CHAPITRE IV. CULTURE SOUS PLUIE
La méthode traditionnelle de culture sous pluie, telle
qu'on la trouve PARTOUT AU MONDE, est appliquée selon la pente en la
remontant et en la descendant (voir figure 22 ). Ce
système encourage à la fois le ruissellement et la perte de sol
et aggrave ainsi l'érosion en nappe. Souvent plus de 50 pourcent des
eaux de pluies sont perdues du fait des ruissellements et donc les cultures en
sont privées.13 Plus la pente est raide et plus le
ruissellement est rapide et davantage érosif. L'utilisation des eaux de
pluie est donc moindre car l'eau n'a pas l'occasion de pouvoir s'infiltrer sur
le champ. En labourant le long de la pente, le paysan, comme le montre la
figure 22, encourage sans le savoir les eaux de pluie à
quitter son champ.

Figure 22.
La figure 23 illustre la méthode de
l'utilisation des haies végétales suivant les courbes
à niveaux pour empêcher l'érosion et conserver
l'humidité naturelle dans le sol. Une fois ces haies fixées,
elles n'auront plus besoin d'entretien et protégeront la terre de
l'érosion pendant des années du fait
13John GREENFIELD, vetiver a HEDGE AGAINT
érosion, Banque mondiale P.8
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qu'elles créent des terrasses naturellement aussi
longtemps qu'il y a de l'érosion. Contrairement aux sellons de
plantation présentés à la figure 22, ceux
que l'on trouve au niveau A dans la figure 23
suivent les courbes du champ comme indiqué par les haies
végétales (B).

g
Figure 23.

Figure 24.
14Idem,
La construction d'une diguette ou monticules suivant la courbe
à niveau a ralenti l'érosion dans le monde entier depuis les
années 1930.14 Cependant cette méthode de conservation
de la terre crée un système non naturel de drainage et n'est plus
considérée comme étant appropriée pour les petits
exploitants. La diguette dans la figure 24 a été
construite avec de la terre arable prise du point A, qui de ce
fait fut transformée en un canal pour évacuer latéralement
les eaux de ruissellement (illustration du haut). Cependant la
diguette est faite à partir du même sol qu'elle est
supposée protéger et étant donné que la
construction rend la pente plus raide, la diguette risque à la longue de
s'éroder et fondre (illustration du bas). Par
conséquent elle devra être refaite à un coût
élevé en main d'oeuvre par le paysan. En outre, afin de collecter
suffisamment de sol pour construire la digue et la rigole se trouvant dans la
figure 24, une bande de deux mètres de large devra
être retirée de la production sur toute l'étendue de la
digue. Cela représente une perte considérable de terre
agricole.
15Idem, P.12
Page | 45
La figure 25 montre la méthode non naturelle de
drainage des eaux de pluie du sol par ce système. Tout le ruissellement
est conduit sur les côtés, créant un cours d'eau qui
devient des petits ravins et qu'aucun exploitant ou exploitante ne voudrait
voir couler dans son parcelle. Ce système rend les zones en dessous des
haies trop sèches et les environs de la rigole trop humides pour
atteindre un rendement agricole optimal15.

Figure 25.
La méthode végétative de
conservation des sols et d'une rétention hydrique, par contre, utilise
la nature pour se protéger elle-même. Dans le système que
nous démontrons dans ce manuel à l'aide du Vetiver
(Chrysopogon zizanioides), avant nommé Vetiveria
zizanioides), une bande de cinquante centimètres seulement c'est
à dire un tiers de la terre occupée par les diguettes ou les
monticules est retirée de la production (Figure 26, illustration du
haut). Du fait que les divisions racinaires des plantes ou boutures sont
plantées sur un seul sillon creusé, très peu de sols sont
perturbés. Alors que les diguettes doivent être
réalisées à la main (ou peutêtre avec tracteur), le
système végétatif n'exige aucun outil ou main-
16Idem, P.14 17Idem, P.14
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d'oeuvre spécifiques autres que ceux que possède
déjà l'exploitant16.
L'illustration du bas de la figure 26 montre
ce qui arrivera à la longue dans un système
végétatif : en haut, le vetiver au temps de la plantation ; en
bas, une ligne/ haie de vetiver coupée en transversal après 12
années de croissance. L'écoulement dépose sa charge de sol
arable piégé par les feuilles raides qui laisse l'eau couler,
tout en la ralentissant, et en créant une terrasse naturelle, permettant
une bonne récolte' et une infiltration des eaux de pluie. La profondeur
et la masse de la racine de vetiver (pivotante) aide à une meilleur
rétention hydrique de la zone protéger (que ce soit une berge de
rivière ou une zone de protection. Dans ces cas, la
végétation ou la plantation en bénéficierons. La
terrasse devient une caractéristique permanente du paysage,
c'estàdire une barrière permanente qui restera efficace pendant
des décennies voire même des siècles17.
Lorsque l'écoulement atteint les haies
végétales, il ralentit, se répand, dépose sa charge
limoneuse et passe plus lentement
à travers les rangées de haies. Et en chemin une
grande partie de l'eau s'infiltre dans la terre, la permettant une meilleur
rétention hydrique. (Figure 27).
Aucune perte de sol n'est enregistrée et il n'y a pas
de perte d'eau provoquée par la concentration d'écoulement dans
des zones particulières. Le système ne demande aucune technique
agricole poussée, les exploitants peuvent accomplir tout le travail par
leurs propres moyens. Beaucoup de paysans entourent une partie de leurs
périmètres agricoles de plants de vétiver. Très
souvent, les plants de vétiver sont plantés le long d'un
côté mais vertical à la pente. Ils seraient plus utile
horizontal à la pente, où ils retiendraient les sols arables et
réduiraient les ruissellements dans les parcelles du voisin en
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sous. Pour préserver l'étroitesse des
haies, les paysans labourent simplement le long des lignes de vetiver. Les
haies resteront en très bon état et donneraient une protection
permanente contre l'érosion.
Figure 26.

