Section ll. De la MONUC à la MONUSCO
Les hauts responsables des Nations-Unies ont été
informés de la volonté du Gouvernement qui, tout en souhaitant
voir le retrait total de la MONUC de la RDC être constaté courant
2011. Cette position de la Rd Congo se fonde sur la nécessité
impérieuse de démarquer le pays d'un état d'exception qui
dure depuis 1999. Certains esprits chagrins, au paroxysme de la suspicion, ont
cru voir dans cette échéance de 2011 un " stratagème " du
pouvoir pour " se débarrasser de la MONUC. C'est une manière
désinvolte, simpliste et caricaturale de présenter l'exercice
légitime par la RDC de sa souveraineté.
Les dirigeants congolais ont ayant étaient élus
en 2006 en plein mandat de la MONUC qui a du reste apporté un concours
apprécié au scrutin. On ne voit pas en quoi le retrait de la
MONUC leur serait particulièrement bénéfique. D'autres,
excipent d'une prétendue incapacité de la RDC à se prendre
en charge pour accuser le Gouvernement de faire preuve d'irréalisme et
d'aveuglement. Ce raisonnement est identique à celui des renégats
qui tentaient en 1960 de déstabiliser le mouvement d'émancipation
nationale emmené par le leader indépendantiste Patrice Emery
Lumumba d'heureuse mémoire.
Après le départ de la MONUC, la RDC ne se
transformera probablement pas. Il y aura comme dans tout autre pays, et comme
en RDC avant et après l'arrivée de la MONUC, des problèmes
socio-économiques ou de sécurité et des abus de droits.
Force est cependant d'admettre que la situation aujourd'hui n'a rien de
comparable avec le chaos provoqué par la présence inédite
dans notre pays d'une dizaine d'armées belligérantes à la
fin des années 1990, lequel poussa précisément la RDC
à solliciter l'assistance des Nations-Unies.
Le réalisme commande que soient pris en compte, d'une
part la survivance des résidus des bandes criminelles nationales et
étrangères dans les territoires du Nord-Kivu et du Sud-Kivu et,
d'autre part, les résultats actuels des efforts de reconstitution des
forces armées et de sécurité du pays dans la nouvelle, et
dernière configuration de la MONUC. C'est la raison pour laquelle le
Gouvernement a décidé que le désengagement des forces de
la MONUC
142 Conseil de sécurité de nations unies,
résolution 1797(2098) du 30 janvier 2008,
52
commence par celles d'entre elles qui étaient
déployées dans les zones non perturbées du
pays.143
C'est dans ce sens qu'il a été demandé
que à la fin de l'année 2010 le transfert de toutes les
unités de la MONUC encore présentes en RDC vers les deux
provinces du Nord et du Sud-Kivu qui font encore l'objet d'incursions des
groupes armés dans cinq de leurs territoires ruraux. Pour le
Gouvernement, les nouvelles attributions de la mission onusienne doivent
être exclusivement orientées vers le soutien aux efforts de
renforcement des capacités organisationnelles, opérationnelles et
d'encadrement des Forces armées de la RDC, de la Police et des forces de
sécurité ainsi que l'appui à la réforme de
l'appareil judiciaire. Le Gouvernement congolais ayant pris la décision
de se faire assister par des partenaires bi ou multilatéraux pour cette
réforme globale du Système de la sécurité,
l'implication de la MONUC dans ce projet pendant le reste du temps qu'elle aura
encore à effectuer dans notre pays a été
souhaitée.144
A : LA DEMANDE CONGOLAISE DU RETRAIT DE LA MONUC
Le gouvernement congolais a demandé aux Nations unies
un plan de retrait progressif de la MONUC.
