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Exploitation aurifère et développement local dans la sous-préfecture de Hiré (Côte d'Ivoire)


par Judith YOBO-GNAHOUA
Université Felix Houphouet Boigny - Doctorat 2019
  

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INTRODUCTION AU CHAPITRE

Ce chapitre est consacré à l'étude de la population et des réalités socio-économiques de Hiré, à ses différentes évolutions depuis le petit village de Hiré jusqu'au recensement de 2014. L'accent sera mis sur les différentes mutations observées au niveau de la population depuis l'ouverture de l'usine minière. Ces observations porteront aussi bien sur la démographie qualitative que quantitative de Hiré. Elles porteront sur les caractéristiques de cette population, sa répartition dans la sous-préfecture.

4.1 HISTORIQUE DE PEUPLEMENT DE LA SOUS-PREFECTURE DE HIRE

4.1.1 Les villages Watta, une géographie motivée par les conflits

La sous-préfecture de Hiré est originellement peuplée de Dida du canton Watta. L'histoire des Dida en Côte d'Ivoire indique qu'ils font partie du groupe ethnique Krou. Ils sont répartis dans les départements de Divo, Lakota et Guitry. Cependant, selon certaines autorités villageoises, les ancêtres des Dida Mamini qu'on retrouve sur le petit massif montagneux entre Divo et Oumé seraient d'origine Akan. Ils seraient venus de l'Est et auraient participé au début du XVIIIème siècle à la migration baoulé et à la traversée miraculeuse de la Comoé.

Watta est le nom du canton qui regroupe cinq villages de Dida Mamini. C'est une déformation du mot dida « Watto » qui signifie « qui aime la guerre ». Les Dida Watta étaient des peuples guerriers et auraient occupés le petit massif montagneux afin de se mettre à l'abri des attaques surprises. L'histoire des Dida du canton Watta est parsemée de guerres qui auraient dicté leurs différents déplacements et leurs positions actuelles. La sous-préfecture de Hiré compte six villages Watta dont l'histoire de peuplement est quelque peu difficile à retracer. On trouve des imperfections dans le récit et des similitudes entre certains villages. Ceci à cause de la transformation des micros histoires sociales mais surtout à cause des rivalités autour de la chefferie de terre qui existent entre certains villages.

4.1.1.1. Hiré dida

Les Dida de Hiré se sont retrouvés dans la zone actuelle par des déplacements successifs suites à des guerres de voisinages. A leur arrivée dans la zone, ils se sont d'abord installés dans la région de Gbadi, localisée dans les montagnes, au-dessus de la cité de la mine de Bonikro actuel. Ils étaient conduits par le chef Gbadjè. Selon le chef et ses notables : « leur premier nom est «

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gbadjèdou » qui signifie le village de Gbadjè, fondateur de Hiré-Dida. Le village de Gbadjèdou a été créé entre le 15 ème et le 16 ème siècle ». C'est en les nommant par leur situation géographique que progressivement Gbadjédou a été oublié au profit de Hiré. En effet, ils étaient installés près d'un jeune arbre appelé « yi » en dida et dont le pluriel est « yirè ». C'est l'administrateur qui a écrit Hiré. Cependant, ils ont dû partir de là pour cause de guerre et ont trouvé refuge à Bouakako avec les ressortissants duquel ils ont des liens de famille. Ils y sont restés pendant plus de trois ans. Puis, pour des difficultés de cohabitations, ils sont retournés sur leur ancien site. Sakpè, neveu des habitants de Bouakako, refusa d'y retourner et une nouvelle terre leur fut offerte sur le site actuel de la Mairie. Dès lors, les descendants de Sakpè devinrent les fils de la terre (maître de terre). Le chef actuel de Hiré est un descendant direct de Gbadjè, premier occupant de Hiré (côté quartier Baoulé), propriété de Bouakako. Il existe 4 grandes familles à Hiré : la famille Koua, la famille Zriga, la famille Gbohouri et la famille Sakpè (neveu de Hiré). Hiré est à cheval entre deux villages (Kagbé et Bouakako).

4.1.1.2. Bouakako

L'histoire de Bouakako est difficile à retracer. La difficulté réside dans la divergence des points de vue relatifs aux différents sites occupés par la famille fondatrice du village et à l'histoire de l'installation des baoulé dans le village. Cependant, ils sont unanimes sur le fait que la première famille installée sur le site de Bouakako est la famille Douzoua. Ils occupaient par le passé le site qui abrite l'école du village. Ils sont donc les fondateurs du village et par conséquent ils sont les chefs de terre.

Avec les guerres de voisinage, une partie de la famille se détacha pour fonder deux autres familles que sont la famille Agbalé et la famille Zabregouan. Ceux de Hirégouan sont allés vers Hiré actuel. Ils n'ont donc pas une autonomie vis-à-vis des gens de Bouakako. Ces familles ont été rejointes plus tard par une famille Baoulé qui est représentée par la famille Akan.

Les personnes interrogées à Bouakako au sujet de l'histoire de la création du village commencent par préciser que les terres cultivables sont éloignées du village et nombreuses sont celles qui sont touchées par la mine et l'exploration actuelle. Les terres de Bouakako selon nos différents interlocuteurs, vont très loin jusqu'à la limite de Taabo, Oumé et Zégo.

4.1.1.3. Gogobro et Kagbé : deux villages, une histoire

Gogobro et Kagbé ne formaient à l'origine qu'un seul village. Le premier site des villages unis de Gogobro et Kagbè a été découvert par des chasseurs. Les Dida, vaillant peuple chasseur,

124

sous la conduite du vieux Gogo, partirent de Pépéhiri et repassèrent le fleuve Bandama, fonçant vers les grandes forêts vierges, côté Oumé, où ils se perdirent dans une zone très reculée. Les guides du groupe disent en patois : "Amono" qui veut dire ; « nous sommes perdus ». De commun accord, ils bâtirent là une nouvelle résidence qui porte le nom du vieux Gogo (Gogobré) qui veut dire ; « chez Gogo » qui devient Gogobro par le système colonial ». Cependant, des querelles incessantes de voisinage vont amener les populations actuelles de Kagbé à partir à la recherche de nouvelles terres cultivables et retrouver la paix sociale. Dans le cas spécifique de Gogobro et Kagbè, le conflit opposait deux frères à propos d'une femme, un problème d'adultère. Suite à ces querelles, une fraction du village est partie. Cette frange de la population s'est installée sur un « point le plus élevé » ; « pente » appelé en dida : « wakagb ». La colline s'appelle « kagbèwatta ». D'où le nom Kagbé qui veut dire « village situé sur la colline ». Cependant, le village a dû se déplacer sur son site actuel qui est moins élevé. Selon nos interlocuteurs, ce site a été découvert avant la colonisation par un chasseur. Il a découvert à cet endroit un cours d'eau qui pouvait alimenter les villageois. C'est ainsi que du haut de leur colline, les habitants de Kagbè sont descendus pour vivre auprès de ce cours d'eau, sachant que depuis bien longtemps l'accès à l'eau est très difficile dans la région. Kagbè proclame son autonomie vis-à-vis de Gogobro. Le village de Kagbè affirme faire limite avec Gabia, Bouakako, Hiré et Diégonéfla et compte une vingtaine de campements.

