CONCLUSION GÉNÉRALE
Le projet initial de cette étude était de
parvenir à la description des structures de la complétive
adjectivale et de mettre en lumière les possibilités
distributionnelles et transformationnelles possibles de cette
sous-espèce de subordonnée. Pour y parvenir, il nous a paru
opportun de revisiter des prérequis.
Nous sommes ainsi parti de la problématique de la
définition de la classe de l'adjectif qualificatif. Elle a
entraîné la question de la saisie des verbes attributifs et de la
fonction attribut. La logique argumentative a conduit l'étude à
la (re) découverte des autres complétives non-verbales. Nous
avons ainsi tablé sur la complétive du nom et celle de l'adverbe
pour tester l'hypothèse d'une harmonie structurelle et fonctionnelle des
complétives introduites par des prédicats non conjugables. Le
contact avec un objet épistémologique hétéroclite
auquel on applique un cadre théorique exigeant a posé des
écueils à l'analyse. Il fallait choisir entre la tentation de
l'éclectisme pour la rapidité des analyses ou la
fidélité au cadre du lexique-grammaire pour plus de rigueur.
La subordination, bien qu'étudiée depuis des
siècles, demeure un secteur dans lequel il reste beaucoup de
matière. La complétive est une proposition introduite par divers
éléments recteurs à savoir le verbe, le nom et son
corollaire le pronom, l'adjectif qualificatif, l'adverbe, la préposition
et le présentatif. Elle est liée à la principale par la
conjonction de subordination que, morphème grammaticale sans
fonction syntaxique, sans valeur anaphorique ni substance sémantique. La
fonction de la complétive peut être difficile à
détecter dans certains contextes telles les suites elliptiques et les
verbes dont le régime actanctiel n'est pas totalement
réalisé.
Nous avons constaté que la phrase simple a le
même schéma structurel que la phrase complexe, d'où une
similitude dans le fonctionnement et la saisie des subordonnées.. Cela
permet d'envisager ce qu'Onguene (2017 :251) nomme la syntaxe unitaire.
Au plan didactique, c'est une démarche qui enseigne la phrase en
montrant que des conjonctives complétives en PC (phrase complexe)
partagent avec le nom ou le GN en PS (phrase simple) les mêmes fonctions
; que certaines relatives révèlent le même comportement que
l'adjectif
qualificatif vis-à-vis du nom et les
subordonnées circonstancielles, le même fonctionnement que
l'adverbe. En clair, l'analyse montre que syntaxiquement la phrase est
une ; qu'elle soit simple, non simple ou plus complexe.
La phrase complexe et la subordination sont donc un couloir
d'analyse complexe. Elles génèrent des controverses. La phrase
complexe ne fait pas toujours de consensus. Rousseau (2005 : 297) estime, par
exemple, que
La subordination est le secteur de la grammaire où
règnent encore beaucoup de préventions, d'idées fausses ou
préconçues, souvent préfabriquées par les
schèmes simplistes de la pensée.
Contrairement à la complétive du verbe, les
complétives non-verbales dont fait partie la complétive de
l'adjectif n'ont pas encore suscité un grand engouement de la part des
chercheurs.
Or, elles présentent des faits syntaxiques dignes
d'intérêt. La relation entre le prédicat et les arguments y
est pertinente. Les contraintes de la détermination du nom, de la
sélection du mode s'y meuvent et suscite des problématiques. La
question de l'unité structurelle et fonctionnelle des complétives
posée par Evouna (2015) s'y trouve. L'originalité de notre
analyse réside non seulement dans le choix de l'objet d'étude
mais également dans le cadre théorique qui lui est
appliqué. Le lexique-grammaire est également une théorie
moins vulgarisée dans notre milieu. Il offre un champ de recherche peu
connu. Nous nous inscrivons donc à la suite de De Gioia (2015 :1).
Parlant du lexique grammaire, elle affirme : Nous nous adressons plus
spécifiquement aux jeunes doctorants et docteurs qui sont en quête
d'un parcours de recherche, pour leur indiquer un chemin peu connu mais
toujours prometteur. L'une des innovations du travail consiste donc dans
son inscription dans une théorie en progression et dans un champ neuf et
partiellement exploré. S'intéresser à la complétive
de l'adjectif implique une redéfinition de la place et du statut de
certains constituants, notamment l'adjectif qualificatif, la copule, les autres
verbes attributifs et la complétive elle-même. Que peut-on retenir
de cette analyse ?
Le travail, en sa première partie, montre que la classe
syntaxique de l'adjectif est loin d'être systématisée.
C'est une classe hétérogène aux contours encore flous.
