WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La robotique industrielle et la performance qhse

( Télécharger le fichier original )
par Ludovic HERGOTT
IAE Metz - Master II QHSE 2018
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

PARTIE

Page 49 sur 111

EMPIRIQUE

Page 50 sur 111

8. Contexte de l'étude empirique

L'étude porte sur le site automobile appartenant à la société Daimler (Smart - Mercedes). Nous étudierons plus précisément la «Smartville» située en France, dans le village de Hambach. Ce site est structuré autour du concept de la Smart dans lequel clients et fournisseurs travaillent au même endroit. Ce véhicule se veut être au plus près du client et propose un large choix de customisation de son modèle (choix des couleurs principales et secondaire, des motifs, de la puissance du moteur, de la finition, etc.).

Une partie de l'étude porte sur un équipementier partenaire du projet, l'entreprise Faurecia. Cet équipementier automobile français est présent partout dans le monde et possède plusieurs pôles d'activités : (intérieurs et extérieur de véhicule, extérieurs de véhicules, recherche et développement, contrôles d'émissions de véhicules...). Le site est spécialisé dans la fabrication des pièces en thermoplastique du véhicule Smart et le livre en juste en séquence (la commande déclenche la production de pièces) son client.

Le projet de modernisation du véhicule (également appelé Facelift) consiste à produire l'ensemble des nouvelles pièces en thermoplastique de la nouvelle version du véhicule Smart Fortwo. L'entreprise décide de robotiser la nouvelle ligne d'assemblage du véhicule afin d'améliorer la productivité et répondre au cahier des charges.

Page 51 sur 111

8.1 Structure de l'entreprise :

L'entreprise est structurée autour de quatre grands pôles de production également appelés unités autonome de production (UAP) qui sont respectivement :

UAP Injection: Cette étape correspond à l'injection de granulés plastiques (matières premières) dans des presses donnant la forme des différentes pièces à l'aide des moules. Dans ce secteur, l'entreprise compte 12 presses à injecter robotisées simple pour un effectif de 64 personnes réparties sur 3 équipes. Les travaux réalisés par les opérateurs consistent à effectuer des finitions ou assemblages de pièces. Les opérateurs récupèrent les pièces injectées et les positionnent sur des convoyeurs qui les amènent vers le prochain processus : la peinture.

UAP Peinture : Le processus peinture consiste à cuire la pièce puis la mettre en couleur et la vernir suivant la forme des pièces injectées, de manière totalement robotisée. Une fois mise en peinture et vernies, ces pièces se dirigent vers le secteur de l'assemblage.

UAP Assemblage : Cette étape consiste à assembler les pièces en y mettant les composants annexes (vis, fixations, joints...) ; cette partie est essentiellement réalisée par des opérateurs de production.

UAP Logistique : Ce pôle consiste à assurer la livraison des pièces et matières aux différentes UAP. Etant donné que le site est directement implanté sur le site de son client les livraisons des différentes pièces vendues sont transférées directement par une structure, robotisée HRL.

Page 52 sur 111

8.2 Constats dans l'entreprise.

Les projets sont définis selon la politique de l'entreprise dont les critères principaux étant

? La conformité de la prestation vis-à-vis du client (interne/externe). ? La maitrise des coûts directs et indirects.

? Le respect des délais imposés.

? Diagnostic QSE d'après le référentiel interne Faurecia.

Il est important que les projets puissent répondre également à l'amélioration de deux exigences de l'entreprise :

La plus importante et fondamentale : l'exigence morale. Elle représente l'amélioration continue des conditions de travail et de la préservation de l'environnement afin d'exercer son métier dans des conditions décentes, respectueuses des opérateurs, des espèces vivantes tout en maîtrisant les risques pouvant nuire à l'opérateur et à l'environnement.

La seconde, l'exigence économique. Il est important de rappeler que les mauvaises conditions de travail, les accidents, la dégradation de la santé des salariés ou la détérioration de l'environnement et de son écosystème sont inacceptables et engendrent de fait, un surcoût économique important.

Réunir ces deux exigences permet à l'entreprise Faurecia de démontrer son engagement en matière de qualité, sécurité et environnement envers ses salariés. S'assurer du bien être de son personnel dans un environnement sain augmente l'engagement et l'efficacité dans les opérations réalisées et par conséquent soutient la performance de l'entreprise.

Page 53 sur 111

8.3 Les accidents du travail et cotisations dans l'entreprise.

La sécurité des salariés est la première priorité de l'entreprise, bien au-dessus de l'aspect économique. Le site de Hambach connait, par son historique, différents pics d'accidents de travail :

Accident de l'entreprise Faurecia

50

 

46

45

40

35

30

25

20

15

10

5

0

intérimaire

CDI

2015

2016

2017

2018

5

2

3

1

35

46

24

7

Nombre d'accident

5

35

2

3

24

1

7

Figure 6 : Répartition des accidents Faurecia (réalisé par l'auteur)

Une part non négligeable de ces accidents repose sur le comportement à risque des employés. Parallèlement, la politique du groupe vise à déployer de plus en plus de robots sur les sites. Notons par ailleurs la présence d'un nombre important d'intérimaires sur le site. Ces derniers sont nombreux (30% de l'effectif total) mais comme le montre le graphique (1) ils représentent une part beaucoup plus faible des accidents du travail.

En étudiant de plus près les différents secteurs de l'usine, il en ressort une part non négligeable d'accidents aux endroits où la main d'oeuvre humaine est la plus élevé (assemblage et injection en tête de Pareto). En 2018, une partie de la ligne d'Assemblage se verra robotisé (ligne pare choc avant) réduisant l'effectif de 7 personnes à 4.

Différents constats expliquent le pic d'accidents de l'année 2016 :

? La précédente direction (< 2017) concentrée sur des enjeux économiques.

? Une hausse du nombre d'intérimaires.

? Des personnes inexpérimentées.

? Le comportement de certains individus (non-respect de règles élémentaires).

