4.3.2.2. L'implacable dégradation des stocks
ichtyologiques
Les ressources halieutiques, notamment les espèces les
plus exploitées, sont, on l'a vu, dans un état de surexploitation
ou de pleine exploitation (MINEPIA, 2015) et menacées
d'effondrement total. Aujourd'hui, les débarquements des poissons de
haute valeur commerciale (Lates, Bagrus, Heterotis, Gymnarchus etc.)
évoluent fortement à la baisse. La situation n'est pas
meilleure pour le reste des stocks, composés des Petrocephalus,
Hydrocyon, Mormyrus, Labeo, Clarias, Tilapia Sp., etc. dont les
captures sont constituées essentiellement d'individus de petite taille,
ce qui constitue un signe de surexploitation (Heincke,
191359).
De plus, les types d'engins de pêche prohibés
sont toujours utilisés massivement par les pêcheurs. Partout sur
la retenue, les filets monofilament sont les engins de pêche les plus
utilisés (Zagazaga). Malgré l'interdiction de la
palangre appâtée (Wari), des sennes de plage (Taro) ou
encore des célèbres éperviers (Birgui), certains
pêcheurs artisans persistent dans l'usage de ce mode de pêche dont
les effets sont de taille pour les habitats benthiques et les ressources
elles-mêmes.
Malgré la signature des textes relatifs à la
cogestion, les ressources ne cessent de se dégrader. Ce
phénomène se traduit par une sérieuse baisse de la
productivité des pirogues qui font diminuer rapidement les ressources
qui leur sont accessibles et se trouvent contrainte d'utiliser du savon ou du
son pour booster leurs rendements. Les gros sites de débarquement tels
Pont 2, Malka, Gamack etc. ainsi que certains sites qui jouxtent la digue
barrage de Guirvidig-Maga-Pouss, offrent des conditions insalubres : le poisson
est débarqué à même le sol où s'entassent des
déchets de toute sorte. Aussi, la masse des emballages plastiques
déversés le long de la digue menace sérieusement la
stabilité de la zone de frayère.
L'État est pourtant conscient de ce problème,
puisque les textes sur la gestion des pêches ont été
révisés à plusieurs reprises afin de protéger
davantage les ressources halieutiques contre une exploitation anarchique,
préjudiciable au développement d'une économie des
pêches. Le MINEPIA s'occupe à la fois de l'élevage, des
pêches des industries animales et les textes réglementaires n'en
finissent guère d'être révisés. Cette
multiplicité des tâches, corroborée par cette
instabilité du dispositif juridique en vigueur, traduit les
hésitations
59 F. Heincke (1913) a démontré que la
réduction du nombre de plies de grande taille et l'augmentation de
celles de petite taille dans les débarquements et la baisse
correspondante de la taille moyenne des plies résultent directement de
l'intensification de la pêche. C'est le premier signe de surexploitation
d'une ressource marine faisant l'objet de pêche par les hommes.
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et les incertitudes politiques. La situation de la pêche
perdure et le véritable problème demeure : l'absence d'une
gestion durable de la ressource.
Bref, l'exploitation des ressources halieutiques ne peut
être optimale à long terme que si les intervenants garantissent
une gouvernance raisonnable. L'établissement de restrictions à
l'accès libre aux ressources est une condition, mais pas suffisante pour
garantir une pêche responsable. Les institutions y afférentes
doivent définir un ensemble de mesures incitatives favorisant la
limitation de la pression de pêche à un niveau correspondant. Mais
il ne suffit pas que ces mesures soient définies, il faut
également les faire respecter.
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