Plusieurs schèmes et sous-classes se trouvent compilés à
l'intérieur de cette classe. Parlant de la complémentation de
l'adjectif qualificatif, il reste à discriminer les types d'adjectifs du
point de vue de leur fonctionnement et leur potentiel de rection,
c'est-à-dire leur capacité à
Les principaux prédicats sont le nom, l'adjectif
qualificatif et l'adverbe. C'est à ce niveau que l'intérêt
du lexique-grammaire apparait plus poignant. Cette théorie,
considère que tous
gouverner une complétive. Le gouvernement est pris au
sens générativiste. Leur profil est à construire au plan
distributionnel et transformationnel. Car pour Gross, cité par Wilmet
(1998 :109), deux adjectifs quelconques n'ont pas le même ensemble de
propriétés syntaxiques. Le travail n'a pas abordé les
pro-adjectifs, à savoir tous les constituants phrastiques qui,
par translation, peuvent syntaxiquement assumer un rôle dévolu
à l'adjectif qualificatif.
Pour le moment, nous retenons qu'il existe trois sous-classes
d'adjectifs qualificatifs. Ces dernières ont chacune un comportement et
des spécificités. Dans ces sous-classes, le participe
passé et le participe présent posent encore de sérieux
problèmes à l'analyse. Leur emploi adjectival et leur emploi
verbal restent mêlés. Une telle problématique constituerait
une piste de recherche prometteuse. Les compléments de l'adjectif
peuvent être un N, un infinitif ou une proposition subordonnée
complétive. Dans ces diverses structures, il existe des contraintes
distributionnelles et transformationnelles dont l'étude nécessite
un autre cadre.
La complémentation propositionnelle sélectionne
les adjectifs du premier et du quatrième type, à l'exclusion des
adjectifs relationnels et des adjectifs situationnels.
Pour mieux saisir le fonctionnement de la complétive
adjectivale, nous avons présenté les autres complétives
non-verbales. La description morphosyntaxique de la complétive du nom et
celle de l'adverbe était un tremplin pour tester l'hypothèse de
l'existence des constantes entre les complétives averbales, lesquelles
traits communs les distingueraient de la complétive du verbe. On
pourrait se demander ce qu'il en ressort.
Les complétives non-verbales apparaissent toutes
extravalencielles. En d'autres termes, elles ne rentrent pas dans le
schéma des arguments du verbe. Elles entrent toutes dans des phrases
prédicatives. La prédication est donc un fait
caractéristique des complétives non-verbales. Elles apparaissent
toutes dans une structure mettant en lumière la relation prédicat
et argument(s). Selon Evouna (2010 : 65)
Le prédicat représente le noyau lexical que
la visée communicative amène le locuteur à choisir parmi
les possibilités lexicales, sémantiques, syntaxiques,
énonciatives et autres rhétoriques de la langue, puis à
les utiliser pour mettre en relation un état de chose ; le second,
l'argument, s'étend comme le ou les choix partiellement
prédéterminés par le noyau ou prédicat.
les autres mots prédicatifs se syntactifient comme le
verbe. Ils ont un schéma d'arguments comme le verbe.
Postposées à leur recteur, les
complétives non-verbales induisent des transformations de divers
ordres.
La complétive nominale se rapproche de la
complétive du verbe. Les Nop sont, pour la plupart, issus pour
la plupart des verbes. Ainsi, il semble s'établir une analogie entre les
complétives du nom et les complétives du verbe. Néanmoins,
les conditions de cette équivalence restent à définir
d'une manière circonstanciée. Les Nop sont variés
et induisent des propriétés différentes.
Au demeurant, la complétive de l'adverbe n'en est pas
une. Il s'agit d'une structure intégrant une proposition
indépendante. Nous avons proposé d'y voir une phrase à
adverbe associé. Cette dernière est modalisée au
moyen de l'adverbe. En tant qu'unité indépendante, la proposition
n'y a pas de fonction syntaxique. L'adverbe porte sur toute la phrase. En tant
que circonstant, il peut se placer à diverses postions dans la phrase.
C'est donc un complément de phrase. Contrairement à la
complétive du nom qui a une variété de structures, la
phrase à adverbe associé n'a qu'une seule structure, à
savoir Adv+Que P. Antéposé à la proposition
indépendante, l'adverbe est régulièrement en position
initiale. Cette phrase peut donner lieu à plusieurs
réécritures dérivationnelles sur la forme Il est
Adj+Que P, Il y a +SN Que P et (Adv., Que P), (Que P, Adv.) ou
simplement se réduire en P.
On peut également se demander si les
dérivés possibles ci-dessus présentent les mêmes
possibilités distributionnelles et sémantiques que la phrase
à adverbe associé. Dans les structures Adv Que P, la
nature de l'adverbe est sélectionnée et conditionné. Les
catégories sémantiques de ces adverbes et leurs contours
morphosyntaxiques demeurent inconnus. Au bout du compte, les complétives
non-verbales posent des problèmes dignes d'être analysés
à leur juste mesure et dans des études spécifiques. Leurs
contours ne sont pas totalement découverts. Certaines de ces
propriétés peuvent être corrélées à la
complétive de l'adjectif, objet central de l'analyse.