Localisation des accidents par UAP sur 3 ans

Nombre d'accidents

2016 2017 2018

20

15

10

5

0

 
 

Assemblage Injection Peinture Logistique Maintenance Laboratoire Supports

Page 54 sur 111

Figure 7 : Localisation des accidants sur les trois dernières années (réalisé par l'auteur)

Page 55 sur 111

Ces accidents motivent de plus en plus l'intérêt de trouver des solutions à long terme pour tendre vers le « 0 » accident, d'autant plus qu'une majorité des accidents proviennent de la manutention manuelle des pièces. L'intérêt de la robotisation est de plus en plus élevé.

Suivi des accidents sur 3 ans

2016 2017 2018

Nombre d'accidents

0

0

Autre Gestes et

Effondrements

postures et aux chutes

d'objets

5

5

23

6 6

4

3

3 3 3 3 3

3

2

2

2 2

1

0 0 0 0

Manutention manuelle

Machines et aux outils

Manutention mécanique

Circulations et aux

déplacements

Chute de plain-pied

25

20

15

10

5

0

Figure 8 : Suivi des accidents sur 3 ans dans l'entreprise Faurecia (réalisé par l'auteur)

En plus d'être inacceptables, ces accidents coûtent extrêmement cher à l'entreprise. Régi par la réglementation française et la Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé au Travail Alsace-Moselle (CARSAT), chaque accident du travail ou maladie professionnelle fait l'objet d'une compensation financière de l'organisme, dépendante de la caractérisation de l'arrêt de travail et du taux de cotisation. L'investissement dans des robots industriels de nouvelle génération pourrait permettre de supprimer les travaux à risque et garantir une intégrité physique et morale des salariés tout en minimisant le risque d'accident au travail.

De manière annuelle, l'entreprise doit verser, selon les catégories « encadrement » ou « employé », un montant s'établissant en fonction des résultats des trois années précédentes (sans compter l'année n-1). On constate en toute logique un taux de cotisation proche de 0 pour les salariés faisant partie de l'encadrement (tous ceux n'ayant pas d'activité directe dans les unités de production). Aucun de ces métiers n'est destiné à être remplacé dans les années à venir, ces métiers dits « supports » requièrent un certain niveau de compétence des individus et l'industrie automobile est en recherche constante de profils types.

Figure 9 : Cotisations encadrement. (Réalisé par l'auteur)

Dans la deuxième situation, l'entreprise paye annuellement les frais liés aux accidents du travail dans les unités de production avec un coût annuel d'environ 200.000€ (coûts très élevés notamment liés aux mauvais résultats de l'année 2016).

Page 56 sur 111

Figure 10 : Cotisation employés. (Réalisé par l'auteur)

Page 57 sur 111

La robotisation constitue donc une évolution particulièrement attractive pour l'entreprise. Et elle a déjà débuté. Mais quels sont précisément les bénéfices escomptés et les craintes soulevées par ce changement majeur ? C'est à ces questions qu'il convient de répondre à présent, à travers une enquête terrain.

8.4 Objectif de l'étude empirique

L'analyse de la littérature permet de déterminer les différents enjeux de la robotisation, tant au niveau de ses bénéfices pour l'entreprise que des obstacles qu'elle entraîne. Nous constatons ainsi que la mise en place de cette technologie joue sur les différents leviers de l'entreprise. La partie empirique nous aide désormais à expérimenter les faits étudiés théoriquement par l'expérimentation et l'observation du terrain. Par le biais de cette analyse, nous pourrons vérifier si cette technologie apporte son lot de bénéfice ou si au contraire d'éventuels problèmes sont soulevés. Nous verrons également comment l'entreprise réagit pour parvenir à dépasser ces limites.

9. Méthodologie de recherche

9.1 Cadre Épistémologique

Il existe différents cadres épistémologiques. Ces derniers nous permettent de construire des connaissances. Dans les sciences sociales on distingue quatre grands cadres épistémologiques (Avenier et Schmitt, 2007) :

1) Le cadre positiviste

2) Le cadre réaliste-critique

3) Le cadre constructiviste pragmatique

4) Le cadre interprétativiste

Page 58 sur 111

Dans ces différents cadres, le but de la connaissance n'est pas le même (Avenier, & Schmitt, 2007). Le cadre positiviste nous amène à rechercher : on se base de fait pour trouver des corrélations. Le réaliste critique amène le chercheur à découvrir les provenances issues de ces corrélations en essayant de comprendre leur provenance.

Le constructiviste pragmatique essaye d'organiser l'expérience du réel : comment nous comprenons à travers notre expérience le fonctionnement du réel. On ne connaît que notre expérience de ce dernier, ce que l'on perçoit à travers ses sens. Pour les constructivistes, le réel est constitué d'interprétations qui se construisent grâce aux interactions (GirodSéville, Perret 1999). Cela s'apparente donc à une méthodologie des connaissances constructibles (Le Moigne, 1995). Le constructiviste pragmatique signifie que les connaissances développées seront mises à l'épreuve dans l'action sur le terrain. C'est la relation forte entre la théorie et la pratique.

Dans notre étude nous nous concentrerons sur les représentations que se constituent les acteurs par rapport à la robotisation qui concerne leur entreprise. Par conséquent, il ne s'agit pas d'étudier les faits en tant que tels (cadre positiviste), bien que des données objectives soient nécessaires pour contextualiser notre étude et en comprendre les résultats. Il ne s'agit pas davantage d'étudier des corrélations objectivées en tant que telles. Nous cherchons, en revanche, à identifier les constructions que se font les salariés des changements induits par la robotisation et les effets générés : les bénéfices ressentis, les espoirs, les craintes, les propositions de solution. Dans la mesure où nous n'irons pas jusqu'à interpréter ces représentations, à en déceler les fondements psychologiques, sociologiques, collectifs ou individuels, nous n'entrerons pas dans un cadre interprétatif à proprement parler. Notre choix d'étude se portera donc sur une approche constructiviste, riche en enseignements.

9.2 Choix de l'outil d'enquête : le guide d'entretien.

Permettant de confirmer ou d'infirmer certaines hypothèses et de répondre à la problématique du présent mémoire, nous réaliserons plusieurs entretiens semi-directifs s'adressant aux personnes issues du monde industriel. Afin d'obtenir une vision juste et représentative de l'ensemble du personnel d'entreprise, le guide d'entretien s'adressera à seize

Page 59 sur 111

personnes issues de différentes catégories socioprofessionnelles. Cette démarche permet de comprendre, à différents niveaux hiérarchiques, les différents points de vue sur le sujet.

