qui est source d'incertitude ex ante et de surprise ex post.

    O.E Williamson va plus loin dans son appréhension de l'incertitude comportementale qu'il associe à la probabilité de conduites opportunistes de la part des parties en présence. Dans cette perspective, les incertitudes comportementales se combinent aux incertitudes exogènes dues aux changements de l'environnement.

    L'opportunisme est, selon O.E Williamson, le principal facteur explicatif des coûts de transaction, il peut se caractériser par toute attitude à divulguer sur le marché des informations fausses, à omettre la transmission de données importantes pour la conclusion d'un contrat ou toute attitude visant à privilégier les intérêts d'une partie au détriment d'une autre. Mais il peut aussi apparaître comme une éventualité ex post du fait de l'incomplétude du contrat. L'opportunisme repose en fait sur une asymétrie d'information entre les partenaires et peut, soit être crée volontairement par l'un des agents( rétention ou déformation voire invention d'une information), soit apparaître de fait au cours de l'application du contrat sans que l'agent ait prémédité cette situation mais aussi sans qu'il fasse rien pour la corriger. Il existe donc dans toute transaction un risque moral dans la mesure où l'un des acteurs peut ne pas respecter ses engagements et que le coût de prévention totale de ce risque est trop élevé pour son partenaire.

    Le risque d'opportunisme augmente donc le coût de négociation et de contrôle du contrat. Lorsqu'il est considéré comme étant trop élevé, il incite donc les agents à internaliser la transaction(J.P. Helfer, M. Kalika et J.Orsoni, 2002).

    Dans la droite ligne de M. Granovettre(1985), S. Goshal et P. Moran (1996) estiment, en effet, que O.E Williamson décrit de manière générale « extrêmement caricaturale » l'opportunisme dans la mesure où il utilise indifféremment pour signifier le comportement et l'attitude. Or, la psychologie et les théories des organisations montrent que les attitudes et les comportements sont deux concepts différents, influencés par les dispositions individuelles et contextuelles. Ces auteurs montrent que le comportement opportuniste est positivement influencé par les attitudes opportunistes. Celles-ci sont influencées par les valeurs, les attitudes, les facteurs héréditaires et le jugement qu'on se fait du partenaire avec lequel on affecte la transaction. Selon eux, Une opinion positive réduit l'opportunisme, alors qu'un jugement négatif l'augmente.

    Par ailleurs, la rationalité des individus est limitée, ainsi que le souligne O.E Williamson, non seulement à cause de facteurs externes, l'environnement lui rendant la tâche souvent impossible, mais aussi à cause de son incapacité à résoudre tous les problèmes de calcul.

    Quant à la structure de gouvernance, O.E Williamson part des mêmes hypothèses que Coase concernant la raison d'être de la firme dans le marché, mais il dépasse l'opposition stricte établie par celui- ci entre ces institutions en analysant l'émergence de structures de gouvernance intermédiaires(contrats hybrides) qu'il met en rapport avec les caractéristiques des transactions.

    Après avoir défini ces hypothèses comportementales des agents, Williamson analyse les types de transactions et met en place trois attributs qui permettent de les différencier et de sélectionner la structure de gouvernance la plus efficace.

    En premier lieu, la théorie néoclassique standard conçoit des transactions instantanées entre acteurs anonymes. Or, O.E Williamson met en avant le fait que si l'investissement est durable et ne peut être redéployé sur une autre transaction, il devient spécifique. Cette spécificité peut être liée au site ( localisation de l'investissement), aux actifs matériels(équipements spécifiques) ou aux actifs humains( spécialisation de la formation et du savoir faire pour une activité particulière). Dans le cas d'une transaction spécifique, les actifs sont difficilement redéployables sur d'autres activités, les agents ne sont alors plus anonymes ni la transaction instantanée. Un lien durable de dépendance se met ainsi en place entre les parties ce qui implique le contrôle de leurs comportements et le suivi des engagements pris.

    La seconde dimension qui permet de différencier les types de transactions est liée à l'incertitude inhérente à toute transaction du fait de la rationalité limitée des agents. Cette incertitude est non seulement liée à l'environnement objectif de la transaction mais aussi aux comportements stratégiques(opportunistes) des parties. Lorsque la transaction est spécifique, l'incertitude peut alors être combinée à l'opportunisme des acteurs. Ainsi, selon O.E Williamson, les types de transaction peuvent être différenciés selon le degré d'incertitude qu'elles comportent.

    La troisième et dernière dimension mise en place par O.E Williamson pour différencier les types de transactions concerne la fréquence de la transaction considérée. La fréquence est aussi liée à la spécificité laquelle conduit à une forme d'organisation particulière pour mettre en place la transaction, qui n'est rentable que si celle- ci est suffisamment fréquente

    La mise en place de ces trois critères de différenciation des transactions permet à O.E Williamson de justifier des différentes formes d'organisations ou structures institutionnelles (gouvernance structures) choisies pour effectuer les différents types de transaction selon un critère de minimisation des coûts de transaction.

    Ainsi, le contrat classique participe d'une transaction traditionnelle effectuée par le marché. Il est unique, clairement déterminé dans son objet et dans le temps et l'identité des parties importe peu. L'incertitude comportementale et le risque d'opportunisme sont donc faibles, la fréquence réduite à une transaction et l'actif très peu spécifique de sorte que l'identité des parties n'importe que peu.

    Le contrat néoclassique ou hybride intervient dans le cadre d'une relation à plus long terme entre les parties et dont l'incertitude et donc le risque d'opportunisme sont forts. Le contrat plus souple dans ses termes que le contrat classique préserve l'autonomie des parties. Mais il est aussi nécessairement incomplet et exige le recours à un tiers pour arbitrer les conflits potentiels ex post. Ces contrats recouvrent par exemple les accords de coopération ou la franchise. Cette situation caractérise par la notion de réseau a l'avantage de minimiser les coûts de transaction par rapport au marché puisqu'elle permet de coordonner les actions des parties, mais elle permet aussi de réduire les coûts bureaucratiques de la structure hiérarchique.

    Enfin, la structure de gouvernance représentée par l'organisation hiérarchisée correspond à l'internalisation des activités. Cette dernière structure, à l'origine la seule conçue par Coase face au marché, permet en fait de minimiser au maximum les coûts de transaction du marché. Cependant, elle génère d'autres coûts de coordination et, ainsi que nous l'avons évoqué précédemment, ne peut pas, pour des raisons d'efficacité, systématiquement se substituer aux autres structures de gouvernance.

    2-2. Impact de la culture sur les coûts de transaction et le choix des structures de gouvernance

    Les différences culturelles si elles ne sont pas maîtrisées sont sources d'accroissement des coûts de transaction, par contre l'apprentissage culturel peut permettre de réduire ces coûts voire de créer des synergies. Par ailleurs, le référent culturel lui même, en conditionnant en partie le choix des modes de garanties, influence aussi le choix des structures de gouvernance.

    D'une part, le référent culturel constitue un facteur de limitation de rationalité (E. Delavallée,1995) qui doit alors être pris en compte dans l'interaction entre les acteurs de nationalités différentes du fait que la distance culturelle entre les acteurs augmente l'incertitude(J. Engelhart, S. Eckert, 1999). En effet, en conditionnant en partie le mode d'identification, de positionnement par rapport à l'organisation et par rapport à leur environnement naturel, ainsi que leurs modes d'action, la culture influence le cadre de réflexion et d'action des individus. Elle instaure certains règles de jeu et fait ainsi obstacle à certaines possibilités tout en favorisant d'autres (I. Berrebi-Hoffmann , 1990). Certes, dans un même contexte culturel, la rationalité des agents est statistiquement limitée de la même façon pour tout un chacun, mais en situation d'interaction culturelle, outre les difficultés posées par les différences de langues, les mécanismes d'interprétation de l'information disponible varient selon les groupes culturels considérés. M. Weber(1971)montre qu'il n'y a pas de rationalité universelle, mais seulement des processus rationnels construits sur des évidences variables d'une culture à l'autre.

    La culture agit comme un facteur de limitation supplémentaire de la rationalité des individus qui, parce qu'elle est différente d'un groupe à l'autre, accroît l'asymétrie et la difficulté de circulation de l'information. (Hornell, et al. 1972; Johanson et le Wiedersheim-Paul 1975; Johanson et Vahlne 1977)35(*)montrent que la différence dans le langage, l'éducation, les pratiques d'affaires, le développement culturel et industriel empêchent le flux d'informations de et au marché. Il s'ensuit que la négociation, la rédaction, la garantie et le suivi des accords sont plus coûteux en temps, en énergie et en précautions dans un contexte interculturel que dans un contexte monoculturel.

    Plus spécifiquement, lorsqu'un individu doit effectuer des transactions dans un contexte qu'il ne connaît pas encore, son incertitude augmente, tant sur les données factuelles, comportementales que linguistiques. B. Kogut et H. Singh(1988) montrent que la différence culturelle entre les partenaires augmente le degré de l'incertitude, elle peut être regardée comme un risque croissant, conduire à accroître la probabilité de choisir une société en Joint Venture comme une méthode de partager le contrôle et la possession, parce que le partenaire local qui peut servir et gérer la force de main d'oeuvre et le rapport avec le fournisseur, l'acheteur et le gouvernement, réduit le risque pour le partenaire étranger.

    La distance socio- culturelle influence significativement les opérations des affaires (S. Agrawal,1994 ; P.S. Chan, 1996 ; G. Hofstede, 1980 ; B. Kogut et H. Singh, 1988). Cette distance socio- culturelle conduit aux désaccords entre les partenaires étrangers et locaux sur le plan des cultures, les styles de direction, les pratiques des affaires...etc(P.S. Chan, 1996 ; G. Hofstede,1980 ; B. Kogut et H. Singh, 1988). B. Kogut et H. Singh(1988)de même que S. Agrawal(1994) et P.S. Chan(1996)indiquent que, comme nous le verrons dans la deuxième partie, cette distance culturelle influence significativement le choix de mode d'entrée d'une entreprise dans pays culturellement différent.   

    D'après M. Boisot(1994), il existe une discontinuité dans la progression des coûts de transaction liés à l'augmentation de la distance spéciale entre les échangistes et cette discontinuité n'est pas causée par des changements d'ordre physique, mais par des changements d'ordre institutionnel et culturel qu'on rencontre à une frontière nationale : changement de loi, de monnaie, de pratiques commerciales, de niveaux de taxation, de valeurs, d'habitudes et au- delà de tout, de langage. De tels changements augmentent les coûts spatiaux de la pratique des affaires.

    Mais, la réduction de la discontinuité des coûts de transaction/ distance spatiale ne signifie pas sa disparition(P. Joffre1999).Chaque pays impulse son propre programme mental, son propre système de croyances et de valeurs, de coutumes et de traditions qui ont des répercussions importantes sur le comportement des organisations. Cela même dans des zones en voie d'intégration économique comme l'Europe et même si les valeurs occidentales ont sans doute tendance à uniformiser. De nombreuses études sociologiques ou anthropologiques établissent des différences fondamentales entre les cultures nationales qui obligent les entreprises internationales à apprentissage coûteux de la pratique des affaires du pays investi(G. Hofstede, 1994).

    En outre, l'asymétrie d'information générée par la différence culturelle peut être source de comportements opportunistes spécifiques générateurs de coûts de transaction supplémentaires. En effet, un individu qui désire entreprendre une négociation dans un pays culturellement étranger éprouve plus de difficultés que son interlocuteurs local à interpréter son environnement humain, politique ou économique. Son partenaire local peut alors jouer sur cette asymétrie d'information et même l'augmenter en lui imposant ses propres règles de fonctionnement au nom de la culture locale ou en ne lui diffusant pas de l'information pertinente(L'hermitte, 1999).

    Cependant cet accroissement des coûts ne se limite pas au seul contexte du marché et de négociation. Il existe aussi des coûts de transactions internes dues aux problèmes de communication et d'interprétation des attitudes entre les membres de l'organisation. En effet, le coût de communication internationale dépend ainsi moins des coûts de télécommunication que de la distance culturelle engendrée par les différences des langages, de développement et de la culture(P. Joffre1999).

    Enfin, le référent culturel peut jouer un rôle dans le choix de la garantie souscrite ex ante et donc indirectement dans le choix de la structure de gouvernance(L'hermitte, 1999). Par exemple, dans un contexte culturel polychrone, les individus préfèrent s'appuyer sur le parole et la confiance de l'autre partie plutôt que sur des règles juridiques écrites qui ne tiennent pas compte des relations interpersonnelles et des compromis qui peuvent être élaborés ex post(E.T. Hall,1984). Ainsi, au delà des attributs classiques de la transaction définis par O.E Williamson (spécificité des actifs, fréquence des transactions et incertitude), l'arbitrage par un tiers et les modes de contractualisation classiques, lesquelles sont ponctuelles et ne tiennent pas compte de l'identité des parties.

    Réciproquement, l'apprentissage culturel et sa formalisation permettent de faire force à ces difficultés en diminuant le sentiment d'incertitude des parties, améliorant la qualité de la relation et corrélativement diminuant les comportements opportunistes. Il permet aussi aux partenaires de partager l'information, de constituer une synergie et donc de diminuer les coûts de transactions liés à l'interaction culturelle (L'hermitte, 1999).

    En résumé, nous avons vu dans cette partie que la culture s'est infiltrée petit à petit dans les théories économiques et organisationnelles. Ainsi, nous commençons à prendre en considération les variables comportementales, sociales et culturelles dans les décisions managériales. La théorie financière, dans son évolution, s'est inspirée de la théorie économique. En effet, toutes les grandes décisions financières sont de plus en plus influencées par des facteurs institutionnels.

    La décision d'investissement en tant que préoccupation majeure, a été jusque là prise en se référant à des déterminants techniques((VAN, TRI)). Ces derniers sont inefficaces pour expliquer certaines décisions d'investissement( notamment de VAN négatives), ce qui a permis l'émergence d'un courant considérant un autre déterminant, la culture, comme un filtre pour les choix des investissements.

    .

    Partie(2): Les facteurs culturels comme un filtre des choix d'investissements

    La conception universaliste du processus de prise de décision que représentent(H.A. Simon, 1947; C.E. Lindblom,1959; H. Mintzberg et ali.1976,1982)36(*), parmi d'autres, ne prend pas en considération la diversité des situations rencontrées dans des contextes culturels différents. Le terme d'« universaliste » sous- entend l'hypothèse que les processus et les pratiques en management sont universels et que les managers procèdent de manière plus ou moins identique dans des situations comparables, dans tous les pays industrialisés. Mais, comme le propose Schramm- Nielsen(2000), la manière préférée d'agir est fonction de la culture d'origine, étant donné que ces manières ont été apprises à travers sa socialisation dans les centres d'apprentissage que sont la famille, l'école et la vie professionnelle. La culture influence donc notre manière d'agir, de décider et de se comporter.

    En quelques années, la culture apparaît dans tous les modèles d'analyse stratégiques. Pourquoi ? Non pas parce que les entreprises n'avaient pas de culture auparavant, mais parce que, compte tenu des règles du jeu concurrentiel actuel, la culture devient une variable pertinente pour la gestion( E. Delavallée, 1996).La culture de l'entreprise est une source d'avantage concurrentiel. C'est une (nouvelle) source(M. Thévenet, 1993).La compétitivité des entreprises japonaises résulte de la cohésion qui existe entre leurs membres. Cette cohésion serait due à la forte culture de leurs entreprises.

    Des études consacrées à la relation entre la culture de l'entreprise et sa rationalité montrent que la rationalité est culturellement limitée(E. Delavallée,1995). Le dirigeant qui occupe une place centrale dans l'entreprise ne prend pas seulement ses décisions en fonction des critères mathématiques de la décision, il est influencé par son contexte social, ses expériences, sa formation, ses relations avec les partenaires...etc(J.P. Bonardi, 1998). Le rôle de la culture pourrait aussi se manifester clairement dans l'internalisation de l'entreprise, c'est- à- dire, lorsque il s'agit de rencontrer des cultures différentes. Ce qui reflète l'influence de la culture nationale sur le mode d'entrée dans les pays étrangers(U. Mayrhofer, 2002).

    Cette deuxième partie de notre travail sera divisée en deux chapitres. Nous analyserons, dans le premier chapitre, le rapport entre la rationalité culturellement limitée et la décision d'investissement. Ce qui nous conduira à analyser, dans le deuxième chapitre, l'influence de la culture nationale des entreprises sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers.

    Chapitre I. La rationalité culturellement limitée et la décision d'investissement

    Alors que la phase de sensibilisation de la notion de culture touche à sa fin, il y a un paradoxe entre le nombre de travaux consacrés à cette notion et la faible utilisation qu'en ont fait les disciplines de la gestion (E. Delavallée,1995). L'explication principale de ce paradoxe réside, selon lui, dans l'opposition des concepts de rationalité et de culture.