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IV.1. Les haies de contours végétales
La figure 28 présente une section transversale
d'une haie végétale perpendiculaire à la pente. Les
feuilles et les tiges du Vetiver ralentissent l'écoulement à
charge de terre arable au niveau A et les faites déposer devant la
plante au niveau B tandis que l'eau de pluie est ralenti par la masse des
feuilles en descendant la pente. Le système racinaire spongieux de la
plante illustré au niveau D fixe les couches de sol jusqu'à une
profondeur atteignant 23 mètres. La haie a démarrée avec
une plantule au niveau du piquet blanc.
En formant un dense rideau souterrain qui longe la
courbe à niveau du terrain, les racines empêchent les formations
de ruisselets, de rigoles et les effets tunnels. La forte huile aromatique
qu'elles contiennent rende l'herbe insipide auprès des rongeurs et
autres insectes (anti nématodes, anti termites et antibactérien);
aussi selon un certain nombre de paysans indiens elles empêchent la
nidification des rats dans la zone. Du fait que le dense système
racinaire repousse les rhizomes des herbes sauvage, les rangées de haies
les empêchent d'entrer dans le champ. Selon certain paysans en Inde, les
feuilles coupantes et raides de la plante éloignent également les
serpents. Ceci est à confirmer en Haïti18.
18PIERRE ROGER et VINCENT JACQ, introduction
à la bio remédiation de sols, des eaux, et de l'air,
Université de province AIY-MARSEILLE 1 Décembre 2000, P.12
Page | 49

Figure 28.
Pour être efficace en tant que méthode de
conservation des sols, le système végétatif doit former
une haie comme le présente la figure 29. Bien que dans certaines
circonstances des haies épaisses peuvent être formées en
une année si elles sont plantées juste avant les pluies, il faut
compter généralement deux à trois saisons d'exploitation
pour établir une haie bien dense pour résister aux pluies
torrentielles et protéger le sol. Durant les deux premières
saisons et parfois la troisième, les plantes ont besoin d'un certain
entretien (désherbage, taillage) et chaque espace au-delà de 10cm
dans les rangées doit être comblé avec de nouvelles
plantes. (Durant les deux premières saisons l'on devrait voir facilement
le limon piégé en amont des plantes, un phénomène
que les encadreurs devraient faire remarquer au moment d'expliquer le
système aux paysans)19. Bien que les monticules
utilisés dans la méthode conventionnelle de conservation des sols
soient efficaces dans l'immédiat, ils se brisent avec le temps et
s'effondrent fréquemment pendant des violentes averses. Une fois la haie
fixée, le monticule reste stable et ne requiert aucun entretien
supplémentaire si ce n'est un élagage au moins une fois par
an.
19CELESTIN NIKIANA, Biotechnologie de l'environnement,
L2 DECO, ISG-KINSHASA 2019-2020