4.1.1.4. Zaroko

Zaroko est un village démographiquement très important. Son histoire est difficile à retracer du fait que deux familles y revendiquent la chefferie de terre. Pourtant, c'est le chef de terre qui en tant que descendant du fondateur détient l'histoire du village. Cependant, cette rivalité autour de la chefferie des terres est récente. Elle est née de la compétition pour le bénéfice du dédommagement de la compagnie minière pour l'exploitation de l'or

4.1.1.5. Douaville

Douaville était un campement créé par un détachement de la population de Zaroko. Ces populations fuyaient les guerres de voisinage à Zaroko et ont trouvés refuge sur le site actuel de Douaville. Anciennement connu sous le nom de 9 km, ce campement est devenu un village avec l'installation d'importantes populations migrantes. Le fondateur de ce village est « Doua Félix » dont le village porte le nom. Sur le plan politique, ce village dépendrait de Zaroko.

125

4.1.2. La migration Baoulé à Hiré

Les Baoulés font partie du grand groupe Akan. Installés dans le centre de la Côte d'Ivoire, ils sont repartis en plusieurs sous-groupes. Toutefois, avec l'introduction des produits d'exportations, les Baoulés ont migré vers les zones forestières. Contrairement à cette raison générale de la migration des Baoulés vers les zones forestières, les Baoulés de Hiré, y ont accouru pour chercher l'or. Ils ont donc été les premiers orpailleurs de la zone de Hiré. Les premiers Baoulés venus à Hiré provenaient des cités où l'on extrayait anciennement l'or comme Toumodi, Sakassou et Kokumbo. Ils ont été installés sur les terres de Bouakako. La proximité d'avec les Baoulé a beaucoup influencé culturellement les Dida watta. Ils ont adopté le tambour parleur (drum) qui serait d'origine Baoulé. Aussi, leur langue, le dida tel que parlé par les Watta serait-il le produit d'un brassage entre le dida et le baoulé. C'est de là qu'est née le brassage et les nombreux noms akan que portent les Dida de Hiré. Peu de temps après, un conflit éclata entre Baoulé autour du vin de palme. La violence de ce conflit fit peur aux autochtones Dida qui décidèrent de leur trouver un espace où ils pourraient habiter afin de retrouver leur quiétude. C'est ainsi qu'ils furent installés sur le site actuel de Hiré-Baoulé (quartier Baoulé) pour créer leur campement. Là, ils ont continué à exploiter le métal jaune. L'or amassé par ces derniers servait à la fabrication de parures traditionnelles de valeur (bagues, chaînes, bracelets, boucles d'oreilles). Aussi ces orpailleurs avaient-ils des qualités d'orfèvres. Les activités étaient structurées tandis que certains cherchaient l'or, d'autres au village s'occupaient de le transformer en parures et d'autres encore s'occupaient de sa commercialisation sur le marché local et dans les localités environnantes. Chaque année, ils venaient voir leur tuteur pour leur témoigner leur reconnaissance avec des cadeaux.

Cependant, les colons du bureau minier s'étant aperçus de la richesse en or de la localité, s'y sont installés en 1940 pour mener une exploitation de type semi-industrielle, et interdirent ainsi l'orpaillage. Cette interdiction de l'orpaillage, combiné à la rareté de l'or et aux risques d'accidents liés à cette activité, entraine la réorientation des populations vers l'agriculture et particulièrement vers le café et le cacao.

Aux Baoulé, s'ajoutent les Maliens et les Burkinabés venus avec le bureau minier. Ils se sont tous reconvertis en agriculteurs incités par la richesse et la fertilité du sol (Kouassi ; 2009), tout en faisant de l'orpaillage une activité de soudure. Cette ruée massive vers l'agriculture va contribuer à faire de Hiré une zone de grande production cacaoyère (Léonard et Vimard ; 2005). La croissance économique que vont connaitre les nouveaux agriculteurs va provoquer

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l'intensification des flux migratoires et la mutation des rapports autour de la terre et du statut de celle-ci. Suite au slogan du premier président de la république Félix Houphouët-Boigny qui a pris `force de loi' : la terre appartient à celui qui la met en valeur, (Chauveau 2000), des colonies importantes de Baoulé se sont déportées à Hiré.

Vers la fin des années 1960, un autre groupe de Baoulé s'est installé sur une partie de la forêt classée de la Sangoué et a créé plusieurs campements dont Bandamakro, Bonikro, Chantier konankro, Koutouklou-Konankro et Petit Bouaké. Selon le chef de village de Gogobro, cette partie de leur terre était dans le périmètre de la forêt classée, et leur était interdit. Tout contrevenant à cette interdiction était amandé et passible de poursuites judiciaires. Cependant, en 1968, des chasseurs s'y sont aventurés et ont découverts qu'il y avait de nouvelles plantations. C'est ainsi qu'ils ont approchés les Gouro de Gabia, leurs voisins immédiats, pour leur demander si les plantations leur appartenaient ou s'ils avaient installé des gens dans la forêt classée, et ceux-ci ont répondu que non. Selon les Baoulés, ils auraient été installés par un Dida de Gogobro nommé Dabié qui ne leur auraient exigé aucun montant et n'avait pas précisé les termes du contrat vu que c'était une forêt classée. Pour les Dida par contre, tandis que cette forêt est considérée comme classée, propriété exclusive de l'Etat, et que les autochtones Dida sont interdit de cultiver et de chasser dans cette forêt sous peine d'amende ou de poursuites judiciaires, les Baoulé sont autorisés à y travailler. Les revendications de la propriété de la zone par les villageois Dida de Gogobro occasionnèrent vers la moitié des années 1970 un conflit entre les habitants de Gogobro et les Baoulé installés dans la forêt classée. Ce conflit selon le chef de Gogobro provoqua l'arrestation d'une trentaine d'autochtones et la bastonnade de plusieurs d'entre eux.

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4.2. EVOLUTION DE LA POPULATION DE LA SOUS-PREFECTURE DE HIRE

4.2.1 Une croissance démographique accélérée par la redécouverte de l'or et l'arrivée massive d'orpailleurs

60000

Nombre d'habitants

50000 40000 30000 20000

 

Populations

10000

0

1975 1988 1998 2014

Année de recensement

Source : INS, 2016

Figure 17 : courbe d'évolution de la population de Hiré sous-préfecture selon les RGPH 1975 à 2014

La sous-préfecture de Hiré connait depuis le premier recensement de 1975 jusqu'au recensement de 2014 une croissance démographique avec un taux d'accroissement positif.

