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Les territoires de mobilité pastorale: Quelle mobilité dans un contexte de pression sur le territoire rural en zone soudano-sahélienne du Nord-Cameroun?


par Natali KOSSOUMNA LIBAA
Université Paul Valéry Montpellier III France - Habilitation à Diriger des Recherches 2014
  

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I.3.4.2. Des aires protégées sous la pression des agriculteurs migrants autochtones

L'afflux massif des migrants de l'Extrême-Nord du Cameroun, ajouté aux autochtones, vient compliquer la gestion des aires protégées. Il va sans dire que le problème migratoire dans le Nord n'a été que très partiellement résolu. Il entraîne dans la région une incompréhension culturelle qui complique la gestion des zones protégées. Les migrants ont en effet du mal à comprendre les règles du jeu (passage des animaux sauvages, pistes à bétail, limites des aires protégées...), par manque de « conscience » écologique disent les initiateurs de projets (PDOB, 2003), ce qui entraîne des conflits avec les gardes-chasses. Les agissements des migrants sur le terrain montrent bien qu'on a fait émigrer des gens de l'Extrême-Nord vers le Nord sans qu'ils soient au préalable mis au courant du fonctionnement des sociétés avec lesquelles ils vont cohabiter. Deux faits importants peuvent expliquer cette situation : l'inexistence de schéma directeur d'encadrement des récents flux migratoires depuis la fin du Projet Nord-Est Bénoué (NEB) et le rôle ambigu des chefs traditionnels qui souvent favorisent l'installation des migrants au détriment de tout souci de conservation. Il s'en suit une forte augmentation de l'emprise agricole (pour le coton

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essentiellement et par voie de conséquence pour les cultures vivrières), ce qui accroît les défrichements et crée des perturbations pour la faune sauvage (Ndamé, 2007). On assiste ainsi à une occupation régulière et une transformation en champs des espaces supposés protégés. Les populations acceptent de plus en plus mal la présence d'aires protégées qui leur paraissent « vides », raison pour laquelle, malgré les interdictions et les appels à la négociation par les pouvoirs publics, elles les empiètent.

I.3.5. Un flou juridique autour du système foncier

Le droit colonial mis en place sous le protectorat allemand (entre 1884 et 1916), puis le mandat (1919-1939) et la tutelle (1945-1960) franco-britannique, a ignoré les spécificités des nomades. Par conséquent, il a ainsi institutionnalisé leur marginalisation. Les conséquences de cette législation coloniale ont été des plus désastreuses en matière de gestion du foncier. Ces conséquences sévèrement catastrophiques ont persisté après l'Indépendance, parce que le Cameroun continue d'appliquer les principales orientations du droit colonial dans le domaine foncier (Nguiffo et al., 2009).

En effet, l'article 15 de l'ordonnance de 1974 fixant le régime foncier camerounais distingue « les terrains d'habitation, les terres de culture, de plantation, de pâturage et de parcours dont l'occupation se traduit par une emprise évidente de l'homme sur la terre et une mise en valeur probante » de celles « libres de toute occupation effective ». Autrement dit, ce texte foncier camerounais ne reconnaît pas l'usage et l'occupation des terres par les Mbororo comme source des droits fonciers coutumiers protégeables. Ceci parce que contrairement aux agriculteurs, ces communautés ont un mode de vie de type nomade et leur occupation des terres est parfois non permanente et sans traces apparentes. Et pourtant, la Constitution camerounaise de 1996 énonce en son article 1 alinéa 2 que la République du Cameroun « reconnaît et protège les valeurs traditionnelles conformes aux principes démocratiques, aux droits de l'homme et à la loi ». Dans le régime juridique foncier actuel, l'État est gardien et propriétaire de toutes les terres depuis 1974.

Cependant, l'État n'a pu mener à bien son projet envisagé en 1994 visant à promouvoir une plus grande individualisation de la propriété foncière et une plus grande

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clarification de la propriété collective. Les dispositions de l'ordonnance n°74-1 du 6 juillet 1974 relative au régime foncier qui régissent jusqu'à présent le régime foncier et l'exploitation des terres au Cameroun se heurtent à la résistance du droit coutumier traditionnel qu'elles ignorent (Nguiffo et al., 2009). En effet, au Nord-Cameroun, il existe dans les faits une prééminence du droit traditionnel sur la législation foncière de l'État. C'est pour cela que les espaces de pâturage où les éleveurs vont en transhumance sont coutumièrement gérés par les chefferies et les sarkin saanou y sont omniprésents.

Les conflits fonciers sont généralement du ressort de la chefferie, mais les parties peuvent aussi s'adresser à l'administration, notamment le sous-préfet. La commission consultative, composée de représentants de l'administration et présidée par le préfet ou le sous-préfet constitue une instance de règlement des litiges prévue par la loi, mais peu utilisée car très onéreuse (à noter que les communes n'en font pas partie, le texte les régissant étant antérieur au transfert de compétence en leur faveur).

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote