CONCLUSION GÉNÉRALE
Cette thèse a consisté à
déterminer à travers ses différentes incidences, la
contribution de l'activité aurifère au développement dans
la sous-préfecture de Hiré. Son but était de contribuer
à l'apport de connaissances géographiques sur l'activité
minière en général, ainsi que sur les incidences
spatiales, démographiques, socio-économiques et environnementales
de l'exploitation minière de type aurifère qui se déroule
à Hiré et sa capacité à y impulser le
développement. L'enjeu de cette thèse s'inscrit dans la
particularité du contexte de l'exploitation aurifère dans la
sous-préfecture de Hiré, car elle intervient dans une importante
zone de production agricole où l'importance à la fois culturelle,
sociale et économique de la terre lui accorde un caractère
sacré.
Il s'est agi pour nous de voir si l'exploitation
minière à travers ses différentes incidences permet
à la sous-préfecture de Hiré de connaître un
développement local ou si, au contraire, cette nouvelle activité
implique une fragilisation des acquis, une aggravation des problèmes du
système de production agricole et une dégradation du tissu social
local. Cette conclusion revient sur les différents apports de la
thèse, par rapport aux trois questions spécifiques
déclinant le questionnement général qui vient d'être
rappelé.
Quelle est la reconfiguration spatiale induite par
l'activité minière dans la sous-préfecture de Hiré?
L'ouverture de l'exploitation aurifère dans la sous-préfecture de
Hiré a entrainé un réaménagement dans son
organisation spatiale. Bien que sous forme artisanale l'activité ne soit
pas nouvelle à Hiré, elle connaît depuis l'ouverture de
l'exploitation industrielle, une nouvelle dynamique. Cela se traduit par une
prolifération des sites d'orpaillage dispersés à travers
la sous-préfecture. En effet, la délivrance des permis miniers et
la distribution spatiale de ceux-ci, couplés aux sites d'orpaillage
à profusion, on est face à un premier niveau de changement
spatial. Le deuxième niveau de changement est que ces sites
d'exploitation aurifère se substituent à des activités
préexistantes qui pour la plupart sont des activités agricoles.
Aussi, le relief a-t-il été modifié du fait de l'exercice
même de cette activité aurifère. Par les pratiques de
creusage et d'entreposage, de nouvelles formes de relief apparaissent
composées de cuvettes et de collines artificielles. Il y a
également la délocalisation de trois campements autour de la mine
sur de nouveaux sites entièrement construits par la compagnie
minière. Cette relocalisation a également entrainé une
reconfiguration spatiale avec transformation du type d'habitat.
285
Quels sont les différents changements introduits par
l'exploitation de l'or en rapport avec le cadre de vie à Hiré
?
Dans la sous-préfecture de Hiré,
l'activité aurifère est un facteur de croissance
démographique née de l'attractivité qu'elle
entraîne. Les mouvements migratoires orientés majoritairement vers
la ville de Hiré contribuent à agrandir le marché de
consommation local. On assiste à une multiplication de logements
modernes avec extension de la ville. L'activité minière entraine
en outre, l'essor des activités commerciales et la diversité des
services dans la sous-préfecture. Elle favorise l'émergence d'une
nouvelle élite sociale et contribue, à défaut d'employer
toute la jeunesse en quête d'emploi, au développement humain
à travers le financement des projets et des formations qualifiantes. De
ce point de vue, le projet minier doit être perçu comme un
catalyseur de croissance des activités économiques dans les
localités hôtes.
Quels sont les mécanismes de régulation des
rapports entre l'entreprise minière et les communautés locales
dans l'exploitation aurifère ?
L'étude des mécanismes de régulation des
rapports entre l'entreprise minière et les communautés locales
dans l'exploitation aurifère à Hiré revient à
montrer la nature des rapports qui se développent entre les acteurs de
l'activité aurifère et les communautés locales. D'une
part, elle contribue à l'aggravation de la fragilisation des
systèmes agricoles. Car, dans un contexte où la population
essentiellement agricole, connaît une baisse de ressource due
principalement au vieillissement du verger, l'activité minière se
présente comme une opportunité. Les jeunes se détournent
de l'agriculture dans l'espoir de trouver des emplois, qui offrent la garantie
de gains financiers plus rapides et plus importants. Ce
désintérêt pour l'agriculture se traduit par l'augmentation
des cas d'abandon du travail de la terre. Les activités minières
exercent également une influence négative sur l'agriculture
à l'échelle locale, à travers la
récupération d'une partie des terres des paysans, comme l'exigent
les besoins des opérations minières. Cela contribue à
réduire les superficies cultivées. La pollution concourt aussi
à cette diminution des quantités de production tout en
influençant les différentes composantes de l'environnement que
sont l'air, l'eau et le sol qui sont essentielles pour l'activité. A
travers la pression foncière qu'elle contribue à accentuer,
l'exploitation minière ravive les conflits fonciers préexistants
et en crée d'autres. Ces conflits sont de tous ordres. Au sein de la
communauté on assiste à des conflits intra familiaux, inter
villages et intercommunautaires. Outre ces conflits, il y a ceux qui opposent
les populations à la compagnie minière. Ce sont des conflits qui
portent généralement sur le dédommagement. Ces conflits
ont donné naissance à
286
des groupes qui s'apparentent à des syndicats et qui
prennent position en faveur des populations. Ces conflits vont jusqu'à
entrainer des procédures judiciaires. Cependant, des mécanismes
de règlement de ces conflits ont été mis en place pour une
meilleure gestion de ceux-ci.
