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Exploitation aurifère et développement local dans la sous-préfecture de Hiré (Côte d'Ivoire)


par Judith YOBO-GNAHOUA
Université Felix Houphouet Boigny - Doctorat 2019
  

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CONCLUSION GÉNÉRALE

Cette thèse a consisté à déterminer à travers ses différentes incidences, la contribution de l'activité aurifère au développement dans la sous-préfecture de Hiré. Son but était de contribuer à l'apport de connaissances géographiques sur l'activité minière en général, ainsi que sur les incidences spatiales, démographiques, socio-économiques et environnementales de l'exploitation minière de type aurifère qui se déroule à Hiré et sa capacité à y impulser le développement. L'enjeu de cette thèse s'inscrit dans la particularité du contexte de l'exploitation aurifère dans la sous-préfecture de Hiré, car elle intervient dans une importante zone de production agricole où l'importance à la fois culturelle, sociale et économique de la terre lui accorde un caractère sacré.

Il s'est agi pour nous de voir si l'exploitation minière à travers ses différentes incidences permet à la sous-préfecture de Hiré de connaître un développement local ou si, au contraire, cette nouvelle activité implique une fragilisation des acquis, une aggravation des problèmes du système de production agricole et une dégradation du tissu social local. Cette conclusion revient sur les différents apports de la thèse, par rapport aux trois questions spécifiques déclinant le questionnement général qui vient d'être rappelé.

Quelle est la reconfiguration spatiale induite par l'activité minière dans la sous-préfecture de Hiré? L'ouverture de l'exploitation aurifère dans la sous-préfecture de Hiré a entrainé un réaménagement dans son organisation spatiale. Bien que sous forme artisanale l'activité ne soit pas nouvelle à Hiré, elle connaît depuis l'ouverture de l'exploitation industrielle, une nouvelle dynamique. Cela se traduit par une prolifération des sites d'orpaillage dispersés à travers la sous-préfecture. En effet, la délivrance des permis miniers et la distribution spatiale de ceux-ci, couplés aux sites d'orpaillage à profusion, on est face à un premier niveau de changement spatial. Le deuxième niveau de changement est que ces sites d'exploitation aurifère se substituent à des activités préexistantes qui pour la plupart sont des activités agricoles. Aussi, le relief a-t-il été modifié du fait de l'exercice même de cette activité aurifère. Par les pratiques de creusage et d'entreposage, de nouvelles formes de relief apparaissent composées de cuvettes et de collines artificielles. Il y a également la délocalisation de trois campements autour de la mine sur de nouveaux sites entièrement construits par la compagnie minière. Cette relocalisation a également entrainé une reconfiguration spatiale avec transformation du type d'habitat.

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Quels sont les différents changements introduits par l'exploitation de l'or en rapport avec le cadre de vie à Hiré ?

Dans la sous-préfecture de Hiré, l'activité aurifère est un facteur de croissance démographique née de l'attractivité qu'elle entraîne. Les mouvements migratoires orientés majoritairement vers la ville de Hiré contribuent à agrandir le marché de consommation local. On assiste à une multiplication de logements modernes avec extension de la ville. L'activité minière entraine en outre, l'essor des activités commerciales et la diversité des services dans la sous-préfecture. Elle favorise l'émergence d'une nouvelle élite sociale et contribue, à défaut d'employer toute la jeunesse en quête d'emploi, au développement humain à travers le financement des projets et des formations qualifiantes. De ce point de vue, le projet minier doit être perçu comme un catalyseur de croissance des activités économiques dans les localités hôtes.

Quels sont les mécanismes de régulation des rapports entre l'entreprise minière et les communautés locales dans l'exploitation aurifère ?

L'étude des mécanismes de régulation des rapports entre l'entreprise minière et les communautés locales dans l'exploitation aurifère à Hiré revient à montrer la nature des rapports qui se développent entre les acteurs de l'activité aurifère et les communautés locales. D'une part, elle contribue à l'aggravation de la fragilisation des systèmes agricoles. Car, dans un contexte où la population essentiellement agricole, connaît une baisse de ressource due principalement au vieillissement du verger, l'activité minière se présente comme une opportunité. Les jeunes se détournent de l'agriculture dans l'espoir de trouver des emplois, qui offrent la garantie de gains financiers plus rapides et plus importants. Ce désintérêt pour l'agriculture se traduit par l'augmentation des cas d'abandon du travail de la terre. Les activités minières exercent également une influence négative sur l'agriculture à l'échelle locale, à travers la récupération d'une partie des terres des paysans, comme l'exigent les besoins des opérations minières. Cela contribue à réduire les superficies cultivées. La pollution concourt aussi à cette diminution des quantités de production tout en influençant les différentes composantes de l'environnement que sont l'air, l'eau et le sol qui sont essentielles pour l'activité. A travers la pression foncière qu'elle contribue à accentuer, l'exploitation minière ravive les conflits fonciers préexistants et en crée d'autres. Ces conflits sont de tous ordres. Au sein de la communauté on assiste à des conflits intra familiaux, inter villages et intercommunautaires. Outre ces conflits, il y a ceux qui opposent les populations à la compagnie minière. Ce sont des conflits qui portent généralement sur le dédommagement. Ces conflits ont donné naissance à

