Troisième
partie : Recueil des données
1. Classe n° 1 : Petite
Section de Maternelle (enseignante : R.)
1.1. Situation de départ
L'enseignante est en demande de conseils et d'aide afin
d'améliorer le fonctionnement de la classe. Ses élèves
sont peu nombreux, majoritairement des garçons (16, 6 filles et 10
garçons), mais ils sont très agités. L'un d'entre eux, I.,
ne « tient pas en place ». Elle se sent démunie, d'autant plus
que le maître G, enseignant rééducateur, qui pouvait
prendre en charge cet élève, est absent pour l'année.
L'enseignante est également directrice de l'école. Elle est donc
remplacée une journée par semaine. L'enseignante
remplaçante trouve également que ce groupe classe, malgré
sa taille réduite, est très difficile à canaliser.
Le travail proposé est clairement indiqué comme
un travail de recherche sur la gestion de classe, l'attention et la motivation
des élèves. Mener une réflexion sur sa pratique de classe
intéresse l'enseignante qui accepte volontiers de participer. Avec cette
collègue comme avec les deux autres, la relation établie est une
relation de confiance. Nous nous côtoyons depuis plusieurs années,
au gré des interventions dues à ma fonction de psychologue
scolaire sur le secteur.
Par ailleurs, l'enseignante formule une demande d'intervention
concernant l'enfant qui pose les problèmes de comportement les plus
importants.
1.2. Fonctionnement de la classe
La problématique de la maîtresse concerne le
moyen de gérer ce groupe difficile, notamment l'accueil du matin.
Le déroulement de la journée commence par
l'accueil et une activité de regroupement. Viennent ensuite les
ateliers, puis la récréation. La deuxième partie de la
matinée est consacrée à une activité collective
(motricité deux fois par semaine notamment). L'après-midi, les
élèves font la sieste, puis se retrouvent pour un petit moment
collectif avant la fin des cours. Ils retrouvent ensuite leur famille (15 h 45)
ou font des activités péri-éducatives jusqu'à 16 h
45. La plupart des enfants assistent aux activités
péri-éducatives, et certains vont ensuite à la garderie.
Un jour par semaine, l'enseignante est remplacée par une collègue
du même âge environ (une trentaine d'années), ayant une
très bonne expérience des élèves de maternelle, et
beaucoup de savoir-faire.
Le travail des enfants est évalué, comme
fréquemment en maternelle, par des visages de bonhomme (souriant,
neutre, ou contrarié).
Avant la fin de l'année (durant le mois de mai
environ), l'enseignante réalise une évaluation globale des acquis
(une dizaine de petits exercices reprenant les différentes notions
étudiées : reconnaissance du prénom, reconnaissance
globale des lettres mettant en jeu des compétences de
découpage-collage, graphisme, connaissance des couleurs, des formes de
base, numération jusqu'à 3, connaissance des parties du corps,
dessin du bonhomme, écriture du prénom, repérage et
reconstitution de mots globaux...). Cette évaluation est remise aux
parents sous forme de petits livrets, assortie d'un commentaire de
l'enseignante.
1.3. L'enseignante
R. est âgée d'une trentaine d'année. Elle
est mère de famille de deux enfants très jeunes, dont une petite
fille à la santé fragile. Elle est directrice de l'école,
tâche dans laquelle elle est investie et montre des compétences
relationnelles et organisationnelles appréciées. Elle est d'un
bon contact, d'humeur égale, fait preuve de souplesse et de
compréhension face aux aléas rencontrés. Elle a une
volonté affirmée de bien faire et que ses élèves
soient épanouis dans sa classe. Il lui arrive de se fâcher et de
ressentir de l'énervement face à certains, ce qu'elle redoute et
parvient difficilement à concevoir. Elle sollicite dans ces cas
là l'aide du RASED, et notamment du rééducateur, ce qui
lui apporte stabilité et réconfort. Cette année est
particulièrement difficile, du fait de son groupe classe
compliqué. Elle ne parvient pas à gérer le comportement de
I. petit garçon qui « ne tient pas en place » et
entraîne les autres élèves dans son énervement, son
agitation, et ses difficultés de contrôle qui font modèle
de désobéissance.
1.4. Le questionnaire concernant l'autodétermination
(cf. annexe 11)
La moyenne à l'autodétermination est de 1,815
(cf. annexe 13). Ce résultat, comparé aux scores obtenus lors du
travail de groupe validant l'UE9 (Massy et al., op.cit.) est plus
élevé qu'attendu, compte tenu de l'âge des
élèves. Nous n'avons pas de comparaison du fait de notre manque
de référence en maternelle, mais nos résultats avaient mis
en évidence un score d'autodétermination proportionnel à
l'âge des enfants. On voit donc que la prise en compte de
l'autodétermination des élèves est importante dans la
gestion de cette classe.
Le score en autonomie est de 1,14, un peu élevé
puisque correspondant au score de la classe de CP de notre échantillon.
Les élèves exercent des choix dans leurs activités (place,
méthodes de travail, type d'activité, travail personnel).
Le score d'autoréalisation (1,40) correspond à
ceux obtenus au CP et CE : les élèves ont l'occasion de
travailler avec les autres, d'échanger et de confronter leur
savoir-faire, de se positionner par rapport aux autres et par rapport à
eux-mêmes.
Le score d'autorégulation est de 2,5. C'est un score
élevé : les enfants sont associés à
l'évaluation de leur travail. Des contrats et objectifs
individualisés leur sont proposés régulièrement.
Le score de responsabilisation est 2,22. C'est
également un score élevé puisqu'il correspond à
celui des classes de CE de notre échantillonnage : les
élèves participent à l'élaboration des
règles de vie, à l'organisation des récréations,
ils ont des responsabilités au sein de la classe, des conseils
d'élèves sont régulièrement organisés, et
ils participent aux décisions concernant la vie de la classe. Leur avis
est fréquemment sollicité et leurs efforts sont valorisés
régulièrement. Les relations avec les parents, les instances
municipales et hiérarchiques sont limitées mais
collaboratives.
En résumé, les résultats montrent une
place laissée à l''autodétermination des
élèves élevée. Compte tenu de l'absence de points
de comparaison en maternelle, il est difficile de situer les réponses
à ce questionnaire. Nos résultats en élémentaire
ayant montré une prise en compte de l'autodétermination
proportionnelle à l'âge des enfants, on peut se demander si ces
résultats ne sont pas un peu élevés compte tenu du jeune
âge des élèves.
1.5. L'enregistrement vidéo d'une séquence de
travail
Il a lieu au tout début de notre collaboration, a fait
l'objet d'une première analyse rapidement, puis d'une seconde
après les analyses des enregistrements des deux autres classes, pour
homogénéiser les critères d'observations.
La séquence est un travail de lecture d'album,
accompagné d'explications. Les élèves ont
déjà entendu l'histoire une fois. Cet album est adapté au
niveau de la classe, l'histoire est plaisante et met en jeu les couleurs :
Pop, le dinosaure, prend la couleur de l'aliment qu'il a mangé. A la fin
de l'histoire, il est multicolore. L'objectif de l'enseignante est de
vérifier que l'histoire a bien été comprise, et que les
élèves mémorisent les noms des couleurs, et,
éventuellement, certains éléments de son
déroulement. Afin de matérialiser celui-ci, elle a
réalisé des figurines, représentant le dinosaure de
différentes couleurs, et les aliments. Le tout est placé dans la
« boîte à trésors ». Elle montre un
aliment, et demande aux enfants de quelle couleur va devenir le dinosaure.
L'enfant qui a trouvé la bonne couleur vient piocher le dinosaure
correspondant. La séquence est codée et les résultats
consignés dans le tableau en annexe 14.
La séquence est une activité de lecture, devant
le groupe classe entier, ainsi que nous l'avions souhaité.
L'activité (cf. annexe 17) génère beaucoup de V+ de la
part de l'enseignante : 19 (la maîtresse lit, ou explique). Elle
pose 23 questions relatives à l'activité au groupe classe (23 V+
>Coll.) En tout, elle a 42 interventions verbales qui s'adressent au groupe,
éventuellement accompagnées de gestes (montre les images, ou
donne une figurine). Dans le cadre de l'activité, elle s'adresse 19 fois
à un élève en particulier, dont 14 fois pour lui poser une
question, et 5 fois pour lui donner une information. Le nombre de gestes
positifs, individuels et collectifs est de 69. Le nombre de gestes
négatifs (R. se lève fréquemment pour asseoir les
élèves [M-], elle leur dit « chut ! »
collectivement, ou leur demande de se calmer individuellement [V-]), est de 38.
Le rapport positif/négatif est de 1,82.
Du côté des élèves, on note une
moyenne de 1.7 mouvements en lien avec l'activité, et de 1,4
interventions verbales positives, donc une somme de 3,1 de gestes positifs. Il
y a en moyenne 11 gestes négatifs par enfant, essentiellement moteurs
(V- : 1,6, M- : 9,4). Le rapport positif/négatif est
très inférieur à 1 (0,28). Notons un moment où les
gestes négatifs disparaissent : l'enseignante propose à certains
enfants de piocher des personnages en papier dans une boîte. Il y a donc
du suspens sur deux registres : le choix de l'élève, et ce qui va
sortir de la boîte. On peut en conclure que l'attention des enfants est
captée lorsque l'activité génère de la surprise.
I., notre enfant hyperactif (en haut du tableau), obtient le
plus grand nombre de gestes, ce qui confirme le diagnostic et le dispositif
d'observation. Notons que beaucoup de ces gestes restent positifs (9), ce qui
correspond au plus grand nombre de manifestations positives de la classe. Le
rapport positif/négatif est de 0,43, ce qui est plus élevé
que le rapport moyen des élèves. Le nombre de gestes
négatifs (21 dont 17 M-) est cependant important. La maîtresse
précise que l'enfant a été plutôt attentif durant
cet enregistrement, par rapport à son comportement habituel.
1.6. I., l'enfant hyperactif
I. est signalé par R. car il présente des
difficultés de comportement importantes. La famille est suivie par une
éducatrice de l'Aide Sociale à l'Enfance depuis plusieurs
années. I. a deux frère et soeur plus âgés, dont
l'un est suivi par le SESSAD (Service d'Education Spéciale et de Soins
à Domicile) de l'ITEP (Institut Thérapeutique, Educatif et
Pédagogique) du département pour des troubles du comportement, et
l'autre est scolarisée en SEGPA (Section d'Enseignement
Général Professionnel Adapté) tous deux sont bien connus
des membres du RASED.
Le bilan cognitif est réalisé. Le petit
garçon investit bien les activités proposées, mais,
certaines séances, son comportement est très instable (notamment,
joue avec le matériel, déplace le mobilier de mon bureau...) et
il faut se fâcher pour qu'il arrête, ce qu'il fait. Les
résultats du bilan témoignent de fragilités, notamment en
maîtrise de la langue orale. I. présente un retard de dix mois
environ en compréhension, ce qui est important pour un enfant de cet
âge (pas encore 4 ans au moment du bilan). A la maison, le comportement
de l'enfant n'est pas aussi difficile qu'en classe, aux dires de sa mère
et de l'éducatrice. Notons que des perturbations familiales importantes
sont survenues récemment (séparation des parents,
éloignement du père, reprise d'une activité
professionnelle par la mère), et que, notamment, le petit garçon
va à la garderie tôt le matin et est récupéré
après la garderie du soir.
Un bilan orthophonique a été demandé afin
de confirmer les difficultés langagières, et d'envisager une
prise en charge.
Le questionnaire de Conners proposé à
l'enseignante témoigne de l'agitation importante de l'enfant en
classe : agité, fait des bruits incongrus, fait le malin, crises de
colère, perturbateur, bagarreur, impulsif, demande une attention
excessive et immédiate, et s'énerve lorsqu'il faut faire un
effort au degré maximal (énormément). R. coche beaucoup
pour : sensible à la critique, distrait, humeur changeante, mal
accepté par le groupe, difficultés à terminer ce qui est
commencé, immature, peu coopérant, et difficultés
d'apprentissage. Compte tenu de ces différents éléments,
l'échelle d'hyperactivité est significative.
