2. REVUE DE LA LITTÉRATURE
Aujourd'hui comme hier, santé et environnement sont
indissolublement liés Vigneron E, (1999). La question de la
dégradation de l'environnement et son impact sur la santé a
été abordée par de nombreux chercheurs.
L'intérêt accordé à cette problématique est
d'autant plus important que plusieurs ouvrages ont développé
différents aspects de cette thématique. En Côte d'Ivoire,
des écrits existent également sur la dégradation de
l'environnement, mais dans l'ensemble ne traitent pas en profondeur le
problème de l'interaction dégradation de l'environnement et
santé des populations. Notre étude « Dégradation
de l'environnement et santé des populations dans le Sud Comoé :
Cas de la ville d'Aboisso », a conduit à l'exploration d'une
littérature en privilégiant une approche que nous avons
organisée autour de trois axes.
- La notion de l'environnement et de dégradation
;
- La santé et le concept de la géographie de
la santé ;
- Les impacts de la dégradation de l'environnement
sur la santé des populations.
1 - Environnement et le concept de la dégradation de
l'environnement
Les notions de l'environnement et de la dégradation
présentent une diversité de définition. L'abondance de la
littérature sur ces thématiques nous a permis de faire une large
synthèse des différents écrits que nous avons
organisés afin d'appréhender dans tous ses aspects, le sens de
ces notions.
1.1- Notion de l'environnement
Jusqu'en 1960, le mot environnement était absent des
dictionnaires. Mais avec l'émergence des problèmes
environnementaux et des catastrophes écologiques à
répétition, l'environnement rentre dans l'actualité.
Ainsi, selon le Dictionnaire Larousse (1972), l'environnement est : « Ce
qui entoure, ce qui environne, le milieu où vit une personne, l'ensemble
des éléments qui conditionnent l'homme ».
Le code de l'environnement ivoirien (1996) défini en
son article 1er, « l'environnement comme l'ensemble des
éléments physiques, chimiques, biologiques et des facteurs
socioéconomiques, moraux et intellectuels susceptibles d'avoir un effet
direct ou indirect, immédiat ou à terme sur le
développement du milieu, des êtres vivants et des activités
humaines. »
Cette définition de l'environnement selon le code de
l'environnement ivoirien est pareil à celle que nous propose le PNUE
(2005) : « Aujourd'hui, on entend par environnement,
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l'ensemble, à un moment donné, des agents
physiques, chimiques et biologiques et des facteurs sociaux susceptibles
d'avoir un effet direct ou indirect, immédiat ou à terme, sur les
êtres vivants et les activités humaines ».
Le terme environnement recouvre donc de nombreuses acceptions
et ne correspond plus seulement à l'idée du milieu. Dans un sens
assez généralement admis pour la santé environnementale,
la notion d'environnement renvoie à nos milieux de vie (domestique,
naturelle ou professionnelle). En Côte d'Ivoire, le Programme National
d'Action Environnementale (PNAE, 1994), qui a élaboré le livre
blanc, donne un aperçu de l'état de l'environnement urbain du
pays. Le programme présente l'environnement physique et biologique avec
les différentes composantes sociales, sanitaires et
géographiques. Mais le rapport relève également que
l'état de l'environnement est préoccupant.
Pour George P. (1980), la géographie a pour objet
l'étude de la condition humaine dans son environnement, qu'elle a
successivement subi, puis maîtrisé et dans certains cas
détruit. Il définit l'environnement comme le milieu global au
contact duquel sont confrontées des collectivités humaines et
avec lequel, il se trouve placé dans une situation de rapport
dialectique d'action et de réaction réciproque mettant en jeu
tous les éléments du milieu.
Plus loin, Tricart J. (1981) affirme que la géographie
a pour objet la description raisonnée et l'explication des divers
aspects de la surface du globe terrestre, l'un des plus importants de ces
aspects est la présence de quelques milliards d'hommes utilisant des
ressources, s'adaptant au milieu et le modifiant. Le rapport homme-milieu se
trouve ainsi au centre de ses préoccupations et qui est en fait la
charnière entre les sciences humaines et celles de la nature.
Pour Bertrand G (2002), l'environnement envisagé par
les géographes, ne recouvre pas la seule nature au sens restreint du
terme, il n'est pas synonyme de géographie physique, pas davantage de
faune et de flore, ce que l'on nomme aujourd'hui la biodiversité, pas
plus que de pollution et de dégradation. Il désigne les relations
d'interdépendance complexes existant entre l'homme, les
sociétés et les composantes physiques, chimiques, biotiques d'une
nature anthropisée, ce qu'il s'est proposé de nommer «
géosystème ».
Si l'on suit Dauphiné A (1979), l'environnement est
à la fois « une donnée, un perçu, un vécu
». Cette analyse permet de souligner que la planète ne porte pas
d'environnement qui
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n'aient pas été à des degrés
divers "modifiés" par les sociétés. Insister sur
l'anthropisation de la planète pose naturellement la question du statut
de l'homme dans la nature. Pour certains écologistes radicaux, l'homme
est toujours celui qui dégrade l'environnement, qui perturbe les
"paysages naturels" ou les milieux naturels, ce qui revient à
considérer l'homme comme un intrus dans la nature.
Pour les géographes, l'environnement est un objet
social qui intègre des données et des phénomènes
sociaux associés à des éléments "naturels" dans un
construit en quelque sorte "hybridé" pourvu d'une double dimension
spatiale et temporelle. Cette dimension temporelle est fondamentale dans
l'étude de l'environnement.