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des groupes qui s'apparentent à des syndicats et qui prennent position en faveur des populations. Ces conflits vont jusqu'à entrainer des procédures judiciaires. Cependant, des mécanismes de règlement de ces conflits ont été mis en place pour une meilleure gestion de ceux-ci.

Nous pensons que les ressources minières comme toutes les activités économiques apportent des mutations diverses positives et négatives aussi bien à l'échelle nationale qu'à l'échelle locale. Quant à la capacité de cette activité à produire le développement minier local, elle réside dans la somme de ses incidences sur ses différentes composantes que sont : l'économique, le social, l'environnement et l'humain. La croissance démographique, l'augmentation du pouvoir d'achat, le développement des activités commerciales et celui des services, sont les effets positifs de l'activité minière. Ces avantages qu'apporte l'activité aurifère à la sous-préfecture de Hiré, lui permettent de connaître un rayonnement dans la région du Lôh-djiboua et au-delà. Toutefois, ces effets positifs sont entravés par la contribution de l'exploitation minière à l'aggravation de la fragilisation des systèmes agricoles. Dans un contexte de baisse de la production agricole due au vieillissement du verger, les paysans ont tendance à négliger leurs campagnes agricoles dans l'espoir de trouver des emplois qui offrent la garantie de gains financiers plus rapides et plus importants. Le constat est que le travail agricole est délaissé par de nombreux bras valides à la recherche de revenus réguliers plus consistants. L'importance des superficies autrefois utilisées pour l'agriculture et désormais dédiées à l'exploitation aurifère réduit de façon drastique les terres agricoles et par ricochet, les productions agricoles. A travers la pollution du sol et des eaux entrainées par l'activité aurifère, les terres épargnées dans l'occupation sont impropres à l'agriculture ou les produits qui en sont tirés nuisent à la santé des populations.

Une autre influence négative est celle de la pression foncière exercée par l'activité minière. Elle fait ressurgir les conflits fonciers à travers la remise en cause des accords passés antérieurement entre communautés, entre villages et entre individus du fait de la question des indemnisations.

Les emplois dans la compagnie minière et chez ses sous-traitants sont pourvus à l'échelle nationale et internationale. La présence de NEWCREST ne permet donc pas de résoudre durablement le problème de l'emploi des populations de Hiré. Les formations qualifiantes offertes et financées par la compagnie minière ne rencontrent pas vraiment l'adhésion des populations car celles-ci sont focalisées sur les emplois salariés. Ainsi, les avantages qu'apportent l'exploitation de l'or dans la sous-préfecture de Hiré sont moindres comparés aux

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effets pervers qu'elle engendre. Les efforts de développement local entrepris par la compagnie minière à travers l'élaboration et la mise en oeuvre du PDL s'en trouvent annulés.

Cette thèse permet de mettre en lumière le poids des différents impacts de l'exploitation minière sur la sous-préfecture de Hiré. Elle permet de comprendre que le non développement local minier de Hiré n'est pas que le fait de l'insuffisance ou de l'impertinence des actions communautaires. Mais il est aussi lié aux influences négatives de l'activité sur l'agriculture, l'environnement et le foncier. Ces effets pervers étant indissociables de cette activité, toutes les actions de développement communautaires ne peuvent permettre d'atteindre le développement local tant espéré.

Le développement local minier à Hiré est contrarié parce qu'il n'y a pas de cohérence entre les différents objectifs des acteurs (dans leur quête de développement). Il y a une sorte de confrontation entre les objectifs de développement et les actions posées par les acteurs en présence. Les différents éléments du système inter agissent les uns avec les autres.

Aussi pensons-nous que les effets pervers de l'activité minière pourraient être atténués afin de permettre aux communautés locales de tirer parti de la richesse de leur sous-sol. C'est le lieu de s'interroger sur les études d'impact environnementales menées avant la signature des permis d'exploitation. Sont-elles menées de façon transparente ? Ne permettent-elles pas de déterminer au préalable ces incidences sur les communautés locales et notamment, dans les zones agricoles ? L'exploitation minière dans les localités agricoles est-elle opportune ? Comment intégrer les de façon efficace les communautés locales dans l'élaboration et la mise en oeuvre des programmes de développement local ?

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