1.7. Journal de bord (augmenté)
· Séance n ° 1 (17/10/2014)
Une première séance d'observation d'une
vingtaine de minutes durant le moment de regroupement collectif du matin, puis
un échange sur les difficultés d'écoute des
élèves et leur agitation, a permis d'isoler un premier objet de
réflexion : la mise en route de la journée de travail, notamment
le rituel de présentation de la journée (date et emploi du
temps), et le rituel d'appel (à l'aide de cartes sur lesquelles figurent
les photos des élèves).
Cette séance a permis de constater que les
élèves (en demi-groupe, garçons ou filles, le 2ème
demi-groupe passant aux toilettes), devant donner collectivement le nom de
l'étiquette photo choisie par l'enseignante, criaient tous ensemble le
prénom de l'enfant concerné et la couleur du panneau
(correspondant à la couleur de leur groupe de travail) sur lequel
l'étiquette devait être placée, ce qui
générait beaucoup de bruit. Engagés dans une tâche
collective sans rôle individuel, ils n'étaient pas
responsabilisés dans la tâche confiée. La notion
d'interdépendance positive, présentée par Céline
Darnon durant l'UE 8, de nature à élaborer des tâches
collectives qui suscitent l'engagement de chaque élève, est
transmise à l'enseignante (figure 5).
Figure 5: Outil n°1 :
l'apprentissage coopératif (d'après Johnson & Johnson,
2009).
La présentation de la notion d'autodétermination
et ses quatre composantes : autonomie, autoréalisation,
responsabilisation, autorégulation (figure 6, schéma en langage
facile à lire réalisé lors de l'UE9), donnent quelques
pistes à l'enseignante pour faire évoluer les activités
demandées.
Figure 6: Outil n°2 :
l'autodétermination (d'après Deci & Ryan, Vallerand,
Wehmeyer, Wolfensberger op.cit.)
La réflexion s'engage ensuite sur les activités
que les enfants peuvent gérer seuls au sein de la classe. Les
coins-jeux, et les colliers (système assez fréquent de
régulation de la fréquentation des coins-jeux dans les
écoles maternelles : un nombre limité (4 ou 5 en
général) de colliers particuliers à chaque coin est
accroché à l'entrée de chaque coin-jeux. Les
élèves doivent avoir le collier qui convient pour profiter du
coin-jeu. Lorsqu'ils changent d'activité, ils remettent le collier
à sa place, ou le donnent à un camarade qui souhaite à son
tour faire cette activité. R. appliquait ce système dans sa
classe jusqu'à présent, mais il ne fonctionne pas cette
année : les élèves ne font pas cas des colliers, et
entrent et sortent librement (et fréquemment, étant donné
que la plupart d'entre eux ne parvient pas à se fixer sur une
activité). Encouragée par le support théorique de
l'autodétermination, l'enseignante exprime, durant l'entretien,
l'intention de revenir sur son organisation habituelle en vérifiant les
colliers (état et nombre), et en renforçant la surveillance
concernant leur utilisation. Les élèves qui n'ont pas de collier
devront, momentanément, renoncer à l'activité
correspondante.
Elle va, par ailleurs, revoir les activités
proposées dans ces coins, faire l'inventaire du matériel (puzzles
par exemple), compléter les éléments manquants (coins
dînette, coins jeux de construction), enrichir les jeux proposés,
et organiser des rotations.
Il est prévu une première séance
d'observation (avec enregistrement vidéo) la semaine suivante, lors du
rituel d'accueil suivi d'une séance de travail collective.
· Séance n° 2 (7/11/2014)
Cette séance est composée de l'observation du
rituel d'accueil et de l'enregistrement vidéo de l'activité de
lecture d'album, puis d'un entretien durant la pause déjeuner.
L'enseignante a remanié son rituel d'accueil, notamment l'appel, en
confiant davantage de tâches individuelles aux élèves
(choix de la carte et lecture du prénom). Ils investissent plutôt
bien la tâche. On note cependant de nombreux déplacements : ils se
lèvent, changent de place. Durant l'activité de lecture, ils
parlent très souvent tous ensemble, et font donc beaucoup de bruit. Par
ailleurs, une fillette pleure encore, ce qu'elle fait souvent, notamment
lorsque les élèves font du bruit ou s'agitent (on est au mois de
novembre, mais cette enfant, pour de multiples raisons dont certaines
extérieures à l'école, présente encore des
difficultés d'adaptation).
L'entretien suivant l'enregistrement de la séquence a
porté sur les moyens de réduire l'agitation des
élèves, et notamment le fait qu'ils ne parviennent pas à
garder la même place. R. est très fatiguée à l'issue
de cet enchaînement de deux activités. Elle reconnaît que,
en l'absence de l'enregistrement, elle aurait arrêté le travail en
cours, ce qu'elle n'a pas osé faire en ma présence. Nous
constatons les capacités d'attention très limitées de ces
enfants, concluant que des activités plus courtes, mais en exigeant
qu'ils restent à la même place, afin de prendre des habitudes de
travail durables, sont préférables. Si l'on analyse cette
situation selon les lois du behaviorisme, on peut même considérer
que continuer l'activité dans un tel contexte est contre-productif, les
élèves associant le lieu du regroupement avec des habitudes de
changement de place soulageant leur besoin moteur, et obtenant même un
contact physique gratifiant avec leur enseignante.
Figure 7: Outil n°3 :
schéma réalisé à la suite de
l'entretien
Le besoin de mouvement des enfants apparaît nettement.
Ce besoin entre manifestement en conflit avec le projet de l'enseignante. La
nécessité de « négocier » entre les besoins des
élèves et les objectifs de R. amène à
schématiser l'élaboration du projet de la classe selon la figure
7, présentée ultérieurement à l'enseignante. En
tant qu'observatrice, je ne suis bien sûr pas intervenue. Le rôle
de l'Agent Territorial Spécialisé des Ecoles Maternelles est
évoqué : l'ATSEM de la classe vient d'arriver dans la
fonction, mais elle a déjà acquis ces petits gestes
professionnels discrets mais facilitateurs (présente physique à
côté de l'enfant) qui aident à recentrer le perturbateur
vers l'activité.
L'entretien porte ensuite sur ce que R. appelle la «
méchanceté gratuite » de certains élèves qui
tapent leurs camarades sans raison apparente, ce qu'elle a du mal à
comprendre et à accepter. L'échange porte alors sur les
règles de vie. L'enseignante a déjà abordé les
règles de conduite les plus élémentaires (figure 8) : Je
ne mords pas, je ne tape pas mes camarades, et je ne leur donne pas de coups de
pied.
Figure 8: Affichage des
règles de vie dans la classe
La nécessité d'éduquer les enfants
à gérer leurs émotions, et à entrer en contact avec
les autres, apparaît nettement. Le livre « 50 activités pour
apprendre à vivre ensemble », de Sylvia Dorance (2007), accessible
dans les mallettes regroupant des outils sur le bien vivre ensemble mises
à disposition des enseignants du secteur du RASED (cf. le blog
mieuxvivrealecole.blog.free.fr), est conseillé et prêté
à l'enseignante. Par la suite, elle s'emploiera avec
bénéfice, en exploitant des livres empruntés à la
médiathèque, à travailler sur le thème des
conflits, que les élèves investiront avec
intérêt.
· Séances n° 3 (14/11/2014)
Cette séance comprend une observation en classe portant
sur le rituel d'accueil, puis un entretien durant la pause déjeuner, qui
prolonge les points abordés, et reprend les difficultés
rencontrées par l'enseignante durant la semaine.
La maîtresse a complètement remanié le
rituel de l'appel : les tâches sont réalisées
individuellement (l'élève pioche une carte-photo, dit le
prénom de l'élève, la couleur de son groupe, et indique
à l'enseignante où placer la carte). L'enfant est
responsabilisé du fait de la tâche qui lui est personnellement
confiée. Il peut demander l'aide d'un camarade qu'il choisit
lui-même en cas de difficulté. En procédant de façon
individuelle, R. vérifie les connaissances des prénoms de chacun
de ses élèves. L'opportunité d'un tableau, à
l'attention de la maîtresse mais aussi des élèves afin
qu'ils visualisent leurs connaissances, est évoquée lors de
l'entretien.
L'enseignante a attribué une place fixe à chaque
élève lors des moments de regroupement : chaque banc a
plusieurs étiquettes avec le prénom des enfants concernés.
Ce dispositif a plu aux jeunes élèves lorsqu'ils l'ont
découvert. Le nombre de déplacements des enfants s'en est
trouvé réduit de façon notable.
La date, auparavant indiquée par une pince que R.
déplace sur le wagon représentant le jour de la semaine
(symbolisée par une locomotive tirant 7 wagons portant le nom des
jours), est à présent déplacée par
l'élève de service désigné au préalable par
l'enseignante selon une liste affichée, dans l'ordre de l'alphabet. Les
élèves peuvent donc prévoir quand ils seront de service,
et anticiper. L'élève de service peut indiquer à ses
camarades en se référant à la frise de l'emploi du temps,
le déroulement de la journée. A cet instant, les réactions
des enfants à l'égard des différentes activités de
la journée peuvent comporter des informations intéressantes pour
établir le projet de classe (Figure 7).
On constate donc que les principes de
l'autodétermination, présentés brièvement à
l'aide du schéma en langage facile à lire, aboutit très
rapidement à une modification des tâches proposées aux
élèves, le plus fréquemment dans le sens d'une
délégation individuelle. Plus actifs, incités à
faire des choix, le repérage de leurs connaissances est ainsi rendu
possible, ce qui permet de mettre en place une autorégulation de leurs
apprentissages. Par ailleurs, l'idée d'une élaboration du projet
de classe en introduisant une zone de négociation, aboutit à
modifier l'attitude de l'enseignante, en l'incitant à prêter
attention à tous les indices relatifs aux besoins, envies, et
intérêts de ses élèves, visant à
développer leur motivation intrinsèque. Les principes
théoriques de cette approche (continuum de l'autodétermination
abordé lors de l'UE 8, outil n°4) sont présentés
à l'enseignante lors de cet échange.
Figure 9: Outil n°4 :
les degrés de la motivation (d'après Deci & Ryan,
op.cit.).
· Séance n° 4 (21/11/2014)
Cette séance est constituée d'un entretien avec
l'enseignante. La semaine a été éprouvante car les
élèves sont toujours très agités, et l'enseignante
craint de ne pouvoir, à certains moments, contrôler son
énervement. Les pièges de l'effet « miroir » (Figure
10) sont alors présentés, pour illustrer ce qu'elle ressent et
mettre en évidence l'escalade émotionnelle qui en
découle.
Figure 10: Outil n°5 :
l'effet miroir (d'après Servan-Schreiber, 2003, citant
Gottman).
Le « message en je », base de la communication
humaniste, est également abordé afin d'aider au
dévoilement de soi, établir une communication authentique avec
les élèves, et leur donner l'information nécessaire
concernant les conséquences émotionnelles que leur comportement
provoque chez l'enseignante, en évitant, cependant, de les culpabiliser.
Figure 11: Outil n°6 :
Le message en Je (d'après d'Ansembourg, 2000).
L'enseignante aborde ensuite un problème
récurrent : certains élèves mettent beaucoup de temps pour
aller en récréation, ce qui mobilise longuement les adultes. Les
lois du renforcement, susceptibles d'expliquer pourquoi un enfant adopte un
comportement et de donner des pistes pour l'aider à abandonner ce
comportement indésirable, sont alors présentées à
l'enseignante (Figure 11). Une réflexion est ensuite engagée sur
les modifications à apporter dans l'environnement pour inciter les
élèves à sortir plus rapidement. Les élèves
qui « traînent » pour s'habiller bénéficient de
l'aide de l'ATSEM et de l'enseignante, ce qui peut renforcer leur comportement.
Il est donc décidé qu'aucune aide ne serait apportée
à l'habillage des élèves durant les dix minutes suivant la
sortie des premiers enfants, espérant que ces dix minutes d'attente sans
aide et sans attention particulière des adultes, finirait par dissuader
les retardataires. L'enseignante est prévenue qu'un « effet rebond
» pourrait être observé les premiers temps, jusqu'à ce
que les enfants aient assimilé le fonctionnement instauré.
