Memoire Online - L’humanitaire entre urgence et permanence. Les activités de médecins transfrontière et de Caritas en Afrique Subsaharienne.

L'HUMANITAIRE ENTRE URGENCE ET PERMANENCE : LES ACTIVITES DE MEDECINS SANS-FRONTIERE ET DE CARITAS EN AFRIQUE SUBSAHERIENNE

INTRODUCTION GENERALE

1- CONTEXTE ET JUSTIFICATION DU SUJET

« Une masse immense de désirs, d`intérêts et d`activités constitue les instruments et les moyens dont se sert l`Esprit du monde pour parvenir à sa fin, l`élever à la conscience et la réaliser. (...) C`est l`union de l`Universel existant en soi et pour soi et de l`individuel et du subjectif qui constitue l`unique vérité.·(...) Une des implications de la connexion ci-dessus indiquée est la suivante : dans l`histoire universelle, il résulte des actions des hommes quelque chose d`autre que ce qu`ils ont projeté et atteint, que ce qu`ils savent et veulent immédiatement. »¹.

Hegel montre que l'humanité est marquée par le contact volontaire ou occasionnel entre l'homme et le monde. Il quitte sa condition humaine personnelle pour vivre pour l'intérêt universel. Pour ce faire, les hommes peuvent mener des combats au péril de leur vie. L'action humanitaire est donc un engagement universel qui fait partie de l'histoire douloureuse et heureuse des nations. Rony Brauman, artisan de l'action humanitaire de cette époque a apporté une réponse à la célèbre question philosophique d'Emmanuel Kant, « qu'est-ce que l'homme ?». « La philosophie humanitaire répond qu`il n`est pas fait pour souffrir ».² La légitimité et l'actualité de l'action humanitaire suscitent l'adhésion des acteurs de la scène nationale et internationale. Quel est le sens réel du vaste concept humanitaire ? Alain Destexhe répond : « s'il fallait caractériser d'un seul mot l'action humanitaire, ce serait par « ambiguïté » »³. L'ambigüité peut justifier l'usage de ce concept par la presse, les politiques, les Etats, les Organisations internationales, les Organisations non gouvernementales, les associations et même le profane. On peut donc être tenté de se demander quels sont les traits caractéristiques de l'action humanitaire ? C'est dire que malgré la célébrité du concept, les analyses portant sur sa nature, son contenu, sa théorie, sa pratique et même ses limites restent une nébuleuse. Pour Alain Destexhe : « après le « tout politique », nous vivons « le toute humanitaire », au risque de perte totale du sens du mot »⁴. Des interrogations peuvent habiter et troubler l'esprit du lecteur avec l'usage abondant du

³ A.Destexhe, L`humanitaire impossible ou deux siècles d`ambigüité, Paris, Armand COLIN, 1993, p 7.

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terme humanitaire : acteurs humanitaires, aide humanitaire, assistance humanitaire, communauté humanitaire, corridor humanitaire, couloirs humanitaire, droit humanitaire, droit d'ingérence humanitaire, ingérence humanitaire, médecine humanitaire, messianisme humanitaire, humanitaire d'endiguement, humanitaire de type caritatif, urgence humanitaire... Le vocabulaire humanitaire est large au point où on se demande si tout est humanitaire ou si l'humanitaire est tout. Cela explique toute quête de certitude et d'approfondissement du vocable significatif action humanitaire. Le Professeur Kamto l'affirme : « l`itinéraire humain est une recherche de certitude »⁵ Avant cela, il sied d'indiquer quelques grands épisodes de l'histoire de l'action humanitaire si tant il est vrai que « l`esprit a toujours le retard sur le monde. L`histoire court quand l`esprit médite »⁶.

L'histoire de l'humanitaire est une marche longue, progressive, riche et idéologique. Elle est longue quand on veut rester dans la logique séculaire. Durant l'antiquité et le moyen-âge⁷, on trouva déjà des prémices de pratique humanitaire. Les hommes vivaient selon le « devoir de solidarité » et les pèlerins et les militaires blessés recevaient les soins des mains des associations chrétiennes. L'esclavage et la mise en exécution des prisonniers de guerre étaient proscrits. Arrivèrent, ensuite les grandes périodes exploratoires, les périodes coloniales et la décolonisation. Comme le dit la doctrine avec Brigitte Piquard et Caspar Schweigman : « La période des grandes missions exploratoires d`abord, des colonisations ensuite, verra certaines techniques essentiellement médicales se développer: soins aux blessés de guerre, interventions dans les pays lointains ou lutte contre certaines épidémies. La période coloniale aura la particularité de réorienter le champ des actions vers d`autres secteurs, minimisant de plus en plus l`aide d`urgence au profit des actions à plus long terme liées pour la plupart au développement économique »⁸ . Cela s'illustre pour le cas des colonisations européennes aux Amériques et en Afrique. A partir du XVIII^ème siècle, l'action

5 M.Kamto, Pouvoir et Droit en Afrique noire, thèse de doctorat en droit, Université de Nice, 1987, p.67

⁷ M.Boulanger, Droit international humanitaire général, Paris, Gualino éditeur, 2é ed , 2007, p. 17. L'auteur indique le fait qu'à l'antiquité certains philosophes comme Aristote demandaient de vivre selon un esprit de solidarité et au moyen-âge les chrétiens réunis dans l'association les croisades de Saint Jean de Jérusalem qui ont développé une pratique de l'action humanitaire.

⁸ THEME (Ministère de la défense américain), « Où va l'action humanitaire ? », Louvain [numéro 139 | juin 2003] . Cette déclaration est tirée du sous thème intitulé : « Le défi de la professionnalisation » animé par Brigitte Piquard et Caspar Schweigman , p.12

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humanitaire sera visible à travers les conflits interétatiques et la référence à l'humanisme promu par les philosophies des lumières. Rousseau l'affirme : « J`élève les yeux et regard loin. J`aperçois et regarde au loin. J (aperçois des feux et des flammes, des campagnes désertes, des villes au pillage. Hommes farouches, où traînez-vous ces infortunés ? J`entends un bruit affreux ,
· quel tumulte ! Quels cris ! J`approche ,
· je vois un théâtre de meurtres, dix milles hommes égorgés, les morts entassés par monceaux, les mourants foulés aux pieds des chevaux, partout l`image de la mort et de l`agonie. C`est donc là le fruit de ces institutions pacifiques ! La pitié, l`indignation s`élèvent au fond de mon coeur»⁹. Cette description des effets de la guerre à cette époque montre bien dans quel contexte l'action humanitaire de la guerre ou dans la guerre va se déployer. La suite sera un enchaînement de guerres sanglantes où l'humanitaire sera mis à l'épreuve, elle qui n'avait pas encore un enracinement matériel et institutionnel réel. Pendant la guerre de Crimée (18541855), ont été expérimentés les premiers hôpitaux mobiles pour les blessés.¹⁰ Florence Nightingale¹¹ est reconnue comme un précurseur de l'action humanitaire médicale du XIX siècle. La Dame à la lampe¹², Eponyme d'une oeuvre de Gilbert Sinoué, avec ses collègues infirmières prendront soin des soldats blessés sur le champ de bataille. Elle trouvait saugrenue d'imaginer un service qui allait prendre soin des blessés de tous les belligérants sans distinction de camp. Comment évoquer l'histoire séculaire de l'humanitaire sans souligner la bataille de Solférino ( 1859). L'expérience du Genevois, pontife des sociétés de la Croix Rouge sera une avancée majeure pour l'action humanitaire. Ses écrits sur ce conflit étaient révélateurs : « Au moment de l`action, des ambulances volantes avaient été établies dans des

¹⁰ Br. Piquard et C.Schweigman « Le défi de la professionnalisation », op.cit., p.13

¹¹ Soucieux du bien-être des soldats, le secrétaire d'État britannique à la guerre de 1845, Sydney Herbert, nomme Florence Nightingale à la tête d'un groupe d'infirmières. Avant cette date, Aucune femme n'avait auparavant occupé une responsabilité officielle dans l'armée et seule son expérience professionnelle a suffi à convaincre. Nightingale arrive début novembre 1854 à la Caserne Selimiye à Scutari, le nombre de soldats nécessitant les soins était plus grand et la mortalité dans ses premières années d'intervention évoluera crescendo. C'est en mars 1855, que la mortalité diminue et l'hôpital militaire est assez équipé et plus adapté aux circonstances. Son management et les interventions de son équipe seront reconnus et Salués. (Source Wikipédia et l'ouvrage de Gilbert Sinoué, La Dame à la lampe: Une vie de Florence Nightingale, Folio, mai 2009).

¹² On appelait Florence Nightingale " la Dame à la lampe " parce qu'on la voyait parcourir la nuit les hôpitaux militaires, éclairée d'une lampe à pétrole. Elle réforme et assainit les hôpitaux militaires en pleine guerre de Crimée. Elle fonde en 1860 à Londres la première véritable école d'infirmières. Au même titre que Pasteur, elle joue un rôle déterminant dans la lutte contre les maladies infectieuses.

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fermes, des maisons, des églises et des couvents du voisinage, ou même en plein air à l`ombre de quelques arbres : là, les officiers blessés dans la matinée avaient subi une espèce de pansement, et après eux les sous-officiers et les soldats ; tous les chirurgiens français ont montré un dévouement infatigable»¹³. Son oeuvre va permettre d'aboutir aux premières conventions en matière de droit international humanitaire. Les autres expériences ont été observées lors des deux guerres mondiales. Surtout, la seconde avec l'entrée en jeu d'une floraison d'organisations internationales et d'organisations non gouvernementales.

L'entrée dans la danse du « sans-frontiérisme » incarné par Médecins Sans-frontière lors de la guerre du Biafra en 1967¹⁴ représente un des tournants majeurs de l'action humanitaire. Les années 1980 et 1990 vont connaître respectivement une augmentation exponentielle de l'aide humanitaire et de nombreuses critiques tenant soit au défaut de l'aide, soit à son retard dans de nombreuses zones de conflit. Evidemment, on peut comprendre la logique de cette époque : « Si depuis les années 1960, les actions de secours d`urgence ont connu une croissance exponentielle, dans les années 1980, l`Humanitaire est devenu non seulement un enjeu moral, mais aussi stratégique, politique et financier »¹⁵. Depuis les années 2000, elle est sollicitée dans des batailles peu classiques notamment les conflits internes et dans les affrontements entre les armées et les groupes terroristes. Le nombre de conflits et de catastrophes permet d'imaginer le besoin de l'action humanitaire sur la scène internationale. Cette considération est exprimée dans plusieurs travaux scientifiques : « On le perçoit chaque jour un peu plus, l`aide humanitaire est devenue un élément clé du jeu des relations internationales. Les exemples se multiplient »¹⁶. L'observation de l'histoire de l'humanitaire montre qu'elle évolue au rythme du temps. Les nombreuses fluctuations que celle-ci a

13 Dunant, Un souvenir de Solferino, 1862 réédition de la croix rouge française, Paris, 2014 pp.39-40. La bataille de Solferino, était une opposition entre la France et la Sardaigne à l'Autriche, est considéré comme l'une des plus sanglantes avec un bilan de : plus de 40000 morts. Henry Dunant s'y trouvait selon un concours de circonstances, et fut indigné par les milliers de blessés laissés sans soins .Il organisa une opération de secours pour tous les blessés qu'importe le camp de ceux -ci et admirait le courage des jeunes infirmières qui s'engagent volontairement à sauver des vies humaines.

¹⁴ Lors de la Guerre de Biafra (1967-1969), on observe une Séparation du mouvement humanitaire avec Médecins Sans Frontière qui force la porte et va secourir les victimes malgré l'interdiction du Nigéria. L'aide n'est plus neutre. Elle ne se fait plus avec le consentement des parties en guerre.

¹⁵ L.Quémet, La politique d`aide humanitaire : enjeu international de l`Union européenne, mémoire, université Robert Schuman Institut d'études politiques de Strasbourg, Juin 2007, p.6.

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connues au cours des dernières années représentent un matériau important pour les chercheurs comme le démontre l'abondance des études sur la question.

L'histoire de l'action humanitaire de type classique se décline en deux grandes étapes principales : la période primitive et la période moderne. La période primitive décrit celle au cours de laquelle l'action humanitaire était improvisée, peu règlementée et moins financée. Pour revenir à Dunant, son histoire montre qu'au départ, il ne savait pas que faire, il s'est trouvé hasardeusement sur le champ de bataille et autour de lui c'était les volontaires qui n'avaient pas un savoir-faire en la matière. Le matériel utilisé était peu adapté. « L`un de ces militaires se sent malade d`émotion, et nos autres infirmiers volontaires se retirent successivement, incapables de supporter longtemps l`aspect de souffrances qu`ils ne peuvent que si faiblement soulager »¹⁷. La deuxième période est la période de l'humanitaire moderne empreinte de professionnalisme avec des campagnes humanitaires organisées par des équipes compétentes et efficaces qui respectent les normes en la matière. Les organisations humanitaires disposent d'un personnel formé et donc l'action est déterminante à l'issue des crises. L'amateurisme est relégué aux oubliettes et les forces humanitaires apportent un espoir et une neutralisation des situations qui provoquent le désastre et les ravages. Cet âge d'or de l'humanitaire classique exprime sa richesse mais aussi le caractère idéologique de ces interventions.

L'action humanitaire est influencée par des idéologies. On a le triangle philosophie-religion-droit. Au plan philosophique, l'action humanitaire est influencée par la morale du bien, faire le bien malgré les circonstances et pour l'intérêt de l'humanité. « Un homme qui souffre dira Césaire n`est pas une ourse qui danse ». Du point de vue religieux, l'action humanitaire prend sa source dans des doctrines chrétiennes¹⁸ et islamiques. Au plan juridique, il est un truisme que la norme encadre l'action humanitaire. Le Professeur Boulanger l'indique si bien : « historiquement, le droit international humanitaire s`est affirmé comme l`expression juridique du sentiment d`humanité lors des guerres »¹⁹. Le deuxième élément idéologique concerne les couloirs qui ont toujours influencé l'humanitaire. Il s'agit des couloirs organisations non gouvernementales-organisations internationales-Etats. Les ONG locales et

17 H .Dunant, Un souvenir de Solferino, 1862 réédition de la croix rouge française, op. cit. , p.65

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internationales peuvent être considérées comme des laboratoires où sont conçues et préparées les interventions éventuelles dans le cas des activités humanitaires classiques. Le CICR apparait comme l'un un modèle en la matière. « Il y a 150 ans, un élan humanitaire annonçait l`avènement d`une nouvelle ère de solidarité internationale »²⁰. Les ONG travaillent en synergie avec les organisations internationales, c'est le cas de l'ONU qui s'est dotée d'une machine institutionnelle en la matière avec des organismes tels que de l'UNICEF, du HCR, OCHA²¹. L'action humanitaire d'Etat sera une étape importante de l'histoire. On part de la logique de l'Etat providence avant de voir l'Etat déployer des moyens logistiques lorsque survient une catastrophe humanitaire. Le Professeur Olinga déclare à ce sujet : « les Etats sont appelés à se mêler de l`action humanitaire ». Il reprend dans ses travaux un autre auteur : « un Etat peut avoir pour politique de soutenir des actions humanitaires et de mettre en oeuvre des moyens nécessaires pour que des organisations humanitaires puissent travailler dans les conditions les plus efficaces, les plus ouvertes et les plus dynamiques »²².La résolution 43/131 du 08 décembre 1988 conforte cette idéologie de l'humanitaire d'Etat avec l'avènement d'un nouvel ordre humanitaire voulu par les Etats. Le nouvel ordre humanitaire se résume en ces termes : « une action humanitaire créative à entreprendre à l`échelle tant internationale que régionale et nationale pour soulager les souffrances humaines et promouvoir des solutions durables aux problèmes humanitaires ». Cette humanitaire d'Etat s'est décliné en humanitaire des Etats en vue de mieux gérer les situations humanitaires qui surviennent. Delphine Loupsans²³ considère que l'humanitaire des Etats a pour vocation « de gérer multilatéralement les crises humanitaires issues de conflits politiques, au moyen d`une intervention politique, économique et/ou militaire. » .

Cette analyse s'inscrit dans une conception théorique de l'humanitaire. Faut-il voir une tautologie entre l'action humanitaire et l'urgence. Y a-t-il un temps favorable à l'action humanitaire ? François Mattei opine clairement : « Le terme « humanitaire » est passé dans

²⁰V.Bernard : « CICR 150 ans d'action humanitaire », Revue Internationale de la Croix-Rouge Sélection française, Volume 94 Sélection française 2012 /p.5.

²¹ Il a été créé en 1992 le DHA (Département des Affaires humanitaires) qui a été rebaptisé Bureau de la Coordination des Affaires humanitaires (OCHA) en janvier 1998.

²² Hermet cité par le Professeur Alain-Didier Olinga , in : L`humanitaire dans le désordre international. In populations en danger, Paris, Hachette, 1992, p.139

²³ D. Loupsans, La place des intérêts et des normes dans l'action humanitaire de l'Union européenne. Science politique, thèse, Université Montesquieu - Bordeaux IV; Institut d'études politiques de Bordeaux, 2009, p.32

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les perceptions et le langage courants comme synonyme d`urgence. »²⁴. L'urgence est donc un élément fondamental dans la compréhension de la logique classique. Dans le contexte de l'Afrique au-delà de cette humanitaire, il existe des besoins tous les jours, les enfants, les femmes, les orphelins souffrent tous les jours. On pourrait considérer l'humanitaire d'urgence comme une chanson à la survie et l'humanitaire en permanence est un rythme de la vie. Il importe de clarifier le sens de l'humanitaire sur la base de ces deux logiques. Excepté les conflits et les catastrophes naturelles, au quotidien il existe des situations qui ont amené des pratiques sociales cohérentes peu suffisantes mais capables de répondre aux souffrances quotidiennes. « Les catastrophes naturelles, les famines et les guerres sont trois exemples qui peuvent entraîner des êtres humains dans des situations qui ne leur permettent plus de survivre par leurs propres moyens » 25 . Cette réflexion indique les grandes lignes de l'humanitaire en urgence. « La réalité, c`est que des enfants sont abandonnés parce que leurs parents biologiques, souvent leur seule mère, ne peuvent pas les élever, faute de moyens matériels et faute de protection, ou tout simplement parce que leur mère est morte après leur avoir donné la vie. »²⁶. Ce cas de figure est une forme d'expression de l'action humanitaire du quotidien. La compréhension de ce sujet nécessite une étude pratique avec deux organisations non gouvernementales qui déploient une entreprise humanitaire sur la base de des critères d'urgence et de permanence. Il s'agit de Médecins Sans-Frontières, présentée au départ comme une organisation urgentiste et de Caritas qui est active auprès des couches défavorisées en Afrique. La pensée peut conduire à croire que si d'un côté MSF serait l'allégorie institutionnelle de l'urgence humanitaire, d'un autre côté l'allégorie institutionnelle de la permanence institutionnelle serait l'oeuvre caritative de CARITAS. Mais, il reste toutefois, difficile d'opérer une démarcation entre les organismes engagés dans une action humanitaire exclusivement urgente et celle se consacrant à une action humanitaire exclusivement permanente. Toute analyse a des frontières et ces frontières permettent de circonscrire le cadre de toute étude.

2- LA DELIMITATION DU SUJET

²⁴ J-F Mattei, L`urgence humanitaire, et après ? opinion, Éditions Hachette Littérature, 2005. Repris par le Economie & Humanisme
· numéro 375
· décembre 2005 p.84

²⁵ R. Philippe, M. Jonas, M. Antoine, Les limites de l'aide humanitaire, EPA, Lausanne, année 2006-2007, p.3

²⁶ D.SCHNAPPER, Quel est le sens de l'humanitaire aujourd'hui ? Conférence du jeudi 21 mai 2015, 18 h, Institut culturel italien, Paris p.6

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a) La délimitation matérielle

L'action humanitaire est un paradigme qui regroupe un champ d'action vaste. Ainsi, si une ONG ou une association se réclame des activités humanitaires, cela manque de précision. Plusieurs programmes entrent dans les activités de l'humanitaire. Loin de traiter la question dans cette immensité, il est nécessaire de se focaliser sur l'humanitaire en urgence pour les cas des conflits armés internes et internationaux et pour les cas des catastrophes naturelles et des crises sanitaires. Cela signifie que la résilience sera analysée subsidiairement cette étude.

Pour l'humanitaire en permanence, seules les activités caritatives et les politiques de

réduction de la misère auront un point d'honneur. La charité et la solidarité constantes sont des éléments qui guident l'action humanitaire en permanence. Les actions des ONG sélectionnées se situent dans ce champ. L'urgence et la permanence sont par conséquent deux des critères qui caractérisent l'action humanitaire. Les différents développements seront déterminés par ces critères. Les développements seront partagés entre la tentative de théorisation de l'action humanitaire et la pratique de l'humanitaire. L'action humanitaire est étudiée dans un contexte précis, celui de l'Afrique subsaharienne.

b) La délimitation spatiale

Cette recherche dans la phase pratique retrouve deux couloirs humanitaires institutionnels : MSF et Caritas. Ces deux espaces agissent dans la société africaine située au Sud du Sahara. Cela signifie que les exemples portent essentiellement sur les cas africains tirés de cette partie de l'Afrique dans lesquels se déploient ces deux acteurs. L'emphase n'a pas été mise sur un cas particulier en Afrique. L'analyse est théorique dans sa phase première en vue de comprendre les principales déclinaisons de l'action humanitaire en Afrique subsaharienne. L'étude se poursuit dans le cadre de deux institutions MSF et Caritas, des instruments par lesquels l'humanitaire en Afrique subsaharienne évolue. Les principales cibles sont les deux institutions humanitaires choisies.

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Il ne s'agit pas de tout embrasser mais plutôt observer comment l'action humanitaire est pratiquée dans ces sociétés africaines par l'entremise de ces organisations qui guident régulièrement le vent humanitaire. Cette étude ne peut se faire sans tenir compte des indicateurs de temps.

c) La délimitation temporelle

Toute étude objective s'inscrit dans une perspective eschatologique. On peut considérer que le présent et le passé sont des moyens pour appréhender une étude et leurs actions sont essentielles pour l'avenir. La période de référence de notre étude celle allant des années 1990 jusqu'aux années 2000. Période qui se justifie du fait que c'est à partir de là que l'humanitaire s'est multipliée en Afrique en Afrique subsaharienne. Cela est autant plus vrai au regard des événements nombreux, urgents et quotidiens subis par les sociétés africaines. Qu'est-ce que l'action humanitaire ? Il convient de procéder à une étape enrichissante et fondamentale de cette étude à savoir la clarification conceptuelle.

3- ANALYSE TERMINOLOGIQUE DES CONCEPTS

Gaston Bachelard établit le rapport entre la science et l'opinion. « On doit rien fonder sur l`opinion ( ...) l`esprit scientifique nous interdit d`avoir une opinion sur des questions que nous ne comprenons pas, sur des questions que nous ne savons pas formuler clairement ». Cette formulation passe par les définitions des concepts. Le professeur KAMTO précise que la définition est « la traduction en prédicats ou attributs qui prétend cerner l`essence de la chose »²⁷. Plusieurs concepts seront présentés en accord avec les définitions conventionnelles, lexicales, doctrinales et selon notre appréhension propre. La terminologie relative à l'action humanitaire en général est ainsi abordée avant de l'appréhension de l'humanitaire dans les formes urgente et permanente. Des précisions portant sur MSF ET CARITAS ne peuvent être négligées.

a) La notion d'action humanitaire

L'essai de clarification du concept action humanitaire se fera en deux grandes phases : la première phase directe avec trois critères d'appréhension de la définition et la seconde

²⁷ M. Kamto , La volonte de l`Etat en droit international, Maurice , Cours dispensé à la Haye en 2009, p. 24.

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phase indirecte avec deux concepts affluents à celui de l'action humanitaire. Il faut dire que les définitions reprises et commentées ici viennent de la doctrine et des milieux institutionnels. Le sujet sera analysé sous l'influence de ces labels. L'objectif étant de faire de l'action humanitaire un concept qui sort de la pénombre, « galvaudant sans cesse le mot, on le dévalorise »²⁸.

Le premier critère ici est global. Ainsi le CICR précise que : « l`action comprend toute entreprise en vue d`aider des êtres humains en état de souffrance physique et morale, en particulier lors des désastres, que ceux-ci soit d`origine humaine, naturelle ou technologique, mais surtout en période des conflits quelle qu`en soit la nature. »²⁹. Ce cadre général de l'action humanitaire est affirmé par la doctrine. D'abord le Professeur De Senarclens pour lequel l'humanitaire s'affirme « comme un cadre de référence pour l`identification des grands problèmes contemporains et une formule pour leur solution »³⁰. Ensuite, l'image utilisée par Alain Destexhe est fort saisissante. Pour lui, l'humanitaire « c`est une pépite dans le limon des problèmes internationaux et le filon est loin d`être épuisé »³¹ . On est tenté de s'inscrire dans cette logique imagée en considérant que l'action humanitaire est un parapluie qui met les victimes à l'abri des torrents et des grondements de la souffrance et du sang issus du conflit et de la misère sociale.

Le deuxième critère est à la fois moral et juridique, l'action humanitaire est considérée comme un système de normes et d'obligations morales. C'est un impératif catégorique soutenu par les exigences juridiques qui encadrent toute mission humanitaire. Il serait illusoire de parler de l'action humanitaire en oubliant l'élément moral même lorsqu'il y a des dérives dans l'humanitaire, c'est la morale que l'on pleure. Brigitte Tison fait une emphase sur l'élément moral en qualifiant l'action humanitaire « d`engagement volontaire d`assistance auprès d`autrui »³², ce qui fait ressortir la logique altruiste à la base de toute action

²⁹ M.P. Chevalier, « l'humanitaire : ses exigences et ses enjeux », Med trop n0 62, 2002, p.34.

³² BR. Tison, Partir en mission humanitaire, Lyon, Chronique sociale, juin 2008, p. 36

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humanitaire. Pour la dimension juridique, il faut dire que l'action humanitaire est influencée par un régime juridique notamment le droit international humanitaire. Le Professeur Olinga Alain Didier va plus loin dans l'analyse juridique de l'action humanitaire, il précise que « l`initiative humanitaire est une créance au profit des organisations humanitaires et de tous ceux qui offrent des secours ; les débiteurs en sont les Etats »³³. L'expression est utilisée, un contrat, qui suppose qu'il y a des parties et des obligations (l'élément juridique) et l'exécution des contrats se fait de bonne foi (l'élément moral). L'action humanitaire est donc une jonction objective entre l'élément moral et l'élément juridique.

Le dernier élément est lié à la finalité. Deux théoriciens et praticiens de la question sont ainsi convoqués, Rony Brauman et Phillipe Ryfman . Pour le premier :« L`action humanitaire est celle qui vise sans aucune discrimination et avec les moyens pacifiques à préserver la vie, le respect et la dignité, à restaurer l`homme dans ces capacités de choix »³⁴.Pour le second : « l`action humanitaire est une assistance fournie par un seul ou une conjecture d`acteurs s`inscrivant à des niveaux variés dans un dispositif international de l`aide régie par un certain nombre de principes et manoeuvre au profit des populations dont les conditions d`existence (...) sont bouleversées et l`intégrité atteinte, voir la survie compromise »³⁵. On ne peut passer sans un bref commentaire en affirmant que ces définitions sont essentielles. La seconde amène à s'interroger sur le pourquoi d'un dispositif international de l'aide et l'omission de son caractère national comme si ce qui tombe du ciel ne trouve pas ce qui est sur la terre. La Résolution des Nations Unies sur le nouvel ordre humanitaire indique que l'Etat est le premier responsable de la prise en charge des victimes des catastrophes naturelles et des situations d'urgence. Il est à noter que l'humanitaire n'est pas l`humanitarisme, l`intervention d`humanité, l`intervention militaire... Pour reprendre Brigitte Tison : « c`est le refus du sacrifice humain »³⁶.

La définition qui influence l'esprit de cette analyse est celle de la Cour Internationale de Justice dans l'un de ces arrêts de principe : « Savoir prévenir et alléger la souffrance des

³³ A.D, OLINGA, Contribution à l`étude du droit d`ingérence.( l`assistance humanitaire et la protection des droits de l`homme face au principe de non-intervention en droit international contemporain), thèse, université de Montpelier I, 1993, p.91.

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hommes et protéger la vie et la santé et faire respecter la personne humaine, elle doit aussi, et surtout, être prodiguée sans discrimination »³⁷ . Cet arrêt est pertinent met en avant l'idée du savoir-faire dans l'humanitaire et dépasse le cadre des circonstances, quand il y a souffrance humaine flagrante et immense, l'humanitaire est appelé à entrer enjeu. L'humanitaire, c'est l'art de donner et de recevoir du soin et du pain. « C`est un geste signifiant, conséquent et lucide de fraternité humaine, geste qui existe, semblable, depuis que l`humanité se pense elle »³⁸. Quand une personne souffre, primum non nocere ( D'abord , ne pas nuire), il faut avoir l'esprit à l'ouvrage, furor sanandi ( la passion du soin). La définition de l'action humanitaire la rapproche de l'assistance et de l'aide humanitaire. Comment concevoir un homme sans tête et sans coeur ?

? définition de l'action humanitaire à partir de deux concepts affluents :

Pour le cas de l'aide humanitaire, on peut reprendre la législation européenne qui dispose que : « l`aide a pour objet d`assister, dans les pays tiers, les populations victimes de catastrophes naturelles (séisme, inondations, sécheresses, tempêtes) de catastrophes d`origine humaine (guerres, conflits, combats) ... Elle se concentre sur la fourniture de biens et de services (par exemple aliments, médicaments, vaccins, eaux, soutien psychologique ...) »³⁹. Les auteurs la présentent à partir de sa nature et sa forme : « l`aide humanitaire se veut apolitique et neutre. Il s`agit d`une aide inconditionnelle et désintéressée pour les personnes dans le besoin, apportée dans le monde entier sans distinction sociale, politique ou culturelle »⁴⁰. Pour Caritas⁴¹, on parle de l'aide lorsqu'il y a quatre critères : la détresse existentielle (personne menacée), besoin d'être secouru (besoin en denrées de base), bénévolat (désintéressement) et l'institutionnalisation (intervention d'organisme). Le dictionnaire de droit international public définit l'assistance comme une « Opération menée par un ou plusieurs Etats, organisations intergouvernementales ou ONG, tendant à procurer, dans le respect du principe de non-discrimination, des secours aux victimes, principalement civiles, des conflits armés internationaux ou non internationaux, de catastrophes naturelles ou de situations d`urgence du même

³⁷ CIJ, arrêt du 27 juin 1986, affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Rec. CIJ 1986§43.

³⁸ A.Destexhe, L`humanitaire impossible ou deux siècles d`ambigüité, op. cit. , p.211.

⁴⁰ R. Philippe, M. Jonas, M. Antoine, Les limites de l'aide humanitaire, op cit ., p.6.

⁴¹ Cette analyse est présentée dans le rapport écrit par Philippe et autres p.7.

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ordre... »⁴². Il est vrai que nous reviendrons sur les éléments évoqués par Jean Salmon à la fin de la définition, éléments non repris préalablement. Un autre théoricien du droit international, le Professeur Olinga, fera une autre présentation de ce concept : « L`assistance humanitaire peut être considérée comme un droit, pour les personnes qui souffrent et qui ne peuvent trouver assistance auprès des pouvoirs publics, de demander et de recevoir une telle assistance de la part des secouristes extérieurs, quelle que soit leur nature... Le droit à l`assistance serait alors un droit erga omnes qui appelle, éventuellement, un devoir d`ingérence »⁴³.

Dans ces appréhensions du concept assistance humanitaire, deux logiques sont ainsi analysées. La première qui présente l'assistance humanitaire dans un contexte d'urgence conflit, catastrophes mais on omet de dire qu'il existe des situations en Afrique au Sud du Sahara, en campagne comme en zone urbaine, qui appellent cette assistance humanitaire. Prenons le cas d'une structure qui accompagne des handicapés visuels et moteurs, c'est une assistance humanitaire de tous les jours. La seconde logique est liée aux débiteurs de l'assistance, on parle des secours extérieurs en cas d'impuissance des pouvoirs publics. Cela est vrai pour les situations d'urgence, mais dans les souffrances quotidiennes, l'assistance humanitaire peut venir des initiatives privées du pays. C'est l'occasion de saluer les campagnes humanitaires du médecin camerounais, Bwelle⁴⁴, qui, une année durant, apporte de l'assistance humanitaire aux populations camerounaises vulnérables malades et ayant des plaies graves.

L'action humanitaire est donc une jonction de l'aide et de l'assistance humanitaires. C'est à se demander s'il y a confusion entre l'aide humanitaire et l'assistance humanitaire. Le dictionnaire de droit international y voit une confusion : « l'assistance humanitaire consiste en la fourniture des denrées alimentaires, de vêtements, d'abris, de médicaments, de soins médicaux et toute aide similaire...» ⁴⁵ . Cette logique est épousée par Lavigne ⁴⁶ et Lestienne. Pour eux, l'assistance humanitaire est proche de l'aide même si elle entraîne la passivité de celui qui en bénéficie. Il semble que si la complémentarité est forte entre ces deux concepts, leur identité est indubitable. Pour le justifier, on peut utiliser l'image de la bouteille. L'action humanitaire serait une bouteille offerte

⁴² J.Salmon , Dictionnaire de droit international public, Bruylant, 2001. p.98.

44 Ce médecin est le fondateur de l'ONG ASCOVIM qui effectue chaque mois, au Cameroun des interventions chirurgicales dans tout le pays auprès des personnes atteintes de plaies et de déformations incapables de prendre soin de leur santé du fait de leur précarité.

⁴⁶ j-c, lavigne, b.lestienne, construire une éthique de la coopération, Lyon, chronique sociale, 2000, p.16.

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gracieusement à la victime, ainsi le contenant de l'action humanitaire serait l'assistance humanitaire et le contenu l'aide humanitaire. Une assistance sans aide n'est pas possible et une aide sans assistance reste lettre morte. L'assistance humanitaire est le conducteur de l'action humanitaire et l'aide humanitaire l'élément conduit. En cas d'urgence ou de manière permanente, on besoin de l'aide et de l'assistance humanitaire.

b) L'action humanitaire entre urgence et permanence

De façon globale, entrent dans la catégorie de l'action humanitaire en urgence l'ensemble des missions humanitaires développées dans un contexte sécuritaire à haut risque et recommandant des interventions solidaires, rapides, efficaces et énormes. C'est la nécessité de secourir à l'immédiat les victimes et les personnes vulnérables des catastrophes naturelles et des guerres classiques et ou civiles. François Mattei résume cette situation à travers cette formule : « l`urgence se résume à l`impératif d`agir, de soigner coûte que coûte, d`administrer des remèdes à un mal bien identifié, sans solliciter une quelconque participation du bénéficiaire dans la relation d`aide. »⁴⁷. En dégageant des traits caractériels de l'humanitaire en urgence, l'un des pionniers de l'action humanitaire moderne, le Genevois Dunant affirmait déjà : « Il faut (...) des secours immédiats, car ce qui peut sauver aujourd`hui le blessé ne le sauvera plus demain, et en perdant du temps on laisse arriver la gangrène qui emporte le malade. »⁴⁸ C'est l'impératif de sauver toute vie menacée. Le cas malien est une illustration de l'action humanitaire en urgence en Afrique. Selon le rapport français de 2013 : « La crise politique et humanitaire que connaît le Mali depuis plusieurs années a plongé plus de 3,5 millions de personnes en situation d`insécurité alimentaire, dont 1,3 million auraient besoin d`une assistance alimentaire immédiate dans le nord du Mali. »⁴⁹. L'action humanitaire en urgence est un humanitaire de la nuit, un humanitaire noir ⁵⁰ et de la survie.

L'action de l'Etat social encore appelé Etat providence fut développée en Europe après la seconde Guerre mondiale. La mission de cet Etat social visait à protéger les marginalisés, les pauvres, les personnes du troisième âge, les orphelins... Cette mission s'accompagnait des actions en faveur de la santé, de l'éducation, de la nutrition, du logement... Dans le contexte africain, la souffrance n'est pas une surprise, dans le continent la souffrance l'emporte sur l'opulence. L'action humanitaire en

47 J-F, Mattei, L`urgence humanitaire, et après ?, Paris, 2005, éditions Hachettes, p.85.

⁴⁹ Ministre français des affaires étrangères et du développement international, Rapport d'activité sur l'action humanitaire d'urgence, 2013, p.11.

⁵⁰ Deux qualificatifs utilisés pour montrer les difficultés et les risques d'une campagne humanitaire en urgence. Le noir et la nuit sont des moments lugubres et dangereux.

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permanence apparait comme un ensemble de programmes et de stratégies qui accompagnent les couches les plus démunies et les plus vulnérables de la société. C'est la compassion envers les pauvres et « l`aumône légale visant à secourir les nécessiteux »⁵¹. C'est une identification empathique et sympathique à l'égard du faible et du malheureux. L'empathie faut -il le préciser est cette faculté d'accueil de l'autre comme il est, lui apporter de notre être et l'aider à se sentir homme. Pour Marandon c'est: « l`ensemble des efforts fournis pour accueillir autrui dans sa singularité, qui sont consentis et mis en oeuvre dès lors qu`est acquise la conscience de la séparation moi-autre »⁵². C'est l'ensemble des activités caritatives et de solidarité visant à réduire les couches sociales de la société. La qualifiant d'action humanitaire durable, Jean François Mattei la présente comme : « Un devoir d`accompagner corps brisés et âmes en peine pour leur permettre de repartir dans la vie, la vraie vie de tous les jours »⁵³. L'écrivain, Albert Camus viendra soutenir cette idée de permanence dans l'humanitaire : « N`êtes-vous donc pas des hommes ? Vivez-vous dans le seul instant ? Alors choisissez la charité et guérissez le mal de chaque jour »⁵⁴. L'illustration la de ce type d'humanitaire est celle d'un enfant affamé ou d'un handicapé moteur. L'humanitaire en permanence n'est pas une forme de mendicité. C'est l'humanitaire de la vie. Les ONG sont conscientes de tout cet état de chose.

c) Médecins sans frontières et Caritas internationale

Le cadre institutionnel de l'humanitaire est marqué par la présence d'une multitude d'acteurs. Chaque acteur a son identité. Dans notre sujet, nous nous intéresserons à une organisation non gouvernementale dont l'histoire et les missions ont intéressé les médias. MSF est une ONG de droit français fondée par les French doctors⁵⁵ lors de la bataille de la guerre du Biafra. Considérée comme la tête de proue du sans frontiérisme, MSF va intervenir dans cette guerre au mépris du consentement du gouvernement nigérian. Eleanor Davey exprime la philosophie et l'esprit de MSF : « The term sansfrontiériste (as an adjective, or sans-frontiérisme as a noun) refers explicitly to interventionist humanitarian action in the period since the Biafra/Nigeria Civil War (1967- 70), after which the principles of the International Committee of the Red Cross (ICRC) are considered to have been challenged by the future founders of MSF. The sans-frontiériste label

⁵² G.Marandon, « Eléments de communication interculturelle », in N.Roussia, Psychologie sociale, Paris, l' Harmattan, 2002.

⁵⁵ Ce concept permet de mettre en evidence des médecins français qui ont favorisé l'assistance humanitaire médicale qui sera par la suite le but de MSF. On peut citer Albert Schweitzer (1875-1965, Eugène Jamot (1879- 1937), Pierre Dufour's ...

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is directly derived from MSF, the 'without borders` epithet referring to the refusal to privilege respect for state sovereignty and discretion as guiding principles. »»⁵⁶ La guerre du Biafra constitue une étape majeure dans la modernisation de l'action humanitaire et une rupture avec une action humanitaire bureaucratique et dépendante.⁵⁷ MSF sans frontière n'a jamais manqué de dénoncer ou de faire un plaidoyer en faveur des victimes. Il est vrai qu'il y a des risques de politisation de l'action humanitaire mais c'est à se demander si prendre position pour l'humanitaire c'est manquer de neutralité ou d'impartialité ou demander de l'aide pour réaliser une mission humanitaire qui demande plus de fonds que prévu est-ce livré son indépendance ? Définir MSF, c'est aussi rappeler qu'elle est le fruit de l'union entre le Groupe d'intervention médico-chirurgicale d'urgence ( GIMCU) et Secours médical français (SMF) et avait choisi de se spécialiser dans l'humanitaire en urgence mais elle s'est adaptée avec le temps⁵⁸. « Ryfman summarized their contribution: 'this new type of NGO on the humanitarian scene charged itself with acting in the South, but with the aim of offering assistance qualified as "emergency" to people who were victims of natural disasters and especially of armed conflict (particularly those said to be "non-international," in other words civil wars), which would rapidly engulf various newly independent countries » 59 Au final, MSF est une :

« Association médicale humanitaire internationale créée en 1971, qui apporte une assistance médicale à des populations dont la vie est menacée: principalement en cas de conflits armés, mais aussi d'épidémies, de pandémies, de catastrophes naturelles ou encore d'exclusion des soins. »⁶⁰ .

« Caritas num quam excidit. » disent les classiques⁶¹. Caritas internationalis est un service de l'église catholique romaine qui prend soin des pauvres. Du point de vue de sa typologie, elle est une

⁵⁶ E.Davey, Beyong the French doctors the evolution and interpretation of humanitarian action in France, London, HPG Working Paper, october 2012, p.3

⁵⁷ E.Davey reprend l'analyse de Rufin : « Rufin described the sans-frontiériste innovation as a response to the blockages that were paralysing classic humanitarian aid, in light of the newly assertive Third World and Cold War antagonisms (Rufin, 1986: 62). He argued that it was an attempt to break the dependence of humanitarian aid on bureaucracy and state structures.

58 Notons que les types de mission de l'organisation sont au nombre de 5 : catastrophes, conflits, camps de réfugiés, assistance technique et Mission Solidarité France, tandis que les types d'activité sont au nombre de 7: nutrition, vaccination, environnement, formation, missions hospitalières, chirurgie et lutte contre les grandes endémies

⁶⁰ Définition reprise par la fiche d'identité de l'organisation. MSF a eu comme premier Président Marcel Delcourt et sa charte fut adoptée par treize membres en décembre 1971.

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confédération internationale d'organisations catholiques à but caritatif présent dans près de 198 pays dans le monde. Sa présence en Afrique noire est incontestable⁶² et elle s'inscrit dans l'esprit de la doctrine sociale de l'Eglise. Ce service avait une nationalité allemande⁶³ avant sa reconnaissance internationale et constitue la marque des activités de charité et de bienfaisance de l'église dans la société. Le Pape Paul VI en l'un des pionniers donnait déjà une orientation : « Combattre la misère et lutter contre la pauvreté et l`injustice, c`est promouvoir avec le mieux-être, le progrès humain et spirituel de tous et donc le bien commun de l`humanité »⁶⁴. Malgré sa philosophie catholique, cette association mène une campagne humanitaire impartiale et neutre dans le monde. Le choix de celle-ci se justifie par ce qu'en Afrique, elle est présente au quotidien auprès des pauvres. Le Pape François va conforter cette position : « Caritas est une caresse de l`Eglise à son peuple, la caresse de la Mère Eglise à ses enfants, sa tendresse et sa proximité »⁶⁵. Voir les pauvres affamés, voir les hommes marginalisés, tout cela doit susciter de la charité et de la compassion. Les points 4 et 10 du Code⁶⁶ de deontologie et de conduite du personnel de Caritas Internationalis indiquent la politique humanitaire de la Caritas. Pour le point 4 on retient que la compassion s'explique ainsi : « rassemblés en une même famille humaine, nous sommes profondément bouleversés par la souffrance des autres et avons le devoir moral de reconnaître l`impératif humanitaire d`y répondre. ». Pour le point 5, il parle de l'option préférentielle pour les pauvres et les opprimés : « Nous sommes engagés dans le combat contre la pauvreté déshumanisante, qui arrache aux personnes leur dignité et leur humanité ». Statutairement, il est reconnu que : « Caritas Internationalis est une personne juridique canonique publique consacrée au service des pauvres et à la promotion de la charité et de la justice » en « aidant les plus pauvres et les plus nécessiteux, en participant à la gestion des urgences humanitaires et en collaborant à répandre la charité et la justice dans

⁶² Le site officiel de la confédération parle d'une présence dans 45 agences nationales en Afrique Sub-saharienne.

⁶³ La première organisation locale Caritas est née en Allemagne à Cologne en 1897. Elle a été créée par l'évêque Lorenz Werthmann (1858-1921) dont le nom allemand d'origine était Charitas verband für das Katholische Deutschland dont la traduction littérale en français est: « Association caritative pour l'Allemagne catholique ». En 1916, Caritas est reconnue par la conférence des évêques comme l'union des associations caritatives diocésaines.

64 Paul VI, Encyclique Popularum progressio, ( le développement des peuples), Copyright - Libreria , Editrice Vaticana, 26 mars 1967, p.13

⁶⁵ Cette déclaration est reprise par le Pape François dans le rapport annuel de 2013.p.3

⁶⁶ Il a été adopté en mai 2004 à Rome. Les points 4 et 5 sont exprimés aux pages 4 et 5.

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le monde à la lumière de l`Évangile »⁶⁷ . Selon son organisation universelle, Caritas est définie comme « Caritas Internationalis est une confédération d`organisations caritatives catholiques qui sont, en général, des Caritas nationales. »⁶⁸. Sont reconnus comme membres des Caritas d'Afrique : « les organisations caritatives d`Afrique Subsaharienne et des Iles de l`Océan Atlantique et de l`Océan Indien membres de Caritas Internationalis, conformément à l`article 3 de Caritas Internationalis, et n`appartenant pas à une autre Région. »⁶⁹ La charité étant une activité quotidienne de l'église, Caritas est un acteur permanent de l'humanitaire. Et l'actualité de ces activités montre bien l'intérêt d'un tel sujet.

4- L'INTERET DU SUJET

De ce sujet, trois intérêts majeurs sont dégagés. Ces intérêts peuvent être scientifique, pratique et culturel.

Au plan scientifique, tout phénomène en étude entraîne une production de l'esprit. Traiter de l'action humanitaire sous cette forme recommande une démonstration, une analyse, un questionnement, des raisonnements et des conclusions objectives. L'analyse de l'action humanitaire doit cesser d'être un exercice d'émotion mais une activité rationnelle qui est basée sur des paradigmes scientifiques. Ce sujet permet d'étudier l'action humanitaire dans une forme classique et de considérer qu'il y a une autre forme avec des critères bien conçus qui la caractérisent. C'est une contribution qui permettra de déterminer les erreurs et de conforter des vérités au sujet de l'action humanitaire. Etudier un phénomène, c'est : « trié, filtré, épuré, coulé dans le moule des instruments, produit sur le plan des instruments »⁷⁰. Quand on parle d'action humanitaire, s'ouvre un dialogue interdisciplinaire entre le droit, la science politique, la sociologie, la philosophie, l'anthropologie, l'économie...

Au plan pratique, il est important de souligner que l'action humanitaire est la somme des expériences vécues lors des conflits, des catastrophes et des autres phénomènes de la

souffrance. L'étude pratique de l'action humanitaire mobilise ici, deux institutions,

historiquement considérées comme les acteurs humanitaires connus sur la scène

⁶⁷ Article I alinéa 2 et 3 des Statuts de Caritas révisés le 2 mai 2012 au Vatican.

⁶⁹ Article 2 des statuts des Caritas d'Afrique Adoptés le 15 septembre 2007.

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internationale. L'action humanitaire n'est pas une vue de l'esprit mais une solution pratique que l'on voit évoluer. Cette étude partage un lien avec la question des objectifs du millénaire pour le développement. Ce projet ambitieux des Nations-Unies visait à combattre la pauvreté sous toutes ces formes sur la base de huit grands piliers⁷¹ durant les quinze dernières années. Le premier pilier demeure avec d'autres des gangrènes qui affaiblissent l'homme. Etudier l'action humanitaire, c'est observer les souffrances quotidiennes. Nous imaginons un monde où les souffrances vont diminuer. Le rapport des Nations Unies relativement aux OMD débute sous un optimisme : « La communauté mondiale a de bonnes raisons de célébrer la fin de la période des OMD. Grâce à des efforts concertés aux plans mondial, régional, national et local, les OMD ont sauvé la vie de millions de personnes et amélioré les conditions de vie de bien plus encore. »⁷². L'action humanitaire est une expression de besoins, un besoin n'est pas un élément immatériel mais un problème concret. Il s'agit de la pauvreté, des maladies, des sécheresses, les conflits armés, les enfants abandonnées... Maslow ⁷³ propose une pyramide de besoins : les besoins psychologiques, besoins de sécurité, besoins des rapports sociaux et d'amour, besoins d'estime de soi et d'autres, besoin de réalisation de soi, besoin de savoir... La dimension pratique de cette thématique se justifie par rapport à son lien avec la sécurité humaine. Une étude sur l'action humanitaire permet aussi de s'appesantir sur la sécurité alimentaire, la sécurité sanitaire, la sécurité environnementale de l'homme. Les besoins peuvent varier selon la société dans laquelle on se trouve.