    Dans la suite, nous dressons, dans une première section, un inventaire des caractéristiques du concept de culture d'entreprise, et nous cherchons, dans les travaux de Simon et de ses collaborateurs de l'Université Carnegie- Mellon, des concepts présentant des similitudes théoriques et des intérêts de connaissance communs à ces dernières. Nous analyserons, dans une deuxième section, les relations entre les concepts de culture et de rationalité et la manière dont le concept de culture d'entreprise peut être intégré dans la décision d'investissement.

    Section I. Les principales caractéristiques du concept de culture d'entreprise

    Le concept de culture, issu de l'anthropologie, fait aujourd'hui l'objet d'une véritable mode en gestion (M. Thévenet, 1993). Depuis le début des années 80, date de son importation ou, plus exactement, de sa réimportation dans le champ des sciences de l'organisation et de gestion, le nombre de travaux consacrés à la culture d'entreprise par l'abondante littérature managériale est impressionnant. Certains (T.J. Peters et R.H. Waterman, 1983) ont fait de la culture un des attributs fondamentaux de l'excellence, pendant que d'autres (G. Morgan, 1989) y ont vu les bases d'un nouveau paradigme de l'organisation. Cependant, alors que, tant au sein du monde académique que dans celui des praticiens dans les entreprises, la phase de sensibilisation de la notion de culture touche à sa fin(M. Thévenet, 1993).

    L'inventaire des principales caractéristiques du concept de culture est articulé par les trois questions suivantes :

    - Qu'est-ce que la culture d'entreprise?

    - Quelles sont les fonctions et la place de la culture dans l'entreprise?

    - Comment prendre en considération la culture dans toute démarche visant l'efficacité de l'entreprise?

    1. Le concept de culture d'entreprise.

    Il y a eu plusieurs précurseurs du concept de culture d'entreprise parmi lesquels on peut notamment nommer C. Barnard (1938) et P. Selznick (1975)37(*). Mais c'est E. Jaques (1972)38(*) qui, le premier, se référa explicitement au concept de culture et donna une première définition de la culture d'entreprise39(*). Malgré l'intérêt de ces différents travaux, le succès de la notion de culture d'entreprise ne vient réellement qu'au début des années 80. Les définitions les plus couramment admises de ce concept se différencient, depuis lors, sur des questions qui ont chacune donné lieu à des débats40(*). Dresser un inventaire des principales caractéristiques de la notion de culture d'entreprise et en retenir une définition nécessitent ainsi d'effectuer un certain nombre de choix successifs qu'il convient de justifier.

    C'est, d'abord, l'autonomie de la culture d'entreprise qui a donné lieu à des échanges théoriques divergents. Pour les tenants de la «Corporate Culture»41(*), les sources de la culture d'entreprise sont à trouver dans l'entreprise elle-même. La question de l'autonomie de la culture d'entreprise est un postulat de départ. A l'opposé, certains travaux sociologiques (R. Sainsaulieu et D. Segrestin,1986 ; O. Aktouf et M. Chretien,1987) partent de l'hypothèse que, si la culture est présente dans toute entreprise, chaque entreprise n'a pas forcément de culture propre, dans la mesure où elle est traversée par un ensemble de régulations culturelles qui ne réussissent pas forcément à se fondre en une culture spécifique. Ces débats articulent l'ensemble des questions liées aux rapports entre la culture d'entreprise, les cultures nationales (P. d'Iribarne,1989), les cultures sectorielles (G.G. Gordon,1991) et les sous-cultures dans l'entreprise (J. Martin, C. Siehl, 1983 et R. Sainsaulieu,1977). Cependant, si une analyse culturelle de l'entreprise ne peut qu'être enrichie par la prise en compte des niveaux culturels externes et internes, ces derniers n'excluent pas l'existence d'une culture au niveau de l'entreprise. En effet, les entreprises ne sont pas seulement des combinaisons de phénomènes sociaux ayant trouvé leur origine dans la société. Elles sont également des espaces sociaux particuliers, dotés d'une certaine autonomie, et, à ce titre, elles développent leur propre culture.

    Cette proposition comporte deux conséquences fondamentales(E. Delavallée, 1995). D'une part, la culture d'entreprise est un concept qui met l'accent sur ce qu'il y a de commun aux membres de l'entreprise. Dans chaque entreprise, une culture commune coexiste avec un ensemble de sous-cultures, lesquelles sont également des facteurs de différenciation entre les différents groupes d'acteurs. D'autre part, la culture d'entreprise n'est entièrement déterminée ni par l'environnement national ou sociétal ni par l'environnement économique de l'entreprise. Les entreprises souscrivent à certaines valeurs dominantes de leur environnement, sans que cela empêche des variations importantes entre la culture d'entreprises soumises à des conditions environnementales similaires.

    Les différents courants anthropologiques se sont ensuite divisés entre ceux qui considèrent la culture comme partie intégrante du système sociostructurel (les écoles fonctionnaliste, structuro-fonctionnaliste, écologique- adaptationniste et historique- diffusionniste), et ceux qui la voient comme un système indépendant d'idéation (les écoles cognitive, structuraliste, de l'équivalence mutuelle et symbolique). La culture de l'entreprise ainsi que sa structure sociale et organisationnelle n'étant pas forcément ou, plus exactement, étant rarement synchronisées, ces travaux ont considéré que ce décalage pouvait entraîner une perte d'efficacité de l'entreprise. Pour cette raison au moins, cette distinction mérite d'être effectuée. Elle a également pour mérite de considérer la culture d'entreprise seulement comme un système d'idées et, par là même, de ne pas qualifier tout phénomène social de culturel.

    Qui plus est, définie comme un système d'idées, la culture d'entreprise a été considérée comme un ensemble de représentations collectives situées dans l'esprit des membres de l'entreprise et/ou comme un ensemble de productions symboliques. A cet égard, E. Enriquez (1992) dissocie système culturel (valeurs et normes de comportement), système symbolique (mythes et rites) et système imaginaire.

    La distinction des niveaux de culture est intéressante, mais mérite explication. Tout d'abord, il convient de distinguer les niveaux de culture selon qu'ils contribuent à définir le concept ou selon qu'ils permettent de le mettre en évidence. A cet égard, les productions symboliques sont beaucoup plus des illustrations, voire des voies d'accès aux représentations communes(M. Thévenet,1993), qu'un niveau de culture réellement pertinent. Ensuite, la distinction entre les représentations communes, selon que certaines restent à un niveau superficiel et manipulateur et que d'autres sont inscrites au niveau des passions et des fantasmes (R. Reitter et B. Ramanantsoa,1985), fait appel à la notion d'inconscient qui, aussi intéressante soit- elle quand elle est utilisée à des fins thérapeutiques dans le cadre d'une cure analytique, n'est pas incontournable quand il s'agit de comprendre le comportement humain au sein des organisations. Enfin, les frontières entre les valeurs, représentations, croyances et normes de comportement ne sont pas toujours faciles à distinguer.

    A cet égard, il est temps de n'utiliser que des constructions génériques qui reflètent la nature cognitive des composants de la culture d'entreprise. On peut alors considérer, à la manière de V. Degot(1985) que la culture d'entreprise est composée des évidences partagées qui guident le comportement des individus dans l'entreprise. Ces évidences peuvent concerner aussi bien la perception de phénomènes que des manières de réagir à des situations (M. Thévenet,1993).

    Malgré l'importation de certaines approches de la culture uniquement synchroniques, l'articulation entre culture d'entreprise et histoire a été rapide. Cette articulation n'est d'ailleurs pas étonnante, puisque, par tradition, l'histoire a eu pour objet privilégié la culture (F. Caron,1991), et, rapidement, on a admis que toute réflexion sur la culture d'entreprise ne pouvait que s'appuyer sur une démarche historique (E. Normand, 1984 ; B. Ramanantsoa et C. Thierry-Basle, 1989). La culture d'entreprise est un concept diachronique qui comporte la notion de temps dans sa définition même. A cet égard, la culture se construit selon un processus d'apprentissage collectif en réponse aux problèmes rencontrés par l'entreprise. Cette proposition a également pour mérite de particulariser le concept de culture aux espaces sociaux particuliers que sont les entreprises en fonction des problèmes spécifiques qu'elles doivent résoudre. Toute entreprise est une communauté contractuelle compétitive (P. Morin,1991) et doit alors résoudre deux grandes catégories de problèmes : d'adaptation à son environnement et d'intégration des individus en son sein. On peut dès lors considérer que la culture d'entreprise résulte d'un processus d'apprentissage, et qu'elle se construit en réponse à ces deux types de problèmes permanents.

    Il n'en reste pas moins que la question de la réification de la culture d'entreprise est, quant à elle, une vraie question. Pour certains (T.J. Peters et R.H. Waterman,1983), les différents traits culturels d'une entreprise sont identifiables, structurés entre eux, et constituent un «paradigme» à la manière des «patterns of culture» de R. Benedict (1934)42(*). Pour d'autres (R. Reitter et B. Ramanantsoa, 1985), nous n'aurions pas assez d'une vie pour faire l'inventaire des traits culturels d'une entreprise. Entre ces deux extrêmes, une solution intermédiaire existe. On peut, en effet, considérer que les évidences qui composent la culture d'une entreprise, difficilement identifiables exhaustivement, sont structurées au sein de grandes catégories, les traits culturels dominants de l'entreprise, qui rassemblent des évidences liées les unes aux autres par une même logique. La culture est cependant un concept qui vise, tout particulièrement, à mettre l'accent sur ce qu'il y a de spécifique à une entreprise. Des entreprises qui ont à résoudre des problèmes différents auront, par définition, des cultures différentes.

    Dans cette mesure, la recherche de traits culturels permanents et communs à toutes les entreprises nous semble quelque peu contradictoire avec la définition même du concept de culture. Les logiques à partir desquelles les évidences sont articulées les unes aux autres peuvent être tout aussi spécifiques à chaque entreprise que les évidences elles-mêmes. En tout état de cause, le fait que l'on puisse dire quelque chose de concret à propos de la culture d'une entreprise, c'est à dire que nous puissions identifier certaines évidences et que leur coexistence suppose un minimum de cohérence entre elles, suffit, nous semble-t-il, à considérer la culture comme un des sous-systèmes du système de l'entreprise(E. Delavallée, 1995).

    2. De la culture d'entreprise à la culture dans l'entreprise.

    Un inventaire des principales caractéristiques de la notion de culture d'entreprise ne peut faire l'économie d'une explicitation, d'une part, des autres variables avec lesquelles elle compose le système que constitue l'entreprise et, d'autre part, de ses fonctions dans l'entreprise.

    Toute entreprise est un système ouvert finalisé qui peut se définir comme un ensemble composé d'éléments identifiables et de leurs interrelations (J.L. Le Moigne,1974). Concernant les variables du système, plusieurs propositions incluent la culture (Strategor,1991; P. Morin,1991). Un modèle ne doit pas se limiter à expliquer le fonctionnement de l'entreprise, mais doit, également, permettre de préparer l'action. A cet égard, B. Ramanantsoa (1984) a bien montré, à propos des modèles d'analyse stratégique, que ce qu'un modèle gagne en opérationalité, il le perd en exhaustivité. Le modèle de Morin est celui qui nous semble avoir trouvé l'équilibre le plus heureux entre ces deux critères de différenciation. Dans ce modèle, l'entreprise est représentée par un système composé de quatre sous- systèmes. En plus de la culture, les trois autres sous-systèmes sont :

    - les structures formelles et informelles (structure des tâches, structure d'autorité et structure des réseaux de communication) ;

    - les objectifs organisationnels composés des objectifs formels à la charge des dirigeants, mais, également, des objectifs de chaque groupe d'acteurs, le tout venant s'agréger en un système en tension ;

    - les techniques de production et de gestion.

    Les fonctions de la culture dans l'entreprise sont étroitement dépendantes de sa définition. A cet égard, rappelons que la culture d'entreprise, c'est :

    - un ensemble d'évidences,

    - partagées dans l'entreprise,

    - construites tout au long de son histoire,

    - en réponse aux problèmes rencontrés par l'entreprise.

    Conformément à la quatrième partie de cette définition, on peut considérer que, comme chacun des sous-systèmes, la culture facilite la résolution des problèmes rencontrés par l'entreprise. Cette fonction principale se caractérise de trois manières suivant chacune des trois premières parties de la définition :

    - composée d'évidences, la culture participe à la réduction de la complexité du monde (V. Degot,1985), en agissant comme un filtre puissant à travers lequel transitent les influences internes et externes à l'entreprise (A.C. Martinet,1984), et économise la recherche de solutions (P. Morin,1991);

    - partagée, elle constitue un des modes de coordination dans l'entreprise, que H. Mintzberg (1982) qualifie de standardisation des savoirs, et un des types de contrôle(W.G. Ouchi,1980)

    - construite tout au long de l'histoire de l'entreprise, elle est le produit de son passé, mais également un tremplin pour son avenir (M. Ruffat,1991) et, par là même, un important facteur de sa stabilité.

    A propos de la nature des interrelations entre la culture et les trois autres sous-systèmes, on peut considérer qu'un minimum de cohérence entre les objectifs, les structures et les techniques est une condition nécessaire à la création d'une culture commune au sein de l'entreprise. Qui plus est, plus grande est la cohérence entre ces trois sous- systèmes, plus forte est la culture d'entreprise. De sous-système structuré par les autres sous- systèmes, la culture devient cependant structurante pour le système, tout particulièrement dans la mesure où elle constitue un important facteur de sa stabilité. Elle peut alors aussi être un frein à l'adaptation de l'entreprise à son environnement (E. Delavallée,1995).

    3. La culture et les conditions de l'efficacité de l'entreprise.

    Les rapports entre la culture et les performances économiques de l'entreprise ne constituent pas une vraie question, à moins de définir la performance comme une certaine forme de culture, ce qui défie les lois de la logique (Thévenet M,1993). Concernant les relations entre la culture et la gestion, il s'agit alors moins de chercher à avoir le bon type de culture, qui permettra à l'entreprise d'acquérir un avantage concurrentiel, que de connaître l'impact de cette variable sur les conditions de l'efficacité de l'entreprise de manière à la prendre en considération dans leur mise en place. Des travaux sur le management stratégique (A.C. Martinet,1984) et sur les structures (P.R. Lawrence et J.W. Lorsch, 1989; H. Mintzberg,1982), on peut dégager deux principes qui caractérisent l'efficacité de tout système organisé et finalisé :

    - le principe de «contingence»qui lie l'efficacité du système à une adéquation entre ses variables et une situation donnée ;

    - le principe du «fit»qui lie l'efficacité du système à une cohérence entre ses variables.

    Ces deux principes conduisent à poser le problème des transitions entre les différents états du système, c'est à dire le problème du changement. A cet égard, lors de toute stratégie de changement, la culture se présente essentiellement comme une donnée à partir de et en rupture avec laquelle il faut agir (J.W. Lorsch,1986). Qui plus est, concernant le changement de la culture, plusieurs précisions s'imposent. Tout d'abord, la culture change et évolue en fonction des différentes phases du développement de l'entreprise. Ensuite, on ne peut pas changer la culture d'une entreprise, car cela supposerait, d'une part, qu'on soit capable de dessiner l'état désiré de la culture et, d'autre part, que l'on sache exactement quoi faire sur l'état actuel pour atteindre l'état désiré (M. Thévenet,1993). Enfin, on peut faire évoluer la culture d'une entreprise. Pour ce faire, on peut soit user d'une stratégie de changement visant directement à faire évoluer la culture, comme les projets d'entreprise (V. Degot,1988), soit user d'une stratégie de changement visant à agir directement sur l'un des trois autres sous- systèmes et indirectement sur la culture, comme la mise en place d'une nouvelle technique (G. Naro,1993).

    En résumé, la culture est un concept qui, depuis sa réimportation dans le champ des sciences de l'organisation, a fait l'objet d'un nombre important de débats, le plus souvent exclusivement théoriques. Dans l'analyse précédente, nous avons retenu que toute entreprise possède une culture spécifique. Cette dernière est composée de l'ensemble des évidences partagées, construites tout au long de l'histoire de l'entreprise, en réponse aux problèmes qu'elle a rencontrés. Ces évidences, difficilement identifiables exhaustivement, sont structurées au sein de grandes catégories, les traits culturels dominants, qui constituent un des sous-systèmes de l'entreprise. La culture est en interaction avec trois autres sous- systèmes : les structures, les objectifs et les techniques. Elle a pour principales fonctions, d'une part, de participer à la réduction de la complexité du monde et d'économiser la recherche de solutions et, d'autre part, d'être un des modes de coordination et un facteur de la stabilité de l'entreprise. Les principes de « contingence » et du « fit » caractérisent l'efficacité du système. Enfin, si on ne peut changer la culture d'une entreprise, on peut quand même la faire évoluer.