L'entretien porte ensuite sur la façon de motiver les
élèves à adopter un comportement « pro-social ».
L'idée de fabriquer une « fleur du comportement »
composée de pinces à linge, où chaque enfant est
représenté par un pétale (sur lequel sa photo est
collée), et où l'objectif de la classe serait que tous les
pétales soient réunis sur cette fleur chaque soir, est
envisagée. La tâche, collective, prendrait en compte les principes
de l'interdépendance positive : un objectif commun, avec une
responsabilité particulière confiée à chaque enfant
: adopter un comportement qui correspond aux règles de vie de la classe.
Cette activité serait l'occasion de revenir sur le déroulement
de la journée en mettant l'accent sur les comportements positifs
plutôt que les comportements négatifs.
Figure 12: Outil n°7 :
Inciter l'autre à changer son comportement (d'après Georges,
2000).
· Séance n° 5 (28/11/2014)
L'enseignante apparaît fatiguée, très
contrariée par les difficultés occasionnées par le
comportement de I., qui ne s'améliore pas, bien au contraire. Une autre
élève adopte des comportements qui gênent le fonctionnement
de la classe, en « miroir » par rapport à I., ce qui
démultiplie les difficultés. Elle réitère sa
demande de bilan psychologique afin de mieux comprendre ce qui gêne I.,
au-delà des perturbations familiales importantes qu'elle constate
régulièrement.
L'entretien porte sur les modalités de gestion du
comportement de l'enfant afin qu'il dérange le moins possible le
fonctionnement de la classe. Les lois de renforcement impliquent que c'est en
limitant les conséquences de son comportement qu'il sera incité
à le modifier. Il est donc décidé que, tant que le
dérangement reste minime, l'enseignante n'y accorde pas d'attention. En
cas de comportement trop gênant, et après avertissement,
l'idée du « time out », où l'enfant serait
écarté sur une chaise au fond de la classe quelques minutes, en
lui accordant le minimum d'attention, est évoquée.
Parallèlement, les comportements adaptés sont
à souligner. L'idée de la fleur du comportement est encore
évoquée. Un livret de réussite (cf. l'exemple, avec des
cartes, proposé sur le site charivari.ektablog.com, figure 13) pourrait
être mis en place, assurant la liaison avec les parents, et permettant
aux enfants de visualiser leur parcours. Les objectifs en termes de
comportement, mais également en termes d'acquisitions scolaires,
seraient explicités. L'attention des élèves serait
mobilisée davantage sur les apprentissages, et moins sur les aspects
comportementaux.
Figure 13: Outil n°8 :
Devenir élève (Guichard & Koch, 2015)
Les travaux d'Hélène Lubienska
(op.cit.) sur l'entraînement à l'attention et le
contrôle moteur dans le cadre de la pédagogie Montessori sont
présentés à l'enseignante (figure 14).
Figure 14: Outil n°9 :
la pédagogie Montessori (d'après Lubienska de Lenval,
op.cit.).
Ces travaux orientent sur l'association du mouvement, du
chant, et des paroles, pour créer un espace collectif que les enfants
partagent. Nous appelons cet espace le « fil du collectif ». Le
besoin de bouger, comme besoin essentiel de ces enfants, est à nouveau
abordé. L'intégration de ce besoin de bouger tout en les incitant
à écouter et à regarder, à entendre et voir, et
à tenir compte de ce que l'enseignante, et les pairs, font, est un
vecteur qui peut être très porteur avec de tels enfants.
L'insistance de Maria Montessori pour que les enseignants donnent l'exemple en
restant silencieux en classe est évoquée, même si cette
enseignante parle de façon mesurée, et crie peu.
Le rythme des activités est également
abordé. Les enfants qui ont des problèmes d'attention ayant du
mal à attendre, il apparaît important que l'enchaînement des
activités proposées soit rapide. Or, l'enseignante,
également directrice, est souvent dérangée, ce qui
occasionne des retards. Par ailleurs, les enfants sont fréquemment
amenés à s'habiller, se déshabiller, à se chausser,
se déchausser. Ces activités peu attrayantes et
répétitives sont souvent mal vécues par les enfants peu
attentifs, et peuvent être l'occasion de comportements asociaux (coups de
pied, bousculades). Assorties de pauses souvent longues le temps que tous les
élèves soient prêts, elles sont susceptibles d'alourdir
l'emploi du temps et peuvent, si l'on n'y prend garde, réduire
l'intérêt des enfants pour l'école et dégrader le
climat scolaire.
· Séance n° 6 (12/12/2014)
L'entretien porte sur les différents moyens pour
l'enseignante d'expliciter les objectifs d'apprentissage des
élèves, et de les représenter, à l'attention des
élèves et de leurs parents.
L'enseignante organise, bien sûr, des réunions de
rentrée avec les parents, et elle utilise un livret de
compétences, mais ce livret n'est pas transmis aux parents en
début d'année, et n'est pas accessible aux
élèves.
Une réflexion s'engage avec R. afin d'imaginer
différents moyens pour les enfants de visualiser leurs objectifs
d'apprentissage, ainsi que leurs progrès, et les modalités de
transmission de ces informations aux parents (cahier de réussites...).
L'idée de visualiser l'acquisition de ces compétences pour chaque
élève est évoquée. Plusieurs systèmes sont
imaginées (médailles, puzzles, dessins à
compléter...). Il apparaît important que les enfants aient une
perception claire des objectifs atteints ou non, afin de favoriser les quatre
composantes de l'autodétermination.
Suivant le principe de l'autodétermination,
l'enseignante a fourni à chaque élève un petit cahier de
dessin (confectionné artisanalement). Lorsqu'il a fini ses
activités, l'élève peut prendre ce petit cahier et
réaliser un dessin libre, puis il le range à sa place. A la fin
de chaque période, il apporte son cahier à ses parents pour
montrer ses réalisations. Cette idée, transmise par une
collègue de PS dans une autre école, lui a paru simple à
appliquer et a reçu un accueil favorable de la part des
élèves.
· Séance n° 7 (10/01/2015)
R. apparaît sereine. Elle a renoué avec le
plaisir d'enseigner, qu'elle n'avait pas éprouvé depuis le
début de l'année scolaire. Elle a pu constater les progrès
réalisés par ses élèves et passer quelques
journées satisfaisantes qui l'ont rassérénée. I. a
été absent, malade : « Quand il n'est pas là,
ça change tout ». Elle continue à construire « le fil
du collectif » en prenant en compte le besoin de mouvement des
élèves, en proposant des jeux de doigts et en utilisant les
séances de motricité pour associer langage, musique, et
mouvement. Par ailleurs, elle valorise les temps d'attente où les
élèves sont regroupés sur un banc pour
répéter des comptines, ce qui permet de maintenir leur
attention.
L'utilité de la fleur du comportement lui
apparaît moins évidente dans un tel contexte, le comportement des
élèves se normalisant.
· Séance n° 8 (16/01/2015)
L'enseignante a continué à faire porter ses
efforts sur le « fil du collectif », en multipliant les
activités corporelles synchronisées, notamment durant les
séances de motricité, ainsi que les jeux de doigts.
Néanmoins, celui-ci reste encore trop fragile. Les écarts de
comportement de I., revenu en classe, gênent pour le maintenir.
L'entretien porte sur ce qui pourrait permettre d'aider l'enfant à mieux
suivre le rythme des activités. La nécessité d'un bilan
apparaît nettement et l'autorisation des parents va être
sollicitée. L'enseignante est en demande de moyens
supplémentaires pour aider I. Elle constate qu'il a besoin de davantage
d'attention de sa part, pour l'aider à se concentrer, à mener une
tâche à son terme. Elle va essayer de développer plus
d'activités autonomes en s'appuyant sur les élèves les
plus calmes, qui peuvent travailler de façon efficace avec peu
d'accompagnement. De cette façon, elle pourra dégager du temps
pour stimuler I., l'aider à entrer dans la tâche et à la
mener à bien. La mise en place de cette adaptation ne pourra être
possible qu'en approfondissant davantage encore les connaissances de chacun de
ses élèves (points forts, points faibles, centres
d'intérêt,...).
La possibilité de donner chaque soir un avis sur la
façon dont s'est passée la journée aux parents de l'enfant
(la mère en l'occurrence, puisqu'il s'agit d'une famille monoparentale)
sous forme de code couleur (rouge, orange, vert) est évoquée, en
demandant à la mère de féliciter et éventuellement
récompenser l'enfant lorsqu'il rapporte une carte verte. L'enseignante
émet des doutes sur l'efficacité d'un tel système. Elle ne
veut pas stigmatiser le petit garçon par rapport à ses camarades.
Par ailleurs, l'enfant est récupéré le soir par son
frère collégien, et la mère qui rentre tard ne portera
pas, lui semble-t-il en se basant sur sa connaissance du milieu familial,
attention à la carte ramenée par son fils. Elle conclut en
déplorant l'absence du rééducateur (maître G) qui,
jusqu'à présent, prenait en charge ces élèves une
fois par semaine, travaillant avec la famille, avec l'enfant et avec les
enseignants, parvenant la plupart du temps à faire évoluer les
situations, et, toujours, à améliorer le quotidien en offrant un
espace différent à l'élève, ludique, attentif et
sécurisant.
Le 19 janvier, une entrevue avec l'enseignante
remplaçante confirme les difficultés de gestion de ce groupe
classe : « A des moments, on se sent dépassés, un qui se met
à crier, tout part en vrac. La majorité des enfants de ce groupe
n'a pas assimilé les règles de fonctionnement, ils peuvent monter
sur les tables et les autres rigoler en les voyant faire... ». C'est donc
le fonctionnement collectif de la classe qui interpelle cette enseignante
à ce moment précis, indépendamment des difficultés
d'élèves particuliers.
· Séance n° 9 (13/03/2015)
Dans l'affectation des places sur le banc, I. est
positionné à côté de la maîtresse. Celle-ci
note qu'il essaie de devenir « l'assistant de la maîtresse »,
moyennant quoi elle observe ses bonnes intentions, mais constate les
difficultés générées auprès des autres
élèves. I. est très réactif, il peut taper ses
camarades. L'enseignante constate que « son comportement déteint
sur les autres, deux garçons notamment». Les parents se plaignent
car leurs enfants sont agressés. La maîtresse craint que la
confiance entre les différents interlocuteurs et le climat
général de l'école ne se dégradent.
De façon plus générale, l'enseignante
essaie de se constituer des fiches personnelles, où elle note les
centres d'intérêt, les réussites, les difficultés,
et tout autre élément lui permettant d'avoir une meilleure
connaissance de chaque élève.
Les principes théoriques des intelligences multiples
(figure 15) lui sont alors présentés. L'enseignante constate que
la plupart de ses activités correspondent à la diversité
des intelligences des élèves. Elle apprécie
l'explicitation des pratiques enseignantes en maternelle que permettent ces
outils théoriques et mesure les opportunités qu'ils apportent
pour mieux caractériser les points d'appui et centres
d'intérêt de chaque élève. Elle souligne que le
mouvement, si nécessaire aux hyperactifs, est intégré, par
le biais de l'intelligence kinesthésique, dans ces principes. Elle
déplore son peu d'intérêt spontané dans le domaine
musical, qu'elle ressent comme une limite dans ses pratiques d'enseignement
auprès d'élèves de Petite Section.
Figure 15: Outil n°10
: les intelligences multiples (d'après Gardner, 2008).