Le troisième intérêt est d'ordre culturel. La culture est un concept vaste qui s'identifie à travers des formes reçues de comportements issus des sociétés. La culture se trouve dans les structures artistiques, religieuses, intellectuelles ; dans les manières d'agir et de penser ; dans les capacités et habitudes acquises. L'action humanitaire est analysée dans un contexte, le contexte africain. Comme souligné précédemment, l'humanitaire de permanence entendue comme une initiative de nature caritative est une donnée culturelle de l'Afrique, la charité, le don, la solidarité... Compte tenu des cultures variables à travers le monde, un humanitaire en

⁷¹ Objectif 1. Éliminer l'extrême pauvreté et la faim. Objectif 2. Assurer une éducation primaire pour tous. Objectif 3. Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes. Objectif 4. Réduire la mortalité des enfants de moins de 5 ans. Améliorer la santé maternelle. Combattre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies. Assurer un environnement durable. Mettre en place un partenariat mondial pour le développement.

72 Nations-Unies, Objectifs du Millénaire pour le développement, Rapport 2015, New York, 2015 .P.4

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mission doit évidemment prendre conscience du particularisme de la zone : la langue, les moeurs, les coutumes etc. Avec l'humanitaire, l'universel fait la rencontre du local. Brigitte Tison en fait une thématique prioritaire dans ses développements : « En partant sur les terrains, l`humanitaire va forcément être confronté à la rencontre d`autres cultures que la sienne propre. Il peut s`adapter rapidement et n`avoir aucun souci ou, au contraire, vivre un choc dans cette première rencontre in vivo »⁷⁴. La confirmation des différents intérêts dégagés s'expriment à travers un point essentiel, celui de la revue de littérature.

5- LA REVUE CRITIQUE DE LITTÉRATURE :

L'abondance de la récolte dépend de l'abondance de la moisson. La littérature d'une question peut être énorme ou réduite selon que la question soit classique ou nouvelle. L'humanitaire étant si vaste que le monde, plusieurs écrits foisonnent au chevet du lecteur. Dans une étude précise, il faut faire le tri des écrits qui sonnent comme une cloche qui annonce un événement. Vu l'abondante littérature en la matière, la revenue sera compartimentée en quatre types de documents de lecture. Les parutions plus larges c'est-à-dire les ouvrages généraux, les thèses, les mémoires et les publications plus spécialisées et techniques notamment les articles, les manuels de formation et les rapports des organismes internationaux. Cette revue de littérature sera développée sur la base de ces différentes sources catégorisées.

Pour le premier cas, nous l'ouvrage de Rony Brauman intitulé L`action humanitaire⁷⁵ comme un ouvrage général qui revient sur l'histoire de l'action humanitaire, les principes et les exigences de l'action humanitaire, les acteurs humanitaires et partage les expériences vécues jusque-là. Ensuite, la voix juridique du Professeur Alain Didier Olinga s'est exprimée sur une question fondamentale qui a influencé l'action humanitaire. Voir le droit s'interroger sur l'action humanitaire pose le problème du droit d'ingérence humanitaire. La première partie de la thèse de l'auteur porte exclusivement sur l'ingérence humanitaire et la seconde sur le droit d'ingérence et la protection des droits de l'homme. C'est d'avantage la première partie qui nous concerne. L'analyse est à prépondérance juridique et l'auteur, parlant de l'ingérence, ne manque pas d'opiner « un terme qui ne correspond à aucune catégorie juridique déterminée »⁷⁶ . Une question formulée par l'auteur est fondamentale : « L'ingérence peut-

⁷⁵ R. Brauman, L`action humanitaire, Paris, Flammarion, coll. « Dominos », 1995.

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elle être un droit ? ». A priori, l'auteur y voit une habilitation juridique impossible et reprend à son compte une pensée « il n`y a pas de droit d`intervention par ce qu`il n`y a pas de droit contre le droit. Le droit, c`est l`indépendance ; l`intervention, c`est la violation de l`indépendance ».⁷⁷ A postériori, il reconnait l'ouverture qui confère un titre juridique à un Etat à intervenir dans les situations des Etats si ce titre est reconnu par le droit international public. Malgré la dimension juridique de l'analyse, la thèse en question traite aussi de l'action humanitaire. Elle y est définie par rapport à son objet et par rapport à l'action politique. Cette analyse est proche de la nôtre encore en construction. Cela est vrai au regard d'une des conclusions de l'auteur. « L`unique motivation de l`action humanitaire », c'est la souffrance humaine qu'importe son origine.

Au registre des thèses, on peut évoquer celle de Delphine Loupsans qui traite La place des intérêts et des normes dans l'action humanitaire de l'Union européenne.⁷⁸ La politologue s'appuie sur les théories de relations internationales notamment le réalisme, le constructivisme, le réalisme pour ressortir dimension stratégique de l'action humanitaire d'urgence engagée par l'UE. L'institution européenne s'engage dans le terrain de l'humanitaire avec des intérêts bien ciblés. « Aucun Etat ou groupe d`Etats n`est disposé à intervenir pour mettre fin à une crise humanitaire, s`il n`a aucun intérêt stratégique à défendre » 79 . L'auteur illustre sa position en indiquant que l'un des intérêts, c'est la démocratisation des Etats non démocratiques. Pour cet auteur, l'action humanitaire est dans le sillage de la sécurité humaine représentant un instrument majeur de gestion des crises. Elle dira alors qu'il s'agit de l'action humanitaire d'urgence de l'Union Européenne définie par lui comme « toute action qui vise, d`une façon ou d`une autre, à pallier les conséquences immédiates d`un conflit sur les populations civiles »⁸⁰ . Cette humanitaire menée de main de maître par l'UE est une humanitaire des Etats qui ont un grand intérêt pour les normes

⁷⁷ Pradier-FODERE, Traité de droit international européen et américain. Paris, 1885, t.1 p.547

78 D. Loupsans , La place des intérêts et des normes dans l'action humanitaire de l'Union européenne, thèse Université Montesquieu - Bordeaux IV; Institut d'études poli- tiques de Bordeaux, 2009.

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humanitaires et les Etats en question mettent des fonds colossaux⁸¹ à la disposition des pays ACP. Le bailleur européen des questions humanitaires est ECHO présente depuis 1991.

On a pu découvrir les travaux de Makandjouala Candide, dans son mémoire intitulé : Intégration régionale et action humanitaire dans l`espace CDEAO.⁸² L'auteur est parti d'une étude générale de l'intégration régionale en Afrique de l'Ouest avant de démontrer la tristesse grainée par les crises humanitaires qui menacent la sous-région. Il proposera les enjeux d'une intégration humanitaire et les défis d'une coopération humanitaire réussie. Le concept intégration humanitaire n'a pas été défini clairement par l'auteur, ce qui laisse cette terminologie complexe. Il parle de la synergie entre les Etats d'une région déterminée pour résoudre les questions d'ordre humanitaire.⁸³ L'intégration devient ainsi une construction bâtie sur plusieurs thématiques : : l'humanitaire, la politique, l'économie et la culture. L'intégration ne devrait-il pas apparaître comme un moyen de prévention des crises. Le concept de coopération humanitaire dont nous parle l'auteur est plus juste et moins polémique que celui d'intégration humanitaire.

Toujours dans le tableau des publications d'origine africaine, nous comptons les oeuvres de Patrick MAVINGA NSAKALA intitulée : « L'action des Médecins sans Frontières (MSF) face à la souveraineté de l'état » et de Sababou Cissé portant sur : « L'apport de Caritas-Mali dans l'insertion des enfants de la rue ». La première publication est la mise en valeur de la forme urgente de l'humanitaire à travers l'étude du rapport entre l'action humanitaire de MSF et la souveraineté de l'Etat. La problématique de l'ingérence humanitaire est plutôt visible. Après avoir constellé, les notions de souveraineté, de droit d'ingérence, l'auteur analyse les fondements de l'action de MSF à savoir l'humanité et le respect de la souveraineté. On peut relever un paradoxe dans son analyse. Si l'auteur considère le respect

⁸¹ Selon cet auteur, « Des aides exceptionnelles peuvent être accordées aux Etats ACP ayant à faire face à des difficultés graves résultant de calamités naturelles ou de circonstances extraordinaires (épidémies, guerres...) ». La Commission décide, alors, de les étendre aux pays non-ACP. C'est pourquoi, une partie des « aides exceptionnelles » est financée par le FED (pays ACP) et l'autre partie par le budget annuel de la Communauté (autres pays).

82 C. Makandjouala , Intégration régionale et action humanitaire dans l`espace CDEAO, mémoire CA2D, IRIC, 2012.

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de la souveraineté comme fondement de l'action humanitaire de MSF, le même auteur affirme : « ce sont les insuffisances de l'action du CICR qui ont poussé certaines ONG, au premier rang desquelles Médecins Sans Frontières (MSF), à outrepasser le consentement des Etats afin d'intervenir auprès des victimes. La démarche de MSF est à l'opposé de celle de la Croix-Rouge : il faut contourner, ignorer les Etats, agir dans l'illégalité si cela est nécessaire (sans-frontiérisme); il faut hurler, dénoncer, ne rien cacher des crimes vus »⁸⁴. Cette prise de position peut susciter une grande réflexion. Dire que MSF outrepasse la souveraineté de l'Etat pose problème. Il peut avoir des quiproquos entre MSF et un Etat sur la pertinence ou l'opportunité d'une intervention, MSF peut exercer des moyens de pression et l'Etat donner une orientation humanitaire contraire mais à aucun moment MSF ne peut ignorer l'Etat. L'auteur de cette publication fait une présentation statutaire, organique et structurelle de MSF. Il achève son analyse à travers les interventions humanitaires de MSF dans un Etat souverain : « A chaque fois qu'un besoin d'assistance humanitaire se présente dans une zone donnée de la planète, et dans le domaine de la santé pour donner des soins aux populations, le MSF est parmi les premières à intervenir aux fins de réduire au plus vite que possible le désastre qui a commencé à sévir et sans avoir de réserve d'un lieu ou d'un autre comme le dit leur slogan : « Ils sont partout où les autres ne vont pas ». » 85.

La seconde publication est un mémoire inspiré d'un projet mené par la Caritas du Mali en faveur des enfants de la rue. Selon l'auteur : « Les enfants de la rue ne connaissent pas les vraies joies de l'enfance et de la jeunesse, quasiment oubliés dans les budgets nationaux, ce sont des organisations de la société civile, des institutions religieuses et des personnes de bonne volonté qui subviennent à leurs besoins urgents de survies : nourriture, centre d'accueil ou d'écouté, vêtement, santé, soutien juridique, conseil sanitaire, protection contre la violence, la répression imméritée et les abus divers au nom de la loi et de l'ordre. »⁸⁶. Caritas Mali prend l'initiative de venir en aide matériellement, psychologiquement et

84 P .Mavinga Nsakala , L'action des Médecins sans Frontières (MSF) face à la souveraineté de l'Etat, mémoire Travaux de fin de cycle , Université de Kinshasa, 2010, Mémoire Online > Arts, Philosophie et Sociologie > Sociologie.

⁸⁶ S.Cissé, L'apport de Caritas-Mali dans l'insertion des enfants de la rue, université de Bamako, 2009, in mémoire online.

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stratégiquement à ces enfants éconduits. L'auteur procède à une catégorisation des enfants de la rue : « les enfants mendiants, les enfants fendeurs de bois, les bébés de rue/orphelins, jumeaux ou simple frères, les enfants guides des personnes invalides ou âgées, les enfants travailleurs ,les enfants maltraités les enfants handicapés , les enfants abandonnés ,les enfants prostitués les enfants issus de familles de dopeurs ou alcoolique, les enfants de parents incarcérés ». Cette prise en charge des enfants de la rue démontre qu'il n'existe pas de réelle politique sociale en faveur de la protection des enfants dans ce pays d'Afrique de l'Ouest. L'apport de Caritas ne vient pas mettre fin aux énormes besoins de ce secteur.

Enfin au plan théorique, nous nous sommes abreuvés d'une analyse théorique pertinente. Il s'agit de la publication scientifique de Zsuzsa Anna Ferenczy qui traite de la thématique Les ONG humanitaires, leur financement et les médias⁸⁷. L'auteur ressort des données théoriques relatives à la signification de l'action de l'action humanitaire, les mécanismes de financement et la place des médias dans l'humanitaire. Toutes ces questions sont essentielles mais l'approche définitionnelle partagée par l'auteur a un grand intérêt. L'action humanitaire est résumée en huit notions : le mouvement (déplacement vers un lieu où l'anormalité est établie), l'acteur ( celui va pour intervenir), l'opérateur ( acteur sur le terrain), le temps ( urgence , période courte ou plus ou moins longue), l'espace humanitaire ( là où les équipes se déploient), le bénéficiaire ( la victime, la population en danger) , l'assistance et la nature de l'aide ( dispositif et logistique) et référence à des valeurs et à des idéaux ( impératif moral, principes déontologiques, logiques universelles).

Pour les publications plus spécifiques, deux ouvrages spécialisés occupent une place fondamentale dans cette analyse ainsi que trois articles sélectionnés. Chronologiquement, on peut citer l'ouvrage célèbre, du Genevois, praticien de l'humanitaire, Henry Dunant. Son ouvrage, un souvenir de Solférino⁸⁸ est une métaphorisation de l'action humanitaire en urgence. Ce récit d'une bataille sanglante a montré le contexte et les réalités dans lesquelles se déroulaient les opérations humanitaires. Les secours étaient menés dans un amateurisme et un plateau logistique insuffisant, les opérations humanitaires étaient menées sans organisation formelle et matérielle réelle. Les personnes engagées étaient des volontaires de coeur et de

⁸⁷ A.Z. Ferenczy , Les ONG humanitaires, leur financement et les médias, Institut européen des hautes études internationales, Nice, Juin 2005.

⁸⁸ Dunant, Un souvenir de Solferino, 1862 réédité par la Croix-Rouge française, Paris, 2014.

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courage. L'auteur décrit clairement les spécificités de l'action humanitaire en urgence. « Tous les chirurgiens français ont montré un dévouement infatigable, plusieurs ne se permirent, pendant plus de vingt-quatre heures, aucun instant de repos. »⁸⁹Dans cet ouvrage, l'auteur propose les solutions pour une action humanitaire professionnelle et efficace. On peut dire que son analyse est une prophétie des réformes et des pratiques qui devaient se développer par la suite.

En outre, l'ouvrage d'Alain Destexhe représente un poteau rose. L'auteur parcourt l'histoire universelle de l'humanitaire, actualise la thématique, soulève des critiques et propose des solutions pour voir l'action humanitaire jouer son rôle et garder sa nature. Au sujet de l'Afrique, il revient sur la guerre du Biafra, la famine en Ethiopie en 1983, la situation en Somalie... Il critique ce qu'il appelle l'humanitaire de spectacle. Mais loin d'être un tableau noir, l'auteur évoque clairement les éléments de l'action humanitaire en urgence et les éléments de l'action humanitaire en permanence. Pour lui, l'humanitaire est un chant d'espoir, « un rayon de soleil qui témoigne encore de notre humanité et notre solidarité avec ceux qui souffrent »⁹⁰ .

Pour ce qui est des articles, sont considérés les écrits de Brunel, Ana Paula Fialho Lopes et Brigitte Piquard. Le premier fait une étude sur le bilan humanitaire des nations Unies⁹¹. Jouant souvent le rôle de coordonnateur humanitaire dans les crises en Afrique avec son organe OCHA, l'ONU a développé ce que l'auteur appelle « la diplomatie de la compassion ». Ses interventions tiennent plus dans l'humanitaire des événements (urgence humanitaire). Son intervention se justifie dans le cadre de la sécurité collective. L'auteur conclut, ce bilan est immense et décevant.

Pour le deuxième auteur, il s'agit de montrer le lien qui existe entre l'humanitaire et la morale. Sauver une vie, soutenir une souffrance, c'est agir pour l'humanitaire et agir pour le règne du bien. Dans cette jonction entre la morale et l'humanitaire, on voit bien naître une action humanitaire de l'habitude, une action humanitaire naturelle (permanence dans l'humanitaire). L'action humanitaire devient un impératif catégorique qui rencontre souvent le

⁹¹ Brunel. « Les Nations unies et l'humanitaire : un bilan mitigé ». In: Politique étrangère, n°2 - 2005 - 70?année. pp. 313-325. doi : 10.3406/polit.2005.115

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politique. Même une action humanitaire qui se déploie dans l'urgence doit garder une déontologie. Enfin le dernier auteur ⁹² , pose un problème fondamental où va l'action humanitaire ? Elle envisage de repenser l'humanitaire dans ses paradigmes, ses balises et ses modes opératoires. Les thématiques abordées dans ce quotidien tiennent la promesse de révolutionner l'humanitaire avec le défi de professionnalisation, le danger de sa politisation, le rôle de l'action humanitaire... Cette publication collective voudrait des innovations et des améliorations de l'action humanitaire.

L'avant dernier point de cette littérature porte sur les données didactiques notamment trois rapports, une conférence et un manuel d'informations. Sont sélectionnés Les rapports de Caritas de 2015, du Ministère des affaires étrangères françaises sur l'action humanitaire d'urgence de 2013 et les limites de l'aide humanitaire, rapport d'un collectif d'étudiants de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. A leur découverte, on voit apparaître la mobilisation, l'intérêt que suscite l'humanitaire en urgence mais il y a une reconnaissance des souffrances quotidiennes dans les pays sous-développés. Les deux premiers renseignent sur l'humanitaire dans les zones de crise en Afrique. C'est le cas du Soudan, de la RCA à l'époque, au Burundi... Les missions médicales et les programmes de nourriture sont au coeur des activités. L'autre rapport est plus scientifique avec la revue des questions théoriques portant sur l'humanitaire. Mais le cas du Soudan est remis sur la table. Le rapport de la conférence de Dominique Schnapper appelle à la curiosité scientifique. On retient que l'humanitaire d'aujourd'hui doit prendre soin du pauvre et du marginalisé. Il revient sur le souhait de la constitution française de 1791 qui posait le devoir de la nation d'assister les pauvres de tous les âges et dans toutes les circonstances de la vie.

Le dernier aspect de cette revue porte sur les articles qui ont inspiré directement le choix de ce sujet. Il s'agit exclusivement de l'analyse de Jean-François Mattei, L`urgence humanitaire, et après ? Opinion. L'article s'ouvre sur une affirmation forte : « Après la survie, il est impératif d`assurer la vie, pour que chacun ait la vie devant soi ». Il fait le constat de la dilution de l'humanitaire à l'urgence, situation qui selon lui, conduit clairement à une impasse. Cette urgence ne résout pas le problème. Elle reste superficielle. Mais l'auteur indique qu'il n'est pas un adepte d'une action humanitaire infinie. Il est favorable à une action humanitaire

92 THEME(Ministère de la défense américain), « Où va l'action humanitaire ? », Louvain [numéro 139 | juin 2003], sommaire de Brigitte Piquard, coordinatrice de ces pages .

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durable. Elle transcende l'urgence et voudrait une action humanitaire de la vie. On comprend que pour cet auteur, entrent dans le registre de l'action humanitaire durable les politiques après crises et les politiques d'aide à ceux qui souffrent tous les jours. Il prend l'exemple de la lutte contre l'illettrisme, le réconfort pour les sans-abris, la prise en charge des malades du Sida en Afrique... Ses conclusions sont légitimes, l'action humanitaire relève du bon sens et l'humanitaire doit humaniser la vie. Après cette revue, il est important de problématiser le sujet.

6 -PROBLEMATIQUE

Toute thématique malgré sa formulation mérite d'être circonscrite. Seule la question centrale peut permettre de comprendre quelle est la direction de l'analyse. N. Ainsi, il apparait à l'esprit une logique utile à la compréhension. L'objectif de l'étude est de tenter de déterminer les critères de détermination de l'action humanitaire inspirée par les pratiques humanitaires observées en Afrique subsaharienne. Comment se caractérise l'humanitaire en Afrique subsaharienne en situation d'urgence et de permanence tenant compte des interventions de Médecins Sans frontière et de Caritas ?

Sur quelles données théoriques peut-on comprendre l'action humanitaire ? Quels rapports existe-t-il entre les critères théoriques de l'humanitaire et l'engagement humanitaire de MSF et Caritas en Afrique ? Ces questions démontrent que l'analyse ne sera pas une étude comparative mais une étude analytique sur les types de propositions humanitaires observées en Afrique subsaharienne à la lumière des critères théoriques prédéterminés. Les hypothèses confortent le sens de du questionnement.

7. LES HYPOTHESES DE RECHERCHE

Nos hypothèses auront pour fonction d'anticiper sur ce que nous cherchons à démontrer. Comme cela est souvent recommandé par la pratique académique, l'exercice de détermination des hypothèses peut se faire à deux axes : un axe principal plus général et des axes secondaires bien ciblés.

Il est à noter que l'action humanitaire en Afrique subsaharienne est un domaine vaste qui ne devrait pas être limité à une catégorie d'intervention ou dans un type d'activités. Ainsi, nous envisageons l'action humanitaire dans toutes les situations de souffrances urgentes comme

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ordinaires qu'importent les circonstances dans lesquelles on se trouve. La pratique humanitaire varie selon l'organisme qui agit. Cette hypothèse va être accompagnée par deux autres hypothèses.

La première hypothèse secondaire permet de déterminer théoriquement les critères d'identification de l'humanitaire. Il s'agit de considérer l'humanitaire sous deux principaux

critères théoriques : l'urgence et la permanence. Ces deux critères connaissent des
adaptations institutionnelles.

La seconde hypothèse porte sur les deux institutions choisies. MSF s'est présentée à ses débuts comme un organisme à prépondérance urgentiste et Caritas internationalis comme un service humanitaire assez permanent dans le contexte de l'Afrique subsaharienne. Toute notre analyse sera construite tenant compte des théories des relations internationales et de sources méthodologiques.

8. CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE

L'intérêt d'une théorie réside dans l'établissement des rapports entre les phénomènes étudiés pour mieux les cerner et les comprendre. Comme disait Jari Correvon : « la théorie rend le monde plus intelligent et oriente les recherches sur le plan ontologique ». L'étude de cette question suppose la détermination des théories qui nous guideront dans l'analyse du sujet en montrant leur lien direct avec les concepts du sujet. Pour ce faire, nous aborderons le cadre théorique avant l'analyse de la dimension méthodologique du sujet.

a. Le cadre théorique

Les chantres de la science politique ont permis une lecture du monde à partir des théories. Ici, seront utilisées trois grandes théories en rapport avec les éléments du sujet notamment la théorie réaliste, la théorie libérale et la théorie constructiviste.

La théorie réaliste des relations internationales considère que la société internationale est un lieu de conflits et de rivalités marqué par les rapports de force. Elle est fondée sur la souveraineté de l'Etat, summa protesta, qui a pour corollaire la puissance et la défense de l'intérêt de l'Etat. Les Etats souverains sont dans l'état de nature les uns par rapport aux autres. Mais aujourd'hui cet état de nature s'exprime à l'intérieur de l'Etat. Le monde

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présenté par les réalistes est un monde où les acteurs sont en action. Ce monde est décrit tel qu'il est. Appliquer le réalisme à l'étude conduit à dire que l'action humanitaire en urgence se fait dans le cadre de conflits et des catastrophes. Il y a des risques pour les humanitaires et des risques pour les victimes. Les acteurs en conflit n'accordent pas toujours du respect à la communauté humanitaire. Cela justifie la nécessité de la coopération civilo-militaire dans le cadre de l'action humanitaire en urgence. C'est à se demander dans ce contexte de conflits ou de catastrophes si l'humanitaire parfaite est possible. L'une des publications du GRIP est assez édifiante les humanitaires en guerre. L'humanitaire en urgence pose un dilemme de sécurité et un dilemme d'intérêt.

La théorie libérale considérée par les théoriciens des relations internationales comme une réponse à la théorie réaliste sera d'un grand apport ici. Pour cette approche, la société internationale peut être civilisée et pacifiée. Influencée par les philosophes de la lumière, elle met la raison et la morale au centre des relations internationales et des relations interpersonnelles. L'instinct de puissance et de passion doit disparaitre. L'on n'est plus dans une approche égoïste mais dans une logique du bien. Appliquer cette approche idéaliste à l'humanitaire en permanence amène à comprendre que la seule façon de mettre fin aux souffrances, c'est la pratique du souverain bien. Il est rationnellement et moralement correct de venir en aide aux enfants affamés, aux handicapés et à personnes très âgées. Il existe une conception optimiste de la nature humaine, l'homme est un être vertueux qui peut aider l'homme. La conception libérale favorise l'entrée d'autres regroupements que les Etas à l'instar des ONG et d'autres associations. La prise en compte des activités de Caritas et de MSF en Afrique est une forme d'expression du libéralisme. Le libéralisme signifie aussi que la raison peut favoriser le bien-être matériel de l'autre. L'humanitaire en permanence, c'est aussi l'aide à ceux qui souffrent à tout moment.

Le dernier argument théorique porte sur le constructivisme. On étudie les relations internationales à partir des rapports sociaux. Ainsi les idées, les croyances, les valeurs, les normes viennent des interactions entre les acteurs. Les idées sont des modèles construits en fonction des structures, de l'environnement dans lequel, on se trouve. Les institutions sont un ensemble relativement stable d'identité et d'intérêts, codifiés sous forme de règles et de normes formelles. Dans l'analyse, qu'il s'agisse de MSF, qu'il s'agisse de Caritas internationale, chacun a une pratique, une logique et une stratégie pour aborder l'humanitaire. Les pratiques humanitaires sont conçues et proposées par les différentes institutions. Et une

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opération humanitaire est fonction du cadre spatio-temporel. Les publications de ses institutions nous servirons aussi.

b. Le cadre méthodologique

Aucune analyse ne se fait sans les sources. Notre travail est construit sur la base de nombreuses sources. Nous exploiterons les documents didactiques et lexicaux, des ouvrages, des articles et des textes juridiques. Nous allons également nous servir des observations, des entretiens et des descentes sur le terrain effectués. Les conférences, les projets et les enquêtes disponibles sont autant de sources dont on aura besoin. Cela sera fait dans une perspective postcoloniale. Cela implique une déconstruction et une mosaïque de sources de divers domaines. Différentes méthodes et techniques peuvent servir de procédés pour parvenir à la connaissance scientifique. A ce stade de l'étude, il convient de procéder à une détermination singulière des méthodes et techniques prépondérantes.

La méthode sociologique sera exploitée pour comprendre comment l'humanitaire évolue dans bon nombre de pays d'Afrique subsaharienne quotidiennement ou à l'occasion d'un évènement. La sociologie a été définie par au Auguste Comte comme la science du présent, « parce qu`elle a l`action pour objet et dans certaines limites, elle est action »⁹³. Considérée comme connaissance scientifique, elle devient « une solution au problème social ». ⁹⁴Et l'action humanitaire est une question sociale, de la société internationale comme de la société nationale. Pour le comprendre, il suffit d'observer les faits sociaux. Ce sont les faits sociaux qui peuvent favoriser la connaissance de l'humanitaire.

L'usage de la méthode sociologique ici, est d'avantage sur le cadre théorique. Comte la consigne clairement : « il n`y a jamais d`action sans une spéculation préliminaire ». « La science se compose de lois non de faits ».⁹⁵Cela signifie qu'en étudiant les évènements et les autres phénomènes qui produisent l'humanitaire dans le contexte de l'étude, il est objectif de faire usage de la méthode fonctionnelle. Merton justifie la méthode fonctionnelle par le fait

⁹³ Comte est cité par ( P) Arnaud in Sociologie de Comte, PUF, 1969, p.42. Cet auteur est cité lui-même par ( M) Grawitz, Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 2001, p.85.

⁹⁵ Comte est cité par ( P) Arnaud in Sociologie de Comte, PUF, 1969, p.70. Cet auteur est cité lui-même par ( M) Grawitz, Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 2001, p.85.

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que : « Dans tous les types de civilisation, chaque coutume, chaque objet matériel, chaque idée, chaque croyance, remplit une fonction vitale »⁹⁶. L'humanitaire a une fonction salutaire et noble. Soulager et épanouir l'homme pour qu'il retrouve la dignité que l'humanité lui doit. C'est ainsi que les différents acteurs humanitaires choisissent la fonction humanitaire qui peut leur rendre utile à l'homme. Il peut s'agir de l'éducation, de la santé, de la nutrition, de l'environnement... MSF et Caritas ont opéré ce choix, ce qui peut expliquer leurs interventions dans les sociétés africaines. Une bonne illustration de leurs interventions passe par l'exploitation de leur documentation officielle.

La technique documentaire est aussi une passerelle utile à la construction de toute analyse scientifique. « Une civilisation s`exprime dans ses documents. Nous sommes une civilisation de bureaucratie, de paperasserie et de microfilms »⁹⁷. Après un évènement qui emporte l'humanitaire, les générations et l'humanité en prennent connaissance par les rapports, des publications de la presse, les analyses scientifiques et les nombreux ouvrages. C'est l'occasion de souligner que La Croix Rouge internationale, MSF⁹⁸, OXFAM et bien d'autres ont fait de la documentation une source essentielle de la compréhension de leurs activités. Ces activités sont encadrées par le droit.

Le recours à la méthode juridique offre la possibilité de comprendre la sécrétion des normes qui nourrissent les activités humanitaires. La méthode exégétique est un procédé utile pour comprendre les normes tant nationales qu'internationales directement liées à l'humanitaire. Avec l'exégèse : « le droit est entièrement contenu dans la loi écrite ; le juriste doit seulement l`en extraire en cherchant la volonté du législateur » 99 . Pour rester dans le contexte humanitaire, on peut ici revenir à la célèbre affaire de L'Arche de Zoé, association humanitaire oeuvrant au secours des enfants depuis le Tsunami du 26 décembre 2004, qui lance une opération d'évacuation des enfants orphelins réfugiés du Darfour. L'association

⁹⁶ ( R.K) Merton, Eléments de méthode sociologique, Plon,1959-trad 1965, P.86. Il est cité par ( M) Grawitz, Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 2001, p.425

⁹⁸ Pour la documentation de la Croix Rouge Internationale, elle est abondante et variée. Sa revue est connue. Pour , MSF il existe Le Centre de réflexion sur l'action et les savoirs humanitaires ( CRASH) créé par Médecins en 1999. Sa vocation : stimuler la réflexion critique sur les pratiques de l'association afin d'en améliorer l'action.

⁹⁹ J.Ghestin et G.Goubeaux, Traité de droit civil -Introduction générale, n°142 et s. Cité par J.L.Bergel, Théorie générale du droit, Dalloz, 1989, p.244.

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prit l'initiative par ce que, selon elle : «les quinze résolutions prises depuis 2003 par le conseil de sécurité de l`ONU étaient restées sans suite pour protéger les populations civiles touchées par le conflit du Darfour. »¹⁰⁰. Cette affaire a été qualifiée de naufrage humanitaire dans la mesure où le droit tant national qu'international n'a pas été respecté.

La casuistique est l'autre méthode juridique fondamentale dans cette analyse. . En droit, casus signifie fait concret, réel ou supposé. La casuistique est Cet art d'appliquer les lois générales d'une discipline à un fait, réel ou supposé par les juges. On utilisera les jurisprudences qui ont des ramifications avec l'humanitaire Afrique subsaharienne. La jurisprudence rend le droit vivant. Les différents contentieux relatifs aux crimes de guerre ou aux crimes contre l'humanité sont étroitement liés à l'action humanitaire. Il est d'autant plus difficile d'imaginer un événement qui suscite la souffrance sans que cela n'aboutisse à un contentieux judiciaire.

9. L'ANNONCE DU PLAN

Toute étude a un noeud. Et la présentation de ce noeud demande de ressortir les grandes lignes de l'étude en question. Comme souligné préalablement, cette étude a initialement une dimension purement théorique pour la compréhension conceptuelle de l'action humanitaire. Par ailleurs, elle a une approche pratique qui vient affermir et rendre visible ce qui a été dit au plan théorique. En clair, sont mises en évidence un cadre théorique de l'humanitaire en urgence et de l'humanitaire en permanence (première partie) et une pratique institutionnelle de l'action humanitaire avec MSF et Caritas internationale en Afrique subsaharienne (Deuxième partie).

'°° I.Leblic, « L'Arche de Zoé : la chronologie d'un naufrage humanitaire », Anthropologie et Sociétés, vol. 33, n° 1, 2009, p. 83-99. http://id.erudit.org/iderudit/037814.

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PREMIERE PARTIE DU MEMOIRE : LA CADRE THEORIQUE DE L'ACTION HUMANITAIRE EN URGENCE ET EN PERMANENCE EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Le train d'une analyse évolue au fur et à mesure où les distances sont effectuées, c'est-à-dire qu'on parvient à apporter des réponses aux différentes questions. Cette analyse en est une preuve. Le premier point est marqué par deux arrêts : l'action humanitaire en urgence et en permanence au plan purement théorique dans le contexte de l'étude. Le premier arrêt porte sur l'humanitaire en urgence. L'humanitaire classique, il s'agit de dégager les paramètres qui nous permettent d'identifier le contexte de l'urgence en question. Elle a ses spécificités, ses réalités et ses conséquences. Le contenu de cette humanitaire montre la complexité et la philosophie des interventions humanitaires. Le deuxième arrêt laisse place à l'action humanitaire en permanence. L'action humanitaire hors des grands dangers, l'action humanitaire éloignée des cris de la guerre mais celle des misères de la vie. Il est impérieux d'en dégager les traits saillants et de montrer les conditions et l'originalité de ce mécanisme. Au quotidien des sociétés africaines, souffrent des citoyens affaiblis par les maladies, le cri du ventre et les situations de vie extrêmement pitoyables. La toile de fond de cette étape est une opération théorique. Cela recommande une construction, une démonstration et une élaboration des instruments observés et évoqués par les auteurs. On peut avoir une idée de l'action humanitaire mais, il n'est pas abusif de vouloir réunir les idées qui permettent de reconnaitre ou de conceptualiser l'action humanitaire. Le philosophe Husserl souligne la nécessité de la théorie en matière de connaissance : « En vérité tout le monde voit pour ainsi dire constamment « des idées », des « essences » ; tout le monde en use dans les opérations de la pensée, et porte aussi des jugements sur des essences, quitte à en ruiner le sens au nom des « points de vue » professés »¹⁰¹. Le tout humanitaire ou tout dans l'humanitaire est un risque. L'action humanitaire évolue certes, mais elle a un cadre, un cercle, un champ et un contenu. Nombre d'institutions internationales¹⁰² dans leur production théorique contribuent à une analyse théorique et pratique de l'action humanitaire. L'action humanitaire est vaste mais

102 On remarque que les organisations humanitaires internationales prévoient dans leur organisation des centres d'étude et des volets de réflexion. C'est le cas des Nations-Unies, du CICR, de MSF, OXFAM...

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l'action humanitaire n'est pas énigmatique. Avant l'agir humanitaire, il faut penser l'humanitaire. Deux critères seront pris en compte et malgré le choix théorique, les illustrations dans le contexte africain vont permettre d'être plus explicites dans notre analyse. Le premier critère, c'est l'urgence, l'action humanitaire en urgence (chapitre premier). Le deuxième critère est moins reconnu. La permanence, l'action humanitaire en permanence (chapitre deuxième). L'Afrique subsaharienne demeure le cadre spatial de l'étude ;

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CHAPITRE PREMIER : ANALYSE THEORIQUE DE L'ACTION HUMANITAIRE EN URGENCE.

Selon Alexandre Koyré, « la théorie précède le fait. L`expérience est inutile par ce qu`avant toute expérience, nous possédons déjà la connaissance que nous cherchons »¹⁰³. Or, nous cherchons ici, à comprendre l'action humanitaire sous le prisme de l'urgence. Jean François Mattei reconnait la place qu'occupe l'urgence dans l'histoire de l'action humanitaire. « L`urgence humanitaire est probablement l`une des plus belles actions qui soient et ceux qui l`ont vécue peuvent en témoigner. Savoir qu`à tout moment, en toutes circonstances, une armée de volontaires peut se mobiliser pour venir en aide à des vies menacées est un des arguments forts qui permet d`espérer et de croire dans la nature de l`homme »¹⁰⁴. La Résolution 43/ 131 de l'Assemblée Générale des Nations Unies détermine les deux grandes situations de l'action humanitaire en urgence. Le texte parle des catastrophes naturelles et des situations d'extrêmes urgences. Les auteurs estiment que les évènements humanitaires dépendent de l'homme et des phénomènes naturels. L'humanitaire pendant la guerre dépend directement de l'homme et pendant des catastrophes indirectement de l'homme. Dépendance indirecte signifie que même en matière de catastrophes naturelles, l'homme a toujours une responsabilité. Les actes, les gestes peu respectueux de l'environnement peuvent conduire à la dégradation progressive de l'environnement. C'est dire que dans des conflits comme dans des catastrophes naturelles et des crises sanitaires, le responsable reste l'homme. Cette étape de l'analyse se fera en deux grands moments : les éléments déclencheurs de l'humanitaire en situation d'urgence (section I) et les critères de détermination et les conséquences de l'action humanitaire en urgence (section II).

SECTION I : LES ELEMENTS DECLENCHEURS DE L'ACTION

HUMANITAIRE EN URGENCE

Cette section permet de ressortir les éléments qui conditionnent l'avènement d'un mouvement humanitaire en urgence. Chacun de ses éléments est fondamental dans l'engagement humanitaire en urgence. En faisant une analyse sur la base de ces éléments, il est utile de montrer comment l'urgence se manifeste et mobilise les acteurs. Seront mises en relief les

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données d'ordre factuel et juridico-institutionnel. Cela signifie que l'action humanitaire en urgence est déterminée par les faits, le droit et les institutions.

PARAGRAPHE I : DONNEES FACTUELLES

Est-ce possible de comprendre l'action humanitaire en urgence, sans le contexte et les évènements qui l'imposent ? Ledit contexte est l'élément déclencheur. Il s'agit des conflits, des catastrophes naturelles et les crises sanitaires. Ces trois types d'évènements suffisent pour comprendre l'urgence dont il est question. Reste à savoir si l'humanitaire en urgence aura encore droit de cité si ces évènements disparaissaient ? L'action humanitaire en urgence nait à la suite ces trois types évènements. Les conflits armés et les catastrophes naturelles et les crises sanitaires sont les faits générateurs de l'action humanitaire en urgence.

A. LA NAISSANCE DES CONFLITS

Frédéric Nietzsche considérait le monde comme un univers dionysiaque, un univers au-delà de la morale, un univers de puissance. « Et savez-vous ce qu`est « le monde » pour moi ? Voulez-vous que je vous le montre dans le miroir ? Ce monde : un monstre de force, sans commencement ni fin ; une somme fixe de force, dure comme l`airain, qui augmente ni diminue. ( ...). Voilà mon univers dionysiaque, qui se crée et se détruit éternellement lui-même. »¹⁰⁵. « Ce monde, c`est le monde de la volonté de puissance, et nul autre. Et vous-mêmes, vous êtes aussi cette volonté de puissance, et rien d`être d`autre ». C'est cette puissance qui entraîne les affrontements armés. Historiquement, les conflits étaient entre les Etats et là l'humanitaire en urgence était déjà développée. L'actualité africaine offre des conflits internes entre les rebelles et les armées régulières, entre les camps qui s'opposent lors d'une élection, là encore l'humanitaire en urgence se déploie.

1. LES CONFLITS ARMES INTERNATIONAUX

L'action humanitaire développée lors des conflits armés internationaux peut être considérée comme la forme première et originelle de l'action humanitaire dans le contexte de l'urgence. L'idée développée ici consiste à dire que le défaut de conflits armés en général et de conflits armés internationaux en particulier, peut conduire au défaut d'action humanitaire sous cette forme. Le conflit armé international devient ce que les juristes civilistes appellent le fait

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générateur ¹⁰⁶ . Le conflit armé est ici un fait générateur de l'action humanitaire. Il est important de savoir à quoi renvoie un conflit armé international.

Il faut reconnaitre que le débat sur la catégorisation juridique d'un conflit armé international reste ouvert en doctrine, les critères sont évoqués. Selon le Tribunal pénal international de l'ex-Yougoslavie¹⁰⁷, il y a conflit armé international, chaque fois qu'il y a usage de la force entre puissances souveraines. Il y a une configuration classique à savoir au moins deux Etats qui s'affrontent. Selon Pietro Verri, le vocable conflit armé international est très vaste : « Lorsqu`il s`agit d`une confrontation armée entre entités étatiques, le conflit armé international s`identifie à la guerre. Sont également considérées comme des conflits armés internationaux les guerres de libération nationale dans lesquelles les peuples luttent contre la domination coloniale, l`occupation étrangère (qu`il y ait ou non résistance active) ou un régime raciste et, en général, les guerres qui peuvent survenir lorsque les peuples veulent exercer leur droit à l`autodétermination »¹⁰⁸.

Dans cette situation, l'humanité est interpellée, il faut agir, c'est en cela que l'urgence humanitaire est appelée à se déclencher. L'un des conflits classiques en Afrique est l'affrontement armé entre l'Ethiopie et l'Erythrée. L'affrontement est né à la suite d'un différend frontalier le 06 mai 1998 concernant le triangle de Yirga. L'histoire révèle que : « Vers 5h30 le 12 mai 1998, les forces armées d'Érythrée, composées d'au moins deux brigades de soldats réguliers, appuyée par des chars et de l'artillerie, ont attaqué la ville de Badme et plusieurs autres dans la région du woreda Tahtay Adiyabo en Éthiopie, ainsi qu'au moins deux villes dans le woreda voisin de La'ilay Adiyabo. Ce jour-là et durant ceux qui suivirent, les forces armées d'Érythrée ont avancé au travers des plaines de Badme jusqu`aux terres hautes dans l'est du pays. Les éléments de preuve relatifs à la nature des forces armées éthiopiennes dans la zone de conflit démontrent que les défenseurs éthiopiens étaient uniquement composés de la Milice et de quelques services de police qui ont rapidement été

106 Selon le lexique des termes juridiques, le fait générateur renvoie à un évènement qui déclenche la mise en oeuvre d'une situation juridique.

107 TPIY, Affaire Tadic, Arrêt relatif à l'appel de la défense concernant l'exception préjudicielle d'incompétence, 2 octobre 1995, para. 70. Voir aussi : TPIY, Affaire Mucic et al. (Celibici Camp), Jugement du 16 novembre 1998, para. 184 : "le recours à la force armée entre États suffit en soi à déclencher l'application du droit international humanitaire".

108 P. Verri, Dictionnaire du droit international des conflits armés, Comité international de la Croix-Rouge,

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contraints de battre en retraite face aux forces armées érythréennes. Compte tenu de l'absence d'attaque armée contre l'Érythrée, l'attaque qui a débuté le 12 mai ne saurait se justifier comme un geste licite de légitime défense conformément à la charte de l'ONU. »¹⁰⁹. Ce conflit a un impact sur les civils qui devaient, pour certains, se déplacer, pour d'autres se réfugier. D'autres étaient blessés et malades. La question conflictuelle est une réalité en Afrique, partout l'action humanitaire est interpellée. Le continent a connu des guerres de libération nationale. Comme le disait Philippe Hugon : «L`histoire de l`Afrique, dans la longue durée, est caractérisée par la violence des conquêtes, des guerres et des razzias. De nombreux conflits africains contemporains réactualisent des conflits ancestraux, parfois instrumentalisés par les pouvoirs ».¹¹⁰ Il est clair que ces situations montrent clairement des souffrances des femmes, des enfants, des journalistes, bref le paramètre conflictuel justifie l'idée et la pertinence de l'action humanitaire en urgence.

Les différents conflits armés internationaux ont un impact énorme sur les populations. En Afrique, les conflits armés internationaux suivent l'adage : « l'Etat fait la guerre et la guerre fait l'Etat ». L'impact humain interpelle les humanitaires. Il faut agir, il y a les blessés, des malades, des déplacés, des réfugiés, des affamés, bref la vie est menacée.

Dans une étude profonde et statistique, Elie Mvie Meka montre comme les horreurs des conflits armés en Afrique centrale ont des conséquences humanitaires lourdes. Les données sont alarmantes et les humanitaires sur ces terrains de conflits mettent à profit leur savoir-faire. « Les génocides rwandais et burundais ont fait plus d`un million de morts et des millions de réfugiés poussés vers les pays voisins. Le conflit angolais a fait plus de 500.000 morts et 3 millions de réfugiés. Celui de la RDC a fait 3 millions et demi de morts parmi lesquels de nombreux enfants, femmes et vieillards. Les dommages collatéraux ont fait 2,5 millions de victimes de tortures, d`assassinats politiques, de viols, etc. La situation de 2,5 millions de réfugiés, de 2,5 millions de déplacés dont 50% en provenance de l`Est de la RDC,

109 Commission frontalière Érythrée-Éthiopie, ? (en) Jus Ad Bellum Ethiopia's Claims 1-8 [archive](pdf) Eritrea Ethiopia Claims Commission [archive] p.5. (Commentaires sur les résultats de la Commission frontalière Érythrée-Éthiopie).

110 P. Hugon, « Conflits armés, insécurité et trappes à pauvreté en Afrique », Afrique contemporaine (n° 218), 2006/2, p. 36.

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est un véritable désastre humanitaire. »¹¹¹. Il n'existe aucun conflit armé international sans souffrance humaine, cela entraîne le déclenchement évident de l'action humanitaire avec les Etats eux-mêmes et les reste de la communauté humanitaire internationale. « L`Afrique est le continent des conflits, de l`urgence, des Tsunami silencieux »¹¹². De nos jours, en Afrique, on enregistre un nombre important de guerres civiles considérées classiquement comme des conflits armés internes.

2. LES CONFLITS ARMES INTERNES

Les conflits semblent être des phénomènes triviaux en Afrique. En Afrique subsaharienne , Cette mode est assez répandue . Partout et à des périodes inattendues, on voit se déclencher un conflit dans tel ou tel autre Etat. Les motivations varient entre éléments politiques et éléments économiques voire sociologiques. Les heurts et des affrontements entre les populations envahissent la scène politique. Quand on compte le nombre de missions de maintien de la paix en Afrique, on conclut que les conflits armés internes ou non internationaux se taillent bel et bien la part belle. Il n'est question de chercher ni des causes, ni des solutions mais de déterminer les souffrances humaines qui naissent lors de ces conflits. Selon le dictionnaire des conflits armés : « Synonyme de« guerre civile», le conflit armé non international se caractérise par l`affrontement opposant les forces armées d`un Etat à des forces armées dissidentes ou rebelles. Le droit applicable durant de tels conflits a longtemps été considéré comme étant une question purement interne aux Etats. »¹¹³ Une distinction peut s'imposer entre les conflits armés non internationaux de haute intensité et les conflits armés de basse intensité. Il est évident que le seuil de violences, la durée, le nombre d'acteurs en conflits et même l'impact de ce conflit peuvent permettre de mesurer son degré d'intensité.

Il est bon de rappeler que les guerres civiles deviennent des héritières des conflits armés internationaux même ces guerres peuvent s'internationaliser à tout moment de l'évolution du conflit suite à l'intervention des forces armées d'un Etat tiers. Les problèmes humanitaires que peuvent soulever ce type de conflit, c'est le droit applicable et la limitation de l'accès aux victimes des affrontements. Pourtant, les civils, dans ce type de conflit sont facilement

111 E. Mvie Meka, Architecture de la sécurité et gouvernance démocratique dans la CEEAC, Presses Universitaires d'Afrique, novembre 2007, p.76.

112 P.Hugon, « Conflits armés, insécurité et trappes à pauvreté en Afrique », op cit, p.33.

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confondus aux combattants. Le principe de distinction connait une application difficultueuse. Et les humanitaires sont dans l'étau entre la volonté de sauver des vies et l'exposition aux dangers de toute nature. En clair, il est possible que les conflits internes puissent susciter des activités humanitaires urgentes. Ils représentent une forme de guerre dans la maison, un linge sale qui se lave en famille même si les membres sont éliminés et menacés et les voisins n'en sont pas épargnés.

Plusieurs guerres civiles en Afrique illustrent les activités humanitaires urgentes. Les crises ivoirienne et malienne sont illustratives de ces formes de conflit. Les illustrations de ces deux guerres civiles permettront de démontrer comment les conflits armés internes entraînent l'intervention humanitaire. De façon générale, « Avec 15 millions de personnes actuellement déplacées sur le continent, l`Afrique est sans conteste le continent où le besoin en intervention humanitaire est le plus grand »¹¹⁴ , les différentes guerres civiles permettent de confirmer cette posture. Le cas ivoirien a conduit à une crise humanitaire. L'organisation des élections dans ce pays débute le 31 octobre 2010. Les péripéties commencent à l'issue du second tour des élections. Deux candidats sont présentés comme victorieux par des institutions politiques différentes : la Commission électorale indépendante proclame la victoire d'Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo lui reçoit la même grâce de la part du Conseil constitutionnel. L'imbroglio électoral quitte la sphère institutionnelle pour la sphère conflictuelle. On assiste à un affrontement entre les partisans des différents camps. Au mois de décembre, l'heure est aux hostilités, la population est mêlée et les forces armées aussi.