Nous pensons que les ressources minières comme toutes
les activités économiques apportent des mutations diverses
positives et négatives aussi bien à l'échelle nationale
qu'à l'échelle locale. Quant à la capacité de cette
activité à produire le développement minier local, elle
réside dans la somme de ses incidences sur ses différentes
composantes que sont : l'économique, le social, l'environnement et
l'humain. La croissance démographique, l'augmentation du pouvoir
d'achat, le développement des activités commerciales et celui des
services, sont les effets positifs de l'activité minière. Ces
avantages qu'apporte l'activité aurifère à la
sous-préfecture de Hiré, lui permettent de connaître un
rayonnement dans la région du Lôh-djiboua et au-delà.
Toutefois, ces effets positifs sont entravés par la contribution de
l'exploitation minière à l'aggravation de la fragilisation des
systèmes agricoles. Dans un contexte de baisse de la production agricole
due au vieillissement du verger, les paysans ont tendance à
négliger leurs campagnes agricoles dans l'espoir de trouver des emplois
qui offrent la garantie de gains financiers plus rapides et plus importants. Le
constat est que le travail agricole est délaissé par de nombreux
bras valides à la recherche de revenus réguliers plus
consistants. L'importance des superficies autrefois utilisées pour
l'agriculture et désormais dédiées à l'exploitation
aurifère réduit de façon drastique les terres agricoles et
par ricochet, les productions agricoles. A travers la pollution du sol et des
eaux entrainées par l'activité aurifère, les terres
épargnées dans l'occupation sont impropres à l'agriculture
ou les produits qui en sont tirés nuisent à la santé des
populations.
Une autre influence négative est celle de la pression
foncière exercée par l'activité minière. Elle fait
ressurgir les conflits fonciers à travers la remise en cause des accords
passés antérieurement entre communautés, entre villages et
entre individus du fait de la question des indemnisations.
Les emplois dans la compagnie minière et chez ses
sous-traitants sont pourvus à l'échelle nationale et
internationale. La présence de NEWCREST ne permet donc pas de
résoudre durablement le problème de l'emploi des populations de
Hiré. Les formations qualifiantes offertes et financées par la
compagnie minière ne rencontrent pas vraiment l'adhésion des
populations car celles-ci sont focalisées sur les emplois
salariés. Ainsi, les avantages qu'apportent l'exploitation de l'or dans
la sous-préfecture de Hiré sont moindres comparés aux
287
effets pervers qu'elle engendre. Les efforts de
développement local entrepris par la compagnie minière à
travers l'élaboration et la mise en oeuvre du PDL s'en trouvent
annulés.
Cette thèse permet de mettre en lumière le poids
des différents impacts de l'exploitation minière sur la
sous-préfecture de Hiré. Elle permet de comprendre que le non
développement local minier de Hiré n'est pas que le fait de
l'insuffisance ou de l'impertinence des actions communautaires. Mais il est
aussi lié aux influences négatives de l'activité sur
l'agriculture, l'environnement et le foncier. Ces effets pervers étant
indissociables de cette activité, toutes les actions de
développement communautaires ne peuvent permettre d'atteindre le
développement local tant espéré.
Le développement local minier à Hiré est
contrarié parce qu'il n'y a pas de cohérence entre les
différents objectifs des acteurs (dans leur quête de
développement). Il y a une sorte de confrontation entre les objectifs de
développement et les actions posées par les acteurs en
présence. Les différents éléments du système
inter agissent les uns avec les autres.
Aussi pensons-nous que les effets pervers de l'activité
minière pourraient être atténués afin de permettre
aux communautés locales de tirer parti de la richesse de leur sous-sol.
C'est le lieu de s'interroger sur les études d'impact environnementales
menées avant la signature des permis d'exploitation. Sont-elles
menées de façon transparente ? Ne permettent-elles pas de
déterminer au préalable ces incidences sur les communautés
locales et notamment, dans les zones agricoles ? L'exploitation minière
dans les localités agricoles est-elle opportune ? Comment
intégrer les de façon efficace les communautés locales
dans l'élaboration et la mise en oeuvre des programmes de
développement local ?
288
|