L'allure générale de la courbe montre une population en croissance continue. Cette croissance peut être subdivisée en trois phases : la phase de 1975-1988, la phase de 1988 à 1998 puis la phase de 1998 à 2014. Ces trois phases correspondent à trois étapes de peuplement de la sous-préfecture de Hiré. La croissance démographique étant liée à une forte natalité ou à une forte migration, la croissance démographique observée à Hiré est de tout temps liée à l'importance des mouvements migratoires.

La première phase de 1975-1988 s'explique par la migration du groupe de Baoulé arrivé dans la sous-préfecture à la recherche de terres fertiles pour la création de plantations de cacao et de café. Cette importante migration Baoulé dans la zone a été déterminante dans le flux migratoire qu'a connu le petit village d'Hiré Watta, à l'instar de toutes les zones pionnières de la culture

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du cacao (RUF, 1995). En effet, l'essor de la culture de cacao que Ruf a appelé « booms du cacao », a contribué fortement à la dynamique démographique des zones forestières de la Côte d'Ivoire. Ces différents modes de migration ont permis au petit village de Hiré-watta de s'agrandir et de connaître une dynamique démographique remarquable. Ce phénomène est à l'origine de son érection en circonscription administrative (sous-préfecture) en 1977, puis en commune rurale en 1985.

La phase de 1988-1998 s'inscrit dans la même dynamique de migration agricole. Toutefois l'explosion démographique observée entre 1998 et 2014 s'explique par l'ouverture de l'exploitation aurifère industrielle de Bonikro. Depuis 2007, avec la construction de la mine d'or de Bonikro, la commune de Hiré fait face à une nouvelle vague de flux migratoire (Kouadio, 2016). Il s'agit d'une part, d'employés de la mine, venus d'autres régions du pays et aussi de pays étrangers notamment le Ghana; et d'autre part, d'orpailleurs venus d'autres régions du pays et surtout des pays voisins (du Burkina Faso notamment). La croissance de la population s'explique par un taux de migration assez important dont le flux varie. La densité de la population de Hiré selon le RGPH 2014 est de 127 habitants/km2. La sous-préfecture de Hiré compte 9 376 ménages dont la taille moyenne est de 5,4 personnes.

Cet excédent des estimations s'explique par l'ouverture de l'exploitation aurifère qui a attiré à Hiré de nombreuses populations venues profiter des opportunités économiques offertes par l'activité aurifère.

L'orpaillage, bien qu'intimement lié à l'histoire de Hiré, connait depuis l'ouverture de l'usine aurifère de Bonikro une nouvelle dynamique. L'intensité de l'activité s'accroit, favorisée par les importantes vagues de migrants venus majoritairement pour l'orpaillage comme le témoigne le graphique ci-dessous (Figure 18).

129

Figure 18 : orpailleurs immigrés selon l'année d'arrivée

Source : NEWCREST, 2015

Cette figure est le résultat d'une enquête sur les orpailleurs menés par NEWCREST en partenariat avec le cabinet Channel. Elle présente la courbe des orpailleurs immigrés selon l'année d'arrivée à Hiré. Les orpailleurs interrogés sont tous arrivés à partir de 2005. Cependant, le flux d'arrivée a évolué dans le temps. La figure présente un graphique en courbe ascendante qui montre une croissance continue du nombre d'orpailleurs immigrés au fil du temps. Cette courbe peut être analysée en trois phases. De 2005 à 2007, faible arrivée d'orpailleurs à Hiré, allant de 8 à 21 orpailleurs sur les deux années. De 2007 à 2011, ce sont entre 21 et 219 orpailleurs qui sont arrivés chaque année. Puis en 2012, les chiffres explosent avec 1037 orpailleurs arrivés dans la sous-préfecture. Cette explosion est corrélée à la découverte des nouveaux gisements de la zone de Hiré.

L'exercice de l'orpaillage nécessitant une grande maitrise des techniques d'extraction et de traitement, ce sont généralement ceux qui ont déjà exercé cette activité qui s'y adonnent. Ceux qui se sont rués vers Hiré du fait de l'opportunité que représente l'exploitation aurifère sont de nationalités diverses.

4.2.2. Une population diversifiée

La sous-préfecture de Hiré dispose d'un fond de peuplement dont l'hétérogénéité est très ancienne. Elle s'explique par les différents flux migratoires. Selon le RGPH 2014, la population

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totale de Hiré est de 50 357 habitants composés d'autochtones Dida et d'allochtones (ivoiriens et non-ivoiriens). Les autochtones représentent seulement 23,70% de la population de Hiré. Les Dida sont en minorité dans la sous-préfecture de Hiré et vivent majoritairement dans les villages.

La population allochtone à Hiré est dominée par les Baoulé qui représentent à eux seuls 20,21% de la population totale de Hiré. La population enquêtée est composée à 23,70% de Dida, à 22,09% de Baoulé, à 20,21% des autres ivoiriens et à 34% d'étrangers (Figure 19).

Figure 19 : répartition de la population de Hiré selon l'ethnie et la nationalité

Source : RGPH, 2014

35%

10%

11%

24%

20%

Dida

Baoulé

Ivoiriens du Nord Autres ivoiriens Etrangers

La répartition de la population de Hiré selon l'ethnie et la nationalité, sur la base du recensement général de la population (RGPH, 2014), est une population diversifiée composée d'autochtones Dida et d'allochtones.

4.2.2.1. Les Dida Watta, une population autochtone minoritaire sur ses propres terres

Les autochtones Dida représentent seulement 23,70%, soit un quart de la population de Hiré. Ils sont en minorité dans la sous-préfecture de Hiré et vivent majoritairement dans les villages. Une étude détaillée de la population des six villages de la sous-préfecture par origine montre une ascension des allochtones sur les autochtones. Cette ascendance des allochtones se ressent plus au niveau de la ville qu'au niveau des villages. Dans la ville de Hiré dont un des quartiers

131

Hiré-dida est un village, la population autochtone n'y représente que 7,87% de la population totale (tableau 8).

Tableau 8 : répartition de la population par origine des villages de Hiré

Localités

Nombre d'habitants

Populations autochtones

Populations allogènes

Bouakako

1 233

642

591

Douaville

2 780

831

1 949

Gogobro

4 355

2 280

2 075

Hiré

31 960

2 514

29 446

Kagbè

8 560

4 876

3 684

Zaroko

1 469

792

677

Total

50 357

11 935

38 322

Source : INS, 2014

4.2.2.2. Une population allochtone majoritaire et diversifiée

La population allochtone à Hiré est composée des allochtones ivoiriens et des allochtones étrangers. Les allochtones ivoiriens sont composés majoritairement de Baoulé. Ils représentent à eux seuls 20,21% de la population totale de Hiré, suivis des ivoiriens du Nord 11,35 %. Ils peuvent être pratiquement considérés comme la deuxième ethnie de Hiré. Les allochtones non ivoiriens représentent quant à eux 34,60 % de la population totale de Hiré. C'est le plus grand poids démographique de Hiré. C'est un groupe hétérogène composé de nationalités différentes La population allochtone constitue une frange importante de la population de Hiré.