9.3 Réalisation de l'enquête

Les entretiens semi-directifs mettent en avant différentes opinions sur un sujet qui ouvre à la discussion où une réponse binaire ne permettrait pas de récolter ces précieuses informations. Les personnes interrogées proviennent de différents secteurs géographiques, sont d'âges différents, et ont une expérience plus ou moins importante dans le monde industriel.

Le questionnaire utilisé pour réaliser l'entretien contient six questions à thèmes permettant d'étudier certains points précis issus de la problématique. Il y a également des sous-questions afin de relancer l'audité sur certains points particuliers.

L'étape initiale consiste à déterminer un échantillon hétérogène sous forme de liste des personnes souhaitées, permettant d'effectuer une prise de contact rapide et d'obtenir une étude élargie à l'ensemble des catégories professionnelles. Ainsi, une demande par courriel, téléphone ou physique a été réalisée. La majorité des personnes ont répondu favorablement à la demande, montrant un réel intérêt pour cette problématique.

Dès lors, une phase explicative s'est déroulée. Ont été mentionnés : l'objectif de l'entretien, la problématique du mémoire, les cibles de ces entretiens, la récolte d'informations. Il convenait aussi de mettre l'individu en confiance en présentant les modalités de l'entretien tel que la nécessité d'une disponibilité minimale d'une heure. Avant le début de l'entretien, les personnes ont été questionnées s'ils souhaitaient garder le statut d'anonyme ou non, permettant dans certains cas de libérer la parole.

L'ensemble de ces témoignages ont eu lieu en face à face dans des salles de réunion prévues à cet effet. Ces témoignages sont enregistrés de manière audio afin de garantir l'exactitude des propos tenus par l'audité lors de la retranscription dans ce mémoire des idées sous forme de verbatim. Lorsque l'entretien se termine, après avoir remercié l'audité, un exemplaire numérique du présent mémoire a été proposé lorsque celui-ci sera disponible.

Page 60 sur 111

Une fois les données recueillies, une étape visant à analyser les entretiens a été effectuée : l'objectif étant de faire ressortir d'éventuelles similitudes, des faits récurrents ou au contraire des informations nouvelles et pertinentes, par un système de mot clés et des techniques d'analyse d'entretiens. Cette approche a donné une représentation de la pensée des individus dans le contexte de l'étude.

9.4 Méthodologie Qualitative

Dans le cadre de la recherche de ce mémoire, nous avons la possibilité d'utiliser différentes approches de méthodologie de recherche. L'approche qualitative, qui privilégie l'investigation de manière profonde et méticuleuse permet de récolter les informations riches et porteuses de sens dans un domaine mal connu.

Plutôt dire que la robotisation est un phénomène récent, qui a été étudié de façon objective, dans ses conséquences à l'échelle d'une entreprise, mais très peu au niveau du vécu des salariés qui doivent s'y adapter. Or, comme l'ont montré les travaux cités dans la partie théoriques, la conduite du changement et la réussite du changement sont fondamentales pour intégrer positivement la robotisation au fonctionnement de l'entreprise. Dès lors, l'approche qualitative semble s'imposer pour conduire notre étude.

La première étape consiste à déterminer le monde de récolte d'information dans l'industrie dans laquelle nous allons étudier la robotisation. Nous choisissons d'opter pour des entretiens semi-directifs auprès d'individus issus de différentes catégories socioprofessionnelles. Cette étape débute par une planification des thèmes de l'évaluation ainsi que la détermination des problèmes potentiels exposés par la littérature.

Dans cette optique, l'objectif est, d'abord, d'identifier le but des entretiens pour en déterminer les questions clés. Ensuite, il est essentiel de décider par quel cheminement procéder à cette récolte d'informations afin de répondre à la problématique présentée dans cette étude sur la robotique industrielle. Nous souhaitons ainsi comprendre l'environnement interne et externe dans lequel nous allons recueillir ces données en réalisant une évaluation du contexte interne / externe.

Page 61 sur 111

La seconde étape consiste à combler les informations manquantes, lacunes des données à disposition en sélectionnant les problèmes. En fonction des données disponibles nous axons les questions selon la pertinence des données voulues / recueillies. Cela nous permet de confirmer que notre collecte de données prévue sera suffisante et répondant aux objectifs préalablement définis.

L'étape suivante concerne l'approche. Il s'agit de déterminer les individus qui feront l'objet de notre recherche suivant notre méthode et autres sources disponibles. L'objectif est de cibler des individus de catégories sociales différentes pour obtenir des valeurs d'intérêt différentes et confronter des idées (ex : une personne âgée aura-t-elle le même point de vue qu'une personne jeune ?).

10. Résultats de l'étude :

Elle porte sur un échantillon de 14 individus issus de l'entreprise Faurecia et complété par 2 professionnels de l'industrie de l'extérieur. Ils ont été sélectionnés suivant un principe d'équité socioprofessionnelle en prenant compte de leur positionnement dans l'entreprise et des secteurs de production.

10.1 La vision de la robotisation des individus de l'entreprise :

Le premier objectif de l'étude empirique est de déterminer la vision globale qu'ont les individus sur la robotisation. Sur la totalité des 16 entretiens le constat est nuancé : les personnes interrogées ne disposent pas d'un avis ferme sur le sujet en définissant la robotisation comme étant positive ou négative dans l'entreprise Faurecia.

Elle met en évidence certains points, dont des résultats originaux. Les différents thèmes qui suivent respectent l'ordre de la partie théorique afin de déterminer rapidement les différences ou la confortation des idées décrites dans la partie théorique. Nous débuterons la partie empirique par une détermination des individus des aspects positifs de la robotisation afin de déterminer les leviers de performance, puis nous verrons les problèmes soulevés par ces derniers et les différentes techniques pour les pallier.

Page 62 sur 111

10.2 Les aspects positifs : Les leviers de performance. 10.2.1 L'aspect qualité :

Pour la totalité des audités, la robotisation constitue indubitablement un levier de performance notamment dans le domaine de la production influençant favorablement la productivité de l'entreprise.

