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Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleur migrants haïtiens. Cas de la République Dominicaine, des états-Unis et du Chili de 2008 à  2018.


par Roodly RICHARD
Ecole de Droit et des Sciences Economiques des Gonaives (UEH) - Licence 2015
  

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Conclusion

À la lumière des obstacles relevés dans les diverses expériences mentionnées dans le présent travail, il convient de remarquer que les facteurs limitant sont multiples et relèvent à la fois du sous-développement institutionnel, des États mais aussi de l'inefficacité des politiques. Il est à souligner également que la plupart des initiatives en matière de protection des droits des travailleurs migrants sont le fait d'organisations internationales qui dans le cadre de programmes cherchent à impulser une dynamique au sein des organisations régionales, sous régionales voire nationales.

Les conditions définies par les autorités administratives sont difficilement appliquées, pour ne pas dire jamais. Dans la plupart des pays d'accueil le nombre de clandestins dépasse celui des migrants réguliers du fait de la porosité du dispositif administratif et des complicités de tous ordres. Le cloisonnement de la citoyenneté uniquement au niveau régionale et national est une entrave à l'ouverture237236, parce qu'elle risque de contribuer à leur stigmatisation par l'introduction administrative de restrictions et le renforcement de l'amalgame, fait généralement entre migrants, faux demandeurs d'Asile, refugiés et délinquants. Elles verrouillent, en plus, le champ du travail légal et affectent les droits des travailleurs migrants qu'elles finissent par rejeter dans le secteur informel.

Pour lever les obstacles et inciter à la ratification de la convention des travailleurs migrants et les membres de leur famille signée par l'État haïtien , il convient alors de développer des partenariats directs entre organisations internationales, organisations régionales et sous régionales dans le but de promouvoir, à travers des programmes communs, des initiatives visant à enraciner dans les pratiques institutionnelles le respect des droits des travailleurs migrants, de favoriser la formation des travailleurs migrants par rapport à leurs droits par le biais des associations de ressortissants, de mettre sur pied une instance de recours supranationale qui puisse permettre aux travailleurs migrants de se défendre en cas de violations de leurs droits dans les pays d'accueil, de développer des cadres d'échanges dans les pays d'accueil pour promouvoir le dialogue interculturel, d'harmoniser les législations

236 L'OIM communication sur « le droit international de la migration » l'enjeu Genève, le 13 avril 2004 p .213

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au niveau national, régional et continental ainsi que les structures qui sont chargées de les mettre en oeuvre, de diffuser par divers supports pédagogiques la dimension protectrice de la loi, d'ouvrir au sein des institutions régionales des concertations entre États importateurs et exportateurs et enfin relancer la campagne de ratification auprès des États non encore signataires.

Arrivé au terme de notre travail « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants haïtiens et haïtienne : cas de la République Dominicaine, les États-Unis et le Chile de 2008 à 2018 », il nous revient de résumer les faits saillants auxquels son étude a conduit, tâche n'est aisé car comme le souligne Yves GUYON « toute conclusion est périlleuse et nécessairement partielle ou partiale »237. Toutes fois l'examen fourni nous pousse à croire que l'exposé qui suit est une vue quasi suffisante complète ; objective de l'ensemble de cette étude.

La protection des travailleurs migrants réguliers, irréguliers, réfugiers et demandeurs d'asiles trouvent son fondement dans les normes à caractères régionales, sous régional et interne relatives aux droits de l'homme. Mais également et surtout dans les différents instruments et textes internationaux spécifiques comme la convention de 1990238.

Pour l'application et le respect de ces normes, aux droits de l'homme en général et des migrants en particulier une série de mécanismes de contrôle a été instituée. Il s'agit de mécanismes qui cherchent en résumé l'efficacité requise pour une réelle protection de la personne quelle que soit son statut. Malgré tout ce dispositif de protection, on constate une violation récurrente des droits de l'homme et des droits des travailleurs migrants en particulier.

Les rouages internationaux semblent impuissants à appréhender et à solutionner les situations des atteintes massives aux droits de l'homme239. Or pour que les mécanismes

237 GUYON Y., Droit des affaires, Tome 1, 8ème éd. Economica, Paris, 1994, p.1987.

238 https://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CMW.aspx

239 AMNESTY INTERNATIONAL, Manuel relative à la surveillance et à la documentation des violations des droits humains en Afrique CODESRIA (2001), 88 pages.

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internationaux puissent effectivement être utiles240, il faudrait construire un double étage de la normalité (interne et internationale).