La diversité ethnique et de nationalité est liée à l'historique de peuplement de la sous-préfecture de Hiré. En effet, Hiré s'est peuplée par l'arrivée successive de populations. D'abord, les Dida, peuple autochtone ont été les premiers à s'installer puis, à leur suite, il y a eu les Baoulé arrivés depuis 1920. La dynamique agricole de cette zone dans les années 1960-1970 a attiré à Hiré des populations venant des autres régions de la Côte d'Ivoire et des pays voisins. La diversité démographique est très ancienne à Hiré mais la proportion d'étrangers y était faible (RGPH 1988). L'importante présence d'étrangers à Hiré que nous constatons aujourd'hui (34%) s'explique par l'ouverture de l'exploitation industrielle de l'or et le redémarrage de l'orpaillage clandestin. En effet, à cette occasion, des vagues de populations sont venues s'installer à Hiré. Ces installations sont motivées soit par la recherche d'un emploi à la mine industrielle soit par l'orpaillage ou les autres opportunités économiques liées à l'activité aurifère. Cet afflux de population est marqué par la croissance de la population étrangère avec une prédominance de trois nationalités que sont les burkinabés, les maliens et les guinéens (Figure 20). Ils représentent 84% de la population étrangère de Hiré.

132

Figure 20: répartition de la population étrangère enquêtée selon la nationalité

Source : enquête de terrain, 2015

Les étrangers enquêtés se sont installés à Hiré à des dates très diverses. Cependant, plus de 60% sont là depuis 2007-2008, année d'ouverture de l'exploitation minière industrielle. Ces personnes viennent à 80% d'autres localités aurifères ivoiriennes où les gisements sont épuisés. Leur arrivée à Hiré a été motivée par l'information de la découverte de l'or dans ladite localité. Seulement 20% ont eu l'information depuis leur pays d'origine. La population étrangère à Hiré est composée à 58% d'hommes contre 36% de femmes. Orpailleurs clandestins pour la plupart, ils sont engagés dans un parcours de la sous-région ouest africaine à la recherche de riches zones aurifères. L'orpaillage est une activité très ancienne dans les pays voisins comme le Burkina, la Guinée et le Mali. Ce qui explique la présence d'une importante colonie de ressortissants de ces pays dans la sous-préfecture de Hiré. On les retrouve également à la mine industrielle et dans les petits métiers et commerce de la ville.

4.2.3 Une population majoritairement jeune

La structure démographique de Hiré en 2014 présente une pyramide dont l'allure générale est triangulaire, la base large et le sommet effilé. Cette forme de la pyramide est caractéristique des populations à forte proportion de jeunes. La pyramide des âges présente la répartition de la population d'un espace selon l'âge et le sexe. Cette répartition est à la fois le résultat et le moteur

133

des dynamismes démographiques découlant du jeu subtil de la natalité, de la mortalité et du solde migratoire (Loba, 2008).

La structure par âge de la population présente l'allure classique de celle d'une population jeune, en croissance rapide, avec une base large, une diminution rapide des effectifs dans les classes immédiatement supérieures, liée à une mortalité encore élevée. L'étude de la structure par âge de la population de la sous-préfecture de Hiré est caractérisée par une proportion importante de jeunes dont l'âge est inférieur ou égale à dix-neuf ans. Ils représentent 58,9% de la population totale de Hiré. C'est une population très jeune due à un taux de natalité relativement élevé. On note également une proportion importante d'adultes dont l'âge varie entre 20 et 59 ans qui représente 39,5% de la population totale. La frange des personnes âgées de plus de 60 ans représente seulement 1,6% de la population. Le nombre important de la jeunesse représente un atout non négligeable dans le rayonnement économique que connait cette localité. En effet, la jeunesse constitue une main d'oeuvre assez importante dans l'agriculture et l'orpaillage qui sont les activités traditionnelles des populations de Hiré.

Tableau 9 : structure résumée de la population de Hiré en 2014

Tranche d'âge

Population

Pourcentage (%)

Moins de 15 ans

22 068

43,82

15-64 ans

27 057

53,73

65 ans et +

1 232

2,45

Total

50 357

100

Source : INS, 2016

La structure résumée de la population de Hiré permet de la classer en trois grands groupes. La frange des moins de 15 ans qui représente 43%, la frange des 15-64 ans et celle des plus de 65 ans. La tranche la plus importante de la population est celle dont l'âge varie entre 15 et 64 ans. Cette tranche d'âge regroupe les adolescents et les adultes. Elle comprend la totalité de la population active et son importance est en partie liée à l'arrivée des migrants actifs qui se situent dans cette tranche d'âge.

4.2.4. Une population à dominante masculine

La répartition de la population de Hiré selon le sexe (voir pyramide) montre qu'il y a 54,8% d'hommes et 46,2% de femmes soit un ratio de 107,5 hommes pour 100 femmes (RGPH, 2014).

134

Il y a donc plus d'hommes que de femmes dans la sous-préfecture de Hiré. Cette dominance masculine s'explique par l'arrivée massive d'hommes à la recherche d'emploi ou venus pour l'orpaillage. Les migrants viennent généralement à la recherche de ressources financières seuls sans femmes et sans enfants. L'étude de la répartition de la population masculine dans les villages de la sous-préfecture de Hiré présente un taux de masculinité inférieur à 100. Soit 96,7 à Bouakako et 95,7% à Gogobro. La prédominance des femmes dans les entités villageoises s'explique par le fait que les hommes en âge de travailler ont généralement tendance à migrer vers les villes de Hiré et/ou d'Abidjan à la recherche d'un emploi, d'où l'importance du nombre de femmes dans les villages contrairement à la ville.

Figure 21 : pyramide des âges de la population de Hiré en 2014

Source : RGPH, 2014

135

4.3 LA STRUCTURE DE LA POPULATION DE HIRE

Sur une population de 50 357 habitants que compte Hiré, seulement 17 158 personnes ont déclaré leur activité. Soit, 34,07% de la population totale dont l'activité est précisée.

4.3.1 La répartition de la population selon l'activité

Ces activités sont diverses et concernent l'agriculture, les mines, l'industrie, le commerce, les bâtiments et les travaux publics, etc. 45,46% de cette population exerce dans le secteur agricole, soit près de la moitié de la population ayant déclaré son activité. Ensuite, viennent les services, le commerce et l'industrie qui occupent respectivement 31%, 13% et 8% de la population déclarée (Figure 22).