Arnaud Trimborn, expert Injection et programmateur indique : « Je constate la régularité, la répétabilité et la précision de ces robots, toujours en terme qualitatif. Cela permet de respecter la cadence imposée par notre client. ». Éric Barbier, responsable laboratoire ajoute : « Le robot va être répétable, la qualité devient toujours de plus en plus sévère, les clients sont de plus en plus sevrés en qualité et il devient de plus en plus dur de repérer ces défauts etc. Le robot est plus performant sur cette analyse. ».

La robotisation dans l'automobile et plus particulièrement chez Faurecia tend à être l'avenir. Le client impose à l'entreprise de plus en plus de contraintes et un temps de livraison de plus en plus court. L'investissement déployé par l'organisme dans ce secteur est de plus en plus important. Faurecia, étant de plus un grand équipementier français, souhaite développer cette culture de modernisation par la robotisation sur ses sites et les incite à prendre le pas pour développer la qualité de ses produits et donc étroitement la relation client - fournisseur.

Patrick Koeller, PDG de l'entreprise Faurecia, décrivait son point de vue vis-à-vis de la performance des robots dans une interview pour Les Echos : « Les robots nous permettent d'être plus compétitifs et il y a des effets intéressant lorsque vous regardez la géopolitique, il y a quelques années nous transférions nos outils de production vers les pays à bas cout en particulier dans les pays de l'est ou au sud de l'Europe, en Afrique du nord. Aujourd'hui avec ces outils digitaux, avec cette transformation digitale, on est capable de conserver dans des pays à haut cout une activité industrielle. Pour une usine Faurecia donnée, moins d'emplois, c'est vrai mais une pérennité réelle de nos infrastructures industrielles ».

En janvier 2018, le groupe Faurecia lance même un concours de grande envergure pour développer ce point : le groupe demande à l'ensemble de ses sites de déterminer le besoin et les

Page 63 sur 111

projets impliquant un robot. Les meilleurs projets sélectionnés se verront octroyés par Faurecia, aux frais du siège, un pactole complet permettant de robotiser le projet.

Nouredine Bagbiegue, consultant projet d'usine ajoute : « Il parait désormais certain que les grands groupes d'aujourd'hui, dont Faurecia, tendent à se robotiser un maximum, même pour les clients et les investisseurs. Je pense que ces derniers auront plus de confiance à nous attribuer de nouveaux projets car ces robots ont fait leurs preuves et nous permettent de nous spécialiser et de nous axer sur des projets jusqu'alors impossibles : par manque de compétence, de personnel, ou tout simplement de temps. D'autant plus que le groupe nous donne les moyens aujourd'hui et s'axe dans une démarche d'amélioration continue.».

Le monde automobile est strict et demande une maitrise complète de son processus de fabrication. La norme IATF 16949, dédiée au monde automobile et aéronautique, en fait foi. Du fait de la complexité des véhicules d'aujourd'hui, d'une multitude de personnalisation du produit et de la hausse des contraintes, la robotisation (collaborative ou totale) paraît être le choix vers lequel se tourne l'entreprise pour répondre au cahier des charges de son client. Le projet du Facelift montre que la robotisation de 70% des postes de travail sur la nouvelle ligne d'assemblage permet le respect du tact-time imposé par le client.

La performance du processus est accrue lorsque celle-ci est robotisée. En effet, réalisée par des gestes précis et répétable les robots permettent d'améliorer la rapidité de production des pièces. Ce point a notamment été constaté dans l'entreprise avec la robotisation par découpe laser de parties issues de la carrosserie pare-chocs avant.

Pour Eric Barbier, responsable Laboratoire et développement : « Certains postes ont fait l'objet de robotisation car on s'est rendu compte qu'il y avait de nombreux incomplets. C'était difficile pour quelqu'un d'être vigilant pendant tout un poste, de voir chaque fois un incomplet à des endroits différents et donc il y avait des cellules qui examinaient la conformité des pièces et les pièces étaient directement envoyés dans des containers ».

La rapidité du traitement de l'information est également un point qui revient fréquemment dans les différents entretiens menés, Martin Schissler, responsable informatique hygiène et environnement indique que « devant la masse d'informations que doivent gérer les

Page 64 sur 111

entreprises d'aujourd'hui, il est évident que la robotisation dotée d'une intelligence artificielle propulsée par la rapidité des processeurs d'aujourd'hui, permet un puissant traitement de l'information et tirer ses ressources dans des bases de données. ». Le traitement de l'information et la réaction en fonction du résultat obtenu permettent d'accélérer les prises de décisions.

De manière générale, l'ensemble des individus s'accordent sur le fait que la robotisation constitue un levier de performance dans la qualité avec l'amélioration des processus de fabrication. Nous retrouvons de plus, dans la quasi-totalité des entretiens, les mots clés suivants : « répétabilité, capabilité, gains de temps ». Mais il est intéressant de constater que les individus s'axent intuitivement vers l'aspect social.

10.2.2 L'aspect social :

Ce point fait moins l'unanimité : seuls 40% des personnes voient de manière spontanée et autonome les aspects positifs de la robotisation sur la dimension sociale. Sur ces 40%, l'ensemble des individus prennent l'aspect « travailler dans un lieu sécurisé » comme élément prioritaire de cette technologie. En effet, et conformément à l'analyse théorique, la robotisation permet de minimiser les travaux pénibles et donc d'impacter favorablement le nombre d'accidents et risques associés. Anne-Sophie Mougel animatrice Hygiène, Sécurité et Environnement informe : « La robotisation a déjà permis de démontrer à notre site une réduction évidente des accidents et des troubles musculo-squelettiques liés à la manutention de pièces. Les personnes travaillaient dans des zones non ergonomiques, parfois même côtés rouge ou noire (les pires cotations ergonomiques nécessitant un plan d'action immédiat). Une des solutions les plus efficaces et des plus radicales est de robotiser ces tâches dangereuses pour l'Homme. Cette solution a déjà été choisie pour le projet du Facelift car nous ne pouvions pas respecter les normes ergonomiques pour certains postes de travail. » Cette idée est de plus complétée par la vision de Martin Schissler, « Les accidents du travail et les maladies professionnelles représentent un coût extrêmement important pour une entreprise, quel que soit sa taille. Il n'est pas envisageable que les personnes travaillent dans des conditions dangereuses pour leur santé, nous tenons à l'intégrité physique de notre personnel. La robotisation est un pas de plus vers la sécurité et le respect des conditions de travail de notre personnel ». Les données permettent effectivement de constater que la première cause de maladie professionnelle chez

Page 65 sur 111

Faurecia est issue des troubles musculo-squelettiques provenant essentiellement des UAP d'injection et d'assemblage.

