2. LA COMPASSION
L'action humanitaire quotidienne est «
associée à la pitié, ou plutôt à la
compassion, qui traduit également les rapports d`identification mutuels
que l`on retrouve au fondement de la solidarité entre les êtres
humains, solidarité élémentaire sans laquelle il n`est pas
de société organisée »188. L'une des
plus grandes valeurs humaines qui suscite l'action humanitaire hors du conflit
est la compassion. Cette forme de dépassement de soi, cette empathie que
l'homme éprouve pour l'homme, qui a besoin que l'on prenne soin de lui.
« En nous identifiant à d`autres personnes, nous partageons
pour ainsi dire l`aide ou la satisfaction que nous leur avons offerte, nous
regagnons d`un côté ce que nous avons sacrifié de l`autre.
Nous réparons un élément fondamental de l`amour et des
relations humaines »189. Klein a voulu montrer que
l'idée de compassion implique un engagement vis-à-vis de l'autre.
L'humanitaire en permanence n'est pas un concours de circonstance mais tout
part du désir d'apporter à l'autre.
La compassion n'est pas à confondre avec de la
pitié. Selon Brauman , le plus important dans l'humanitaire, ce n'est
pas l'expression de la pitié mais la compassion. « Compassion
et pitié doivent être, dans cette perspective, fondamentalement
distinguées. La compassion s`exprime au singulier envers des êtres
souffrants, elle "ne parle que dans la mesure où il lui faut
répondre directement aux sons et gestes expressifs par lesquels la
souffrance se fait visible et audible au monde" et c`est pourquoi elle n`est
pas "loquace". L`émotion qui en est au principe n`a que peu de place
pour se déployer, et ne se fait pas entendre. La pitié, au
contraire, sort de la sphère privée, généralise et
se revendique publiquement "en tant qu`émotion, que sentiment" à
l`aune duquel doivent être mesurés les actes. C`est dans ce
mouvement d`exposition du sentiment à l`état brut que la
sensibilité se fait sensiblerie, que l`émotion devient
sentimentalisme »190 . La compassion est une base
essentielle pour toute initiative humanitaire. C'est elle qui ouvre le coeur du
volontaire humanitaire, c'est elle qui
188 P.De Senarclens, op cit,p.29.
189 M.Klein et J.Rivière, l`amour et la haine,
Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1992, p.88.
190 R. Brauman, « l'assistance humanitaire », op cit,
p.6.
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L'HUMANITAIRE ENTRE URGENCE ET PERMANENCE : LES ACTIVITES
DE MEDECINS SANS-FRONTIERE ET DE CARITAS EN AFRIQUE SUBSAHERIENNE
fait constater la souffrance, c'est une énergie qui
éveille et réveille les volontaires pour une oeuvre humanitaire
afin de mettre fin à la souffrance de l'homme. La compassion est
l'appétit qui aiguise l'action humanitaire. Cette compassion n'est pas
la pitié, parce la pitié peut être un sentiment passager
sans effet concret. Pourtant la compassion est une valeur plus forte qui
conduit à l'altruisme. L'humanitaire est une affaire de compassion. La
compassion permet de constater les souffrances des autres.
B. AU PLAN SOCIAL
Souvent, on entend parler dans les sociétés
africaines, de l'égalité entre les citoyens, cela est une
réalité difficile. Aucune société n'est
homogène même si ont été prévus les
mécanismes d'équilibre, la société est un tout
composite. L'égalité voulue par la société n'est
qu'une égalité de droit et non une égalité de fait.
A partir de là, on peut comprendre que la situation des
sociétés donne à voir les citoyens vulnérables et
les souffrances sociales.
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