· Séance n° 10 (10/04/2015)
La classe a accueilli deux nouveaux élèves,
arrivés en même temps bien que de familles différentes. Ces
deux élèves motivés « donnent l'exemple » : leur
présence a amélioré le comportement des autres
élèves. Elle a peut être, également,
créé un effet de nouveauté qui a pu éveiller leur
intérêt. L'enseignante rappelle qu'elle a le sentiment de passer
une année très difficile et de « mener un combat
pratiquement tout le temps ». Pour l'instant, elle savoure ces
quelques moments de répit. Elle se rend compte qu'elle a établi
une alliance pédagogique positive avec une dizaine des
élèves, dont les deux nouveaux venus, et en éprouve de la
satisfaction. Le travail basé sur la lecture de livres concernant les
conflits et la façon de les résoudre, sur le contrôle de
leurs émotions, à partir de situations vraies
« parlantes pour les enfants », continue sur le
thème de la coopération. D'ores et déjà, les
élèves ont développé un intérêt pour
la lecture qui permet une réflexion sur les comportements pro-sociaux,
des échanges intéressants, et des moments collectifs
agréables.
L'enseignante a transmis aux parents un petit livret
d'évaluation de chaque élève. Ce petit livret regroupe les
différentes acquisitions des enfants. L'hypothèse que
l'association des parents aux progrès des enfants, par
l'intermédiaire de ce livret, puisse contribuer à
l'amélioration (relative) du climat de la classe et de leur implication
est évoquée.
I. est à présent plus calme. Le bilan
psychologique est en cours et deux séances ont déjà eu
lieu. L'enfant vient facilement et participe volontiers. Il est content de
bénéficier de l'attention d'un adulte disponible. Il se montre
très serviable, rangeant spontanément le matériel, ouvrant
la porte et la refermant à bon escient, etc. Une dernière
séance est prévue la semaine suivante. Néanmoins,
même en situation duelle, cet enfant est très difficile à
canaliser. Il peut refuser de faire certaines tâches, et se lasse
très rapidement. Les difficultés de compréhension de la
langue orale sont retransmises à l'enseignante, avec pour conseil
d'utiliser des phrases courtes, des mots simples, de faciliter l'entrée
dans la tâche par l'exemple, et d'utiliser des supports visuels en
complément des explications orales. Le bilan orthophonique
demandé est rapidement réalisé en raison de l'urgence. Une
double prise en charge hebdomadaire est préconisée par
l'orthophoniste. Les résultats au questionnaire de Conners orientent sur
une hyperactivité associée. Des informations sur la nature du
trouble sont diffusées auprès des enseignantes (Laurent
et al, op. cit.). Pour l'année prochaine, un dossier est
constitué afin de solliciter auprès de la MDPH l'aide d'une AVS
pour cet enfant.
· Séance d'observation (01/07/2015)
Une séance de bilan avait été
projetée dès le départ, comme aboutissement du travail
réalisé. Pour des raisons d'emploi du temps, elle a eu lieu la
dernière semaine de classe. L'enseignante a accepté de maintenir
cette séance d'observation, bien que des contraintes personnelles aient
affecté sa disponibilité.
On observe que les enfants restent très
« mobiles », notamment durant la phase de démarrage
de l'activité (lecture d'album), où on les voit sauter des bancs,
se lever, etc. R. commence, comme pour la première séance, par
des jeux de doigt (imitation) qui aident les élèves à se
concentrer et qu'ils exécutent avec plaisir. Durant la lecture, de
nombreux enfants sont intéressés, et silencieux. Certains se
lèvent encore, mais beaucoup moins : les élèves ont
développé leur capacité d'écoute depuis le
début de l'année. Après la lecture, des comptines et jeux
chantés rencontrent l'adhésion et l'enthousiasme des enfants.
La circulation de la parole n'est pas encore mise en
place : l'enseignante s'adresse peu aux élèves
individuellement. Ils ont encore tendance à répondre tous
ensemble, et à s'amuser du bruit que le groupe peut
générer. Les règles de vie sont assimilées, mais le
fonctionnement collectif et l'écoute des consignes de l'enseignante
restent fragiles. Il reste beaucoup de travail à ce groupe pour avoir un
comportement d'écoliers. La présence de I. a compliqué la
tâche tout au long de l'année, mais d'autres enfants ont un
comportement problématique, ce qui démultiplie la
difficulté.
1.8. Bilan avec l'enseignante du travail
réalisé
L'enseignante a apprécié de pouvoir
échanger sur les difficultés rencontrées.
Les outils présentés l'ont
intéressée. La méthode Montessori lui semble la plus
propice à une amélioration de sa pratique de classe : elle a
visité une école où cette pédagogie est mise en
pratique et va, progressivement, construire le matériel (exercices
manipulatoires, sensori-moteurs et logico-mathématiques, que les
élèves réalisent selon leur choix, en autonomie et
à leur rythme). Parallèlement, elle va multiplier les comptines
et jeux chantés.
La théorie de l'autodétermination l'a peu
aidée, mais l'interdépendance positive, avec l'idée d'une
responsabilité individuelle dans les tâches demandées, un
peu plus.
Le travail sur les règles de vie, la découverte
des albums avec les enfants, les échanges et discussions avec eux, ont
pu être gratifiants à certains moments (notamment lors des moments
proches de leurs préoccupations, où ils se sentaient
concernés).
Pour les enseignantes, cette année scolaire restera une
année difficile, fatigante, et souvent démoralisante.
1.9. Conclusions
Le travail avec cette enseignante s'est déroulé
sur une longue période, de nombreuses pistes ont été
explorées. C'est un travail de tâtonnement et de prise d'indices,
devant une situation préoccupante pour laquelle aucune solution
déterminante n'a été apportée. Le besoin de
mouvement apparaît un besoin fondamental pour les enfants de cet
âge, et le travail réalisé, durant les années de
maternelle, pour le canaliser, l'apprivoiser, est capital. C'est un objectif
d'enseignement en lui-même pour ces élèves et les moyens
d'y parvenir sont à explorer méthodiquement.
Les théories de la motivation présentées
n'ont pas été concluantes. Rétrospectivement, et compte
tenu des informations obtenues à l'issue du travail
réalisé dans les deux autres classes, il apparaît que les
pistes behavioristes auraient du être explorées davantage, afin de
proposer des leviers supplémentaires à l'enseignante pour asseoir
son autorité face à de très jeunes enfants. Au contraire,
les lois de l'autodétermination et les principes motivationnels ont
orienté sur trop de souplesse dans cette situation particulière.
Un travail sur le rythme des activités, et notamment l'engagement
attentionnel des enfants dans les tâches, la « mise en
projet », aurait du être mené, basé sur le geste
d'attention de La Garanderie (op.cit.). Malencontreusement,
l'étude bibliographique n'étant pas terminée, ces concepts
n'étaient pas encore en ma possession. De même, l'analyse de
l'enregistrement vidéo n'a été finalisée
qu'après la fin du travail mené dans les trois classes. Ses
conclusions n'ont donc pas encore pu être utilisées.
Concernant l'hyperactivité, cette expérience
montre combien la présence d'un enfant hyperactif dans une classe
où se construit le contrôle moteur et attentionnel des
élèves, est un contrexemple qui complique durablement le
fonctionnement de la classe entière. La situation de cet enfant
nécessite l'accompagnement d'une tierce personne (AVS), qui pourra
s'occuper de lui tandis que l'enseignante maintient le « fil du
collectif », quitte à ce que l'enfant soit
momentanément décroché lorsqu'il ne peut plus suivre ce
fil. Ce travail illustre aussi, en négatif, combien l'intervention d'un
rééducateur peut être déterminante dans une telle
situation : outre le travail avec l'enfant et la famille, ce professionnel
qui intervient sur le temps scolaire auprès de l'enfant, envoie le
message à celui-ci, et aux autres élèves, que son
comportement n'est pas conforme à ce qui est attendu. Par ailleurs, le
temps de « respiration » du reste du groupe classe lorsque
l'enfant est pris en charge est essentiel car il est utilisé par
l'enseignant pour retrouver (en PS : créer) un cadre scolaire
fonctionnel. Le présent travail n'a pu, bien évidemment, se
substituer à une prise en charge du rééducateur.
2. Classe n°
2 : Cours Moyen 1 (enseignante : N.)
2.1. Situation de départ
L'enseignante accepte avec enthousiasme de réaliser ce
travail de « recherche sur la gestion de classe, l'attention et la
motivation des élèves ». La réflexion
l'intéresse, même si, ayant prévu de partir à la
retraite à la fin de l'année, elle n'est pas
particulièrement en quête de nouvelles façons de
travailler.
Sa classe cette année est une classe difficile. Elle
est composée de 28 élèves, dont une majorité de
garçons (19). Un certain nombre d'enfants présentent des
difficultés d'apprentissage (deux ou trois ne pourront pas suivre en
6ème, et il faudra probablement envisager une orientation
SEGPA) ; beaucoup sont « immatures » (huit
garçons sont cités). Ils pensent à jouer surtout, aux
Legos, au foot... ». Pour beaucoup, on « laisse tomber les
notions qui ne sont pas indispensables, on simplifie », mais
« on va pas lâcher ». Peu d'enfants sont
« bons élèves », ceux-là font
« tourner leur petite hélice ». Un enfant est
particulièrement compliqué à cadrer ; il s'agit
de X., arrivé l'année précédente dans
l'école. X. est un bon élève, un garçon brillant et
intéressé par les apprentissages, mais cet enfant est
« seul au monde, ya que moi qui existe, je fais ce que je veux quand
je veux ». L'enseignante exprime avec ses mots le sentiment que ce
garçon a du mal à se positionner dans le groupe classe,
probablement dans son rapport à l'autre en général. Pour
le contenir au sein de la classe, elle « l'ignore ». Cette
attitude est la plus fonctionnelle qu'elle ait trouvée.
N, l'enseignante, est également la directrice de
l'école. Deux après-midis par semaine, elle est remplacée
par un enseignant expérimenté, avec lequel nous avons eu
plusieurs échanges, et qui exprime sa déception par rapport
à ce groupe : « ils sont souvent à la limite
du respect. Ils pensent à autre chose, les matches en
récré, leur groupe de copains, ils s'envoient des mots pendant
les cours, organisent leurs jeux. Ils ne prennent pas en compte les remarques,
notamment concernant l'écriture... ». Pour lui, la
démotivation du groupe d'une dizaine de garçons est aussi
difficile à gérer que le comportement de X.
2.2. Fonctionnement de la classe
Le français et les mathématiques sont appris par
plan de travail. Chaque élève a un
« calepin » qui regroupe les leçons de
l'année. Un plan de travail est proposé tous les quinze jours. Il
choisit le degré de difficulté de ses exercices (l'enseignante
propose trois degrés différents) et procède dans l'ordre
qu'il souhaite. L'enseignante peut ainsi avoir du temps pour chaque
élève individuellement. Par ailleurs, chaque matin, les
élèves font une dictée qu'ils préparent à la
maison la veille. Les après-midis, l'enseignante, lorsqu'elle assure les
cours, propose une lecture suivie (alternance de lecture individuelle et de
questions orales, collectives ou individuelles). L'enseignement d'anglais est
également assuré par N. Par ailleurs, lorsque les
élèves sont inattentifs, elle a pris l'habitude de leur parler en
anglais, système qui s'est révélé efficace. Sport
et musique sont enseignés par des intervenants municipaux. Le
maître remplaçant assure l'enseignement des autres matières
(sciences, histoire, géographie) les deux après-midis
restantes.
Deux élèves sont de service à tour de
rôle. L'enseignante relativise l'importance de ces tâches :
« rendre service, distribuer, tu n'es pas à l'école
pour ça ! ».
En fin d'année, toute la classe ira en classe de mer
passer une semaine. Ce projet, que l'enseignante a déjà
réalisé plusieurs années, mobilise la classe, par une
correspondance (électronique) notamment avec une classe
d'élèves du même âge dans la région d'accueil.
Les élèves sont associés à l'organisation et au
choix de certaines activités.
2.3. L'enseignante
N. est une femme expérimentée, affirmée,
énergique, qui a une très bonne présence verbale. Elle
part à la retraite à la fin de l'année, sans regret. Elle
a le goût de l'effort, pratique un sport artistique dans une association
où elle a des responsabilités. Directrice, elle est très
organisée et gère son école avec dynamisme.
Réactive, elle n'hésite pas à prendre position et à
argumenter ses points de vue.