    Section II. La formulation des relations entre la rationalité et la culture

    Pour certains (M. Ghertman, 1981), la contribution de Simon à la théorie de la décision est sans égal à ce jour. Elle a d'ailleurs été consacrée par un prix Nobel d'économie en 1978. D'autres insistent également sur sa contribution essentielle à la sociologie (M. Crozier,1993) et à la théorie de l'organisation (X. Greffe,1983). Les travaux de Simon, tout comme ceux de March et Cyert qui s'en sont largement inspirés, constituent ainsi, aujourd'hui encore, des références incontournables dans le champ des théories de la décision, mais également, et peut être surtout, dans celui des théories de l'organisation et, par là même, en sciences de gestion. Si Simon, March et Cyert, comme nous l'avons précédemment vu, n'ont pas abordé explicitement le thème de la culture d'entreprise, ils ont développé certains concepts avec des préoccupations similaires à celles qui ont guidé l'introduction de cette notion dans les théories de l'organisation. Fort de l'inventaire des principales caractéristiques du concept de culture d'entreprise que nous avons dressé dans la section précédente de ce chapitre, nous nous proposons, à présent, de chercher certaines similitudes théoriques et certains intérêts de connaissances communes entre ces dernières et certains concepts présents dans les trois ouvrages de base des professeurs de l'Université Carnegie- Mellon.

    1. La « rationalité limitée » et les « frontières à la rationalité ».

    Une des caractéristiques fondamentales du concept de « rationalité limitée » réside dans l'observation empirique que les choix des individus sont toujours exercés au regard d'un schéma simplifié et limité de la situation réelle. J.G. March et H.A. Simon (1999) qualifient ce schéma de « définition de la situation ». Ces limites à la rationalité ont, comme le soutient P. Bourdieu(1992),plusieurs origines qu'il convient de dissocier. Tout d'abord, la rationalité est limitée par la capacité du cerveau humain à appréhender l'ensemble des facteurs à prendre en considération tout au long du processus de décision. En ce sens, la rationalité humaine est « génériquement limitée ». Mais la rationalité est également limitée, parce que l'esprit humain est « socialement limité », et ce notamment par les limites du système de catégories de perception et d'appréciation que tout individu doit à sa formation et à sa trajectoire sociale dans et hors l'entreprise. Enfin, la rationalité est aussi « culturellement limitée », parce que, comme le soutiennent J.G. March et H.A. Simon (1999), « l'organisation aura une structure [...] dans la mesure où il y a des frontières à la rationalité - dans la mesure où il y a des éléments de la situation qui doivent être, où qui sont en fait pris comme des données, et qui ne font pas partie des calculs rationnels en tant que facteurs stratégiques potentiels. S'il n'y avait pas de frontières à la rationalité ou si elles variaient d'une façon rapide et imprévisible, il ne pourrait pas y avoir de structures d'organisation stables ».

    C'est en ce sens que l'introduction du concept de culture dans les théories de l'organisation, défini comme l'ensemble des évidences partagées, rejoint une des préoccupations qui conduit Simon à définir le concept de « rationalité limitée ». On comprend alors que la culture est intimement liée à la possibilité de prendre des décisions, notamment parce qu'elle permet de ramener une infinité de variables à un nombre limité d'entre elles sur lesquelles portent les choix. Tout processus de décision est construit sur et à partir des évidences qui composent la culture de l'entreprise. Les concepts de rationalité et de culture ne peuvent ainsi ni être opposés ni même être dissociés. Le concept de « rationalité limitée » rend possible une articulation entre les deux types de rationalité identifiés par M.Weber (197143(*)) et montre qu'il est illusoire de vouloir séparer les dimensions culturelles et rationnelles de tout processus de décision. Il n'y a pas de rationalité universelle, mais seulement des processus rationnels construits sur des évidences variables d'une culture à l'autre. La théorie de la décision de Simon apporte également deux contributions essentielles sur la manière dont ces « frontières à la rationalité » interviennent dans les processus de décision. D'une part, pour un système de « frontières à la rationalité » donné, le préférable s'exprime sous une forme relative et comparative. Le système a une rationalité, mais elle n'est jamais la seule. A cet égard, il est impossible de hiérarchiser, à priori et de manière stable, les contextes d'action et leurs mécanismes de régulation (E. Friedberg,1993). D'autre part, l'évaluation est multicritère, c'est à dire qu'une évaluation qui donne la priorité à un état donné du système ne se fonde pas sur l'exclusion d'un critère aux dépens d'un autre, mais plutôt sur une pondération de l'un par rapport à l'autre. Pour H.A Simon (1983), l'évaluation donne lieu à une sélection qui « [...] n'évoque aucun processus conscient ou intentionnel. Il montre simplement qu'en choisissant tel ou tel type d'action, l'individu renonce par là même à d'autres alternatives ». La rationalité et la capacité de choix des individus sont ainsi plutôt préstructurées que déterminées par les « frontières à la rationalité ». Elles limitent l'éventail des choix et, par là même, les rendent possibles, mais n'éliminent pas pour autant la possibilité de choisir. A cet égard, à moins que de déterminer de manière mécanique le comportement des individus dans l'entreprise, la culture influence les possibilités de réponse à un problème donné. Elle instaure certaines règles du jeu et fait ainsi obstacle à certains possibles tout en en favorisant d'autres (I. Berebbi-Hoffmann, 1990).

    2. L'apprentissage et l'adaptation à long terme.

    March et Simon considèrent que la « rationalité limitée » résulte principalement d'un apprentissage par résolution de problèmes. Cette notion d'apprentissage est également très présente dans la théorie de la décision des professeurs de l'Université Carnegie-Mellon. Cela nous autorise à aller plus loin dans la recherche de similitudes entre ces deux corps théoriques.

    L'apprentissage organisationnel peut se définir comme un phénomène collectif d'acquisition et d'élaboration de compétences (G. Koenig, 1994). C'est un processus dont résulte un acquis collectif, qui ne se résume sans doute pas aux « frontières à la rationalité », mais qui sans nul doute les comprend. Il y a ainsi fort à parier que la nature des frontières à la rationalité est liée à celle des éléments sur lesquels les entreprises apprennent. Dans leur théorie de l'entreprise adaptative, Cyert et March considèrent que les organisations apprennent à porter leur attention sur certains points de leur environnement et à en négliger d'autres. Cet apprentissage peut concerner certaines parties de l'environnement ou certains critères mesurables explicites. Il porte, en outre, sur chacun des trois composants du processus de décision. En poussant cette logique à son terme, on peut considérer que, pour un processus de décision donné, les points sur lesquels les entreprises apprennent peuvent être dissociés :

    - selon qu'ils concernent une partie de l'environnement ou un critère ;

    - selon la phase du processus de décision dans laquelle ils interviennent.

    Cependant, comme l'a bien montré Simon en raison de la difficulté d'établir une distinction nette entre fins et moyens, la deuxième dimension de cette dissociation, si elle est pertinente à un instant donné, perd de sa rigueur quand on veut l'appliquer à un processus se déroulant dans le temps. Ainsi, concernant la nature des « frontières à la rationalité », la théorie de la décision des professeurs de l'Université Carnegie-Mellon rejoint les conclusions que nous avons retenues des travaux sur la culture d'entreprise. Les « frontières à la rationalité » peuvent concerner aussi bien la perception de phénomènes que des manières de réagir à des situations. Qui plus est, quand bien même la phase du processus de décision dans laquelle elles interviennent n'est pas un critère déterminant pour les différencier, on peut tirer de ces travaux qu'elles interviennent sur chacun des composants de tout processus de décision.

    Partant de la décision comme principe de construction d'une théorie de l'organisation, March et Simon (1999) définissent les fonctions de l'apprentissage dans les organisations. Ils considèrent que « une organisation est confrontée avec un problème semblable à celui d'Archimède : afin qu'une organisation agisse de façon adaptative, elle a besoin de certaines régulations et de procédures stables qu'elle puisse employer pour mener à bien ses actions adaptatives. [...] L'adaptation à courte échéance correspond à ce que nous appelons ordinairement la résolution de problèmes, et l'adaptation à longue échéance correspond à l'apprentissage ». Qui plus est, « l'action est adaptative et orientée vers un objectif. Mais par suite de son caractère approximatif et fragmenté, seulement quelques éléments du système sont adaptatifs, à un certain moment, les autres étant, du moins à court terme, des données fixes ». Donc, « [...] certains éléments du processus qui ne deviennent pas souvent des facteurs stratégiques (les « frontières à la rationalité ») forment le coeur stable de la structure de l'organisation ». On comprend ainsi que le processus d'adaptation de l'entreprise peut se décomposer en deux sous- processus dont il est la résultante : un processus d'adaptation à courte échéance, qualifié de résolution de problèmes, et un processus d'adaptation à long terme, qualifié d'apprentissage. Ce dernier permet à toute organisation de se doter de certaines « frontières à la rationalité » qui, en garantissant la stabilité de ses structures, rendent possible l'action adaptative en élargissant les « aires de rationalité » de ses membres par l'intermédiaire d'économies d'attention. A cet égard, les « frontières à la rationalité », qui composent la culture d'entreprise, peuvent se concevoir comme une des réponses de l'action organisée à l'insuffisance des capacités cognitives des individus. Le système de « frontières à la rationalité » garantit alors à l'entreprise une certaine stabilité tout en lui permettant une certaine adaptation.

    En résumé, la rationalité humaine étant également « culturellement limitée », le concept de « rationalité limitée », développé par Simon permet alors de dépasser la fausse dichotomie de Weber et, par là même, de ne pas ni opposer ni même dissocier les concepts de rationalité et de culture. La culture d'entreprise peut alors se concevoir comme un ensemble de « frontières à la rationalité » prises comme des données dans les calculs rationnels. Ces « frontières à la rationalité », qui peuvent concerner aussi bien la manière de percevoir des phénomènes que des façons de réagir à des situations et interviennent sur chacun des trois composants de tout processus de décision, préstructurent plutôt que déterminent les choix, dans la mesure où plusieurs solutions sont toujours possibles. Elles résultent de processus d'apprentissage et, par là même, participent à l'adaptation à long terme de l'entreprise, notamment en garantissant la stabilité de ses structures.

    3 La culture et la possibilité de prendre la décision d'investissement

    Dans le cadre traditionnel, les acteurs font leurs choix d'investissement en maximisant l'espérance d'utilité de leur consommation intertemporelle ; le choix se fait uniquement à travers les flux monétaire (absorbés ou sécrétés) et qui permettent de consommer. Dans cette perspective, les acteurs sont à même de prévoir l'ensemble des flux aux différentes périodes pour les différents états du monde possible, sur un horizon temporel déterminé, et ils connaissent la structure à terme des deux intérêts permettant de faire les arbitrages de consommation optimaux. Une telle représentation suppose donc une rationalité substantielle extrême(G. Charreaux, 2001).

    A. La prise de décision sur la base d'une représentation subjective de la réalité

    L'incapacité des acteurs à prévoir les différents états du monde sur un horizon temporel illimité constitue une altération du cadre traditionnel. Selon l'argument avancé par Simon(1961)44(*), portant sur le caractère limité des capacités cognitives des individus, une telle prévision est irréaliste et ce d'autant plus que les innovations sont, par définition, imprévisibles. Cet argument, indépendamment de tout conflit d'acteurs, conduit a priori à privilégier les investissements à court terme, les flux étant le plus souvent d'autant moins difficiles à prévoir qu'ils sont censés survenir à un horizon approché(G. Charreaux, 2001).

    De même, ces limites cognitives des individus qui les conduisent à substituer au principe de la maximisation celui de la satisfaction impliquent une prise de décision sur la base de représentations subjectives de la réalité. Les théories sur lesquelles se fondent les individus pour prendre leurs décisions sont des schémas mentaux45(*) (P. Wirtz,2002). Ces derniers sont le résultat d'un processus d'apprentissage dans lequel interviennent des facteurs culturels(A. Denzau et D. North,1994).

    L'apprentissage culturel permet une réduction de la divergence entre les schémas individuels. Dans ce contexte, les schémas mentaux partagés sont des représentations de la réalité partagées par une population plus large(P. Wirtz, 2002). Selon cet auteur, le schéma mental, en tant que réducteur d'incertitude, a un impact réel sur le choix des acteurs. L'idée fondamentale est que le construit mental influe sur la perception des opportunités de création et d'appropriation des rechasses.

    Ainsi, la structure cognitive de dirigeant dépend de son contexte social. Mais, le dirigeant en tant qu'entrepreneur organisationnel possède une certaine autonomie intellectuelle par rapport à son environnement, son schéma mental individuel ne converge pas nécessairement avec l'idéologie dominante de son contexte social sur tous les points. Ses expériences personnelles et particulières contribuent potentiellement à une certaine distance entre sa représentation personnelle de la réalité et celle contenue dans le schéma mental partagé. Ceci est la base même de sa capacité à découvrir des opportunités nouvelles(J.P. Bonardi, 1998).

    Concernant ces divergences entre les schémas mentaux individuels et partagés, on trouve que les facteurs culturels expliquent clairement cette divergence. La formation initiale suivie par le dirigeant est susceptible de façonner un schéma mental divergent si cette formation a été conçue dans un contexte culturel différent de celui dans lequel opère le dirigeant. Un manager formé aux Etats-Unis aura une représentation différente de la création de valeur que ses homologues japonais. L'interaction avec les partenaires de provenances culturelles différentes induit une modification des schémas mentaux des dirigeants intéressés par l'apport potentiel de ressources de la part d'une telle catégorie de partenaires de la firme (P. Wirtz,2002).

    Dans cette perspective, P. Romelaer et G. Lambert(2001)considèrent que le décideur d'un investissement doit être un manager expérimenté qui se sert aussi de son jugement et de son intuition (et qu'il ne peut pas être uniquement un technicien des méthodes financières). Par conséquent, en utilisant les connaissances, les croyances et les convictions en stratégie, le décideur fait d'abord le pari de poursuivre une seule intention stratégique et, donc, de faire concevoir et étudier un nombre très limité de types de projets d'investissement.. Ceci revient à dire que l'entreprise préférera un projet d'investissement « conforme à la stratégie » à tout projet qui n'est pas dans le cadre de l'intention stratégique, même pour des projets qui, considérés individuellement, sont plus rentables et moins risqués.

    Aussi, le décideur, selon (A. Langley,198946(*)), est à la fois « créateur » de sa décision, « acteur » et enfin « porteur et réceptacle (carrier ) ». En fait, c'est surtout ce dernier aspect qui nous intéresse car il souligne l'effet mémoire qui signifie que l'individu n'est pas dépourvu de toutes connaissances, valeurs, préjugés... Cette mémoire rassemble un ensemble d'éléments irréversibles ayant des conséquences sur le processus de décision puisqu'ils vont influer sur la façon qu'a le décideur d'appréhender le problème. Cette expérience cumulée et cette histoire ne sont pas représentées dans les processus classiques.

    Une autre conséquence des limites cognitives des individus concerne l'ensemble des choix d'investissement. Les cultures agissent comme un filtre de ces choix et les différences culturelles créent une difficulté de communication informelle (A. Desreumaux et P. Romelaer,2001). Si l'on exclut que cet ensemble soit donné de façon exogène, se pose alors la question de son émergence. La limitation des capacités cognitives, ainsi d'ailleurs que les coûts liés à l'analyse et à la conception des projets ou encore la nécessité stratégique de prendre parfois des décisions dans l'urgence, font que le nombre d'alternatives constituant l'ensemble des choix, notamment pour les investissements stratégiques, est relativement restreint(G. Charreaux, 2001).

    Le processus de maximisation, si maximisation il y a, se réduit dans cette perspective à comparer l'accroissement de richesse ou d'utilité auquel conduit chaque alternative identifiée et sous la conduite du temps imparti pour la décision. A cette notion de rationalité limitée est liée celle de faillibilité (G. Charreaux, 2001). Comme le souligne Sah(1991)47(*), les jugements humains sont faillibles, les dirigeants peuvent accepter de mauvais projets et en rejeter de bons. Cette faillibilité trouve son origine, notamment, dans le caractère limité en effort et en temps qu'un individu peut consacrer à une décision, l'importance du timing et les biais cognitifs liés par exemple aux modèles mentaux implicites auxquels il recourt.