La définition de la complétive de l'adjectif est
dynamique. Elle réfère d'abord à une subordonnée
liée à l'adjectif ou à un prédicat complexe au
moyen du morphème que, conjonction de subordination. Elle est
une proposition syntaxiquement liée à un adjectif
En dernier analyse, notre étude est une étape
d'un projet plus étendu, construire un lexique grammaire des adjectifs
prédicatifs introducteurs des complétives. Pour y parvenir, il
qualificatif. Elle rentre ensuite dans une construction
attributive. Autrement dit, c'est une proposition que l'on retrouve dans une
phrase pourvue d'un verbe attributif comme noyau central. La complétive
adjectivale sera enfin une proposition qui, introduite par le morphème
Que, est directement ou indirectement liée à l'adjectif
qualificatif dans sa fonction prédicative. La complétive de
l'adjectif se présente sous deux formes dans notre corpus, la structure
personnelle et la structure impersonnelles. Bien que les différences
entre les structures personnelles et impersonnelles soient nombreuses et non
encore systématisées, nous pensons que la sélection du
mode, la structure argumentale, les réécritures et
réductions possibles, les équivalences et les sous-classes de
verbes attributifs offrent des perspectives prometteuses pour cette
entreprise.
Cette complétive est susceptible d'être
remplacée par d'autres types de subordonnées. Ce sont les
circonstancielles, les participiales et des complétives du nom, de
l'adverbe et du verbe. Cela a conforté l'hypothèse d'une
unité formelle voire fonctionnelle entre les complétives.
Nonobstant le labeur déjà entrepris par Evouna (2015), nous
pensons que cette problématique mérite toujours une attention.
Que dire des adjectifs intégrés aux structures attributives ?
Certains rentrent simultanément dans les deux types de
constructions. D'autres choisissent soit la tournure personnelle, soit la
construction impersonnelle. Cela suscite d'autres questions. Peut-on envisager
une distribution exhaustive de ces adjectifs suivant la possibilité
d'intégrer telle ou telle structure ? Qu'est-ce qui au plan
morphosyntaxique et distributionnel prédispose certains à se
construire dans les deux structures et quelles contraintes
l'empêcheraient à d'autres ?
Les adjectifs qualificatifs prédicatifs semblent
présenter des propriétés distributionnelles et
transformationnelles au sein de ces énoncés. Au-delà de la
complétive elle-même, nous pouvons d'ores et déjà
nous demander ce qui caractérise réellement ces adjectifs. Nous
avons également postulé que la structure syntaxique dans laquelle
entre un adjectif qualificatif lui confère un fonctionnement syntaxique.
Quelles sont les propriétés morphosyntaxiques et
sémantiques des adjectifs qualificatifs sus-relevés ? Quels
critères peuvent être choisis pour leur dresser des tables suivant
la méthode du lexique grammaire initiée par Gross ?
fallait donc au préalable décrire la structure
qui intègre les adjectifs dont il est question. C'est à ce titre
que nous avons intitulé le mémoire Lexique-grammaire et
complétive de l'adjectif. Cette logique est en adéquation
avec les principes de notre cadre théorique. Pour monter un lexique
grammaire, il faut maîtriser la structure qui intègre le
prédicat ciblé. Avant d'aboutir aux tables telles que les
conçoivent Gross (1975), Gross et Vivès (1986) et Talone (2009),
il est important de saisir le fonctionnement de la structure. La structure
déteint sur le prédicat et ses arguments. Autrement dit, les
informations d'une table du lexique-grammaire dépendent du
prédicat et de toute sa construction. Par ailleurs, pour rester dans
l'esprit du LADL, on a besoin d'un traitement informatique des données
structurelles obtenues. Il est donc à envisager en perspective une autre
étude qui pourrait s'intituler Lexique-grammaire des adjectifs
recteurs de complétives. Pour être menée, il faudrait
que les logiciels fussent acquis et que les modèles de constructions des
tables soient choisis et mieux spécifier. En outre, au-delà la
langue française, le lexique-grammaire des parties du discours de nos
langues nationales peuvent être envisagés. Des travaux sur le
lexique-grammaire des noms, des adjectifs, des verbes, des adverbes, des
locutions ou des expressions figées en èwondo, en mbo'o, en bulu,
en bayangam, en bamoun, en bamougoum, en basa, etc sont possibles. Que dire des
lexiques-grammaires comparés entre nos langues et les langues
européennes ? L'aspect didactique n'est pas à exclure. On
pourrait s'interroger sur la manière de didactiser les principaux
prédicats du français ou ceux de nos langues à l'aune des
principes et des résultats des études liées au
lexique-grammaire. En définitive, la moisson est donc abondante.
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