2.4. Le questionnaire concernant l'autodétermination
(cf. annexe 12)
Le résultat global (2,65) est le plus
élevé de tous ceux obtenus jusqu'à présent. Les
scores concernant l'autonomie et l'autorégulation sont
particulièrement élevés (respectivement 2,86 et
2,6) : les élèves présentent leur cahier librement,
ils choisissent leurs activités, leurs méthodes de travail,
réalisent du travail personnel en classe. Concernant
l'autorégulation : ils analysent et expliquent leurs
stratégies de travail, des contrats sont mis en place, les
résultats aux évaluations sont symbolisés par des couleurs
qu'ils peuvent visualiser sur des grilles. A l'échelle
d'autoréalisation, le résultat est également
élevé (2,6) : les élèves font des choix en
fonction du degré de difficulté des exercices, et donc anticipent
sur leurs performances ainsi que sur les efforts qu'ils sont prêts
à fournir. Comme pour la classe de CM1 dont l'enseignant appliquait la
pédagogie de type Freinet dans notre échantillonnage (le profil
des réponses est d'ailleurs analogue), le score en responsabilisation
est particulièrement faible (1,44), ce qui montre que cette organisation
délègue à l'élève la responsabilité
de la gestion de ses apprentissages, mais l'autorise peu à participer
aux décisions concernant la vie et le fonctionnement de la classe.
2.5. L'enregistrement vidéo d'une séquence de
travail
La séquence a lieu lors de la deuxième
séance de travail, se déroule en début d'après-midi
et porte sur une lecture suivie. L'observation et l'analyse des données
permettent les constats suivants : l'activité est une lecture
collective et une explication de texte, avec le groupe classe entier. Les
élèves sont filmés et en ont conscience.
L'atmosphère générale est concentrée. Chaque
élève dispose d'un livre individuel. Nous n'avons pas
reporté de M+ lorsque l'enfant suit la lecture alors qu'un camarade lit
tout haut, mais cela aurait pu être envisagé. Les résultats
sont consignés sur le tableau en annexe 15.
L'enseignante (cf. annexe 17) adopte essentiellement des
gestes verbaux. Il n'y a pas de gestes négatifs (à aucun moment,
l'enseignante n'a besoin de « sortir » de l'activité
pour reprendre un élève ou émettre une réflexion
sur un comportement gênant le cours de la séquence). On compte 36
V+ et 1 M+, donc 37 gestes positifs adressés de façon collective,
et 25 V+ et 1 M+, donc 26 gestes positifs adressés individuellement. Le
rapport positif/négatif est très élevé (division
par zéro).
Du côté des élèves, on compte une
moyenne de 9,4 gestes moteurs positifs (ferment les yeux, tournent la page,
lèvent le doigt, lisent tout haut...) par enfant, et de 10,2 gestes
verbaux positifs (lisent tout haut, répondent aux questions
posées, ou terminent les phrases de l'enseignante), ce qui fait une
moyenne de 19,5. Il y a une moyenne de 0,9 gestes négatifs
(exclusivement moteurs [jeux avec la règle, enfant couché sur la
table, ne suivant plus la lecture, balancements importants...]). Le rapport
positif/négatif est de 20,8.
Les conclusions de cette analyse, finalisée
après la sortie des classes, n'ont pu être communiquées
à l'enseignante, ce qui est regrettable car il aurait été
un bon support pour souligner le savoir-faire et les réussites de cette
enseignante expérimentée, mais néanmoins
déçue par un groupe classe peu gratifiant.
X., notre élève hyperactif (ligne n°1),
obtient le deuxième plus grand nombre de gestes après une
élève particulièrement active dans ses réponses
verbales. Il présente le nombre de gestes moteurs positifs le plus
élevé à égalité avec cette
élève (18) car il lève très fréquemment le
doigt. Il a peu d'interactions négatives (2 M-, 0 V-). Notons qu'il est
placé tout seul, au premier rang, tout à côté de
l'enseignante qu'il voit de profil.
2.6. X, L'enfant hyperactif
X. est un jeune garçon dont la famille est originaire
d'Afrique du Nord, choyé et valorisé en tant que garçon
dans le cadre familial. Il est arrivé dans le groupe classe l'an
passé, ce qui peut être un facteur, encore maintenant,
d'intégration compliquée dans ce groupe de garçons qui se
connaissent très bien. Notons cependant que les difficultés
préexistaient, d'après les parents, dans l'école
précédente. Bon élève, très bon lecteur, il
ne relève pas d'un suivi par le RASED, mais son comportement est
problématique, comme le confirment les réponses au questionnaire
de Conners, concernant les points suivants : X. « fait le
malin », il perturbe les autres enfants, a du mal à
coopérer, semble mal accepté par le groupe et demande une
attention excessive de son enseignant. A un degré moindre, il est
agité, se « tortille » sur sa chaise, se montre trop
sensible à la critique, va à droite, à gauche, est
excitable et impulsif. Il a des difficultés à terminer ce qu'il
commence, et a tendance à nier ses erreurs et à accuser les
autres.
Les réponses au questionnaire, comparées
à celles d'un jeune de son âge (9 ans 6 mois), montrent que seul
l'indice d'hyperactivité approche la zone significative. Les
critères concernant la conduite et l'index global d'hyperactivité
sont hauts, mais non significatifs. Il n'y a pas d'inattention ni de
passivité. X. présente donc un profil de légère
hyperactivité sans trouble de l'attention. L'enseignante est
néanmoins inquiète pour la suite de sa scolarité, car il
apprend bien dans sa classe du fait d'un guidage étroit. Elle
s'interroge sur son comportement au collège, et appréhende la
réaction des enseignants face à celui-ci.
2.7. Journal de bord (augmenté)
· Séance n° 1 (20/01/2015)
Cette séance est consacrée à la
présentation du mode de fonctionnement de la classe (cf. informations
plus haut). N. explique que le niveau dans cette classe est très
hétérogène : certains élèves
réalisent plutôt des exercices de niveau CE2, la plupart des
exercices de niveau CM1, tandis que quelques-uns font du travail relevant
presque d'un CM2.
Les travaux sont évalués par des codes couleurs
au fur et à mesure de la réalisation des exercices. Les
dictées font l'objet d'un pourcentage de réussite et d'une
indication sur la nature des difficultés repérées, de
façon à ce que l'élève puisse retrouver dans son
calepin les informations nécessaires pour se corriger.
Le point noir du fonctionnement de la classe, cette
année, est le peu de discipline des élèves, qui font du
bruit, s'agitent, et ne sont pas concentrés : « Pour
l'instant, on perd beaucoup de temps en discipline ».
· Séance n° 2 (27/01/2015)
Cette séance comprend l'enregistrement analysé
plus haut, suivi d'un bref entretien. N. a présenté une
séquence frontale, comme il était prévu, mais elle
précise que les élèves ont changé :
« les enfants, maintenant, il faut qu'ils soient acteurs, il faut
qu'ils comprennent ce qu'on leur demande, il faut qu'ils bougent
beaucoup ». C'est la raison pour laquelle, il y a quatre ans, elle
est passée à une organisation sur plan de travail. L'année
précédente par exemple, cette organisation lui avait donné
beaucoup de satisfactions, avec des élèves
particulièrement investis et motivés : « tu
rentrais dans la classe, ils étaient tous en train d'bosser,
c'était dans les dernières fournées d'élèves
suffisamment élèves ». Elle explique qu'elle ne donne
pas de note, voulant passer le message « j'ai envie de travailler,
c'est pour moi que j'le fais ». Il y a une évaluation par
période, avec les critères « non acquis »,
« à confirmer », et
« acquis ».
· Séance n° 3 (03/02/2015)
Le schéma de l'autodétermination (figure 7) est
présenté à l'enseignante, afin d'illustrer le contenu de
l'entretien précédent. N. est particulièrement
intéressée par cette représentation qu'elle ressent comme
très vraie, et qu'elle applique à la surprotection parentale qui
lui paraît l'obstacle majeur à l'autonomie de beaucoup d'enfants.
L'immaturité des garçons de son groupe lui apparaît
nettement : « on peut plus du tout enseigner comme on enseignait
avant, pour 20 % de la classe, oui, mais pour les 80 % restant, non, surtout
les garçons, les filles, encore, ça irait ; mais les
garçons, ils sont obnubilés par le jeu. Heureusement qu'ils me craignent ! ». Le
fonctionnement par plans de travail lui paraît l'antidote à cette
évolution. On voit également qu'elle entend se faire respecter,
quitte à gronder, ou punir. Concernant le travail de groupe,
présenté comme un des moyens d'autoréalisation, elle
exprime qu'elle a constaté que « seuls les forts donnent sens,
les bons élèves prennent en charge, les autres, non ».
Elle a fait le choix de proposer du travail individuel la plupart du temps
« je veux savoir où tu bloques pour savoir comment tu peux
progresser ». Elle explique ensuite qu'elle a proposé aux
élèves qui se montraient peu motivés de se mettre au fond
de la classe : « si tu n'as pas envie de travailler, tu vas au
fond de la classe, mais tu ne déranges pas les autres ». Il
lui paraît important, également, d'accorder à l'enfant le
droit à l'erreur « j'ai le droit de ne pas savoir, je fais le
mieux possible, si je me trompe, c'est pas grave... ».
· Séance n° 4 (17/03/2005)
N. est particulièrement survoltée. Elle a
surpris, sur le carnet d'un des élèves, un mot d'insulte la
concernant, suite à une punition concernant un groupe de garçons
auquel il appartenait. L'entretien porte sur l'enfant concerné (qui
n'est pas X.), frère d'un enfant en situation de handicap qui a fait
l'objet d'un bilan psychologique les années précédentes.
La difficulté de la vie familiale est abordée, et notamment le
comportement des enfants face à la mère, dépassée
par les événements.
La suite de l'entretien est consacrée à
expliciter le fonctionnement d'un enfant hypersensible, et notamment la
contre-réaction lorsque l'on insiste trop, illustrée figure 16
(concept présenté par Céline Darnon durant l'UE 8).
· Séance n° 5 (24/03/2015)
N. est préoccupée par les difficultés
scolaires de plusieurs de ses élèves. Elle passe en revue
certains cas, et notamment celui d'un jeune qu'elle voit comme
complètement déresponsabilisé face à ses
apprentissages : « il est incapable d'écrire une phrase
sans faire une faute de copie, il ne dessine même pas ses
lettres ». L'hypothèse que cet enfant souffre d'un trouble des
apprentissages est émise, mais cette hypothèse est rejetée
par l'enseignante, qui considère que l'enfant n'a pas envie.
Figure 16: Outil n°11
: des enfants librement consentants (d'après Freedman, cité par
Joule & Beauvois, 2014)
Il est probable qu'un certain nombre d'élèves de
cette classe, en difficulté, auraient besoin du regard d'un enseignant
spécialisé, voire d'un bilan psychologique pour mieux comprendre
ce qui les gêne. Il y a quelques années, des enseignants
spécialisés (maîtres E) pouvaient intervenir auprès
de certains élèves du cycle 3. Le travail réalisé
permettait, progressivement, de changer le regard de l'enseignant sur la nature
des difficultés, et de lui donner des réflexes concernant le
dépistage. Avec la réduction des personnels, ces interventions ne
sont plus possibles. Seuls subsistent les bilans du psychologue pour les cas
les plus graves, les demandes à la Maison Départementale des
Personnes Handicapées (MDPH), et les orientations en SEGPA...
· Séance n° 6 (31/03/2015)
L'entretien porte sur la motivation des élèves,
de façon générale. Le parallèle est fait en
apportant les techniques de l'entretien motivationnel (Miller et al.,
2013), notamment sur les avantages d'une position de guidage par rapport au
« réflexe correcteur », directif,
spontanément adopté par les éducateurs, et dont les
chercheurs ont mis en évidence l'effet défensif et donc
contre productif qu'il produit sur les personnes que l'on aimerait voir
changer. Cette théorie est résumée à travers les
deux outils représentés figure 17 et 18.
La problématique des enfants hyperactifs est
abordée également de façon générale. Le
document (Laurent et al., op.cit.) édité par l'Education
Nationale pour sensibiliser enseignants et parents au trouble lui est
communiqué. Il est précisé notamment que ce type
d'enfants, lorsqu'on leur laisse le choix, préfèrent souvent
être à une table seuls car ils ressentent que leur concentration
en est facilitée.