Dès lors l'entretien découle sur les secteurs susceptible d'être entièrement robotisé et le constat est unanime : la quasi-totalité des personnes nous indiquent qu'elles verraient le secteur de l'injection et de l'assemblage entièrement robotisé.

Paradoxalement, ce sont également ces secteurs qui embauchent le plus de personnes (contrats à durée indéterminé et intérimaires). Selon Jordan Martellota, technicien méthode assemblage : « Je suis sûr qu'un jour les secteurs de l'assemblage et de l'injection seront à terme entièrement robotisés ces deux secteurs représentent des difficultés pour l'opérateur. A l'assemblage comme à l'injection, l'opérateur manie différentes pièces de toutes tailles et de tout poids. Il piétine beaucoup sur place, ce qui n'est pas bon pour la santé. De plus, on travaille dans la précision : manipuler de petites pièces toute la journée dans tous les sens sur toute une vie, vous récolterez dans le pire des cas des troubles musculo-squelettiques. ».

La manipulation et la précision requises pour la production des pièces génèrent en effet une cotation ergonomique défavorable. Rendre un poste ergonomique pour l'Homme requiert parfois un investissement extrêmement important et peut-être dans certains cas insuffisant pour répondre aux critères favorables. De nombreux projets existants et toujours en cours au sein du site de Hambach pour rendre ergonomique des postes de travail utilisé par l'homme en font foi. Certains projets échouent, vouloir améliorer un système défaillant pour le rendre ergonomiquement plus acceptable mènera indubitablement l'entreprise vers de nouveaux problèmes.

Ce cas a notamment été expérimenté par l'entreprise dans le secteur de la peinture pièce et de la zone de changement de Skid (structure portant les pièces en thermoplastique produites). Ce poste longtemps coté noir ergonomiquement a fait l'objet de nombreuses modifications plus ou moins onéreuses. L'entreprise a désormais choisi de constituer un groupe de travail afin d'en déterminer les solutions. Ne pouvant y intégrer un robot autonome sur cette ligne pour des soucis techniques (l'intervention humaine d'un opérateur qualifié étant obligatoire pour déterminer la séquence en fonction de la production), nous avons décidé de mettre en place un système robotisé permettant d'assister l'opérateur pour le chargement et le déchargement de ces supports.

Page 66 sur 111

Ce projet a été immédiatement accepté par le groupe et l'investissement a été validé par le groupe permettant à la fois d'accéder aux bénéfices du robot et de la technicité de l'opérateur.

10.2.3 L'aspect environnemental.

La robotisation apporte également ses points positifs dans l'entreprise Faurecia, elle permet de réduire le bilan CO2 de l'entreprise. Anne-Sophie Mougel indique « les robots ont un impact nettement moins important sur l'environnement qu'un individu, hormis dans leur rares cas de maintenance corrective (génération d'huile...) » Le coût de consommation électrique d'un robot est estimé à 0,15€ / Kwh. Pour une utilisation de 300 jours par an, de façon continue (24h/24) soit 7200 heures, la facture est estimé à 600€ pour les plus petits et jusqu'à 2000€ pour les plus imposants. Le recours à cette technologie permet d'optimiser les ressources et d'améliorer les performances technologiques. Le site de Faurecia s'inscrit également dans une démarche énergétique et environnementale en y déployant respectivement les normes ISO 50001 (management de l'énergie) et 14001 (management de l'environnement). De ce fait, elle réalise mensuellement des revues énergétiques et environnementales permettant d'analyser les consommations de l'entreprise et d'y développer des actions amélioratives.

Mais l'ensemble de ces points positifs sont également nuancés dans l'entreprises par des problèmes potentiels, nous allons désormais voir dans la suite de l'étude ce que les entretiens ont permis de soulever et de voir si des solutions sont existantes pour y pallier.

11. Les problèmes soulevés dans l'entreprise Faurecia 11.1 La performance qualité :

La robotisation permet de développer la performance industrielle de l'entreprise mais cette technologie munie d'une multitude d'atouts pose également des problèmes et peut freiner sa performance. En étudiant Faurecia, il s'avère que les coûts liés à la robotisation en cas de défaillance peuvent être élevés.

La provenance des pièces issues d'un seul fabricant, la difficulté d'obtention des pièces ou les pièces caduques peuvent faire repenser l'ensemble d'une zone de production. Mais le

Page 67 sur 111

point le plus critique réside parfois dans la durée de maintenance de ces robots. La monté en informatique embarqué, la complexité des systèmes électriques, mécaniques, pneumatiques, rendent les opérations de maintenance de plus en plus complexes et de plus en plus longues avec parfois des diagnostics compliqués. La hantise du site de Hambach serait de mettre à l'arrêt son client par l'incapacité de produire des pièces liées à une panne robot.

Une information originale est également fournie par Patrick Hug, responsable du centre de recherche et développement d'Arcelor Mittal : « Il faut réellement faire attention à ce point, les robots ont une extraordinaire capacité et un défaut fondamental : c'est qu'ils font juste. [...] Quand on fait des gestes justes on a plus la moindre capacité de se développer. ». Ce point est alors très surprenant, ce qui faisait la force du système est vu par certains comme un défaut majeur : la justesse de ce dernier. Tandis que les robots font justes, les hommes eux font des erreurs. « Un cerveau humain c'est fait pour se tromper en permanence et pour pouvoir ajuster ses réponses de façon heuristique et créative et pouvoir assembler un comportement très adapté avec des décisions qui étaient fausses. [...], ce qui va faire la force de l'humain c'est sa capacité à se tromper. L'essentiel des découvertes humaines sont des erreurs d'interprétation. Partout où ces tâches seront robotisées, il faut que cela laisse un espace pour l'homme et son imaginaire. ». Robotiser entièrement les lignes peut s'avérer contreproductif en retirant cette part d'erreur. Les projets d'entreprises proviennent généralement d'erreurs humaines permettant l'amélioration des processus de fabrication, les données des plans d'action de l'entreprise en font foi. Ce cas a notamment été décrit par Anne-Sophie Mougel : « il n'est pas rare que certaines erreurs des opérateurs (j'entends de manière involontaire) aient permis de déceler des erreurs dans notre façon de procéder, et en analysant les lieux et en y préparant les actions adéquates, on à améliorer la performance du poste. ».