Figure 22 : répartition de la population de la sous-préfecture de Hiré par branche d'activité

Source : INS, 2014

Selon le diagramme ci-dessus, l'agriculture est l'activité principale de la population de Hiré. Cette agriculture est diversifiée et repartie en sous-branche d'activité (voir tableau ci-dessous).

136

Tableau 10 : répartition de la population agricole de Hiré par culture selon le sexe en 2014

Branches d'activité

Sexe

Total

Masculin

Féminin

Cultures de céréales

150

10

160

Cultures de féculents

78

13

91

Culture fruitière

22

5

27

Culture des légumes

19

10

29

Cultures des condiments

33

6

39

Productions agricoles diverses

2 484

502

2 986

Production de café, cacao et autres

2 952

539

3 491

Production de bananes d'exportation et d'ananas

24

5

29

Production d'oléagineux

2

2

4

Total

5 764

1 092

6 856

Source : INS, 2014

Ce tableau montre la répartition de la population agricole de Hiré par culture selon le sexe en 2014. Plus de la moitié de la population agricole, soit 3 491 s'adonnent à la production de café, cacao, et autres. Ce sont les hommes qui s'adonnent le plus à ces cultures. La proportion de femmes pratiquant le café, le cacao, et autres cultures pérennes représente 1/7 des acteurs de cette branche d'activité. De façon générale les hommes sont plus nombreux dans le secteur agricole. Ils représentent 84,7% de la population agricole pour seulement 15,3% de femme.

Cependant, le nombre élevé de réponses en "activité non spécifiée" traduit l'existence d'une activité difficilement descriptible et donc certainement en partie clandestine.

4.3.2. Une population en pleine reconversion professionnelle

L'agriculture a été de tout temps l'activité économique dominante à Hiré. Elle est à la base du peuplement de toute la sous-préfecture. A côté de cette activité économique prédominante, il existe d'autres activités dont le dynamisme est resté longtemps dépendant de l'agriculture. Il s'agit de l'artisanat, du commerce et d'autres activités non agricoles. Les petits métiers de l'artisanat sont aussi pratiqués à Hiré. Il s'agit de la couture, la coiffure, la mécanique auto, vélo, moto etc. Le commerce de vivriers, de vêtements et autres produits cosmétiques se pratique dans l'unique marché de la ville. Cependant, depuis l'ouverture de la mine les

137

populations agricoles de Hiré sont confrontées à d'énormes difficultés qui les contraignent à se détourner de leur activité de base. L'exploitation minière à ciel ouvert est une activité consommatrice de grands espaces (Thune, 2011). Son emprise foncière à Hiré avec la mine de Bonikro et la fosse satellite de Hiré-Est, est une réalité. Ce sont 847,07 hectares qu'occupe la mine de Bonikro et 640 hectares que couvre la fosse de Hiré-est. Ces surfaces abritaient initialement des activités économiques des populations riveraines, en majorité des plantations agricoles. Ce sont environ 150 propriétaires terriens à Bonikro et plus de 1 000 exploitants qui ont été expropriés et indemnisés. Cette occupation du sol par les activités minières, crée des contraintes économiques énormes pour ces paysans. Ils se retrouvent dans l'obligation de trouver de nouvelles terres pour continuer d'exercer l'agriculture, alors que cette ressource est rare. Avec l'expropriation, les paysans sont obligés de trouver de nouveaux moyens de subsistances, aussi cherchent-ils à se reconvertir dans des activités diverses. Ne répondant pas aux critères de recrutement à la mine, du fait de leur manque de qualification ou de l'inadéquation de leur formation aux métiers de la mine, l'artisanat minier se présente comme la meilleure alternative de reconversion.

En effet, l'orpaillage offre de meilleures possibilités pour la création d'emplois par rapport à la mine industrielle. Ce choix se justifie également par son avantage économique par rapport à l'agriculture en termes de revenu plus élevé et plus immédiat. La pratique de l'orpaillage permet à certains anciens ouvriers agricoles de s'installer à leur propre compte en tant qu'orpailleur. Le salaire journalier d'un ouvrier orpailleur (2 000-3 000 F CFA) est de loin plus avantageux que le salaire d'un ouvrier agricole (1 000-1 500 F CFA). L'orpaillage se présente comme une opportunité économique que la morosité de leur activité initiale, pousse les paysans à pratiquer, soit temporairement, soit de façon indéterminée. Son attraction est telle qu'on trouve dans le rang des orpailleurs, des paysans, des commerçants, des hommes de métiers d'origines diverses. Cependant, les commerçants et les paysans sont les plus nombreux avec respectivement 22,5% et 20,7%. Ils sont suivis par les artisans ou «hommes de métiers» avec 15,1% et les élèves 10,9%. Au début de l'orpaillage, c'était surtout les allogènes qui se consacraient à cette activité car ils étaient les seuls à connaitre ce métier. Mais progressivement les populations locales Dida, Baoulé et Malinké s'y sont mis. Aujourd'hui 50% d'orpailleurs sont des nationaux et même originaires de Hiré (Dida et Baoulé). La présidence des orpailleurs de Hiré est assurée par un Dida de Hiré. Les revenus tirés de cette activité au vue du niveau de vie de ses acteurs, attire de nombreux jeunes. D'autant plus que les sommes perçues par les orpailleurs ne sont en rien comparables aux revenus tirés de l'agriculture et des autres activités locales. Il ressort de

138

nos enquêtes de terrain que 75% des ouvriers sont payés par les chefs de site ou de groupes de façon journalière en fonction des tâches à eux confiées. Les ressources tirées de cette activité sont en majorité directement investies dans la sous-préfecture, même si certains rapatrient leur gain dans leurs localités d'origines. Nombreux sont les orpailleurs qui investissent dans l'immobilier à Hiré. Avec la présence des travailleurs de la mine et la nécessité pour eux de se loger, la demande de logement est de plus en plus forte à Hiré.

A côté de ceux qui exercent l'orpaillage comme activité, il y a les paysans qui mettent leurs parcelles en location aux orpailleurs. Cela soit du fait de la baisse de leurs productions soit du fait du vieillissement du verger ou de sa proximité à un site d'extraction aurifère. Ces paysans dédient ainsi les terres agricoles à l'orpaillage.

La diversité des emplois dans les mines et le caractère clandestin de l'orpaillage expliquent le fait que les populations aient eu du mal à nommer la branche d'activité dans laquelle ils tentent de se reconvertir. L'importance des revenus tirés de l'exploitation de l'or conjugué aux difficultés du secteur agricole à Hiré provoque une grande mutation sociale.