    Enfin, l'activité de la firme dépend d'un ensemble de ressources. Mais la question qui se pose : est- ce que convaincre un seul apporteur de capitaux de l'intérêt de la stratégie personnelle de dirigeant, grâce à la proximité relative de deux schémas mentaux individuels, est nécessairement suffisant pour l'exécution effective du projet ? Prenant l'exemple d'un projet de croissance externe, et admettons que la direction parvient facilement à convaincre un investisseur important de l'intérêt de l'opération, P. Wirtz(2002) montre que la mise à disposition des fonds qui en résulte est un levier important pour l'exécution de la stratégie. Mais supposons par ailleurs que le projet choisi par le dirigent implique un nombre élevé de suppression de l'emploi. Si la firme opère dans un pays, dans lequel le concept de la firme accorde une place importante aux intérêts des salariés, leur accordant par ailleurs des droits de contrôle, la résistance de cette catégorie de stakeholders contre le projet peut s'appuyer sur le schéma mental partagé. Ce qui nécessite d'analyser, comme nous le verrons dans le chapitre suivant, la variation du gouvernement de l'entreprise d'une culture à l'autre.

    B. Le biais cognitif comme alternative aux hypothèses d'enracinement du dirigeant

    L'impact des facteurs culturels sur la décision d'investissement pourrait-il aussi se manifester par les biais cognitifs du décideur ? L'analyse de la littérature montre que les auteurs sont unanimes pour constater que les décisions où un individu est confronté à des choix complexes, ambigus et incertains sont fortement biaisées (J. Evans 1989 ;R. Ghiglione et J.F. Richard 1999). Cela tient au fait que les individus ont des capacités cognitives limitées de traitement et de mémorisation des informations(H.A. Simon, 195848(*)). Ainsi, de nombreuses recherches recensent une multitude d'heuristiques et de biais cognitifs qui peuvent s'exercer chez un décideur(R.M. Hogarth, 1980) en matière de sélection et d'interprétation des informations qui seront considérées par lui comme pertinentes(J. Evans, 1989). En dépit de leur utilité (R. Ghiglione et J.F. Richard 1999), ces heuristiques et biais peuvent se révéler erronés et conduire à des stratégies cognitives abusives, donnant lieu au développement d'actions déviantes chez le dirigeant( J. Fredrickson et T. Mitchell, 1984).

    P. Romelaer et G. Lambert(2001)montrent aussi que lorsque les décideurs sont face à des décisions d'investissement dont les conséquences apparaissent ambiguës, des contraintes, des valeurs, voire des affects vont prendre une place non négligeable dans la décision. Ces éléments d'appréciation de l'action des managers ne rompent pas les liens avec la recherche légitime de maximisation des bénéfices, mais viennent distordre l'évaluation des projets d'investissements. Cette distorsion sera d'autant plus forte que l'ambiguïté caractérise la base décisionnelle de l'investisseur. De même, le monde dans lequel le décideur conçoit et déploie son action est changeant, complexe, habité par des forces et par d'autres acteurs qui, puisqu'ils influencent le futur de son investissement, doivent être pris en compte dans la rationalité qu'il y applique.

    J.B. Heaton(1998)49(*) propose une modélisation financière qui suppose que les dirigeants sont optimistes relativement aux chances du succès de leurs investissements : ils les surestiment systématiquement. On trouverait ce biais notamment quand l'objectif poursuivi est sous le contrôle (au moins partiel) de l'acteur et quand ce dernier est fortement impliqué dans le projet ; deux conditions qui semblent caractériser les dirigeants. Cette hypothèse de biais cognitif constitue une alternative aux hypothèses d'enracinement des dirigeants ou de construction d'empire pour expliquer l'adoption de projets non rentables.

    Selon M. Barabel et O. Meier(2002),ces biais cognitifs du dirigeant peuvent expliquer les résultats décevants des opérations de croissance externe de l'entreprise.

    En centrant l'analyse, dans une opération de fusion- acquisition, sur le dirigeant de l'entreprise acheteuse on peut se poser les deux questions suivantes :

    1- quelles sont les erreurs(liés aux biais cognitifs) commises par le dirigeant de l'entreprise acheteuse lors d'opérations de croissance externe ?

    2- Quels sont les facteurs qui peuvent, au regard du contexte de l'acquisition et de ses caractéristiques, augmenter le risque d'apparition d'erreurs cher les dirigeants ?

    Une opération de fusion- acquisition se décompose classiquement en trois phases distinctes : La phase de pré acquisition, la phase de négociation avec la société cible et la phase de mise en oeuvre qui conduit à l'intégration de l'entité acquise dans le nouvel ensemble(M. Barabel et O. Meier., 2002).

    Au cours de ces différentes phases, le dirigeant de l'entreprise acheteuse joue un rôle déterminant, eu égard à sa position dans la structure et à son impact sur la performance future du nouvel ensemble. Acteur important de l'opération(G. Guieu, 1994), il peut commettre un certain nombre d'erreurs liées aux processus cognitifs biaisés dont les effets seront néfastes à la qualité et à la valorisation de l'opération.

    En phase de pré-acquisition(préparation), La focalisation sur une cible préférée d'entrée conduit par conséquent le dirigent à éliminer des alternatives parfois crédibles et à minimiser les inconvénients de la solution retenue en première intention. Ceci peut par conséquent l'amener à retenir une société qui n'apparaît pas comme la solution la plus optimale. De même, le dirigeant peut être tenté de reproduire et d'appliquer les principes antérieurs à un nouveaux contexte décisionnel, au regarde des similitudes perçues entre un événement passé et une situation présente, sans tenir compte des phénomènes de temporalité et des caractéristiques propres aux différents événements.

    En phase de négociation exclusive avec la cible retenue, le dirigeant peut exagérer les chances de sucés de l'opération et avoir la conviction que la décision aura un coup sûr, une issue positive alors que statistiquement les chances de réussite sont de moins d'une sur deux(R. Olie, 1994).En particulier, il aura tendance à surestimer sa capacité à contrôler les résultats, pensant que le risque encouru peut être réduit par une bonne utilisation de ses compétences professionnelles. Le décideur est alors exagérément optimiste sur ses capacités à obtenir des résultats nettement supérieurs à ceux obtenus avant lui(M.H. Bazerman, 1998)

    Dans la phase d'intégration , lorsque le processus de décision d'acquisition est caractérisé par un haute niveau de stress et une mobilisation d'énergie importante sur une longe période, les décideurs peuvent en fin de processus(proximité de l'échéance) accélérer le cours des événements, pour en finir. En procédant ainsi, les dirigeants peuvent être conduits à prendre leurs aptitudes managériales en les amenant à céder à la pression des événements, sans pour autant avoir une totale maîtrise de la situation. Ce phénomène de précipitation peut avoir comme conséquences de négliger ou d'occulter les dernières phases de décisions.

    En ce qui concerne les facteurs augmentant le risque d'apparition d'erreurs cher les dirigeants, plusieurs facteurs renforcent l'apparition de biais cognitifs chez le dirigeant à savoir : La pression temporelle des différentes parties prenantes, le rôle des experts, l'homogénéité culturelle de l'équipe de décision de l'entreprise acheteuse, les expériences antérieures réussies dans des opérations de fusions- acquisitions et la qualité relative de l'entité acquise(M. Barabel et O. Meier., 2002).

    En se focalisant sur le troisième facteur(l'homogénéité culturelle de l'équipe de décision de l'entreprise acheteuse), on trouve que le Pdg s'entoure presque toujours d'une équipe restreinte d'individus(P.C. Haspeslagh et D.B. Jemison,1991) chargés de décider avec lui de l'opportunité de l'opération et de négocier avec la cible des conditions de l'accord. L'un des risques pour le Pdg, responsable de la constitution de l'équipe, est alors de sélectionner des acteurs aux caractéristiques proches (homogénéité culturelle) sur le plan personnel(même sensibilité, état d'esprit voisin) et professionnel(même diplôme, même type de compétences, etc.) (D.C. Hambrick, 1995).

    En procédant ainsi, le dirigeant uniformise ex ante les points de vue des membres de son équipe(D.C. Dearborn et H.A. Simon,1958), ce qui les conduit lors de la prise de décision à avoir une opinion très proche les uns des autres(S.B. Rodrigues et D.J. Hickson,1995). Ainsi, la proximité culturelle des décisions risque de générer un processus décisionnel sans heurt(absence de conflits cognitifs liés à une interprétation commune des données) avec un recueil d'informations limité( M.E. Shank et al. 1988) qui peut masquer les problèmes posés par l'opération et aboutir à des solutions peu productives(A. Amson et al.1995). L'homogénéité culturelle des décideurs peut donc conduire à des consensus précoces, empêchant d'aborder les problèmes clés de la décision et de sa mise en oeuvre(R.L. Priem et al.1995), ce qui tend à générer des évaluations erronées(H. Laroche,1988). A ce stade, on peut aussi citer (Janis,197250(*)), selon lui, lorsque la cohésion est particulièrement forte entre des individus alors des solutions peuvent être acceptées sans réelle évaluation, les acteurs se conforment à la norme.

    En résumé, Les dirigeants sont toujours actifs, leur rôle dans le processus de la décision d'investissement ne se limiterait pas à des techniciens des méthodes financières. Ils prennent leurs décisions selon des représentations subjectives de la réalité. Les théories sur lesquelles se fondent les dirigeants sont des schémas mentaux. Ces derniers sont le résultat d'un processus d'apprentissage dans lequel interviennent des facteurs culturels. Les biais cognitifs des dirigeants conduisant à choisir des projets d'investissement non rentables, remplacent l'hypothèse d'enracinement des dirigeants. L'homogénéité culturelle du cadre qui entoure le dirigeant augmente ses biais cognitifs et conduit par conséquent à des résultats décevants. Ceci nous permet de dire que la décision d'investissement pourrait être expliquée par la personnalité du dirigeant.

    Chapitre II. L'influence de la culture nationale des entreprises sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers

    Hofstede (1991,1994) définit la culture nationale comme un système d'idées et de valeurs partagé par les membres d'un même groupe. Si, depuis la fin des années 1980, plusieurs investigations empiriques ont tenté d'évaluer l'influence de l'environnement culturel des entreprises sur le choix du mode d'entrée, la relation entre ces deux variables n'est pas clairement établie. Une juxtaposition et une comparaison des résultats de ces études permettraient de déterminer si la culture nationale des acteurs constitue effectivement un facteur explicatif du choix du mode d'entrée (Mayrhofer U, 2002).

    Avant d'analyser, dans la deuxième section, Les éléments de la différenciation culturelle des pays et leur impact sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers, il convient de montrer, dans la première section, la variation du système de gouvernement de l'entreprise d'une culture à l'autre du fait que la logique d'investissement des entreprises dérive des modèles de gouvernement nationaux, dont la nature du contrôle et la nature du financement externe représentent des caractéristiques importantes (Mayrhofer U., Roth F,1999).

    Section I. La culture comme facteur d'inertie de l'évolution des systèmes des gouvernements des entreprises(( étude comparative))

    Malgré l'intégration croissante des marchés de capitaux, les systèmes de gouvernement de l'entreprise(désormais GE)de différents pays divergent encore souvent d'une manière non négligeable. Nous parlerons de système de GE par rapport à l'ensemble des mécanismes qui contraignent potentiellement l'espace discrétionnaire des dirigeants dans un pays donné. Ces systèmes ne sont pas indépendants des traditions nationales en terme de contrôle des dirigeants. Les traditions, issus de l'histoire, différent non seulement par rapport au répertoire des mécanismes disciplinaires appliqués, qui sont légaux, spontanés ou organisationnels, mais également par apport aux objectifs qui sont assignés au GE(P. Wirtz, 2002).

    Comme l'exploration de nouvelles activités, l'exploration de nouveaux territoires, ou l'internationalisation peut être associée à la notion de « distance culturelle » entre acteurs. La distance culturelle indique le degré de proximité entre deux cultures(J. Engelhard ; S. Eckert, 1999). La culture est un schéma mental partagé qui représente, selon A. Denzau et D. North (1993), un facteur d'inertie dans l'évolution des systèmes de gouvernement des entreprises nationaux. Le modèle mental du dirigeant représente également une barrière aux investissements internationaux(N. Kessler 1995 ; R. Uppal, 1994), car celui-ci perçoit de façon biaisée les chances et les risques à l'étranger. Ce biais peut être attribué au manque d'informations que possède le dirigeant sur les coutumes, traditions, normes, lois, telles que la réglementation comptable ou les spécificités du système de gouvernement des entreprises. Comme conséquence de ce manque d'informations, l'incertitude perçue au travers des investissements effectués à l'étranger tend à être plus forte que celle qui concerne les investissements « domestiques ». Aussi, l'initiateur d'un rapprochement potentiel devrait être plus sensible aux problèmes d'asymétrie d'information et de sélection adverse (S. Balakrishnan ; M. Koza, 1993), qui conditionnent le degré d'incertitude comportementale

    Les analyses fondatrices de (A.A. Alchian et H. Demsetz,1972 ; M.C Jensen et W.H Meckling 1976 et E.F Fama,1980). 51(*) ont privilégié l'étude des relations d'agence entre les dirigeants, les actionnaires et les créanciers. Elles peuvent être élargies afin d'intégrer d'autres stakeholders, en particulier les salariés, et approfondis pour mieux rendre compte de l'hétérogénéité de groupes tels que les actionnaires ou les créanciers. Charreaux(1997) définit le gouvernement de l'entreprise comme « l'ensemble des mécanismes qui ont pour effet de délimiter les pouvoirs et d'influencer les décisions des dirigeants, autrement dit qui ''gouvernent'' leur conduite et définissent leur espace discrétionnaire ».

    Se distinguant de la théorie de l'agence qui privilégie la notion de conflit d'intérêt, associée à celle de relation d'agence, la théorie des coûts de transaction retient la transaction comme unité d'analyse et la spécificité des actifs supports de la transaction, comme concept central. Un actif est d'autant plus spécifique que son redéploiement vers un autre usage entraîne une perte de valeur importante(Charreaux,1997).

    s'appuyant sur le principe d'efficacité, O.E. Williamson (1985)52(*) analyse les mécanismes organisationnels qui permettent de gérer les différentes transactions entre la firme et les stakeholders, selon le critère de minimisation des coûts de transaction, ces derniers incluant les coûts d'agence. Il oppose les mécanismes intentionnels, issus d'un dessein de contrôle de la transaction, de nature institutionnelle, aux mécanismes spontanés, de nature contractuelle. Les premiers permettraient de gérer plus efficacement les transactions mettant en jeu des investissements fortement spécifiques. Ainsi, le conseil d'administration interviendrait pour contrôler la transaction avec les actionnaires, censée financer les investissements spécifiques à la firme. Inversement, la relation de prêt associée au financement d'actifs redéployables serait plus efficacement protégée par un mécanisme spontané et contractuel, sous forme de clauses ou de garanties.

    Les salariés qui, dans le cadre de la relation salariale, effectuent des investissements en capital humain spécifique, liés à la firme, encourent un risque lié à la nature à long terme des contrats de travail. Des mécanismes tels que la cogestion ou la participation au conseil d'administration permettraient de préserver leurs intérêts et contribueraient à minimiser les coûts liés à cette transaction particulière. La protection des clients serait le plus souvent assumée, indépendamment de tout mécanisme institutionnel, grâce notamment à la marque qui fait intervenir la réputation de la firme et aux contrats de garantie. Enfin, la transaction entre les dirigeants et la firme, à caractère spécifique élevé, justifierait, outre le recours à des mécanismes de protection contractuelle (contrats de rémunération, indemnités en cas d'éviction), une protection institutionnelle assurée par la présence des dirigeants au conseil d'administration. Le conseil d'administration se verrait ainsi reconnaître un rôle secondaire de protection des intérêts des dirigeants.

    Les créanciers financiers ne constituent pas non plus une catégorie homogène. On distingue ainsi les dettes internes contractées auprès des banques, des dettes externes négociées directement sur les marchés. Les banques assureraient ainsi une fonction de spécialiste du contrôle, ce qui conduirait les autres stakeholders à leur déléguer la mission de surveiller les dirigeants. Au Japon, ce rôle des banques, notamment de la banque principale, est souvent avancé comme étant un des facteurs déterminants de l'efficacité des firmes, d'autant plus que les banques y sont fréquemment les actionnaires principaux.

    Le cadre théorique décrit précise les différents mécanismes qui délimitent l'espace discrétionnaire des dirigeants, avec pour objectif de limiter les coûts de transaction, sans s'interroger sur le comportement des dirigeants. Ces derniers cependant ne sont pas passifs. Poursuivant d'enracinement, ils cherchent à neutraliser les différents mécanismes disciplinaires.