1. Les accusations de l'État congolais contre la
MONUC
Le Gouvernement congolais et la MONUC ne semblaient plus
entretenir de bonnes relations depuis octobre 2008. Les causes de cette
méfiance sont à trouver dans le comportement imputé aux
agents de la MONUC, notamment leur attitude complaisante et complice à
l'égard des rebelles du CNDP. Des faits saillants ont ainsi fait asseoir
dans le chef de l'opinion congolaise l'inquiétude de voir en cette
opération non pas un ange gardien de la paix, mais une couverture de
distribution de la mort aux Congolais par les Rwandais.145
D'abord, au début de la transition, l'affaire d'un
certain major Kasongo qui s'était rebellé contre le Gouvernement
au point de voir le RCD violer les accords issus du dialogue inter congolais.
On a noté en conséquence des tueries à grandes
échelles à Bukavu imputées à
143 MULOMAYI NSANGWA, Monuc à la Monusco, rupture ou
continuité, mémoire de licence droit public, UNIKIN, 2010, p
37
144 ATAMADRI MANVOTAMA, O, De l'intervention de l'ONU dans les
conflits armés en RDC. De la MONUC à la MONUSCO,
Université de Kisangani - mémoire de licence droit public 2010,
p37
145 Idem, p 38
53
Jules Mutebusi et Laurent Nkunda, sans la moindre intervention
de la MONUC. Ce qui avait occasionné des émeutes sanglantes
à Kinshasa Capitale contre ses installations.
Mais ce qui a choqué l'opinion mondiale est le fait que
les casques bleus de l'ONU aient laissé la population civile être
massacrée par les soldats du CNDP sans la moindre réaction de
leur part. Un tel manquement contrastait avec leur mandat de protection de la
population civile.
Retenons que : « La détérioration de la
situation place la MONUC dans une position inconfortable. Le Nord-Kivu,
l'Ituri, le Sud-Kivu et le Nord Katanga baignent dans
l'insécurité. Que fait alors la MONUC ? De nombreuses critiques
ont été émises à son endroit ».146
Ensuite, certains agents de la MONUC étaient déjà
accusés de scandales et d'abus sexuels depuis 2008. En décembre
2007, par exemple, après des histoires de pédophilie et de trafic
d'armes contre minerais attribués au personnel de la MONUC, les
Congolais étaient convaincus des soupçons envers celle-ci d'avoir
en plus des missions officielles de maintien de la paix, d'autres missions
obscures.147
En prenant la précaution de ne pas perdre des troupes
au Congo, les Etats fournisseurs demandaient à leurs militaires de ne
pas intervenir, même lorsqu'il s'agirait de protéger les
populations civiles. L'engagement intéressé et mercantiliste a
engendré un goût affairiste dans le chef des Casques bleus qui
n'ont pas pour certains hésité à s'adonner à
l'extraction minière. Cet affairisme a engendré une
solidarité avec les groupes armés. Pris dans cet angle,
l'embrassade chaleureuse de Laurent Nkunda par le colonel indien Sahora Chand
en fin de mission ne pouvait pas constituée une surprise
scandaleuse.148 Mais ce qui aurait le plus offensé les
autorités gouvernementales ce sont certains attributs de
souveraineté bafoués par certains agents de la MONUC.
Beaucoup d'autres allégations sont mises à
charge de la MONUC allant de la complicité dans le pillage
illégal de ressources naturelles au trafic des armes avec les milices
congolaises.149 Cette attitude de la part de la MONUC ne pouvait pas
laisser indiffèrent les dirigeants congolais.
146Obotela Rashidi, N, les Défaites et
Échecs à l'endroit de la MONUC, 6 éd, La brouilleur,
Toulouse 2002, p 101 147 Idem
148MULOMAYI NSANGWA, Monuc à la Monusco,
rupture ou continuité, mémoire de licence, UNIKIN, 2010, p 40 149
Op.cit., p105
54
C'est dans ce contexte que nait la demande de
désengagement de la MONUC car elle commençait à desservir
les intérêts de la paix au Congo. Bref, on avait constaté
avec regret qu'en dépit d'énormes services que rend l'ONU en RDC,
ces quelques faits et gestes posés par le personnel de la MONUC
confortaient la thèse de la nécessité d'encadrer les
activités de ce personnel tant civil que militaire. Mais cette demande
n'ignorait pas l'importance de la présence de la MONUC sur le territoire
congolais.
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