Le conseil de sécurité va prendre ses responsabilités en dépêchant une mission de maintien de la paix. L'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci), sur le terrain mettra en oeuvre son mandat. La situation humanitaire sera préoccupante. La société nationale de la Croix Rouge sera interpellée face à ses attaques sanglantes. Mais, la situation ne sera pas évidente. Le témoignage de la société nationale de la Croix Rouge ivoirienne est une preuve de la complexité de l'exercice de l'action humanitaire dans une situation de guerre civile. « L`équipe a entendu des rafales d`armes à feu automatiques venant de la zone du front de mer. Elle s`est alors précipitée sur les lieux et a découvert un certain nombre de blessés, dont plusieurs gravement. L`équipe a chargé les victimes dans son véhicule, s`apprêtant à les emmener à l`hôpital, mais la tâche n`était pas aisée. Très vite, elle s`est trouvée bloquée à un

114 O.Gandzion, « Quel rôle l'Union Africaine peut-elle jouer dans la gestion des crises humanitaires en Afrique ? » L`Afrique des Idées, Note d`Analyse - ADI - N°2, Octobre 2014, p.3.

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poste de contrôle où des hommes armés intraitables leur ont refusé le passage. L`équipe a alors tenté d`emprunter un autre itinéraire, plus long, pour gagner l`hôpital, mais elle s`est trouvée à nouveau bloquée par des hommes en armes. L`état des victimes choquées se détériorait rapidement ; les secouristes firent leur possible pour les maintenir en vie en essayant de gagner l`hôpital par un troisième itinéraire. »¹¹⁵. La société nationale de la croix rouge en question, poursuit son analyse, elle affirme que les blessés étaient fouillés et sortis des véhicules par les militaires. L'assistance humanitaire était retardée et rendue inefficace. Les secours de la Croix Rouge étaient refoulés dans certains hôpitaux.

Plus récente, est la crise malienne. Le Mouvement National de Libération de l'Azawad (MNLA) au mois de janvier 2012, a lancé des raids contre le gouvernement de Bamako avec pour ambition l'invasion du Nord du Mali. Ce mouvement formé de Touareg avait pour ambition de proclamer l'indépendance de cette partie du territoire. Dans mission de protection de l'intégrité du territoire Malien, l'armée malienne va affronter ce mouvement. Le déferlement de la violence va prendre une ampleur impressionnante. La communauté internationale va se mobiliser, la plus proche avec la CDEAO, les Etats voisins et amis du Mali et plus vaste avec l'ONU, l'UE qui voleront au secours d'un Etat au chevet des massacres, des blessés, les morts... Le conseil de Sécurité a connu une activité décisoire et communicationnelle considérable à travers ses résolutions¹¹⁶, ses interventions... Pour ce qui est de ces résolutions, on retient une prise de conscience, un appel à l'action et des décisions utiles pour changer la situation. « Soulignant que la situation dans le nord du Mali et le fait que des groupes terroristes et des réseaux de criminels y sont «solidement implantés continuent de faire peser une grave menace, pour laquelle le temps presse, sur la population du Mali tout entier et la stabilité du Sahel, de l'Afrique en général et de la communauté internationale dans son ensemble. » (3e considérant du préambule). « Exige que les groupes rebelles maliens rompent tout lien avec des organisations terroristes, en particulier avec Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et les groupes qui lui sont affiliés. » (par. 2 du dispositif). « Décide d'autoriser le déploiement au Mali, pour une durée initiale d'une année, de la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (MISMA), qui prendra toute mesure utile, dans le respect du droit international humanitaire et des droits de l'homme

116 Le 5 juillet 2012 : la Résolution 2056 (2012) , Le 12 octobre 2012 : la Résolution 2071 (2012), le 20 décembre 2012 :la Résolution 2085 (2012), Le 25 avril 2013 : la Résolution 2100 (2013)

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applicable et dans le respect le plus total de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'unité du Mali. » (par. 9 du dispositif).¹¹⁷ Il faut dire que plus tard, en 2013, la MISMA sera remplacée par MINUSMA ¹¹⁸ qui aura un mandat de stabilisation de la situation, de l'application de la feuille de route pour la transition et la protection des civils. Pour revenir à l'urgence, l'action humanitaire sera mise à l'épreuve avec la difficulté de créer un couloir humanitaire pour acheminer l'aide, le détournement de l'aide... Il fallait prendre des mesures urgentes et immédiates pour favoriser l'action des ONG. La collaboration entre humanitaire et militaire était une nécessité réelle. L'urgence humanitaire ne se trouve pas seulement dans la guerre comme conflit armé mais dans la guerre environnementale et sanitaire.

B. DELIQUESCENCE PROVOQUEE PAR LES CATASTROPHES NATURELLES ET LES CRISES SANITAIRES

L'humanitaire est une affaire de l'humanité et l'action humanitaire en urgence est aussi vaste que le monde. L'humanitaire prend soin des rescapés des catastrophes naturelles et des populations menacées par les crises sanitaires.

1. LES DEGATS ENVIRONNEMENTAUX

Plus haut, il a été considéré que les catastrophes naturelles étaient aussi la conséquence des activités de l'homme. Considérer qu'il n'est pas à l'origine de ces désastres serait une idée saugrenue. Les catastrophes naturelles ont aussi une cause humaine même si les mystères de la nature ont aussi leur mot à dire. De l'avis de William Easterly « les catastrophes naturelles » ne sont pas si naturelles que cela : l`absence de prévention coûte une multitude de vies, généralement parmi les plus pauvres. Et il lance un défi : pallier le honteux désintérêt pour la prévention afin de sauver ces vies. »¹¹⁹. Dans la même dynamique, le Professeur Richard Zeckhauser considère que le manque de gestes responsables, le défaut de précaution et les décisions de développement économique sont autant de facteurs qui ont plus tard des conséquences sur la nature. Selon lui : « Le monde est sans cesse frappé de « catastrophes

117 Le Conseil de sécurité vote cette Résolution le 20 décembre 2012 à l'unanimité, la Résolution 2085 (2012).

118 Le 25 avril 2013, le Conseil de sécurité adopte à l'unanimité la Résolution 2100 (2013), dans laquelle il décide que l'autorité de la MISMA, requise par le Conseil dans sa Résolution 2085.

119 Banque Mondiale et Nations-Unies, Risques naturels, catastrophes non naturelles Aspects économiques d'une prévention efficace .Aperçu. 2010, p.6

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naturelles », déclenchées par des tremblements de terre, des sécheresses, de violentes tempêtes ou des rivières en crue. Ces catastrophes infligent de terribles souffrances humaines, en particulier chez les pauvres. Mais la nature n`est pas la première responsable de ces pertes ...ces pertes découlent de la synergie entre les forces de la nature et les malencontreuses décisions humaines. Nous accentuons les risques en endiguant les rivières et en libérant des gaz à effet de serre, et nous nous exposons aux risques existants en construisant des villes dans des zones inondables ou sans respecter les normes parasismiques. »¹²⁰. En se rendant maître et possesseur de la nature, l'homme prend des initiatives personnelles et collectives pour mieux la dompter. Les gardiens de la nature au vu des catastrophes naturelles et des risques naturels diront que la nature reprend le dessus et se dégrade pour montrer que l'homme ne fait pas attention à elle. La question des changements climatiques n'est pas sans conséquences sur les risques de catastrophes naturelles.

Quand on parle de catastrophes naturelles, de quoi s'agit-il ? Quelles en sont les conséquences ? L'Organisation Mondiale de la Santé analyse le concept de catastrophe comme : « un choc sévère, une rupture brutale, écologique et psychosociale, qui dépasse largement les possibilités de faire face de la communauté affectée ». ¹²¹ La catastrophe naturelle, elle peut être appréhendée soit comme un « Impact soudain ou début brutal (tremblements de terre, tsunamis, tornades, inondations, tempêtes ou cyclones tropicaux, éruptions volcaniques, glissements de terrain, avalanches, feux de forêt). » ou comme un « Début progressif, chronique (canicule, vague de froid, sécheresse, famine, dégradation environnementale, exposition chronique à des substances toxiques, désertification, déforestation...). »¹²².

L'Afrique est un terrain exposé à ces catastrophes notamment la sècheresse, les inondations, les tremblements de terre, les glissements de terrain. La zone sahélienne est l'une des plus affectées. Selon le rapport de la Banque Mondiale : « Les catastrophes naturelles ont fait 3,3

121 Cette définition est reprise par le Comité de la prévention et de la précaution, dans son rapport intitulé : catastrophes environnementales préparer l'évaluation de leurs effets et le retour d'expérience, ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, Paris, février 2010, p.12.

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millions de victimes depuis 1970, soit quelque 82 500 morts par an, mais on observe de fortes variations d`une année à l`autre et aucune tendance ne se dégage clairement. Les sécheresses sont les catastrophes les plus meurtrières (les trois autres catégories de catastrophes. sont les tremblements de terre, les inondations et les tempêtes) et elles touchent les pays pauvres de manière disproportionnée -- elles ont fait à elles seules près d`un million de victimes en Afrique. C`est dans les pays pauvres que les catastrophes sont les plus meurtrières. »¹²³.

L'action humanitaire des catastrophes naturelles est un mécanisme technique et particulier. Chaque catastrophe a sa particularité et seuls les professionnels de l'humanitaire seront capables de faire une intervention humanitaire efficace et proportionnée. Il est donc urgent de prendre des mesures d'alerte et de sauvetage. Selon le dictionnaire des conflits armés, une catastrophe naturelle évolue selon une chronologie à cinq différentes phases : alerte (si elle est prévisible) ; impact ; sauvetage ; secours ; de rétablissement¹²⁴.

Dans l'urgence, l'action humanitaire est symbolisée par les activités d'alerte, de sauvetage et de secours. L'activité humanitaire d'OXFAM en matière de catastrophes est visible. Cette confédération fait une étude statistique pendant l'année 2010 où on enregistre environ 69 millions¹²⁵ de personnes qui ont été exposées aux inondations. En cette même année, les catastrophes naturelles ont provoqué plus de 300 000 morts.¹²⁶ Dans ce type d'humanitaire, OXFAM insiste sur la résilience et la protection sociale pour mieux aider les victimes des différentes catastrophes. « Chaque pays doit être résilié aux chocs et aux tensions provoqués par une catastrophe naturelle, le changement climatique ou des crises économiques et politiques telles qu'une flambée des prix des matières premières ou une poussée de violence. Le développement de la résilience dépend en partie des investissements réalisés en matière de prévention des risques de catastrophe naturelle et de protection sociale, ainsi que de l'intégration de l'adaptation au changement climatique dans les actions des États. »¹²⁷.

124 P. Verri, Dictionnaire du droit international des conflits armés, op.cit. p.34

125 OXFAM, « Les crises dans un nouvel ordre mondial projet humanitaire en danger », Document d'information d'Oxfam 158 ,7 février 2012, p.5.

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L'urgence humanitaire n'est pas l'apanage des catastrophes naturelles, sont aussi considérées les crises sanitaires.

2. LES FRACAS ISSUS DES CRISES SANITAIRES

L'histoire du continent africain est un torrent de souffrances. Les africains font face à des crises sanitaires qui entrainent une avalanche de conséquences.

Est prise comme crise sanitaire, « une menace pour l'état de santé d'une population. Deux caractéristiques permettent de décréter qu'il y a crise sanitaire : l'état d'urgence et le caractère inédit du risque à l'origine de cette crise. C'est l'État concerné qui décrète l'état de crise sanitaire. Elle peut notamment se présenter en tant qu'épidémie (due à des agents pathogènes tels que le virus H1N1, par exemple), ou en tant que crise d'origine médicamenteuse, alimentaire ou encore naturelle (canicule, tsunami, etc.). » 128 . En faisant une emphase sur le terme crise, on se rendra compte qu'à l'antiquité, le concept avait une signification autre. Cette considération est reprise dans une étude faite par Vuibert : « le terme de crise désignait le moment où la maladie touchait à son terme. La crise n'est donc pas un signe de maladie, mais plutôt de résistance à la maladie. Dans la tragédie grecque, la crise est le moment de vérité où le passé est révélé. Edgar Morin note qu'on en arrive aujourd'hui à des retournements complets de sens : en effet, ce qui désignait à l'origine « décision, moment décisif d'un processus incertain » en arrive à pointer son contraire : « crise signifie indécision : c'est le moment où, en même temps qu'une perturbation, surgissent les incertitudes ».¹²⁹ Le terme a désormais une connotation péjorative, c'est une situation qui génère un risque majeur du fait de la gravité et l'intensité de la crise, de la quantité de personnes touchées, des dommages, des conséquences économiques.

Dans cette étude, Vuibert utilise l'analyse des dix dimensions génériques de la crise proposée par Weiner et Kahn. Pour résumer la logique de ces deux auteurs, on peut dire qu'une crise sanitaire est caractérisée par un enchaînement d'évènements et d'actions, une nécessité d'action urgente, une menace, des effets sur les populations, la médiatisation...

129 Vuibert, « La gestion des crises sanitaires », Thèmes d'actualité économiques, politiques et sociaux, p.3

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Plus loin, Vuibert procède à une détermination des phases¹³⁰ de la crise. Tout part de l'ouverture de la crise avec des signes avant-coureurs ; ensuite le coeur de la crise avec la locomotive de problèmes ; il ajoute la recherche des solutions de façon immédiate et la phase de résolution. L'Afrique a souvent connu ces crises sanitaires, et là une fois de plus l'humanitaire est interpellée. C'est l'occasion de dire que l'Organisation Mondiale de la santé a un grand rôle à jouer dans l'action humanitaire sanitaire en temps de crise. L'épidémie Ebola en est une preuve.

« L`épidémie due au virus Ebola en Afrique de l`Ouest a enregistré le plus grand nombre de décès depuis que la maladie a été diagnostiquée en 1976. Elle a aussi des conséquences socioéconomiques d`une portée considérable. Bien que la maladie soit encore en pleine évolution, plusieurs études sur ses incidences ont été menées depuis l`apparition de la maladie en Afrique de l`Ouest »¹³¹.Il y a deux ans, cette maladie a particulièrement menacé trois pays d'Afrique notamment la Guinée Conakry, le Libéria, la Serra Leone mais avant d'autres Etats comme le Mali ou la RDC ont connu les mêmes déboires. « Le premier cas signalé en Afrique de l`Ouest remonte à décembre 2013 à Guéckédou, une région forestière de Guinée proche de la frontière avec le Libéria et la Sierra Leone. En mars 2014, le Libéria avait signalé 8 cas suspects et la Sierra Leone 6 cas ; fin juin, 759 personnes avaient été infectées et 467 étaient mortes de la maladie, faisant de cette maladie la pire épidémie d`Ebola. Les services de santé en Guinée, au Libéria et en Sierra Leone n`étaient pas bien équipés pour lutter contre la maladie. »¹³² . Ebola est une fièvre virale hémorragique qui se manifeste à travers plusieurs symptômes notamment une grande et soudaine fièvre, des maux de tête, des douleurs et de la faiblesse, des douleurs à la gorge et à la poitrine, des hoquets, les yeux rouges, l'affaiblissement des reins et du foie, des saignements internes et externes, la diarrhée¹³³ . Cette épidémie a entraîné une situation de panique générale.

131 Commission économique pour l'Afrique, incidences socio-économiques d`Ebola sur l`Afrique, Edition révisée, janvier 2015, Avant-propos.

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L'OMS a pris le mal à sa hauteur et s'est engagé avec d'autres acteurs humanitaires à sauver, à soulager et à éliminer le virus Ebola. Elle fut obligé de se référer à son document cadre d'action d'urgence. Il faut dire que cette organisation internationale catégorise les crises humanitaires à trois niveaux : les crises sanitaires de niveau 1, les crises sanitaires de niveau 2 et les crises sanitaires de niveau 3. Ebola fut classé au troisième niveau. L'OMS assure deux fonctions majeures en cas de crises sanitaires : l'autorité principale pour fixer les orientations techniques et le directeur en matière de santé lors des crises humanitaires. Monsieur Bruce Aylward, Sous-Directeur général de l'OMS chargé du Groupe Poliomyélite et situations d'urgence le rappelle : « Nous serons toujours une institution spécialisée de caractère technique, mais il faut qu`il soit reconnu que nous avons et devons avoir des bases solides pour intervenir en cas de crise», «Dans les crises humanitaires, notre rôle de leadership nous oblige à être fournisseurs de services de santé en dernier ressort. Cela peut vouloir dire aussi bien la coordination de l`application de multiples stratégies sanitaires dans les communautés, depuis les opérations de vaccination jusqu`à l`équipement des établissements de santé que, dans certaines conditions, la fourniture à proprement parler de services de soins de santé »¹³⁴. Elle n'agit pas mais bénéficie de l'appui d'autres acteurs internationaux et de certains acteurs locaux. On pouvait également parler de l'épidémie du choléra qui a fragilisé certaines régions du Cameroun, ce point sera abordé dans l'étude de l'action humanitaire urgente avec Médecin Sans Frontières.

Ce dernier élément factuel, déclencheur de l'action humanitaire permet d'ouvrir le rideau des données juridiques et institutionnelles qui président l'avènement de l'action humanitaire en urgence. (Paragraphe II).

PARAGRAPHEII : DONNEES JURIDIQUES ET

INSTITUTIONNELLES

Précédemment, les faits du déclenchement de l'action humanitaire d'urgence ont été analysés. Dans cette partie, l'exercice donne à voir la place du droit et des institutions dans l'initiative humanitaire. Plus concrètement, l'action humanitaire urgente peut-elle se concrétiser si certaines conditions normatives n'ont pas été mobilisées et si les institutions

134 B. Aylward, L'OMS et ses partenaires de l'action sanitaire font face à cinq crises prioritaires sans précédent, septembre 2014.

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compétentes ne se sont pas engagées dans cette aventure humanitaire ? Il s'agit de partir des éléments juridiques pour aboutir aux éléments institutionnels. D'autant plus que le droit rime avec les institutions et les institutions incarnent le droit. Le domaine humanitaire ne saurait échapper à ces logiques.

A. LA SECRETION DES NORMES JURIDIQUES EN LA MATIERE

Il n'est pas un secret que l'action humanitaire a un droit ou encore que le droit international humanitaire soit la cheville ouvrière qui réglemente et encadre l'activité humanitaire en général et celle en urgence en particulier. Des écrits de Françoise Bouchet-Saulnier, on retient que : « Le droit humanitaire constitue l'ultime référence pour les situations de crise et de conflit. Il arbitre la survie des individus contre la violence des sociétés. C'est un droit qui se plaide et se défend dans l'action. Il n'appartient donc ni aux juristes ni aux spécialistes, mais doit être connu et défendu par le plus grand nombre » 135 . Le droit international humanitaire promeut d'une part l'encadrement de la guerre et d'autre part l'humanisation de la guerre. Il y a le jus in bello, portant sur les règles régissant les conflits armés notamment celles sur les personnes tombées aux mains de l'ennemi et celles régissant la conduite des hostilités. En plus, on a le Jus ad bellum c'est-à-dire les conditions par lesquelles les Etats peuvent lancer les hostilités. Ici, le droit international humanitaire ne sera pas amplement développé mais les résolutions qui ont été formulées pour un intérêt éminemment humanitaire et ce qui permet de clarifier le mandat humanitaire lors d'une mission humanitaire.

1. LA FORMULATION DES RESOLUTIONS

Le droit international public est comme un logiciel qui a plusieurs programmes. Ces programmes sont symbolisés par ce que les juristes appellent les sources formelles du droit. On distingue deux sources principales le traité et la coutume internationale, le droit international est déterminé par d'autres sources notamment la jurisprudence, les principes généraux de droit, la doctrine des juristes les plus qualifiés et les actes unilatéraux des organisations internationales. Sont considérés ici, les actes unilatéraux des organisations internationales. De quoi s'agit ? Il faut dire qu'il s'agit des prescriptions juridiques prises

135 F. Bouchet-Saulnier, Dictionnaire pratique du droit humanitaire, Éditions La Découverte, Paris, 2006. p.1.

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par les organisations intergouvernementales dans le cadre de leur fonctionnement interne et dans le cadre de leur déploiement externe selon la technique de votation retenue.

Le mot « résolution » est le terme générique qui désigne l'ensemble des actes des organisations internationales intergouvernementales, que la doctrine appelle aussi « actes institutionnels internationaux » ou encore « actes unilatéraux d'organisations internationales ». Dans le cadre de cette étude, le droit réglemente l'action humanitaire dans les situations d'urgence qui se présentent. Dans le principe, « toute prescription juridique est caractérisée par un commandement et une sanction. C`est une règle de conduite imposée dans les relations sociales pour ordonner la société. Elle consiste à prescrire ou à interdire certains comportements en créant certains comportements et en légitimant certains attitudes »¹³⁶. Il faut dire pour autant que qu'une résolution légitime ou autorise l'action humanitaire, elle n'a pas toujours une portée erga omnes. Certaines résolution ont une valeur déclaratoire, programmatrice sans que cela ait un impact dans l'ordonnancement juridique international. En doctrine, les résolutions de l'Assemblée Générale des Nations-Unies ont une portée juridique assez faible contrairement aux résolutions du Conseil de sécurité prises dans le cadre des chapitres VI et VII de la Charte.

L'action humanitaire urgente ne peut se faire si une résolution ne l'autorise. C'est une formalité mais c'est une formalité substantielle. Même si l'aide humanitaire est bien précisée, il faut dire qu'elle ne devrait pas se faire sans le consentement du pays qui bénéficie de l'aide. En cas d'absence du consentement de ce dernier, on peut qualifier la situation, d'ingérence humanitaire ou de responsabilité de protéger. Certains auteurs notamment le Professeur Mario Bettati et le ministre Bernard Kouchner sont les défenseurs de la thèse de l'inapplicabilité du principe de non-ingérence¹³⁷ aux activités des organisations humanitaires. Pour eux, le droit international n'interdit pas aux membres des organisations internationales de pénétrer sur le territoire d'un Etat sans son consentement. Deux exemples de résolutions dans le contexte de l'Afrique subsaharienne abreuvent cette étape des débats.

137 ( M) Bettati et ( B) Kouchner, Le devoir d`ingérence, Paris, Denoël, 1987.

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Avant de ressortir les deux cas de résolutions, il est à souligner l'existence des résolutions des Nations-Unies pouvant être qualifiées de résolutions générales en matière humanitaire. Générales par ce qu'elles balisent le cadre juridique de l'action humanitaire au-delà des résolutions particulières relatives à une situation donnée. On peut illustrer cela avec deux résolutions de l'Assemblée Générale des Nations-Unies. La plus ancienne d'entre elles, c'est la résolution 45/100 du 14 décembre 1990 qui porte sur l'établissement des couloirs humanitaires. Une telle résolution est fondamentale dans la concrétisation de l'acheminement de l'aide humanitaire. Le droit favorise ainsi, la permissivité de l'action humanitaire dans un cas d'urgence. L'autre résolution est la résolution 43 /131 du 8 décembre 1988 qui encadre le domaine des catastrophes

naturelles et d'autres situations d'urgence. Elles serviront dans les prochains
développements.

Pour l'Opération des Nations Unies en Somalie en 1992, le Conseil de Sécurité a encadré et défini les activités humanitaires. C'est dans sa Résolution 794/1992 du 3 décembre 1992 que l'autorité en charge du maintien de la paix dans le monde va faire constater à l'humanité l'ampleur de la crise somalienne. Dans son préambule, on lit : « Estimant que l`ampleur de la tragédie humaine causée par le conflit en Somalie qui est encore exacerbée par les obstacles opposés à l`acheminement de l`aide constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales ». Cette résolution propose des solutions pour favoriser la conduite des opérations humanitaires en interpellant tous les acteurs de la chaine humanitaire. Des mesures urgentes ont été proposées à l'instar la sécurité du personnel des Nations-Unies et des autres groupes de personnes qui favorisent l'acheminement de l'aide, la facilitation de l'acheminement de l'aide humanitaire...

Au Rwanda, avait été adoptée la Résolution 812 /1993 du 12 mars 1993 du Conseil de Sécurité qui demandait au Secrétaire Général des Nations Unies d'étudier avec l'appui de l'OUA la possibilité de créer une force africaine chargée de la protection et de l'assistance humanitaire des populations. Il faut dire que les résolutions dans le domaine humanitaire ne sont pas l'apanage des organes principaux des Nations Unies. Les institutions spécialisées comme l'OMS ont une compétence reconnue en la matière. Envisager l'hypothèse de l'humanitaire sans le droit est impossible. La place du droit dans l'avènement de l'action humanitaire est confortée dans l'idée du mandat humanitaire.

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2. LA DEFINITION DU MANDAT HUMANITAIRE

En droit civil, le mandat désigne un « un acte par lequel une personne est chargée d`en représenter une autre par l`accomplissement d`un ou de plusieurs actes juridiques. Le mandat est conventionnel lorsqu`il résulte d`un contrat conclu entre le représenté et le représentant »¹³⁸. Mais dans le cadre de l'action humanitaire, il faut appréhender le mandat humanitaire comme une forme de contrat d'adhésion où la communauté internationale représentée par les institutions internationales indique quelle sera la teneur de l'action humanitaire dans une situation d'urgence. Sont contenues les prestations humanitaires précises et adaptées au contexte de la crise. De façon générale, il est évident que tout mandat humanitaire respecte le véritable dessein de l'action humanitaire « savoir prévenir et alléger les souffrances des hommes et protéger la vie et la santé et faire respecter la personne humaine ». Tout mandat doit tourner autour de cet esprit mais il doit être précis.

Chaque situation humanitaire a un type de souffrances précises. Le mandat humanitaire se fait dans le respect des principes traditionnels de l'action humanitaire. Une étude du CICR indique clairement l'importance du respect du mandat en tenant compte des principes qui l'entourent. « Exercer un mandat juridique est une chose, mettre en pratique les principes d`humanité, neutralité, indépendance et impartialité en est, bien sûr, une autre. Pour le CICR, cela exige essentiellement une approche basée sur les besoins ainsi qu`une proximité avec les bénéficiaires et l`établissement d`un dialogue avec toutes les parties prenantes. Cette approche permet à l`institution de gagner le maximum d`acceptation et de respect et, par ce biais, l`accès humanitaire le plus large possible. Elle contribue aussi à assurer la sécurité de son personnel. C`est ainsi que le CICR a pu obtenir l`accès aux victimes lors de crises récentes (conflits armés ou autres situations de violence) en Côte d`Ivoire, en Libye et en Syrie, par exemple. Il convient cependant de répéter que, dans plusieurs cas, il n`a pas été facile d`obtenir cet accès. »¹³⁹.

139 Cl. McGoldrick , « L'avenir de l'action humanitaire : une perspective du CICR », Revue Internationale de la Croix-Rouge, Volume 93 Sélection française 2011 / 3, p.110.

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Plusieurs principes orientent le mandat humanitaire. Les principes d'humanité, de neutralité, d'impartialité, de proportionnalité, de non- discrimination, libre accès aux victimes, bonne foi... Il faut reconnaitre l'expression et la compréhension de ces principes sont influencées par l'action et la conception du CICR. Lesdits principes sont résumés en ces termes : « de prévenir et d`alléger en toutes circonstances les souffrances des hommes ; de protéger la vie et la santé et de faire respecter la personne humaine, en particulier en temps de conflit armé et dans d`autres situations d`urgence ; d`oeuvrer à la prévention des maladies et au développement de la santé et du bien-être social ; d`encourager l`aide volontaire et la disponibilité des membres du Mouvement, ainsi qu`un sentiment universel de solidarité envers tous ceux qui ont besoin de sa protection et de son assistance »¹⁴⁰.

Ces principes ont une nature juridico-morale. Au plan théorique, ces principes sont significatifs. Selon Action Contre la Faim : « L'action humanitaire, comme son nom l'indique, est motivée par le principe d'humanité, et la volonté de soulager la souffrance humaine. Sans chercher à tirer un avantage de son action, et guidée par la volonté d'apporter une aide de manière inconditionnelle, l'action humanitaire repose sur des principes eux-mêmes fondés sur des valeurs morales et éthiques. » 141 . Le principe d'humanité, de volonté ne pose en général pas de problème. Le mandat humanitaire est souvent remis en cause en ce qui concerne les principes de neutralité, d'impartialité et d'indépendance. De plus, le Professeur Alain Didier Olinga précise le sens du principe de neutralité, principe déontologique : « l`action humanitaire signifie que celui qui accomplit celle-ci s`abstient non seulement de prendre part aux hostilités , mais en tout temps de se mêler de controverses d`ordre politique , racial, religieux et idéologique, de se prononcer sur les causes du conflit ou sur les responsabilités respectives des uns et des autres »¹⁴².

140 Préambule des principes et règles régissant l'assistance humanitaire de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

141 ,Y.Dyukova et P. Chetcutis , « principes humanitaires en situation de conflit le respect des principes humanitaires en situation de conflit armé ou de violence : l'expérience d'ACF et son positionnement », Action contre La Faim, 2013 - 14/16 Boulevard de Douaumont.

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L'idée d'impartialité signifie qu'il y a une non-discrimination parmi les personnes assistées et parmi les parties présentes au conflit. L'indépendance, est un autre point qui signifie que l'action humanitaire se fait sans aucune influence d'un gouvernement ou de toute autre fraction concernée par le conflit. D'où la liberté de conduire le mandat, la mission. Il faut dire en tout état de cause, que la réalisation d'un mandat fait face à des critiques en rapport avec l'application des principes. Les différents organismes se divisent sur la compréhension et l'application de ces principes. Mais dans l'urgence, il faut partir de ces principes théoriques mais savoir les appliquer sine die.

Rony Brauman recommande cette posture : « Il ne s`agit pas ici de les juger moralement mais de souligner que, comme nous l`avons vu sous d`autres aspects pour la neutralité, l`impartialité se prête à des interprétations pratiques très différentes, voire opposées, mais aussi fondées l`une que l`autre au regard des objectifs généraux de l`action humanitaire. Les organisations humanitaires étant conduites, en toutes situations, soit à arbitrer entre ces stratégies opérationnelles, soit à les combiner, elles gagneraient à les rendre explicites, pour elles-mêmes en premier lieu, faute de quoi elles se contentent de mettre en avant des principes abstraits, de vaines normes juridico-morales que leur action peine à illustrer. S`agissant de la Syrie, le choix du CICR de bâtir sa communication publique sur un « dialogue constructif » avec le gouvernement, choix que traduit la satisfaction, certes prudente et conditionnelle, exprimée par son président à l`issue de rencontres avec les plus hautes autorités de Damas, ne peut qu`accentuer le questionnement concernant son impartialité »¹⁴³.

Et cette logique signifie que les principes sont assortis d'exceptions et s'adaptent selon la situation à condition d'être efficace. Un mandat humanitaire peut évoluer au fur et à mesure que la mission de maintien de la paix se met en place et évolue dans son action. C'était le cas avec la Mission d'observation des Nations Unies au Congo¹⁴⁴ dans sa section civile qui avait pour rôle de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire. L'intervention humanitaire de Artémis¹⁴⁵ va élargir le mandat jusqu'à la protection et la

143 R. Brauman, « MSF et le CICR : questions de principes » in : « CICR : 150 ans d'action humanitaire », Volume 94 Sélection française 2012 / 4, p.353.

144 Cette mission a été déterminée la Résolution 1279 de novembre 1999 du Conseil de sécurité.

145 Cette force multinationale européenne est créée par la Résolution 1484 de Juin 2003.

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B. LA MOBILISATION DES INSTITUTIONS HUMANITAIRES

L'humanitaire est un cri qui n'épargne personne, que d'acteurs qui rendent l'humanitaire possible. Si l'humanitaire est un corps, l'on dira de ses acteurs qu'ils sont les bras et les mains de l'action humanitaire. On peut donc distinguer les acteurs humanitaires étatiques et les acteurs humanitaires non étatiques.

1. L'ACTION DES ACTEURS ETATIQUES

Classiquement, la notion d'acteurs étatiques peut être vue sous deux prismes : l'ordre westphalien et l'organisation intergouvernementale. Au-delà de la logique de l'humanitaire d'Etat admise ou refoulée en doctrine, l'Etat est au coeur de l'action humanitaire. Il est l'hôte ou le destinataire de l'action humanitaire comment envisager l'action humanitaire sans que l'Etat ne soit. Plus clairement, c'est l'Etat qui a des ressortissants nationaux ou non. En cas de situations humanitaires d'urgence, il est celui qui voit souffrir et attaquer sa population. L'Etat représente l'espace humanitaire. Si l'action humanitaire a droit de citer, c'est tout simplement parce que les citoyens lors d'une crise ont besoin d'être sauvés. Les premiers secours doivent être assurés par l'Etat ou les Etats qui ont besoin d'assistance humanitaire. L'Etat doit jouer son rôle. Selon la Constitution de la République du Congo : « La personne humaine est sacrée et a droit à l a vie. L`État l`obligation absolue de la respecter et de la protéger. Chaque citoyen a le droit au libre développement et au plein épanouissement de sa personne dans le respect des droits d`autrui, de l`ordre public, de la morale et des bonnes

Dans ces situations douloureuses, l'Etat peut bénéficier des secours et de l'appui des autres Etats considérés comme étant les Etats pourvoyeurs de l'aide humanitaire. Cette logique s'inscrit dans ce que Guy de Lacharrière va appeler la politique extérieure des Etats. Les puissances économiques s'illustrent notamment la France, les Etats-Unis, la Chine, la Grande Bretagne, la Russie qui apportent une enveloppe pour redonner de l'espoir aux hommes et aux femmes. Certains de ces Etats, la France notamment publient un rapport sur leur action

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humanitaire d'urgence. Cette action humanitaire de l'Etat n'est pas négligeable même si les critiques peuvent être faites à ces Etats qui peuvent agir seul ou ensemble.

La synergie entre les Etats à travers leur création, l'organisation internationale montre comment l'humanité se mobilise derrière une catastrophe pour protéger et garder les victimes qui souffrent, les victimes qui pleurent le prix de leurs vies. Il faut dire que l'action des organisations internationales est essentielle dans la détermination, l'alerte et la coordination de l'action humanitaire. Au niveau international, point n'est besoin d'une abondance dissertation sur la machine onusienne de l'humanitaire à travers ses organes principaux et ses institutions spécialisées. L'Union européenne est le bailleur de fonds le plus en vue dans sa contribution comme dans ses interventions. En Afrique, l'Union Africaine à travers son Conseil de paix et de sécurité peut à son initiative ou à l'initiative du Conseil de sécurité des Nations -Unies agir en matière humanitaire notamment dans la coordination. L'article 15 du Protocole qui crée le Conseil de paix et de sécurité de l'UA en mai 2004, établit qu'il « participe activement à la coordination et à la conduite de l`action humanitaire en vue du retour à une vie normale en cas de conflit ou de catastrophe naturelle » et que la force africaine en attente « sera adéquatement équipée en vue d`entreprendre des activités humanitaires dans ses zones de mission ». L'action humanitaire envisagée sans l'action des organisations internationales est complexe. Les organisations internationales travaillent en étroite collaboration avec les Organisations non gouvernementales et d'autres associations.

2. L'INTERVENTION DES ACTEURS NON-ETATIQUES

Engagement des bénévoles et des volontaires, l'action humanitaire est un champ cultivé par le mouvement des organisations non gouvernementales et des associations qui ont choisi de mener des missions salutaires pour les hommes souffrants lors des conflits. Qu'importe leur nature internationale ou locale, leurs efforts soulagent les vies en péril. Les missions sont larges et complexes mais cela n'empêche pas à ces tenaces de donner le meilleur d'eux-mêmes. Ces acteurs représentent les véritables techniciens, les mécaniciens et les concepteurs des opérations de sauvetage des victimes. Leur multiplication est en adéquation avec l'abondance des missions vitales et nécessaires lors des conflits ou lors des catastrophes. Les domaines d'intervention sont larges et les enjeux multiples. Le rêve d'Henry Dunant de voir, sur le terrain les de véritables professionnels, se réalise inexorablement.

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En clair, l'action humanitaire est conditionnée par plusieurs déclencheurs : les faits, le droit et l'institution. Si ces éléments ne sont pas réunis, elle restera lettre morte. Agir sans les faits est aberrant, agir sans le droit est violant et agir sans les institutions est vacillant. Il est important d'analyser l'action humanitaire sous le prisme des critères de détermination et de ses conséquences. (SECTION II).

SECTION II : CRITERES DE DETERMINATION ET

Le terme « humanitaire » est passé dans les perceptions et le langage courant comme synonyme d'urgence »¹⁴⁷ selon François Mattei. Ce type d'humanitaire a une spécificité, une identité, des éléments qui permettent de la reconnaitre. « A l`urgence, il faut répondre par l`urgent »¹⁴⁸ pour reprendre la formule emphatique du Professeur Olinga . Quel est l'attribut de l'action humanitaire en urgence ? (Paragraphe I) Quelles sont ses conséquences ? (Paragraphe II). L'engagement humanitaire en République Centrafricaine par exemple, ces dernières années n'est pas resté sans incidence. Ces incidences sont visibles et réelles.

PARAGRAPHE I : LA NATURE DE L'HUMANITAIRE EN SITUATION

D'URGENCE

Une étude quant à sa nature commande de partir du contexte, un contexte complexe pour toute activité visant à sauver les vies. Le dit contexte singularise a fortiori les interventions dans le cadre de l'humanitaire en urgence.

A. L'ENVIRONNEMNT SOMBRE DU CONTEXTE

Dans le propos introductif, il a été proposé une forme de métaphore pour parler de l'action humanitaire en urgence. Il s'agit de l`humanitaire noir ou l`humanitaire de la nuit. Cette image n'est pas fortuite, elle est justifiée dans la mesure où l'humanitaire est un enchaînement de risques et de dangers dans une situation de crise aggravée. C'est dire que la nature urgente de cette humanitaire-là est marquée par le contexte de l'intervention.

1. L'ADDITION DES DANGERS ET DES RISQUES

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L'urgence signifie présence du danger et prise de risques. Xavier Zeebroei ne manquera pas de le souligner : « Chercher à sauver des vies innocentes au sein même du même conflit s`avère tout aussi dangereux »¹⁴⁹. Le contexte est difficile et volatile. Dans la Charte de Médecins Sans Frontières, ce problème de risque était déjà soulevé : « Volontaires, ils mesurent les risques et les périls des missions qu`ils accomplissent et ne réclameront pour eux ou alors leurs ayants droit aucune compensation autre que celle que l`association sera en mesure de leur fournir ». Ainsi qu'il s'agisse d'une catastrophe naturelle ou d'une mission de maintien de la paix, les risques et les dangers sont imminents et réels. Selon le comité permanent inter organisations des Nations unies, il est inimaginable de parler de l'humanitaire en urgence sans dangers : « Les conflits armés et les catastrophes naturelles entrainent de Graves souffrances pour les populations affectées sur les plans psychologique et social. Les conséquences psychologiques et sociales de ces situations d`urgence peuvent être dramatiques à court terme, mais elles peuvent aussi porter atteinte à la santé mentale et au bien-être psychosocial de ces populations à long terme. Ces conséquences peuvent constituer une menace pour la paix, les droits de l`homme et le développement ».

Les risques et les dangers augmentent au fur et à mesure que la situation s'accentue et c'est l'aide humanitaire qui court un risque de blocage, les acteurs humanitaires sont en danger, exposés à l'insécurité, aux menaces et aux pièges. Dans le cadre de la MONUC, le 09 juillet 2003, des assaillants armés, une vingtaine firent une infiltration dans les locaux de Action contre la faim à Kayanza ( au Nord du Burundi) et emportent le matériel de l'association. Deux mois avant cela, le 03 mai 2003 : « Le pire pointait à l`horizon ; Bunia , la ville phare de l`Ituri, allait subir le sort de centaines de villages et de groupes ituriens avant elle : la confrontation par civils interposés, l`horreur insondable au centre d`une ville moyenne , la division du travail entre lance-roquettes et machettes. »¹⁵⁰ .

La question des risques ne peut aucun cas être considérée comme un phénomène surprenant. L'action humanitaire en urgence est une action de risque. Face au « brouillard de la guerre », on est face à la logique de certains théoriciens : « d`appréhender le risque sous sa forme mathématique (risque = probabilité [menace, vulnérabilité] X impact29) et d`affiner son

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calcul à l`aide de bases de données. »¹⁵¹. Selon Weiss, MSF s'est confronté «dans les années récentes, en Syrie, en République centrafricaine, en République démocratique du Congo et en Somalie notamment, à la mort violente et à l'enlèvement de plusieurs membres de son personnel ». L'organisation est également gagnée par l'idée selon laquelle « son environnement de travail serait devenu plus dangereux ».¹⁵²

Quels peuvent être ces dangers. On peut citer quand on observe les récits humanitaires de l'Afrique des crises politiques : la terreur suscitée par des belligérants : le lynchage de blessés ennemis dans les hôpitaux ; l'attaque des civils par les armées dites régulières et ou rebelles ; le bombardement d'hôpitaux, des écoles et des marchés ; l'enlèvement, l'exécution ou la revente d'otages civils ou militaires ; l'assassinat des proches des hommes politiques concernés par le conflit et des humanitaires ; le trafic d'enfants et d'organes, l'extrême brutalité sur les blessés et les otages . En clair l'action humanitaire urgente est risquée et dangereuse. Et la réponse humanitaire évolue dans ce contexte.

2. L'AGGRAVATION DE LA CRISE

Pour parler de crise humanitaire, il s'agit d'une « situation dans laquelle des personnes subissent une détresse mettant leur vie en danger et à laquelle ni l`Etat ni la société ne remédient ou ne peuvent remédier » 153 . Il y a donc la détresse, le chaos s'installe, l'enlisement de la violence est sans précédent et les civils sont sacrifiés. Une crise s'aggrave quand il est difficile ou lorsqu'il devient difficile pour les humanitaires de faire une différence entre les civils et les militaires. Les enfants se trouvent être recrutés par les parties au conflit. La population participe au conflit. L'action humanitaire en urgence doit se déployer dans un flou total. On comprend que cette humanitaire est prise aux pièges de la crise, tout dépend du niveau de crise et la crise peut conditionner l'efficacité et l'effectivité de l'assistance humanitaire.

Le cas rwandais et le cas biafrais montrent bien que la dimension sombre du contexte dans lequel l'humanitaire doit évoluer est un critère de détermination de l'action humanitaire

151 M. Neuman & F.Weissman, Secourir sans périr la sécurité humanitaire à l`ère de la gestion des risques, CNRS, mars 2016,p.160.

152 M. Neuman & F.Weissman, Secourir sans périr la sécurité humanitaire à l`ère de la gestion des risques, ibid.p.175

153 P. Reymond, J. Margot & A. Margot, Les limites de l`aide humanitaire, op cit, p.7.

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urgente. C'est l'humanitaire de la détresse, du désastre et de la crise. C'est cette situation qui a gêné le CICR lors de la crise du Biafra. Pourtant comme le dit Alain Destexhe : « l`action humanitaire s`occupe alors essentiellement de panser les plaies des conflits »¹⁵⁴. Le même auteur conclut que cet état de crise entraîne la complexité de l'humanitaire en urgence : « Les lampions de la fête sont éteints, mais le cahier de doléances est de plus en plus rempli. Il faut sans cesse colmater les brèches d`un bateau dépourvu de timonier ». Il y a donc nécessité des interventions sur les terrains de crise.

B. LA PARTICULARITE DE L'INTERVENTION

L'intervention humanitaire selon le principe de proportionnalité et de la logique d'efficacité est à la taille des besoins et des souffrances que rencontrent les victimes potentielles et les

victimes souffrantes. Deux phases sont essentielles à toute intervention d'urgence
notamment l'observation et l'action. ¹⁵⁵ Quelques qualificatifs correspondent à cette intervention de sauvetage.

1. LE CARACTERE PONCTUEL ET TEMPORAIRE

Ce caractère est clairement déterminé par le Professeur Bettati :« Cette assistance est purement humanitaire et est destinée à protéger le droit aux soins, le droit à la vie, le droit au droit »¹⁵⁶. Le caractère ponctuel de l'action humanitaire en urgence signifie qu'elle est exacte et immédiate. Aussitôt il y a souffrance, aussitôt il y a une réponse. On est dans le principe souffrance et réaction. « L`action humanitaire est naturellement condamnée à être une activité ponctuelle »¹⁵⁷. C'est à partir de là que l'on ressent la force et la dextérité des acteurs humanitaires qui doivent proposer la mesure à prendre pour faire face à la souffrance des victimes. L'attente trop longue d'une assistance humanitaire a pour effet de prolonger les civils et les blessés dans le chaos. L'effet induit de cette action humanitaire urgente ponctuelle est l'improvisation. Il faut improviser par ce qu'il n'est pas toujours évident pour les humanitaires de procéder à une anticipation.

155 A-L Maïola, « Médecins Sans Frontières et la gestion des catastrophes naturelles : standardisation et limites de la logistique en situation d'urgence », Mondes en développement 2007/1 (n° 137), p.84.

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Reste à se demander quelle est la durée de l'action humanitaire urgente ? Toute réponse tranchée serait peu commode. Dans l'urgence, c'est le moyen terme qui prévaut, même si des politiques de développement et de résilience suivront. Mais il peut arriver que le conflit prenne plus de temps comme le cas congolais. L'Agence française de développement dans une de ces publications a posé le problème du temps de l'urgence à travers des déclarations d'acteurs humanitaires. La durée de l'urgence n'est pas facile à déterminer et varie d'un cas à l'autre. « C`était toujours une urgence, même 2-3 mois après le tremblement de terre, car les gens devaient aller chercher l`eau très loin ». « La phase d'urgence, c'est disons 4 mois ». « L'urgence, c'est pendant les 5 premiers jours, qui souvent sont les 10-15 premiers... ». « L'urgence au sens propre du terme, c'est les 15 premiers jours, les trois premières semaines ». « Six mois après le tremblement de terre, le gouvernement déclare l'urgence terminée, même si c'était loin d'être le cas ; car par exemple c'était toujours très difficile d'atteindre certains endroits ». « C'est de l'urgence, mais ce n'est pas de la première urgence ; en effet, considérant l'isolement des populations et le manque d'infrastructure, la situation se caractérise par l'existence de réseaux menacés par un risque sérieux d'effondrement, avec l'accès à l'eau complètement coupé pour une grande partie de la population » »¹⁵⁸. Mais l'action humanitaire urgente ne peut s'éterniser, elle a un temps malgré la durée. Sa durée traduit son immensité.

2. LE CARACTERE IMMENSE ET DILIGENT

L'intervention humanitaire est fonction du volume des besoins. On constate que l'oeuvre humanitaire est abondante. L'aide urgente répond aux besoins de survie. Plus concrètement, il s'agit de l'aide alimentaire, l'aide sanitaire, l'aide scolaire, l'appui dans les habitations.

Le nombre d'acteurs humanitaires sur le terrain peut paraître exagéré mais la quantité de souffrances n'est pas à négliger. Les blessés, les malades, les déplacés, les réfugiés, les prisonniers ont tous besoin d'une assistance. On remarque l'option de deux tendances d'ONG notamment celles qui sont spécialisées et celles qui embrassent un large spectre d'action. Action contre la Faim est l'illustration du premier cas et Le CICR est l'illustration du second cas. Le Secrétaire général des Nations-Unies d'alors a également apprécié l'action large du CICR dans le domaine humanitaire en général et dans l'urgence en particulier : « Il y a ensuite

158 AFD, « L'accès à l'eau et à l'assainissement pour les populations en situation de crise», DT n°115, septembre 2011, p.12.

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l`étendue des activités menées par le CICR, dont la pierre angulaire est l`idée que protection et assistance sont les deux faces d`une même médaille. Certaines de ces activités sont spécifiques à l`institution, plus particulièrement au mandat qui lui a été conféré de promouvoir le droit international humanitaire et de s`en faire le gardien. D`autres sont complémentaires aux activités réalisées par la famille des Nations Unies et ses institutions humanitaires, de défense des droits de l`homme et de développement : je pense ici notamment aux activités du CICR visant à protéger les civils, à rétablir le contact entre les membres des familles dispersées, à fournir un accès aux soins médicaux, à l`eau, à la nourriture et à d`autres biens de première nécessité, ainsi qu`à ses visites aux détenus, à ses programmes destinés à assurer une production alimentaire durable et à ses initiatives microéconomiques. ».

La diligence est le dernier caractère. La diligence ne doit pas être confondue à la précipitation. Les activités humanitaires urgentes s'enchaînent. Il faut des investissements rapides et des décisions imminentes. La chaîne d'approvisionnement en urgence peut s'étendre pendant environ un mois. Anne Laure Mailona¹⁵⁹ propose une chaine d'approvisionnement de la logistique en quatre phases notamment : la première (0 à 2 semaines) pour l'arrivée du premier matériel humanitaire, la deuxième (2 à 4 semaines) avec la détermination des besoins spécifiques de l'intervention, la troisième phase (Cinquième semaine) avec l'installation des équipes et la fin de l'urgence et la quatrième phase (à partir de la neuvième semaine) pour la gestion du reste des approvisionnements.