    Mais, une comparaison des systèmes de gouvernement des entreprises nationales montre que des similitudes et des différences coexistent. Les différences expliquent que dans différents pays il existe des différences dans les représentations du statut des stakeholders. Ces représentations ont des racines socioculturelles et peuvent être assimilées à des schémas mentaux partagés (Denzau et North,1994)53(*).L'héritage culturel est important pour ces représentations partagées. La pertinence de ce concept se reflète dans l'étude de Yoshimori(1995)54(*), qui constate l'existence de divergence au niveau de la représentation du statut des partenaires de la firme dans différents pays.

    Le cadre qui est étudié ici passe en revue les caractéristiques des ''modèles'' japonais , allemand et anglo- américain, mais ces modèles sont tirés à la fois de ce qui est réel et qui est perçu et ils représentent des « catégories idéales ».S'agissant des contrastes entre ces trois modèles(le système français constitue une forme hybride(Charreaux,1997), on peut mettre en avant le principe dit d'« inversion » dans 1'ordre de priorité des « trois P » (les personnes, les produits, les profits), il sera déterminé ultérieurement si ces modèles sont en train de changer et si une convergence apparaît (P.C. Oman, H.D. Brooks,1997).

    Japon

    Allemand

    Etats- Unis/Royaume- Uni

    Personnes

    Produits

    profits

    Produits

    Personnes

    Personnes

    profits

    Personnes

    Personnes

    1. Le modèle japonais :

    Les grandes entreprises japonaises pratiquent ce que l'on appelle « l'emploi à vie ». Le fait qu'il puisse y avoir des exceptions à cette règle (dans le cas des femmes, des travailleurs temporaires ou des travailleurs immigrés, par exemple) n'a pas de pertinence du point de vue du gouvernement d'entreprise. Il entre dans la rhétorique du capitalisme japonais que les personnes ont la priorité dans l'entreprise, que ce sont des formes d'entreprises fondées sur la notion de collectivité et que les cadres dirigeants ont une responsabilité sociale (M.Fruin,1992). Le mot japonais qui désigne l'entreprise, kaisha, et celui qui désigne la société, shakai, sont composés à partir des deux mêmes caractères (kanji), mais dans un ordre inversé. Certains Japonais aiment à dire que, dans leur pays, il y a beaucoup de kaisha (entreprises), mais pas de shakai(société). Parmi les nombreuses conséquences de cet état de fait, dont la plupart devront être laissées de côté pour les besoins de cette analyse, il convient d'en souligner une : l'absence de shakai se manifeste, entre autres, par la non existence d'un Etat- providence. Par ailleurs, les salariés des grandes sociétés attendent de celles- ci qu'elles leur apportent le bien-être. L'une des nombreuses raisons pour lesquelles les créations des entreprises sont très peu nombreuses au Japon est le fait que les conditions sont bien meilleures dans les grandes firmes bien installées. La sécurité, le prestige social, une meilleure rémunération et de précieux avantages annexes, y compris de bonnes perspectives de mariage, sont quelques- uns des privilèges offerts. Traditionnellement, les licenciements n'existent pas dans les firmes japonaises. En contrepartie, les salariés sont sensés servir fidèlement leur entreprise.

    Oman P.C., Brooks H.D(1997)montrent que décrire le directeur général japonais comme un « généraliste » nécessite une explication. L'élite à la tête des entreprises japonaises est généralement diplômée de l'une des trois filières suivantes: droit, ingénierie ou économie. Les diplômés des facultés de droit des universités japonaises prestigieuses, formant ce que l'on appelle les anciennes « universités impériales». L'accès à une bonne université japonaise est très difficile et uniquement possible via des examens d'entrée très sélectifs (les élèves travaillent donc extrêmement dur dans l'enseignement primaire et surtout dans le secondaire), alors que l'obtention d'un diplôme d'université est une simple formalité.

    L'emploi à vie étant pratiquement garanti dans les grandes firmes, un de ses corollaires a toujours été le principe selon lequel une personne travaille dans une entreprise, et n'occupe pas tel ou tel poste ou telle ou telle fonction. Comme le note R.Whitley(1992), au Japon les niveaux élevés de dépendance réciproque entre les employeurs importants, leurs salariés de base et leurs fournisseurs et clients sont peu susceptibles de produire des systèmes d'activités efficaces s'ils sont accompagnés de tâches très spécialisées et de systèmes de supervision formalisés. La rotation du personnel dans l'entreprise est également une caractéristique de la culture d'entreprise japonaise. Dans les entreprises, les qualités nécessaires pour encourager l'esprit d'équipe, créer le consensus, ou motiver sont celles qui seront particulièrement appréciées pour la promotion. Un directeur général japonais et les cadres qui le secondent seront donc en principe des généralistes, c'est- à- dire des personnes ayant travaillé dans de nombreux services de cette entreprise et qui ont ainsi acquis une bonne vue d'ensemble.

    Selon Yoshimori(1995)55(*), il est possible de distinguer les systèmes monistes, dualistes et pluralistes. La philosophie moniste qui privilégie les intérêts des seuls actionnaires, est dominante dans les pays anglo- saxons. L'approche pluraliste, qui tient compte des objectifs de plusieurs stakeholders, serait caractéristique du Japon. Le concept dualiste, à demi chemin entre les précédents, dans la mesure où, à côté des intérêts des actionnaires, sont pris en compte ceux des salariés, prédominerait en Allemagne et, partiellement, en France. On constate donc que dans ces différents pays il existe des Differences dans la représentation du statut des stakeholders.

    Il est certain que le Japon traverse une crise. Son économie est en plein marasme depuis environ cinq ans, situation sans précédent dans l'histoire de ce pays depuis la guerre, et assez peu brillante même comparée à l'activité des pays européens, généralement moins soutenue. On peut être d'accord avec Watanabe et Yamamoto(1993)lorsqu'ils affirment qu'au Japon, la crise économique est, dans une certaine mesure, une crise du gouvernement d'entreprise. Il existe à la fois des pressions internes et externes pour des changements dont quelques-uns ont été intégrés dans des amendements, aux codes du commerce japonais, en 1994, par exemple la création d'au moins un poste d'auditeur externe(A.Viner,1993).Depuis la Seconde Guerre mondiale, la performance économique des systèmes orientés réseaux semble cependant supérieure, tout en étant apparemment plus équitable dans la répartition des gains de la croissance. Le meilleur partage du pouvoir décisionnel entre les différentes catégories de stakeholders, en garantissant une plus grande cohésion organisationnelle, conduirait à une plus grande efficacité.

    2. L e modèle allemand

    Selon Oman P.C., Brooks H.D(1997),les sociétés allemandes ne prêtent pas autant d'attention à leurs salariés que les entreprises japonaises. La structure des syndicats est également différente. Au Japon, les syndicats d'entreprise sont généralement de nature verticale, tandis que ce sont les syndicats de type horizontal qui prédominent en Allemagne. Par ailleurs, alors que le syndicat d'entreprise au Japon fait partie intégrante de la culture de l'entreprise et de sa structure, les firmes japonaises ne sont pas juridiquement tenues, contrairement aux entreprises allemandes, d'assurer une représentation syndicale au sein de leur conseil d'administration. Ce qui nous permet de dire qu'au Japon, le rôle du conseil d'administration en tant qu'un mécanisme de contrôle de la décision du dirigeant n'est pas le même qu'en Allemagne.

    Les salariés se voient accorder une priorité moins grande dans les firmes allemandes que dans les entreprises japonaises, mais sont encore plus éloignés des préoccupations des sociétés anglo-américaines traditionnelles. En Allemagne, la formation des salariés fait l'objet d'investissements considérables, par exemple via un système d'apprentissage intensif et très étendu. Il est rare qu'un salarié quitte une grande entreprise pour en intégrer une autre. De plus, même si l'emploi à vie n'existe pas, contrairement à ce qui se passe au Japon - les licenciements sont possibles, bien qu'ils soient rares si l'on compare cette situation à celle des Etats-Unis et du Royaume-Uni - les salariés restent en principe dans la même entreprise tout au long de leur vie professionnelle. Aussi bien les entreprises allemandes que japonaises pratiquent, pour l'essentiel, la promotion interne.

    Quant au système financier allemand, il se caractérise en premier lieu par un contrôle du capital des grandes entreprises par les principales banques du pays, à savoir la Deutsche Bank, la Dresdner Bank et la Commerz Bank. Ce contrôle du capital dérive d'une part, des participations détenues, d'autre part, du système de procuration très développé qui permet aux institutions financières de représenter les petits actionnaires. La banque joue donc un rôle central dans le système de gouvernement des entreprises du pays. Les liens financiers entre les trois principales banques sont renforcés par des participations croisées conduisant à un fort autocontrôle.

    Les compagnies d'assurance et de réassurances s'insèrent également dans ce réseau financier, conduisant à la constitution d'un véritable coeur financier (D. Mertens- Santamaria, 1997). Ce réseau de participations croisées est renforcé par un verrouillage de l'administration des entreprises, où la Deutsche Bank joue un rôle central (H. Papenheim-Tockhorn,1995 ; A. Pfannschmidt, 1993)56(*). Aussi, « l'esprit de corps » des dirigeants allemands devrait être fort, notamment lorsqu'il s'agit de partager le contrôle du capital avec des entreprises étrangères au réseau (H. Kalfass,1988). Avec un capital verrouillé et des marchés financiers peu actifs( R. La Porta et al., 1997), on observe donc un pouvoir en réseau de type technocratique, selon la formule de (F.Morin,1974). Ce pouvoir technocratique peut être qualifié de professionnel, dans la mesure où la carrière des dirigeants allemands s'effectue principalement en interne (M. Bauer, B. Bertin- Mourot,1990). Enfin, comme pour la plupart des pays occidentaux, sauf les États- Unis, la logique de financement externe des entreprises allemandes repose sur l'intermédiation bancaire. Toutefois, le faible poids du marché financier dans ce pays limite les possibilités de lever des ressources externes autres que bancaires (E. Berglöf, 1997 ; R. La Porta et al., 1997).

    M. Aoki et H.Patrick(1994)indiquent que les OPA sont très rares et les OPA hostiles pratiquement inexistantes en Allemagne et au Japon, contrairement à ce qui passe aux Etats- Unis et au Royaume- Uni. Généralement, on souligne aussi qu'une des raisons essentiels de cette disparité porte sur les relations banques- entreprises différentes et très étroites qui prévalent dans les contextes allemands et japonais. Cependant, il faut également souligner qu'il existe d'importantes raisons culturelles. En particulier, dans la mesure où une priorité élevée et relativement élevée est accordée aux personnes respectivement au Japon et en Allemagne, les OPA sont désapprouvées d'un point de vue social et éthique, selon l'argument que l'on n'est pas censé acheter ou vendre des personnes.

    On a jusqu'à présent beaucoup commenté - et souvent en termes négatifs - le fait que les conseils d'administration japonais et, dans une mesure moindre quoique comparable, les conseils d'administration allemands, aient une structure relativement contestable. Le pouvoir y est en effet concentré entre les mains du directeur général.

    Bien que la forme juridique des conseils d'administration japonais et allemand soit distincte, cette différence est plus apparente qu'effectives en termes d'équilibre des pouvoirs. Le système germano- nippon (allemand/japonais) apparaît principalement réglé par des mécanismes internes. Il semble offrir une meilleure capacité préventive et favoriser la coopération et l'investissement à long terme(Chareaux,1997).

    Enfin, le principal inconvénient des modèles allemand/japonais qui donnent la priorité aux personnes et aux produits plutôt que chercher impérativement à maximiser la valeur de l'entreprise aux yeux de l'actionnariat et reposent sur un rôle plus limité des actionnaires, est constitué par l'absence relative d'une surveillance efficace des activités de la direction générale (Oman P.C., Brooks H.D,1997).

    3. L e modèle anglo- américain

    Dans les pays anglo Saxons, les fonds en provenance du marché boursier seraient la principale source du développement des entreprises(Corbett et Jenkinson, 1996). Les OPA sont endémiques.

    Lorsque l'on oppose l'ordre de priorités des « trois P » du modèle japonais à celui du système anglo- américaine, il faudrait se garder d'en conclure que l'attitude qui consiste à se préoccuper des personnes fait d'avantage partie intégrante de l'environnement socio- éthique du Japon que de celui des Etats- Unis et au du Royaume Uni. De plus, dans le modèle anglo- américain, la valeur d'un individu est normalement fondée sur ses compétences spécifiques tandis que, dans le modèle japonais, elle repose davantage sur la fidélité à l'entreprise et la durée de l'activité du salarié dans cette entreprise. La valeur d'un bon ingénieur Intel ou GEC tient au fait que cet homme ou que cette femme est bon ingénieur ; la valeur d'un bon salarié de Toshiba tient au fait qu'il est un bon salarié de Toshiba(Oman P.C., Brooks H.D,1997).

    De ce point de vue, la fréquence des licenciements aux États- Unis ou au Royaume-Uni, par rapport à leur absence générale au Japon, laisse supposer un raisonnement différent. L'ingénieur Intel/GEC, homme ou femme, peut vendre ses compétences sur un marché du travail ouvert. S'il est licencié, ses compétences peuvent être relativement facilement transférées dans une autre firme. Si un salarié de Toshiba est licencié, ses nombreuses connaissances sur Toshiba ne sont guère utiles, sauf, bien entendu, si elles sont telles qu'il peut en faire bénéficier la concurrence, auquel cas, cependant, il est peu susceptible d'être licencié ! C'est pourquoi, lorsque les grandes entreprises japonaises mettent en préretraite ou licencient leurs salariés, elles les reclassent habituellement, dans le dernier cas, chez l'un de leurs fournisseurs, où le fait de connaître la société mère reste un avantage évident.

    Indiquer que, dans les modèles japonais et allemand, les profits soient moins prioritaires que dans le modèle anglo- américain, ne signifie pas que ces profits et les actionnaires ne comptent pas ! les actionnaires institutionnels/ en réseau étant beaucoup mieux considérés en Allemagne et au Japon, l'accent est généralement mis sur la stabilité des rendements des investissements. L'accent mis sur la priorité aux profits et la valeur de l'entreprise aux yeux des actionnaires produit de toute évidence des résultants importants. Au Royaume- Uni, les dividendes sont en général près de deux fois supérieurs à ceux versés en Allemagne et de trois fois supérieurs à ceux versés aux actionnaires au Japon(V.Handy,1993).

    Aussi, au Royaume-Uni, le système de contrôle repose essentiellement sur les investisseurs institutionnels [OCDE 1998]57(*). En effet, l'actionnariat se caractérise par une prédominance de ce type d'investisseurs, une forte concentration des actions des entreprises cotées entre leurs mains, la quasi- absence de participations croisées entre entreprises et un poids faible des actionnaires individuels dans les participations directes [OCDE 1998]58(*). Les investisseurs institutionnels jouent donc un rôle globalement plus important dans le capital des sociétés cotées en bourse. Ce contrôle peut donc être qualifié d'orienté- marchés (P. Moerland,1995), puisque reposant sur des marchés financiers actifs sans verrouillage de capital. Enfin, le marché financier, à côté du financement bancaire, représente également un moyen important de financement externe (E. Berglöf, 1997 ; R. La Porta et al., 1997).

    Le système anglo- saxon serait sensé conduire une politique d'investissement sous- optimale, privilégiant une optique de court terme. Cependant, sa flexibilité et son adaptabilité seraient supérieures à celles du système concurrent(Chareaux,1997).

    4. Le modèle français

    La plupart des études opposent les systèmes anglo- saxons (Etats- Unis et Grande Bretagne) aux systèmes allemands et japonais, les systèmes latins en particulier le système français- constituent une forme hybride(Charreaux,1997).

    Les conseils d'administration des entreprises en France peut contenir un certain nombre de salariés. Leur nombre est cependant plus faible et leur influence réduite. A contrario, en France le rôle de l'Etat supposé être fort(V. Schmidt, 1996). Concernant les mécanismes spontanés de contrôle, la plupart des auteurs soulignent la faible importance des OPA hostiles pour les firmes allemandes et françaises, bien que les freins institutionnels semblent globalement moins importants en France qu'en Allemagne(J. Franks, C. Mayer, 1990). Ainsi, le système de contrôle français occupe une position intermédiaire entre le système de contrôle allemand et celui des pays anglo- saxon(E. Berglôf, 1990). Une autre distinction entre système de contrôle, due à Moerland(1995), est celle entre une logique de réseaux(Ex :Allemagne) et une logique de marché(Ex :les pays anglo-saxons). Toujours selon Moerland, la France occupe une position intermédiaire.