Figure 17 : Outil n°12
: inciter à changer 1 (d'après Miller et al.,
op.cit.).
N. revient sur ce qui a été tenté dans la
classe pour favoriser l'attention des élèves. Dans un premier
temps, ils ont décidé de mélanger les plutôt
attentifs et les plutôt inattentifs, afin que ceux qui se concentrent
facilement aident les autres. Cette solution n'a pas donné les
résultats espérés. Dans un second temps, il a
été décidé, après discussion, que ceux qui
ne « voulaient pas » travailler iraient au fond de la
classe. Il a aussi été envisagé, pendant un temps, que
quelqu'un dans la classe, à tour de rôle, « fasse la
police » pour aider les autres à se concentrer. Toutes ces
idées n'ont pas modifié les dysfonctionnements observés
dans la classe. L'enseignante propose qu'une autre tentative soit faite en ma
présence afin de prolonger la réflexion collective, ce que
j'accepte volontiers.
La suite de l'entretien concerne le regard porté sur le
comportement des élèves. L'exemple est pris d'un
élève qui a du mal à écrire. J'émets
l'hypothèse d'une dysgraphie non dépistée, mais
l'enseignante rejette cette idée, car, me dit-elle, « il
peut » : « Il faut qu'il soit obligé à
faire les choses », généralisant : « ils
y arrivent quand ils mettent la volonté, ils n'ont pas la
volonté, la vie c'est ça, faire des efforts ».
L'enseignante revient sur son interprétation de surprotection,
déjà formulée : « cet enfant est tellement
cocooné, on lui trouve des excuses, il n'est pas
responsabilisé... ».
Figure 18: Outil n°13
: inciter à changer 2 (d'après Miller et al.,
op.cit.)
Les théories de la communication de la psychologie
humaniste incitant à rester sur les faits et non les
interprétations, généralisations ou personnalisations pour
éviter les pièges du jugement, qui comportent le risque
d'enfermer l'enfant sans lui donner une chance de pouvoir s'améliorer
est émise. Elle est illustrée par la figure 18.
Le « message en je » (figure 11) est
exposé ensuite à l'enseignante, mode d'emploi pour s'exprimer
sans juger, et insistant sur la différence entre demander et refuser,
essentielle pour respecter l'autodétermination de l'interlocuteur, avec
en l'occurrence, la possibilité d'une limitation personnelle dans la
capacité à répondre à la demande.
Les lois du renforcement, et notamment l'intérêt
de souligner les comportements souhaités (figure 12) sont
également abordées lors de cet entretien, liées à
l'idée de recentrer sur le positif en évitant
l' « escalade
émotionnelle » négative (contre-attaque de
Gottman, cité par Servan-Schreiber, op.cit.), en lien avec
l'effet miroir. La figure 19 reflète la teneur de la conversation.
L'entretien se termine sur le projet de discussion collective
concernant les problèmes d'attention des élèves dans la
classe. L'idée de l'organisation d'une
« autorégulation » (Allamand & Chosalland, 2005,
présentation à suivre) est évoquée, que je propose
à l'enseignante d'animer.
Figure 19: Outil n°14
: l'escalade émotionnelle (d'après Servan-Schreiber,
op.cit., citant Gottman.
· Séance n° 7 (06/04/2015)
N. a passé de mauvaises vacances. Elle a perdu un
proche et ce deuil la fragilise. Elle a exprimé sa difficulté
à ses élèves (« j'ai perdu mon
papa »). Les enfants ont su se mobiliser pour lui témoigner
son soutien en faisant un effort supplémentaire pour se concentrer sur
les tâches demandées.
L'organisation de la classe de mer se poursuit. Les
élèves sont chargés d'organiser la journée
passée avec les correspondants. En fin d'année, de nombreuses
activités porteront sur ce voyage (exposés oraux, écrits,
carnet de voyage...). Le sujet de l'organisation du séjour est
abordé, ainsi que l'inquiétude de l'enseignante concernant un
voyage avec ce groupe difficile. Si elle l'avait pu, elle aurait
organisé un premier petit séjour moins loin en guise de
préparation et de test en cours d'année. Les accompagnateurs sont
nombreux (un adulte pour 8 élèves alors que la norme est de 1
pour 12). Par souci d'équité, aucun parent n'accompagnera le
groupe. Des manifestations (loterie, goûter de Noël...) ont
été organisées pour améliorer le budget. Une
réunion par mois, environ, est organisée avec les parents pour
préparer ce voyage.
La régulation est prévue pour le lendemain. Elle
sera organisée selon les principes exposés dans
« Enseignants dans la tourmente » par Allamand et
Chosalland, deux enseignantes de collège qui ont écrit cet
ouvrage suite à un cycle de formation sur la gestion des conflits
proposé par la Mission Académique de Formation des Personnels de
l'Education Nationale (MAFPEN) et animé par Charly Cungi, psychiatre
spécialisé en Thérapie Comportementale et Cognitive (TCC),
et formateur. Les questions suivantes seront posées aux
élèves : Est-ce que je me sens bien dans cette classe ?
Pourquoi ? Qu'est-ce qui facilite mon travail ? Qu'est-ce qui me
gêne dans mon travail ? Autre ? (expression libre), (Allamand
& Chosalland, op.cit., p. 92).
· Séance n° 8
(07/04/02015)
Les élèves sont informés de cette
séance d'échange. Ils sont assis par terre devant le tableau. Les
questions sont posées à l'oral et j'écris les
réponses au tableau. L'enseignante est à son bureau et elle prend
les notes ci-dessous (les mots et expressions des enfants ont été
conservés, dans la mesure du possible).
Question : Est-ce que je me sens bien dans mon
travail ? Pourquoi ?
- Oui, les programmes sont sympas, les activités, les
arts visuels.
- La maîtresse est gentille.
- Il n'y a pas de moquerie, il y a une bonne ambiance dans la
classe.
- Il y a trop de bruit.
- (X répond) Je suis à fond sur mon travail
(rires de toute la classe), je n'entends pas le bruit (...) Je n'aime pas la
maîtresse parce qu'elle me crie dessus tout le temps, même pour des
petites erreurs. (rires collectifs)
- (Réponse d'une élève) Ce n'est pas
vrai parce que c'est lui qui cherche la maîtresse.
A ma question : « Comment ? », un
autre enfant répond :
- En faisant tomber des choses, en parlant.... ».
- Une autre élève : « On peut
dire à celui qui dérange de sortir ».
- J'aime cette classe parce qu'on va aller en classe de
mer.
- Sur le plan de travail, la maîtresse entoure les
erreurs et elle nous explique.
- K., il est au fond à côté des
« méchants » mais c'est parce qu'il bavarde quand il
est à côté de quelqu'un.
A ma question : « Travailler avec les plans de
travail, est-ce que cela vous convient ? »
- Oui, on peut faire dans l'ordre qu'on veut.
- La dictée, j'aime bien, la maîtresse elle
corrige et elle donne un pourcentage.
- Après on note le pourcentage sur le plan.
- C'est bien parce qu'on a des couleurs : vert, bleu,
jaune et rouge.
- J'aime pas les plans de travail, il y a trois groupes, je
préfère qu'on fasse tous la même chose et sur un cahier
(NB : c'est une bonne élève qui parle. Sept enfants
déclarent partager la même opinion).
- J'aimerais que la maîtresse elle explique plus au
tableau.
- J'aime bien le plan de travail parce qu'on fait ce qu'on
veut quand on veut.
- Avant la cantine la maîtresse elle nous lit un livre,
Hermès (mythologie) (NB : toute la classe aime sauf X.).
- Je préfère lire seul pour apprendre les mots
(orthographe. NB : apparemment, l'élève a besoin d'un
support visuel pour mémoriser l'orthographe).
A la question : « Qu'est-ce qui facilite mon
travail ? »
- On a deux livrets de leçons.
- Ça évite de copier les leçons.
- Quand on se trompe ou on ne comprend pas on va voir la
maîtresse et elle nous explique.
- Il y a des exercices plus faciles que d'autres et on
choisit.
- (réponse de X) On peut apprendre à la maison
en avance par rapport aux cahiers de leçons.
- On s'entraîne, et c'est pour les
évaluations.
- On peut faire les exercices à la maison.
- La maîtresse met une croix et on corrige.
- J'aimerais bien être dans le groupe 2.
- Le plan de travail à la fin des deux semaines la
maîtresse fait des commentaires, ça aide.
- On a un contrat, il faut au moins deux exercices de
chaque.
La discussion porte alors sur les changements de groupe, et le
désir de certains enfants de changer de groupe (apparemment, les
élèves sont dans un groupe plus ou moins fixe pour certains
exercices, et sont autorisés à changer de groupe selon leurs
résultats).
A la question : « Qu'est-ce qui me gêne dans
mon travail ? »
- Le bruit.
- (réponse de X) Le stress, trop de stress. Je fais
mon exercice et je pense à autre chose et je me déconcentre et je
fais des erreurs
- J'ai peur de ne pas y arriver.
- Pour les évaluations, je stresse. J'ai peur
d'oublier.
- Il y a trois façons d'apprendre. Moi, je ne sais pas
comment apprendre.
- J'ai peur que la journée se passe mal alors je
stresse.
- Que j'arrive pas à faire des exercices, qu'on me
juge.
A ma question « Avez-vous le sentiment que vous
êtes jugés ? »
- (réponse de X) J'aimerais qu'on arrête de
parler de moi, qu'on me prenne en exemple.
A ma question « Qui veut répondre à
la demande de X ? »
- Il provoque, il embête la clase, il arrête pas
de juger, il fait son intéressant, il se lève
- On ne le juge pas, on lui demande d'arrêter.
- Qu'il lève le doigt comme tout le monde.
- (réponse de X) Je ne me lève jamais, je les
appelle. Ils ont du confondre
- Tu te lèves tout le temps.
- Il les appelle sans lever la main.
- Tu te moques quand on t'explique, ou que tu as un meilleur
résultat en dictée.
A mon explication, incitant à différencier jugement
(interprétation, personnalisation, généralisation,
jugement) et critique (sur un fait précis) :
- J'aimerais que X. soit dans le groupe des
« gentils », si il veut, il peut le faire.
- On veut qu'il essaie de changer.
- On veut qu'il arrête de faire exprès, de
bouger.
- (réponse de X) Je suis
bien dans le groupe où je suis et je suis bien tout seul, c'est plus
fort que moi les bêtises.
A ma question « Comment on peut aider
X ? »
- S'asseoir à côté d'un
« gentil » qui pourrait l'aider.
- Le mettre à côté de la
maîtresse.
A la question : « Est-ce qu'il y a autre chose que
vous aimeriez dire ? »
- Les jeux de guerre et la bagarre, ça me gêne.
La guerre, c'est pas drôle.
- (réponse de X) Merci de m'avoir dit mes
défauts parce que je ne me rendais pas compte.
La classe est remerciée pour la qualité des
échanges, la franchise et la bonne qualité d'écoute. Les
élèves nous remercient en retour.
· Séance n° 9 (01/07/2015)
Il n'a pas été possible de se rencontrer
longuement après la séance de régulation. Il a juste
été abordé avec l'enseignante la tendance de X. à
devenir le centre des discussions collectives. L'enseignante a
déjà eu de nombreuses discussions au sujet du bruit et de
l'agitation dans cette classe, au cours desquelles elle avait noté cette
particularité de X. Ces discussions n'ont pas vraiment abouti à
des améliorations.
La classe de mer a bien eu lieu, et s'est plutôt bien
passée, avec de nombreuses déceptions et sources d'agacement,
tant dans le comportement des garçons agités, que l'enseignante a
gardés dans son groupe y compris la nuit, que dans les
préparatifs avant de partir. Notamment, les consignes, de ne pas
s'encombrer avec les produits de toilette (les accompagnateurs avaient
prévu des produits collectifs), de ne pas s'encombrer avec trop de
bouteilles d'eau car le nécessaire avait été prévu,
etc. n'ont pas été respectées par les parents, et ont
occasionné des complications (sacs trop lourds, lourdeurs de la gestion
du matériel personnel...). Par ailleurs, un des garçons s'est
blessé sans en parler aux enseignantes, ce qui a retardé et
compliqué les soins...