Les mesures succèdent aux mesures. Un domaine de l'action humanitaire qui recommande cette diligence est la médecine humanitaire. Dans la bataille de Solferino, Dunant a mis en valeur ce caractère de l'action humanitaire. «Voici la longue procession des voitures de l`intendance, chargées de soldats, de sous-officiers et même d`officiers de tous grades confondus ensemble, cavaliers, fantassins, artilleurs, tous sanglants, exténués, déchirés, couverts de poussière ; puis des mulets arrivant au trot, et dont l`allure arrache à chaque instant des cris aigus aux malheureux blessés qu`ils portent. La jambe de l`un est fracassée et semble être presque détachée de son corps, chaque cahot de la charrette qui l`emmène lui impose de nouvelles souffrances ; un autre a un bras cassé, et avec celui qui lui reste il soutient et préserve le membre fracturé ; un caporal a le bras gauche traversé, de part en

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part, par la baguette d`une fusée à la Congreve, il la retire lui-même, et cette opération faite, il se sert de cette baguette en guise de canne pour s`aider à gagner Castiglione ; plusieurs expirent en route, leurs cadavres sont déposés sur le bord du chemin, on viendra plus tard les enterrer. »¹⁶⁰. La vitesse de l'urgence entraîne des conséquences réelles.

PARAGRAPHE II : QUELQUES CONSEQUENCES DE L'ACTION HUMANITAIRE EN URGENCE

Le qualificatif urgent à lui seul suffit pour que l'action humanitaire ait une incidence forte au sein de la société internationale. L'avènement d'une crise humanitaire emporte les politiques et les programmes. Plus concrètement, se trouvent concernés par cette situation, les politiques et les victimes qui pourront se soulager ou se sauver. Deux grandes conséquences seront analysées à savoir les conséquences politiques et les conséquences pratiques et systématiques.

A. CONSEQUENCES POLITIQUES

Deux questions permettent de comprendre ces conséquences à savoir la médiatisation et la collaboration entre humanitaires et militaires.

1. LA MEDIATISATION

« Il n'est pas de jour, de discours politiques, d'évènement international où ne sont désormais convoqués la morale, les droits de l'homme ou le souci humanitaire »¹⁶¹. Il y a un effet paradoxal dans la médiatisation de l'action humanitaire urgente. Un effet objectif où les médias se mettent au service de l'humanitaire. Une parole, une photo, un slogan, une chanson peuvent suffire pour mobiliser la communauté internationale face à la détresse et les pleurs des enfants qui souffrent à l'occasion d'une catastrophe naturelle. « Afin de déclencher chez le téléspectateur le réflexe humanitaire et faire appel à sa générosité, la télévision use de tous les moyens. Elle s`associe, par exemple, aux grandes stars et aux personnalités célèbres dans le monde du cinéma, de la chanson, du sport, de la politique et du business, les présente comme de fervents militants de l`humanitaire et signale qu`elles ont fait des dons importants au profit de la cause humanitaire, lors d`un

161 R.Brauman, « politique et éthique : un baiser de vampire », Politique internationale, octobre 1990, p.3.

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Téléthon ou d`une soirée spéciale d`aide d`urgence, pour donner l`exemple à leurs fans. Ces derniers ne tardent pas à agir. Les médias soutiennent ainsi l`élan humanitaire et apportent énormément à l`action humanitaire qui tient son efficacité et son succès, avant tout et surtout, de sa revendication par les médias. »¹⁶². Les médias se mettent au service de l'action humanitaire en dénonçant, en interpellant et alertant la communauté internationale. On peut illustrer cela avec toute la campagne médiatique autour d'Haïti ou des victimes du Tsunami.

L'autre effet, c'est l'instrumentalisation de l'urgence au profit non pas des victimes mais des politiques. Les faits ne sont pas publiés objectivement. Tantôt voilée et tantôt exagérée, l'action humanitaire est désacralisée et tronquée. On peut y voir de la récupération politique, de la domination et même du sabotage politique. « Les photos que l`on diffuse disent à la fois la réalité et le mensonge. Jouant sur des images qui choquent, de blessés amputés ou gravement défigurés, de maladies bizarres et incurables, d`images de torture et de décapitation, de traitement inhumain et humiliant, de détournement d`avions, d`attentats à la bombe, (etc.), les médias peuvent aller jusqu`à abuser de la sensibilité du téléspectateur »¹⁶³. Seules l'éthique et la déontologie peuvent avoir raison sur cette dérive qui n'occulte pas la place des médias dans l'aventure humanitaire.

Que retenir de ce couple média et humanitaire ? Pour MSF : « Le rapport médias - humanitaire est un phénomène de société complexe : l`un et l`autre travaillent souvent sur les mêmes terrains et ont des contacts rapprochés pour servir leurs intérêts propres. L`humanitaire a besoin des médias pour faire connaître les causes qu`il défend, provoquer les prises de conscience collectives et rassembler les citoyens autour des valeurs qu`il veut transmettre. Les médias ont aussi besoin des associations humanitaires, sources d`informations fiables et souvent indépendantes pour mieux appréhender des situations de crises complexes dont elles sont les témoins privilégiés. »164

¹⁶²H.Gueldich, « les médias et l'humanitaire: quelle relations? », Ordine internazionale diritti umani, (2015), p.72.

164 MSF, « Médias et Humanitaire : je t'aime moi non plus ! », Dossier, 26 février 2006.

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Ce couple doit éviter de verser dans l'humanitarisme béant mais à une coopération déontologique. Ladite coopération peut mettre en lumière la vraie coopération entre les humanitaires et les militaires.

2. LA COOPERATION ENTRE HUMANITAIRE ET MILITAIRE

En analysant la question de la nature de humanitaire urgente, on n'a pas manqué de soulever le caractère risquant et dangereux du contexte. Et si les opérations de sauvetage s'effectuent dans cette situation morose. La conséquence immédiate, c'est la sécurisation de l'aide humanitaire, la sécurisation des acteurs humanitaires. Malgré leur légitimité, les acteurs humanitaires accusés à tort ou à raison ont besoin d'un bras séculier pour mener à bien leur mission. « A coeurs vaillants rien d'impossible » dit l'adage mais sans sécurité quelle humanitaire ? Malgré les garanties reconnues à ces acteurs par les conventions de Genève, rien n'y fait, ils sont menacés et ont besoin des militaires. Il est vrai que l'action humanitaire est neutre et apolitique à l' opposer de l'intervention d'humanité qui est un acte politique. « Le cas des conflits armés est bien particulier, puisque les « humanitaires » doivent très souvent multiplier leurs contacts avec les différents acteurs présents sur le terrain et en particulier les forces armées qui s`affrontent. De plus, depuis la fin de la guerre froide, les armées ne se contentent plus de leur fonction traditionnelle, mais prennent de plus en plus un rôle de maintien de la paix ou de « mandat humanitaire »¹⁶⁵. Il n'est pas déontologique de voir le militaire et l'humanitaire en couple. Mais l'état du terrain et la violence des combats ne laissent pas une meilleure option. L'arme de l'humanitaire, c'est l'aide mais il doit faire face à des combattants qui sont lourdement armés. Le militaire devra assurer sa protection pour qu'il réalise sa mission. D'autres conséquences existent dans les activités humanitaires.

B. LES CONSEQUENCES PRATIQUE ET SYSTEMATIQUE

L'urgence appelle à des mesures réalistes et à un résultat visible. La conséquence pratique permet d'acheminer l'aide et le résultat, ce sont les victimes qui parviennent à survivre.

1. CREATION DES CORRIDORS HUMANITAIRES

Cette conséquence vaut dans le cadre de l'humanitaire des conflits armés. Calqués sous le modèle du droit de la mer avec la notion de « passage inoffensif » pour le libre accès aux

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espaces maritime sous juridiction étatique, la quatrième convention de Genève définit le corridor humanitaire comme : « le libre passage de tout envoi de médicaments et de matériel sanitaire ainsi que des objets nécessaires au culte destinés à la population civile d`une autres partie contractante , même ennemie »¹⁶⁶. Il faut dire qu'un tel mécanisme est une preuve de l'état d'urgence dans lequel on se trouve. Encore appelé couloir d'urgence ou couloir humanitaire, cette mesure favorise la protection et l'acheminement de l'aide. C'est l'Etat qui l'autorise qui a le droit d'en poser les conditions. Dans le cadre des catastrophes naturelles ou des crises sanitaires, ce mécanisme n'est pas prévu mais l'Etat doit réunir toutes les conditions pour rendre possible les activités humanitaires prévues pour ces deux situations. Il faut dire que la nécessité du couloir humanitaire survient quand le conflit est complexe. Lors de la crise malienne évoquée plus haut, l'ambassadeur¹⁶⁷ du Mali à Paris, dans une interview accordée à l'OCDE soulignait la nécessité de cet outil dans son pays : « La nécessité d`un couloir humanitaire est une évidence. Mais nous faisons face à deux problèmes. Le premier est celui de l`acheminement de l`aide. Il s`agit ici d`un problème purement logistique qui n`est pas infranchissable, même s`il faut parcourir des milliers de kilomètres dans une zone désertique ; le Président de l`Assemblée régionale de Tombouctou, avec l`appui de la Croix-Rouge malienne, a d`ailleurs réussi à acheminer cinq tonnes de vivres et des médicaments à Tombouctou. L`autre problème est beaucoup plus ardu. Il s`agit de faire en sorte que l`aide soit distribuée aux populations les plus vulnérables. Un corridor humanitaire entraîne la protection et le soulagement des victimes.

2. LA DIMINUTION DE VICTIMES

La conséquence d'une activité humanitaire est en réalité la réduction du nombre de victimes concernées par la situation. Lors d'une assistance humanitaire, on veut sauver le maximum de victimes. « L`aide humanitaire a pour but d`apporter des secours immédiats dans une situation d`urgence. Sans cette aide, les catastrophes naturelles et les guerres feraient encore plus de morts. Elle est donc nécessaire pour la survie d`êtres humains. Le terme « aide humanitaire » ne peut cependant pas être utilisé pour toutes les formes de soutien. »¹⁶⁸. Il existe plusieurs types de victimes lors d'une action humanitaire en urgence au regard de la

166 Article 23 de la Convention IV de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.

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pratique et des textes juridiques applicables. On peut citer des victimes atteintes physiquement (Blessés, malades, handicapés), des victimes atteintes matériellement (celles qui ont perdu leurs biens ou leurs maisons), victimes professionnelles (journalistes ou professionnel de l'humanitaire) et victimes débarquées (déplacés, réfugiés, les prisonniers de guerre, des personnes enlevées).

Il faut dire que le résultat attendu lors d'une activité humanitaire en urgence est la diminution maximale du nombre de victimes. Des mesures sont prises à cet effet notamment les soins, la médecine humanitaire, la protection de la population civile, l'installation des déplacés et des camps de réfugiés. Il est toujours important de se poser la question de savoir quel est le nombre de victimes sauvées lors d'une mission humanitaire ? Ou encore qui pouvait être potentiellement sauvé et qui a été sauvé réellement ? Là se trouve interpelé la question de l'efficacité de l'assistance humanitaire. Madagascar en 1997 a été frappé par un cyclone qui causa près de 500 000 sinistrés¹⁶⁹ . Une étude assez statistique proposée par la CEEAC est encore plus édifiante : « Les génocides rwandais et burundais ont fait plus d`un million de morts et des millions de réfugiés poussés vers les pays voisins. Le conflit angolais a fait plus de 500.000 morts et 3 millions de réfugiés. Celui de la RDC a fait 3 millions et demi de morts parmi lesquels de nombreux enfants, femmes et vieillards. Les dommages collatéraux ont fait 2,5 millions de victimes de tortures, d`assassinats politiques, de viols, etc. La situation de 2,5 millions de réfugiés, de 2,5 millions de déplacés dont 50% en provenance de l`Est de la RDC, est un véritable désastre humanitaire. Cette réalité est d`autant plus significative quand on sait que 1 million de personnes sont sans assistance, 18,5 millions d`habitants (37% de la population) n`ont pas de soin de santé. Enfin pour la seule RDC, 16 millions de personnes sont en situation alimentaire critique » ¹⁷⁰.L'urgence des interventions humanitaires est un remède qui doit soulager.

Rony Brauman a envisagé une fin heureuse de l'action humanitaire en urgence : « l`urgence de l`action à mener pour faire cesser les souffrances invoquées l`emporte toujours » et « La préservation d`un espace d`humanité au coeur de la tourmente guerrière est désormais une obligation légale s`imposant en tout temps et en tous lieux. »¹⁷¹ .

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Cette première analyse étudie la question de l'urgence dans l'humanitaire d'un point de vue théorique . Les grandes lignes débutent par des éléments déclencheurs à savoir les événements majeurs, les éléments juridiques et institutionnels avant une tentative d'identification de l'humanitaire urgente et de ses incidences. Tout compte fait, « l'humanitaire noire » n'est pas seule dans cette symphonie fredonnée pour rendre les souffrances éloignées des hommes. Si dans l'urgence il y a la souffrance, au quotidien des sociétés africaines, il y a aussi des pleurs et les blessures.

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CHAPITRE DEUXIEME : ETUDE THEORIQUE DE L'ACTION HUMANITAIRE EN PERMANENCE

La poésie est lyrique et didactique. Gabriela Mistral conforte cette position :

La reprise de ce poème permet de montrer que la souffrance n'est pas seulement pendant la guerre, pendant les catastrophes ou lors des crises sanitaires. Cette forme de souffrance plus loquace est particulière. Particulière, elle est vue à l'occasion d'un évènement et même lorsqu'elle met du temps, elle garde sa dimension exceptionnelle. Hors des évènements, dans

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les sociétés africaines loin des évènements exceptionnels, l'enfant est dans la rue abandonné, il a faim, il n'est pas en santé, bref il souffre. Cela signifie que l'action humanitaire ne peut et ne saurait s'arrêter sur l'exceptionnel, il faut transcender l'exceptionnel et s'ouvrir à l'habituel. Il est développé un humanitaire naturel. Que de souffrances quotidiennes à soulager. Ce chapitre est une construction qui tourne autour de cette action humanitaire naturelle. Albert Camus le souligne : « La vraie générosité envers l`avenir consiste à tout donner au présent. ». Les misères et la liturgie des souffrances doivent trouver une réponse, symbole d'une action humanitaire en permanence, l`humanitaire blanc, l`humanitaire du jour. Son étude théorique présente une double spirale constituée des fondements théoriques (Section I) et de l'identification et la structuration (Section II) de l'action humanitaire en permanence. Cela demeure une approche théorique.

SECTION I : LES MOTIVATIONS DE L'ACTION HUMANITAIRE EN

PERMANENCE

La question de l'humanitaire en permanence n'est pas une nouveauté dans les sociétés en général et en Afrique en particulier. Pour comprendre de quoi est ce qu'il est question, il est important de procéder à une démonstration qui a trait aux fondements de cette logique permanente de l'humanitaire. Deux grandes ont été retenues notamment les bases philosophico-religieuses et les bases matérielles et sociales. Le cadre de vie de la société africaine conforte ces motivations.

PARAGRAPHE I : MOTIVATIONS PHILOSOPHICO-RELIGIEUSES

Si en apparence, philosophie et religion s'affrontent dans le fond, ces deux domaines forment un trait d'union surtout sur les questions morales. Il faut faire du bien à autrui, au prochain. Le cadre de l'humanitaire en permanence confirme l'intimité qui peut s'établir entre la morale philosophique traditionnelle et la morale religieuse. Seront présentées les fondements sur les plans philosophique et religieux.

A. AU PLAN PHILOSOPHIQUE

La question du bien en philosophie a été analysée par bon nombre d'auteurs à l'instar de Platon, Kant ou encore la morale stoïcienne. Il faut faire du bien en tout temps et en tout lieu.

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Les actes de générosité doivent naturellement être posés dans la vie quotidienne. Deux retenu positions philosophiques sont retenues : la thèse de l`homo homini Deus et la loi du coeur.

1. LA THESE DE L'HOMO HOMINI DEUS

La thèse de l`homo homini Deus n'est pas à proprement parler opposer à la thèse l`homo homini lupus. L'homme est un loup pour l'homme au nom de la rivalité, de la méfiance et de la fierté. La société prend l'allure envisagée par cette formule classique, « bellum omnium contra omnes », traduite en français, « la guerre de chacun contre chacun » bien exprimée par Thomas Hobbes dans le Leviathan . Mais au-delà de ce visage animal de l'homme, il a paradoxalement un visage humain, raisonnable. D'où la thèse de l`homo homini deus défendue par Baruch de Spinoza. Elle consiste à reconnaître que l'homme est un dieu pour l'homme. Il est capable de porter secours et assistance à l'autre qui en a besoin. Il pose des gestes humanitaires par ce qu'il est éclairé par la raison. « Dans la mesure seulement où les hommes vivent sous la conduite de la raison, ils s`accordent toujours nécessairement en nature... L`expérience même atteste chaque jour par des témoignages si clairs presque tous répètent : l`homme est un Dieu pour l`homme »¹⁷². L'homme comme être de raison ne peut tolérer les souffrances quotidiennes, il va agir. Et cette action, c'est l'action humanitaire.

Cette action devient du fait de la raison en activité un devoir moral. Emmanuel Kant qualifie cela : « l`indissociable sociabilité des hommes, c`est-à-dire leur inclination à entrer en société »¹⁷³. La personne humaine, lorsqu'elle souffre au nom de son identité et du règne de la souveraine raison doit toujours être traitée avec humanité. C'est l'occasion de dire que si l'humanisme est un esprit, il est concrétisé par l'action, l'action humanitaire permanente. L'expression de la raison se trouve donc dans la loi morale. Il y a un impératif de moralité. « Il y a un impératif qui nous ordonne immédiatement une certaine conduite »¹⁷⁴ . En clair l'action humanitaire a un fondement moral, elle est morale parce que l'homme agit selon la puissance de la raison. C'est la raison qui agit dans cette thèse de l' homo homini deus mais pour d'autres auteurs , c'est le coeur qui motive l'action humanitaire.

¹⁷²Spinoza, Ethique, 4^e partie, prop.35, et scolie du corol.2de la prop, 1677, 35, p.249.

¹⁷³E. Kant, Idée d`une histoire universelle au point de vue cosmopolitique, in philosophie de l`histoire, Aubier, 1947. pp.64-65.

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2. LA LOI DU COEUR

Souvent considéré comme l'instrument, l'expression de la sensibilité, le coeur est un élément fondamental dans l'action humanitaire quotidienne. Les actes, les dons, les facilités viennent mettre en actes une sensibilité, une émotivité, une subjectivité intérieure à l'homme. Malgré quelques objections, l'action humanitaire véritable est une affaire de coeur. La faiblesse, l'impuissance, le malheur et les souffrances suffisent à susciter l'affection de celui qui aide. Aller à la rencontre des hommes en souffrance demande un minimum de sensibilité, il faut le faire en accord avec ses sentiments. Rousseau confirme cette logique du coeur : « Exister pour nous, c`est sentir ; notre sensibilité est incontestablement antérieure à notre intelligence, et nous avons eu des sentiments avant les idées. Quelle que soit la cause de notre être, elle a pourvu à notre conservation en l`amour de soi, la crainte de la douleur, l`horreur de la mort, le désir du bien-être »¹⁷⁵.

Cette humanitaire en permanence se confond à la bienfaisance et à la charité quotidienne. C'est le monde sensible et non le monde intelligible. Il faut faire le bien sans jamais se lasser. La sensibilité fait partir du monde. Si la sensibilité n'est plus, le monde cesse et l'action humanitaire n'a plus droit de citer. Kant permet de voir le rapprochement entre l'humanitaire en permanence et la bienfaisance. « Etre bienfaisant, lorsqu`on le peut, est un devoir, et, de plus, il y a certaines âmes si naturellement portées à la sympathie que, sans aucun motif de vanité ou d`intérêt, elles trouvent une satisfaction intérieure à répandre la joie autour d`elles, et jouissent du bonheur d`autrui en tant qu`il est leur ouvrage »¹⁷⁶. Kant ne s'arrête pas là dans son texte, il imagine des hommes bienfaisants sans un moindre chagrin pour les malheurs d'autrui et s'abstiennent de voler à leurs secours, cela sera immoral et dangereux. On retient que c'est la loi du coeur, une loi naturelle qui favorise cette humanitaire en permanence qui apparait dans les écrits de Kant comme l'ouvrage qui garantit le bonheur d'autrui. Cette loi du coeur est aussi exprimée dans les doctrines religieuses.

B. AU PLAN RELIGIEUX

Loin d'une prière ou l'expression d'un sentiment religieux, on peut démontrer que l'action humanitaire de tous les jours a un fondement religieux. Les écrits bibliques et la doctrine de

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l'église catholique romaine inspirent l'action humanitaire de type permanent. Deux logiques guident cette action : la logique du prochain et la place de la charité dans la doctrine. Ces deux logiques sont interprétées selon l'action humanitaire de permanence.

1. LA LOGIQUE CHRETIENNE

Dans l'épitre de Jean, il est mentionné : « Celui qui n`aime pas son frère, qu`il voit, est incapable d`aimer Dieu, qu`il ne voit pas » 177 . Les écritures posent deux attitudes fondamentales à savoir l'amour de Dieu et l'amour du prochain. « J`aime Dieu et j`aime mon prochain. Si je n`aime pas Dieu, je ne peux aimer mon prochain ». Et cet amour du prochain devient un besoin dont on ne peut se détacher. L'amour du prochain s'appelle encore l'attitude samaritaine. Il faut se donner à l'autre gratuitement. Voir une souffrance ou une misère appelle la manifestation de cet amour du prochain. « Tu aimeras ton prochain comme toi-même»¹⁷⁸ . La personne humaine est sacrée et mérite d'être aimée sans discrimination aucune. Dans les écritures saintes¹⁷⁹, on raconte l'histoire d'un samaritain qui passait et qui trouvait sur son chemin, un homme qui fut grièvement blessé par des brigands et fut abandonné. Alors que personne ne prenait soin de lui, le samaritain prit soin de lui et confia la suite de son traitement à un aubergiste à qui il promit de venir payer les soins qui allait offrir. Il viendra régler la somme due. Ce samaritain ressemble à un humanitaire de passage dans une rue d'Abidjan ou de Ndjamena constate qu'un homme y est couché et semble affaibli. L'homme de coeur aura donc l'obligation de prendre soin de ce misérable.

La motivation religieuse s'exprime par la charité chrétienne. « Tu vois la trinité quand tu vois la charité »¹⁸⁰ disait Saint Augustin. En effet, l'Eglise catholique romaine a une triple mission : l'annonce de la parole, la célébration des sacrements et le service de la charité. Pour ce troisième volet, il faut dire qu'il existe des institutions chargées d'assurer cette mission et chaque fidèle à son niveau doit manifester cette charité. C'est donc un service, une tâche naturelle, il faut servir l'autre gratuitement. Dans son encyclique, le Pape Benoît XVI revenait sur cette mission charitable et caritative de l'église. « Toute l`activité de l`Église est

180 De Trinitate, VIII, 8, 12: CCL 50, 287: Bibliothèque augustinienne 16, Paris (1955), p. 65.

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l`expression d`un amour qui cherche le bien intégral de l`homme: elle cherche son évangélisation par la Parole et par les Sacrements, entreprise bien souvent héroïque dans ses réalisations historiques; et elle cherche sa promotion dans les différents domaines de la vie et de l`activité humaines. L`amour est donc le service que l`Église réalise pour aller constamment au-devant des souffrances et des besoins, même matériels, des hommes. C`est sur cet aspect, sur ce service de la charité »¹⁸¹.

L'esprit de cette charité consiste à venir en aide aux affamés, aux sans-abris, à ceux qui ont non pas de vêtements, aux orphelins, aux veuves, aux personnes âgées, aux prisonniers...Pierre de Senarclens a pu tirer une conclusion de cet engagement humanitaire de l'église : « Les principes de la charité chrétienne, qui commandent l`assistance aux enfants abandonnés, aux malades, aux pauvres , sont mis désormais au service d`une philanthropie laïque à vocation universelle. » 182 En clair, l'humanitaire en permanence, c'est la manifestation continue de la charité en faveur de ceux qui souffrent. Cette logique chrétienne n'est pas en déphasage avec la logique musulmane.

2. LA LOGIQUE MUSULMANE

Il faut admettre que la charité n'est pas l'héritage exclusif des chrétiens. Les fidèles musulmans ont également choisi ce credo pour vivre dans la société. La place du coran et les exigences de Allah sont essentielles ici. Selon Afissou Bakary, « La charia signifie étymologiquement « la voie à suivre », stricto sensu, elle est l`ensemble des règles de l`Islam qui signifie étymologiquement salam (paix) ou istislam (soumission - obéissance) à un Dieu unique, Allah ¹⁸³». Dans la charia, on trouve des règles impératives et précises qui indiquent le comportement et l'attitude à suivre par les musulmans. Bakary résume la charia à cinq grands enseignements à savoir : « la Chaâda, profession de la foi, la Salat, communément appelée prière et qui est obligatoire, cinq fois par jour, la Zakât ou la dîme qui est la règle qui veut que tout musulman reverse une partie de son argent pour les personnes défavorisées, le jeûne du

183 A. Bakary, La mise en oeuvre du droit international humanitaire par les Etats musulmans: contribution à l'étude de la compatibilité entre DIH et droit musulman. Droit, thèse de doctorat, université de Nice Sophia Antipolis, 2014, p.22.

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mois de Ramadan, le Hajj ou pèlerinage à la Mecque »¹⁸⁴. Sinon nous prenons le cas du Zakât , on perçoit clairement qu'une pratique en faveur de ceux qui souffrent est prévue. Suivre les exigences de Allah, c'est apporter le secours aux personnes défavorisées de la société sans discrimination.

Les formules utilisées par les écritures sacrées interpellent les fidèles. « Ô croyants ! Faites l`aumône des meilleures choses que vous avez acquises, des fruits que nous avons fait sortir pour vous de terre... » et « Vous n`atteignez à la vertu parfaite que lorsque vous aurez fait l`aumône de ce que vous chérissez le plus et tout ce que vous aurez donné, Dieu le saura »¹⁸⁵. Que faut-il retenir de la place de l'islam dans la pratique sociale de l'humanitaire ? Il faut dire que cela est prévu et prend la forme d'une exigence. L'islam essaie d'atténuer les souffrances quotidiennes par l'engagement personnel de ses fidèles et par l'engagement communautaire. Il y a la logique du don gratuit pour les couches vulnérables de la société. On retient aussi que : la charia est «un système de devoirs comprenant des obligations rituelles, morales et légales, mises sur le même plan, toutes soumises à l`autorité du même impératif religieux » 186 .Toute cette doctrine tient compte des motivations matérielles de l'action humanitaire dans la société.

PARAGRAPHE II : MOTIVATIONS MATERIELLES ET SOCIALES

A l'observation des sociétés contemporaines, de plus près et plus précisément africaines, il faut dire que la misère plane, que des couches défavorisées et la situation devient alarmante. Tout cela appelle à l'agir. En essayant de résoudre ces situations difficiles, c'est l'humanité qui est sauvée. Un homme aidé et assisté et l'humanité en lui se trouve conservée. Il est important de présenter à la fois les fondements d'ordre matériel et d'ordre social.

A. AU PLAN MATERIEL

Le principe dans toute société est de voir chacun prendre soin de lui, de sa famille et de ses proches en fonction de son revenu ou d'autres investissements parallèles. Ce principe est

185 Les deux formules sont tirées respectivement du Souarate II, verset 76, verset 296 et du Souarate III , verset 86.

186 J.-P. PAYRE, « Cours de Grands systèmes juridiques comparés », Faculté de Grenoble, Université Pierre Mendès-France, 2007 - 2008.

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malheureusement battu en brèche dans toutes les sociétés et plus grave encore en Afrique subsaharienne, traditionnelle, qualifiée par Hegel de « continent de l`enfance » où la précarité des populations appelle une commisération et une compassion.

1. LA PRECARITE

La paupérisation des peuples entraîne les souffrances et quand il existe des souffrances, s'imposent des gestes humanitaires. Au début de cette étude, la pyramide des besoins de Maslow a été évoquée. L'auteur indique un ensemble de besoins essentiels à la vie de tout individu. Il s'agit les besoins physiologiques, les besoins de sécurité, les besoins de rapports sociaux et d'amour, des besoins d'estime de soi et des autres, le besoin de savoir et de comprendre. L'absence d'un de ces besoins n'entraîne pas directement la précarité et donc le besoin humanitaire. Il semble que cette précarité peut se justifier par l'incapacité à résoudre les besoins physiologiques qu'il résume à la nutrition, à l'accès à l'éducation, l'accès aux soins de santé et l'accès au logement et les besoins de rapports sociaux et d'amour notamment le cas des orphelins ou des enfants abandonnés, des personnes du troisième âge isolées ou de malades atteints d'une cécité ou d'une maladie incurable rejetée.

On peut illustrer la précarité en question dans le contexte africain sur deux volets : celui de l'alimentation au Burkina Faso et celui de l'éducation au Cameroun. L'objectif de cette illustration consiste à dire que les situations précaires imposent l'action humanitaire dans notre société. Au Burkina-Faso, la nutrition est un besoin qui trouble les populations. « La situation de la malnutrition aiguë au Burkina Faso reste encore très préoccupante, même, en dehors des périodes de crises humanitaires. Selon les résultats provisoires de la SMART 2014, le nombre d`enfants de moins de 5 ans affectés par la malnutrition aiguë est resté quasiment le même entre 2013 et 2014 malgré les actions entreprises par le Gouvernement et ses partenaires. En effet, la prévalence de la malnutrition aiguë globale en 2014 est de 8,6% dont 1,7% de forme sévère contre 8,2% et 1,7% en 2013. Au regard de ces chiffres, le Gouvernement du Burkina Faso en partenariat avec le cluster nutrition estime que le nombre d`enfants malnutris aiguë sévère en 2015 est de 149 000 contre 144 000 en 2014. S`agissant du nombre d`enfants malnutris aiguës modérés il est estimé à 350 000. »¹⁸⁷ Pour le cas du Cameroun, envoyer un enfant à l'école devient une charge difficile voire impossible. Les parents sont parfois incapables de régler les frais d'écolage ou de fournir à leurs enfants le

187 Aperçu des besoins humanitaires 2015 Burkina-Faso, décembre 2014, p.1.

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matériel scolaire. Toutes ces situations montrent la précarité des populations et dans ces cas, des initiatives humanitaires méritent être prises. C'est une forme d'épreuve de compassion.

2. LA COMPASSION

L'action humanitaire quotidienne est « associée à la pitié, ou plutôt à la compassion, qui traduit également les rapports d`identification mutuels que l`on retrouve au fondement de la solidarité entre les êtres humains, solidarité élémentaire sans laquelle il n`est pas de société organisée »¹⁸⁸. L'une des plus grandes valeurs humaines qui suscite l'action humanitaire hors du conflit est la compassion. Cette forme de dépassement de soi, cette empathie que l'homme éprouve pour l'homme, qui a besoin que l'on prenne soin de lui. « En nous identifiant à d`autres personnes, nous partageons pour ainsi dire l`aide ou la satisfaction que nous leur avons offerte, nous regagnons d`un côté ce que nous avons sacrifié de l`autre. Nous réparons un élément fondamental de l`amour et des relations humaines »¹⁸⁹. Klein a voulu montrer que l'idée de compassion implique un engagement vis-à-vis de l'autre. L'humanitaire en permanence n'est pas un concours de circonstance mais tout part du désir d'apporter à l'autre.

La compassion n'est pas à confondre avec de la pitié. Selon Brauman , le plus important dans l'humanitaire, ce n'est pas l'expression de la pitié mais la compassion. « Compassion et pitié doivent être, dans cette perspective, fondamentalement distinguées. La compassion s`exprime au singulier envers des êtres souffrants, elle "ne parle que dans la mesure où il lui faut répondre directement aux sons et gestes expressifs par lesquels la souffrance se fait visible et audible au monde" et c`est pourquoi elle n`est pas "loquace". L`émotion qui en est au principe n`a que peu de place pour se déployer, et ne se fait pas entendre. La pitié, au contraire, sort de la sphère privée, généralise et se revendique publiquement "en tant qu`émotion, que sentiment" à l`aune duquel doivent être mesurés les actes. C`est dans ce mouvement d`exposition du sentiment à l`état brut que la sensibilité se fait sensiblerie, que l`émotion devient sentimentalisme »¹⁹⁰ . La compassion est une base essentielle pour toute initiative humanitaire. C'est elle qui ouvre le coeur du volontaire humanitaire, c'est elle qui

189 M.Klein et J.Rivière, l`amour et la haine, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1992, p.88.

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fait constater la souffrance, c'est une énergie qui éveille et réveille les volontaires pour une oeuvre humanitaire afin de mettre fin à la souffrance de l'homme. La compassion est l'appétit qui aiguise l'action humanitaire. Cette compassion n'est pas la pitié, parce la pitié peut être un sentiment passager sans effet concret. Pourtant la compassion est une valeur plus forte qui conduit à l'altruisme. L'humanitaire est une affaire de compassion. La compassion permet de constater les souffrances des autres.

B. AU PLAN SOCIAL

Souvent, on entend parler dans les sociétés africaines, de l'égalité entre les citoyens, cela est une réalité difficile. Aucune société n'est homogène même si ont été prévus les mécanismes d'équilibre, la société est un tout composite. L'égalité voulue par la société n'est qu'une égalité de droit et non une égalité de fait. A partir de là, on peut comprendre que la situation des sociétés donne à voir les citoyens vulnérables et les souffrances sociales.

1. LES CITOYENS VULNERABLES

Depuis l'époque de Karl Marx, on constate dans nos sociétés, la présence des opprimés opposés à leurs oppresseurs. Mais cette logique de Marx n'entre pas dans le sens de l'analyse. Il s'agit de démontrer que, dans les sociétés, il existe un groupe d'individus qui sont ou se sentent exclus à cause de leurs situations sociales, leurs handicaps ou des avantages qui leur sont refusés. Tous ces facteurs peuvent motiver le développement de l'action humanitaire au quotidien. La mise à l'écart volontaire ou non d'une catégorie d'individus peut être un facteur de détermination de leur état. L'état de santé d'un individu ou le cas d'un enfant éconduit peut être un symbole de fragilité. Les citoyens vulnérables sont ici, ceux qui sont fragiles et fragilisés et qui demandent une prise en charge gratuite et constante. L'humanitaire est un remède pour les faibles et les personnes rendues fragiles. « Pour comprendre le sens de l`humanitaire aujourd`hui, il faut l`inscrire dans la transformation que la modernité politique a introduite dans la relation aux pauvres et plus généralement aux diverses populations marginales » 191 . Prenons le cas de l'enfant, l'humanitaire doit toujours être ménagée en tout temps pour lui. Les enfants issus des

191 D. schnapper, Quel est le sens de l'humanitaire aujourd'hui ?, Jeudi 21 mai 2015, 18 h, Institut culturel italien , conférence Paris.

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familles les moins nanties peuvent assez souvent bénéficier d'assistance et d'aide humanitaires.

Depuis plusieurs années en Afrique, se développe l'action humanitaire pour une catégorie d'individus. Pendant plusieurs décennies, les handicapés visuels, mentaux et moteurs par exemple n'étaient pas admis à l'école. Selon une étude faite par le fonds des Nations-Unies pour l'enfance dans le contexte africain, « l`accès à l`éducation demeure un problème pour les couches défavorisées dans toutes les sociétés »¹⁹². Les exclus selon cette étude indiquent qu'il s'agit des filles, des jeunes ruraux et les handicapés. Au sujet des handicapés, l'étude prend le cas de la Tanzanie où les enfants handicapés sont difficilement admis à l'école. Dans le domaine de la santé, on peut évoquer le cas des actions humanitaires d'ONUSIDA et d'autres organismes en faveur des enfants orphelins du SIDA. ( Il s'agit des enfants dont la mère ou les deux parents sont morts du SIDA) . En Ouganda et au Malawi, une politique d'enseignement gratuit a été élaborée pour accompagner ses enfants. Il faut leur accorder le maximum d'aide, ils ont un destin malheureux. Dans une publication, ONUSIDA indique : « Les enfants ne devraient pas être obligés de voir leurs parents ou des êtres chers souffrir et mourir. On estime que, dans le monde, 15 millions d`enfants ont été rendus orphelins par le VIH/SIDA, dont plus de 12 millions en Afrique subsaharienne. Cette région abrite 24 des 25 pays connaissant les taux les plus élevés de prévalence du VIH .Moins de 10 % de ces enfants reçoivent actuellement un soutien public ou bénéficient de services d`appui. »¹⁹³ Ils sont exclus et se sentent à l'écart. En eux, s'installe un état de souffrance sans faille.

2. LES SOUFFRANCES SOCIALES

« Encore une fois de plus, je trouve tout à fait normal, tout à fait bien de soulager des misères, de sauver des malheureux. Quand des hommes de qualité consacrent leur vie à cette activité, je les admire. » . Cette réflexion de Raymond Aron met en valeur la base sociale de l'action humanitaire, les souffrances sociales. Une société constituée des hommes misérables ou des familles malheureuses est un autel où l'action humanitaire doit se célébrer. La vie humaine est sacrée et au nom de cette sacralité, la souffrance ne peut amener à la réjouissance. L'humanitaire hors des conflits est la main qui vient consoler et réduire les

193 ONUSIDA et UNICEF, Appel à l'action, les enfants la face cachée du SIDA, UNICEF, Octobre 2005, p.6.

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souffrances des hommes. Les hommes poussent des cris de peine et des gémissements de douleurs, voilà comment se manifestent cette souffrance que l'on voit, ressent, analyse et traite.

Les souffrances sociales se trouvent dans le vocable bien connu les cas sociaux. Selon Irène Régnier, on attend par cas social, celui : « qui a nécessairement besoin d'aide et d'assistance et qu'il faut prendre en charge pour la défense de ses intérêts. »¹⁹⁴. Il est dans une situation grave, il n'a pas les moyens pour apporter une réponse à cette état critique. Au Cameroun, les médias ont l'habitude de diffuser des informations sur les cas sociaux. Les images sont frustrantes et violentes, mais le téléspectateur peut observer et constater la souffrance sociale à travers un cas qui nécessite une aide immédiate. Les cas sociaux renvoient par conséquent à la situation des individus qui émeuvent de par leur souffrance, de par leur douleur et surtout du fait de la complexité de leur situation. On les appelle encore les nécessiteux, les démunis, les misérables ... En 2005 au Cameroun, sur les écrans de la Cameroon Radio and Television a été retransmise l'image d'une jeune fille âgée de seize ans, mère d'un bébé atteint d'hydrocéphalie si avancé que l'enfant risquait de perdre la vue. Plusieurs parties du corps avaient alors subi des modifications. C'est le cas de la tête qui avait grossi, ses pieds s'étaient enflés et il ne parvenait plus à marcher. La jeune fille était donc face à une situation qui recommandait une intervention chirurgicale pour sauver la vie de son fils. Mais le coût de l'opération est apparu comme un obstacle. Il fallait faire appel au soutien de la population. Ainsi, lorsqu'un cas social n'est pas fantaisiste, l'action humanitaire est interpellée. Ce cas est un facteur de motivation. Pour d'avantage comprendre ce type d'humanitaire tourné vers la société, il est utile de procéder dans la suite de cette étude à son identification et à sa structuration.

SECTION II : IDENTIFICATION ET TENTATIVE DE STRUCTURATION DE L'ACTION HUMANITAIRE EN PERMANENCE

Toute activité humanitaire et plus particulièrement l'humanitaire sociale est un terrain fertile aux valeurs. Ce sont les valeurs qui forgent et fondent l'humanitaire. « Les valeurs sont comme des poteaux indicateurs; elles montrent une certaine direction, celle d'un monde

194 I. Régnier, Approche du devenir-social des jeunes issus de l`immigration algérienne, 1986, p. 7.

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idéal, sans souffrance ni injustice. »¹⁹⁵. On peut procéder à une identification de l'action humanitaire en permanence à partir de certaines valeurs et sur la base des valeurs retenues, on essaiera de déterminer les axes d'intervention de cette humanitaire.

PARAGRAPHE I : IDENTIFICATION AXIOLOGIQUE

L'axiologie est considérée comme la théorie des valeurs. La catégorisation des valeurs n'est pas un exercice aisé. On pourra en fonction du temps parler des valeurs traditionnelles et des valeurs modernes. En fonction des domaines parler des valeurs morales, chrétiennes, artistiques, scientifiques et religieuses. Dans l'analyse, seront développées deux valeurs la générosité et la solidarité, ensuite le sentiment et la philanthropie permettront de procéder à une catégorisation théorique de cette forme d'humanitaire.

A. LA LOGIQUE DE LA GENEROSITE ET DE LA SOLIDARITE

« En Belgique, le pays où j`ai grandi, il est probable qu`un enfant qui rechigne à terminer son assiette lors du dîner familial ou à la cantine scolaire s`entende dire un jour ou l`autre, sous le poids d`un regard réprobateur : « Pense à tous ces petits Africains qui meurent de faim ! ». Manquer d`appétit peut prendre une dimension dramatique si l`on met ce fait en relation avec les famines que connaît le continent africain. Je me souviens du chemin que faisait cette remarque dans mon esprit d`enfant : si je jette le reste de mon repas à la poubelle, je suis responsable de la mort d`un enfant africain. »¹⁹⁶ . Cette expérience est un appel à la générosité et à la solidarité par ce que l'humanité souffrante doit réveiller tout sans discrimination. Deux valeurs sont fondamentales à la prise en compte de l'autre et permettent de déterminer l'humanitaire de tous les jours.

1. LA GENEROSITE SOCIALE

Il s'agit de comprendre le sens de la générosité sociale et de faire un lien direct avec le sens de l'humanitaire que nous défendons. La générosité est bien identifiée dans cette courte formule poétique d'Arthur Rimbaud : « Je est un autre ». Vers tiré d'un Extrait d'une lettre adressée à Paul Demey, appelée la « Lettre du Voyant », datée du 15 mai 1871. Etre

196 N. Nicaise, « La construction sociale de la générosité et la politique de développement européenne », Revue Tiers Monde 2009/4 (n° 200), p. 767.

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généreux, c'est se mettre au service de l'autre gratuitement et volontairement. La générosité est une vertu qui permet à l'homme de partir de ce que Réné Descartes appelle passions de l`âme¹⁹⁷ pour la transmettre à l'autre qui a besoin de moi. La générosité est pour lui le sentiment de disposer de sa volonté de façon libre. « Je crois dit-il que la vraie générosité, qui fait qu`un homme s`estime au plus haut point qu`il se peut légitimement estimer, consiste seulement partie en ce sens qu`il connaît qu`il n`y a rien qui véritablement lui appartienne que cette libre disposition de ses volontés »¹⁹⁸. En donnant, on offre à l'autre mais plus profondément, on offre à l'humanité. Plus grande que la sympathie et plus concrète que l'amour, la générosité est une valeur universelle qui favorise le règne du souverain bien. Voir l'autre retrouver le sourire suite à son action comble le généreux. « Le généreux apparaît comme un être en expansion, un ruisseau qui coule et qui comble l`autre, sans retenue autre que celle du lit dans lequel il est et du barrage que l`autre établirait pour retenir cette expansion. ».¹⁹⁹

Serait-ce abusif d'assimiler ou d'identifier l'action humanitaire à la simple générosité ? L'humanitaire n'est-il pas un hymne à la générosité ? Dit autrement, si l'humanitaire ne s'arrête pas à l'action généreuse, l'action généreuse est au coeur de l'action humanitaire. Descartes fait d'ailleurs le lien entre la générosité et la volonté. La volonté est une valeur fondamentale de l'humanitaire. Un volontaire d'une association humanitaire est un être généreux du fait de son engagement humanitaire. Même ceux des auteurs qui finissent par critiquer la place de la générosité dans la vie de l'homme peuvent à leur tour recevoir les critiques. Sartre est l'un des auteurs qui s'oppose à l'action généreuse. « La générosité est avant tout fonction destructrice. La rage de donner qui prend à certains moments certaines gens (...) n'est pas autre chose qu'une rage de posséder (....). Donner, c'est asservir l'autre (...) la générosité nous guide vers le néant »²⁰⁰.

Cette position est légitime mais celui qui aide ou assiste son frère dans le besoin ne devrait parvenir à cette fin s'il s'agit d'un acte généreux. La générosité est gratuite et aveugle. Elle n'est pas une manoeuvre utilitariste. « Qui a fait un don pour recevoir à son tour n`a pas fait

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un don », écrivait Sénèque, « La générosité est la respiration qui permet l`épanouissement. Elle crée un risque considérable, comme dans tout échange. Il faut en être conscient et gérer ce risque. »²⁰¹. Victor Hugo, dans son oeuvre, les misérables, montre comment la générosité peut garder toute sa valeur morale quand on sait que l'on sert l'humanité. Un de ses personnages, Jean Valjean sortit de prison sera généreusement hébergé par l'évêque Myriel. Le prisonnier soustrait son argenterie et sera arrêté par la gendarmerie. Elle le conduira à l'évêque. L'évêque demandera qu'il soit relâché et lui remettra le reste l'argenterie qu'il n'avait pas pu emporter lors de son forfait. Malgré son hébétude, l'évêque gardera sa position en donnant une leçon de morale à Valjean. «Jean Valjean, mon frère, vous n`appartenez plus au mal, mais au bien. C`est votre âme que je vous achète ; je la retire aux pensées noires et à l`esprit de perdition ». C'est la personne humaine qui est sauvée et non un individu bon ou mauvais. Ceux qui reçoivent de l'aide dans les rues de l'Afrique sont assez agressifs mais faut-il faire un chemin retour ? La générosité est un signe fort de notre solidarité sociale.

2. LA SOLIDARITE SOCIALE

Dans le même souci d'identifier l'action humanitaire à cette autre valeur, on procédera à une signification de la solidarité en faisant le lien entre la solidarité universelle et l'action humanitaire quotidienne. Pour Marie-Claude Blais : « nous sommes non seulement unis, mais enchainés les uns aux autres » 202 . Elle renvoie à l'idée d'ensemble, à l'idée d'une communion, un vivre-ensemble, une cohésion, une relation mutuelle, une conjugaison d'efforts... L'adjectif solide est encore un grand révélateur de cette valeur, il y a une force qui crée une symbiose et une osmose entre les parties du tout. Etre solidaire, c'est préférer l'intérêt du tout dont on est parti. «La solidarité est à prendre dans son sens factuel de cohésion, sans dimension morale. La solidarité est une condition qui s`applique en principe à chacun des éléments d`un tout et non pas seulement à quelques-uns : il ne peut y avoir de solidarité que s`il y a dépendance mutuelle. Sans cette dimension, l`aide apportée ne relève plus de la solidarité mais de l`altruisme » 203.

202 M-C, Blais, La solidarité, histoire d`une idée, Gallimard, 2007, Paris, p.55.

203 L. Viévard , Les fondements théoriques de la solidarité et leurs mécanismes contemporains, Grand Lyon, mars 2012, p.8.

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On peut considérer plusieurs types de solidarités, on peut citer la solidarité familiale, la solidarité nationale et la solidarité universelle. C'est la troisième solidarité qui concerne l'humanitaire. Venir en aide dans le contexte éthiopien ou congolais ne saurait être de l'action humanitaire, c'est un geste naturel. Mais la solidarité universelle plus vaste est une valeur qui emprunte le même sentier que l'action humanitaire. C'est Bergson qui considérait que l'homme de la société ouverte avait la responsabilité de l'harmonie et du bien-être de ceux qui en font partie. L'action humanitaire dans nos sociétés s'appelle encore solidarité universelle. « La souffrance éprouvée devant la souffrance d`autrui suffit à expliquer le désir d`assistance. Les ressorts de la solidarité sont alors à chercher dans la Nature profonde de l`homme. L`idée de l`époque -- que l`on retrouve à d`autres moments mais qui se trouve alors particulière exaltée -- renvoie à une forme de conscience collective d`un destin commun, à un sentiment de compassion pour un autre dont on reconnait l`identité avec soi- même et qui fait de la solidarité une inclination naturelle de l`homme »²⁰⁴ . C'est le souci de solidarité qui amène les individus à créer des associations pour partager l'humanité avec les autres. La solidarité humanitaire devient un vent favorable aux soins et au pain des faibles, des malheureux, des nécessiteux. L'humanitaire en permanence est « un geste significatif de fraternité et d`espoir »²⁰⁵. La solidarité est un élément fondateur de la nature de ce type d'humanitaire.

B. LA NATURE DE L'HUMANITAIRE EN PERMANENCE

L'identification de cette forme d'humanitaire est encore plus directe à travers une tentative de détermination de sa nature. Il est vrai que certains éléments liés aux motivations et aux valeurs entrent en jeu à ce stade de l'analyse. Pour ce faire deux éléments peuvent résumer ce type d'humanitaire notamment la philanthropie et le sentiment.

1. LA NATURE PHILANTHROPIQUE

Généralement, l'action humanitaire est guidée par trois principes fondamentaux, la libre évaluation des besoins et de leur priorisation, le libre accès aux plus vulnérables et le contrôle de l'arrivée de l'assistance aux bénéficiaires²⁰⁶. C'est l'évaluation des besoins qui est

204 L. Viévard , Les fondements théoriques de la solidarité et leurs mécanismes contemporains, p.22.

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intéressante ici. L'action humanitaire est légitime quand les besoins des hommes sont vitaux et énormes vue leur précarité. Et sa nature philanthropique s'impose parce les dons viendront soulager les nécessiteux. « La philanthropie consiste à concilier l`émotionnel et le rationnel. C`est un voyage qu`il convient d`aborder avec passion et humilité »²⁰⁷ pour venir en aide à l'autre. Ce qu'il faut considérer comme humanitaire en permanence reflète l'esprit de ce qui a toujours été considéré comme la philanthropie. D'ailleurs, la philanthropie est plus une pratique historique qu'actuelle. Mais l'état d'esprit est identique à l'humanitaire sociale. Cependant, elle n'est plus la chasse gardée du colon ou de l'Occident. « N`aimant pas voir les autres souffrir, le philanthrope recherche le bien-être de ses semblables et de l`humanité en général, par des moyens divers, le don de sa fortune étant le plus commun. Pour être qualifié ainsi, le philanthrope se doit d`être altruiste, de manière désintéressée. » ²⁰⁸. Dire que cette humanitaire a une nature philanthropique, c'est admettre qu'elle est l'art de donner à ceux qui souffrent, ceux qui sont dans le besoin à tout moment quand cela est possible.