    Le modèle financier français se caractérise par l'existence de plusieurs pôles financiers. Lorsque l'État dominait l'économie nationale, le contrôle des grandes entreprises du secteur financier était public. Les vagues de privatisation ont conduit à un éclatement des groupes. Toutefois, les réseaux de dirigeants, liés au système de formation des grandes écoles et des grands corps de l'Etat, représentent toujours un mécanisme de gouvernement des grandes entreprises essentiel en France (C. Kadushin, 1995 et F. Morin,1996). De plus, si l'Etat n'est plus majoritaire dans un grand nombre d'entreprises, il reste très impliqué par le biais des participations détenues (D. Mertens-Santamaria,1997) et la mise en place de noyaux durs (F. Morin, 1996). Les coeurs financiers en France sont également stabilisés par de fortes participations croisées entre les groupes concernés. Il existe donc, à l'instar du modèle allemand, une sorte de verrouillage institutionnel du capital. Ce verrouillage conduit aussi à un pouvoir en réseau de type technocratique. Toutefois, celui-ci peut être qualifié de politique du fait de l'implication de l'État et du système de formation des dirigeants français. Enfin, les marchés financiers, comme moyen de financement externe, jouent un rôle plus important qu'en Allemagne ( E. Berglöf, 1997 ; R. La Porta et al.,1997).

    En résumé, nous constatons, donc, que les comparaisons internationales opposent souvent les pays anglo américains, pour lesquels les mécanismes du marché financier guidés par les intérêts des actionnaires revêtent une grande importance, à des pays comme l'Allemagne et le Japon, où le contrôle semble s'effectuer d'une manière plus relationnelle, tenant compte de plusieurs catégories de stakeholders. A la France, on attribue souvent une place intermédiaire, soulignant comme particularité le poids de l'Etat. Nous constatons aussi que les pays anglo américains privilégient l'investissement à court terme alors que d'autres pays comme l'Allemagne et le Japon privilégient l'ensevelissement à long terme.

    Section II. Les éléments de la différenciation culturelle des pays et leur impact sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers

    Une analyse réalisée par U. Mayrhofer en 2002 montre qu'il est préférable d'appréhender la culture à partir de plusieurs dimensions plutôt que de s'appuyer sur un seul facteur. Elle confirme la nécessité d'intégrer les variables culturelles dans les modèles explicatifs du choix du mode d'entrée.

    Nous essayerons, dans ce qui va suivre, de classifier ces facteurs en quatre catégories à savoir : le mode d'identification des individus, leurs positionnement par apport aux autres individus et leur positionnement à leur environnement naturel ou religieux ainsi que leur positionnement par apport à leur environnement économique.

    1. Premier axe de référentiel culturel : le mode d'intensification et d'appartenance des individus

    La première différenciation culturelle concerne le besoin qu'éprouvent les individus à se définir par apport à un ou plusieurs groupes d'appartenance de référence. Ces groupes peuvent être plus ou moins étendus et dominants et prendre des formes différentes telles que la nation, l'ethnie, la religion, la caste, l'entreprise ou la famille.

    1-1. Appartenance monochrone ou polychrone

    Le caractère polychrone de l'appartenance que nous reprenons à E.T Hall(1984) est relatif à un mode relationnel complexe qui inscrit les individus dans les rapports multiples d'interdépendance souvent informels et d'engagement personnel. Il est caractéristique des cultures de groupe(collectivistes) dans lesquels l'individu privilégie les relations personnelles et émotionnelles sur les relations fonctionnelles et rationnelles. Au contraire, le caractère monochrone de l'appartenance fait référence à un mode relationnel plus fonctionnel, séquentiel et formalisé qui engage dans une bien moindre mesure la personnalité des individus concernés. Aussi, Hall montre que, dans une organisation monochrone, la qualité humaine des membres qui la constituent n'est pas prise en considération, Les hommes d'affaires américains sont peu soucieux du moral de leurs employés. Pourtant, leur moral peut avoir une influence décisive sur les bénéfices des entreprises. Alors que la faiblesse du modèle d'organisation polychrone tien au fait qu'il dépend des capacités des dirigeants à faire face aux imprévus et à toujours maîtriser la situation générale.

    La décision peut donc participer d'un processus plus ou mois formalisé selon les cultures. Selon l'auteur, les cultures polychrones favorisent les contacts personnels et la mise en place de réseaux de décision informels qui s'établissent dans l'ombre et en parallèle des lieux, des étapes et des acteurs officiels de la décision. Au contraire, les organisations monochrones attachent cette importance au travail, aux programmes et procédures.

    1-2. Le support de l'appartenance

    Les supports de l'appartenance sont multiples. Ils peuvent faire référence à la famille mais aussi à l'entreprise, la nation, la communauté de langue, les universités fréquentées ou la corporation professionnelle..... etc. Ces différents supports coexistent dans la plupart des cultures mais leur importance relative, leur caractère élargi ou restreint, leur caractère globalisant ou différencié, leur caractère de reconnaissance diffus ou spécifiques varient d'une culture à l'autre(G.Hofstede,1994).

    Les individus polychrones, par exemple, accordent une grande importance aux relations individuelles et la famille occupe une place centrale dans leur vie. La famille passe avant tout, les amis viennent ensuite. La famille a toujours la priorité quand un problème grave se pose. Au contraire, les cultures monochrone ne donnent pas la même importance à la famille que les cultures polychrones, elles favorisent les appartenances multiples(E.T Hall,1984). Ainsi, en Asie, la référence à la famille élargie domine et même intègre les autres supports de l'appartenance. La culture nord-américaine qui est plus monochrone favorise au contraire la multiplicité des supports selon le contexte des interactions(professionnel, amical, religieux.....etc.).

    La différence entre la culture polychrone et la culture monochrone se manifeste aussi dans le processus de décision. Nous pourrons citer ici Philippe d'Iribarne59(*) qui a montré la différence entre la France et la Suède dans leur manière de prise de décision. Selon l'auteur, les suédois se réunissent pour comprendre, puis ils analysent longuement et finalement les décisions sont prises. Ils mettent aussi par écrit ce qui est décidé, ce que les français n'ont pas l'habitude de faire. Dans une perspective française, le directeur ne doit pas craindre de poser ses décisions alors que le directeur suédois n'a pas à imposer ses décisions. En matière d'innovation, chez les suédois, une fois que la décision est prise, tout le monde y va sans atermoiement(....). Chez les français, le processus de décision pour introduire une innovation(...) peut sans arrêt être remis en cause, rediscuté. Chacun fait un peu ce qu'il veut. Chez eux, on fait un dessin à la main et on propose rapidement des changements. Ce qui est très mal vu chez les suédois.

    2. Deuxième axe de référentiel culturel : Le positionnement des individus les uns par rapport aux autres

    Le deuxième axe de différenciation culturelle concerne la façon dont se positionnent les individus les unes par apport aux autres. Nous avons considéré deux facteurs qui permettent de circonscrire cette dimension.

    2-1. La présomption de confiance ou de méfiance

    Etymologiquement, la confiance c'est une foi partagée. Cette volonté à se fier à un partenaire, d'échanger en qui l'on croit(Moorman, Zaltman, Deshpande,1993)61(*). Plus largement comme le remarque P.Y Gomez (1995) : « la confiance établit un lien entre chacun d'entre nous et notre environnement économique et technique. Pour vivre en société, chaque homme porte sa confiance en un certains nombres de valeurs, de représentations et de système de justification qui situent ses propres calcules et ses propres jugements ». Elle est donc le résultat d'une norme sociale à travers des normes de réciprocité( Gouldner,196062(*)).

    Ainsi, la confiance joue un rôle important sur le processus d'investissement du fait qu'elle est, selon (Williamson,199563(*)), une condition essentielle à l'investissement en capitale spécifique à la firme. Les employés consacrent du temps et des efforts pour se fondre dans l'outil de production afin d'améliorer leur travail et être employés par la firme dans les périodes futures. De même, les fournisseurs extérieurs réalisent des investissements ayant un coût irrécupérable dans la mesure où ils espèrent maintenir leur relation privilégiée avec la firme pendant une période suffisamment longue et ainsi récupérer l'investissement initial.

    La confiance apparaît essentielle à la compréhension des mécanismes de création de valeur mais aussi des réappropriation des rentes. La confiance intra-organisationnelle, parce qu'elle encourage l'investissement en capitale spécifique des salariés, favorise leur dépendance en diminuant leur coût d'opportunité(G.Hirigoyen,1998).

    La présomption de la confiance et de la méfiance par rapport à l'autrui correspond en fait à une variable culturelle posée par N. Adler(1986).Relativement aux précédentes variables, il est claire qu'une appartenance polychrone, et surtout familiale, implique un mode relationnel fondé à priori plus sur la confiance en l'autre. De ce fait, les comportements opportunistes sont, dans une société collectiviste, plus dangereux en ce qu'ils risquent d'être sanctionnés par l'ensemble de la communauté dont l'individu dépend et dont il risque de se faire exclure( l'effet de réputation). Au contraire, une appartenance monochrone implique une plus grande compétitivité entre les individus qui suivent les intérêts d'une communauté particulière ou leurs propres intérêts contre ceux des autres communautés ou des autres individus. Dans ce contexte, l'individu peut plus facilement être tenté d'aborder des comportements compétitifs et opportunistes vis à vis d'autrui.

    G. Hofstede(1994)indique que, Dans une société collectiviste, la relation personnelle l'emporte sur l'affaire à traiter et doit être établie prioritairement ; dans la société individualiste, l'affaire à traiter est sensée l'emporter sur toutes les relations personnelles. L'homme d'affaires occidental naïf qui veut aller vite en besogne dans une culture collectiviste se condamne au rôle de non- initié au groupe et à la discrimination. L'auteur a montré aussi qu'une relation de confiance doit s'établir, dans une culture collectiviste, avant toute transaction commerciale. La confiance domine donc dans une société collectiviste.

    L'opportunisme est sans conteste le modèle comportemental qui domine la finance ; les agents sont guidés par des considérations d'ordre personnel et dotés de capacités de calculs stratégiques incorporant la manipulation de l'information ou la dissimulation des intentions(Williamson, 1975)64(*).

    S. Shane (1994) considère que les dirigeants originaires de sociétés où la confiance interpersonnelle est élevée font davantage confiance à des personnes issues d'autres cultures et devraient donc percevoir des coûts de transaction plus faibles que les managers marqués par une faible confiance interpersonnelle. Ils devraient dès lors préférer des accords de licence à des investissements directs à l'étranger

    2-2. La distance hiérarchique

    Dans les travaux de(Hofstede,1991, 1994),« la distance hiérarchique » désigne la perception du degré d'inégalité du pouvoir entre celui qui détient le pouvoir hiérarchique et celui qui y est soumis. Elle est mesurée par la perception que le subordonné a du pouvoir de son chef. Dans le cadre d'un mode d'appartenance polychrone familiale, la distance hiérarchique est en générale plus importante que dans un mode d'appartenance monochrone dans la mesure où la volonté du groupe domine celle des individus qui existent par apport à lui et qui suivent sa loi.

    Les comparaisons de dimensions comme la distance hiérarchique ne permettent pas seulement de comprendre les différences de modes de pensée, de réaction et de comportement des leaders et des suiveurs selon les pays ; elles permettent aussi d'évaluer les théories conçues ou adoptées dans ces pays pour expliquer ou prescrire les modes de pensée et de comportement(G. Hofstede,1994).

    Dans les cultures à forte distance hiérarchique, le pouvoir est centralisé et le style de direction, autocratique. À l'inverse, dans les sociétés à faible distance hiérarchique, le pouvoir et le processus de décision ont tendance à être décentralisés(U. Mayrhofer,2002).

    M.K. Erramilli (1996) considère que les dirigeants issus de cultures marquées par une forte distance hiérarchique cherchent à contrôler les opérations internationales, tandis que ceux qui sont originaires de sociétés à faible distance hiérarchique sont davantage disposés à partager le contrôle avec des partenaires locaux. Cette hypothèse est reprise par J.F. Hennart et J. Larimo (1998).

    S. Shane (1992, 1994) suppose que la distance hiérarchique reflète le degré de confiance qui caractérise une organisation. Ainsi, dans les sociétés marquées par une forte distance hiérarchique, la confiance interpersonnelle serait plus faible et le besoin de mécanismes de contrôle organisationnel plus important. Par conséquent, les dirigeants de ces pays devraient percevoir des coûts de transaction plus élevés que ceux marqués par une culture où la distance hiérarchique est faible et montrer une préférence pour des investissements directs à l'étranger (comparativement à des accords de licence).

    3. Troisième axe du référentiel culturel : le positionnement des individus par apport aux éléments naturels dont particulier l'incertitude et le temps

    Nous avons considéré d'une part la représentation de ces éléments à travers le contrôle de l'incertitude. D'autre part nous avons étudié plus spécifiquement la représentation du temps et son intégration dans le calcul de la valeur actuelle nette(VAN).

    3-1. la maîtrise des éléments naturels et le contrôle de l'incertitude

    La nature est- elle soumise à l'homme ou se soumet- elle à lui ? Cette problématique a été intégrée dans la modélisation des différences culturelles par N. Adler(1986).

    La représentation du rapport entre l'homme et la nature peut être aussi mise en relation avec la variable du contrôle de l'incertitude développée par G. Hofstede(1991,1994). En effet, cette variable permet d'analyser dans quelle mesure les individus se sentent menacés par les situations ambiguës et tentent alors d'éviter ces situations en recherchant une certaine stabilité professionnelle notamment préférant les règles de fonctionnement formalisées, en rejetant les idées ou les comportements déviants par rapport à la norme acceptée, en acceptant l'existence de vérités absolues et en valorisant l'acquisition d'expertise. Une forte contrôle de l'incertitude est donc plus caractéristique des individus des cultures monochrones qui cherchent à maîtriser leur environnement naturel, que des individus polychrones qui acceptent l'incertitude de futur en se contentant de s'adapter aux situations sans vouloir systématiquement les anticiper.

    G. Hofstede(1994)montre que la religion est un des moyens par lequel l'humanité contrôle l'incertitude. Les croyances religieuses nous aident à accepter des incertitudes contre lesquelles nous ne pouvons nous défendre ;certaines offrent même la certitude suprême d'une vie après la mort65(*).

    Dans les sociétés caractérisées par un faible contrôle de l'incertitude, les individus se sentent relativement en sécurité. Ils n'hésitent pas à prendre des risques et se montrent généralement plus tolérants à l'égard d'opinions et de comportements différents. En revanche, dans les sociétés où le contrôle de l'incertitude est élevé, les individus ne se sentent pas en sécurité et cherchent à éviter les risques(U. Mayrhofer,2002).

    Des auteurs considèrent que la propension d'une culture à contrôler l'incertitude influence l'attitude des dirigeants envers les risques associés aux opérations internationales (K.D. Brouthers et al.,1997 ;M.K. Erramilli,1996 ;J.F. Hennart & J. Larimo,1998 ;B. Kogut & H. Singh,1988 ; B.N. Kumar & L. Studnicka,199766(*) ;P. Pan1996,1997 ; D.K. Tse et al.,1997).

    Dans sa recherche, M.K. Erramilli (1996) estime que dans un contexte de faible contrôle de l'incertitude, les dirigeants se montrent plus tolérants à l'égard d'autres cultures et devraient dès lors accepter plus facilement de partager le pouvoir avec des partenaires locaux. À l'inverse, dans les pays où le contrôle de l'incertitude est important, les dirigeants s'efforceraient de minimaliser les risques associés à l'entrée sur un marché étranger en contrôlant les opérations internationales. Un contrôle majoritaire ou total leur permettrait d'imposer leur style de management et d'éviter des situations d'incertitude où le partenaire étranger détient une position égalitaire voire dominante. Ces arguments sont repris par K.D Brouthers et al. (1997) et J.F. Hennart et J. Larimo (1998).

    B. Kogut et H. Singh (1988) considèrent que le contrôle de l'incertitude influence la perception qu'ont les dirigeants des risques et des coûts organisationnels associés aux modes d'entrée. Ils supposent que les acquisitions génèrent davantage de risque que les joint ventures et les créations ex nihilo de filiales, notamment en raison de la nécessité d'intégrer une nouvelle entité, caractérisée par des pratiques organisationnelles et managériales différentes. Les entreprises originaires de cultures qui cherchent à écarter l'incertitude devraient considérer l'acquisition comme un mode d'entrée moins attrayant et devraient dès lors préférer s'établir au moyen de joint ventures ou de filiales créées ex nihilo.

    B.N. Kumar et L. Studnicka (1997)67(*) présentent que le contrôle de l'incertitude influence l'attitude des dirigeants face aux risques associés au pays d'accueil. Ce facteur expliquerait pourquoi certaines entreprises cherchent à s'associer avec des partenaires locaux pour partager les risques liés à l'environnement politique et économique d'un marché.