4.4. HIRE, UNE URBANISATION BOOSTEE PAR L'EXPLOITATION MINIERE

4.4.1. Une concentration démographique dans la ville de Hiré

Le rythme d'urbanisation de la ville de Hiré dans les années 1990 a connu quelques problèmes liés à l'approvisionnement en eau. Cependant, l'occupation des zones loties se faisait de manière régulière avec un taux d'urbanisation de 1,2%. La densité de l'espace était d'environ 102 habitants/ha pour une consommation d'espace de 150 m2 par habitant. La qualité de l'habitat était relativement bonne. Dans les quartiers anciens comme les quartiers Dioula, Baoulé, Dida et Gnakankro, les constructions sont en grande partie en Banco crépis de ciment. Par contre, dans les nouveaux quartiers résidentiels Assayé et Plateau, elles sont de meilleures qualités.

L'ouverture de la mine de Bonikro en 2007 a entrainé des vagues de populations venant de tout le pays et même des pays voisins. Cet afflux de population se dirige pour la plupart vers la ville de Hiré. L'estimation en 2010 de la population totale de la sous-préfecture de Hiré, sur la base des données du recensement de 1998 et d'une croissance démographique annuelle moyenne de 3%, permet de chiffrer celle-ci à 48 231 habitants, dont 25 580 habitants pour la ville de Hiré. Soit, un peu plus de la moitié de la population de la sous-préfecture en 2010, vivait en ville. A partir des recensements de 1998 et 2014, la croissance démographique est plus accentuée dans

139

la ville de Hiré. Cette population a pratiquement doublé entre les deux recensements (voir tableau 11).

La figure 23 montre la dynamique démographique entre les recensements de 1998 et 2014. A vue d'oeil, l'importance de la croissance démographique dans la ville de Hiré est perceptible.

Derruau (1998) nous rappelle que la population citadine varie par accroissement naturel et par migration. Cependant, c'est surtout par excédent d'immigration que la population d'une ville augmente car la croissance industrielle et commerciale y multiplie la création d'emplois.

140

Figure 23 : carte d'évolution de la population de Hiré entre 1998 et 2014

Source : nos enquêtes, 2016

141

L'afflux de population dans la ville de Hiré se justifie par les opportunités d'emploi et d'affaires qu'elle offre à la mine dans l'orpaillage et dans les activités connexes. En effet, Hiré ville est le lieu de résidence de la plupart des travailleurs de NEWCREST car elle offre des possibilités de logement plus importantes que les villages. C'est dans la ville de Hiré que la cité dortoir des cadres de la mine a été édifiée. Les sites d'orpaillages se concentrent à la périphérie de la ville de Hiré. On observe un mouvement pendulaire journalier des orpailleurs de la ville de Hiré vers les différents sites comme c'est le cas des femmes du site de Bouakako.

Tableau 11 : répartition de la population de la sous-préfecture de Hiré par localité en 1998 et

2014

 

Nombre d'habitants selon l'année

Localités

1998

2014

Bouakako

1272

1233

Douaville

1811

2780

Gogobro

3452

4355

Hiré

17941

31960

Kagbè

7945

8560

Zaroko

1407

1469

Source : INS, 2014

Le tableau montre l'évolution de la population de la sous-préfecture de Hiré selon la localité. On observe une concentration de la population dans la ville de Hiré depuis 1998. La ville de Hiré abrite près de deux tiers de la population sous-préfectorale de Hiré. A la suite de la ville, les villages démographiquement importants sont Kagbè et Gogobro. Le tableau ci-dessous présente l'évolution de la population de la ville de Hiré depuis le recensement de 1965 jusqu'à celui de 2014.

Tableau 12 : Evolution de la population de la ville de Hiré de 1965 à 2014

Années

1965

1975

1980

1988

1993

2010

2014

Effectifs

4 500

10 000

13 700

14 551

16 704

25 580

31 960

(Source : INS, 2014, RGPH et estimations)

Ce tableau présente l'effectif de la population urbaine de Hiré à différentes dates. Il ressort de son analyse que cette population connait de façon globale une croissance. Toutefois, trois phases sont à distinguer dans cette croissance. De 1965 à 1975, la population urbaine de Hiré double, passant de 4 500 habitants à 10 000 habitants. Cette croissance se justifie par l'arrivée massive d'allogènes venus pour la pratique de l'économie de plantation. Entre 1975 et 1993, la

142

population croit timidement passant en 18 ans de 10 000 habitants à 16 704 habitants. Puis entre 1993 et 2014, la population passe de 16 704 à 31 960 habitants. Cette croissance est stimulée par l'exploitation aurifère qui a attiré dans la ville de Hiré de nombreuses personnes venues aussi bien des localités de la sous-préfecture que d'ailleurs.

4.4.2 La dynamique spatiale de la ville de Hiré

La croissance démographique observée dans la ville de Hiré s'accompagne d'une croissance spatiale de celle-ci (voir figure 24). Le besoin de logements de ces populations a entrainé l'étalement de la ville. Selon Pages (1980), la généralisation de la maison individuelle sur des parcelles de quelques centaines de mètres carrés aboutit à une extension en surface considérable de l'espace urbanisé. Cette dynamique spatiale de la ville de Hiré traduit surtout l'étalement des zones périphériques, avec une multiplication et une concentration du bâti dans les quartiers enclavés. Cependant, l'extension du quartier Baoulé est quelque peu freiné par la fosse satellite de Hiré située à quelques encablures de celui-ci.

Figure 24: Évolution de l'emprise spatiale de la ville de Hiré

1854

2000

1800

1420

1600

Superficies (ha)

1400

1165

1200

820

1000

800

600

400

200

0

1983 1990 2000 2017

Années

Superficies...

Source : service technique de la mairie de Hiré 2017

L'emprise spatiale de la ville de Hiré connait une évolution générale de 1983 à 2017. La superficie de la ville de Hiré est passée de 820 ha à 1 165 ha entre 1983 et 1990. De 1990 à 2000, la superficie de Hiré passe de 1 165 ha à 1 420 et de 1 420 à 1 854 ha entre 2000 et 2017.

La faible extension de la ville dans la décennie 1990-2000 se justifie par les problèmes liés à l'approvisionnement en eau de celle-ci. Jusqu'en 1992, la ville de Hiré ne disposait pas d'un système d'approvisionnement en eau potable. Cependant, l'occupation des zones loties s'est fait de manière régulière avec un taux d'urbanisation de 1,2%. Avec l'ouverture de la mine,

143

cette croissance urbaine s'est vue booster par l'installation dans la ville de Hiré de l'essentiel des migrants et des paysans en exode rural.

La dynamique spatiale à Hiré s'observe également au niveau des constructions de logement pour les populations des hameaux déplacés par la mine. Ce sont en effet, des habitations de type moderne totalement différentes de celles qui étaient sur les anciens sites. Les hameaux de Bonikro, Bandamakro et Koutouklou-Konankro sont les localités qui ont bénéficié de ces habitats. Même si les populations se plaignent de certaines incorrections, elles reconnaissent pour beaucoup que ces constructions sont de type moderne et de qualité. Le nouveau site de Koutouklou-Konankro est situé à environ 100 mètre de la ville de Hiré, cela en fait un presque village urbain ce qui contribue à son attractivité.