Le dire amène à parler de l'acte philanthropique. C'est un acte qui prend plusieurs formes. Il n'est pas seulement financier ou matériel. « L`acte philanthropique a évolué. Bien souvent, il ne s`agit plus simplement de signer un chèque. De nombreux donateurs désirent s`engager plutôt dans leur vie et soutenir des projets avec des objectifs à la fois clairs et mesurables, parfois en s`associant avec leur famille ou d`autres mécènes. »²⁰⁹. Les finances ne suffisent pas pour faire l'humanitaire dans les sociétés. Il faut aller au-delà. L'humanitaire de type social risque de se confondre à un capitalisme pur. Cette tendance est retenue par quelques organismes. Certains contribuent par le don qui n'est pas financier comme l'appui scolaire et psychologique des enfants qui ont soit un retard scolaire ou un manque de suivi scolaire. La mission de l'ONG Femmes en Mission Humanitaire en est une illustration. « La mission consiste en « aide à la vie quotidienne » pour 24 enfants accueillis jour et nuit par le partenaire. Ils sont soit orphelins soit ils vivent dans une très grande précarité qui ne leur permet pas un développement correct. Ils sont scolarisés au village et rentrent après 15 heures. La mission consiste à les aider à faire leurs devoirs, puis à leur proposer des

208 L . Mellier, Philanthropie culturelle et économie du don aux Etats-Unis Un modèle exportable ?, Formation des cadres culturels territoriaux, master, «Direction de Projets Culturels», 2008-2009, septembre 2009, p.11.

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activités artistiques ou ludiques. » Cette nature en cache une autre notamment la nature sentimentale.

2. LA NATURE SENTIMENTALE

L`humanitaire du jour est un appel du coeur, une matérialisation concrète de la sensibilité face aux souffrances. Ici se retrouve encore la valeur compassion analysée plus haut. L'humanitaire dans une situation normale est une question de sentiments. On agit par sentiment. Le sentiment pousse à agir pour les démunis ou les pauvres. Tout part d'un « sentiment naturel qui, modérant en chaque individu l`activité de l`amour de soi-même, concourt à la conservation mutuelle de toute espèce. C`est elle qui nous porte sans réflexion au secours de ceux que nous voyons souffrir »²¹⁰. Les activités sociales obéissent à la logique sentimentale. Plusieurs êtres souffrent de blessures personnelles et de malheurs, il faut les secourir. Adam Smith parlait de « l`émotion que l`on ressent pour la misère des autres ».

La nature sentimentale signifie que l'action humanitaire est une affaire d'émotion. « Sans aucun doute, nous dit Brauman, l`action humanitaire a partie liée avec la compassion. Ce n`est ni l`amour de l`humanité, ni une pulsion sacrificielle qui en est le moteur, mais un « sentiment de vulnérabilité partagé » (Rousseau) avec d`autres hommes, d`autres sujets conscients. » ²¹¹. Cette émotion, on peut la ressentir à tout moment. D'où le caractère permanent de cette humanitaire. Mais loin de croire qu'elle n'a pas de limiter il s'agit de montrer que les souffrances sociales sont énormes et ne sont pas quantifiables. Mais y apporter une réponse en tout temps et en tout lieu reste chimérique. Il reste que cette humanitaire est nourrie par les émotions. Pour mieux comprendre cette dimension sentimentale de l'action humanitaire, le Professeur Didier Fassin met en lumière la notion de Raison humanitaire²¹² .Titre qui rend le lecteur interrogatif. L'humanitaire a-t-elle une raison ? Il faut y voir l'ensemble des sentiments moraux mêlant compassion et solidarité qui sont heurtés et interpellés face à l'authenticité de la souffrance. Elle conduit les individus et les associations aux actions pour mettre fin aux traumatismes et aux blessures psychiques des populations. La raison humanitaire est incarnée par ce que l'auteur appelle le

211 R.Brauman , « Emotion et action humanitaire », Études 2009/1, Tome 410, p.9.

212 D. Fassin, La raison humanitaire. Une histoire morale du temps présent, Paris, Seuil / Gallimard, 2010.

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gouvernement humanitaire, c'est-à-dire « la réponse que nos sociétés ont apportée à l'intolérable de l'état du monde contemporain » ou encore le « déploiement des sentiments moraux dans les politiques contemporaines »²¹³. Cet auteur montre bien le fait que le sentiment soit au coeur de l'humanitaire en général mais tout particulièrement au coeur de l'humanitaire de permanence. Quand on entend parler de la fondation coeur d`Afrique, cela reflète cette nature sentimentale de l'action humanitaire. La structuration de l'action humanitaire garde l'esprit de cette nature philanthropique et sentimentale.

PARAGRAPHE II : LA TENTATIVE DE STRUCTURATION DE

L'HUMANITAIRE EN PERMANENCE

Cette étape constitue une interprétation des pratiques et des politiques sociales développées dans les sociétés africaines contemporaines. Elles entrent dans le registre d'une action humanitaire permanente si tant il est vrai que leur objectif est d'alléger les souffrances des populations et de favoriser leur épanouissement. On ne peut avoir la prétention de répertorier toutes les politiques et les pratiques en question. Le contexte de l'Afrique subsaharienne des politiques et des pratiques sociales en faveur du bien-être et de l'épanouissement sera le cadre exploratoire de l'analyse. Dans ce sillage, seront analysés les activités sociales et quelques programmes sociaux souvent mis en oeuvre dans les sociétés.

A. LES ACTIVITES SOCIALES

Déterminer les activités sociales qui contribuent à la compréhension de l'action humanitaire en permanence revient à mettre un accent sur les activités caritatives et des activités d'inclusion sociale.

1. LES ACTIVITES CARITATIVES

Le don est un instrument de l'action sociale. Imaginer l'action humanitaire sans le don est improbable. Il est une équation entre d'un côté, les candidats à sa réception et de l'autre, les candidats à son offre. Autant on trouve les nécessiteux autant on trouve des pourvoyeurs. Les activités caritatives dans nos sociétés sont monnaie courante. Il n'est inutile de procéder à une théorisation du don sur la base des travaux de deux auteurs qui permettent de mieux comprendre les activités caritatives.

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Antoine Vaccaro fait une étude sur la collecte des dons.²¹⁴ Pour ce faire, il procède à une trilogie des dons : prospection, fidélisation et legs. L'auteur résume ces trois techniques en ces termes : « Donner une première fois, donner chaque année, léguer son patrimoine »²¹⁵. Selon cet auteur, les organismes sociaux ont besoin de ces profils de donateurs pour mieux organiser les activités caritatives dans la société. Stéphanie Dupont²¹⁶ propose une autre catégorisation des donateurs selon les âges et les catégories professionnelles : les éprouvés, les militants, les épargnés et les généreux. Elle apporte une explication respective pour chacun des donateurs. Pour les éprouvés, il s'agit « des donateurs jeunes, ils ont entre 30 et 40 ans de catégorie socio-professionnelle modeste » qui sont reconnaissants pour la générosité dont ils ont bénéficié mais demeurent assez proches de la pauvreté, d'où la modestie de leurs dons. Les militants, personnes adultes caractérisés par des engagements tantôt écologique, politique voire spirituel ; « leurs dons déjà sont réfléchis, programmés, souvent réguliers »²¹⁷. Les épargnés âgés de 40 à 60 ans sont qualifiés par l'auteur de baby-boomers. Leur bonne situation financière les amène à prendre en charge les personnes défavorisées de la société. « Leur don est motivé par le souci de préserver un équilibre perçu comme instable entre les pauvres et les riches, le Nord et le Sud... »²¹⁸. Enfin, les généreux qui représentent la catégorie socio-professionnelle supérieure et constitués de retraités. Leur don est « rationnel, planifié, il s`inscrit dans une praxis choisie ou héritée, la tradition familiale étant un facteur déterminant dans le comportement de ce type de donateur »²¹⁹. Cette catégorisation est proposée relativement à l'action sociale en général et en Europe en particulier. Mais dans certaines sociétés africaines, il est possible de déterminer ces types de donateurs et d'en catégoriser d'autres.

Stéphanie Dupont ira plus loin dans son analyse en proposant le contenu des différentes activités caritatives de la société. Elle propose une typologie formée de six formes de dons : le don spirituel, le don rationnel, le don magique, le don militant, le don plaisir et le don

214 A .Vaccaro, les techniques modernes de collecte des dons, in N. Dufourcq (dir.) , 2002.

216 St. Dupont, les enjeux d`internet dans la communication des associations, 2002, p.14.

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émotif. Acte d'humanité et de compassion, l'auteur nous enseigne que le don spirituel « c'est une démarche d'ouverture vers l'autre, un désir de le comprendre et de l'aider »²²⁰. C'est l'empreinte des généreux. Marqué par l'empreinte de la raison, le don rationnel, signifie que le donateur a besoin de comprendre pour contribuer à une situation de besoin. Il est le don privilégié des épargnés. Le don magique est motivé par l'effroi et à la panique par rapport à la situation. On n'est pas à l'abri de la menace qui attaque la population. C'est le don des éprouvés. Le don militant est celui qui permet au donateur d'avoir une reconnaissance sociale à travers ses oeuvres caritatives. Plusieurs types de donateurs peuvent manifester leur solidarité sur la base de ce type de don. Le don plaisir est marqué par des motivations d'ordre affectif et des convictions personnelles. Ici se trouve encore exprimée la charité des généreux. Le dernier don, le don émotionnel est celui qui est nourri par des sensations fortes suite à une situation pathétique qui amène le donateur, l'éprouvé notamment à agir. Ces dons peuvent avoir plusieurs natures : pécuniaire, infrastructurelle, matérielle et d'autres acquisitions et privilèges...

Le cas de l'action caritative des ONG au Mali peut permettre de mesurer les natures diverses de l'offre dont bénéficie les populations. « L`action caritative, très importante lors des périodes de grande sécheresse, se traduit par des distributions gratuites d=aide alimentaire, de médicaments ou de fournitures scolaires. A` ce type d`actions ponctuelles se substituent, de plus en plus, des projets de long terme. D`autres poursuivent l`aide caritative par des opérations de parrainage des individus du pays d`origine de I`ONG pour le financement de projets à l`échelle d`un village (cas du Forster Parents Plan International)»²²¹. Le Ghana a bénéficié en 1990, d'une activité caritative de la Fondation Hilton qui apportait sa contribution au projet World vision. Ce projet visait à approvisionner en eau de nombreuses régions du Ghana. L'expérience n'est pas restée fermer au Ghana mais s'est élargie au Mali et au Niger. « Le projet Word Vision/Hilton a permis de creuser jusqu`en 2002 plus de 1 100 puits alimentant plusieurs centaines de milliers de personnes. Au Sommet mondial pour le développement durable, qui a eu lieu la même année à Johannesburg, la fondation Hilton et l`organisation USAID ont annoncé le lancement d`un partenariat public/privé pour étendre le projet à de nouvelles régions du Ghana, du Mali et

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du Niger. »²²². L'action sociale ne se limite pas aux activités caritatives, on peut aussi considérer les activités d'inclusion sociale.

2. LES ACTIVITES D'INCLUSION SOCIALE

Rendus à cette étape, il convient de démontrer que l'action humanitaire dans la société africaine peut s'étendre aux politiques d'inclusion sociale. L'inclusion sociale signifie que dans la société, il existe une catégorie d'individus qui souffre pour plusieurs motifs qui seront évoqués. La notion d'inclusion sociale est une notion assez vaste. Elle peut être considérée « comme un processus de socialisation de tout individu valide ou handicapé. C'est le passage des individus, tout au long de la vie, dans les différentes institutions que sont la famille, l'école, l'entreprise, la maison de retraite » 223 . Elle peut connaitre deux déclinaisons à savoir l'inclusion intégrative et ségrégative. La première renvoie : « une dynamique d'ouverture qui permet à des personnes atteintes de déficiences de rencontrer les personnes valides dans les lieux d'éducation, de travail, de loisirs et d'habitat ordinaire. ». Et la seconde s'entend comme : « une dynamique qui cloisonne, qui enferme es personnes dans des institutions et des filières spécialisées et qui a pour fonction à la fois de porter attention à la personne handicapée mais aussi de la mettre à l'écart. ».

L'approche inclusive veut apporter de l'aide à ceux qui ont des souffrances fonctionnelles, physiques, sociales et même psychologiques. Il peut s'agir des handicapés, des enfants abandonnés ou séparés de leur famille, des enfants de parents atteints du VIH sida... Il faut dire que pour le cas des handicaps, l'exclusion ne se fait pas naturellement, c'est à mesure que l'individu évolue dans la société qu'il ressent cette fragilité. Selon Marion Héraud : « les personnes handicapées ne sont pas exclues au sens propre du terme, ce qui signifie que le handicap n`est pas traditionnellement une cause d`exclusion. Néanmoins, les personnes handicapées n`ont pas une réelle place dans la société, du fait du caractère « improductif » de ces personnes, conséquence de leurs déficiences. Ces comportements de rejet ne sont pas dus à des croyances, mais bien à des circonstances sociales et économiques défavorables.

222 OCDE, « Fondations philanthropiques et coopération pour le développement », Tiré-à-part des dossiers du CAD 2003, Volume 4, n° 3 , p.47.

223 J-M Bardeau-Garneret, « Les dynamiques d'inclusion sociale et d'intégration psycho-sociale », extraits d'un article paru dans le dossier n°14 « Accueillir la différence » des « Cahiers de l'animation » revue des CEMEA/ F. Chaumon (Psychiatre et psychanalyste) dans la revue « Communautés éducatives » septembre 2002 n°120.

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Par conséquent, elles ne sont pas exclues de la société, mais bien marginalisées et discriminées. »²²⁴.

Selon Harry, présidente de la Fondation FITIMA 225 : « Souvent les enfants qui souffrent de handicap moteur sont cachés dans les familles, souvent on dit : c`est de la sorcellerie, c`est de l`ordre du surnaturel donc il faut le cacher ; c`est la malédiction, comme un sort jeté ». Il est évident qu'au-delà des situations d'handicap, les enfants orphelins des parents atteints du VIH SIDA se sentent aussi exclus de la société. Selon une étude sur leur situation, on retient ce bilan : « Le nombre d`enfants rendus orphelins ou vulnérables par la maladie est l`une de ses conséquences les plus visibles et les plus désastreuses. Ils sont aujourd`hui environ 15 millions d`enfants de moins de 18 ans qui ont perdu l`un ou leurs deux parents à cause du Sida. Douze millions d`entre eux (75%) vivent en Afrique sub-saharienne » 226 . Les statistiques ont également été faites au Sénégal : « Au Sénégal vivent 400.000 enfants en situation de risque, dont 20 .000 enfants ayant perdu un ou les deux parents à cause du Sida. Ce chiffre atteindra 40.000 en 2010 »²²⁷.

L'une des activités d'inclusion sociale visible sur le continent, c'est l'éducation inclusive menée avec l'appui des organismes internationaux comme l'UNESCO, UNICEF, HANDICAP International... Selon l'UNESCO entre dans le registre de l'éducation inclusive « un système éducatif qui permet aux écoles d'être au service de tous les enfants, et en particulier de ceux qui ont des besoins spéciaux y compris les enfants en situation de handicap. Ces écoles valorisent les différences entre les enfants au lieu de les considérer comme des problèmes. Elles puisent dans les ressources disponibles dans leurs collectivités pour veiller à ce que les besoins des apprenants soient satisfaits de manière efficace »²²⁸. L'UNICEF ne s'éloigne pas de cette approche : « un système d'éducation où tous les élèves ayant des besoins éducatifs spéciaux reçoivent leur éducation à l'école du quartier, dans les classes ordinaires, avec des services de soutien et un enseignement fondé sur leurs forces et

224 M. Heraud, « Malédiction et handicap à qui la faute ? », Handicap International, 2005.

225 Cette abréviation signifie Fondation Internationale Thierno & Mariam qui a son siège au Burkina Faso.

226 N.Mbaye et Ch.Becker, Guide de prise en charge des orphelins et enfants rendus vulnérables par le VIH /Sida au Sénégal, Dakar, février 2006, p.11.

228 UNESCO, Guide de l'animateur, publication de l'UNESCO, Québec, 2003, p.35.

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leurs besoins »²²⁹. L'éducation inclusive est donc une solution pour la prise en charge des personnes handicapées. Ce mécanisme a fait l'objet des travaux scientifiques de Beata Nyirahabimana²³⁰ .

Elle s'appesantira sur le cas du Rwanda en matière d'éducation inclusive. L'auteur fait un rappel historique de l'éducation inclusive. Elle est née à la suite de la conférence mondiale de SALAMANCA. Selon elle, au Rwanda, le fait d'avoir un enfant atteint d'un handicap est une malédiction. Malgré le fait que, au départ, l'éducation scolaire des enfants handicapés n'était pas possible, par la suite seront instituées des écoles et centres spécialisés pour ce type d'enfant. C'est l'église catholique romaine qui fut la pionnière de ces initiatives sociales vers les années 1960. « Le premier centre a été construit à Gatagara dans la province du Sud. Depuis ce temps un bon nombre des écoles spécialisées ont été construites ; même si leur nombre est en encore insuffisant vis-à-vis de celui des enfants nécessitant de l'éducation spéciale ». Le Burkina-Faso s'inscrit également dans cette politique d'inclusion sociale. « Il existe au Burkina Faso quelques écoles spécialisées pour enfants sourds et malentendants, pour enfants non-voyants et pour enfants déficients intellectuels. Toutes ces écoles sont localisées dans les grands centres, à Ouagadougou, Bobo Dioulasso et Ouahigouya, ce qui réduit la possibilité pour un bon nombre d`enfants dont l`habitation est éloignée d`accéder à ces écoles. Ce qui caractérise le plus souvent ces structures, c`est l`accueil limité du fait des faibles moyens financiers et matériels dont elles disposent. » 231 . On peut considérer l'inclusion sociale comme une activité sociale appartenant à des programmes sociaux bien déterminés.

B. LES PROGRAMMES SOCIAUX HABITUELS

Selon Yves Alexandre Chouala : « Les pauvres font irruption sur la scène de l`histoire et transforment l`Afrique en «une marmite qui bout » »²³². En empruntant la formule « une

²²⁹UNICEF- Mali, Manuel de formation des enseignants des écoles intégratrices, Mali, octobre 2002, p.38.

230 B. Nyirahabimana, Contribution de l'éducation inclusive à l'intégration des personnes vivant avec handicap, mémoire online, Université libre de Kigali, 2011.

231 Handicap International, Scolariser les enfants handicapé au Burkina Faso : un exemple d`approche en éducation inclusive, Ds/ EXP/2Programme Burkina Faso / Niger Juin 2011, p.17.

232 A . Chouala, « Éthique et politique internationale africaine du XXIe siècle : les normes de civilité à l'épreuve du jeu réaliste des États », Politique et Sociétés, vol. 25, n°2-3, 2006, p. 183-217, URI: http://id.erudit.org/iderudit/015933ar, p.189.

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marmite qui bout »²³³ au Professeur Jean Marc Ela, l'auteur a voulu souligner les conditions de vie précaires dans laquelle se trouve l'Afrique subsaharienne. Face à cette précarité, il faut un ensemble de programmes sociaux qui permettent à cette Afrique souffrante d'aider ceux qui ont un niveau de vie extrêmement bas. Il existe désormais un ensemble de programmes sociaux qui facilitent quelques pans de la vie, c'est le cas de la santé et de l'éducation. Les programmes sociaux sont également l'oeuvre de nombreux acteurs qui tentent de mettre fin aux souffrances des hommes.

1. LES FACILITES SCOLAIRES ET SANITAIRES

Aussi étonnant que cela puisse paraître dans la zone subsaharienne de l'Afrique, il existe de nombreux enfants intelligents et volontaires mais qui ne peuvent s'offrir le luxe d'aller à l'école. La non scolarisation et même la sous-scolarisation ont plusieurs motivations. L'absence de frais d'écolages est la principale motivation de la non scolarisation et la sous-scolarisation. « Le retard de développement du secteur de l`éducation en Afrique subsaharienne est principalement dû à une allocation insuffisante des ressources financières. »²³⁴. Les politiques sociales vont donc s'accentuer permettant d'apporter de l'aide à ceux qui ne réunissent pas les conditions financières pour aller à l'école. En Afrique subsaharienne, une mesure avait été arrêtée selon les exigences des OMD à savoir la gratuité de l'école primaire et des manuels scolaires. Même si cela demeure un véritable serpent de mer, cette mesure sociale est fondamentale pour les couches les plus vulnérables de nos sociétés.

Au Cameroun, certains établissements prévoient des quotas de paiements pour les orphelins et les autres cas d'élèves en situation familiale difficile. Au Collège Catholique Père Monti, établissement privé confessionnel situé dans une banlieue de Yaoundé, Mfou, il existe un programme de soutien aux orphelins, aux handicapés et autres enfants démunis. Il s'agit sur les milliers d'élèves que comptent le collège d'identifier environ 500 d'entre eux qui se retrouvent dans les cas suscités. Le promoteur de cet établissement, religieux de nationalité italienne, le Père Sergio Standini attribue à ces élèves sélectionnés des parrains qui sont des

233 J-M. Ela, 1994, Afrique, l`irruption des pauvres sociétés. Contre ingérence, pouvoir et argent, Paris, Harmattan, p. 266.

234 Performances Group, l'éducation en Afrique Subsaharienne panorama, problématiques et défis, avril 2013, p.11.

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donateurs occidentaux qui financent 75 % des frais de scolarité²³⁵. La partie restante doit être assurée par la famille. Les élèves en question ont une obligation de réussite pour être bénéficiaires fidèles pendant tout leur parcours scolaire. Ce soutien scolaire peut être effectif à court terme pour certains et à long terme pour les autres. Les situations divergent par ce qu'il peut arriver les cas où la situation familiale s'améliore et l'année suivante, l'enfant est pris en charge totalement par la famille ou un proche. Le chef d'établissement des dix premières années de cette expérience, Kuba Kalabaye a confié que, malgré cette politique, certaines familles ne parvenaient pas à s'acquitter du reste des frais de scolarité. Nous avons aussi en Afrique, les cas de distributions gratuites des manuels scolaires et du matériel dans les zones urbaines et les zones rurales. On peut rester au Cameroun avec les oeuvres de l'ONG ASCOVIME qui a un volet scolaire. Elle procède à la distribution du matériel scolaire aux élèves dans tout le pays. En 2012, 4964 élèves ont bénéficié du matériel scolaire et 2013, 4045 élèves ont également eu droit à ce geste humanitaire.²³⁶ ASCOVIME ne facilite pas seulement l'humanitaire scolaire, il a aussi un volet sanitaire.

En Afrique subsaharienne, la pauvreté et la santé sont liées. La santé a un prix et son coût s'avère parfois dissuasif pour ceux qui n'ont pas d'argent. Pourtant la santé est un service vital et on devrait transcender le problème du coût exorbitant des services sanitaires. Les indigents sont à la risée des humiliations et des maladies qu'ils sont incapables de soigner. « En Afrique subsaharienne, l'accessibilité aux soins reste faible, en particulier en zone rurale. Dans de nombreux pays, les taux d'utilisation des services de santé atteignent rarement 0,5 contact par personne et par an1. Dans ce contexte, la situation des indigents est évidemment la plus difficile. De nombreuses politiques de santé tentent d'y remédier »²³⁷.

Pour y parvenir les gouvernements de la zone saharienne ont adopté de nombreuses mesures à l'instar des politiques de paiement d'exemption des soins sanitaires par les pauvres, les paiements différés, les paiements en nature, les tarifs différenciés, les subventions pour les mécanismes de prévention et du traitement des maladies transmissibles, la fourniture des

235 La scolarité vers les années 2005 à 2010 était d'une valeur de 230 .000 FCFA.

236 Les statistiques sont rendues disponibles dans son Rapport de 2013, Association des compétences pour une vie meilleure, plaquette de présentation de 2013 p.4.

237 Kaddar Miloud, Stierle Friedeger, Schmidt-Ehry Bergis, Tchicaya Anastase. L'accès des indigents aux soins de santé en Afrique subsaharienne. In: Tiers-Monde, tome 41, n°164, 2000. Disparités régionales et globalisation, organisations paysannes et marchés, ... p. 905.

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médicaments gratuitement ou à faible coût... L'initiative de Bamako²³⁸ et la conférence de Alma-Ata ont conduit les Etats africains à mobiliser les énergies pour les soins de la santé primaires. Les soins de santé primaires sont définis par la conférence d'Alma-Ata²³⁹ : « les soins de santé essentiels universellement accessibles à tous les individus et toutes les familles de la communauté par des moyens qui leur sont acceptables, avec leur pleine participation, et à un coût abordable pour la communauté et le pays ».

La Tanzanie est l'un des Etats africains où les facilités sanitaires ont été mises en oeuvre. « La politique de santé a été orientée depuis 1986 vers « la création d'une médecine préventive de masse, mieux à même de profiter à toutes les couches de la population urbaine et rurale, et I 'extension des soins primaires qui requiert peu d`infrastructures et fait davantage appel à la participation de la population » (commentaire officiel en réponse à la 6éme enquête des Nations unies, 1990). »²⁴⁰ . Dans ce même pays, le programme Iringa a été mis en place en 1983 avec 170 villages bénéficiaires et en 1989 avec 620 villages bénéficiaires. Il s'agit d'un accompagnement sanitaire de ces populations rurales à travers des conseils d'hygiène et la fourniture des soins sanitaires comme les vaccinations, d'autres soins préventifs et curatifs. Barbier et Cantrelle révèlent qu'à l'issue du programme la malnutrition a été réduite à 60 %.²⁴¹ Nombreuses sont les premières dames d'Afrique qui s'investissent dans la politique sociale sanitaire à travers leurs fondations.

2. LA MULTIPLICITE DES CENTRES SOCIAUX

238 L'initiative de Bamako correspond à une réforme de la gestion des systèmes de santé. Adoptée à la suite du comité régional africain en 1987 (37ème comité régional) de l'OMS à Bamako au Mali, elle est mise en oeuvre dans plusieurs pays en voie de développement, confrontés à des situations économiques difficiles, à partir de la fin des années 1980. Selon l'OMS trois objectifs accompagnaient cette initiative : renforcer les mécanismes de gestion et de financement au niveau local ; promouvoir la participation communautaire et renforcer les capacités de gestion locale, renforcer les mécanismes de fourniture, de gestion et d'utilisation des médicaments essentiels ; assurer des sources permanentes de financement pour le fonctionnement des unités de soins.

239 La Conférence internationale sur les soins de santé primaires s'est tenue à Alma-Ata le 12 septembre 1978, soulignant la nécessité d'une action urgente de tous les gouvernements, de tous les personnels des secteurs de la santé et du développement ainsi que de la communauté internationale pour protéger et promouvoir la santé de tous les peuples du monde.

240 M. Barbieri ET P. Cantrelle reprennent ce commentaire dans leur publication : Politique de santé et population, p.57.

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L'action humanitaire permanente est réalisée par les soins d'un ensemble d'organismes sociaux. Les centres sociaux historiquement ont vu le jour au XIXème siècle à Londres avec des maisons sociales, héritières des settlements de Londres et à New York et à Boston où émergeaient les premiers centres sociaux. Plusieurs motivations peuvent justifier la création de ces centres sociaux. Ces personnes morales de droit privé ont plusieurs terrains d'action. Durant considère que les contextes, les situations et les besoins des citoyens d'une société influencent leur création. « Ceux-ci, regroupés par la Fédération des centres sociaux, intéressent les acteurs de la famille. Centrés sur l`action éducative en Angleterre, l`ordre civique aux États-Unis, en France, les centres sociaux accueillent les familles. Après la Seconde Guerre mondiale, l`explosion démographique et la reconstruction urbaine, l`exode rural et la désertification des campagnes favorisent le développement des centres sociaux dans les banlieues et dans les villages pour lutter contre le dépeuplement »²⁴².

Malgré l'immensité de leurs actions, seul le domaine social est au coeur de cette analyse. Il s'agit au niveau national des centres sociaux qui ont différentes appellations notamment les orphelinats, les centres d'accueil, les fondations d'entreprises nationales, les maisons de retraite, des ONG locales, les associations caritatives et humanitaires. Au niveau international sont comptées des ONG internationales, les fondations à initiative privée et les fondations de multinationales et des plates-formes associatives internationales. Tous ces organismes sociaux ont à coeur d'agir envers des enfants en situation difficile, des enfants abandonnés, des couches les plus vulnérables, des personnes âgées, des personnes fragiles...Les organismes sociaux constituent les mains par lesquelles l'humanitaire du quotidien est offert. Les mains par lesquelles sont repoussées constamment les souffrances, la pauvreté, l'indigence et la fragilité des sociétés africaines. Leurs actions n'ont pas de prix mais par eux la vie est rationnalisée.

Cette autre étape du travail porte sur l'exploitation deux organismes sociaux sélectionnés selon la disponibilité des informations et la pertinence de leurs interventions. Il s'agit de l'engagement social de la Fondation Orange et de la Fédération Internationale SOS Villages d'enfants. Le slogan choisi par la fondation Orange²⁴³ peut suffire à comprendre l'intention et

242 Durand R., 1996, Histoire des centres sociaux. Du voisinage à la citoyenneté, Paris, Syros, p.20.

243 Créée en France en 1987, puis engagée depuis 2005 dans des actions de mécénat en Afrique, en Europe, au Moyen-Orient et en Asie, la Fondation Orange soutient des projets dans 30 pays où le Groupe Orange est présent en tant qu'opérateur ( page officielle de la Fondation Orange)

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l'action souhaitée. « On a tous besoin de vivre ensemble ». Trois domaines constituent des domaines d'action de la Fondation de cette firme : éducation, santé et culture.

Exclusivement analysées ici, l'éducation et la santé ont fait l'objet de nombreux projets. La fondation Orange est présente dans seize pays d'Afrique. Sur les seize pays, La fondation Orange couvre en Afrique subsaharienne, sept ²⁴⁴ pays. Les statistiques disponibles 245 témoignent de l'effectivité de l'oeuvre sociale africaine et mondiale d'Orange. On peut citer comme projets réalisés le projet « village » en Côte d'ivoire et le projet « éducation numérique en bibliothèques » au Cameroun en partenariat avec bibliothèques sans frontières. En Côte d'ivoire, les populations ont bénéficié de la construction d'une école, d'un point d'eau, des latrines et de la Case santé. Au Cameroun, les enfants en difficulté scolaire bénéficient de la traduction et de l'adaptation des contenus des cours de la Khan Academy.

La Fédération SOS villages d'enfants Internationale a voulu mettre en oeuvre ce voeu de la Déclaration mondiale sur la survie et la protection et le développement des enfants : « « Les enfants du monde sont innocents, vulnérables et dépendants. Ils sont également curieux, actifs et pleins d`espoir. Leur enfance devrait être remplie de joie et de paix. Ils doivent avoir l`occasion de jouer, de s`amuser, d`apprendre et de grandir. »²⁴⁶. « Les villages d`enfants SOS accueillent les enfants qui, en raison de la perte de leurs parents, ont besoin d`un nouveau foyer permanent ou qui, pour diverses autres raisons, ne peuvent plus vivre chez leurs parents. Les familles SOS offrent aux enfants ce foyer en remplacement de leurs parents naturels. »²⁴⁷. L'humanitaire proposée ici est une action humanitaire affective qui touche intégralement la personne de l'enfant.

Le développement de l'enfant est garanti sur trois aspects l'éducation (formelle, informelle et non formelle), la santé (préventive, curative et soutien psychosocial) et la prise en charge

244 Parmi les sept , on compte : le Botswana, Le Cameroun, la Côte d'ivoire, le Madagascar, le Mali, le Niger et le Sénégal.

245 22 millions € pour 1 400 000 bénéficiaires- 5000 personnes ont bénéficié du programme d'alphabétisation-Construction du Central Association For The Blind And Disabled, un centre de jour destiné à accueillir de jeunes enfants malvoyants et d'entamer leur scolarisation au Botswana. (2012) .

246 Préambule de la Déclaration mondiale sur la survie la protection et le développement des enfants 30 septembre 1990.

247 Préambule du Statut de SOS villages d'enfants international. Statuts approuvés par la 19e Assemblée générale ordinaire, le 22 Juin 2012.

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(directe, nutrition, hébergement ...). La politique humanitaire ici, est mise en place par trois instruments : la famille biologique, les familles SOS et une prise en charge de type familial. Dans le premier cas, on insiste sur l'affection que reçoit l'enfant dans sa vie entre ses parents et ses frères. Pour le deuxième cas, il s'agit « des familles de substitution pour les enfants qui ne sont plus pris en charge par leurs parents, qui ne peuvent pas vivre dans leurs familles d`origine et pour qui un placement à long terme répond à leur intérêt supérieur. Les familles SOS sont dirigées par une mère/un parent SOS et organisées et soutenues par SOS Villages d`Enfants. »²⁴⁸.

Et pour le troisième cas, il s'agit d'une autre alternative familiale autre que celle des villages SOS. L'enfant est pris en charge dans les familles d'accueil. L'Afrique Subsaharienne est un des terrains d'action de cet organisme qui travaille au quotidien. Elle est active à travers plusieurs projets. Au Burundi par exemple, SOS va accompagner les adolescents orphelins. « Le Burundi compte déjà un nombre croissant d`enfants orphelins, principalement en raison des conflits armés qui ont occasionné des pertes matérielles et humaines. Dans son livre intitulé « La haine n`aura pas le dernier mot», Christel Martin donne une estimation quant au nombre d`orphelins sur une période de dix ans qui s`élèverait à 660.000 dont 200.000 à cause du sida ! Au regard de ce chiffre important, je peux me permettre de penser que tous ces enfants ne bénéficient pas d`une prise en charge adaptée à leurs besoins, compte tenu de la pauvreté ambiante »²⁴⁹ .

L'ambition de cette étape était de présenter l'action humanitaire dans un contexte autre que celui du conflit et des catastrophes, d'analyser l'humanitaire au regard de la société africaine. Cette action humanitaire s'appelle encore politiques sociales ou moyens d'assistance des personnes les plus vulnérables de nos sociétés. Elle se déploie pour plusieurs motivations qui veulent annihiler les souffrances sociales. Non aux souffrances sociales, non à la marginalisation des plus faibles, l'autre mérite les faveurs, l'autre peut vivre. Plusieurs valeurs permettent de comprendre cette logique humanitaire, concrétisée par des programmes et des

248 SOS villages d'enfants international, La politique du programme SOS Villages d'Enfants, l'enfant d'abord, mai 2009, p.5.

249 Gloriose Uwera, Prise en charge des adolescents orphelins institutionnalisés, dans un pays d'Afrique comme le Burundi, Sierre, février 2012, p.10. Elle cite dans ce propos Christel Martin dans : Christel Martin et al, La haine n'aura pas le dernier mot, Albin Michel, Paris, 2005, p. 14

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initiatives pensées pour secourir l'autre à tout moment et en fonction de la disponibilité matérielle de l'aide. L'humanitaire de type permanent est pour reprendre Jacques Lebas « le geste même de secourir, d`aller vers l`autre, de l`aider. »²⁵⁰. « C`est ne pas abandonner à leur sort des hommes, des femmes, des enfants appartenant à une humanité commune »²⁵¹. Il

est essentiel que l'humanitaire en permanence soit plus structurée, dans les sociétés
africaines avec une ressource humaine formée et spécialisée sur les questions de politiques sociales. Il existe certes des structures étatiques et infra étatiques en matière de politiques sociales mais la qualité et la quantité du personnel en matière sociale demeure un véritable serpent de mer.

250 Lebas, F.Veber et G.Brucker, médicine humanitaire, Flammarion, coll. Médicine, Science, Paris, 1994, p.11.

251 Z. Anne Ferenczy, Les ONG humanitaires, leur financement et les médias, mémoire, Institut européen des hautes études internationales, Nice, juin 2005, p.12.

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CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

L'analyse théorique de l'action humanitaire sur la base de deux facteurs essentiels notamment l'urgence et la permanence était l'essentiel de cette première partie du travail. La question que l'on peut se poser rendu à cette étape est la suivante : qu'est-ce que l'action humanitaire en tenant compte de l'urgence et de la permanence ? Deux auteurs permettent de comprendre que l'action humanitaire est cumulativement un engagement en temps de crise et un engagement de tous les instants pour vu qu'il y ait les moyens d'accompagnement. Pour le Haut-commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés, c'est « un vaste concept qui couvre tout un éventail d`activités, mises en oeuvre, par des institutions aussi nombreuses que diverses »²⁵². Ce qui rend ce domaine aussi vaste, c'est qu'il y a trop d'enjeux et les souffrances humaines sont interminables. Sylvie Brunel propose une synthèse qui allie urgence et permanence dans l'humanitaire : « l`humanitaire est pour moi l`humanisme concrétisé au travers d`un geste de secours et d`altruisme envers son prochain. C`est l`humanisme incarné dans la main tendue, dans un geste de solidarité »²⁵³ . Plus que jamais le monde a besoin de l'action humanitaire et l'action humanitaire a besoin du monde. Il faut à chaque fois se demander où va l'humanitaire ? Elle doit évoluer dans le sens social et dans le sens des crises. La crise des migrants qui menace l'Europe est une preuve de la mise à l'épreuve constante de l'action humanitaire. Heureusement, les acteurs humanitaires sont là et refuse le sacrifice humain. Beaucoup d'organismes sont engagés dans l'oeuvre humanitaire, c'est le cas de Médecins Sans Frontières et de Caritas présents en Afrique Subsaharienne notamment, depuis plusieurs années.

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DEUXIEME PARTIE : LA PRATIQUE HUMANITAIRE INSTITUTIONNELLE EN AFRIQUE SUBSAHERRIENNE : L'OEUVRE DE MSF ET DE CARITAS.

Il est une période où bon nombre d'institutions internationales sont entrées en jeu dans le monde humanitaire. Ce qui donnera naissance à un mouvement humanitaire sans précédent entre multiplication et augmentation des efforts pour cette cause : « L`humanitaire moderne vient offrir à l`ensemble de la génération du baby-boom un sas de décompression idéologique. À l`univers épuisant du « tout politique », elle oppose une simplicité reposante : peu importe si la victime est de gauche ou de droite, seule sa douleur est insupportable. A partir du milieu des années 1970, c`est toute cette génération qui d`une manière ou d`une autre embarque dans l`aventure humanitaire et recombine les principes de l`aide d`urgence avec l`antitotalitarisme et les droits de l`Homme. Ce qu`apporte, en réalité, l`action humanitaire à l`opinion, c`est une sorte de monde à part conjuguant tous les traits de l`héroïsme moderne. »²⁵⁴. Dénis Maillard parle d'héroïsme moderne, cette qualification n'est pas abusive étant donné l'oeuvre immense et complexe que doivent mener les acteurs humanitaires notamment les ONG humanitaires, les agences et les associations internationales qui ont bâti leurs missions et leurs actions sur la préservation de la vie au gré des crises humanitaires. François Daudet désigne par l'expression « acteur humanitaire » des ONG qui sont spécialisées dans l'humanitaire. Elles sont des acteurs humanitaires, « une grande variété d`organisations reflétant un très large spectre opérationnel et philosophique. Il ne s`agit donc pas d`une entité homogène et indissociable. C`est d`ailleurs dans cette diversité organisationnelle que s`inscrit le défi d`uniformiser l`action et le discours humanitariste. Néanmoins, même si elles n`utilisent pas toutes les mêmes méthodes, ces

254 D.Maillard, « 1968-2008 : le Biafra ou le sens de l'humanitaire », Humanitaire [En ligne], 18 | Printemps 2008, mis en ligne le 06 octobre 2009, consulté le 29 novembre 2016. URL : http://humanitaire.revues.org/182, p .21.

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organisations ont le même objectif, qui est de porter secours aux victimes des crises humanitaires, qu`elles soient d`origine humaine ou naturelle. »²⁵⁵.

A l'ouverture de ce travail, il a été démontré que l'action humanitaire est un art et les artisans et artistes sont les ONG qui montrent leur savoir-faire et leur génie malgré les lacunes et les faiblesses observées. Michael Schloms²⁵⁶, dans sa publication intitulée « Le dilemme inévitable de l'action humanitaire » a fait une analyse portée vers les interactions et les orientations dans lesquelles les organisations humanitaires agissent. Elles font face à des obligations morales ambiguës. Il considère que les acteurs humanitaires sont influencés par le pragmatisme et la politisation. Il y a un affrontement entre l'humanitarisme traditionnel (sauver des vies) et l'humanitarisme moderne (garantie des droits de l'homme). Trois obligations morales animent ainsi l'acteur humanitaire : l'impératif humanitaire, le cadre éthique de l'intervention et l'environnement politique. L'acteur aura des actions d'ordre affectif, introverti et extraverti. Michael Schloms utilise deux figures illustratives de son analyse. La première plus synthétique et la seconde plus accentuée.

Cette seconde étape permet d'opérer une étude à partir de deux institutions bien connues sur les théâtres humanitaires en Afrique et partout ailleurs. L'engagement humanitaire de MSF et de Caritas en Afrique est influencé à la fois par l'urgence et par la permanence. Le choix de ces deux associations n'est pas fortuit, dans la mesure où l'une, MSF s'est affirmée à ses

débuts comme une association urgentiste. Et l'autre, Caritas comme un acteur
quotidiennement au chevet des démunis et des individus vulnérables . Au demeurant, l'évolution de l'action humanitaire rend désormais difficile d'opérer une distinction nette entre « humanitaire d'urgence » et « humanitaire en permanence ». Bien des aspects de l'action des deux institutions au coeur de notre analyse permettent de témoigner de l'émergence d'un hybridisme humanitaire, résultat de la fusion entre les logiques d'urgence et de permanence . L'office humanitaire de MSF (chapitre III) est le point de départ de cette étude institutionnelle et à l'arrivée il sied d'analyser l'oeuvre humanitaire de Caritas (Chapitre IV), tout cela dans le contexte de l'Afrique Subsaharienne.

255 F.Audet, « L'acteur humanitaire en crise existentielle : les défis du nouvel espace humanitaire » Études internationales, vol. 42, n° 4, 2011, p.451.

256 M. Schloms , « Le dilemme inévitable de l'action humanitaire », Cultures & Conflits [Online], 60 | hiver 2005, Online since 15 January 2006, connection on 30 November 2016. URL : http://conflits.revues.org/1924 ; DOI : 10.4000/conflits.1924.

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CHAPITRE TROIS : L'OFFICE HUMANITAIRE DE MSF EN AFRIQUE SUB-SAHERIENNE

Aucune association humanitaire ne naît sans une motivation factuelle, sans un événement qui ait suscité sa mission et ses actions. La guerre du Biafra est un événement fondateur de l'acteur de Médecins sans frontière. « Dès sa naissance dans les suites du Biafra - événement fondateur, raconté mythiquement comme soutien à un peuple résistant, opprimé, comme geste de rupture d`avec la tradition de silence de la Croix-Rouge - MSF s`inscrit dans un champ de références multiples liées aux enjeux de son temps. »²⁵⁷. Le 21 décembre 1971 est reconnue comme étant la date officielle de création de MSF. L'association nait de la fusion entre les French`s doctors (qui du retour de la guerre du Biafra ont décidé de briser le mythe du silence tel que voulut par la Croix Rouge et vont dénoncer les atrocités de cette guerre) et les journalistes du Magazine médicale Tonus²⁵⁸. La symbiose souhaitée par les deux entités favorise l'entrée en jeu d'un acteur humanitaire majeur, MSF. Bernard Kouchner Bernard Kouchner résume l'origine de MSF à travers cette affirmation : « Autour de la table d`une salle de garde au Biafra naîtra, dans le mois d`octobre 1968, l`idée de Médecins sans frontières » ²⁵⁹. Et le journal Tonus rapportait : « Médecins Sans Frontières est aujourd'hui un fait : il aura suffi que se lèvent, parmi les médecins français, quelques centaines d'hommes et de femmes de coeur, décidés à apaiser les cris de souffrance et de désespoir, dont, après la Jordanie et le Pérou, le sous-continent indien retentit encore. Le 22 décembre 1971, on votera donc cette mobilisation de volontés déterminées à faire tomber tous les barrages, toutes les frontières qui se dressent encore entre ceux qui ont vocation de sauver, de soigner, et les victimes de la barbarie humaine ou de ces dérèglements de la nature, raz-de-marée, tremblements de terre et autres catastrophes qui endeuillent les pays souvent les moins

257 J. Soussan, MSF et la protection : une question réglée? Avril 2008 - CRASH/Fondation - Médecins Sans Frontières Discours et pratiques autour de la « protection des civils», p.13.

258 L'histoire révèle que le cyclone de Bhola frappe le Pakistan oriental, actuel Bangladesh avec près de 500000 victimes. Les rédacteurs de Tonus y envoient les médecins sous le nom de Secours médical français).

259 Bernard Koucher est cité par A.Vallaeys in Médecins sans frontières, la biographie, Fayard, 2004, p. 51.

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préparés à y faire face. »²⁶⁰ . Bernard Kouchner et Max Récamier sont reconnus comme les deux fondateurs cette organisation au côté d'autres personnages²⁶¹.

Jean Claude²⁶² Vignoli parle du schisme entre les « hommes de terrain » présents lors de la Guerre du Biafra et les « hommes du cabinet » majoritairement constitués des journalistes de Tonus. Le schisme le plus important, présenté sous forme de débat est celui du choix entre une action humanitaire à court terme limitée à l'urgence et une action humanitaire à long terme, option d'un développementalisme. Dès le départ, l'urgentisme était l'option privilégiée. La fin des années 1970 marque la rupture de cette option où désormais le long terme est brandi comme la nouvelle option. Mais le schisme le plus conséquent provoque le départ des leaders comme Bernard Kouchner. Le problème est celui du type d'humanitaire à pratiquer. « Deux visions de l`humanitaire vont s`opposer jusqu`à se déchirer. Faire savoir contre savoir-faire, la lutte est implacable. Elle voit s`affronter les « Biafrais »groupés autour de Kouchner aux « soixante-huitards »et autres anciens militants gauchistes rassemblés par Claude Malhuret puis Brauman. En 1979, ces deux pôles de l`humanitaire se séparent et se refondent mutuellement : Kouchner invente Médecins du Monde pour « soigner et témoigner ». De son côté, Rony Brauman et Claude Malhuret se chargent de la « deuxième fondation de MSF »dont ils feront la principale organisation médicale d`urgence. Mobile, efficace, professionnelle.»²⁶³. Malgré cette rupture, on retient que MSF est la fille aînée du deuxième siècle de l'humanitaire²⁶⁴. Ce qui a mène Anne Vallaeys a considéré MSF comme «la plus célèbre des ONG françaises, couronnée par le Prix Nobel de la paix en 1999 ». MSF ajoute-t-elle «MSF réunit aujourd'hui un million de donateurs privés. Contre les risques de bureaucratisation, MSF privilégie l'action et ne craint pas de se remettre en question ».

261 Les Pionniers de MSF : Dr Marcel Delcourt, Dr Max Recamier, Dr Gérard Pigeon, Dr Bernard Kouchner, Raymond Borel, Dr Jean Cabrol, Vladan Radoman, Dr Jean-Michel Wild, Dr Pascal Greletty-Bosviel, Dr Jacques Bérès, Gérard Illiouz, Philippe Bernier, Dr Xavier Emmanuelli. Disponible sur le site de MSF.

²⁶²J-C Vignoli, Médecins sans frontières : l`humanitaire face à ses contradictions, Introduction à la coopération au développement et l`action humanitaire internationale, Institut universitaire d'études du développement - Institut universitaire des hautes études internationales, février 2005.

263 D. Maillard, « 1968-2008 : le Biafra ou le sens de l'humanitaire », op cit.11

264 A. Ferenczy dans son mémoire ONG humanitaires, leur financement et leurs medias , op cit, présente la naissance de MSF comme l'avènement du deuxième siècle de l'humanitaire ( 1970) , le premier siècle étant l'entrée en jeu du CICR ( 1859-1853).

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265 Le point d'honneur tient dans la nature des activités de MSF dans l'urgence comme dans la permanence. Sont par conséquent développées les techniques d'intervention en situation d'urgence (Section I) et les interventions sociales à long terme de MSF (Section II). Et nous interrogerons sur le registre qui l'emporte entre les deux.