    Y. Pan (1996, 1997) et D.K. Tse et al. (1997) considèrent que le contrôle de l'incertitude influence les perceptions qu'ont les investisseurs des risques liés au pays d'accueil. Selon le degré de contrôle de l'incertitude, les entreprises devraient apporter des réponses différentes à des situations de risque (p. ex. : des événements politiques) sur le marché étranger.

    Dans une étude réalisée sur les modes de contrôle de gestion en France et en Grande Bretagne, J. Horovitz(1979)68(*) s'aperçut que les chefs des entreprises français et allemands voulaient être informés dans le moindre détail du fonctionnement de leur affaire. Au contraire, les patrons anglais se contentaient d'un contrôle général, portant plus leur attention sur la stratégie de développement de leur firme. S'occuper du détail est le signe évident de l'activité d'un chef d'entreprise qui appartient à un pays à indice de contrôle de l'incertitude élevé.

    3-2. La représentation du temps et son intégration dans les calculs de la valeur de l'investissement

    Le temps est un élément culturel, un des systèmes fondamentaux de toute culture. Et la culture joue un rôle si important pour la compréhension du temps comme système culturel qu'il est pratiquement impossible de le séparer des différents niveaux de cultures dans lesquels il s'inscrit (E. T. Hall,1984). Chaque culture a ses propres cadres temporels à l'intérieur desquels fonctionnent des modèles qui lui sont particuliers :ce qui constitue un facteur de communication des rapports interculturels. Ainsi pour pouvoir effectivement communiquer à l'étranger, il est aussi nécessaire de connaître le langage du temps que le langage parlé du pays où on se trouve. L'auteur considère aussi qu'un système temporel est totalement dépendant, non seulement de la manière dont une culture se développe, mais aussi de celle dont les membres de cette culture perçoivent leur environnement.

    Certaines cultures, notamment occidentales considèrent que le temps peut être transformé en une variable externe, formalisée, calculée, prévisible et instrumentalisée. En occident, peu de choses échappent à la « main fer » de l'organisation. Au contraire, dans une culture polychrone, le temps, l'au- delà, dieu et leur monde quotidien forment un ensemble indissociable dont ils ne peuvent extraire les parties afin d'instrumentaliser ou les maîtriser. Dans cette culture, rien n'est solide ou ferme, en particulier les projets que l'on établit pour le futur ; même des projets importants peuvent être modifiés jusqu'à la minute de leur exécution(E. T. Hall,1984).

    Ainsi, Le temps est un facteur déterminant dans le processus décisionnel, les délais d'action et de réaction sont parfois longs ; agir trop tard, c'est perdre, mais agir trop tôt, c'est aussi échouer (P. Aurégan 1998). Le processus de planification est fortement lié à la perception du temps du dirigeant et notamment à sa vision du futur et la détermination de l'horizon de ce processus par le manager est primordiale pour maîtriser la diversité des perspectives temporelles de l'entreprise. Or, les dirigeants n'ont pas la même capacité à se projeter et à imaginer le temps. Cette attitude, variable selon les sujets, a des répercussions en termes de perceptions et de comportements. Le profil temporel du dirigeant influence ainsi énormément son type de réflexion stratégique.

    Enfin, les cultures monochrones intègrent la valeur du temps dans le calcule de la valeur d'un investissement à moyen ou à long terme notamment avec les calcules de la valeur actuelle nette(VAN). Au contraire, les cultures polychrones n'intègrent pas systématiquement le temps dans leurs calcules(L'hermitte,1999). Les hommes d'affaires chinois de Jakarta ont par exemple souvent recours à des prêts auprès des membres de leur communauté sans toujours prendre en compte la dépréciation du capital en fonction du temps.

    4. Quatrième axe de référentiel culturel : les objectifs économiques des individus 

    Le quatrième axe du référentiel culturel concerne l'orientation des individus dans la définition de leurs objectifs économiques.

    4-1. Le rapport à l'argent : L'équilibre des dimensions matérielles, spirituelles et intellectuelles

    K. Marx(1968) avait déjà montré que l'argent ne servait pas uniquement de moyens d'échange mais qu'il était le mode de puissance dans le monde capitaliste marchand. G. Simmel(1900) ne méconnaît pas les effets aliénants de l'argent, surtout lorsqu'il contribue à « l'évaluation monétaire des valeurs personnelles », mais il montre que l'argent peut aussi libérer les individus, parce qu'il transforme par sa médiation des relations d'obligations personnelles et matérielles en relations impersonnelles et immatérielles. L'argent comme outil d'échange économique fondamental représente une valeur non seulement fonctionnelle mais aussi culturelle, qui s'est forgé au cours de l'histoire de la communauté considérée. Il est clair dans une société agraire et féodale, la représentation de l'argent ne peut être la même que dans une société capitaliste. En outre, certaines cultures considèrent l'argent non pas seulement comme un instrument d'échange mais une valeur positive de prospérité de bonheur et de réussite sociale voir de sécurisation de futur.

    Selon Max Weber, l'un des effets du développement de l'économie capitaliste est de rationaliser et d'uniformiser le rapport des agents aux objets de l'activité économique. Il montre que l'éthique économique des agents reste diversifiée et différenciée et qu'elle est loin de se fondre avec la seule éthique économique utilitariste de la communauté de marché69(*). En effet, les attitudes à l'égard de l'argent, objet central de l'activité économique, ne se différencient pas seulement en fonction des seules contraintes de position (et parmi celles-ci la contrainte budgétaire), mais au contraire elles se différencient en fonction des dispositions, du passé incorporé des agents. Parmi ces dispositions, le poids de la religion, sans doute moindre que lors des débuts du capitalisme, est loin d'être nul et il renforce avec ses effets propres ceux dus à l'appartenance de classe.

    Ainsi, dans certaines cultures, l'argent représente une valeur concrète, visible, palpable et sécurisante. C'est le cas des chinois qui dans les affaires valorisent avant tout la trésorerie, l'or et toutes les formes concrètes et liquides de la richesse. Selon les résultats de l'enquête réalisée par L'hermitte (1999) auprès de dirigeants et cadres d'entreprises en Joint Venture internationales implantées en Indonésie, nous avons trouvé que les critères de décisions d'investissement pour les chinois indonésiens concernaient plus le temps de retour sur l'investissement que le critère plus théorique de la valeur actuelle nette. Cette représentation concrète de la richesse et de l'investissement participe alors d'une part d'une volonté de sécurisation( dans un climat d'insécurité politique les chinois veulent pouvoir rapatrier rapidement leur avoirs) et d'autre part de celle d'afficher un certain statut social qui s'exprime à travers la richesse matérielle des individus.

    Réciproquement d'autres cultures, ont une représentation plus théorique et volontairement désincarnée de l'argent, culturellement plus acceptable. Dans cette perspective, parmi les critères financiers d'investissement par exemple, les outils financiers mathématiques tels que le calcul de la valeur actuelle nette(VAN) ou du taux de rentabilité interne(TRI) sont préférés à des approches plus intuitives et donc plus personnelles (L'hermitte,1999). Ce dernier a constaté dans son étude de cas sur un projet d'investissement franco- indonésien, la différence d'attitude des partenaires locaux et étrangers relativement à ces critères, les premiers considérant d'abord les flux de trésorerie tandis que les seconds s'évertuaient à maximiser le taux de rentabilité interne au moyen de multiples versions du plan d'affaires. L'argent, comme le temps, est alors traité comme une variable externe, dépersonnalisée.

    4-2. La création ou la distribution de richesse

    Certaines cultures valorisent plus la création de richesse par l'industrie et l'innovation tandis que d'autres valorisent plus l'échange et la distribution des richesses par les activités commerciales. Cette différence d'orientation est certes influencée par des déterminants parmi lesquels, on trouve les facteurs culturels. Ainsi parmi ces facteurs culturels susceptibles de déterminer les rapports avec l'activité économique, Max Weber(1996) a isolé le facteur religieux et a établi une interrelation entre les modes d'acquisition des biens de salut et les modes d'acquisition des biens sur terre. De ce fait, l'orientation économique ne dépend pas uniquement des conditions objectives et présentes d'acquisition des biens mais aussi des formes de socialisation culturelles passées. En ces termes, M. Offenbacher(1901)70(*)a cru pouvoir formuler l'opposition qui apparaît entre deux confessions(le catholique et protestante) dans leur relation avec la vie économique : « le catholique est [...] plus tranquille, possédé d'une moindre soif de profit ; il préfère une vie de sécurité, fût- ce avec un assez petit revenu, à une vie de risque et d'excitation, celle- ci dût- elle lui apporter richesses et honneurs. La sagesse populaire dit plaisamment : soit bien manger, soit bien dormir. Dans le cas présent, le protestant préfère bien manger ; tandis que le catholique veut dormir tranquille ». Max Weber avait montré, dans L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme, que le protestantisme calviniste en favorisant une conduite de vie rationnelle était la doctrine.

    Comme Marx l'avait déjà remarqué « la religion est la théorie générale de ce monde, son compendium encyclopédique, sa logique sous une forme populaire, son point d'honneur spiritualiste, son enthousiasme, sa sanction morale, son complément cérémoniel, son universel motif de consolation et de justification ».

    L'hermitte(1999) a constaté dans ses enquêtes sur les entreprises en Joint Venture internationales implantées en Indonésie que les européens fondent plutôt le développent de leur entreprise sur un savoir faire technique concret et sur une certaine capacité d'innovation productive. Au contraire, les hommes d'affaires indonésiens et sino- indonésiens, conçoivent le développement de leurs affaires de façon plus polychrone en cherchant d'abord à développer leur réseau d'affaire par de multiple prise de participation dans différentes entreprises, sans souvent s'investir dans les fonctions de production.

    4-3. L'obtention d'un capital relationnel ou d'une rémunération individuelle lors d'une transaction

    Le troisième variable culturelle concernant la définition des orientations économiques des individus concerne la primauté qu'ils donnent à l'obtention d'un capital relationnel ou à celle d'une rémunération individuelle. Cette dernière variable doit être mise en relation avec la préférence pour la création ou la distribution de richesses.

    Cette variable peut aussi être mise en relation avec l'orientation féminine ou masculine développée par G. Hofstede(1980). En effet, celui- ci distingue les cultures selon qu'elles valorisent l'acquisition d'argent ou l'objet matériel ou au contraire entre les relations entre les individus ainsi que la qualité de la vie. Dans le premier cas, le matérialisme est alors selon lui, plus caractéristiques des cultures dites masculines tandis que dans le second cas, l'importance de la qualité de la relation caractérise les cultures dites féminines. Il montre en outre que selon cette définition, la répartition des rôles entre hommes et femmes est plus rigide dans les cultures masculines.

    Selon G. Hofstede(1994), une des devises des pays masculins pourrait être ''vivre pour travailler'' alors que les cultures féminines préféreraient l'expression ''travailler pour vivre''. Ainsi, dans une société féminine, les valeurs dominantes sont l'attention aux autres et la continuité, les managers font appel à l'intuition et recherchent le consensus alors que dans une société masculine, les valeurs dominantes est le succès matériel par le progrès, les managers doivent faire preuve d'assurance et savoir trancher.

    De ce fait, on trouve, dans une culture monochrone, la volonté des individus de s'engager dans un rapport contractuel compétitif avec les autres individus en vue de maximiser leur intérêt personnel ou au contraire, dans une culture polychrone, la volonté de maximiser un intérêt collectif à travers la recherche d'un compromis et d'une harmonie relationnelle(E. T. Hall,1984).

    En résumé, la confiance(méfiance), la distance hiérarchique, la notion du temps, la gestion de l'incertitude et le rapport à l'argent(création et distribution des richesses, capital relationnel ou rémunération, équilibre matérielle ou spirituelle) sont des variables culturelles. Leur importance varie d'un pays à l'autre. Ils peuvent aussi être en interaction, un variable peut influencer l'autre, comme le montre, par exemple, G. Hofstede (1987,p.14-15) « Toutes les sociétés humaines ont leur religion, d'une manière ou d'une autre. En quelque sorte, toutes les religions rendent l'incertitude tolérable car elles conditionnent toutes un message qui dépasse l'incertitude.... ».

    L'importance de ces variables exige leur integration dans le choix d'investissement et en particulier dans le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers. Cette intégration pourrait permettre aux partenaires ayant des cultures différentes de prendre la bonne décision, tout refusant la mauvaise.

    Conclusion générale et perspective de recherche

    Notre revue de la littérature présentée dans ce travail met en lumière l'importance des facteurs culturels dans le processus du choix d'investissement. Elle révèle que l'esprit humain est culturellement limité. A cet égard, la culture de l'entreprise peut alors se concevoir comme un ensemble de « frontières à la rationalité »prises comme des données dans les calculs rationnels. Ces frontières à la rationalité qui peuvent concerner aussi bien la manière de percevoir des phénomènes que les façons de réagir à des situations et interviennent sur chacun des trois composants de tout processus de décision, préstructurent plutôt que déterminent les choix, dans la mesure où plusieurs solutions sont toujours possibles. Elles résultent du processus d'apprentissage et, par là même, participent à l'adaptation à long terme de l'entreprise, notamment en grandissant la stabilité de ses structures.

    Le dirigeant en tant que décideur occupe une place centrale dans le processus de décision. Son rôle ne se limite pas à l'application des critères mathématiques de la décision d'investissement. Il est influencé par son contexte social, sa formation initiale, ses expériences, son histoire.....etc. De ce fait, son schéma mental ne converge pas nécessairement avec l'idéologie dominante de son contexte social sur tous les points. Cette divergence entre les schémas mentaux du dirigeant et les schémas mentaux partagés pourrait donc s'expliquer par des facteurs culturels.

    En utilisant les connaissances, les croyances et les convictions en stratégie, le dirigeant poursuit une intuition stratégique et, donc, de faire étudier un nombre très limité de types de projets d'investissement. Ce qui conduit, par conséquent, à préférer des projets d'investissement, conformes à la stratégie et à l'intuition du dirigeant, à d'autres projets qui ne sont pas dans le cadre de sa stratégie et son intuition. Même si ces autres projets sont moins risqués et plus rentables.

    Par ailleurs, à travers ce travail, le dirigeant peut être optimiste relativement aux chances du succès de ses investissements. Cette hypothèse du biais cognitif constitue une alternative aux hypothèses d'enracinement des dirigeants pour expliquer l'adoption de projets d'investissement non rentables.

    De même, l'homogénéité culturelle de l'équipe de décision qui entoure le dirigeant peut entraîner un mauvais choix d'investissement. Cette homogénéité limite la recherche d'information, elle peut aussi masquer les problèmes posés et aboutir à des solutions peu productives. Les acteurs se conforment, dans ce cas, à la norme sans réelle évaluation des alternatives des choix. Ceci peut expliquer les résultats décevants des fusions- acquisitions. Mais, on a trouvé par contre que la distance culturelle qui sépare les partenaires est considérée comme source d'asymétrie d'information, de sélection adverse et des comportements opportunistes.

    On peut donc noter que le processus d'investissement ne se résume pas au choix du projet optimal (maximisant la richesse des actionnaires) parmi un ensemble d'investissements dont les flux sont donnés, représentation retenue dans les exercices destinés aux étudiants en finance. Il s'agit, dans une perspective explicative, de comprendre comment un projet complexe, aux contours imprécis et aux retombées incertaines, a pu émerger et être mis en oeuvre en fonction des stratégies de différentes parties prenantes aux objectifs différents.

    Les dimensions du choix ne se réduisent plus aux flux et à leur distribution de probabilité, elles ne sont pas indépendantes des personnes même des décideurs et leurs stratégies. De ce fait, le choix d'investissement ne se fait plus alors selon la seule dimension des flux monétaires actualisés, malgré leurs apports considérables, mais également à partir d'autres arguments liés au prestige et à la personnalité du dirigeant.

    Au niveau de la culture nationale, on a vu que le modèle mental du dirigeant présente une barrière aux investissements internationaux. Ce biais est dû au manque d'informations que possèdent les dirigeants sur les traditions, les coutumes, les lois et les spécificités des systèmes de gouvernement des entreprises nationales.

    La logique d'investissement des entreprises nationales dérive des modèles de gouvernement nationaux. Ces derniers dont la nature du contrôle et la nature du financement externe représentent des caractéristiques importantes et varient d'une culture à l'autre. Cette variation a des racines socioculturelles. Ces modèles sont dépendants des traditions nationales en terme de contrôle des dirigeants. La culture est donc un facteur d'inertie d'évolution des systèmes de gouvernement des entreprises nationales.