La loi de l'offre et de la demande aidant, l'immobilier est devenue le principal secteur d'investissement des populations. La croissance démographique observée à Hiré a fortement contribué à l'extension de la ville avec des constructions de plus en plus modernes.

Le quartier d'habitat résidentiel (haut et moyen standing) est situé dans le secteur Sud-Est de la ville. Il est en quelque sorte la cité administrative de la ville car il abrite l'essentiel des services administratifs publics comme : le trésor, la Compagnie Ivoirienne d'Électricité (CIE), l'Institution de Formation et d'Education Féminine (IFEF), la mairie, la sous-préfecture. Les quartiers d'habitat évolutif et les quartiers d'habitat péri-urbain sont dispersés dans le reste de l'agglomération urbaine.

4.4.3 Des constructions de plus en plus améliorées

Outre l'étalement de la ville, la croissance urbaine de Hiré se traduit également par la modernisation des constructions. L'augmentation des demandes en logement du personnel de la mine, des orpailleurs et des autres migrants à Hiré, a entrainé une prolifération des constructions. Les exigences des nouveaux demandeurs ont également contribué à l'amélioration des constructions.

Tandis que dans les quartiers anciens comme Djoulabougou, Baoulé, Dida et Gnakankro, les constructions sont en grande partie en Banco crépis de ciment, dans les nouveaux quartiers résidentiels, Assayé et Plateau, elles sont de meilleure qualité et généralement en parpaing et bâties sur des parcelles de 300 à 600 m2.

144

Tableau 13 : Caractéristiques de l'habitat à Hiré

Matériaux de
couverture

Proportions (%)

Parpaing

42

Banco amélioré

10

Banco simple

7

Couverture tôle

39

Couverture papaux

2

Source : nos enquêtes de terrain, 2017

On trouve de plus en plus de maisons qui offrent toutes les commodités. Les nouvelles maisons ont des sols revêtus de carreaux, avec des cours et des toilettes individuelles. Les anciennes constructions ont également été remises au goût du jour. Les cours communes sont plus spacieuses avec des toits plus hauts. Cela a une incidence sur les prix pratiqués qui ont connu une véritable explosion. Les maisons d'une pièce communément appelée « entrer-coucher », étaient louées à 10 000-12 000 F CFA. Aujourd'hui, la tendance est plus à la construction de studios dont les prix varient entre 20 000 et 25 000 F CFA. Les deux pièces sont passées de 20 000-25 000 F CFA à 30 000-35 000 F CFA voire même 40 000 F CFA. La modernisation de l'habitat s'est accompagnée de l'installation de plusieurs équipements collectifs.

4.4.4. Typologie des espaces habités

La typologie des espaces habités permet d'établir une différenciation des quartiers (figure 25). La ville de Hiré compte dix quartiers comme présenté sur la figure 26 : le résidentiel, Hiré Dida, Hiré Baoulé, Gnankankro, Dioulabougou, Plateau, Assayé 1 et Assayé 2.

145

Figure 25: organisation spatiale de la ville de Hiré en 2016

Le quartier d'habitat résidentiel (haut et moyen standing) est situé dans le secteur Sud-Est de la ville. Il est en quelque sorte la cité administrative de la ville car il abrite l'essentiel des services administratifs publics comme : le trésor, la Compagnie d'Electricité Ivoirienne (CEI), l'Institution de Formation et d'Education Féminine (IFEF), la mairie, la sous-préfecture. Les quartiers d'habitat évolutif et les quartiers d'habitat péri-urbain sont dispersés dans le reste de l'agglomération urbaine.

146

Tableau 14 : Classification des quartiers de la ville de Hiré selon la position et le standing

Quartiers

Standing

Position dans la ville

Centrale Plateau

Evolutif

Périphérique

Djoulabougou

Economique

Centrique

Hiré Baoulé

Evolutif

Périphérique

Commerce

Economique

Centrique

Gnakankro

Economique

Centrique

Gnakankro extension

Evolutif

Périphérique

Assayè 1

Evolutif

Périphérique

Assayè 2

Evolutif

Périphérique

Hiré Dida

Evolutif

Périphérique

Résidentiel

Haut standing

Périphérique

Source : nos enquêtes, 2016

La population de la ville de Hiré est inégalement répartie suivant l'espace et la typologie des quartiers. Le quartier Hiré-dida était un village Dida créé par les populations de Gogobro fuyant les guerres de voisinage. Le quartier Baoulé est celui qui a abrité les premiers migrants Baoulé à Hiré, installés ici par les populations de Bouakako. Au fur et à mesure des flux migratoires à cause de l'importance économique de la ville, les autres quartiers ont été créés jusqu'à obtenir la configuration actuelle.

La densité de l'espace est de 127 habitants/km2 pour une consommation d'espace de 150 m2/habitants.

En effet, du point de vue de la localisation, 53,04% de la population se concentrent au niveau de la couronne centrale contre 46,96% à la périphérie.

Cette situation s'explique par le fait que le centre étant le noyau de la ville, il a bénéficié des premiers équipements et constructions. Cela a favorisé une forte concentration humaine en ce lieu. La périphérie étant une zone d'extension, elle abrite les nouvelles constructions occupées généralement par les allogènes nouvellement installés à Hiré.

147

Figure 26: répartition des types d'habitat dans la ville de Hiré

Source : INS, 2014

Selon le RGPH de 2014, à Hiré plus deux logements sur cinq sont une concession (47%) connue sous le vocable de "cour commune". La villa moderne n'occupe que la troisième place, avec 10%, après les maisons simples 32%.

Il nous a été donné de constater au cours de nos enquêtes de terrain de constater que quel que soit la typologie de quartiers, la concession et la maison simple demeurent les deux types de construction prédominants. Nous avons trois ménages sur six dans les concessions et deux ménages sur six dans les maisons simples. Les maisons en bande et les cases traditionnelles accueillent très peu de ménages. Les villas modernes sont plus présentes dans le quartier résidentiel et dans certains quartiers péri-urbains.

4.4.5. Le niveau de services et d'équipement de la ville de Hiré

Depuis l'ouverture de l'activité minière industrielle à Hiré, on observe un déploiement des services administratifs publics et privés. Avant l'arrivée de la mine, la sous-préfecture de Hiré jouissait d'une faible représentation des structures administratives. Depuis lors, divers services administratifs s'y sont installés. La dynamique économique que connait la ville de Hiré depuis l'ouverture de la mine a attiré les structures financières comme la BIAO. On trouve également à Hiré un bureau de la COOPEC. Les équipements se définissent comme des espaces réservés

148

ou concédés à des fonctions d'intérêt public. Ces équipements et infrastructures qui contribuent au bon fonctionnement de la ville Hiré sont de nature diverse.