SECTION I : LES TECHNIQUES D'INTERVENTION EN URGENCE

La philosophie humanitaire de MSF s'appelle le sans frontiérisme. Il s'agit d'une vision de l'humanitaire, d'une identité humanitaire, « On ne peut être médecin si l'on a des frontières » affirmait Bernard Kouchner. Avant lui, Pasteur affirmait déjà : « l`avenir appartiendra à ceux qui auront le plus fait pour l`humanité ». La force d'un acteur humanitaire se trouve dans la force de son geste. MSF est un acteur humanitaire en Afrique et dans le monde, la réactivité et la rapidité dans les interventions humanitaires particularisent ses opérations. Patrick Mavinga Nsakala ne tarie pas d'éloges au sujet de la mission urgente de MSF : « A chaque fois qu'un besoin d'assistance humanitaire se présente dans une zone donnée de la planète, et dans le domaine de la santé pour donner des soins aux populations, le MSF est parmi les premières à intervenir aux fins de réduire au plus vite que possible le désastre qui a commencé à sévir et sans avoir de réserve d'un lieu ou d'un autre »²⁶⁶.

L'analyse de l'humanitaire dans le couloir de MSF amène à considérer deux principales logiques : celle de l'assistance médicale en situations urgentes et celle du témoignage des situations vécues. Comme pour dire que l'action humanitaire de MSF se résume aux gestes et à la parole. On perçoit ainsi la pertinence de cette formule : « Au-delà du soin, l`action humanitaire permet de pointer le doigt vers l`injustice, de désigner l`inacceptable »²⁶⁷ .

PARAGRAPHE I : L'OFFRE D'UNE ASSISTANCE MEDICALE DANS LES SITUATIONS URGENTES

Préalablement, l'urgence a été considérée à partir de deux situations : la belligérance et les catastrophes naturelles. C'est sur la base de ces deux terrains que l'étude permettra d'analyser

266 P.Mavinga Nsakala, L'action des Médecins sans Frontières (MSF) face à la souveraineté de l'état, Université de Kinshasa - Travaux de fin de cycle 2010, mémoire online.

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les actions de MSF dans le contexte Africain. Ces deux déclinaisons de l'action humanitaire urgente de MSF sont visibles depuis la création de l'organisation : « Depuis MSF soigne sur les fronts les victimes des guerres et des catastrophes naturelles »²⁶⁸.

A. UNE ASSISTANCE MEDICALE REGULIERE DES VICTIMES LORS DES CONFLITS

MSF est une ONG qui s'identifie et se particularise par son domaine d'action et ses différentes interventions sur le terrain. L'intervention médicale est son domaine de prédilection. Cette identité a été portée par les promoteurs et les artisans de l'évolution de cette association. Pour Rony Brauman : « Dès que l`on tente de définir et de fixer par écrit les objectifs de MSF, on voit se profiler des enjeux massifs et surgir les mots enchantés : la vie, l`humanité, le bien, l`éthique, la dignité, l`intérêt général, la santé, la politique »²⁶⁹. Cette assistance médicale garantit la vie, l'humanité, le bien et la dignité dans un environnement politique et avec des moyens éthiques. La phrase-programme de MSF est significative : « La raison d`être de Médecins Sans Frontières est de contribuer à la sauvegarde de la vie et à l'allègement de la souffrance dans le respect de la dignité de la personne humaine. »²⁷⁰.

269 R.Brauman, « les limites de l'action humanitaire », Texte publié à Médecins Sans Frontières dans le cadre du processus de « La Mancha » 2006, p.1.

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Qu'est-ce que la victime au sens de l'action humanitaire dans le cadre d'un conflit ? : « Etre désigné comme victime [...] c`est être condamné à devenir celui qui ne maîtrise plus, provisoirement, son avenir, celui dont le destin est en d`autres mains. C`est devenir ce « bénéficiaire », pour reprendre le jargon bureaucratique des ONG, cet être de chair que l`on soigne mais qui, au bout de la chaîne humanitaire devient aussi un argument marketing au détour d`un mailing envoyé aux donateurs, ou un simple chiffre ramené à l`anonymat et à la massification des statistiques »²⁷¹ . L'action humanitaire médicale de MSF est manifestée en Afrique à travers son apport dans le système de santé de la période de la guerre et les interventions médicales concrètes.

1. L'INSTALLATION DES HOPITAUX MOBILES ET DES DISPENSAIRES PROVISOIRES

Dans cette partie, sont présentés les apports de MSF dans le système de santé des pays d'Afrique subsaharienne en conflits avec des initiatives qui viennent soutenir les structures sanitaires affaiblies pendant la guerre et les autres situations de belligérance et les initiatives ponctuelles et réactives qui viennent favoriser l'assistance et la fourniture des secours aux victimes des conflits . Ces initiatives peuvent se comprendre d'autant plus que pendant les périodes de belligérance, les éléments de vitalité et de subsidence d'une population sont soit rares, soit insaisissables ou alors très dispendieux. Et dans ce cas l'association favorise la fonctionnalité des plateaux techniques des hôpitaux locaux aptes à prendre soin des blessés et des malades. « Pour MSF, il n`existe pas de frontières à la souffrance et elle veut apporter son aide médicale à tous ceux qui en ont le plus besoin un peu partout dans le monde. Nombreuses sont les régions du monde où les systèmes de santé sont défaillants, en raison des guerres, des catastrophes naturelles ou humaines. Dans ces situations difficiles, les hôpitaux sont surchargés ou détruits et une aide médicale est primordiale pour prendre en charge les populations. »²⁷². Certaines

271 A.Choumoff, L`humanitaire, un secteur industriel comme les autres ?, Mastère de Création et Technologie Contemporaine 2010 - 2011, p.22 qui cite Christian Troubé in « L'humanitaire, un business comme les autres ? », 2009, Larousse, Paris, p. 38.

272 MSF, Un jour, je serai Médecin Sans Frontières copains sans frontières, Dossier pédagogique, Meteor, Brochure disponible sur www.msf.lu, p.22.

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structures sanitaires peuvent être détruites et MSF avec l'assistance matérielle doit envisager leurs reconstructions urgentes. Il peut s'agir des blocs opératoires, des banques de sang, des salles de soins et des pharmacies. Cette mission d'appui sanitaire est attribuée aux sections opérationnelles de MSF²⁷³. Les cas centrafricain et congolais peuvent servir d'illustrations au regard des rapports disponibles :

L'intervention d'MSF à Ankoro est presque aussi ancienne que les débuts de la mission dans la province. En décembre 2002, MSF décide d'appuyer pendant deux mois l'hôpital de référence et un certain nombre de structures sanitaires dans les villages périphériques. En 2003, la direction MSF décide de reprendre en gestion l'hôpital d'Ankoro pour traiter les cas graves et les blessés. Cet investissement est justifié par la localisation « idéale » de l'hôpital, « à équidistance des deux zones les plus touchées par les violences et accessible de la zone RCD». L'objectif est ambitieux : l'hôpital est intégralement réhabilité (électricité, toiture, approvisionnement en eau, équipement des services...), MSF participe à la gestion administrative, forme le personnel et instaure une forfaitisation des soins. Ce projet a une double finalité : assurer une prise en charge de proximité pour la population d'Ankoro et servir de référence pour les urgences médico-chirurgicales des zones de santé voisines. A la fermeture du programme en 2007, le bilan est mitigé. L'hôpital a relancé des soins primaires

273 Seules existent cinq sections, opérationnelles, c'est-à-dire chargées d'opérations humanitaires sur le terrain. Celles-ci sont : MSF OCB (centre opérationnel de Bruxelles), basée à Ixelles (Bruxelles), MSF OCBA (centre opérationnel de Barcelone), basée à Barcelone, MSF OCP (centre opérationnel de Paris), basée à Paris, MSF OCA (centre opérationnel d'Amsterdam), basée à Amsterdam, MSF OCG (centre opérationnel de Genève), basée à Genève.

274 MSF fiche projets, 2003, p. 5. Une partie du Nord-Katanga est sous contrôle de l'administration gérée par Le RCD-Goma, l'autre, où travaille MSF-F, dépend du gouvernement de Kinshasa. L'agglomération d'Ankoro est Située au bord du fleuve qui constitue la ligne de démarcation, l'hôpital est donc accessible aux habitants des deux zones.

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de qualité, accessibles, mais l'ambition d'en faire une structure de référence en soins secondaires n'a pu être réalisée de manière systématique...²⁷⁵

On se rend bien compte que cet appui médical n'est pas toujours une épreuve reluisante et peut laisser place à des conflits entre les acteurs humanitaires et les politiques. Dans la foulée, MSF au-delà de cet appui met en place des structures embryonnaires, passagères mais qui constituent des moyens à partir desquelles l'association apporte une réponse urgente aux victimes. Au départ, MSF, s'est définie comme association urgentiste. « La réponse aux urgences est le coeur de l`activité de MSF (...), il n`existe pas de réponses préfabriquées à une situation de crise. Nous devons sans cesse nous adapter pour aider au mieux les populations en situation de précarité »²⁷⁶. Les mesures médicales prises vont de la construction des hôpitaux mobiles à la mise en place des sites de santé intermittents en fonction des combats et de l'accès aux victimes.

« Le temps de la guerre, perçu comme le « coeur de métier » des équipes MSF, est aussi un « temps des évidences » sinon des « certitudes » : la situation de guerre est perçue comme le terrain d`intervention le plus légitime pour MSF. La fin de la guerre, c`est la disparition de cette évidence : avec la fin des combats disparaît ce qui motivait initialement le déploiement des équipes MSF, l`assistance à des populations victimes d`un conflit. »²⁷⁷. Pendant la guerre civile au Libéria entre 1999 et 2003, plusieurs régions sont restées inaccessibles à l'aide humanitaire. Malgré cet environnement austère, les équipes de MSF vont adapter les mesures d'interventions. « Pendant le siège de Monrovia (juin-août 2003), les équipes MSF, enfermées dans le quartier de Mamba Point, voient affluer des blessés par balles ou éclats de mortier. Faute de structure appropriée, la maison des expatriés est transformée en hôpital de fortune où plus d`un millier d`opérations sont réalisées au cours de l`été 2003. Après la fin des combats et le départ de Charles Taylor, un nouveau projet d`hôpital urbain est proposé par la coordination à Paris. »²⁷⁸.

275 J-H .Jézéquel et C.Perreand, Médecins Sans Frontières et les sorties de guerre, Crash/Fondation Médecins Sans Frontières, Novembre 2010, p.38.

276 MSF, INFOS, « L'hôpital au coeur des soins », N° 167bis, éditorial de Mego Terzian intitulé Innovation et audace, juillet 2013, p.3.

277 J-H .Jézéquel et C.Perreand, Médecins Sans Frontières et les sorties de guerre, ibid, p.47.

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Pour le cas du Libéria, deux projets n'ont pas connu une réalisation : le projet Mamba Point Hospital (MPH) et le projet Lofa dans la mesure où l'association a privilégié l'approche mobile et réactive lors des interventions au détriment de l'approche fixe. Le rapport d'activités de MSF de l'année 2010 met en lumière l'impact de l'intensité des conflits sur les stratégies d'intervention médicales.

Il est urgent d'adapter des mesures liées aux circonstances des conflits. « Le projet en RDC est le plus important de Médecins Sans Frontières (MSF) en termes de programmes, de personnel et de budget. Les équipes offrent des soins généraux et spécialisés dans les hôpitaux, les dispensaires et les cliniques mobiles de diverses provinces ...l`intensification du conflit et les mauvaises infrastructures compliquent encore l`accès aux zones isolées. Près de la ville de Pinga au Nord-Kivu, combats et instabilité de la ligne de front ont piégé la population. Il a fallu utiliser des motos pour organiser des cliniques mobiles et fournir du matériel médical. Dans les Hauts Plateaux, une zone montagneuse très isolée du Sud-Kivu, des équipes ont marché jusqu`à six heures pour atteindre les déplacés et assurer près de 13 800 consultations médicales. Shabunda ne peut être approvisionnée que par avion-cargo et c`est à vélo et moto que les équipes de MSF ont apporté des soins médicaux à 22 000 déplacés »²⁷⁹.

L'objectif de la création des hôpitaux mobiles et des dispensaires est une manifestation de la volonté de pallier aux insuffisances du système de santé pendant le conflit. Les structures pratiques et provisoires mises en place favorisent l'action médicale efficace et pertinente de MSF. Entrent dans le registre des soins de santé fournis par les dispensaires et les unités mobiles de santé le diagnostic, la prévention, les soins, la lutte contre les maladies et les blessures. Les structures opérationnelles mises en place pour les besoins de la cause demandent l'accès aux blessés, aux malades, leur évacuation et même les premières prises en charge. La question des unités mobiles de santé n'est pas l'apanage de MSF, même si il faut reconnaitre que cette association est connue dans cette dynamique créatrice. Le CICR définit les unités mobiles de santé comme « une stratégie de fourniture épisodique et ambulatoire d`un service de santé »²⁸⁰, dans une période courte, le temps de

280 CICR, Unités mobiles de santé, approche méthodologique, www.cicr, mai 2006, p.5. Réflexion d'Hervé Le Guillouzic, Chef de l'Unité des services de santé, dans la préface.

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voir rouvrir les structures sanitaires fixes. Ces unités proposent des programmes verticaux de santé, un personnel bien formé et un soutien matériel nécessaire. En Côte d'ivoire en 2003 et au Sud-Soudan et Darfour en 2006, on a pu mesurer l'ouvrage des unités mobile de santé et ses autres centres de santé MSF.

« La guerre civile qui a éclaté en 2002 divise visiblement la Côte d'Ivoire. Bien que le personnel du ministère de la Santé revienne en poste lentement depuis la signature d'un accord de paix en 2003, la majorité de la population n'a que peu ou pas d'accès aux soins de santé en raison de la violence sporadique et de l'instabilité générale.

Les cliniques mobiles offrent des services dans les régions plus isolées, y compris la zone tampon entre les factions en guerre.MSF invente de nouvelles méthodes pour prodiguer des soins contre le VIH en régions lointaines : nous formons des infirmières et des agents sanitaires dans les cliniques de santé; nous avons étendu les séances de consultation; nous offrons le dépistage et la thérapie antirétrovirale gratuitement aux personnes dans le besoin. »²⁸¹.

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« En l'absence de personnel soignant, structures de santé, routes, transports, autres acteurs et investissements, MSF est la seule organisation médicale présente au Sud-Soudan, et tente de répondre aux besoins immenses. MSF offre des soins médicaux dans cinq États, allant des soins primaires à la chirurgie et au traitement de la malnutrition et de la maladie du sommeil. Le personnel de ses centres de santé et hôpitaux dans les Etats de Jonglei, Haut-Nil et Unité a assuré plus de 350.000 consultations ambulatoires et 2.000 interventions chirurgicales. Dans l'État de l'Unité, environ 150 patients ont été héliportés depuis des sites éloignés. En plus des structures fixes, MSF recourt à des cliniques mobiles et à des équipes de terrain afin que les habitants des zones reculées puissent recevoir des soins. »282

« . MSF a recouru à des cliniques mobiles pour traiter ces déplacés. MSF propose des soins à environ 70.000 personnes dans la ville de Muhajariya, au sud, assurant hospitalisations, soins ambulatoires, chirurgie et traitement des victimes de violences sexuelles. Les soins nutritionnels mobiles sont intégrés aux soins de base pour répondre

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au nombre élevé d'enfants malnutris. MSF a lancé un nouveau projet pour les résidents et déplacés de Feina et des environs, proposant soins de base, soins prénatals et un programme nutritionnel à domicile. Quelque 130 consultations ont lieu chaque jour et en moyenne 60 cas par mois sont admis dans le programme de nutrition. MSF a organisé des cliniques mobiles pour accéder à la population restant éparpillée sur une vaste zone. »²⁸³.

Les exemples évoqués précédemment témoignent des enjeux de l'engagement humanitaire en période de conflit. Les questions de sécurité ouvrent la porte aux questions de santé, de nutrition et aux problématiques de migrations. Aussi des solutions provisoires ne sont pas toujours à l'avantage des blessés et même des malades si on se réfère à l'objectivité de ce aphorisme humanitaire : « La clinique passe, le malade reste ! ». Et si le malade reste, quel sera son sort dans les minutes et les heures qui suivent ?

MSF doit procéder à ce que Pierre Boulet-Desbareau appelle la « Clusterisation de la logistique humanitaire », c'est-à-dire « édifier un système humanitaire efficace et prévisible »²⁸⁴. Et pour cet auteur, cela nécessite une identification des besoins en tenant compte des clusters sectoriels notamment la santé, la nutrition, l'abri ; un partenariat entre les acteurs humanitaires et l'expérimentation des bonnes pratiques. Cela est tributaire d'une logistique de soutien fiable, rapide et efficace. « Elle s`applique aux urgences humanitaires - consiste à organiser tout ce qui est nécessaire pour déployer, maintenir et approvisionner des programmes d`urgence en situation de crise majeure. Les performances de la logistique humanitaire sont à ce titre avant tout guidées par des objectifs de rapidité de déploiement et de fiabilité des solutions apportées (fiabilité des fournisseurs, maintenabilité des équipements, sécurité des structures, transportabilité, etc.) qui priment généralement sur les contraintes de coût d`acquisition ou d`approvisionnement. »²⁸⁵. La logistique humanitaire est un élément fondamental même dans les interventions médico-chirurgicales de MSF.

284 P .Boulet-Desbareau , « logistique d'urgence humanitaire : revue critique des dix dernières années », lhu - revue critique , mai 2014, p.5.

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2. LA PRATIQUE DES INTERVENTIONS MEDICO-

Considérée comme ONG humanitaire médicale, MSF avec d'autres ont mis un poteau rose sur la médecine humanitaire. Elle a pour objectif « d`atténuer les souffrances des victimes et de diminuer la mortalité. Elle repose sur un encadrement humain expérimenté, une préparation soigneuse des équipements et une logistique efficace (transports, communication, approvisionnement et maintenance). La médecine humanitaire est analysée selon deux branches ici. La logique médicale, c'est-à-dire les soins fournis aux victimes des conflits et la logique chirurgicale, les différentes opérations chirurgicales.

Aux termes de l'article 3 commun aux Conventions de Genève du 12 août 1949, on retient que : « En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l`une des Hautes Parties contractantes, chacune des Parties au conflit sera tenue d`appliquer au moins les dispositions suivantes :

1) Les personnes qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention, ou pour toute autre cause, seront, en toutes circonstances, traitées avec humanité, sans aucune distinction de caractère défavorable basée sur la race, la couleur, la religion ou la croyance, le sexe, la naissance ou la fortune, ou tout autre critère analogue...

Un organisme humanitaire impartial, tel que le Comité International de la Croix-Rouge, pourra offrir ses services aux Parties au conflit. Les Parties au conflit s`efforceront, d`autre part, de mettre en vigueur par voie d`accords spéciaux tout ou partie des autres dispositions de la présente Convention. L`application des dispositions qui précèdent n`aura pas d`effet sur le statut juridique des Parties au conflit. ».

Cette disposition indique les catégories de personnes, qui, dans une situation de belligérance peuvent bénéficier des secours et des soins. Dans la deuxième partie de la même disposition, la mission médicale de l'action humanitaire est établie et le CICR est cité comme exemple d'organisme pouvant assurer cette mission mais les autres organismes spécialisés dans ce

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domaine peuvent intervenir à l'instar de MSF. L'association assure la prise en charge médicale des malades et des blessés. Cette prise en charge dans l'urgence demande de la réactivité et de la créativité : « L`équipe d`urgence doit avant tout évaluer les besoins médicaux et les moyens opérationnels disponibles sur place. A partir de là, elle peut déterminer les médicaments et les équipements nécessaires ainsi que les quantités requises. Il est parfois possible de s`approvisionner sur le marché local. Toutefois la commande internationale est la règle pour 90% du matériel car le temps presse et les normes des produits doivent correspondre aux standards MSF pour assurer la meilleure qualité des soins ».²⁸⁶

Au Mali, en 2012, alors que les Touaregs cherchent à prendre possession du Nord du pays, les ressortissants de villages de la zone sont secoués par des maladies et d'autres nombreuses pathologies. MSF viendra au secours des populations fragilisées. Elle va offrir des soins pédiatriques dans de nombreux villages. « Des « agents paludisme », personnels non-médicaux formés par MSF à l'utilisation des tests de diagnostic rapide et à l'administration des traitements simples à base d'artémisinine sont déployés. Un projet pilote mis en place au centre de santé de Konséguéla consiste à inclure un volet préventif dans une offre de soins complète et notamment l'accès à des suppléments nutritionnels permettant de prévenir la dénutrition. Il vise les villages. Ce dispositif permet de diminuer significativement le nombre de cas de paludisme sévère et donc la mortalité infantile en amenant des soins de qualité au plus près des patients. »²⁸⁷. Un témoignage d'une malienne est d'ailleurs repris par MSF : « Mon enfant était malade, je ne comprenais pas quelle était la maladie. Je l`ai emmené à Konséguéla, puis on lui a donné un aliment thérapeutique. L`enfant avait un an, je l`avais sevré et je ne croyais pas à sa survie ». Aminata, 22 ans, mère du petit Issa.

Selon le CICR, la prise en charge médicale dans l'urgence recommande de procéder à un triage de patients pour distinguer les cas critiques de malades ou de blessés avec des cas simples qui demandent moins d'effort. Il procède à une catégorisation à quatre niveaux : les cas graves, les patients de seconde priorité, les patients qui ne nécessitent pas une consultation et les patients ayant une faible chance de survie ²⁸⁸ . Il faut agir

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rationnellement dans la mission humanitaire comme le suggère Claire Jacquot²⁸⁹ dans sa thèse de doctorat. Elle exprime sa pensée en s'inspirant d'un auteur, Eric Dachy : « L`action se décide, s`organise et s`évalue à partir du suivi d`indicateurs de santé collectés en urgence, tels les chiffres de mortalité journalière et d`apparition des nouveaux cas de maladie à haut risque de contagion. Ces indicateurs deviennent ainsi des éléments stratégiques de la « prise en charge de la population. ».

L'action médicale de MSF est loin d'être complète, l'offre demeure insuffisante par rapport à la demande humanitaire. Les professionnels de l'association le témoignent : « Le plus dur à vivre, ce sont les chocs émotionnels violents. Les enfants qui meurent dans vos bras, l`accueil des malades qui hurlent de douleur et pour lesquels vous ne pouvez rien faire, car vous n`avez pas les médicaments nécessaires. ».²⁹⁰

MSF est également connue par ses interventions chirurgicales. C'est également un chapitre fondamental de la médecine humanitaire. On opère dans un contexte précaire, dans une rapidité et avec un nombre impressionnant de victimes. Les blessures les plus graves nécessitent des interventions chirurgicales immédiates et efficaces. On est loin des situations ordinaires, il faut de l'innovation et de l'efficacité. Sans vouloir verser dans un débat de spécialisation, les auteurs reconnaissent que MSF a évolué dans ses entreprises chirurgicales. Et cette évolution est avantageuse pour les victimes. « La chirurgie a structuré l`imaginaire collectif de MSF depuis ses débuts. Mais depuis les premières missions chirurgicales réalisées lors de la guerre civile du Liban (1975-1976), les programmes chirurgicaux ont réellement changé. Aujourd'hui, MSF tente de dispenser une médecine de qualité s`approchant des standards européens...A côté de la chirurgie générale, d`autres activités de chirurgie plus spécialisées sont intégrées à nos activités (chirurgie des grands brûlés, fistules vésico-vaginales...). En Jordanie, MSF fait désormais de la chirurgie réparatrice pour les

289 C.JACQUOT, La médecine humanitaire : histoire et enjeux, pratique et leçons. Relations entre médecine générale et médecine humanitaire : histoire, définitions, témoignages, Université Henri Poincaré Nancy 1, 2010, P.63.

290 Un Témoignage de Thomas, chirurgien en Afghanistan pour MSF en 1998 recueilli dans : «Agir avec des ONG » d'André , p.7.

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victimes du conflit irakien. Il s`agit de réhabiliter des fractures et des blessures - souvent déjà traitées, mais mal - et d`aider les patients à retrouver leur mobilité. »²⁹¹.

La chirurgie de guerre permet à MSF de prendre soin des plaies de guerre, des blessés par balle ou par éclats d'obus et les cas de brûlures. En Somalie, à Kismayo également dans le Juba inférieur, MSF a lancé un projet de chirurgie d'urgence en septembre 2007. En 2010, en RDC, sa présence chirurgicale s'est manifestée dans un incident. «En juillet, l`accident et l`explosion d`un camion-citerne à Sange, au Sud-Kivu, ont fait plus de 230 morts et 96 blessés graves. MSF a lancé une intervention d`urgence spécialisée, prodiguant des soins médicaux et infirmiers intensifs, un soutien en santé mentale et de la physiothérapie à 52 grands brûlés dans deux hôpitaux de la région. Des chirurgiens ont procédé à des greffes de peau selon une technique qui favorise une guérison rapide. »²⁹². La récente crise politique de la RCA est une illustration de cette activité de MSF.

« Les anti- Balaka ont intensifié les attaques contre les musulmans au nord et à l`ouest du pays, car ils voyaient ces zones comme des bases politiques potentielles pour les ex-Séléka. MSF a soigné des centaines de blessés. À l`hôpital communautaire, pendant cette période, les équipes MSF ont soigné 15 à 20 patients par jour, principalement blessés par balles et à coups de machette. Certains avaient été torturés et battus. Beaucoup présentaient des lésions de défense à la tête, aux mains et aux bras... »

La chirurgie humanitaire est délicate quand on observe le nombre de cas et la disponibilité du matériel sanitaire. Il faut agir, dans l'urgence, malgré le nombre de patients et le matériel peu fourni. « L`environnement en temps de guerre est rude et austère. Le travail chirurgical est grandement limité par les difficultés logistiques pour approvisionner les zones reculées et dangereuses, l`absence de travaux d`entretien et de réparation, et le manque de pièces de rechange. Il est rare qu`il y ait suffisamment de personnel technique pour assurer le fonctionnement correct des installations. »²⁹³..

De façon plus pratique, le CICR propose une systématisation de la chirurgie humanitaire. Il indique que les équipes chirurgicales agissent dans un processus d'intervention allant de la

291 MSF, « Dossier de Présentation, d'un hôpital à l'autre, exposition », www.msf.fr, Pp.3-4

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chirurgie du sauvetage à la réanimation²⁹⁴. Au total cinq étapes sont retenues notamment les premiers secours prodigués sur place, les mesures d'urgence vitale, le parage de la

plaie, le traitement définitif et la chirurgie réparatrice et rééducation
fonctionnelle.²⁹⁵Cette chirurgie humanitaire est pratiquée dans un environnement socioculturel complexe et les risques d'improvisation et d'erreurs sont évidents. La collecte de sang, « difficile à réaliser dans certains pays en raison de restrictions et de croyances culturelles et religieuses » et la réalisation des opérations conditionnées par un environnement où « les amputations et les laparotomies ne peuvent être réalisées qu`avec le consentement de la famille du patient. »²⁹⁶.

Geneviève, médecin-anesthésiste pour MSF en Sierra Leone, 1998 rapporte : « En dix jours, nous avons opéré 185 personnes, parfois jusqu`à deux heures du matin. Il fallait se reposer. C`était dur, on savait que des patients allaient mourir, qu`il n`y avait personne pour les opérer. »²⁹⁷. « La chirurgie de guerre est la chirurgie du temps de paix avec des obstacles surajoutés, la chirurgie des complications, la chirurgie des médecins sans formation chirurgicale, une chirurgie d`adaptations et d`improvisations pour remplacer ce qui fait défaut, la chirurgie des surprises que réservent les nouveaux moyens de combat. ».²⁹⁸

Les kits d'urgences sont généralement disponibles auprès des centres opérationnels de MSF. Plusieurs acteurs humanitaires font usage des kits d'urgence dans leurs interventions. Nous illustrons l'usage du Kit selon MSF et le partenariat entre les acteurs humanitaires.

298 Cette réflexion est tirée de l'ouvrage précité, Chirurgie de guerre, ouvrage qui reprend une analyse de Commission sur la chirurgie du Département militaire fédéral. Chirurgie de guerre (Aide-mémoire 59.24.f). Berne, Armée suisse, 1970 et 1986.

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« Pour être prêt en toutes situations, MSF prépare son matériel sous forme de kit d'urgence. Il existe plus de cent kits différents qui permettent d'agir très rapidement. Ces kits peuvent contenir des médicaments, des pansements, des vaccins mais aussi du matériel plus encombrant pour réaliser des examens médicaux ou des opérations. En fait, pour chaque situation d`urgence, il existe un kit ! Par exemple, le kit médical chirurgical pèse 284 kg. Il est conçu pour intervenir dans une zone de guerre. Il permet de soigner 150 blessés, brûlés ou malades. Tout ce matériel est envoyé par avion mais une fois sur place, le personnel de MSF devra parfois se montrer ingénieux afin d'amener le matériel sur le lieu de la crise. Dans certains cas, comme lors d`u tremblement de terre, les routes peuvent avoir été détruites. Il faudra donc trouver une autre solution pour acheminer le matériel, en bateau, par exemple. »²⁹⁹.

« Le Kit 2011 est composé de deux assortiments différents de médicaments et de dispositifs médicaux, l'unité de base et l'unité supplémentaire. Pour faciliter la distribution à des structures de santé de faible capacité, les quantités de médicaments et de dispositifs médicaux de l'unité de base ont été divisées en dix unités identiques destinées chacune à 1000 personnes. »³⁰⁰.

299 MSF, « l'aide humanitaire d'urgence : c'est quoi ? », Dossier réalisé en partenariat avec Médecins Sans Frontières supplément au Journal des enfants septembre, 2012, p.1 .

300 OMS, Kit sanitaire d`urgence inter institutions 2011 : médicaments et dispositifs médicaux pour une population de 10 000 personnes pendant environ 3 mois. Des Editions de l'OMS, 2011, Pp.3-4.

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Plusieurs pratiques médicales évoquées précédemment ont été expérimentées par MSF dans les situations de catastrophes naturelles. La suite sera une analyse illustrative de l'action de MSF lors des catastrophes naturelles en Afrique.

B. L'INTERVENTION VITALE POUR LES RESCAPES DES CATASTROPHES NATURELLES

La colère est un élément de la personnalité de l'homme mais la nature a également ses moments et ses périodes de colère. Ces moments de colère de la nature sont encore appelés catastrophes naturelles. Pour MSF, les catastrophes naturelles sont « des événements brutaux d`origine naturelle, qui engendrent généralement la mort et la destruction. Les catastrophes naturelles sont diverses et variées : tempêtes majeures, ouragans, cyclones ou encore séismes ou inondations. »³⁰¹. L'association dans sa mission est porteuse d'un idéal humanitaire qui se trouve concrétisé à travers son action de sauveteur lors des catastrophes naturelles. La Charte de l'association lui reconnait ce rôle de sauveteur : « Les Médecins Sans Frontières apportent leur secours aux populations en détresse, aux victimes de catastrophes d`origine naturelle... sans aucune discrimination de race, de religion, philosophie ou politique. ». Il est vrai qu'au départ, ce champ de l'humanitaire enregistrait peu d'interventions humanitaires. Mais la persistance et la régularité des phénomènes n'ont pas laissé indifférents les fondateurs, les professionnels et les volontaires de l'association. OXFAM prévoyait déjà en 2009 que : « Séismes, inondations, tempêtes,... les catastrophes naturelles affectent en moyenne 250 millions de personnes chaque année dans le monde et d`ici 6 ans le nombre de personnes touchées par ces catastrophes devrait augmenter de plus de 50% pour atteindre 375 millions de victimes par an. »³⁰². Par souci d'analyse pratique, nous montrerons les interventions régulières de MSF dans certaines catastrophes naturelles, les inondations notamment et les interventions exceptionnelles et dans d'autres catastrophes naturelles : les cyclones et les sécheresses dans le contexte de l'Afrique subsaharienne.

1. LES INTERVENTIONS REGULIERES DE MSF LORS DES INONDATIONS

301 MSF, « Un jour, je serai Médecin Sans Frontières », Copains Sans Frontières, op. cit, p.23.

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Avant de démontrer l'implication de MSF en Afrique subsaharienne, dans l'action humanitaire pendant les inondations, une présentation brève de l'organisation et du déploiement des secours lors des différentes catastrophes naturelles sera faite, tout particulièrement les inondations. « Pendant la catastrophes, ou toute autre situation d`urgence, il faut identifier la catastrophe, sauver les victimes, recenser les dégâts, informer les autorités, organiser les secours et transporter les premiers secours sur les lieux....»³⁰³. Plusieurs activités d'intervention peuvent être identifiées dans un processus ascendant pour favoriser le sauvetage des victimes. La RDC dans son plan d'organisation de secours en cas de catastrophes, élaboré avec le concours de nombreux acteurs humanitaires internationaux identifie clairement les activités d'intervention urgente dans un ordre croissant: alerte, évacuation et migration, recherche et sauvetage, évaluation suite à la catastrophe, intervention et aide...Pour l'UNICEF, les inondations recommandent de procéder d'entrer de jeu à une évaluation rapide , de procéder à une fourniture des produits de secours (des sels de réhydratation orale, des comprimés de désinfection de l'eau et de floculation, des réservoirs souples, des conteneurs d'eau et des bâches de plastique.) , à la fourniture des trousses sanitaires d'urgence .

MSF intervient dans le contexte des inondations dans le respect des principes évoqués. L'association intervient dans un temps assez réduit mais selon les principes déontologiques. « Lorsqu`une catastrophe naturelle frappe, il est absolument essentiel d`intervenir sans délai pour sauver le plus grand nombre de vies possible. Les 72 premières heures déterminent souvent l'ampleur des répercussions humaines, car les personnes blessées ou prises au piège dans les décombres ont encore une chance de survie. Voilà pourquoi MSF doit toujours disposer des ressources suffisantes, non seulement pour dispenser des soins d`urgence, mais aussi pour dépêcher le plus vite possible ses équipes auprès des victimes privées d`accès à l`aide médicale »³⁰⁴. La lecture des rapports d'activités rendus publics par MSF atteste que cette organisation en matière de catastrophes naturelles, en Afrique agit plus, dans le domaine des inondations. Ce tableau récapitule ses interventions humanitaires en Afrique Subsaharienne à la période 2010 et de 2013.

303 République Démocratique Du Congo, Plan d'organisation De secours en cas de catastrophe plan ORSEC, mars 2012, p.108.

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PAYS	FAITS	AIDE HUMANITAIRE DE MSF	ANNEE
SOMALIE	À Belet Weyne, au centre du pays, de graves inondations ont déplacé plus de 10 000 personnes	Les équipes de MSF ont distribué des bâches pour la construction d'abris temporaires et pratiqué le dépistage de la malnutrition chez les enfants.	2010

KENYA	. dans la région de Tana River a connu graves inondations et cela a provoqué de nombreux déplacés	Les équipes ont offert une aide médicale et psychologique aux populations d'Orma et Pokomo. Elles ont assuré près de 4 900 consultations médicales et 160 consultations individuelles et familiales de santé mentale. Elles ont organisé près de 830 activités dans les camps des déplacés avec de nombreuses réalisation à l'instar	2013

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de la construction

des latrines, des
points d'eau...

MOZAMBIQUE

Inondations à

Chókwè

Début 2013, des

pluies torrentielles

ont provoqué

d'importantes inondations, notamment dans la province de Gaza et la ville de Chókwè, oùle fonctionnement

des structures de
santé, dont l'hôpital

principal, a été
suspendu.

MSF a déployé une équipe d'urgence et

donné des
fournitures

médicales au

ministère de la

Santé. Ce
programme

d'urgence a duré

deux mois et

l'équipe a assuré

plus de 23 000
consultations médicales, dont près de la moitié étaient liées au VIH/sida et à la TB.

2013

Il est important de noter qu'à la suite d'une inondation dans une région d'Afrique, de nombreuses crises sanitaires et alimentaires peuvent déclencher et les équipes de MSF se retrouvent interpeller doublement. Durant l'année 201 3, le Soudan a connu de fortes inondations et s'en est suivie une grande crise sanitaire. « En août, des pluies torrentielles ont provoqué des inondations qui ont affecté 150 000 personnes. L`État de Khartoum a été le plus touché. MSF est intervenu en urgence pour fournir 228 600 litres d`eau potable et a assuré 654 consultations dans la localité de Sharag Alniel grâce à des cliniques mobiles. Les

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patients souffraient le plus souvent d`infections respiratoires, gastrites ou diarrhées. »³⁰⁵. Les inondations ne sont pas les seules catastrophes naturelles en Afrique, dans lesquelles MSF apportent son expertise humanitaire.

2. LES INTERVENTIONS EXCEPTIONNELLES DE MSF

Deux grandes catastrophes sont ici concernées, les cas de sécheresse et le cas du cyclone Haruna le 22 février 2013. MSF adopte des méthodes utiles à son efficacité lors des interventions en cas de séisme, sécheresse ou toute autre catastrophe naturelle. « La méthode MSF prévoit qu'après les deux premières semaines d`urgence les besoins et les commandes doivent émaner des projets. » ³⁰⁶. Cette méthode nécessite une identification des besoins de la communauté et des personnes vulnérables, le choix de la nature de l'opération à réaliser, étudier les conditions d'intervention et anticiper les besoins et collaborer avec les partenaires locaux dans les actions de sauvetage.

Pour le cas de la sécheresse, plusieurs caractéristiques permettent d'identifier ce phénomène naturel qui dans l'histoire de l'Afrique a déjà frappé de nombreux pays notamment les parties sahéliennes et désertiques. Les manifestations de la sécheresse sont nombreuses. « La sécheresse est un phénomène naturel qui se manifeste lentement, qu`il est souvent possible de prévoir et qui nécessite normalement une intervention concertée à long terme. Ceci dit, l`arrivée soudaine de populations dans une région extrêmement sèche ou en proie à la sécheresse, à la suite de troubles civils, de conflits ou d`autres catastrophes naturelles peut avoir de lourdes répercussions sur la santé et la nutrition des enfants en bas âge et nécessiter une intervention immédiate ».³⁰⁷ L'association était déjà au chevet des victimes de sécheresse en Ethiopie en 1984.³⁰⁸ Les rapports de 2006 et de 2010 servent d'illustrations pour étayer

306 A-L.Maïola, « Médecins Sans Frontières et la gestion des catastrophes naturelles : standardisation et limites de la logistique en situation d'urgence », Mondes en développement n°137, 2007, p.82.

307 UNICEF, Manuel pour les situations d`urgence sur le terrain, www.unicef.org/french, octobre 2005, p.96

308 1983 - 84, la sécheresse frappe l'ensemble de la bande sahélienne, de la Mauritanie au Soudan. Des poches de disette, voire de véritables famines, apparaissent dans les pays affectés, qui lancent des appels internationaux à l'aide. Atteinte comme les autres, l'Éthiopie ne réagit pas, bien que des informations alarmantes commencent à parvenir, via les mouvements d'opposition armée du Tigray et de l'Érythrée. À Korem, le principal camp où travaillait MSF les membres de l'organisation assistaient au chantage exercé par le nouveau responsable du Parti

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les interventions humanitaires à l'effet d'atténuer la vulnérabilité que provoque la sécheresse auprès des populations africaines.

Sécheresse, flambée des prix des denrées alimentaires et nombre accru de migrants en transit ont profondément affecté Djibouti. En 2010, les niveaux de malnutrition ont dépassé les seuils d'urgence en plusieurs endroits. Médecins Sans Frontières s'est employé à réduire ces taux parmi les enfants des bidonvilles de la ville de Djibouti. Traiter la malnutrition dans la capitale En 2010, MSF a soigné les enfants atteints de malnutrition dans les districts de Balbala, Hayableh, Arhiba et PK 12, qui abritent principalement des migrants, des demandeurs d'asile et des Dijboutiens issus des zones rurales. ». (Rapport annuel des activités 2010.).

MSF est aussi présente en cas de cyclones. Ce phénomène n'est pas très régulier en Afrique. MSF a été un acteur de sauvetage des sinistrés et des blessés en 2007 avec le cyclone Flavio³⁰⁹ et en 2013 avec le cyclone Haruna³¹⁰. Nous reprenons l'essentiel de la mission

contre la population sinistrée : confisquant les couvertures et une partie des stocks de nourriture. Isolée dans sa protestation, MSF fut expulsée d'Éthiopie le deux décembre 1985 mais continua de faire campagne contre les transferts de populations, qui furent suspendus à l'automne 86.

309 Rapport annuel des activités, 2007. ³¹⁰Rapport annuel des activités ,2013 .

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humanitaire de MSF pour le cas du cyclone Haruna compte tenu du manque suffisant d'informations disponibles pour Flavio.

« Le cyclone Haruna qui a frappé la côté sud-ouest de Madagascar le 22 février, a provoqué d'importantes inondations et entraîné le déplacement de plus de 10 000 personnes. Selon l'Organisation mondiale de la santé, plus d'un tiers des Libyens ont été exposés directement et/ou indirectement au conflit. En 2012, la prévalence des symptômes de stress post-traumatique était estimée à 12,4%, et celle de la dépression sévère à 19,8%. En août 2013, Médecins Sans Frontières (MSF) a ouvert un centre de santé mentale à Tripoli, la capitale, pour soigner les pathologies physiques et mentales liées à toute forme de violence, qu'elle soit physique, psychologique, sexuelle ou conséquence directe du conflit. Conçu pour offrir une prise en charge. Les villes de Tuléar et Morombe ont été les plus touchées par ce cyclone. Plusieurs organisations humanitaires sont intervenues, dont Médecins Sans Frontières (MSF) qui a ouvert des cliniques mobiles et donné des médicaments aux centres de santé de ces villes et des environs jusqu'à mi-avril. De février à mai, une équipe a aidé les autorités sanitaires à faire face à une recrudescence du paludisme à Tuléar, Morombe et Betioky. Au total, 5 761 consultations ont été assurées. » . (Rapport annuel des activités 2013).

Au terme de cette analyse qui a porté sur la principale mission humanitaire de MSF plus vaste, plus technique et bien connu, nous envisageons la deuxième étape de son action en matière d'urgence humanitaire, le témoignage humanitaire qui peut parfois prendre des allures judiciaires.

PARAGRAPHE II : LE TEMOIGNAGE EN CAS DE SITUATIONS HUMANITAIRES : UNE REACTION URGENTE

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Dans un article scientifique intitule «Speaking out or remaining silent in humanitarian work », Jakob Kellenberger³¹¹ revient sur une question au nom de la neutralité : faut-il garder silence face aux atrocités et aux douloureuses réalités rencontrées sur les théâtres humanitaires ? Il y a donc ce que l'auteur appelle « Tension between action and testimony » ? Pour MSF, dans une mission humanitaire, la parole est fondamentale, elle fait partie d'une réaction humanitaire urgente. Il faut agir et faire agir. Cette logique du « témoignage humanitaire » est une preuve de la manifestation de la dimension urgente des interventions. Elle a à notre sens deux objectifs complémentaires à savoir montrer l'indignation de l'acteur humanitaire face à la crise humanitaire et dénoncer les abus observés contre les normes de droit international humanitaire. L'intérêt de ce témoignage a été résumé par James Obinski, ancien président de MSF à l'occasion du discours de la remise du prix Nobel de la paix 1999. « Le silence a souvent été confondu avec la neutralité, il a souvent été présenté comme une condition nécessaire pour mener des actions 1`humanitaires. MSF s'est construit en réfutant cette hypothèse. Car si nous ne sommes pas sûrs que la parole peut sauver, nous savons que le silence tue. »312

A. LA RHETORIQUE VEHEMENTE DE L'INDIGNATION

La logique de l'indignation vise à favoriser la mobilisation de la communauté internationale et toute la communauté humanitaire. En plus, l'indignation vise à alerter les acteurs en conflit pour soit faciliter le travail humanitaire, soit réduire l'intensité des conflits. Pour Bernard Kouchner, c'est un enjeu moral, une parole agissante et un appel à la mobilisation.

Ainsi, se trouvent mobilisées la communauté internationale et la communauté humanitaire. La communauté internationale interpellée signifie que, l'action humanitaire n'est pas une affaire privée ou un jeu de complice mais un service universel, un service pour le bien-être de l'humanité. L'humanité a le droit de savoir et MSF le devoir de parler. L'humanitaire en urgence serait donc un système de communication³¹³ entre l'acteur humanitaire sur le terrain et les spectateurs loin du conflit et entre l'acteur humanitaire et les Etats de la planète. Pour

311 J.Kellenberger, « Speaking out or remaining silent in humanitarian work », RICR Septembre IRRC September 2004 Vol. 86 No 855,Pp. 593-609.

312 Discours prononcé par Monsieur James Orbinski. Oslo 10 décembre 1999, Pp.1-2.

313 P.Sylvain, La représentation humanitaire en question, la crise du Darfour au quotidien à Médecins Sans Frontière, mémoire, institut d'études de Toulouse, 2004-2005, p.12.

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Perron Sylvain, il y a un passage de la représentation humanitaire de la victime à la représentation de la victime humanitaire. Cette politique de mobilisation de la communauté internationale a été expérimentée par MSF lors de la crise du Darfour en 2004. Comptée parmi les ouvriers de la première heure au Darfour, MSF interpelle le monde entier par le service des médias. Les communiqués de presse, les publications, les rapports sont autant de mécanismes que MSF utilise pour mobiliser la communauté internationale derrière la cause humanitaire survenue étrangement. Le 15 janvier 2004, MSF « réveille » le monde avec son communiqué de presse sur la crise du Darfour. Le contenu du communiqué de presse décrit une situation considérée comme une crise humanitaire sans précédent. « Soudan-Darfour, suite à la fermeture forcée des camps de Nyala par les autorités soudanaises, MSF s`inquiète du sort des populations », « ces personnes arrivent à Nyala les mains vides, après avoir subi des violences et vu leurs villages et leurs récoltes pillées et brûlées, dans l`espoir de trouver enfin un asile sûr et une aide vitale » ...

MSF va communiquer au monde le premier bilan humanitaire³¹⁴ de la situation dans la sous-région. Le communiqué de l'association va susciter l'émotion et les réactions urgentes. Les besoins de la crise vont augmenter au fur et à mesure que la crise évolue. Qui dit besoin, parle de finances et de matériel utile pour la logistique humanitaire. Au Darfour cette mobilisation a favorisé l'implication des bailleurs de fonds traditionnels à l'instar des Etats-Unis ou encore de l'Union européenne. Pour le cas de l'UE, elle a soutenu la mission d'observation de l'Union Africaine pour son extension dans le conflit. Officiellement, l'instrument financier pour la paix en Afrique a mis une enveloppe de 80 millions d'euro³¹⁵ à la disposition de l'UA.

L'indignation de MSF a aussi pour objectif de susciter la mission et les interventions des autres acteurs humanitaires. Sur le terrain humanitaire, le paradigme partenariat est fondamental pour la réalisation de la mission. L'ampleur de la crise humanitaire implique que les acteurs se mettent ensemble pour apporter une réponse efficace et proportionnée. Au Darfour, MSF est restée leader d'opinion demandant aux acteurs un engagement réel et supplémentaire face à la crise humanitaire. Le 10 mars 2004³¹⁶ dans un communiqué de presse, MSF relève le chao nutritionnel qui menace les populations déplacées. Le

314 Un taux de mortalité de 6 décès pour 10 00 personnes par jour pour les enfants de moins de cinq ans.

315 ECHO est présenté comme le premier bailleur de fonds en matière humanitaire.

316 Médecins Sans Frontières, Communiqué de presse du 10 mars 2004 publié à Paris.

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communiqué du mois d'avril de la même année est une main tendue de l'association aux autres acteurs humanitaires. Elle révèle les problèmes de malnutrition, de santé et la fin du communiqué montre que nous sommes en situation d'urgence, « il y a urgence à agir » lira-t-on.

Dans le rapport moral publié en mai 2004, on enregistre pour cette année, un nombre impressionnant de 90 communiqués de presse.³¹⁷ Cela a un grand impact pour la mobilisation selon Fabrice Weissman³¹⁸ qui indique que la crise du Darfour a mis en scène près de 13 000 travailleurs humanitaires, soit 900 travailleurs internationaux, 80 ONG et 12 agences des Nations-Unies.

Enfin, cette indignation est une forme d'interpellation des auteurs du conflit ou des responsables politiques. En effet, MSF comme tout autre acteur humanitaire a le devoir de communiquer avec les autorités, dans le cas de la guerre civile, entre les acteurs en conflits. L'intérêt de ce rapport vise à légitimer l'intervention et d'envisager les arrêts des conflits. MSF a lors de ces interventions évité la complicité avec les autorités, complicité qui dans le cadre de certains conflits a entraîné le détournement de l'aide ou l'usage stratégique de l'aide. La mission humanitaire demande aux acteurs de rester fidèles à certains principes déontologiques. L'illustration de cette action d'alerte des autorités nationales permet de revenir sur un évènement majeur qu'a connu l'Ethiopie, la famine de 1984. C'est à l'occasion de cet évènement que MSF a su et a pu montrer l'impact de la parole publique malgré l'expulsion de sa branche française. Nous n'allons pas revenir sur le récit complet de la situation mais sur le rôle de taon, acteur humanitaire major qu'a joué MSF.

C'est une situation des années 1983, période marquée par une famine causée par la sécheresse. Les régions du Nord, de l'Est et de l'Ouest du pays sont touchées et le pays est dirigé par le régime autoritaire du colonel Mengistu Haïlé Mariam. Ayant pour objectif d'améliorer le niveau de vie des éthiopiens, le régime institua Relief and rehabilitation commission (RRC)³¹⁹ qui avait l'immense responsabilité de procéder à la coordination et à la

318 F.Weissman, « Point de vue humanitaire sur les réactions internationales à la crise du Darfour », Crash, 2005, p.5. Extrait de son Intervention à l'Université de Columbia dans le cadre de la conférence Sudan Divided, The Challenge to Humanitarian action, 22 février 2007.