    Enfin, notre revue de littérature révèle que la culture nationale du pays d'origine influence le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers. Ce résultat vient appuyer les recherches qui montrent que la culture nationale détermine le comportement stratégique des acteurs(Schneider, Barsoux, 1997 ; Schneider, de Meyer, 1991 ; Tayeb, 2001)71(*).

    L'examen approfondi des études retenues révèle les difficultés rencontrées par les chercheurs pour appréhender la culture nationale. L'analyse effectuée indique que certaines dimensions sont plus pertinentes pour ce champ de recherche que d'autres. Ainsi, les études centrées sur la dimension « distance hiérarchique » montrent qu'une forte distance hiérarchique accroît généralement la probabilité qu'on choisisse un contrôle majoritaire ou totale des opérations internationales. En revanche, l'influence de la variable « contrôle de l'incertitude » semble ambiguë.

    Cette analyse montre aussi que la confiance domine dans les sociétés polychrones. Les dirigeants de sociétés où la confiance interpersonnelle est élevée font davantage confiance à des personnes issues d'autres cultures et devraient donc percevoir des coûts de transaction plus faibles que les managers marqués par une faible confiance interpersonnelle. Ils devraient dès lors préférer des accords de licence à des investissements directs à l'étranger. En revanche, le temps comme variable culturelle peut être intégré, pour certaines cultures (monochrones), dans le calcul de la valeur d'un investissement (VAN). Au contraire les cultures polychrones n'intègrent pas systématiquement le temps dans leurs calculs. Malgré l'importance de cette variable, on trouve un nombre limité de recherches qui lui sont consacrées.

    La dernière variable culturelle est, dans notre travail présent, le rapport à l'argent. Comme on l'a vu, l'argent a, dans certaines cultures, une représentation concrète, les critères de décision d'investissement peuvent concerner plus le temps de retour sur l'investissement que le critère plus théorique de la valeur actuelle nette (VAN). Au contraire, dans d'autres cultures, l'argent a une représentation plus théorique, les critères financiers d'investissement(VAN, TRI) y sont préférés. Cette variable mérite aussi des recherches futures reflétant son importance dans la décision d'investissement.

    Les variables utilisées doivent dès lors être choisies avec prudence. Il apparaît effectivement plus judicieux de considérer plusieurs facteurs que de s'appuyer sur un seul facteur.

    Cette revue de la littérature pourrait contribuer à une compréhension de l'influence des facteurs culturels sur le choix d'investissement. Si, on admet que seule une accumulation des résultats permet de détecter des tendances fiables dans le domaine des sciences de gestion, ce champ de recherche demeure encore peu exploré.

    De nouvelles études empiriques sont nécessaires afin qu'on puisse valider les relations constatées et préciser l'influence des différentes variables culturelles sur le choix d'investissement. Par ailleurs, il conviendrait d'intégrer la culture nationale dans les modèles explicatifs du choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers.

    Dans cette perspective, il serait intéressant d'évaluer plus précisément l'importance relative du facteur culturel. Il serait aussi tentant de déterminer dans quelle mesure la culture nationale du pays d'origine influence la perception qu'ont des dirigeants d'autres facteurs explicatifs de cette décision, comme des variables de localisation.

    Le choix d'étudier la création d'une entreprise en Joint Venture International pourrait nous aider à préciser l'importance relative des facteurs culturels dans le processus d'investissement. Cette entreprise est presque souvent considérée comme une réponse à la distance culturelle entre des partenaires de nationalités différentes (un mode d'entrée sur des contextes culturellement différents). Les entreprises en Joint Venture Internationales permettent aux partenaires de partager les informations, les ressources et de réduire les risques. Mais, elles créent des problèmes lorsque les partenaires peuvent avoir des cultures, des valeurs et des buts différents.

    F. Simiar (1983)72(*) a montré, dans son article « Major Causes of Joint Venture Failures in The Middle East : the Case of Iran », les difficultés liées à l'implantation et au fonctionnement de cette forme de partenariat avec les entreprises du Moyen- Orient. Selon lui, dans les pays arabes, ces difficultés ont pour origine des phénomènes interculturels.

    Notre voie de recherche peut donc se focaliser, comme un moyen pour atteindre notre objectif de recherche, sur la création d'une entreprise en Joint Venture entre un partenaire français et un partenaire syrien. Deux cultures (française et syrienne) dont le rapport pose beaucoup de questions ? 

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    Table des matières

    Introduction générale....................................................................................7

    1. Présentation et originalité du sujet....................................................................7

    2. L'intérêt théorique du sujet...........................................................................10

    3. L'intérêt pratique du sujet............................................................................10

    4.La problématique.......................................................................................11

    5.L'objectif poursuivi....................................................................................12

    Partie(1) : L'évolution de la culture à travers les théories économiques et organisationnelles......................................................................14

    Chapitre I. La place du facteur culturel dans les théories économiques et organisationnelles.. .....................................................................................15

    Section I. L'absence de la culture dans la théorie économique classique....................15

    1. Les hypothèses de la théorie économique classique.............................................15

    2. La firme point technico- économique : conceptions mécanistes de Taylor à Fayol..........17

    3. Inefficience de la notion de culture dans cette perspective.......................................20

    Section II. La remise en cause processive des hypothèses de la théorie standard et ses conséquences sur la théorie des organisations.....................................................22

    1. L'Ecole des Relations humaines et la contingence culturelle..................................22

    2. L'approche béhavioriste de l'organisation et la culture.........................................25

    3. Les approches contingentes de l'organisation et la culture.....................................29

    4. L'approche systémique et la culture...............................................................32

    Chapitre II. La notion de culture et les approches institutionnalistes.......................34

    Section I. Le facteur culturel dans l'ancien- institutionnalisme...............................34

    1. L'approche de Veblen...............................................................................36

    2. L'approche de Commons...........................................................................38

    3. L'approche de Mitchell..............................................................................41

    Section II. Le facteur culturel dans la perspective de la Nouvelle Economie Institutionnaliste.........................................................................................43

    1. La théorie des coûts d'agence et référent culturel................................................43

    1-1. La problématique et les coûts d'agence.............................................43

    1-2. L'impact de la culture sur les coûts d'agence......................................47

    2. La théorie des coûts de transaction et le référent culturel.......................................49

    2-1. Les hypothèses qui fondent l'émergence de coûts de transaction................49

    2-2. 2-2. Impact de la culture sur les coûts de transaction et le choix des structures de gouvernance..........................................................................54

    Partie(2) :Les facteurs culturels comme un filtre des choix d'investissements........................................................................58

    Chapitre I. La rationalité culturellement limitée et la décision d'investissement..........59

    Section I. Les principales caractéristiques du concept de culture d'entreprise............59

    1. Le concept de culture d'entreprise..................................................................60

    2. De la culture de l'entreprise à la culture dans l'entreprise.......................................64

    3. La culture et les conditions de l'efficacité de l'entreprise.......................................65

    Section II. La formulation des relations entre la rationalité et la culture...................67

    1. La « rationalité limitée » et les « frontières à la rationalité »....................................67

    2. L'apprentissage et l'adaptation à long terme......................................................69

    3.La culture et la possibilité de prendre la décision d'investissement.............................71

    A. La prise de décision sur la base d'une représentation subjective de la réalité............71

    B. Le biais cognitif comme alternative aux hypothèses d'enracinement du dirigeant.....74

    Chapitre II. L'influence de la culture nationale des entreprises sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers..................................................................78

    Section 1. La culture comme facteur d'inertie de l'évolution des systèmes des gouvernements des entreprises(( étude comparative))..........................................79

    1. Le modèle japonais.................................................................................82 

    2. L e modèle allemand.................................................................................84

    3. L e modèle anglo- américain........................................................................87

    4. Le modèle français...................................................................................88

    Section II. Les éléments de la différenciation culturelle des pays et leur impact sur le choix du mode d'entrée sur les marchés étrangers...............................................90

    1. le mode d'intensification et d'appartenance des individus.......................................90

    1-1. Appartenance monochrone ou polychrone.............................................90

    1-2. Le support de l'appartenance............................................................91

    2. Le positionnement des individus les uns par rapport aux autres................................92

    2-1. La présomption de confiance ou de méfiance..........................................92

    2-2. La distance hiérarchique..................................................................94

    3. le positionnement des individus par apport aux éléments naturels dont particulier le temps et la religion ..............................................................................................95

    3-1. la maîtrise des éléments naturels et le contrôle de l'incertitude.....................95

    3-2. L'intégration du temps dans les calculs de la valeur de l'investissement...........97

    4. les objectifs économiques des individus...........................................................98 

    4-1. Le rapport à l'argent (les dimensions matérielles, spirituelles et intellectuelles)....................................................................................98

    4-2. La création ou la distribution de richesse.............................................100

    4-3.L'obtention d'un capital relationnel ou d'une rémunération........................101

    Conclusion générale et perspective de recherche................................................103
    Bibliographie...........................................................................................107
    Table des matières....................................................................................117

    * 1 Idem, p.107

    * 2 Cité par G. Charreaux, 2001, « Images de l'investissement »,p. 22

    * 3 Et comme l'a dit aussi Jensen dans le discours qu'il a prononcé en 1993, peu d'études ont été réalisées par les chercheurs en finance sur la façon dont sont effectivement prises les décisions d'investissement dans les pratiques des organisations.

    * 4 Sabel(1994) prétend ainsi la politique des coûts- cibles, qui a parmi pendant une certaine période de gérer des gains de productivité et d'expliquer la supériorité des firmes japonaises, se révélerait, dans l'environnement actuel, source d'inefficacité.

    * 5 Usunier et Roger (1999), à partir de la démarche que La Porta et ali.(1997c), contestent cependant le lien le niveau de la confiance et la performance lorsque la comparaison est limitée à la France et à l'Allemagne. Charreaux(1998) présente une vue plus nuancée de la confiance dans le système de gouvernance, faisant intervenir également les coûts de la confiance.

    * 6 A. Smith(1776), «Recherche sur la nature et les causes de la richesses des nations »version française(1976), p.256

    * 7 L. Walras, 1874, « Eléments d'économie politique pure »,LGDJ, Paris, 1976

    * 8 Coriat B et Weinstein O(1995), p.5

    * 9 Idem, p.12

    * 10 Cité par J. Rojot, « Théories des organisations », in Encyclopédie de gestion,1997, Economica

    * 11 F. Taylor, 1911, « La direction scientifique des entreprises »,Dunod, Paris, 1957

    * 12 B. De Montmorillon et J. P. Pitol- Belin(1995),p.135

    * 13 Idem

    * 14 Cité par U. Mayrhofer et F. Roth(1999)

    * 15 Cité par J. Rojot, Op-cit

    * 16 Cité par J.M. Plane,2003,«Théories des organisations », DUNOD, Paris 

    * 17 Cité par J. Rojot, 1997, Op-cit

    * 18 Idem

    * 19 Cité par J.M. Plane,2003,Op-cit

    * 20 Idem

    * 21 B. De Montmorillon et J. P. Pitol- Belin(1995),p.145

    * 22 Cité par M. Nussenbaum, la décision d'investissement dans l'entreprise, 1978

    * 23 Idem

    * 24 Cité par J. Rojot, 1997, Op-cit

    * 1. 25 Cité par J. Rojot, théorie des organisations, in Encyclopédie de gestion, sous la direction de Yves Simon, Patrick Joffre, 1997, Economica

    * 26 Fons Trompenaars(1985)

    * 27 W.H. Hamilton, 1932, p. 84

    * 28 Idem 

    * 29 G. Hirigoyen et J.P. Pichard- Stamford, 2003,p.4

    * 30 Les stakeholders ou parties prenantes d'une organisation se définissent comme les personnes dont le bien être est effectué par les actions et décisions de l'organisation. 

    * 31 Cité par G. Hirigoyen et J.P. Pichard- Stamford, 2003,p.3

    * 32 Williamson O. E(1994, édition française), p 48

    * 33 Idem, p39

    * 34 Idem, p 41

    * 35 Cité par M. Omar., D. Boyd., 2003, « Economic Development and Culture Differences in the determination of the Degree ofInvolvement of Firms in Overseas Markets », p.5

    * 36 Cité par Schramm- Nielsen.,2000, « Dimensions culturelles des prises de décision », Revue Française de Gestion, mars- avril- mai

    * 37 Cité par E. Delavallée,1995, « Culture d'entreprise :la contribution de Herbert Simon », cahier de recherche

    * 38 Idem

    * 39 Pour Jaques «la culture de l'entreprise, c'est son mode de pensée et d'action habituel et traditionnel,

    plus ou moins partagé par tous ses membres, qui doit être appris et accepté, au moins en partie, par les nouveaux

    membres».

    * 40 Certains de ces débats sont directement issus de l'anthropologie. D'autres résultent des différences entre

    l'anthropologie et les sciences de gestion, aussi bien au niveau des spécificités de l'objet étudié, les sociétés en

    général dans un cas, les organisations dans l'autre, qu'au niveau des objectifs poursuivis par les deux disciplines.

    * 41 Pour une présentation de ces travaux, on peut consulter M. Bosche (1984)

    * 42 Cité par E. Delavallée,1995 op- cit.

    * 43 Pour M. Weber,«agit de façon rationnelle en finalité celui qui oriente son activité d'après les fins, moyens

    et conséquences subsidiaires (Nebenfolge) et qui confronte en même temps rationnellement les moyens et la fin, la fin et les conséquences subsidiaires et enfin les diverses fins possibles». La définition de la «rationalité en finalité» correspond, pour beaucoup, à la rationalité économique telle que définie par les économistes néo-classiques.

    En revanche, «agit d'une manière purement rationnelle en valeur celui qui agit sans tenir compte des conséquences prévisibles de ses actes, au service qu'il est de sa conviction portant sur ce qui lui apparaît comme commandé par le devoir, la dignité, la beauté, les directives religieuses, la piété ou la grandeur d'une «cause» qu'elle qu'en soit la nature. L'activité rationnelle en valeur consiste toujours (au sens de notre terminologie) en une activité conforme à des «impératifs» ou à des «exigences» dont l'agent croit qu'ils lui sont imposés»

    * 44 Cité par G. Charreaux, 2001, « Image de l'investissement », édition Vuibert, pp. 24

    * 45 Un schéma mental est une représentation du statut des différents partenaires dans la processus de création de valeur, ainsi que de la rémunération appropriée de leur contribution(P. Wirtz ,2002),pp.79

    * 46 cité par A. Gratacap (1997)

    * 47 cité par G.Charreaux,2001,op-cit

    * 48 Cité par M. Barabel et O. Meier., 2002

    * 49 Idem

    * 50 Cité par A. Gratacap,1997,op-cit

    * 51 Charreaux G., 1997, « Gouvernement de l'entreprise »,Encyclopédie de gestion, 2ème édition, p.1652- 1662

    * 52 Idem

    * 53 Wirtz P., 2002,« Politique de financement et gouvernement d'entreprise »

    * 54 Idem

    * 55 Cité par Wirtz P., 2002, op-cit

    * 56Cité par Mayrhofer U et Roth F.,1999, « Gestion de l'incertitude et influence de la diversification et de la nationalité sur les formes de rapprochement : une comparaison Allemagne, France et Royaume-Uni », Finance Contrôle Stratégie - Volume 2, N° 4, décembre 1999, p. 135 - 156.

    * 57 Cité par Mayrhofer U et Roth F.,1999, op-ci

    * 58 Idem

    * 59 60 d'Iribarne Ph., 1998, « Comment s'accorder, une rencontre franco- suédois », in d'Iribarne Ph et ali. « Cultures et mondialisation »'Edition du SEUIL

    * 61 Hirigoyen G (1998)

    * 62 Idem

    * 63 Idem

    * 64 Idem

    * 65 Les pays orthodoxes et catholiques romaines ont un indice de contrôle de l'incertitude élevé(à l'exception des Philippines et de l'Irlande). Les pays juifs et musulmans ont des indices moyens, et les pays protestants un indice faible. Les religions orientales correspondent, exception faite au Japon, un indice allant de moyen à faible.

    * 66 Cité par Mayrhofer(2002)

    * 67 Idem

    * 68 Cité par D. Bollinger et G. Hofstede, 1992 , « Les différences culturelles dans le management »,pp.121

    * 69 Weber M., 1971, « Economie et société », pp. 400

    * 70 Cité par Weber M., 1964, « L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme »,PP.36

    * 71 Cité par U. Mayhofer,2002,op-ci

    * 72 Cité par G. Naulleau,1990, « Joint- Ventures franco- égyptiennes :confrontations des représentations de l'entreprise»,in F. Gauthy et D. Xardel, « Management interculturel : Mythes et réalités », p.14- 15






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