Le voyage ne s'est pas conclu comme prévu par un
goûter festif, étant donné les contrariétés
accumulées. L'enseignante note que les parents ont formulé peu de
reconnaissance face aux accompagnateurs, contrairement aux années
précédentes.
Compte tenu de la proximité de la fin de
l'année, il n'a pas été possible de faire un bilan du
travail réalisé. A ma question concernant des effets
éventuels de la régulation, l'enseignante a perçu que X.
se posait moins en victime. On peut donc en conclure que cet échange a
favorisé chez cet enfant une prise en conscience des effets de son
comportement sur les autres.
2.8. Conclusions
L'intervention n'a pas changé la nature des relations
entretenues entre l'enseignante et ce groupe classe difficile.
Régulièrement dans les écoles, certaines classes plus
compliquées à gérer sont redoutées par les
enseignants. La présence de plusieurs enfants au comportement difficile
est souvent associée à cette impression négative ; la
cohésion qui peut s'installer entre plusieurs jeunes en concurrence avec
les apprentissages, le manque de coopération et de bienveillance des
familles, sont également des facteurs explicatifs. Malgré tout,
la classe a bien fonctionné toute l'année, et les apprentissages
ont été réalisés. Certaines années, des
groupes plus agréables permettent aux maîtres de
« respirer » et de reprendre goût à leur
métier. Il est regrettable à mon sens que cette enseignante qui a
beaucoup investi d'énergie et d'enthousiasme dans l'exercice de sa
profession durant de nombreuses années, et dont on sent parfois la
tension proche de l'épuisement professionnel, n'ait pas pu terminer sa
carrière avec un groupe plus gratifiant.
La régulation a été un temps fort du
travail réalisé ensemble. Elle a donné, notamment, des
informations importantes concernant le ressenti de son trouble par X. dont on
aperçoit, au travers des informations qu'il livre, le malaise et le
sentiment de différence par rapport aux autres, la difficulté
à se positionner dans le groupe, caractéristique (il personnalise
tout de suite les questions et se montre dans l'incapacité de se fondre
dans le groupe au même titre que les autres). Il perçoit
également avec lucidité ses problèmes de concentration.
On peut constater également la gêne, l'agacement
et l'incompréhension des autres enfants face au comportement du jeune
garçon, ainsi que son isolement dans le groupe classe.
3. Classe n° 3 : Cours
Elémentaire 1 (enseignante : K)
3.1. Situation de départ
L'enseignante accepte avec plaisir et intérêt ma
proposition de travailler sur la gestion de la classe en lien avec la
concentration et la motivation de ses élèves. Nous entretenons de
bonnes relations depuis plusieurs années, et avons déjà
travaillé sur des projets antérieurs. Cette enseignante est
toujours à la recherche d'idées nouvelles :
« J'aime mon métier. Je ne veux pas être une instit.
traditionnelle. J'ai horreur des personnes rigides. »
La classe de CE1 comporte 26 élèves. Une
élève est en très grande difficulté cognitive. Un
dossier de demande d'Auxiliaire de Vie Scolaire a été
monté. Cette enfant est suivie à l'extérieur, en
orthophonie et en psychomotricité. Un autre élève montre
de sérieuses difficultés d'apprentissage. Deux
élèves présentent des problèmes de comportement,
une petite fille, et B., notre enfant hyperactif, qui a
bénéficié d'un bilan en Grande Section car il avait de
grandes difficultés à réaliser son travail écrit.
L'enfant est suivi à l'extérieur par une psychologue. La classe
comporte également « quatre ou cinq élèves qui
n'ont pas besoin de moi », donc des enfants très autonomes qui
ont des facilités d'apprentissage.
Le travail commence fin mai, il sera donc beaucoup plus court
que celui mené avec les deux classes précédentes.
3.2. Fonctionnement de la classe
L'enseignante exerce à temps complet. Le
français et les mathématiques sont enseignés le matin.
L'après-midi est consacré à des activités
« découvertes », de l'écriture, de la
géométrie, ou à réinvestir une notion
présentée le matin.
Dans la classe, on note la présence de nombreux
animaux, cages et aquariums : phasmes, têtards, orvet ... Chaque
année, des élevages, des sorties animalières, des
observations d'animaux, sont organisées et font l'objet
d'activités pédagogiques : « les enfants qui ont
des problèmes d'attention et des difficultés scolaires,
très souvent, les p'tites bêtes, ça les intéresse.
J'aime qu'ils observent, du coup, ils sont canalisés... ».
L'enseignante incite les enfants à apporter « des
bêtes » en classe : « Ils touchent, toucher des
bêtes, c'est passer un cap. Ça aide dans les apprentissages, de
vaincre sa peur ».
L'enseignante pratique le tutorat « depuis des
années. Je trouve que ça aide les deux ». Le tutorat
dure une semaine (plus court si, pour une raison ou une autre, cela ne se passe
pas bien). Les enfants sont volontaires. Cette année, la petite fille
qui présente des difficultés cognitives est aidée
régulièrement par un enfant tuteur.
L'enseignante travaille beaucoup avec l'enseignant
spécialisé dans la prise en charge des élèves en
difficulté. Leur collaboration est étroite. En début
d'année, elle consacre beaucoup de temps à observer ses
élèves pour mieux les connaître, et n'organise la
réunion de rentrée à l'intention des parents que tard par
rapport aux autres collègues (début octobre).
Les évaluations sont annotées par des codes
couleur (vert : parfait, bleu : bien, orange : en cours,
rouge : non acquis).
Chaque élève a à sa disposition
« une boîte » dans laquelle du travail personnel est
déposé par l'enseignante. Ce travail, sous forme de fiches
plutôt ludiques, coloriages magiques, jeux éducatifs, dessins
cachés... est gérée par l'élève. Ils le
réalisent à leur rythme et à leur façon.
3.3. L'enseignante
K. est âgée d'une quarantaine d'année.
Elle a un enfant d'une dizaine d'années. Très sportive, elle
nage, court, marche, fait du vélo... Sa formation initiale était
dans le secteur de l'animation sportive. Elle s'est découvert une
vocation d'enseignante un peu plus tard. Elle a une présentation
très colorée : bijoux, vêtements originaux, amusants,
créatifs, très esthétiques. Cette enseignante curieuse,
innovante, très ouverte, est très intéressée par
tout ce qui touche à la santé. Les médecines naturelles
(homéopathie, ostéopathie, acupuncture), l'attention
portée à l'énergie, à l'alimentation, au
bien-être, est omniprésente. Elle est passionnée de
psychologie. Concernant la gestion de sa classe, elle dit : « la
valeur numéro 1, c'est le bien-être à l'école.
J'aime les yeux qui pétillent quand ils viennent à
l'école. Pour être enseignant, il faut être relationnel en
numéro 1. J'essaie que les enfants n'aient pas peur de moi ».
Les compétences relationnelles de K. sont indéniables : elle
recherche le contact et entre facilement dans l'échange, qu'elle
alimente généreusement tout en sachant écouter.
3.4. Le questionnaire concernant l'autodétermination
(annexe 12)
Les résultats à l'échelle globale sont
conformes à la population d'échantillonnage (1,955). L'autonomie
accordée (1,29) correspond à l'âge des enfants. Les
élèves réalisent fréquemment du travail personnel.
Ils ont un « cahier d'autonomie » et leurs boîtes
avec du travail plus « ludique » à réaliser
comme ils le souhaitent. L'autoréalisation est plutôt
élevée (2,00), comme observé dans notre population, qui
montrait que ce score était plus élevé au CE qu'au
CM : le travail en groupes, le tutorat, l'enseignement mutuel, sont
favorisés par l'enseignante. L'autorégulation correspond
également au niveau de la classe (2,4) : les réponses sont
positives sur tous les points, mais avec une certaine mesure. La
responsabilisation (2,13) correspond également aux classes de même
niveau de notre échantillonnage : les élèves
participent toujours au fonctionnement de la classe. Pour le reste des
questions, les réponses sont également mesurées : les
élèves comme les parents sont associés parfois aux
décisions. Notons que l'enseignante incite toujours les parents à
l'informer dès que leur enfant rencontre une difficulté ou un
tracas particulier, ce qui correspond à des liens
particulièrement étroits, que l'enseignante a à coeur
d'établir avec les parents. En conclusion, les résultats au
questionnaire sont équilibrés. L'autodétermination des
élèves est mesurée, respectée dans tous les
domaines, en proportion avec le niveau de la classe.
3.5. L'enregistrement vidéo d'une séquence de
travail
K. réalise une séquence de repérage de
son. Compte tenu de la courte durée de notre collaboration,
l'enregistrement, qui a eu lieu après les échanges sur le
fonctionnement de la classe et les problématiques soulevées par
l'enseignante, a été réalisé l'avant-dernier jour
de classe, juste avant les grandes vacances. Notons que les
élèves, malgré la chaleur et l'énervement
compréhensible de la fin des cours, ont fait preuve d'un calme et d'une
participation exemplaires.
Les résultats sont consignés en annexe 16.
L'enseignante propose une séquence de repérage du son [j]. Les
élèves sont au CE1, c'est un approfondissement qui est
proposé et non une découverte. Le déroulement de la
séquence est habituel, l'enseignante ayant proposé plusieurs
séances de repérage de sons construites sur le même
modèle durant l'année. Du matériel (flèche
recouverte de papier plastique tenant lieu d'ardoise, et feutre
effaçable) a été constitué en début
d'année à cet effet.
Les résultats (annexe 17) sont
caractérisés par un rapport entre les interventions individuelles
et les interventions collectives très en faveur des premières (V+
+ M+ Indiv. = 198 ; V+ + M+ Coll. = 36). Par ailleurs, il y a un nombre
très important de gestes positifs, moteurs, et verbaux, de la part de
l'enseignante (234). On compte 17 interventions négatives. Le rapport
positif/négatif est de 13,8.
Du côté des élèves, le nombre de
réponses motrices positives est très important, en raison de
l'appel de l'enseignante, auprès de tous les enfants, d'une
réponse dans ce registre (écrire sur la flèche ardoise, la
lever, lever le doigt, fermer les yeux, chercher le feutre, distribuer les
ardoises [pour les élèves de services]...). Le nombre de M+ moyen
par élève est de 16,1, le nombre de V+ moyen est de 1,1, rapport
positif/négatif de 13,1. On constate donc qu'il est au même niveau
que celui de l'enseignante.
B. notre enfant hyperactif, n'était malencontreusement
pas dans le champ du film. Il n'a pas été possible d'analyser en
détails son comportement. Il a participé au même titre que
les autres. Il était en charge, cette semaine là, du tutorat de
la petite fille en difficulté. A part un échange de quelques mots
avec l'enseignante, qui note à un moment qu'il n'a pas levé le
doigt et lui demande pourquoi, son comportement sur le plan des interactions
avec l'enseignante, a été conforme à celui de ses
camarades.
3.6. B. l'enfant hyperactif
B. est l'aîné d'une famille de deux
garçons. C'est un petit garçon vif et de contact agréable,
dont la maman ne travaille pas et s'occupe attentivement. Elle sait
établir de bonnes relations avec les enseignantes de son fils, et
travailler en collaboration pour aider celui-ci à améliorer ses
difficultés d'attention et de comportement, dont elle est consciente. Le
petit garçon est suivi par une psychologue à l'extérieur
de façon régulière. La prise en charge, basée sur
la médiation animale (équine), convient particulièrement
bien à B. qui l'investit avec enthousiasme.
Les résultats au questionnaire de Conners
renseigné par l'enseignante indiquent une hyperactivité
très élevée et un indice général
d'hyperactivité très significatif : l'instabilité
psychomotrice est au premier plan : B. « se tortille »
énormément, fait des bruits incongrus, est trop sensible à
la critique, très distrait, il perturbe énormément les
autres enfants, est très rêveur, très agité,
très impulsif, et a de grandes difficultés à terminer ce
qu'il commence. Il a beaucoup de difficultés d'apprentissage. Les
difficultés relationnelles sont en arrière plan. Il n'y a pas de
trouble des conduites. L'inattention et la passivité atteignent le
degré de significativité sans le dépasser.