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distribution de l'aide nationale et internationale et à la réinstallation des sinistrés dans d'autres zones. En Avril 1984, les volontaires de MSF France s'installent au camp de Korem avec une dizaine de milliers de personnes. Ce camp est non loin de la zone contrôlée par un groupe de rebelles contre le gouvernement en place, le Front de libération tigréen. A cette époque, MSF n'exerce que les activités médicales, les activités nutritionnelles sont menées par Save the Children Fund (SCF).

Les personnes âgées sont affectées doublement par les maladies et la malnutrition. Malgré les soins de santé fournis aux déplacés, les populations sont affamés. Pendant que le régime prépare le dixième anniversaire de la révolution, les statistiques de mortalité et de victimes de famine augmentent mais l'ordre est donné de ne pas voir diffuser ou publier les informations relatives à la situation de la famine. Le témoignage de Brigitte Vasset lors d'une visite du responsable du PAM à Korem traduit le contexte politique : « On avait très peu de visites extérieures mais un représentant du PAM est passé à Korem. Je lui ai dit : « famine » et quinze jours à trois semaines après, Tamrate le représentant de la RRC (Commission éthiopienne de secours et de réhabilitation) me dit : « le grand chef veut te parler, parce que tu as dit famine ». Je descends à Addis et je vois le commissaire de la RRC, qui me dit « il ne faut pas parler de famine. Il n`y a que des problèmes de disette, des problèmes de malnutrition. Attention, il n`y a pas de famine ici ». Il ne faut pas oublier qu`à cette époque, ils préparent le 10e anniversaire de la révolution. »³²⁰.

MSF doit négocier avec les autorités pour pouvoir exercer dans certaines localités. Mais la difficulté survient lorsqu'après la reconnaissance officielle de la famine, le Colonel Mengistu prend la décision du transfert d'un million et demi d'habitants des provinces du Nord vers les terres fertiles du Sud et de l'Ouest.³²¹ Cela a suscité de vives critiques et de nombreuses interrogations sur l'usage de l'aide.

320 B.Vasset, coordinatrice médicale MSF France à Korem d'avril 1984 à mai 1985 puis responsable de programme Ethiopie MSF France, témoignage que nous avons retrouvé dans la publication de MSF , Famine et transferts forcés de populations en Ethiopie 1984-1986, p.15.

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En même temps, la mobilisation de la générosité pour cette cause va connaitre une plus grande ampleur mais la famine continuait de faire des ravages dans les zones qui n'étaient pas contrôlées par le régime. « En octobre 1985, après avoir essuyé plusieurs refus d`autorisation pour l`ouverture d`un centre de nutrition thérapeutique à Kelala, qui aurait évité la mort de plusieurs milliers d`enfants, MSF France dénonce publiquement ce refus, l`utilisation de l`aide internationale pour les transferts forcés de population et les conditions désastreuses dans lesquelles se déroulent ces derniers. »³²². En décembre 1985, MSF-France est expulsée. Son départ a permis de découvrir d'autres dérapages humanitaires. Son activité de dénonciation a des conséquences pour la protection et le témoignage judiciaire.

B. LA DENONCIATION DES PRATIQUES CONTRAIRES A LA DEONTOLOGIE ET AUX NORMES DE L'HUMANITAIRE

322 MSF, Famine et transferts forcés de populations en Ethiopie 1984-1986,op cit , p.8.

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Deux logiques sont analysées : la protection des victimes dans le cadre des situations humanitaires urgentes et le statut de témoin que peut avoir MSF dans une affaire contentieuse. L'action humanitaire dans son principe est un engagement pour l'humanité. A MSF, rester fidèle à la conscience universelle, c'est produire des mécanismes qui garantissent la protection des victimes des situations de belligérance. Les qualificatifs n'ont pas manqué pour identifier l'action humanitaire de protection de l'association : sentinelle des droits de l`homme³²³, un témoin gênant³²⁴, un obstacle à l`arbitraire et la violence³²⁵, trublions et empêcheur de massacre en rond³²⁶...

La protection des victimes entraîne la production des rapports ou toute autre documentation de même nature notamment les photographies et les films des évènements. MSF publie deux formes de rapports : le rapport d'activité et le rapport moral. . Le rapport d'activités est plus technique et fait la promotion des activités de l'organisation pendant une bonne période. Le rapport moral est une lecture éclairée et déontologique de ce qui a été fait et des évènements qui ont déclenchés les crises humanitaires. Le rapport moral est une stratégie d'évaluation de l'action humanitaire et des orientations actuelles et prospectives de l'action humanitaire. « Nous qui sommes médecins, protégeons les hommes »³²⁷ à travers les rapports qui peuvent servir aux organes de promotion et de protection des droits de l'homme. Le cadre juridique de l'action humanitaire, c'est le droit international humanitaire peu respecté par les parties. Le 22 juillet 1992, Rony Brauman³²⁸ interpelle les parlementaires français réunis en congrès sur la tragédie humanitaire qui sévit en Somalie. Il démontre que le droit à la vie et à l'alimentation sont sacrifiés provocant de nombreux décès. MSF, présente dans ce pays aux premiers jours de cette guerre civile demande à la communauté internationale de privilégier

323 Rapport moral 1984 avec la création d'un centre de recherche sur les questions de développement, des droits de l'homme et des droits des peuples.

328 Nous avons retrouvé le discours de l'ancien président de MSF dans Somalie 1991-1993 : guerre civile, alerte à la famine et intervention « militaro-humanitaire » de l`ONU, production de MSF relative à la situation humanitaire de ce pays, p.83.

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l'aide humanitaire au détriment de l'intervention humanitaire. Les somaliens affaiblis, avaient besoin d'être protégés et la parole de MSF a favorisé leur protection.

A la première partie de cette étude, il a été indiqué que l'action humanitaire a des conséquences. Au plan judiciaire notamment, on peut en dégager quelques-unes. MSF dans le cas des guerres et même des catastrophes a souvent joué le rôle de témoin et même de victime. Cette action participe à donner vie à la justice internationale qui n'a jamais fait l'unanimité tant au plan doctrinal qu'au plan politique. Dans un procès, on peut envisager l'hypothèse de témoin ordinaire et de témoin expert. Les deux peuvent intervenir dans le cadre des interrogatoires et des contre-interrogatoires pour l'une ou l'autre des parties. Dans ce sillage, MSF protège les victimes contre leurs bourreaux. Les preuves que MSF détient, peuvent faciliter les phases inquisitoire et accusatoire. En tant que témoin-expert, le mouvement peut aider les victimes à établir leurs certificats médicaux et les aider à formuler les recours devant les tribunaux compétents. « Contrairement au témoin de fait, l`expert examine, constate et apprécie les faits relatifs au litige. Son rôle n`est pas de rapporter ce qu`il a vu ; il doit plutôt guider le Tribunal dans l`appréciation de la preuve par son opinion éclairée »³²⁹.

Pour éviter de fragiliser les engagements humanitaires éventuels, MSF peut décider de porter son témoignage dans la confidentialité même si le principe demeure la présence du témoin dans le prétoire. MSF pour avoir été présent durant tout le conflit a les moyens d'apporter la preuve documentaire par un témoignage vivant et objectif. Le génocide Rwandais et la guerre en Sierra Leone sont deux cas de figure où MSF a joué un rôle important.

Pour le cas du Rwanda, en collaboration avec la Commission internationale des droits de l'homme sur le Rwanda, MSF Belgique portera un témoignage oculaire sur les actes de génocide observés dans la ville de Butare. Une collecte des témoignages des volontaires de toutes les sections MSF fut effectuée pendant les mois d'avril, mai et juin et au final un rapport sur le génocide région par région sera disponible.³³⁰ Ce rapport sera transmis au tribunal d'Arusha en 1999 de façon confidentielle. La coopération avec le tribunal d'Arusha a

329 A-M, La Rosa, Juridictions pénales internationales, Graduate instute publications, p.262.

330 F. Bouchet-Saulnier et F. Dubuet, témoignage judiciaire ou humanitaire ? Historique des interactions

entre msf et les procédures d`enquêtes et de poursuites judiciaires, avril 2007 - CRASH/Fondation - Médecins Sans Frontières, p.23.

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permis de déterminer le nombre de victime et les conditions dans lesquelles était tuée la population.

Dans la période 1997 à 2002, MSF mit à la disposition de la Cour spéciale pour la Sierra Leone un témoignage et une documentation relativement à la violence subie par les populations. Elle établit les certificats médicaux pour les victimes qui envisageaient de porter des recours devant la Cour. Au-delà de ces interventions dans l'urgence, MSF intervient dans bon nombre de sociétés africaines où les besoins de santé, de nutrition et de vie demeurent un dilemme humanitaire.

SECTION II : L'APPROCHE DEVELOPPEMENTALISTE ET

L'OEUVRE SOCIALE DE MSF EN AFRIQUE

« L'humanitaire indépendant est un combat quotidien pour porter assistance »³³¹ dans les sociétés qui en ont le plus besoin. Cette deuxième grande étape permet de montrer que MSF s'intéresse aux activités humanitaires qui dépassent le sporadique et peuvent s'inscrire dans une période assez longue. C'est l'action humanitaire au-delà de l'urgence qualifiée d'approche développementaliste de l'humanitaire. Par conséquent, son activité humanitaire se prolonge dans des oeuvres sociales en faveur des démunis et des pauvres.

PARAGRAPHE I : L'HUMANITAIRE AUDE-LA DE L'URGENCE

La différence entre l'humanitaire et le développement est bien établie. Il arrive des situations où les activités humanitaires se prolongent malgré le retour à la stabilité, il est de nombreuses initiatives qui permettent aux régions de conflit ou de catastrophes de se réhabiliter. Cette réhabilitation est une forme de développement mais dans un souci humanitaire. Pour éclairer notre analyse, les actions de MSF participent à la viabilisation des camps de réfugiés. Les réfugiés , après les conflits, doivent retrouver la vie. En outre, l'organisation apporte une assistance pour soutenir les autres victimes des conflits et les sinistrés.

A. LA PARTICIPATION A LA VIABILISATION DES CAMPS DES REFUGIES

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Les camps des réfugiés constituent les nouvelles habitations provisoires et précaires qui accueillent, dans bien des cas, des milliers d'individus. Cela augmente nécessairement les risques de vulnérabilité d'une partie importante de cette population souvent composée, en majorité de femmes et d'enfants. C'est ce qui explique l'appui qu'apporte MSF dans la couverture sanitaire, l'assainissement et l'hygiène ... Quelques critiques peuvent être formulées contre l'ampleur des engagements de l'association dans la vie de la communauté des réfugiés.

1. La couverture sanitaire

Le domaine de la santé est l'activité qui ne peut faire office de parent pauvre à MSF. L'organisation humanitaire offre les mesures pour garantir l'état de santé des réfugiés³³². Elle met en place un programme de prévention à travers les vaccinations et un programme de prise en charge des réfugiés malades matérialisé avec la consultation régulière et la fourniture des autres soins de santé. A ce tableau, s'ajoute l'installation des dispensaires dans les camps de réfugiés ou près de ces camps en coopération avec les autorités locales.

Deux cas de figures sont ici évoqués : ,un cas dans les années 1994-1995 et un autre récent, en 2014. Pour le premier cas de figure, il s'agit des réfugiés rwandais venus de l'Est du pays installés en Tanzanie dans le camp de Boneco³³³ et d'autres vont trouver refuge en RDC dans la zone de Goma, au camp Bukavu provenant du Sud-ouest du Rwanda.³³⁴ Les statistiques font état d'une présence massive de rwandais³³⁵ de part et d'autres et des vulnérabilités sanitaires observées dans la zone. Au plan sanitaire, MSF à Beneco a procédé à la

332 Pour MSF, l'expérience des camps de déplacés commence des années 1980 en Ethiopie et 1990, MSF commence a gagné une autonomie dans la prise en charge des réfugiés.

333 Informations suffisamment détaillées dans une publication de MSF intitulée : Camps de réfugiés Rwandais Zaïre-Tanzanie 1994-1995, Médecins Sans Frontières. avril 2004 / avril 2014, p.11.

334 Informations suffisamment détaillées dans une publication de MSF intitulée : Camps de réfugiés Rwandais Zaïre-Tanzanie 1994-1995, op cit.p.26

335 Fin avril, environ 250 000 d'entre eux atteignent la frontière tanzanienne (Fuyant les massacres qui se poursuivent, deux cent cinquante mille Rwandais ont trouvé refuge en Tanzanie » Jean Hélène, Le Monde (France), 4 mai 1994). Environ 200 000 réfugiés rwandais sont arrivés à Bukavu (Le HCR coordonne un pont aérien humanitaire massif vers Goma » Communiqué du HCR, 20 juillet 1994). Ces statistiques ont été reprises par la publication officielle de MSF.

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construction des dispensaires médicaux et au lancement de la campagne de vaccination contre la rougeole.

A Bukuvu, l'avion de MSF qui part de la Belgique tous les deux jours fournit des milliers de perfusions pour traiter les cas de malades atteints de choléra. Cette couverture sanitaire à Bukuvu se fera dans la douleur due à l'absence de moyens, des conditions de sécurité et la masse criarde de demandeurs de soins. En 2014, à Est du Cameroun, MSF assure pour les réfugiés centrafricains une surveillance prospective³³⁶ de la mortalité et de la malnutrition dans les zones de Garoua Boulai, Gbiti, les camps de Gado Badzere et Gbiti. D'après l'étude réalisée³³⁷ par MSF en collaboration avec l'OMS dans cette partie Est du pays, près de 85.000 réfugiés centrafricains se sont exilés. Deux projets à vocation sanitaire ont été mis sur pied par MSF. Le premier qui a consisté à l'ouverture du centre opérationnel genevois de MSF (MSF-OCG) qui a fourni les premiers soins aux réfugiés dans la zone de Garoua Boulai et le second projet à l'installation des centres de santé dans le camp de Gbiti. Des cas de rougeole ont été signalés dans les camps et MSF a permis de mettre fin à cette épidémie croissante dans la zone. «La prévalence de la malnutrition aigüe sur le camp de Gado Badzere est très élevée et reste relativement stable sur les trois semaines. On note qu`un seul cas avec des oedèmes a été notifié »³³⁸. Cette couverture sanitaire additionnée à une bonne politique d'assainissement et d'hygiène permet une meilleure prise en charge de la communauté des réfugiés.

2. L'ASSAINISSEMENT ET L'HYGIENE DU CAMP DES REFUGIES

L`eau humanitaire, est-elle potable ?³³⁹, interrogation pratique ouverte par les hommes de MSF qui ont voulu dans leur publication affirmer qu'au-delà des soins médicaux, MSF offre aussi une autre activité opérationnelle à savoir l'eau, hygiène et assainissement ( EHA). L'approvisionnement des populations en eau est fondamental dans un camp de réfugiés. L'eau

337 E. Gignoux et M.Ginsbourger, Surveillance prospective de la mortalité et de la malnutrition en

339 J-H Bradol, F.diaz, J.leglise ET M.le Pape, « L'eau humanitaire, est-elle potable ? », CRASH/Fondation - Médecins Sans Frontières , Juin 2011.

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doit être de bonne qualité et en grande quantité. MSF rappelle la nécessité de rester fidèle aux normes de l'eau humanitaire. La norme humanitaire « recommande l`utilisation préférentielle d`une ressource souterraine non polluée et protégée est souvent difficile à respecter. Lorsque cela est possible, l`eau n`a pas toujours la qualité espérée. Des pollutions fécales, notamment dans les zones karstiques ou bien en cas de puits ou de forages mal protégés, et des contaminations physicochimiques, naturelles ou non, sont parfois retrouvées » ³⁴⁰. Sur le terrain, elle doit être désinfectée, clarifiée, irradiée et ultrafiltrée. L'hygiène et l'assainissement sont liés à la question des latrines. Dans le cadre d'une étude liée à l'épidémie de choléra³⁴¹, MSF recommande en moyenne 20 personnes par latrines avec un idéal pour chaque famille, une latrine. La question des déchets doit également être gérée avec une certaine organisation et une efficacité. Le rapport d'activités de 2010 fait état d'une distribution du matériel d'hygiène et de salubrité notamment les savons, les brosses à dents, matériel de nettoyage et d'hygiène... Au Darfour occidental, en 2007, MSF a amélioré les conditions de vie de près de 20 000 réfugiés en leur fournissant de l'eau potable et la nourriture³⁴². Dans le cas des réfugiés centrafricains de l'Est Cameroun, MSF y a construit³⁴³ des douches et des latrines et a pris en charge l'approvisionnement en eau potable.

Au demeurant, on se demande quelle est la politique de MSF pour ce qui est des réfugiés pouvant être qualifiés soit de réfugiés urbains, soit de réfugiés ruraux. Que prévoit MSF pour ces réfugiés sortis des camps et qui veulent à nouveau construire leur vie ? Si le mouvement a pris depuis les années 1980, l'initiative de s'intéresser aux réfugiés, dans le cadre de l'humanitaire en permanence, ils devraient s'intéresser aux réfugiés dans une circonstance ordinaire. Dans un travail de recherche universitaire³⁴⁴, se trouve développée la situation des réfugiés libériens. Installés dans les villes Accra et à Conakry, ils réfugiés cherchent les moyens de subsidence. L'amélioration de leurs conditions de vie dépend de leurs capacités

341 Brown et autres , Management of Cholera Epidemics in a Refugee Camp, 2002, 95 (5):351-4notBull Soc Pathol Exot, p.352.

344 H - S-Loriere, Conditions de vie et projets migratoires des refugies libériens à Conakry (Guinée) et Accra (Ghana). Géographie. Thèse, Université de de Poitiers, 2013. Français.

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personnelles, professionnelles et linguistiques. On a pu lire³⁴⁵ qu'à Conakry et à Accra malgré les discriminations, ils cherchent les stratégies de survie et ce volet que nous appelons l'humanitaire en permanence qui concerne aussi les autres victimes de l'urgence doivent reconstruire leur une vie aux lendemains d'une crise.

B. L'ACCOMPAGNEMENT PSYCHOLOGIQUE REGULIER DES VICTIMES

L'accompagnement psychologique est un aspect important de l'action humanitaire de MSF. Il s'agit d'offrir les soins psychiques aux personnes souffrantes de traumatismes liés soit à un conflit, soit aux violences sexuelles. A l'issue d'une catastrophe ou d'un cas de violence, la victime est affaiblie et peut éventuellement ressentir les troubles psycho-traumatiques, les troubles anxieux, les troubles dépressifs etc. Par l'oreille et la parole de ses spécialistes, MSF favorise un traitement progressif qui permettra d'identifier les symptômes, les troubles silencieux ou agressifs et de conduire le patient vers une sortie mentale du choc. Dans la logique de la violence sexuelle, on compte les viols, l'abus sexuel et l'exploitation sexuelle. Selon MSF, « Dans des contextes stables, la violence sexuelle apparaît également comme un problème grave, dévastant la santé et des vies »³⁴⁶. Il faut accompagner les plus vulnérables notamment les enfants, les femmes, les personnes âgées... MSF déclare avoir pris en charge 12 791 victimes de violence sexuelle à travers 127 projets dans le monde en 2007. Au Burundi, l'association a créé une clinique appelée Seruka, en 2003 qui a accueilli près de 7000 victimes de violence sexuelle. Les sinistrés des catastrophes naturelles bénéficient du même accompagnement. C'est une expression de l'action humanitaire d'affection en réaction aux chocs subis par les victimes. MSF ne s'arrête pas à ce niveau et propose une politique d'accès facile aux soins pour les populations d'Afrique subsaharienne.

PARAGRAPHE II : L'OEUVRE DE MSF DANS LES SOCIETES

D'AFRIQUE SUBSAHERIENNE

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Au-delà de l'urgence, dans la durabilité, MSF s'attèle à accompagner les Etats africains dans l'amélioration de leur système de santé affaibli et peu efficace. Cela constitue pour nous un prolongement de l'action humanitaire dans la mesure où seront visibles les programmes pour l'amélioration du système de santé en Afrique et les politiques sanitaires pour les populations démunies.

A. L'APPUI A L'AMELIORATION DU SYSTEME DE SANTE

NATIONALE

L'une des défaillances majeures du système de santé africain, c'est le défaut de matériel médical, adapté et standardisé et le faible financement de certains programmes sanitaires. MSF apporte son soutien en matériel sanitaire et dans le traitement du VIH-Sida.

1. LA DISTRIBUTION DU MATERIEL SANITAIRE EN ZONE

L'appui sanitaire que MSF offre aux Etas africains, élargit sa politique humanitaire dans la mesure où le principe retenu voudrait que l'accès aux soins soit un droit fondamental pour tous. MSF accompagne ses partenaires africains à la promotion de la santé. Son action permet d'apporter des solutions au manque d'infrastructures, à l'accès inégal aux soins de santé, aux coûts élevés des soins, aux larges distances entre les centres de santé et les habitations... L'action doit tenir compte des circonstances dans lesquelles la santé est offerte. Dans le contexte urbain, MSF favorise la qualité des systèmes, la réduction considérable des coûts, la vulgarisation de la politique sanitaire et la disponibilité des services sanitaires dans les hôpitaux. Jean Hervé Bradol dans son rapport moral de la période 2002 à 2003 rapportait la pertinence du projet de Tananarive³⁴⁷ en 2002. Ledit projet favorisait un programme d'offre de soins aux enfants vivant dans des situations précaires dans cette ville de Madagascar. On retrouvait ces enfants dans les rues souffrant d'infections de la peau, de la malnutrition, de paludisme... Le rapport d'activités de 2010, le cas Burundais est illustratif de sa politique humanitaire dans les villes africaines. Au centre du Burundi, dans la ville de Gitega, où

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l'association a ouvert un centre qui offrait les soins gratuits 24 h sur 24 h pour le traitement Les fistules obstétriques, lésions qui affectent le canal utérin.³⁴⁸

Dans les zones rurales, MSF aide les autorités administratives à sensibiliser les populations locales dans la lutte contre de nombreuses maladies et dans la pratique des règles élémentaires d'hygiène. Les soins sont aussi offerts gratuitement et les infrastructures sanitaires plus proches des populations locales. L'enjeu est double faire comprendre et soigner. MSF-Belgique, dans sa coopération avec d'autres acteurs humanitaires réunis dans le cadre de la plateforme ALIMA ( THE ALLIANCE FOR INTERNATIONAL MEDICAL ACTION ), a participé à la réalisation du projet Kangaba³⁴⁹, dans la région de Koulikoro au Mali. Ce projet visait une prise en charge médicale et hospitalière pédiatrique (de 18 377 enfants de moins de 5ans) et obstétrique (Cibles de 5 350 femmes enceintes) gratuite et de qualité. Ce projet réalisé en 2011 a permis d'améliorer la couverture des programmes de lutte contre le paludisme et de la nutrition. En Ethiopie, le mouvement a offert en 2010 un centre de santé dans la ville d'East Imey avec une gamme complète de services et des lits d'hospitalisation. Au Lesotho, la même période, « MSF a construit un nouvel hôpital (James N. Davies Junior Memorial Hospital) à Jacob Town Neezoe à Paynesville, et en a fait don au ministère de la Santé, afin que la fermeture des hôpitaux Benson et de Bushrod Island ne crée pas de lacunes majeures dans l`offre de soins. MSF a aussi ajouté 80 lits au service de pédiatrie et intensifié son aide aux services pédiatriques de l`hôpital Rédemption, le principal hôpital public de Monrovia »³⁵⁰. Outre ce volet d'appui, MSF s'est aussi investi sur le plan de la gratuité des médicaments.

2. LA DISTRIBUTION GRATUITE DES MEDICAMENTS

L'efficacité d'un système de santé est tributaire de la disponibilité des médicaments. Cependant, le système sanitaire africain montre de nombreuses défaillances dans ce volet. Lors de la célébration des 40 ans de MSF, le constat de l'absence de médicaments chez les patients du Sud était déjà considéré comme une fatalité. Le concept gratuité signifie qu'il existe des politiques d'exonération des taux exorbitants pour certains médicaments ou des

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politiques de distribution proportionnée des médicaments selon le seuil de pauvreté et la virulence des maladies. Le programme campagne d'accès aux médicaments essentiels a animé de nombreux projets. Deux types de médicaments sont proposés les médicaments génériques et les médicaments essentiels.³⁵¹ Ce programme bénéficie aux couches les plus vulnérables de la société. Or, en Afrique Subsahérienne, selon une source officielle, 270 000 personnes³⁵² n'ont pas accès aux médicaments essentiels, soit 55 % de la population.

MSF a pu aussi participer à la coopération pour le financement des médicaments gratuits dans les pays d'Afrique. Ce fut le cas en République du Congo, en 2007, où le partenariat OMS, UNICEF et MSF a renforcé le financement et l'approvisionnement des médicaments antipaludiques et des médicaments antituberculeux pour la campagne d'accès aux médicaments essentiels du pays. Le Congo a ainsi réalisé une liste officielle des médicaments essentiels et des mécanismes des dons de médicaments. En général MSF, met à la disposition des populations malades des médicaments gratuitement et les moustiquaires efficaces pour la prévention du paludisme et les autres maladies parasitaires. Un tel engagement humanitaire a été visible à Madagascar en 2013 dans la région d'Androy où l'association a amélioré la fourniture des soins.³⁵³ L'action humanitaire constante de l'association est plus affirmée sur les programmes de pathologies les plus menaçantes et les plus récurrentes.

B. LA REALISATION DES POLITIQUES SANITAIRES DE LUTTE CONTRE LES EPIDEMIES MAJEURES

Aucune maladie n'est plus importante qu'une autre mais dans le jargon médical, on entend souvent parler des maladies rares, des maladies chroniques et des maladies épidémiques. L'emphase est mise sur les maladies les plus dangereuses par rapport au nombre de victimes enregistrées. Compte tenu du nombre élevé de maladies dangereuses en Afrique, le rôle de MSF devient essentiel dans la lutte contre certaines pandémies telles que le SIDA et des épidémies majoritaires.

351 Un médicament est considéré comme générique lorsqu'il est fabriqué sans brevet de la société d'origine mais garde toute son efficacité, son dosage, sa force et sa sécurité. Son coût est abordable voire réduit. Et un médicament est dit essentiel lorsqu'il répond aux besoins de santé de la majorité de la population.

352 Manuel d'AEFJN, Volume 2 - Chapitre 4 - Accès à des médicaments de qualité, p.8.

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1. L'APPORT EN MATIERE DE CAMPAGNES DE VACCINATION ET DE LUTTE CONTRE LES EPIDEMIES MAJEURES

Sur la base des rapports de MSF disponibles, trois grandes épidémies sont considérées. Le Choléra et la rougeole qui seront analysés cumulativement et l'épidémie Ebola analysée particulièrement.

Selon MSF, « Le choléra est une infection gastro-intestinale aiguë causée par la bactérie Vibrio cholerae et transmise par de l`eau ou de la nourriture contaminées. Il se propage rapidement et peut déclencher de grandes épidémies. »³⁵⁴. Rares sont les pays d'Afrique qui n'ont pas été affaiblis par cette épidémie. On constate que les plus touchées par le phénomène sont les populations des zones reculées, enclavées et des zones rurales. MSF comme d'autres acteurs humanitaires est aux aguets de cette menace. La Guinée Conakry a été secouée par l'épidémie de Choléra. Dans les quartiers de Ratoma et Matoto , MSF a traité près de 4000 patients³⁵⁵. En 2010, l'extrême-Nord du Cameroun également subie une épidémie de choléra au cours de laquelle MSF a apporté un appui sanitaire et médical aux autorités à Maroua et à Mokolo et Kolofada et Mogodo, elle a offert son savoir-faire dans la prise en charge des patients. Cette prise en charge des victimes de cette infection intestinale a été visible au Malawi.

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Des équipes MSF transportent des vaccins anti choléra pour vacciner la population du lac Chilwa, au Malawi. 2016 (c) Aurélie Baumel/MSF

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La rougeole, maladie virale très contagieuse, menace les enfants et les jeunes. Ses conséquences ont toujours défrayé la chronique et les Etats africains ont souvent bénéficié des gestes de secours des humanitaires. L'humanitaire de MSF a pris des initiatives pour enrayer le phénomène. En Somalie, en 2010, MSF a procédé à une couverture vaccinale contre la rougeole pour les enfants de moins de 15 ans et les adultes âgés entre 15 et 49 ans. Au Katanga en 2015, près de 300.000 enfants ont été vaccinés et 20.000 hospitalisés pour la cause de la rougeole.³⁵⁶

L'épidémie qui a récemment secoué l'Afrique, c'est l'épidémie du virus Ebola. La fièvre a menacé près de huit pays : Guinée, Sierra Leone, Libéria, Nigeria, Mali, Sénégal, RDC, Ouganda. L'ONG médicale propose six mesures à suivre pour contrôler le virus : l'isolement des patients dans les centres de prise en charge d'Ebola, la promotion des inhumations sécurisées, la sensibilisation des communautés pour empêcher la propagation, la surveillance active et précise de la maladie, le traçage méticuleux et actif des personnes à risque et l'accès facile aux soins médicaux pour les éventuels patients.³⁵⁷ A l'actif de MSF, figurent quelques actions telles que la distribution des médicaments contre le paludisme à Monrovia (650 .000 personnes) et à Freetown (1,8 million de personnes), la construction d'un centre de maternité spécialisé dans l'accueil des femmes enceintes souffrant d'Ebola, des essais cliniques du vaccin et du traitement de la maladie en pleine épidémie³⁵⁸. MSF ne manquera pas très tôt de souligner que cette épidémie est hors contrôle. Le bilan est assez critique avec près de 24.000 personnes infectées et 10.000 décès enregistrés.³⁵⁹ La prochaine carte donne à avoir l'organisation géographique de l'intervention de MSF en matière de lutte contre Ebola.

356 MSF, « République démocratique du Congo (RDC) : l'épidémie de rougeole s'aggrave au Katanga », Infos, journal des donateurs, N° 181 - décembre 2015,p.6.

357 Samuel HANRYON, « Poussés au-delà de nos limites une année de lutte contre la plus vaste épidémie d'Ebola de l'Histoire », 2014, p.12.

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Et l'action sanitaire de l'association s'est heurtée à la complexité et à la violence de l'épidémie. Le virus sans-frontière a menacé MSF. Madame Lindus Hurum, coordinatrice des opérations de l'association à Monrovia en 2014 va conclure : « Je crois qu`il est juste de dire que nous sommes des Médecins Sans Frontières, mais pas des médecins sans limites. Nos limites, nous les avons atteintes et c`est très frustrant »³⁶⁰. L'épidémie Ebola a secoué l'Afrique pendant une période mais le SIDA le fait depuis des décennies.

2. L'APPORT DANS LA LUTTE CONTRE LE SIDA

Dans son action contre le SIDA, la politique humanitaire distingue deux cas de figures : le cas des personnes saines mais exposés à la maladie et le cas des personnes malades et qui n'ont pas de moyens de se prendre en charge. Dans le premier cas de figure, MSF aide les Etats dans les stratégies de sensibilisation et l'organisation professionnelle des dépistages du VIH-SIDA. Pour la sensibilisation, elle peut accompagner, organiser ou financer les différentes campagnes de sensibilisation sur ce syndrome. Et l'association n'arrête pas son action dans les zones urbaines mais se déploie dans les zones rurales et reculées. Certains pays manquent de professionnalisme dans l'organisation des campagnes de dépistage. MSF propose aux pays en développement quatre mesures capitales pour améliorer le traitement du VIH-SIDA et

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réduire la transmission en référence avec les grandes orientations de l'OMS³⁶¹. Ont été retenues comme mesures : le traitement plus précoce, le suivi de la charge virale, le renforcement de l'appui à l'observance et le recours accru à l'approche de soins communautaires. L'objectif de ces mesures est d'atteindre plus de gens éligibles au traitement. L'insistance sera mise sur le suivi de la charge virale et l'approche des soins communautaires qui ont permis de réaliser les programmes de traitement antirétroviral.

Le suivi de la charge virale a pour objectif de suivre le traitement en mesurant le nombre de virus dans le sang pour vérifier l'efficacité du traitement ARV. Si le patient suit bien le traitement, la surveillance de la charge virale montre que le virus a atteint un stade indétectable, le contraire signifie que le traitement n'est pas bien suivi ou qu'il est inefficace.³⁶² L'illustration de cette mesure est le projet SAMBA (Simple Amplification Based Assay ), programme SIDA de Chiradzulu au Malawi. Ce programme mis en oeuvre à long terme est un outil de mesure rapide de la charge virale nécessaire pour vérifier l'efficacité du traitement ARV. Ce programme a permis la prise en charge des patients par MSF dans onze centres de santé de Chiradzulu. L'approche des soins communautaires est une technique qui favorise la responsabilisation et l'autonomie des patients. Elle permet d'aller à la rencontre des patients dans leurs lieux de vie et non se limiter à leur venue dans les centres de santé. Cette innovation a porté de nombreux fruits dans les pays africains. « En Ouganda, le taux de survie et de suppression virologique dans un projet de fourniture d`ARV à domicile est comparable à celui des modèles traditionnels31. Au Kenya, dans la Province occidentale, des personnes vivant avec le VIH [PVVIH] ont été formées et rémunérées pour assurer les soins de suivi et la fourniture d`ARV à d`autres PVVIH cliniquement stables de leur communauté » 363.

361 Quelques recommandations formulées par OMS en 2013 : Mettre les personnes séropositives sous traitement antirétroviral plus tôt (à partir d'un taux de CD4 de 500 par ul); Mettre en oeuvre des protocoles plus efficaces pour prévenir la transmission du VIH (PTME) de la mère à l'enfant (ARV à vie pour toutes les femmes enceintes VIH-positives); Fournir un traitement immédiat pour tous les enfants séropositifs de moins de cinq ans; Etendre le test de la charge virale, la référence dans le suivi du traitement du VIH ...

362 Les détails de cette mesure sont donnés par MSF, document d'information, objectif VIH indétectable, www.msfaccess.org, p.3-4.

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Mener cette étude sur la pratique humanitaire par l'entremise de MSF dans le contexte de l'Afrique subsaharienne, conduit au fait que l'association a une grande tendance à l'humanitaire en urgence mais sa présence est également visible dans des activités sociales. On se rend bien compte que l'humanitaire, dans ces deux tendances ne déroge pas au colloque singulier entre l'être souffrant et l'être aidant, principe affirmé par Le groupe URD³⁶⁴. Ce même groupe propose une réflexion enrichissante : L`être humain n`est ni un ventre à remplir, ni une tête à abriter, ni une bouche à humidifier, ni un corps à habiller. C`est à la fois tout cela, et beaucoup plus encore. ». Cette logique est proche du crédo de la confédération Caritas présente partout dans le monde et en Afrique.

364 Urgence, réhabilitation et développement, « les dangers et les incohérences des approches normatives de l'aide humanitaire, synthèse des réflexions soulevées », inédit, p.2.

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CHAPITRE QUATRE : CARITAS, UN OASIS HUMANITAIRE EN AFRIQUE SUBSAHERIENNE

Etre un acteur humanitaire, c'est servir l'humanité et poser des actes dignes pour l'intérêt universel. L'église catholique romaine n'est pas étrangère aux questions internationales en général et à l'action humanitaire en particulier. Son engagement humanitaire est le reflet de sa doctrine sociale et des valeurs évangéliques universelles. Fruit de la pensée de l'église, la doctrine sociale permet à l'église de Rome de participer « aux joies et aux espoirs, aux angoisses et aux tristesses des hommes, et est solidaire de tout homme et de toute femme, en tout lieu et en tout temps »³⁶⁵ . L'église s'ouvre au monde et s'intéresse aux questions d'éducation, de développement, de justice et du bien-être des hommes. Parmi les valeurs évangéliques proches des principes de l'action humanitaire, on peut citer la dignité de la personne, la charité sociale, la civilisation de l'amour et l'humanisme solidaire et intégral. La Caritas Internationalis est une confédération mondiale de 164 organisations catholiques reparties à travers le monde et coordonnées par un secrétariat général situé au Vatican. Plusieurs valeurs orientent « l'engagement et la générosité sans bornes »³⁶⁶ de Caritas internationale, l'une d'elle c'est le partenariat à l'intérieur et à l'extérieur de la confédération. Dans l'Afrique subsaharienne, le réseau Caritas tourne comprend 46 organisations Caritas nationales. Ces organisations nationales connaissent des regroupements par sous-région : Caritas Zone ACEAC, Caritas Zone ACERAC, Caritas Zone AECAWA, Caritas Zone AMECEA, Caritas Zone CERAO³⁶⁷. De nombreux pays de l'Afrique subsaharienne sont membres de ces groupements.

A l'extérieur, elle agit en synergie avec les Etats et les autres acteurs humanitaires internationaux ou nationaux. A l'intérieur, il existe une forte collaboration entre les

ACERAC = Association des Conférences Episcopales de la Région de l'Afrique Centrale. AECAWA = Association of Episcopal Conferences of Anglophone Western Africa. AMECEA = Association of Members of the Episcopal Conferences of Eastern Africa. CERAO = Conférence Episcopale de la Région d'Afrique de l'Ouest .

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organisations des Caritas de chaque continent du monde. Dans notre contexte d'étude, on traitera de l'engagement social des Caritas d'Afrique subsaharienne qui garde une interconnexion entre les Caritas d'Europe et d'Amérique qui représentent pour elles une opportunité de financement des oeuvres sociales, des projets et des interventions urgentes. L'image utilisée par le Président de la Caritas internationale symbolise ce partenariat intérieur : « Un train a beaucoup de wagons et Caritas a 164 membres. Caritas est semblable à un long train de charité et d`amour ».³⁶⁸. Dans cette étude, on constate la présence de Caritas dans le quotidien des sociétés africaines au côté des pauvres, des démunis, bref des personnes vulnérables (Section I). Son action n'est pas achevée à ce niveau, elle continue dans le cadre de l'assistance humanitaire pendant et après les catastrophes et les crises humanitaires (Section II). L'intérêt sera moins porté vers les missions directement liées à la prévention de la paix, à la réconciliation et à la justice.

SECTION I : L'AFFIRMATION D'UNE SOLIDARITE QUOTIDIENNE EN FAVEUR DES PAUVRES

Selon le Pape François : « Quand la vie intérieure se ferme sur ses propres intérêts, il n`y a plus de place pour les autres, les pauvres n`entrent plus, on n`écoute plus la voix de Dieu »³⁶⁹. Le style spirituel du souverain pontife indique la volonté et la nécessité à servir les pauvres. C'est la solidarité qui pousse la Confédération Caritas à servir les pauvres afin de leur rendre leur dignité de personne. C'est à travers les opérations humanitaires quotidiennes que l'on ressent la présence et les gestes de solidarité de Caritas. Caritas en Afrique est solidaire vis-à-vis des familles vulnérables selon les situations et apporte un appui concret dans domaines tels que l'alimentation et la scolarisation.

PARAGRAPHE I : LES OPERATIONS HUMANITAIRES POUR LES FAMILLES VULNERABLES

C'est dans la famille que l'homme naît, grandit et meurt. Les efforts de solidarité de Caritas concourent à l'épanouissement de la famille humaine. Même ceux des enfants qui n'ont pas de famille biologique méritent d'avoir une cellule qui les accueille, les éduque et les

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accompagne dans la joie d'une vie heureuse. Selon La Commission Européenne , sont considérées comme les personnes démunies « les personnes physiques, individus ou familles ou groupements composés de ces personnes, dont la situation de dépendance sociale et financière est constatée ou reconnue sur la base de critères d`éligibilité adoptés par les autorités compétentes, ou est jugée par rapport aux critères utilisés par les organisations caritatives et approuvés par les autorités compétentes » 370.

370 Le règlement de la Commission européenne n°807/2010 , dit PEAD (Programme Européen d'Aide aux plus Démunis).

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Les personnes vulnérables verront se manifester pour elles une compassion concrète et un appui leur permettant de se développer et de ne plus être dépendantes. L'originalité de l'engagement humanitaire de Caritas n'est ni de toujours donner aux démunis, ni leur apprendre à tendre les mains tout le temps. Donner mais pour se développer et prendre son destin en main. Ces opérations humanitaires visent à l'amélioration des situations sociales des familles et l'accompagnement des différents membres des familles.

A. L'AMELIORATION DE LEURS SITUATIONS SOCIALES

Aux termes de la lecture des dispositions du Statut de la Caritas internationale, il est clairement indiqué que la confédération caritative a plusieurs missions, la première étant d'aider « les plus pauvres et les plus nécessiteux »³⁷¹ dans la promotion de la charité et considérant que la charité est une tâche de l'Eglise.³⁷² Dans cette dynamique, Caritas manifeste une solidarité constante pour les démunis et apporte son appui aux petites entreprises économiques familiales.

1. LE DEVOIR DE SOLIDARITE PERMANENTE ENVERS LES

L'action humanitaire quotidienne de Caritas évolue sur la conviction que la solidarité représente une valeur fondamentale avec laquelle chacun devra agir pour le bien-être de l'autre. « L`humanité avance sur le chemin de l'histoire. Héritiers des générations passées et bénéficiaires du travail de nos contemporains, nous avons des obligations envers tous et nous ne pouvons-nous désintéresser de ceux qui viendront agrandir après nous le cercle de la famille humaine. La solidarité universelle qui est un fait, et un bénéfice pour nous, est aussi un devoir. » 373 . On est conscient que dans les sociétés africaines, nombreuses sont les personnes qui continuent de vivre dans la précarité et la pauvreté et

372 Benedictus XVI , Lettre encyclique Deus Caritas est, publiée à Rome, près de Saint-Pierre, le 25 décembre 2005, p .14.

373 Populorum Progressio ,lettre encyclique de sa sainteté le Pape Paul VI sur le développement des peuples, du Vatican, à la fête de Pâques 26 mars 1967, p.5.

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qui perdent le goût de la vie et sombrent dans le désespoir. Caritas, organe de la pastorale sociale se met au service des pauvres. Il est impératif de sauver des vies, de transformer les vies, de reconstruire les communautés et de combattre la pauvreté déshumanisante. L'exercice de la charité passe par le service de tous ceux qui sont dans le besoin mais avec une priorité pour les plus pauvres. « Comment se fait-il que lorsqu`un SDF âgé meurt de froid cela ne soit pas une nouvelle, et qu`en revanche une baisse de deux points sur le marché boursier le soit ? »³⁷⁴ se demande le Pape François.

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Manifester cette solidarité implique pour le service catholique de favoriser pour les démunis l'accès aux services fondamentaux pour tout homme à savoir l'éducation, la santé, le travail décent, la protection sociale... Relativement à la protection sociale entendue comme l'ensemble des stratégies et des mécanismes pensés pour venir en aide aux populations les plus vulnérables de la société. En Afrique, ce n'est pas une formule commune à tous les Etats mais Caritas promeut la protection sociale et en devient avec d'autres organismes un partenaire important de ladite protection. L'illustration portera sur les cas congolais et camerounais. En RDC, de nombreuses initiatives sont enregistrées par les Caritas diocésaines qui s'engagent au côté de l'Etat à l'accès aux programmes sociaux prévus pour les couches les plus vulnérables de la société.

Sur les informations recueillies, il importe de revenir sur le projet « Valorisation de la scolarisation de la Fille « vas y fille »³⁷⁵. Exemple d'activité de protection sociale, ce projet est réalisé par Caritas-Développement de Mbandaka dans le Nord de la RDC. Le projet a pour objectif à terme d'assurer la scolarisation au cycle primaire de 56.000 filles marginalisées avec pour ambition d'améliorer leur apprentissage d'ici 2020 à 2022. De façon spécifique, le projet concourt à supporter les charges d'éducation des jeunes filles pour leur famille et améliorer la qualité de l'enseignement qui leur est proposé avec une augmentation du nombre d'heures de cours de soutien en français et en mathématiques. Au Cameroun, on enregistre une forte mobilisation pour les activités caritatives en faveur des enfants et des femmes détenus dans la prison centrale de Kondengui et à la prison de Mfou .

La Caritas diocésaine y a distribuée un matériel assez complet constitué des produits de subsidence, des médicaments, des vêtements, un matériel de travail... La Caritas en Afrique subsaharienne, propose les services fondamentaux que les couches vulnérables ne parviennent pas à acquérir par leur propre moyen. Elle est pour eux une main tendue à ce qui parait impossible et incroyable à leurs yeux vu leur situation. L'action de la

375 Nous avons trouvé le contenu du projet dans le Magazine d'informations et d'analyse du réseau national de Caritas Congo Asbl : Lève-toi et marche n°032 février - avril 2014 avec titre de l'article : « parlons protection sociale », p13.

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Confédération en Afrique va plus loin, ce slogan est assez édifiant : « Caritas travaille

pour transformer les structures économiques et sociales », la famille en est un exemple.

2. L'APPUI AUX ENTREPRISES ECONOMIQUES FAMILIALES

On constate la pauvreté ou la vulnérabilité d'une famille africaine par le manque de revenus ou de finances dans ladite famille. Avec cela, la souffrance s'installe. Or, quand « Caritas rencontre la souffrance, elle répond avec amour ». Répondre amène à apporter un soutien à l'entreprise familiale. En considérant que la société traditionnelle soit

l'ancêtre de la société moderne³⁷⁶ , l'entreprise familiale a précédé l'entreprise
moderne. Elle est née avec l'apparition des propriétés privées, on observait une organisation économique au sein de la famille solidaire voire communautaire et différente de l'organisation moderne plus individualiste. Perçue en Afrique subsaharienne comme une unité chargée de la production et de l'écoulement des biens et services, avec des acteurs ayant entre eux des liens de sang directement ou indirectement³⁷⁷, l'entreprise familiale est plus présente en zone rurale aujourd'hui. Elle permet aux ménages d'avoir des revenus et d'assurer leur bien-être. Caritas consciente de cette volonté vole aux secours des familles qui veulent sortir par elles-mêmes de la précarité.

Comme souligné plus haut, sur les principes de partenariat et de solidarité, Caritas Afrique avec la collaboration et le financement des Caritas d'Europe et d'Amérique offrent des opportunités aux familles de se relancer et de se construire. Les stratégies de financement varient selon les réalités et les programmes de financement disponibles. L'objectif est d'aider et d'accompagner les initiatives simples. Dans certains cas, on pourra avoir des activités génératrices de revenus et dans d'autres cas les activités économiques réelles. Ce n'est pas le caractère économique du processus qui nous intéresse mais la main tendue qui garantit l'épanouissement de l'autre. Au Rwanda, les coopératives ont bénéficié des possibilités de crédit offert par la Confédération. Selon le rapport annuel de 2008, « En Afrique, Caritas conduit un grand nombre de programmes de micro finance qui offrent aux personnes souhaitant mettre sur pied une petite entreprise la possibilité d`accéder à

³⁷⁶J-C. Boungou Bazika, « L'entreprise familiale : définition et fonctionnalité dans une perspective africaine », Université Marien Ngouabi Faculté des Sciences Economiques Centre d'Etudes et de Recherche sur les Analyses et Politiques Economiques (CERAPE), p.2.

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des capitaux d`un montant modeste. Les programmes permettent aux ménages d`épargner et de rembourser les prêts au fil du temps. Caritas cible les personnes ayant difficilement accès aux services de crédit ou d`épargne officiels, en particulier les femmes. ». 378

Le choix de la femme se justifie selon le rapport dans la mesure où elle est un entrepreneur fidèle et crédible qui utilise les prêts et les bénéfices pour le bien-être du ménage. En 2009, le rapport³⁷⁹ indique qu'une femme soudanaise, Miriam a initié et formé près de 106 femmes à la couture. Caritas a mis à la disposition de ces femmes des machines et du matériel de couture. Ces dons ont permis à celle-ci d'avoir une petite entreprise de couture.

Au Cameroun, dans la ville d'AKONO, la Caritas Diocésaine de Yaoundé dans un partenariat avec Caritas Alsace a proposé au mois de février dernier aux jeunes de cette localité un financement des projets conduisant à la création de petites entreprises familiales.

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Une famille a plusieurs membres et certains sont plus vulnérables que d'autres et dans cette dynamique Caritas prend soin des enfants vulnérables et des personnes de troisième âge.

B. L'ACCOMPAGNEMENT DES MEMBRES DES FAMILLES

VULNERABLES

La vulnérabilité est un fait qui menace tout membre de la famille. En Afrique, Caritas s'intéresse à ceux qui sont les plus défavorisés et les plus abandonnés de la société. Les qualifier de Paria, n'est pas une exagération. La Caritas agit avec les membres des familles les plus nécessiteux. Nous analyserons les soins que Caritas offre aux enfants et aux personnes de troisième âge.