Ainsi, au-delà des aspects pécuniaires que peuvent avoir les entreprises face à la maintenance des systèmes robotisés, elles doivent prendre conscience également que les robots ont la capacité de reproduire exactement (dans les conditions normales d'utilisation) ce qui est demandé en éliminant le facteur d'erreur. Or, l'histoire de la recherche faisant foi, l'erreur permet de progresser et d'obtenir de nouvelles perspectives d'amélioration. La robotique permet d'accroitre les performances de l'entreprise quand cette dernière est capable de l'intégrer au mieux en tenant compte des facteurs susmentionnés. Mais ce point est fortement nuancé par

Page 68 sur 111

Martin Schissler : « Je ne crois plus au modèle de l'apprentissage par l'erreur, c'est dépassé. Dans l'industrie automobile nous n'avons pas le droit à l'erreur, cela coûterai beaucoup trop cher»

Nous allons désormais mentionner les aspects sociaux qui ont été mentionnés dans l'étude du site Faurecia.

11.2 L'aspect social et sécuritaire.

L'étude théorique nous montre que la robotisation peut dans certains cas être source de destructions d'emploi : ceux qui sont généralement répétitifs, dangereux pour l'homme ou pour répondre aux critères et orientations stratégiques économiques de l'entreprise. Le projet du facelift va réduire le nombre de salariés sur certaines lignes. Ces salariés sont essentiellement intérimaires. Cette question de destruction d'emploi divise les individus.

Pour certains cette destruction ne sera pas comblée par la création de nouveaux emplois chez Faurecia. Cet axe est notamment défendu par Arnaud Trimborn, expert Injection et programmateur machine Faurecia : « Si ce n'est pas compensé par des aides pour d'autres emplois, s'il n'y a pas une loi qui impose un reversement des gains lors de l'implantation des robots pour favoriser d'autres emplois, c'est destructif. De toute manière, même si nous obtenons de nouveaux emplois sur notre ligne d'assemblage, je pense que le nombre sera nettement inférieur à ceux qui disparaîtront avec cette nouvelle technologie. ». Il complète : « Nous sommes des êtres sociaux, et travailler avec très peu de monde, on sait tous vers quoi cela mène : dépression et vous perdrez votre intérêt et votre motivation à travailler dans cette entreprise. Nous avons besoin de ce lien social ».

Jean-Sébastien Fafournoux, représentant du personnel nous donne sa vision concernant ce point : « Si on estime qu'un opérateur est uniquement employé, rémunéré pour faire une tâche de production en 8 heures de temps sans penser son travail, en se mettant à la place d'une entreprise, oui le robot sera rentable, il ne tombe pas malade, ne négocie pas d'augmentations de salaire, de coefficient, et on peut le faire travailler 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Il n'y a pas photo. En revanche, si on souhaite qu'il y ait une émancipation de l'humain et que dans une entreprise il y ait un minimum de lien social pour que les gens puissent améliorer leurs

Page 69 sur 111

conditions de travail, améliorer leurs postes de travail, si on supprime l'humain et qu'on le remplace par des robots, ce phénomène n'existera plus. Même s'il faudra des techniciens pour régler ces robots, les dépanner et faire le service après-vente. On sera dans une déshumanisation. On sait également que le secteur automobile est l'acteur majoritaire dans la robotisation des lignes de production. L'Assemblage est le secteur qui se développera le plus dans cette technologie et il n'est pas improbable que dans les années à venir les conclusions faites aujourd'hui se réalisent pour de vrai et il est important de réfléchir en amont pour diminuer au maximum les risques liés à cette technologie. ». Il est intéressant de constater que le mot clé « lien » est très présent dans les entretiens, presque systématique des discours. Ce mot permet de comprendre le besoin des personnes envers ce lien social en entreprise et qu'il est difficile d'imaginer de travailler seul en compagnie des robots.

Dans l'entreprise Faurecia, les valeurs humaines sont très présentes et s'axent autour d'une culture d'entreprise : Beins Faurecia. Ces principes prônent des valeurs d'entraide, de créativité et d'autonomie. Cela explique une certaine difficulté d'acceptation sociale face à ces robots industriels. La peur de la perte de l'emploi n'est pas alors le premier point évoqué contrairement à ce qui a pu être établi via les recherches théoriques. Pour Bruno Bondu : « j'aurais du mal à déterminer si je souhaiterais travailler seul munie d'une équipe de robots, ou ne pas travailler du tout et rechercher un emploi dans une entreprise classique, mais dans le cas de notre projet du facelift on en est encore loin ».

Un autre constat, plus original encore, est décrit par Éric Barbier : « Un point particulier attire mon attention, et cela me fait peur même au niveau personnel, c'est la surveillance et le flicage au travail. Par exemple, imaginons qu'il y ait un être humain en même temps que le robot, ce dernier va emmagasiner une énorme masse de données, qui peuvent ensuite être utilisées pour dire : « Ce salarié, il est quand même moins performant que les autres, là il va 2 secondes moins vite, là il fait ça comme ça etc.» et donc en analysant ces données recueillies, on peut arriver à justifier que tel salarié est moins compétitif qu'un autre. C'est vraiment comparable aux réseaux sociaux, si quelqu'un s'accapare des données personnelles et les croise, celui qui les étudie, peut dire « cette personne là j'arriverai à lui vendre mon produit, à lui faire croire ceci ou cela, car j'ai remarqué que dans sa personnalité il a tendance à ... « dans ce cas-là ce n'est pas honnête. »