Le bilan réalisé alors que l'enfant était
en fin de Grande section montrait de bonnes compétences dans tous les
domaines cognitifs appréhendés, avec un point
particulièrement fort en mémorisation des nouvelles informations
langagières, et en maîtrise de la langue orale
(compréhension et vocabulaire). Les performances approchaient la zone
supérieure par rapport aux enfants du même âge. Notons que
le petit garçon est du mois de décembre, donc plus jeune que tous
les autres élèves de sa classe.
L'ensemble de ces éléments orientent sur une
hyperactivité qui gêne l'adaptation scolaire. L'investissement
cognitif et la disponibilité restent relativement
préservés cependant. L'écriture, et le maintien de
l'attention sur un travail écrit sont préoccupants.
3.7. Journal de bord (augmenté)
· Séance n° 1 (19/05/2015)
La première séance est une prise de
contact : présentation du projet, de la classe et de ses multiples
« p'tites bêtes », de la particularité des
enfants hyperactifs (l'enseignante est informée du trouble, de ses liens
avec les problèmes d'attention, et notamment, des difficultés
à écrire que peuvent rencontrer ces enfants, ce qui est le cas de
B.).
Compte tenu du fonctionnement de la classe, la théorie
des intelligences multiples de Gardner (figure 15) lui est
présentée : l'enseignante est très
intéressée par cette théorie qui correspond à ce
qu'elle met en place spontanément. L'intelligence naturaliste est une de
ses caractéristiques depuis toujours, reconnaît-elle. Concernant
le fonctionnement de sa classe, elle précise : «J'aime aussi
quand on m'amène des bêtes. Du coup je travaille dessus. Ça
crée un lien et ces enfants là sont attentifs. Ils ont moins peur
de moi ». « B. qui aime pas écrire, il a ouvert son
cahier de texte pour écrire : attraper des mouches... Du coup il y
a un lien affectif qui nous lie. Souvent, j'utilise ça avec ce genre de
gamins... B., quand il vient dans ma classe, il est content, et moi, c'est
c'que j'recherche»... « on fait des dessins (des
bêtes), ceux qui ont des troubles de l'attention, souvent, ne savent pas
dessiner... ». L'enseignante fait donc appel, dans ce cas
précis, à deux formes d'intelligence, naturaliste, et
visuo-spatiale.
K. souligne également qu'elle fonctionne
personnellement beaucoup sur le registre kinesthésique. La conversation
dérive sur le chi kong : elle aimerait pouvoir apprendre aux
enfants certains gestes, la danse du dragon, des mouvements qui stimulent telle
ou telle partie du corps. Il y a quelques années, nous avions mis en
place des séances de relaxation dans sa classe...
L'intelligence interpersonnelle lui paraît à
rapprocher d'une autre de ses valeurs : la prise en compte des
émotions des enfants : « Mon objectif est de
libérer l'émotionnel. J'essaie de capter les émotions des
enfants, je me laisse du temps pour mieux amener les
apprentissages ». Elle s'intéresse au yoga du rire, et
aimerait mieux connaître ce domaine. Elle utilise beaucoup
l'humour : « Y. (un élève passé au
collège, brillant mais souffrant également de TDA/H, et dont la
scolarité à l'école avait été très
compliquée) je le tenais comme ça, cette forme d'autorité
là...Quand il dérapait, je le fâchais, mais sur le ton de
l'humour, ça le calmait, il comprenait les
inférences ». En l'occurrence, cette façon de
procéder fait appel à l'intelligence verbale et linguistique.
Dans ce registre, elle utilise les blagues de Toto, les charades (dans la
classe, j'ai eu l'occasion d'observer brièvement à deux reprises
un travail de création de charade par groupes de deux
élèves). Elle précise également :
« j'aime le théâtre, j'aime m'amuser avec les
gamins ».
L'intelligence intra-personnelle est une forme d'intelligence
qu'elle cultive depuis toujours, constamment en recherche de nouvelles
connaissances dans ce domaine. Elle fait du développement personnel
régulièrement. Actuellement, elle est en lien
téléphonique avec la psychologue qui prend en charge B. Le
travail réalisé par la médiation animale la passionne.
Elle précise ce qui lui semble être de nature à aider cet
enfant à se dépasser : « avec le cheval, il y a
des règles de sécurité, il y a du soin... ». En
tant que psychologue du secteur, elle me sollicite souvent, et se montre
toujours très enthousiaste lorsque je suis à la recherche
d'informations concernant la gestion des élèves, ou pour
approfondir un sujet particulier.
Concernant l'intelligence musicale, elle
reconnaît : « j'aime chanter, j'aime le bruitage, je
m'intéresse aux sons ayurvédiques, j'aimerais en apprendre plus
dans ce domaine ». Effectivement, l'enseignante a l'habitude
d'utiliser divers instruments (cloches tibétaines, percussions diverses)
pour attirer l'attention des élèves. Lors de l'enregistrement,
elle cherchera la petite cloche qu'elle utilise habituellement, et ne la
trouvera pas. Elle tapera donc, à deux reprises, dans ses mains
positionnées au-dessus de la tête, pour attirer l'attention des
élèves.
L'entretien se termine sur l'enthousiasme d'avoir
trouvé un cadre conceptuel (la théorie des intelligences
multiples) qui l'aide à prendre de la distance et à mieux
comprendre son mode de fonctionnement personnel et pédagogique.
· Séance n° 2 (29/05/2015)
Cette séance est consacrée aux cinq
élèves en difficulté dans sa classe. Différencier
lui paraît évident, et ne lui pose pas de problème
particulier. Pour encadrer les élèves qui ont du mal à
apprendre, elle précise « Je me sers des enfants autonomes
pour dégager du temps » et « sur un dyslexique, je
ne m'acharne pas, je ne le prends pas, en plus, en Activité
Pédagogique Complémentaire (APC). L'APC, je m'en sers en
début d'année pour repérer les difficultés en
lecture, sinon, c'est pour des difficultés ponctuelles ».
Concernant B., le fait que son attitude soit différente de celle
qu'elle adopte vis-à vis des autres ne pose pas de problème :
« je parle des difficultés des élèves aux autres
élèves ».
Le problème des nouveaux rythmes est également
évoqué. L'enseignante trouve les élèves plus
fatigués et moins attentifs qu'avant : « il n'y a
rien de bon dans ces nouveaux rythmes ».
Elle explique le fonctionnement de sa classe, le tutorat, les
boîtes personnelles (cf. plus haut). La théorie de
l'autodétermination lui est présentée (figure 7) :
elle fait le lien avec les plans de travail, face auxquels elle réagit :
« je ne suis pas assez organisée pour travailler de cette
façon, il faut une rigueur que je n'ai pas ». Elle
explique : « Je ne prévois pas mes séquences longtemps
à l'avance. Je réajuste. Si ça ne passe pas, je change,
j'allège, j'adapte. Des fois, on fait même du coloriage. Quand je
vois que ça va bien, je fonce. Je travaille au feeling. Je
présente les notions quand je le sens... C'est souple... je ne suis pas
cartésienne ». Je lui transmets ensuite le questionnaire sur
l'autodétermination à remplir.
· Séance n° 3 (09/06/2015)
Les échanges portent davantage sur les relations avec
les élèves. L'enseignante, on l'a vu, souhaite que ses
élèves n'aient pas peur d'elle, et n'appréhendent pas de
venir en classe. « Je veux apporter de la belle énergie...
J'utilise des termes toujours valorisants, décontractés... De
nature, je suis plutôt d'humeur égale, et je suis très
patiente... ». Néanmoins, elle entend être
respectée. Il lui arrive de gronder : « Ceux qui disent
sans lever le doigt, je me fâche ». De la même
façon : « Quand ils embêtent les autres, ça
me met en colère... Ils n'ont pas l'habitude, ça les fait
pleurer ».
Le premier trimestre, l'enseignante « pose le
cadre ». Elle a trouvé un dispositif sur un site
pédagogique qui lui permet de travailler le comportement avec ses
élèves : toutes les fins de semaine, les prénoms des
enfants sont placés sur une affiche en fonction du respect des
règles de fonctionnement de la classe, dont on a vu qu'elles
étaient élaborées avec les élèves. Elle
abandonne cette activité en décembre en général,
lorsque les règles sont assimilées : « Moi, je
crois dans la relation que nous avons créée ».
Concernant la discipline elle complète : « Ils essayent,
mais je peux être ferme, et quand je suis ferme, ils
pleurent ».
Concernant B., elle dit : « J'adore ce gamin...
il bouge sans arrêt...s'il y a une excitation
générale dans la classe, tu le perds... Quand y disjoncte, je
n'peux pas l'ram'ner...la douceur, des fois ça marche... quand j'ai
aucune prise sur lui, la seule solution, je le sors, je le mets dans une autre
classe », je lui dis : « B. là, ça
suffit, il faut du calme. Je suis fatiguée, j'en peux plus, j'ai atteint
ma dose ». Je lui parle alors du « message en
je » (figure 11), qu'elle ne connaît pas, et nous
réalisons qu'elle l'adopte de façon spontanée. Elle
explique : « Pour moi, l'autoritarisme, c'est la fin de l'estime
de soi ».
Concernant les demandes qu'elle pourrait avoir
vis-à-vis du travail que nous réalisons ensemble, et les
difficultés qu'elle rencontre, elle répond qu'elle souhaiterait
davantage d'éléments concernant la gestion des conflits, et des
pistes pour mieux gérer le temps, pour mieux organiser l'espace, ranger.
Le placement des élèves dans la classe lui paraît
également un sujet d'étude intéressant, sur lequel elle
aimerait obtenir davantage d'informations. Les plus grandes difficultés
qu'elle rencontre sont en lien avec les effectifs : « toujours
le collectif, le collectif... le bruit... ». K. souhaiterait
évoluer vers une autre fonction, peut être l'enseignement
spécialisé. Cela fait déjà un an ou deux qu'elle
envisage ce projet.
· Séance n° 4 (18/06/2015)
L'entretien commence par porter sur le comportement de B.
durant la matinée. La fin de l'année approche et l'enfant est
sans arrêt en mouvement...
Puis les modalités d'évaluation sont
abordées. Les élèves ont chacun un livet de
compétences, transmis à la famille à chaque fin de
période avec une appréciation de l'enseignante. K. lit aux
élèves l'appréciation transmise aux parents avant de
remettre le livret et leur demande leur avis.
Le thème des relations avec les parents est ensuite
évoqué. K. entretient généralement de très
bonnes relations avec eux. Elle y consacre du temps. On la voit d'ailleurs
très souvent échanger avec l'un d'entre eux devant le portail.
Il lui paraît important, pour les élèves, que les liens
avec les parents soient les plus détendus possible. L'effet miroir
(figure 10) est évoqué au cours de la conversation. K. est
heureuse, une nouvelle fois, de prendre connaissance de ce concept qu'elle
ressent comme très vrai, et qu'elle applique spontanément.
L'entretien dérive ensuite sur la fatigue de la fin de
l'année, et des techniques de relaxation pour favoriser le sommeil...
Rendez-vous est pris pour l'enregistrement d'une
séquence, qui sera repoussé à deux reprises en raison de
perturbations de l'emploi du temps dues aux activités de fin
d'année, et qui aura finalement lieu le 2 juillet, avant-dernier jour de
classe.
3.8. Conclusions
Le travail mené avec cette enseignante a
été particulièrement riche en informations. La
séance d'enregistrement oriente sur des pistes inattendues en
matière d'autodétermination des élèves. Ce
troisième volet permet de remettre à leur place les
différents outils abordés, et d'établir une
hiérarchie entre eux. La gestion de classe, et notamment son aspect
dynamique, le positionnement adopté par l'enseignante, prennent un
éclairage différent devant le savoir-faire de cette
enseignante.
|
|