Figure 29.
P a g e | 50
L'élagage des haies à une hauteur de 30 à
50cm les empêche de monter en graine, les rend plus épaisses et
par conséquent augmente leur efficacité dans le filtrage de
l'écoulement. Dans certains villages, les paysans taillent leurs haies
de Vetiver toutes les deux semaines et nourrissent leur bétail avec des
jeunes feuilles sapides. Par conséquent ils sont assurés d'avoir
des provisions fourragères presque tout au long de l'année.
Haie bien établie et entretenue d'1 1/2 an
Il faut ajouter des plants là où il y a des trous
(haie de mois)
|
|
P a g e | 51
Il est possible que beaucoup d'encadreurs ne
comprennent pas exactement ce que l'on entend par courbe à niveau».
La figure 30 illustre un malentendu comme quoi un sillon creusé le long
d'une «pente principale» suit actuellement la courbe à niveau.
Malheureusement ce n'est pas le cas. Une vraie courbe à niveau doit
englober toutes les pentes, majeures ou mineures, il s'agit d'une ligne
égale d'élévation autour d'une colline. Les sillons dans
la figure 30, qui à partir du point A suivent la pente principale
jusqu'au point C au lieu de former une courbe autour de la colline, ne sont pas
sur la colline et par conséquent ne conserveront pas l'humidité
ni n'empêcheront l'érosion.
Saut d'Eau : Protection d'un
ravin
P a g e | 52

Figure 30.

Figure 31.
Le véritable contour illustré dans la
figure 31va de A à B puis à D et continue autour de la colline
tout en maintenant une élévation égale tout au long du
chemin. On retrouve une bonne courbe à niveau pour l'installation du
vetiver pour la protection d'un talus; zone du Bassin Magnan aux
Gonaïves20.
20Idem
P a g e | 53
Grâce à ses haies de Vetiver suivant la courbe
à niveau et donc perpendiculaire à la pente, le paysan A obtient
d'excellentes récoltes (Figure 32). Étant
donné que le sol a retenu suffisamment d'humidité provenant des
pluies antérieures, ses récoltes profitent du fort
ensoleillement; toutes les graines se développent et les cultures
affichent une croissance. Ce paysan A obtiendra des rendements
élevés.
Le paysan B (Figure 33) est
un bon paysan mais il n'exerce pas son métier avec sagesse. En labourant
du bas vers le haut, parallèle à la pente, il encourage les eaux
de pluie à s'écouler en dehors de son champ en emportant le
fumier et une couche irremplaçable de terre. Les eaux de pluie
s'écoulent si vite qu'elles ne s'infiltrent pas dans le sol. Par
conséquence, ses récoltes ne sont pas protégées
pendant les périodes sèches. Il n'utilise pas des haies de
Vetiver et obtient une récolte décevante (Figure
33). Sa récolte n'a pas totalement échoué mais
les quelques endroits restants où il y avait des flaques d'eau sont en
phase d'assèchement à cause du soleil. Seul un faible pourcentage
de graines se développera avec comme conséquence des
résultats inégaux.
Le paysan B ne peut espérer qu'un
faible rendement. Pourtant il avait planté les mêmes semences que
le paysan A, avait utilisé les mêmes engrais,
avait semé en même temps et ils ont eu les mêmes
quantités de pluie et de soleil. Cependant, contrairement à son
voisin, le paysan B a perdu la majeure partie de ses engrais
de même que 60% d'eau de pluie et une couche superficielle mesurant
probablement un centimètre d'épaisseur. Tout cela du fait qu'il
n'avait pas labouré suivant la courbe et n'avait pas utilisé les
haies végétales pour se protéger contre l'érosion
et retenir l'humidité provenant de la pluie.
Figure 32.
P a g e | 54

14
Figure 33.
15
P a g e | 55
Il convient àcet effet de chercher à stabiliser
les rigoles et des ravins pour avoir un bon rendement au moyen de la culture de
vétiver.
P a g e | 56
CHAPITRE V. STABILISATION DES RIGOLES ET DES
RAVINS
Une autre solution aux problèmes d'érosions
s'applique en zones de friche, où les terres manquent de
végétation et les pluies imprévisibles créent des
rigoles provenant de plusieurs directions. La Figure 34montre
la protection appropriée en établissant des haies
végétales pas seulement dans les rigoles mais en montant et
descendant des deux côtés, et sur plusieurs mètres. La
même technique est utilisée pour des ravins en formation ou en
états avancés. Les haies de Vétiver ont l'avantage, dans
des conditions extrêmes et permanentes d'incendie et de
sécheresse, de résister et de survivre. Elles recueillent les
bienfaits des surplus d'écoulement et récolte la matière
organique au moment de filtrer les eaux de ruissellement à travers ses
haies.