Page 70 sur 111

11.3 Des risques pour la sécurité.

Travailler avec des robots n'est pas dépourvu de risque pour la santé. Même si ces cas sont extrêmement rares, l'analyse des risques doit le mentionner. En étant de plus en plus perfectionnés ces robots sont pourvus d'une multitude d'outils et autres composants permettant d'effectuer des tâches complexes. Ainsi, la présence d'outils dangereux dans les zones robots peut avoir des effets graves sur la santé : magnétisme, faisceau laser, vitesse, ligne de tir etc. sont des points qui nécessitent une analyse approfondie. Le projet du Facelift se verra doté d'une zone robotisé de découpe laser. Cette découpe sera réalisée par un laser de catégorie 4 (soit le plus puissant et dangereux existant). Les robots permettent de réaliser des opérations dangereuses dans un environnement maitrisé, la zone peinture de l'entreprise est le parfait exemple. Martin Schissler indique : « Cet environnement est vu de l'extérieur par nos employés. Ils l'estiment sécurisée car il n'y a pas de problème visible de l'extérieur de la cabine, mais ils oublient que c'est un robot qui est dans un environnement agressif et pas un homme. S'ils pénètrent dans cet environnement agressif sans le respect des consignes de sécurité cela peut être extrêmement dangereux. ». Les robots peuvent ainsi donner un sentiment de sécurité qui peut être dangereux.

Développer la robotisation permet en effet de limiter les travaux à risques et les sources de pénibilité, mais il est vrai que dans certaines configurations, ces systèmes peuvent également être source de danger pour l'homme. Heureusement, le site de Faurecia n'a pas eu à faire à un accident de ce type. Mais ces différents points affectant l'aspect social et la sécurité du salarié risquent de créer une forme de résistance, nous nous proposons de poser la question de la résistance au changement aux personnes interrogées.

11.4 Le phénomène de résistance au changement

Dix personnes interrogés sur la résistance au changement voient effectivement ce phénomène dans l'entreprise. Les mots clés « peur » « remplacement » « syndicats » « culture » reviennent souvent dans les propos tenus. Éric Barbier, déclare ainsi : « Oui, je pense que c'est le cas, en tout cas chez les allemands cette technologie, c'est culturel. Les Allemands aiment bien la mécanique et tout ce qui touche les machines, c'est les rois de la machine à outils dans le monde et c'est grâce à tout ça qu'ils ont une balance à l'exportation positive. Je pense que par

Page 71 sur 111

notre culture on aura toujours tendance à avoir peur face à ces nouvelles technologies car certains métiers seront amenés à disparaître. » Mais ce constat est nuancé par Martin Schissler : « dans notre entreprise les employés n'ont pas réellement de résistance car ils comprennent que ces robots apportent une amélioration des conditions de travail, ce sont essentiellement les intérimaires qui sont impactés par un non renouvellement de contrat »

Pour Patrick Hug : « C'est une crainte fondée car il y a une disposition du monde actuellement énormément de personnes qui n'ont pas forcément eu l'accès à une éducation d'abstraction suffisante. ».

Mais alors quelles sont les solutions que Faurecia peut - met en oeuvre pour y remédier ? 12. Les solutions pour pallier aux problèmes soulevés dans l'entreprise.

L'objectif de cette partie est d'exposer les recommandations que certains chercheurs et professionnels de l'entreprise Faurecia peuvent apporter à l'entreprise dans son contexte de modernisation du véhicule Smart afin d'accompagner au maximum cette technologie.

12.1 L'aspect économique.

Le coût de cette technologie peut s'avérer être un frein pour l'entreprise mais des solutions ont été exposées permettant de répondre au mieux à ces limites. Un service de maintenance adapté et formé aux nouvelles technologies permet de limiter les frais liés aux pannes des systèmes. La présence d'un automaticien spécialisé permet de pallier aux problèmes récurrents dont la solution ne nécessite plus l'intervention systématique du fournisseur du robot.

Martin Schissler indique « nous sommes passé à la deuxième génération de robot, on a divisé par dix le nombre de pannes et ces derniers sont capable d'alerter nos services avant même que la panne ne se produise ».

Dans les situations les plus graves, il y a un risque d'arrêt client qui peut coûter très cher à l'entreprise, sachant que Faurecia Hambach est située sur le site de son client unique. Arnaud Dubourdieu, responsable Qualité, nous informe qu'un arrêt client reviendrait économiquement « à 3000€ pour 10 minutes d'arrêt du client, sans compter les frais annexes ». Pour pallier ce

Page 72 sur 111

problème lié à l'arrêt client par un robot ou une défaillance système, l'entreprise met en place dans les postes les plus critiques un système de « back-up ». Pour Sébastien Dosne, méthodiste maintenance, « ces back-ups sont primordiaux dans notre entreprise, si un robot est défaillant, dans les meilleurs cas nous pourrions le remettre sur pied dans des délais n'impactant pas notre client ». Faurecia dispose en effet d'un stock tampon, dans une structure logistique entièrement robotisée permettant notamment de fournir pendant quelques heures le client si des soucis apparaissent (cas de pannes, grèves, problème matière, défaillance matière ...). Cependant, ce système ne garantit pas une livraison client si la panne survient pendant plusieurs heures. C'est ainsi que pour Sébastien Dosne : « Une solution réside dans nos postes back-up, surtout à l'avenir de la robotisation, ces petits postes permettent de réagir en mode dégradé et un opérateur peut garantir pendant tout le poste une production de pièces nécessaire pour livrer le client. ». En réfléchissant à cette réponse et en investiguant de plus près l'organisation d'entreprise, cette solution pourrait permettre en même temps de déplacer les emplois vers des métiers disposant d'une plus grande flexibilité. Il ajoute : « On pourrait croire que l'entreprise aurait choisi d'implanter des robots autonomes back-up mais cet axe n'est pas envisagé, la politique d'entreprise, la complexité de nos processus et la nécessité de dialogue avec le client fait que l'homme est, et sera la meilleure solution dans nos locaux. ».

12.2 L'aspect Social :

Pour certains, la solution se trouve dans la durée de travail adaptée à la modernisation de la ligne, Arnaud Trimborn propose par exemple de « Travailler moins. C'est à dire travailler et être capable de dire à nos salariés de l'injection : travailler sur une plus courte période pour pouvoir avoir une vie plus enrichissante. Travailler moins ne signifie pas être moins productif, cela signifie juste de mieux répartir les tâches. Former mieux les gens pour qu'ils soient plus performants à dépanner des robots, à les reprogrammer [...]. Dans ce que je constate actuellement, la solution c'est de répartir le travail sur plusieurs personnes. ».