4.4.5.1 Les Infrastructures de base

Hiré est traversée par la route nationale qui part d'Abidjan, traverse Divo et Hiré puis se prolonge vers Oumé et Gagnoa. Les voies à l'intérieur de la ville ne sont pas bitumées. Hiré est doté de l'éclairage public qui éclaire la ville et ses quartiers. Les six villages de la sous-préfecture sont aussi fournis en électricité. Du point de vue de l'eau courante, la SODECI de Hiré éprouve d'énormes difficultés à approvisionner les ménages de la ville si bien qu'il y a des coupures intempestives d'eau qui peuvent durer des mois. Cette situation explique d'ailleurs le recours des populations à l'eau de puits dans la plupart des ménages de la ville.

4.4.5.2. Les équipements scolaires et éducatifs

La ville de Hiré abrite une inspection de l'enseignement primaire et préscolaire (IEPP) créées pour surveiller l'appareillage éducatif composé d'écoles publiques et privées reparties dans différents quartiers.

Tableau 15 : répartition des établissements primaires dans la ville de Hiré

Quartiers

Dénominations des écoles

Statut

Nombres
d'écoles

Nombre de classes

Dida

Groupe scolaire Dida

Public

4

24

Commerce

EPV Catholique

Privé

1

7

Gnakankro

Groupe scolaire Gnakankro

Public

6

31

Assayé

Groupe scolaire Assayé

Privé

4

18

Groupe scolaire Stade

Public

4

19

Plateau

Groupe scolaire centrale

Public

4

24

Résidentiel

Ecole Méthodiste

Privé

1

6

Total

24

129

Source : Inspection de l'enseignement primaire, 2015

Le collège municipal a été agrandi puis transformé en lycée municipal du fait de l'importance de l'effectif et de la nécessité d'un lycée dans la ville. Les collèges privés Amitié et MUPES permettent à la ville de compter trois établissements secondaires.

4.4.5.3. Les équipements socio-culturels

Au niveau des équipements socio-culturels, Hiré dispose d'un espace communautaire construit par la compagnie minière, d'un terrain municipal, d'un institut de formation et d'éducation féminine et d'une salle des fêtes à l'intérieur de la mairie.

149

Au niveau des équipements religieux, Hiré dispose d'une grande mosquée située au marché de la ville et de plusieurs petites mosquées dissimulées dans la ville. On trouve aussi à Hiré, une mission Catholique, une mission Protestante Méthodiste et deux temples des Assemblées de Dieu. Plusieurs temples aux appellations diverses sont répandus à travers la ville (Baptiste oeuvre et missions, Christianisme céleste, Eglise Unie de Pentecôtes, CMA, etc...).

4.4.5.4. Les équipements hôteliers

En matière d'équipement hôtelier, la ville de Hiré n'est pas très nantie. Cependant, on y trouve quelques hôtels de standing acceptable dont le plus prestigieux est l'hôtel « Gold Hotel » que présente la photo ci-dessous. Ces établissements satisfont la demande qui n'est pas très élevée en la matière du fait de la distance pas trop importante (45 km) qui sépare Hiré de Divo. Les potentiels clients préfèrent souvent passer la nuit à Divo qui offre des possibilités plus commodes.

 

GOLD HOTEL, un des prestigieux hôtels de Hiré.

Auteur photo : YOBO, 2015

Photo 16: Hôtel de luxe de Hiré

 

4.4.5.5. Les équipements économiques

Hiré dispose d'un équipement économique public, le trésor, et de deux équipements économiques privés que sont la NSIA Banque et la COOPEC. LA BIAO devenue la NSIA Banque. Depuis 2016, une agence remplace le guichet automatique d'autrefois (photo 17).

 

Une agence de la BIAO nouvellement (NSIA) ouverte en 2015.

150

Auteur photo : YOBO, 2015

Photo 17: La succursale bancaire BIAO-CI

Du fait de la dynamique économique que connait le secteur du transport, des stations-services ont ouvert dans la sous-préfecture de Hiré. Sur les quatre stations existantes, deux sont encore en service (voir photo 18).

 

Le supermarché CDCI est situé dans le quartier résidentiel de la ville de Hiré, zone de grande consommation de ce type de produit.

Auteur photo : YOBO, 2015

Photo 18: station-service Essenci

 

151

Les besoins des produits manufacturés des travailleurs et agents des services publics et privés sont satisfaits par les grandes boutiques, mini-market et supermarchés de la ville. Le plus important d'entre eux est le supermarché CDCI que présente la photo ci-dessous.

 

La station ESSENCI située sur la route nationale reliant Hiré à Oumé.

Auteur photo : YOBO, 2016

Photo 19: un des super marchés de la ville de Hiré

 

4.4.5.6. Les équipements de sécurité

Hiré est dotée d'une brigade de gendarmerie et d'un commissariat de police. Ces services sont chargés de la sécurité des personnes et des biens dans toute la sous-préfecture. Avec la croissance démographique et l'activité de l'or notamment de l'orpaillage, Hiré connait une ascendance de l'insécurité et des infractions diverses comme les vols, les viols, les assassinats, etc. Aussi la présence de ces services est-elle d'une utilité capitale afin d'assurer aux populations un cadre de vie paisible. Des renforts viennent parfois de Divo, chef-lieu de département et de région quand le besoin se fait sentir.

4.4.5.7. Les équipements administratifs

La ville de Hiré dispose de plusieurs services publics. On y trouve la sous-préfecture, la mairie, un bureau de la direction régionale de l'agriculture, un bureau de L'ANADER, un bureau des eaux et forêts en raison de la forêt classée de la Sangoué. On trouve également à Hiré un bureau de la CET.

152

L'administration publique est très bien représentée dans la ville de Hiré. Ce sont des services dont la présence est antérieure à l'exploitation industrielle de l'or. Toutefois, la dynamique économique que connait Hiré depuis le début de cette activité y a favorisé l'accroissement des capacités des services existants et l'ouverture de nouveaux services (tableau 16).

Tableau 16 : quelques structures présentes dans la commune de Hiré

Structures

Quartiers

Services

Responsables

Date

d'installation

Economie et des finances

Résidentiel

Trésor public

Directeur

2004

Sécurité intérieure
et décentralisation

Sous-préfecture

Sous-préfet

1977

Mairie

Maire

1985

Commissariat de
police

Commissaire

2005

Dida

Brigade de
gendarmerie

Commandant de
brigade

 

Education nationale

Assayé 1

IEPP

Inspecteur

1998

Agriculture et
développement durable

Dida

Antenne de
l'agriculture

Directeur

1992

Eaux et forêt

Dida

Compagnie

Chef de
compagnie

1953

Source : IEPP, 2016

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