Figure 34.
Notons qu'un bouchon/petit barrage en maçonnerie au
bout du système permet au limon de se consolider et de fournir au
Vétiver une base de fixation (Figure 34). Le même
procédé s'appliquerait aux ravins normaux comme le montre la
figure 35. Une fois fixée, les haies créeront
les ravins en terrasses ().
P a g e | 57

Figure 35.
4M1M Protection des infrastructures
21Idem
22www.vetiver.org
P a g e | 58
Pour la protection des infrastructures rurales
(pistes, bassins, canaux d'évacuation, radiers et passages à
niveau), le Système Vétiver est utilisé suivant les
règles d'art de la phyto ingénierie. Ce ne sont pas seulement des
lignes suivant des courbes à niveaux, mais aussi un mélange
d'application des plantes pour stabiliser des gabions, des ouvrages en
béton ou en terre telle que des canaux d'irrigation, et pour
réorienter et évacuer des cours d'eau le long des
pistes21.
Aux Caraïbes, la plante est utilisée pour
la stabilisation des accotements et depuis des années elle a
réussi à arrêter l'érosion. L'application pour la
protection des infrastructures est démontrée par la figure 36.
Non seulement il y a lieu de protéger les talus de glissement sur la
piste, mais la chaussée doit pouvoir être à même
d'évacuer les eaux de pluies de la partie intérieure d'un
tournant par des « saignants » qui orientent l'eau vers des drains
internes (A) au bas du talus et par une haie qui est plantée à 25
cm de la chaussée avec des saignants qui font évacuer les eaux de
pluie sur le côté externe de la piste (B). La protection des
tournants de pistes que l'on retrouve dans les zones rurales montagneuses est
parmi le défi le plus compliqué à résoudre; une
technique telle que celle proposée ici n'est pas nécessairement
applicable partout; chaque cas demande une observation et une solution
individuelle. Les solutions sont basées sur: a) la proximité de
ravins du côté interne de la piste qui peut servir comme exutoires
au ruissellement, b) le degré de la pente, c) l'espace disponible sur le
côté externe, et d) la proximité de champs ou habitations
en dessous de la piste avant de pouvoir justifier de mettre des saignants
dirigés de ce même coté22.
P a g e | 59
L'utilisation du Vétiver pour stabiliser les
accotements de ponts et de canaux d'irrigation est une autre pratique
recommandée. Lors d'une expérimentation en Tanzanie, sur la route
de Dodoma, un ingénieur des travaux routiers avait utilisé du
Vétiver pour protéger le mur en aile d'un pont d'un
côté du fleuve et avait construit le mur bajoyer habituel en
béton de l'autre ().

Figure 36.
Trente à quarante années plus tard, le mur en
béton s'était effondré dans le fleuve et la berge qu'il
protégeait s'était érodé. De l'autre
côté, le Vétiver retenait toujours à perfection
P a g e | 60
la berge comme le montre la figure 37. La photo
démontre l'application des deux accotements d'un pont routier.

P a g e | 61
Figure 37.
P a g e | 62
La figure 38 montre comment le Vétiver
peut être utilisé pour protéger les rives d'un canal
d'irrigation principale.
Les canaux d'irrigation de contour sur colline,
destinés à amener l'eau du canal principal aux destinataires se
remplissent fréquemment par un envasement et une érosion. Le
problème type est illustré dans la partie supérieure de la
figure 39: le conduit en béton est entaillé par
l'érosion au point A et s'emplit de limon au point B.
Pour réduire ces problèmes, le Vétiver
est planté parallèlement aux côtés supérieur
et inférieur du conduit, qu'il soit bétonné ou en terre.
Comme le montre la figure du bas, la haie supérieure empêchera le
limon d'arriver dans le canal tandis que les haies inférieures
empêcheront l'érosion et éviteront ainsi à la
structure d'être minée par les ruisselets ou les rigoles.
P a g e | 63
Figure 38. Canaux d'irrigation principale en terre

Figure 39. Canaux d'irrigation en dur sur collines

P a g e | 64
Une approche similaire peut être entreprise pour
protéger les barrages. Les micros barrages s'envasent à un rythme
alarmant à travers le monde. Une fois envasés, ils ne sont plus
d'aucune utilité - et dans la plupart des cas il n'y a plus d'autre site
approprié pour accueillir un nouveau barrage. En plantant du
Vétiver autour des abords du barrage comme le montre l'illustration en
haut de la figure 40, le limon transporté par
l'écoulement provenant des collines environnantes sera
piégé avant d'atteindre le barrage. Et les haies de
Vétiver plantées à travers les voies d'arrivée (A)
des micros barrages sur les rivières intermittentes protégeront
les barrages de l'enlisement. Avec le temps ces haies formeront des terrasses
stables qui pourront servir pour les cultures ou pour l'arboriculture. Dans
l'illustration du bas, le Vétiver a été planté en
parallèle des murs d'un barrage afin de les protéger contre
l'érosion en ruisselets, un problème qui affecte un grand nombre
de barrages en terre non protégés à travers le monde. Afin
de détecter facilement les infiltrations le long des soubassements des
murs des barrages et des digues des canaux, le Vétiver est planté
dans ces régions-là.

P a g e | 65
340
Figure 40.


Le vetiver étant une essence exceptionnelle
paraît a juste titre important dans la lutte contre la
déforestation et présente un atout majeur dans
l'agroforesterie.
P a g e | 66
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