En effet, comme le rappelle si bien le préambule de la déclaration universelle de 1948241, c'est l'institution d'un régime de droit sur le plan national qui est la meilleure garantie des droits fondamentaux. Si les systèmes juridiques nationaux ne deviennent pas performants sur le terrain des droits de l'homme, en vain s'échinera-t-on à sophistiquer les rouages internationaux ? Par son caractère supranational, la convention constitue une source d'enrichissement du droit interne en l'occurrence du Code du Travail au vu de la référence à des catégories juridiques jusqu'alors méconnues dans la législation actuellement en vigueur: les « travailleurs frontaliers(art. 2 § 2, a)» ou les « travailleurs itinérants » (article 2, alinéa 2) Travailleurs employés au titre de projet (art. 2 § 2, f).

De plus, à mesure que les avantages de la concertation régionale deviennent inéluctables, il s'avère de plus en plus évident qu'un dialogue interrégional sur la gestion des migrations est également nécessaire. Bien sûr, la multiplication des colloques, conférences242et des séminaires sur les questions de liberté de circulation est à encourager.

En outre, même si une grande partie de la migration se produit à l'intérieur des régions, il est indéniable que d'importants flux migratoires se produisent aussi entre les régions243. Malgré tout, aujourd'hui, les États doivent se rendre à l'évidence : les migrations se font, à différents niveaux et sous différentes formes, parties intégrales de notre présent et de notre futur244. Dans cet ordre d'idées, la consécration de la liberté de circulation dans les espaces régionaux et sous régionaux est surtout synonyme d'espoir. Toutefois, pour que ces espérances ne restent pas vaines, il serait indiqué de faire la part des choses. Ou bien la

240 C ASTLES (Stephen) and MILLER, (Mark J). The Age of Migration, op. cit., p. 47.

241 L'ensemble des archives sur la rédaction de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme peut être consulté sur le site http://www.unog.ch/library.

242 CONFERENCE PARLEMENTAIRE AFRICAINE « L'Afrique et les migrations : défis, problèmes et solutions » (Rabat, Royaume du Maroc, du 22 au 24 mai 2008) p.5-9. CONFERENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL, Etude d'ensemble sur les travailleurs migrants, Rapport III (Partie 1 B), Section II.B, 87e session, Genève, juin 1999 p.10-15.

243 ORGANISATION INTERNATIONALE DES MIGRATIONS (OIM), Gestion des migrations au niveau régional : Stratégies de consultation, op. cit., p. 15.

244 SPENCER (Sarah), the Politics of Migration, Grande-Bretagne, the Political Quarterly, 2003, p. 2.

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communauté internationale accepte dans son ensemble d'intégrer sa stratégie globale de gestion du phénomène migratoire et de lutte contre l'immigration clandestine dans les limites de la Convention de 1990 et ainsi profite des effets bénéfiques de l'immigration ,ou bien elle se réfugie dans le nationalisme ou le régionalisme juridique avec ses contingences et ses complexités par des systèmes de quotas qu'il soit par pays, par filière économique ou encore par regroupement familial ou encore par d'autres initiatives unilatérales qui créent davantage de problèmes qu'ils n'en résolvent. Dans ce dernier cas, non seulement les retombées positives des flux migratoires lui échapperont mais également se créeront et couveront les germes d'une déstabilisation sociale sur le long terme.

Dès lors, faire de la Convention un instrument universel par une adhésion massive devient plus qu'une nécessité mais un objectif à atteindre. Pour y parvenir, il faudrait joindre aux actes concrets une diplomatie active. Faire tomber aussi des barrières Nord/Sud semble aussi indispensable. De surcroit, la mondialisation en cours met au centre de l'activité la circulation des biens et services au détriment de la promotion des droits des migrants. Un recadrage s'impose si le monde a encore un souci d'humanisme. Cela pose toute l'importance du respect et de la reconnaissance des droits des travailleurs migrants dans la société. C'est le gage d'une société où la justice, la dignité, le travail décent, la protection sociale, le dialogue social, la démocratie en sont les socles indestructibles. Car, en tant que consommateurs, il se peut que la nourriture que nous mangeons où les vêtements que nous portons soient le fruit de l'exploitation ou de la maltraitance d'un individu. Et en définitive, le XXIe siècle ne se fera pas sans la maîtrise des flux migratoires et la protection des travailleurs migrants. Et si les États ne prennent pas suffisamment la mesure du défi et des enjeux, la vague de l'immigration clandestine245 risque d'emporter sur son passage les efforts réalisés jusque-là.

245 BENSAAD (ALI) « Voyage au bout de la Peur avec les clandestins du Sahel » LE MONDE DIPLOMATIQUE | septembre 2001 | Pages 16 - 17

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