D'autres voient en la formation un axe de résolution : « Si le robot devient monteur ajusteur, on n'aura plus besoin de monteur ajusteur. Mais pour créer ces robots il faudra cette connaissance pour réaliser l'architecture même du robot. Je pense que ça va créer des métiers

Page 73 sur 111

qui demandent plus d'autonomie et de responsabilité, d'initiative, de réflexion et créatif. Moins répétitif, plus créatif. » Eric Barbier.

Pour d'autres encore, l'Homme n'aura aucun moyen de contrôle sur cette technologie. Par exemple, Patrick Hug considère qu'il est illusoire de penser maitriser cette technologie mais qu'il faudrait repositionner sa vision et ses questions sur le but même du travail : « Dans un aspect systémique, cette technologie qu'on a produit à l'origine est plus forte que nous, c'est comme l'économie, elle nous surpasse, elle est au-delà de nous, c'est nous qui l'avons mise en place et elle nous échappe. Je pense qu'il est illusoire de l'imaginer canalisée. La seule chose c'est de dire maintenant que cela existe, comment arrivons-nous à trouver notre place dans ce système ? Pour certains individus, cela ne posera jamais de difficultés mais je ne sais pas s'il y aura de la place pour tout le monde à tout moment. Certains seront à l'aise dans les éléments sociaux culture qui sont les leurs, d'autres non, seront en crainte. La meilleure façon pour que les humains soient à l'aise c'est que les robots libèrent l'homme des contingences pour libérer son imaginaire. Si on n'était pas obligé de travailler que ferions-nous ? A quoi sert de gagner l'argent ? ». L'une des solutions résiderait dans la montée en compétence des salariés.

12.3 La montée en compétence.

La prise en compte de la nécessité de montée en compétence des salariés est un point qui est particulièrement pris au sérieux dans l'entreprise. Une structure de e-learning entièrement dédiée aux formations est mise en place. Le groupe Faurecia investi de plus en plus dans ces plateformes de formation digitalisées et font appel à des prestataires externe de service digital tel que Klaxoon, solution dédiée exclusivement à la réalisation de formations et réunions digitalisées. Dans ces formations on y trouve un éventail complet de thèmes touchant à la fois productivité, économie, gestion, management. La formation sur la «résistance au changement » est présentée en interne. Ce thème est connu de l'entreprise, et la formation digitalisée en E-learning en fait foi. Dans cette formation, l'entreprise propose aux individus « d'apprendre à désapprendre » en mettant de côté leurs anciennes pratiques car l'entreprise considère que la juxtaposition de processus anciens et nouveaux est impossible. Ces cours sont évalués, permettant d'octroyer un grade et un rang interne.

13 Comparaisons entre les solutions empiriques et théoriques

Ce tableau a pour objectif de présenter de manière synthétique l'ensemble des pistes de solutions proposé dans la partie théorique et étudiée sur le terrain.

Problèmes Solutions théoriques Solutions empiriques

La robotisation
industrielle
supprime les
emplois

· Les emplois sont déplacés ou de nouveaux emplois sont créés. Permet de débloquer des fonds d'investissement.

· Rend l'entreprise plus

efficace et permet
d'embaucher de manière globale.

· Réalisation de formations internes permettant la montée en compétence du personnel (formation de 3 techniciens devenus régleurs robots).

· Permet de maintenir les infrastructures dans les pays à haut cout.

· Impacte essentiellement les intérimaires

 

L'acceptation
sociale

· Création de robots sociaux permettant de prendre en compte les émotions des individus.

· Taxation de la robotique.

· Prendre en considération les attentes des employés.

· Etre à l'écoute.

· Analyse de ce facteur dans les nouveaux projets

 

La sécurité
menacée

· Mise en place d'un droit des robots avec cadre juridique spécifique. Charte éthique basée sur le concept d'Asimov. La sécurité aide à la réalisation d'opérations dangereuses.

· Etre vigilent sur l'image sécuritaire que donnent les robots aux salariés. Les robots travaillent dans un environnement agressif non adapté pour l'homme. Réaliser des formations et sensibilisations.

 

Page 74 sur 111

Résistance au changement

· L'accompagner, en tirer parti : la voir comme positive, mène vers une stabilité, un consensus. Les salariés ont une approche par les risques.

· Faible résistance du personnel de

Faurecia : ils acceptent la
technologie car elle améliore les conditions de travail.

· Réaliser de la communication avec l'ensemble des salariés en prenant compte de leurs attentes. Faire des formations sur les enjeux de demain et les faire « apprendre à désapprendre ».

 

Coût important
· Aide financière garantie par

l'état. retour sur
investissement de cette technologie important.

· Diminution de 40% en 10 ans du prix de la robotique.

· Aide du groupe au déploiement de cette technologie.

· Retour sur investissement important. Estimé à 2 ans.

 

Problèmes techniques

· Des coûts liés à la maintenance réduits.

· Des technologies plus fiables.

· Diminution par 10 du nombre de pannes lié au robot grâce aux nouvelles générations.

· Permet d'informer les services de l'entreprise avant même que la panne ne se produise.

· Une simplicité de remplacement des robots : présences de robots back-up

 

·

Permet de répondre aux critères du

Attractivité du
· Donne une image de cahier des charges du client Smart.

produit modernité à l'entreprise.
· Prix de production

Page 75 sur 111

· Cadence et reproductibilité assurée

Menace pour l'environnement

· Une consommation d'énergie moins importante qu'une consommation humaine.

· Consommation et cout (0,15€ / kwh) des robots faible.

· Précision de l'utilisation des ressources

· Meilleure gestion des
consommations des matières premières

· ISO 14001 / 50001

 

Le manque de compétences

· Faire monter en compétence par des formations régulières des employés pour les faire accéder à de nouveaux métiers

· Disponibilité d'une structure en e-learning permettant la formation et la monté en compétence des employés de l'entreprise.

· Formation des employés sur les nouvelles technologies

 

Page 76 sur 111

Page 77 sur 111

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault