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UNIVERSITÉ PAUL VALÉRY - MONTPELLIER
III Art et lettres, Langues et Sciences Humaines et Sociales U.F.R
III: Géographie et aménagement
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Dossier d'Habilitation à Diriger des
Recherches
Présenté et soutenu publiquement le 18
décembre 2014
Par
Natali KOSSOUMNA LIBA'A
Inscrit aux fonctions de Maître de Conférences par
décision en date du 5 février 2009
VOLUME 1 - POSITION ET PROJET SCIENTIFIQUE
LES TERRITOIRES DE MOBILITE PASTORALE Quelle
mobilité dans un contexte de pression sur le territoire rural en zone
soudano-sahélienne du Nord-Cameroun?
Sous la Direction de:
Geneviève CORTES
Professeure des Universités
Université Paul Valéry - Montpellier III
(France)
Membres du jury:
· Emmanuel TORQUEBIAU (HDR, CIRAD de
Montpellier, Président)
· Geneviève CORTES (Professeure,
Université Paul Valéry Montpellier III, Tutrice)
· Jean Philippe TONNEAU (HDR, CIRAD de
Montpellier, Rapporteur)
· Hélène GUÉTAT
(Professeure, Université Jean Moulin Lyon III, Rapportrice)
· Thierry LINCK (Directeur de Recherche,
INRA, Rapporteur)
Année académique
2014-2015
Cette Habilitation à Diriger des Recherches a
été réalisée avec le soutien scientifique et/ou
financier des institutions et organismes suivants que nous tenons à
remercier.
Service de Coopération et d'Action Culturelle de
ARTDEV - Acteurs, Ressources et Territoires l'Ambassade de France
au Cameroun dans le Développement
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Université de Maroua (Cameroun)
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Centre de Coopération Internationale en Recherche
Agronomique pour le Développement
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Résumé
Malgré la fixation des éleveurs sur de petits
territoires où restent une partie de la famille toute l'année, la
mobilité des animaux continue sur des territoires morcelés,
difficilement accessibles et en réduction permanente. L'objectif de
cette contribution était d'analyser le fonctionnement des territoires de
mobilité pastorale, les logiques et les stratégies des acteurs en
présence et de pouvoirs dégager les conditions de leur
réhabilitation et de leur préservation. Il s'agissait
également de mettre au point une démarche de recherche de
consensus entre les acteurs locaux pour la définition conjointe et
concertée des limites de ces territoires, des modalités de leur
fonctionnement et de leur gestion harmonieuse et durable.
Les résultats montrent que les territoires de
mobilité pastorale sont sous forte pression à cause des
migrations massives des agriculteurs vers les espaces dédié
anciennement à l'élevage qui sont mis en culture, l'augmentation
du cheptel bovin avec la diversification des acteurs qui s'intéressent
à cette activité, l'insécurité sur le foncier
pastoral exacerbée par l'omniprésence des autorités
traditionnelles qui impose leurs lois pour sa gestion et son contrôle en
lieu et place des lois étatiques et au détriment de ceux qui
l'exploitent, la présence de vastes zones protégées
interdit de pâturage. À cela il faut ajouter l'arrivée
récente des éleveurs mbororo venant de la République
Centrafricaine fuyant les exactions des anti-balaka. Les territoires de
mobilité pastorale semblent suffisants, mais ils sont mal
répartis dans l'espace et leur accessibilité pose
problème.
Les résultats montrent également que les acteurs
qui utilisent, gèrent et exploitent les territoires de mobilité
pastorale à savoir les éleveurs, les agriculteurs, les citadins,
les autorités traditionnelles et administratives entretiennent des
relations d'échanges, de complémentarités et de conflits.
La diversification de ces échanges et la proximité
géographique entre les acteurs contribuent à l'atténuation
des situations conflictuelles qui sont de moins en moins violentes. Elle peut
également être une base sociale solide pour la concertation autour
des territoires de mobilité pastorale.
Après avoir contextualisé la situation de la
mobilité pastorale, l'un des résultats majeurs de cette
contribution est la définition des territoires de mobilité
pastorale. Au Nord-Cameroun, les autorités traditionnelles locales sont
au centre de l'appropriation, de la gestion, de l'exploitation des territoires
ruraux. À la place de l'État et de ses lois foncières, le
pouvoir coutumier est au centre de toutes les décisions et actions sur
le territoire. C'est pour cela que sa caution est en permanence
recherchée pour garantir le succès de toute entreprise visant
à faire évoluer les modes de gestion, d'organisation et de
fonctionnement des territoires de mobilité pastorale.
Un autre acquis de cette contribution se fonde sur les efforts
de caractérisation des différents territoires de mobilité
pastorale au Nord-Cameroun avec les acteurs en présence et leur
fonctionnement. Ces territoires s'appuient et s'organisent à partir des
territoires d'attache où vit en permanence une partie de la famille des
éleveurs et où ils pratiquent une agriculture de subsistance.
Autour de ces territoires de fixation s'organise la mobilité dans les
territoires de proximité complémentaires des villages
environnants où les animaux pâturent les résidus de
récolte des cultures pluviales lors de la saison sèche ainsi que
dans les parcours de taille modeste qui s'y trouvent encore (collines incultes
principalement). Ces territoires sont complétés par les
territoires lointains délimités ou non pour la petite et grande
transhumance dont l'accès est souvent difficile à cause de
l'obstruction des pistes à bétail par les cultures. En plus de
ces territoires reconnus, les éleveurs utilisent également les
territoires illicites (aires protégées) où ils «
volent » du pâturage.
À la fin de ce travail, nous avons proposé une
démarche de concertation pour une gestion et exploitation durable et
harmonieuse des territoires de mobilité pastorale. Cette démarche
capitalise les acquis des principaux projets et programmes passés qui se
sont attachés à la sécurisation et à la gestion
intégrée des ressources agropastorales. Elle prend
également à son compte pour essayer de les minimiser les conflits
d'intérêts entre les utilisateurs et les conflits de pouvoirs
entre les instances de médiation et de régulation. La
démarche proprement dite s'appuie sur six phases allant de la phase
d'identification et de formulation à la phase de mise en oeuvre en
passant par l'analyse, la négociation, la concertation et le choix. En
ce qui concerne les territoires illicites de mobilité pastorale, un
consensus est à rechercher autour des aires protégées en
prenant des initiatives de cogestion et les plateformes de négociation
pour que les éleveurs et les agriculteurs se sentent concernés
par l'objectif de préservation de cette biodiversité.
En définitive, les processus actuels de
décentralisation de la gestion du territoire doivent aboutir à
l'élaboration de conventions locales et de règles de gestion
consensuelle des territoires de mobilité. Leur succès n'est
possible que si les différents groupes d'usagers et d'intervenants sont
suffisamment formés et impliqués dans cette gestion et si les
intérêts de chacun sont pris en compte. Même si les
autorités traditionnelles sont pour le moment les acteurs forts dans ce
système, une forte implication des pouvoirs publics pourraient permettre
aux acteurs faibles de mieux s'intégrer dans le dispositif
réglementaire de gestion de ces territoires de mobilité
pastorale.
Mots-clés : Territoire,
mobilité pastorale, élevage, agriculture, aires
protégées, consensus, négociation, Nord-Cameroun.
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