· Environnement et milieu
naturel
L'environnement est aussi un cadre de vie, un produit de
l'homme et de la société qui nécessite d'envisager les
aspects historiques et culturels des sociétés. De ce point de
vue, la perception et les représentations que les sociétés
ont de la nature varient selon les cultures et selon les époques
à l'intérieur d'une même aire culturelle.
Étudier un environnement c'est étudier une
relation. Pour VEYRET Y (1999), l'environnement « traite des relations
existant entre les sociétés et leur cadre physique, de la place
des facteurs naturels dans l'aménagement à différentes
échelles spatiales ». Elle écrit plus loin que ce terme
« désigne les relations d'interdépendance qui existent entre
l'homme, les sociétés et les composantes physiques, chimiques,
biotiques du milieu en intégrant aussi ses aspects sociaux,
économiques et culturels ».
Lorsque le géographe travaille sur un
"géosystème", l'objet de sa recherche est un espace où
sont en interaction des faits naturels et humains. Lorsqu'il travaille sur une
question d'environnement, son regard se porte sur les rapports des
sociétés avec un espace où la « nature » joue
encore un rôle.
VEYRET Y (1999), affirme également que pour la
géographie, société et nature (ressources, paysages...)
sont indissociables ; il convient donc de gérer les interactions avec
discernement et de manière durable. Mais toute transformation de la
nature n'est pas obligatoirement catastrophique, tout aménagement n'est
pas systématiquement dramatique ; certes, il faut envisager des «
seuils » à ne pas dépasser pour que les aménagements
ne dégradent pas les ressources et plus largement la nature. Ces seuils
doivent être établis en fonction du niveau de
développement, des données socio-économiques, techniques
et culturelles qui caractérisent à un moment de son histoire le
groupe social. VEYRET Y a proposé
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de nommer « géoenvironnement » la conception
géographique de l'environnement pour en souligner la
spécificité.
MORLON P. (1992), donne une définition du milieu et le
décrit par la suite. Il affirme que le milieu naturel est ce qui, dans
la nature, est perçu comme important à une date donnée par
un groupe humain donné. Il dit également que décrire un
milieu naturel ne consiste donc pas à accumuler autant de données
que l'on peut, mais au contraire à choisir un nombre aussi petit que
possible (principe de parcimonie du descripteur) qui permette de comprendre,
prévoir et éventuellement agir.
· Environnement et milieu : cadre de vie des
sociétés humaines
Dans un sens plus large, l'environnement comme le milieu, est
ce qui entoure un lieu. Il est ce qui constitue le cadre de vie des
sociétés humaines. Ces deux termes incorporent donc, outre des
éléments « naturels », les équipements
variés que les sociétés ont introduits (habitats, usines,
voies de communications, espaces cultivés etc.).
Cet environnement, de ce fait, agit plus ou moins sur les
sociétés. Il a une dimension matérielle, physique,
conçue en ce sens. Les notions de milieu et d'environnement
privilégient les relations d'une société avec l'espace
construit où elle vit. Parlant de rapport homme et milieu, George P.
(1963) a élargi les perspectives en donnant un intérêt plus
grand aux facteurs sociaux et ont étudié l'impact des actions de
l'homme sur le milieu. On passe alors à une géographie active
à partir d'une géographie des particularités et des
typologies : l'équilibre homme-milieu avec les facteurs endogènes
et exogènes. C'est donc l'étude des interactions entre les
diverses sociétés humaines et leur environnement et les
déséquilibres qui en résultent.
Bally A et Ferras R (2004), ont traité de la question
de l'environnement et du milieu dans leur ouvrage. Abordant la question de
l'environnement, les auteurs ont d'emblée fait un bref historique de
cette notion dont le sens a considérablement évolué. De
1917, la notion de l'environnement qui se résumait en une plante, a
été définit en 1964, comme l'ensemble des facteurs
biotiques (vivants) ou abiotique (physico-chimique) de l'habitat.
Quant à la notion de milieu, Bally A et Ferras R
(2004), affirment que c'est ce qui nous entoure. Plus loin, Ciattoni A et
Veyret Y (2007), abordent le concept de l'environnement comme l'ensemble des
relations existant entre les sociétés et leur cadre physique, de
la place des facteurs naturels dans l'aménagement à
différentes échelles spatiales. Pour les deux auteurs, le
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terme recouvre à la fois un milieu et un système
de relations, ainsi qu'un champ de forces physico-chimiques et biologiques en
interrelation avec la dynamique sociale, économique, spatiale. Ces
relations d'interdépendance existant entre l'homme, les
sociétés et les composantes naturelles du milieu fondent
l'approche environnementale qui inclut également perception et
représentation.
George P (1970), précise l'objet de l'environnement
comme l'ensemble des rapports réciproques entre les groupes humains et
leur domaine spatial, les interrelations qui lient les sociétés
et le milieu dans lequel elles se situent.
COMOLET (1991), le terme d'environnement désigne
« l'entour, c'est-à-dire un ensemble de choses et de
phénomènes localisés dans l'espace ». Pour insister
sur les interactions qui existent entre l'environnement et les activités
économiques, l'auteur analyse la notion d'environnement, ses composantes
et ses relations avec le système. Il choisit la définition de
Passet R., qui l'amène à distinguer l'environnement naturel de
l'environnement urbain.
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