1. L'ACCOMPAGNEMENT PSYCHO-SOCIAL DES ENFANTS VULNERABLES

Le terme « enfants vulnérables » est large. Caritas prend en charge plusieurs types d'enfants. On peut parler des cas d'enfants abandonnés par leurs parents, abandonnés à leur destin et qui n'ont pas d'occupations et même de foyers. Ceux qui n'ont pas de foyers ont un nouveau foyer, la rue, ils deviennent des enfants de la rue, phénomène général dans les capitales et les cités africaines et même du monde. Ils sont éduqués par la rue et sont dans les aventures dangereuses et piteuses. Ils sont orphelins en majorité. La situation d'orphelins les rend fragiles, serviles et fébriles. Pour les orphelins, il peut avoir deux cas de figure : ceux des orphelins accueillis dans les groupes spécialisés ou des familles d'accueil et ceux des orphelins gardés par leur famille biologique. L'exemple des orphelins rencontrés dans les rues de Kampala est utilisé. « Dès les années 70, des centaines d`orphelins errent dans les rues de Kampala. Age moyen : 8-10 ans. Leur surnom : les bayaye. Ce qui veut dire, littéralement, les « voleurs ». Dès cette époque, face à l`indifférence ou à l`hostilité générale, et malgré l`inaction des autorités, une poignée d`hommes et de femmes ont accepté de s`occuper du sort de ces enfants ».

Dans ce sens, on observe que Caritas travaille en partenariat avec les institutions spécialisées en matière d'accompagnement des enfants vulnérables. Ces enfants doivent

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être écoutés, conseillés et orientés pour éviter leur perte. Il a été constaté plus haut que l'action humanitaire sociale prend soin des enfants qui ont besoin d'affection et de chaleur. L'affection et la chaleur retrouvées sont des symboles de l'humanitaire qui peuvent concourir à la personnalité de l'enfant. Caritas est entrée en collaboration avec Africa Fondation en 1979 dans le cadre du projet³⁸⁰ de réinsertion des enfants de rue de Kampala. L'objectif de cette fondation est d'accueillir, réadapter, former, réinsérer dans la société des enfants de la rue et des enfants abandonnés. Cet objectif n'est pas loin d'un principe cardinal de Caritas, la dignité de la personne. Les enfants n'ont pas seulement le mérite de la dignité mais l'essence de la dignité. La collaboration entre ces deux structures a permis de parvenir à l'hébergement de 1500 enfants errant dans la rue mais, désormais ils reçoivent une éducation formelle.

Plus récemment en RDC, en 2014, a été lancé le projet appelé projet EADE à Kisangani. Il concerne les enfants et les adolescents en dehors de l'école. L'objectif du projet est la scolarisation des enfants démunis. Près de 1.335 élèves sont accompagnés dans près de 17 écoles. Les attentes étaient nombreuses dans la réalisation de ce projet. « Les fiches d`identification ont été complétées et les absents, après un délai bref, ont été remplacés. Toutes les écoles ciblées par le projet ont été visitées. Les activités destinées à la mise en oeuvre ont été toutes réalisées. Les chefs d`établissements ont eu une même et meilleure compréhension du projet. Les communautés locales ont été sensibilisées sur l`intervention. Les frais scolaires ont été payés ou sont en cours de l`être. »³⁸¹.

Caritas Mali a également conduit un projet en faveur des enfants de la rue. Il s'agit du « projet action enfant de tous, Caritas-Mali, a été initié en 1992, sous l'impulsion de Feu Monseigneur Luc Auguste SANGARE, ex archevêque de Bamako s'est montré très préoccupé par la question des enfants de la rue de Bamako. Il a fait appel aux institutions et aux spécialistes qui ont fait leurs preuves dans certains pays pour fonder « action

380 Bureau International Catholique de l'enfance, Dans les rues avec les enfants, op. cit, p.192.

381 Ce projet a été publié dans le Magazine d'informations et d'analyse du réseau national de Caritas Congo Asbl : Lève-toi et marche n°032 Février - Avril 2014 avec titre de l'article : «Appui à la scolarisation des enfants et Adolescents en dehors de l'école : Lancement officiel du projet EADE à Kisangani en RDC », Pp 2122.

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enfant de tous.»³⁸². Le but du projet fut d'accueillir, d'orienter, d'écouter, de scolariser, de prendre en charge ses enfants abandonnés à eux-mêmes. Caritas fait usage de différentes stratégies notamment les tournées de rue, le centre d'écoute des garçons, les foyers de type familial...

Au plan statistique, il a été retenu que pour cette période : « Tous les enfants qui arrivent pour la première fois sont accueillis avec le maximum de traitement (présentation, ouverture d'un dossier, dortoir urgence). Pour cela chaque nouvel enfant est identifié et enregistré. Sur le plan statistique 2701 enfants ont fait leur passage au centre. »³⁸³ . Les enfants ne sont pas les seuls à être accompagnés, les personnes âgés sont aussi une priorité pour Caritas Afrique.

2. L'APPUI AUX PERSONNES DU TROISIEME AGE

La pyramide des âges est un instrument qui permet de comprendre les différentes tranches d'âge. Cet histogramme structure la population d'une société selon les âges et selon les sexes. L'une des étapes qui appelle l'attention de Caritas en Afrique, c'est le troisième âge. Quelle est la tranche d'âge requise pour le troisième âge ? Toute proportion gardée, nous pensons qu'elle varie selon les sociétés et que toute règle est assortie d'exception. Selon, Institut franco-ontarien, le troisième âge correspond à la « Période qui suit l`âge adulte et qui fait référence aux personnes aînées qui sont encore autonomes, ayant maintenu en grande partie leurs capacités cognitives et physiques »³⁸⁴. Caritas Alsace détermine le troisième âge à plus de 60 ans et moins de 60 ans étant la dérogation, ces personnes sont valides et dépendantes.³⁸⁵

Les motivations humanitaires de Caritas pour cette catégorie sont légitimes. Elles sont arrivées au pinacle de leurs vies, et la fatigue est générale et les risques de maladies en

382 S.Cissé, L'apport de Caritas-Mali dans l'insertion des enfants de la rue, université de Bamako, 2009, mémoire online.

383 S.Cissé, L'apport de Caritas-Mali dans l'insertion des enfants de la rue, op.cit,

384 Institut Franco-Ontarien, apprentissage au troisième âge recherche sur les besoins et les intérêts d`apprentissage des personnes aînées francophones de l`Ontario, juin 2009, p.7.

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cas de mauvais ou de défaut de suivi sont nombreux. On est délaissé par ses proches, on a besoin d'un épanouissement particulier et bien organisé. En Afrique, peu de personnes de troisième âge sont transférés dans les maisons de retraite et la plupart restent avec leurs familles ou sont abandonnés en zones rurales.

Au Cameroun comme dans d'autres sections nationales Caritas, le traitement des personnes de troisième âge est le plus souvent indirect et occasionnel. Les visites, les dons et l'assistance des cibles sont les principales activités observées ici. Caritas Congo signe des partenariats avec les pensionnats du pays, ce phénomène est aussi visible au Sénégal et au Cameroun.

Caritas en Afrique subsaharienne doit réorganiser ses interventions dans ce domaine. Les statistiques mondiales de la population indiquent l'évolution asymptotique du vieillissement. « On estime qu`entre 1990 et 2030, le nombre de personnes de 60 ans et plus aura triplé à travers le monde. Les adultes de 65 ans et plus passeront de 155 à 325 millions dans les pays en développement, de 131 à 188 millions dans les pays industrialisés. Si le taux d`accroissement est plus faible dans le Sud, ce ralentissement est compensé par une croissance démographique globalement plus forte »³⁸⁶. Ces statistiques révèlent un challenge humanitaire pour Caritas. Et les organisations de la confédération devraient passer à une étape de construction des centres d'accueil des personnes de troisième âge en Afrique, d'abord au niveau national et ensuite au niveau diocésain. Cette proposition tient en ce que les centres d'accueil dans les pays africains sont rares. Un échange de pratiques avec les régions européennes et américaine serait utile et la formation des employés dans la spécialité sera une nécessité. Les financements peuvent être de sources hybrides. Ce défi est à venir, celui sur l'aide alimentaire et scolaire est déjà dans les couloirs des sociétés.

PARAGRAPHE II : LES OPERATIONS HUMANITAIRES DANS LES DOMAINES ALIMENTAIRE ET SCOLAIRE

« Une seule famille humaine ; de la nourriture pour tous » et « Apprendre, c'est vivre pleinement; si on arrête d'apprendre, on arrête de vivre. », deux formules qui résument

386 UNESCO, de Populations âgées apprenantes : guide de discussion. CONFINTEA, « Les personnes âgées Les personnes âgées et l'éducation des adultes » UNESCO, Hambourg 1997, p.356.

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en quelque sorte les opérations de Caritas dans les domaines alimentaire et scolaire. La première formule a été le slogan de la campagne internationale lancée par la Confédération internationale en décembre 2013. Ce fut un engagement pour éradiquer la faim et promouvoir le développement intégral de l'homme. La seconde formule a été proposée par l'institut franco-ontarien dans son rapport intitulé « apprentissage au troisième âge recherche sur les besoins et les intérêts d`apprentissage des personnes aînées francophones de l`Ontario ». Les développements qui suivent, permettront de comprendre les réalisations de Caritas dans les domaines de l'alimentation et de la scolarisation.

A. LA LUTTE CONTRE L'INSECURITE ALIMENTAIRE

« Le cri du ventre » des populations est bien plus aigu en Afrique subsaharienne que partout ailleurs. Caritas fait de l'alimentation une préoccupation constante. Ne pas laisser mourir les âmes innocentes. Dans la logique de Caritas, l'opulent ne doit pas laisser périr l'opprimé. Caritas propose une solution immédiate et une solution durable : la nutrition des misérables et la réalisation des projets agricoles.

Aussi longtemps que le monde existera, la misère en général et celle du ventre en particulier sera toujours réelle. Il est vrai que le pourcentage peut connaitre une baisse considérable ou moyenne mais, la misère sera difficilement éradiquée. Caritas part d'un constat et tente d'apporter une solution audit constat : « Aujourd`hui, des millions de personnes se couchent la faim au ventre alors qu`il y a de la nourriture en abondance dans ce monde. Caritas oeuvre à tous les niveaux pour s`assurer que ceux qui ont faim aient de quoi manger »³⁸⁷. Caritas se préoccupe de la disponibilité de l'alimentation, ont-ils à manger ? L'utilisation des denrées alimentaires dans les ménages : pourquoi gaspiller pourtant près de chez toi souffre l'affamé ? Et la stabilité dans la consommation de la nourriture : comment faire pour avoir toujours du mil dans le grenier ? Telle est l'esprit de la philosophie alimentaire de Caritas. Caritas en Afrique subsaharienne lutte à

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la fois contre la dénutrition ³⁸⁸ , la sous-alimentation et la malnutrition. Selon la confédération, la faim « consiste pour les personnes qui en souffrent à manquer d`aliments sains et nutritifs pour assurer leur croissance et leur développement normaux, ainsi qu`une existence saine et active. ».

La suite de ces programmes et de ces réalisations est une conséquence de sa politique en matière de sécurité alimentaire. Les actions de Caritas au Burkina Faso sont visibles. Le Cas du Nigéria sera brièvement présenté.³⁸⁹

Caritas Autriche soutient le travail en cours d'OCADES Caritas Burkina, en mettant l'accent sur la prévention de la malnutrition des enfants dans le diocèse de Dori au Burkina Faso. Cette région est particulièrement touchée par la malnutrition chez les enfants de moins de 5 ans.

388 Lors de la campagne lancée le 10 décembre 2013, une seule famille humaine, de la nourriture pour tous, la Confédération a précisé que La dénutrition concerne les personnes ayant un poids insuffisant par rapport à la moyenne, de petite taille (ou avec un retard de croissance), excessivement minces ou présentant une carence en vitamines et minéraux (ces personnes souffrent alors de malnutrition en micronutriments) et la malnutrition se caractérise par de mauvaises associations ou un déséquilibre entre nutriments dans l'alimentation des personnes : elle peut être une surnutrition ou une sous-nutrition.

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Éducation à la nutrition : au moyen d'un programme d'éducation, le personnel de Caritas rend visite aux familles, dans les villages, pour leur apprendre à prévenir la dénutrition, les pratiques de soins indispensables et à reconnaître les symptômes d'une Dénutrition aiguë.

Alimentation thérapeutique dans un centre d'alimentation (CREN) : les enfants dont le diagnostic a été établi par le personnel de Caritas, ou par un centre de santé gouvernemental, sont envoyés dans un centre d'alimentation thérapeutique pour des traitements thérapeutiques. Les patients reçoivent normalement une bouillie à base de soja, de lait en poudre et d'huile. Suivant leur état, les enfants séjournent dans le centre entre 7 jours et 3 semaines. Ensuite, il est demandé aux mamans de venir régulièrement au centre pour faire examiner leur enfant.

Caritas utilise le séjour thérapeutique des enfants dans le centre pour éduquer les mamans accompagnant leurs enfants. On leur enseigne comment préparer des repas nutritifs et quels légumes cultiver dans leur jardin potager. Elles sont également sensibilisées à l'importance de l'hygiène et aux aspects sanitaires. Une illustration schématisée de l'action alimentaire de Caritas peut être plus expressive.

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En Mars 2010, Caritas Nigéria a bénéficié d'un projet³⁹⁰ de 688 715 $ (486 160 €) sur une année a fourni à 2 500 familles des vivres et du matériel d'hygiène. D'autres cas peuvent être exposés et l'action de Caritas ne s'arrête pas à l'immédiat, elle est aussi durable.

2. LA REALISATION DES PROJETS AGRICOLES AVEC LES POPULATIONS RURALES

La terre est un bien précieux qui peut suffire à garantir l'alimentation de l'homme. Mais pour ce faire, il faut son effort personnel. Point n'est besoin de rappeler les mérites de la terre, héritage secret du laboureur à ses enfants. Caritas n'est pas un acteur pour une action humanitaire passive : l'homme reçoit dans l'urgence, reçoit tout le temps et en demande encore et encore. Loin de la doctrine de la manne tombée du ciel, Caritas est pour une manne obtenue après les efforts de la terre. C'est l'action humanitaire active. Elle est possible avec et par l'agriculture. La Caritas Afrique ne promeut pas l'agriculture à grande échelle mais un appui aux petits agriculteurs. L'agriculture est prise dans son sens large avec des domaines tels l'élevage, le pastoralisme, l'agroforesterie et la pêche. Son appui est financier, matériel et pédagogique. Le volet financier évoqué en matière d'entreprises familiales économiques ne sera pas évoqué profondément. Au plan matériel, le service offre aux petits producteurs le matériel suffisant pour développer leur production. Sur le plan pédagogique, il s'agit d'une formation gratuite et spécialisée pour les aider à parvenir à un effort réel. Tout cela en vue de parvenir à la souveraineté alimentaire³⁹¹.

Des cas de figure démontrent comment l'association catholique aide les agriculteurs. On a assisté à la promotion d'activités agricoles durables au Burkina Faso, en Éthiopie et en République Démocratique du Congo.³⁹²

391 Ce concept est proposé par la Déclaration de Nyéléni : « est le droit des peuples à une alimentation saine, dans le respect des cultures, produite à l'aide de méthodes durables et respectueuses de l'environnement, ainsi que leur droit à définir leurs propres systèmes alimentaires et agricoles », 27 février 2007.

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Dans cette optique, le soutien de Caritas va en faveur des petits producteurs sévèrement touchés par la faim et la sous-alimentation. Près de quatre mille petits producteurs démunis et peuplant les zones rurales du Burkina Faso (diocèses de Dori et de Kaya), de l'Éthiopie (le vicariat de Meki) et de la République Démocratique du Congo (diocèse de Lubumbashi) ont adopté les techniques de l'agro écologie dans le but d'améliorer leur production de nourriture et leur sécurité alimentaire.

Ceci a été réalisé par le biais d'initiatives s'appuyant sur les communautés concernées, avec le concours de Caritas Autriche, et dont les organisations diocésaines de Caritas de ces trois pays assuraient la mise en oeuvre. La majorité des populations ciblées par le programme est constituée de petits producteurs pratiquant une agriculture de subsidence et cultivant de petites superficies. En Éthiopie, le maïs, le haricot, le blé et le thé représentent les principales cultures non irriguées, récoltées une fois par an et offrant une faible productivité. En RDC, les principales cultures alimentant les populations rurales sont le maïs, le haricot et la pomme de terre. Au Burkina Faso, la production agricole se compose, en majorité de sorgho et de mil, tandis mais aussi de niébé, de sésame et d'arachide. La récolte arrive à peine à nourrir une famille ou à générer un excédent permettant de dégager un petit revenu pour assurer l'achat des biens essentiels non

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alimentaires, tels que l'éducation ou les soins de santé. Le faible niveau de productivité s'explique par le recours à des méthodes culturales dépassées, à des semences de qualité médiocre, ainsi que par l'utilisation insuffisante d'engrais écologiques, le manque d'irrigation ou la fertilité décroissante des sols.

Le programme mené par Caritas Autriche a démontré que la promotion de pratiques agricoles durables permet d'obtenir des résultats positifs et souligne le caractère essentiel de ces pratiques dans la lutte contre l'insécurité alimentaire dans les régions rurales pauvres. Les actions ont encouragé les petits producteurs isolés à se réunir au sein d'organisations communautaires, à planter une plus grande variété de céréales et de légumes, à inclure de petits ruminants et l'apiculture dans leurs pratiques, ainsi qu'à utiliser le compost, le fumier et d'autres engrais biologiques pour améliorer la fertilité des sols.

L'actualité de Caritas est marquée par le geste de charité du Pape François, le 22 juin 2017 en faveur du Sud-Soudan. Dans le site internet de la Fédération, on a pu lire :

« Le Pape François offre 460 000 € (plus de 500 000 $) pour aider le Soudan du Sud, qui couvrent trois projets :

Le soutien de deux hôpitaux gérés par les Soeurs Comboniennes à Wau et Tombura-Yambio.

Le soutien à Caritas pour acheter des semences et des outils pour 2250 familles de Tombura-Yambio, Yei, Torit, Malakal et Djouba.

Le soutien à Solidarity with South Sudan comprenant une formation pour enseignants, infirmières, sages-femmes, intervenants agricoles et chefs communautaires à Yambio.

Au Soudan du Sud, Caritas finance déjà 70 projets d'aide destinés à 480 000 bénéficiaires. Plus de 12 millions de dollars américains, ou 42 pour cent des fonds apportés par Caritas et ses agences, sont dédiés aux programmes d'aide d'urgence». Une potentielle bénéficiaire de ce don réagit. « Caritas nous a donné des semences et des outil, ce qui me rend optimiste : dans les jours à venir, je n`aurai pas à survivre grâce aux pommes de terre sauvages (très dures, elles mettent deux jours à cuire) ; au lieu de

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cela, je vais récolter du maïs, du sorgho, de l`arachide et du gombo » Torit, une très jeune mère qui a bénéficié d'un programme de distribution de Caritas. Mettre l'aide alimentaire proche de l'aide scolaire n'est pas anodin, si on est bien nourri, l'activité intellectuelle est envisagée sur de bonnes bases.

B. L'AIDE HUMANITAIRE SCOLAIRE

La question est analysée dans sa globalité. Caritas Afrique reste fidèle à ses principes, sa mission et sa vision. Les démunis doivent- ils être exclus de l'éducation par défaut de moyens financiers ou de fournitures scolaires ? Que faut-il faire des régions reculées où les écoles ne sont pas construites ? Quel mécanisme prévoir pour ceux qui n'ont pas de bons résultats ? Les programmes humanitaires que propose Caritas sont des essais de réponse aux questions posées.

Caritas propose des programmes simples du point de vue de la réalisation. Simple parce qu'ils peuvent se résumer à apporter un coup de pouce aux élèves démunis. En leur offrant le matériel didactique pour les aider à faire leurs études dans des conditions acceptables. Le don d'uniformes scolaires à 3 000 élèves à la rentrée scolaire de 2010 est une illustration de l'action humanitaire de Caritas Benin 393.

Au Cameroun, à Batouri et à Yaoundé, les fournitures scolaires sont partagées par les structures diocésaines dans les paroisses et les écoles aux enfants démunis. Mais dans cette politique de distribution, on peut se demander quels sont les critères de choix des enfants démunis ?

Les programmes les plus complexes entrent également dans la politique humanitaire de Caritas. La complexité se justifie quant à l'importance de la demande et la complexité des réalisations. Les Caritas d'Afrique réalisent généralement avec le concours des Caritas plus puissantes et d'autres organismes publics comme privés. Les programmes complexes conduisent à des réalisations pérennes. Il s'agit généralement des projets de longue durée et implantés dans les zones lointaines.

Il peut s'agir d'une action entraînant une réduction des frais de scolarité : « Les écoles primaires au Kenya, en Tanzanie, en Ouganda et dans beaucoup d`autres pays ont

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supprimé les frais de scolarité, ce qui s`est traduit par des augmentations impressionnantes du taux de scolarité en l`espace de quelques années, grâce à l`allégement de la dette. » 394 . La Confédération apporte aussi son soutien à la construction ou à la reconstruction des salles de classe. Au Congo, cette pratique est commune, depuis 2012, à une trentaine d'écoles primaires qui sont engagées dans un programme de construction³⁹⁵ initié par Caritas-Congo en partenariat avec le service de promotion du développement. La liste n'est pas exhaustive.

Caritas saisit l'humanitaire à deux bras. Le premier touche la misère sociale et le seconde touche les souffrances dans l'urgence.

SECTION II : LE SERVICE DE CARITAS DANS LA GESTION DES URGENCES HUMANITAIRES EN AFRIQUE SUBSAHERIENNE

« Caritas Internationalis is a Confederation of 165 Catholic Church humanitarian, health and social service, and development organizations, with a moral mandate to respond to humanitarian and other human needs without distinction as to origin, nationality, creed or sex. Caritas plays a pivotal role in humanitarian emergencies and social development. »³⁹⁶. Sont mentionnées dans cette déclaration, les traditionnelles missions de la Caritas. Le deuxième chapitre porte sur la mission humanitaire de Caritas dans le contexte des urgences. C'est une mission statutaire qui a fait connaître Caritas à travers le monde et en Afrique en particulier. En partenariat avec les acteurs humanitaires traditionnels, Caritas est présente en Afrique pour prêter main forte aux victimes des catastrophes naturelles et des conflits de toute nature. Caritas est un acteur important avant, pendant et après la crise humanitaire à travers, notamment, ses démembrements nationaux et locaux. Elle est surtout effective pendant et l'après les crises humanitaires. Mais nos développements portent en majorité sur les interventions en temps de crise humanitaire et à l'issue de celle-ci. Notre analyse s'intéresse à l'action

394 Rapport annuel des activités 2008, « Imaginez un monde unique basé sur la justice et la solidarité», p.13.

395 LEVE-TOI ET MARCHE N°030 , « Contribution de Caritas Congo Asbl dans l'éducation par la reconstruction d'écoles », octobre - décembre 2013, p.15.

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de Caritas pendant les deux situations classique à savoir les catastrophes naturelles et les conflits.

PARAGRAPHE I : UNE PRESENCE LORS DES CATASTROPHES NATURELLES

Selon les Nations-Unies : « L'aide humanitaire peut sauver des vies et limiter les effets d'une catastrophe, mais elle n'empêche pas les chocs récurrents qui rendent nécessaires les interventions d'urgence. Ce besoin répété d'intervenir, souvent aux mêmes endroits et pour les mêmes personnes, a amené les pays et la communauté internationale à repenser les approches employées pour gérer ces situations complexes. » 397 . Les approches choisies permettent aux acteurs humanitaires d'intervenir au même moment que les conflits. En matière de catastrophes naturelles, les efforts de Caritas amènent à le considérer comme un acteur de la résilience et un promoteur de la réalisation des projets durables en matière agricole.

A. UN ACTEUR DE LA RESILIENCE

Pratique récente³⁹⁸, la résilience ne fait pas l'unanimité en doctrine. Si certains auteurs éloignent la résilience de l'aide humanitaire en la considérant comme une étape du développement, d'autres l'enregistrent comme une phase importante de l'aide humanitaire. S'il la résilience s'impose, c'est à cause de la vulnérabilité. Et la vulnérabilité est une porte ouverte à l'action humanitaire. C'est ce qui fait dire à Moussa Sacko que la résilience et la vulnérabilité sont deux faces d'une même pièce, l'une étant les capacités des individus et des communautés à amortir les chocs et à se développer et l'autre étant le manque de capacité d'un individu ou d'une communauté à faire face à un

397 Équipe spéciale de haut niveau des Nations Unies sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire « La résilience des individus, des ménages, des communautés et des institutions dans les situations de crise prolongée », 2010. Cadre global d'action actualisé. Disponible à l'adresse: http://un-foodsecurity.org/sites/default/files/UCFA_English.pdf. Consulté le 1er août 2012 .

398 Depuis les années 2005 avec l'adoption du cadre Hyôgo, la résilience est au centre des activités des acteurs humanitaires mais aussi de développement et des Etats.

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événement risquant.³⁹⁹ La résilience est considérée dans son contenu et son effet comme une pratique humanitaire durable. Caritas propose aux communautés résilientes des stratégies qui se manifestent la mise en oeuvre et d'une politique de reconstruction et de soutien aux sinistrés.

1. LES STRATEGIES D'INTERVENTION

Par définition, la résilience s'entend comme « la capacité des personnes ou des communautés à absorber et à se relever des effets des crises (récurrentes ou non) et à se réorganiser en intégrant ces changements, tout en conservant la même structure de base, le même fonctionnement, la même identité et la capacité de réagir et de s`adapter »⁴⁰⁰. Pour le groupe Résilience-Alliance, il s'agit d'une « Aptitude d'un système à absorber les perturbations et à se réorganiser en cours de mutation » 401 . Caritas propose une intervention stratégique. Elle procède à une identification des groupes vulnérables. Cette identification tient compte des individus, des familles et de la communauté. Au niveau des individus, on tient compte des enfants, des femmes, des handicapés ; pour les familles, on distingue les ruinées, les sauvées et les menacées et les communautés, entre celles qui ont péri, survécu et migré. La prochaine stratégie demande le ciblage des ressources et des types d'intervention. Il faut y prévoir la participation des populations elles-mêmes et des organes locaux.

L'intervention de Caritas Suisse lors de la Sécheresse qui a secoué le Mali en Février

2012 est un cas de figure. Les faits de cette catastrophe naturelle sont ainsi détaillés.

« Le Mali en février 2012. Les jardins potagers des femmes de la région de San, dans le sud du pays, sont en friche. Au lieu des couleurs vives des oignons, concombres, aubergines, tomates et autres légumes, les plates-bandes sont uniformément brunes, recouvertes de poussière et de terre desséchée. Les petits canaux d`irrigation des jardins

399 M.Sacko, Action humanitaire et déterminants de la résilience des ménages dans une situation de post conflit Cas de la région de Tombouctou (Nord du Mali) après la crise de 2012, CERAH Working Paper 37 2015 - 2016, p.15.

401 Source: Ministère britannique du développement international. 2012. Defining Disaster Resilience: A DFID Approach Paper.

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sont à sec. ( ...) Les conséquences désastreuses de cette saison des pluies 2011 presque inexistante se sont fait sentir dès la fin de l`année: pas de récolte, ou presque, pour la plupart des paysans; maïs, riz, sorgho et légumes, rien n'est venu ... Pour des millions de paysans du Sahel, tout s`est passé comme pour les paysans de la région de San. La combinaison de facteurs comme la pauvreté, la destruction de l`environnement, le prix en augmentation des denrées alimentaires et le sous-développement chronique ont conduit à une crise alimentaire majeure en février 2012 »⁴⁰². Face à cette situation, Caritas va intervenir dans le cadre du projet d`aide d`urgence adaptés aux besoins des populations touchées.

Pour ce faire, elle va commencer par identifier les personnes vulnérables notamment les personnes âgées, les handicapés ne bénéficiant pas de la protection de leurs familles, les veuves, les orphelins, les malades, les ménages économiquement faibles etc. Ensuite, Caritas a apporté son soutien aux sinistrés en proposant des mesures simples, immédiates et par la suite des mesures utiles à long terme. L'intervention de Caritas a permis de réagir et d'apporter une suite à son action. Nous reviendrons sur l'intervention de Caritas dans le cadre de ce projet de manière plus détaillée dans les prochaines analyses.

2. LA POLITIQUE DE RECONSTRUCTION ET DE SOUTIEN DES SINISTRES

Les catastrophes naturelles entrainent de nombreux dégâts. Caritas propose une assistance humanitaire pour permettre aux populations de vivre malgré le drame. Deux cas de résilience menés par Caritas sont ici, analysés. Mais la résilience est un engagement humanitaire peu évident. Raison pour laquelle, un cas de figure où la résilience n'a pas été réussie sera évoqué.

402 Caritas Suisse, « Caritas Suisse fait le bilan de son engagement Un an après la crise de la sécheresse au Mali », service de presse 3, 28 février 2013, p.1.

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« Caritas Suisse a d'abord distribué gratuitement des céréales aux familles les plus touchées et a subventionné la vente de denrées alimentaires de base. En mettant à disposition des denrées alimentaires et des semences pour la prochaine saison de culture, Caritas Suisse cherchait non seulement à aplanir le problème de famine, mais aussi à renforcer la résistance de la population. Avec des fonds d'environ 750 000 francs, on a pu aider 135 000 personnes. Dans la seule région de San, Caritas Suisse a distribué 530 tonnes de maïs et de riz à 6000 familles. Dans la région de Mopti, 5200 familles ont bénéficié de 500 tonnes de millet. Pour Mamadou Diarra, représentant local de Caritas Suisse, les projets ont été un succès, non seulement parce que les gens ont pu se nourrir, mais parce qu'ainsi, ils n'ont pas été obligés de quitter leurs villages. «Sans ce soutien, les familles touchées par la famine auraient migré vers les villes pour trouver du travail et de quoi manger et l'avenir de ces familles, et notamment des enfants, aurait été compromis.»⁴⁰³.

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PROJET EA 20/2009
BURKINA FASO
INONDATIONS
SEPTEMBRE 2009 / PHASE
D'INTERVENTION
D'URGENCE

« Les bénéficiaires sont tous les sinistrés recueillis dans l'ensemble des sites d'hébergement pour la distribution de céréales. Les 2.500 ménages (15.000) sont sélectionnés parmi les sinistrés recueillis dans les familles d'accueil par les CCB (communautés chrétiennes de base), les équipes d'animations paroissiales OCADES Caritas et les curés en concertations avec les municipalités dans les 5 arrondissements de la ville. Les 1.500 sinistrés bénéficiant de repas chauds, en éducation sur l'hygiène, eau et assainissement, d'assistance médicale sont les personnes recueillies dans les 10 paroisses de la ville de Ouagadougou. Les 2.500 enfants sont sélectionnés parmi l'ensemble des sinistrés dans les familles les plus démunies. Il en est de même des 1.000 personnes bénéficiant de l'aide à l'établissement de documents administratifs perdus. »⁴⁰⁴.

« Avec l'appui de ses partenaires techniques et financiers CARITAS Bénin lance la construction de 2409 maisons aux populations victimes des inondations d'octobre 2010. Bientôt, environ 14.935 personnes de 2.409 ménages actuellement installées sur 11 sites auront une maison digne de ce nom.

404 EA 20/2009 Burkina-Faso, Inondations / phase d'intervention d'urgence, document du projet, septembre 2009 , p.6.

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70% de la frange fragile de la population (enfants de moins de 12 ans, femmes enceintes et personnes âgées de plus de 60 ans), ont été temporairement abrités chez des parents dans le bourg le plus proche (Zagnanado-centre), ainsi que dans des écoles ou des églises avant de rejoindre les tentes de refuge quelques semaines plus tard.

l'ONG Caritas Bénin s'était engagée à construire un nouveau village sur un domaine de 10 ha visant à assurer le déplacement définitif des sinistrés de Kpoto hors de la zone à risque d'inondation, mais le projet n'a pas abouti »⁴⁰⁵ .

Les informations retenues montrent l'impact de la résilience, les énormes besoins et les risques d'échec. Après la survie, il faut favoriser la vie des sinistrés. D'autres approches ont été proposées par la confédération pour prévenir et aider les populations en matière de catastrophes. Caritas leur propose d'agir avec « la conscience verte ».

A. UN PROMOTEUR DES PRATIQUES ENVIRONNEMENTALES

DURABLES

Cette question est technique et complexe. Caritas collabore avec les paysans en leur recommandant des politiques environnementales vitales pour la communauté locale et universelle. Planter un arbre devient un geste humanitaire pourtant l'abattre est un geste contre l'humanitaire. Sur les informations recueillies, deux orientations sont proposées et développées par Caritas en Afrique et dans le monde : l'agro écologie et les autres pratiques agricoles durables.

1. LA PROMOTION DE L'AGRO ECOLOGIE

La question de l'agro écologie s'inscrit dans la continuité de la résilience. Plus concrètement, quand il arrive à Caritas de venir en aide aux petites entreprises familiales, la Confédération propose aux populations des techniques qui leur permettent de pratiquer une agriculture qui en les nourrissant, préserve également leurs vies. La dignité et la responsabilité, deux autres principes cardinaux de Caritas sont ainsi respectés. L'agro écologie est une solution alimentaire pour mettre fin à la misère mais c'est aussi une solution humanitaire pour que la

405 M. Bernice et autres, D. Adaptation et résilience des populations rurales face aux catastrophes naturelles en Afrique subsaharienne. Cas des inondations de 2010 dans la commune de Zagnanado, Bénin

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pollution ou la dégradation de l'environnement par l'agriculture malsaine soit faible. L'agro écologie est définie par Caritas Bangladesh comme « des systèmes agricoles intégrés (associant culture, pêche, élevage et forêt) permettant aux paysans pauvres et marginalisés de développer une production durable, ainsi qu`une distribution et une consommation équitables, centrées sur la protection de l`environnement et la conservation de la biodiversité grâce à un usage judicieux des ressources naturelles locales. » ⁴⁰⁶. C'est une agriculture peu nocive pour l'environnement. Caritas forme les paysans agriculteurs sur les savoirs et les pratiques de cette agriculture, alternative à la production agroindustrielle et aux impacts des changements climatiques. Elle privilégie les ressources de la nature par rapport aux intrants extérieurs. Elle est favorable à la biodiversité et prône une association des plantes.⁴⁰⁷ On affirme que : « L`agro écologie demande beaucoup plus de travail que l`agriculture chimique. Vous devez ramasser de la fumure organique, la faire décomposer, la mettre dans vos champs, il faut trouver des plantes qui agissent comme bio-pesticides, désherber à la main... Il faut par exemple 40 charrettes de fumure organique décomposée pour un hectare de terres. Alors qu`il vous suffit d`acheter et de transporter un sac d`engrais en agriculture chimique » 408 .

Quelques avantages sont reconnus à ce modèle agricole. Il est avantageux pour la préservation de l'environnement et de la biodiversité. « Caritas Mauritanie indique que l`un des principaux avantages de l`agro écologie pour les bénéficiaires de ses projets est l`amélioration de leur environnement ainsi que la réduction des risques d`intoxication, pour eux-mêmes et pour leurs animaux. »⁴⁰⁹. On peut ajouter l'implication des populations locales qui ont une grande responsabilité dans la gestion rationnelle des ressources. Caritas Kinshasa rapporte que plus de 800 femmes ont choisi ce modèle agricole une fois qu'elles ont été sensibilisées et formées. D'autres pratiques environnementales ont le même intérêt que l'agro écologie qui n'est pas encore assez répandue par Caritas en Afrique dans les communautés rurales du continent.

406 Définition reprise par Secours catholique et Caritas France dans sa publication intitulée : Agro écologie et développement durable, rapport coordonné par : Marc Laroche, octobre 2016, p.5.

408 I. COULIBALY, Grain de sel, no 63-66, « Regards croisés : quels obstacles à l'agro écologie ? », juillet 2013 - juin 2014, p.34.

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2. LA PROMOTION DES AUTRES PRATIQUES AGRICOLES

Comme démontré à la première partie de ce travail, l'homme a une grande responsabilité dans le déclenchement des désastres naturels. Caritas propose aux petits producteurs de pratiquer des techniques de culture respectueuses de l'environnement. Des mesures sont proposées pour éviter et réduire la dégradation de l'environnement. « La lutte contre le déboisement et les feux de brousse sont des aspects très importants de la protection des ressources naturelles. À Bamako, au Mali, comme à Kaolack au Sénégal, Caritas encourage la création de conventions locales entre agriculteurs, éleveurs et chasseurs, sous l`autorité des communes. Les feux de brousse sont interdits, ou très limités, des couloirs de transhumance sont définis, de larges espaces sont mis en défend. Si la coupe du bois pour des besoins domestiques est autorisée, celle pour la vente est désormais interdite »⁴¹⁰. Caritas procède à des campagnes de sensibilisation pour l'amélioration par les paysans des techniques agricoles.

Dans le cadre du projet PRODAC ⁴¹¹ à BULUNGU district de Kwilu, province de Bandundu, la Caritas Congo a vulgarisé les techniques agricoles durables et a fait la promotion des semences améliorées. A Goma dans le Nord Kivu, un autre projet a été financé par Caritas Belgique et a favorisé l'usage des produits naturels. 200 ménages y ont pratiqué le maraichage à petite échelle. Ils utilisaient la cendre, le mutuzo et le tabac dans les jardins et les pépinières pour l'extermination des insectes et des larves ravageurs.⁴¹² Ces techniques proposées aux paysans sont salutaires et participent de la mise en oeuvre de la politique humanitaire. L'action humanitaire de Caritas est différente dans un contexte de conflits.

PARAGRAPHE II : L'ENGAGEMENT HUMANITAIRE DE CARITAS LORS DES CONFLITS

412 Caritas GOMA, « de 1995 à 2015 : 20 ans de partenariat qui a sauvé des vies », main dans la main n°006, octobre -décembre 2015, p.11.

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La force d'un acteur humanitaire se trouve dans sa capacité à servir sur le terrain. Sur le terrain, la souffrance est parlante. Caritas comme tout autre acteur humanitaire privilégie la présence sur le terrain. Etre présent sur le terrain est un signe d'un engagement humanitaire réel. Il est utile de faire une analyse sur l'engagement humanitaire de Caritas en Afrique en temps de conflits. La confédération peut intervenir en matière de secours aux victimes et dans la prise en charge des réfugiés et des déplacés.

A. LES SECOURS DES VICTIMES

L'histoire de l'engagement humanitaire de Caritas dans le monde et en Afrique Subsaharienne montre que la Confédération est un acteur constant et présent. Son rayonnement et les critiques sont évoqués à partir de ses interventions. L'étude se base sur le choix de deux Etats d'Afrique Subsaharienne. Tout choix revêt toujours un aspect subjectif, mais à la vérité, le cas Centrafricain s'explique dans la mesure où la crise humanitaire du pays est l'une des plus récentes et des plus criardes que le continent et le monde ait connu ces dernières années. Le choix de la République démocratique du Congo dans la mesure où le pays connait une crise humanitaire sans précédent. Elle demande des interventions humanitaires constantes et après une période d'accalmie, déclenche un autre affrontement et les conséquences sont plus grandes. Au regard de nos lectures et des parutions, Caritas Congo est l'une des plus actives d'Afrique.

1. LE CAS CENTRAFRICAIN

Connue initialement sous la dénomination Oubangui Chari, la République Centrafricaine a vécu depuis la mort de celui que l'on présente souvent comme le père de la nation, Barthélémy Boganda, des crises politiques successives entre tentatives et réussites de coups d'Etat, le peuple en a payé un lourd tribut. Les missions de maintien de la paix se sont succédées et les conséquences humanitaires étaient à chaque fois plus grandes. La Caritas Centrafrique a souvent été sollicitée. Que de besoins humanitaires et des victimes des affrontements. Un morceau choisi de la dernière crise politique de 2013 du pays peut être repris. « Michel Djotodja fut contraint à la démission. Sont arrivés les antibalaka. A la base ce sont des villageois qui se sont constitués en groupe d`auto-défense pour protéger leur maigre bien des pillages des coupeurs de route appelés Zaraguinas et cela bien avant l`avènement de la Seleka. Puis face aux multiples exactions de la Seleka qui

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brûlait leur villages, violait leurs filles... ils se sont radicalisés pour s`attaquer à leur bourreaux à l`arme blanche. Finalement ce groupe d`auto-défense a été récupéré par

l`ancien régime Bozize et transformé en massacreur systématique de musulmans »⁴¹³.

L'intervention humanitaire de la Caritas portera sur les questions sanitaires, de sécurité alimentaires et des biens non alimentaires. Le contexte des interventions est sombre. Au plan sanitaire, La situation était alarmante : « La santé reste une urgence en raison du dénuement des formations sanitaires. Les besoins sont énormes car la plupart des pharmacies et centres de santé ont été soit pillés, soit vidés des médicaments et équipements médicaux. ». Au plan alimentaire Caritas constate : « Il n`y a pas de nourriture dans la ville, une pénurie en eau potable et un manque de ravitaillement en vivres à cause des hostilités et de l`impossibilité d'accès à ce qui reste des champs » . D'autres aspects peuvent être relevés : « nous avons constaté plusieurs maisons incendiées dans les villages suivants : Ndowé-Ketté à 43 Km de Bossangoa, plus de 50 maisons incendiées, à Gbakaba. Dans la ville de Bossangoa,plus de 100 maisons ont été incendiées dans les quartiers Bondili, Kaba et Boro. A Zérèà 25 km de Bossangoa sur la route de Bouca tout le village a été entièrement incendié et les populations se sont retirées à 18 km du village. »⁴¹⁴. L'action de Caritas à consister à distribuer les kits santé, les kits cuisine, les denrées alimentaires, les couvertures ... Caritas a favorisé la reconstruction des écoles, des centres de santé et des maisons. Elle a aidé les enfants à retourner à l'école et aider les populations à reprendre la vie et à relancer leurs activités.⁴¹⁵ Dans le rapport annuel 2014 de Caritas, on a pu lire : « En collaboration avec l`ONU, Caritas a gratuitement assuré les soins de santé, une aide alimentaire et un enseignement scolaire »⁴¹⁶ . Caritas est également présent au Congo Démocratique dans les zones de conflit.

413 J.Bissakonou, « cours d'histoire pour comprendre la crise centrafricaine », http://www.grotius.fr, 27 mai 2014.

414 CARITAS Centrafrique, Secrétariat exécutif national, Rapport de mission BOSSANGOA , 14-16 septembre 2013, p.10. Les autres faits repris relativement à la situation sanitaire et à la sécurité alimentaire sont tirés du même rapport, aux pages 9 et 10.

415 Ces informations ont été recueillies dans le site officiel de la Caritas sous le titre « Caritas sauve des vies en Centrafrique », site officiel de la Confédération Caritas.

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2. LE CAS DU CONFLIT CONGOLAIS

Il faut reconnaitre que le territoire Congolais baigne depuis des années dans des conflits qui s'enchaînent. Depuis des décennies, des nombreuses luttes sont enregistrées. « L`est de la République Démocratique du Congo a connu des conflits depuis l`indépendance du pays en 1960. Le pire des conflits a frappé la région à la fin des années 1990 et est toujours en cours. La zone la plus touchée par le conflit dans l`est de la RDC est la région du Kivu. Avec sa superficie d`environ 120 000 kilomètres carrés et ses 12 millions d`habitants, la région du Nord-Kivu et du Sud-Kivu sont plus grandes que le Burundi et le Rwanda réunis et la région n`est pas aussi densément peuplée que le Burundi, le Rwanda et l`Ouganda »⁴¹⁷. C'est donc une zone où les besoins humanitaires sont plus grands et toujours plus croissants. Pour montrer comment Caritas s'y engage, nous prendrons deux projets menés dans cette partie du pays par Caritas Congo avec les autres Caritas, partenaires du Congo.

Le premier projet est celui de la Dream Team pour la scolarisation des enfants-Soldats ou des enfants issus du viol à l'Est du Congo. Le projet Dream team est une initiative de l'association Actions des femmes pour le développement conduit par la Congolaise Maddy Tiembe. L'association a organisé une course à travers la ville de Bruxelles et les participants devaient verser un minimum de 5 euros pour redonner vie à ces enfants meurtris par la guerre. Tous les enfants doivent aller à l'école et non à la

417 Aimé Sindayigaya ,« Le conflit de l'est de la République démocratique du Congo : Un fiasco de longue durée et ses leçons pour les décideurs régionaux », e 24 juin 2014 à 14:40 | par Jambonews | Catégorie: Actualité.

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guerre. Cette association a permis à Caritas Goma par la voie de Caritas Belgique de recevoir un financement à hauteur de 250 euros par enfant à la rentrée scolaire 2015⁴¹⁸. Avec cet argent, les enfants ont pu s'offrir des uniformes, des fournitures, des cartables ... Le second projet est intitulé : « Projet Appui en sécurité alimentaire en faveur des populations du Nord-Kivu affectées par les conflits armés»⁴¹⁹. Projet piloté avec le partenariat de Caritas Belgique, ECHO et Caritas développement Goma. « L`objectif global du projet est la contribution à la réduction de l'insécurité alimentaire des populations du Nord - Kivu affectées par les conflits armés. Le projet a comme objectif spécifique de contribuer à l`amélioration du statut alimentaire des groupes vulnérables déplacés, retournés et autochtones ciblés. »⁴²⁰. Le projet a débuté à Kibabi en Avril 2012 et s'achève en mai 2013 et à Buabo, les activités ont été lancées en février 2013 et se sont achevées en novembre de la même année. Quelques résultats ont été obtenus : « Une enquête finale a été menée auprès d'un échantillon de 550 ménages bénéficiaires du groupement de Kibabi. Nous avons constaté qu'avec l'accompagnement du projet, les 5.500 premiers bénéficiaires ont amélioré leur statut alimentaire » à travers la reprise des activités agricoles et l'augmentation de la production. Cette action de Caritas démontre que même dans un contexte sombre, celui de l'urgence, il faut garder le coeur à l'ouvrage et à l'espoir. Caritas a aussi un grand coeur pour les réfugiés.

B. L'ACCUEIL ET LE SOIN DES REFUGIES ET DES DEPLACES

Le Haut-Commissariat des Nations -Unies pour les Réfugiés est l'instrument international de promotion et de protection des Réfugiés. Née à la suite de la Résolution 319 de l'Assemblée générale des Nations-Unies du 3 décembre 1949, l'Agence des Nations-Unies pour les réfugiés a été créée en 1950 par l'Assemblée Générale des Nations

418 Caritas Congo, « ABCD, l'approche qui autonomise les assistés », in main dans la main n°004, avril et juin 2015, Pp16-17.

419 Date de démarrage de l'action 01/04/2012 pour une durée de 20 mois. 820.000 euros (dont 770.000 € financés par ECHO et 50.000 € cofinancés par Ci.be)

420 Aimé Sindayigaya ,« Le conflit de l'est de la République démocratique du Congo : Un fiasco de longue durée et ses leçons pour les décideurs régionaux », op.cit., p. 5

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Unies et a commencé ses activités le 1er janvier 1951. Le HCR avait un mandat temporaire à la base et à partir de 2003, il acquiert auprès de l'Assemblée générale un mandat permanent. Cette évolution s'explique par la prolifération des crises politiques que le monde a connues jusqu'ici et les conséquences immédiates étant les nombreux déplacements et l'afflux des réfugiés. Dans le souci d'accomplir ses traditionnelles missions notamment offrir une protection internationale aux réfugiés et aider les gouvernements à trouver des solutions durables pour ces derniers⁴²¹, le HCR agit en collaboration avec d'autres acteurs notamment les organisations internationales et les ONG internationales et locales. C'est dire que la Confédération Caritas collabore avec le HCR en s'intéressant au volet réfugiés et déplacés. Cette collaboration entre ces deux acteurs humanitaires a commencé en 1991 et s'est concrétisée par des projets pilotés conjointement. Nous pouvons illustrer cela par trois projets : le Projet d'intégration locale des Réfugiés Libériens ; le Projet de retour et réinsertion des réfugiés ivoiriens et le Projet de retour et réinsertion des déplacés internes⁴²² .

Pour revenir à la question des réfugiés en rapport avec l'Afrique subsaharienne, le HCR indique qu'à la fin de l'année 2013, l'Afrique subsaharienne comptait un nombre total de 3 670 630 réfugiés, 414 924 demandeurs d'asile et 7 633 317 déplacés internes.⁴²³La période choisie par l'institution des Nations-Unies en charge des questions des réfugiés a influencé le choix de deux contextes d'intervention de Caritas en Afrique Subsaharienne, un plus récent le cas Burundais et un autre plus lointain mais actuel à cause de la présence continue des réfugiés dans les pays voisins, c'est le cas malien.

1. LE CAS BURUNDAIS

Dans la plupart des cas en Afrique, les crises humanitaires surviennent à la suite des crises politiques des Etats qui se transforment en des batailles sanglantes. Arrivé aux affaires, le 26 août 2005, Pierre Nkurunziza, ancien chef rebelle est réélu le 28 juin 2010 pendant ce temps le pays est trempé dans des affrontements discontinus entre proches du

421 Article 1 du Statut du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

422 Caritas Côte d'ivoire, Rapport consolide d'activités 2014 de CARITAS CÔTE D'IVOIRE, décembre 2014, p.8.

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pouvoir et les partisans de la rébellion. Mais la situation s'envenime à la suite de l'échec de l'adoption du projet de révision constitutionnelle qui aurait permis au régime en place de conserver le pouvoir, c'est le 21 mars 2014. Le pays s'enlise dans les affrontements et les premières victimes du chao dans lequel le pays s'installe sont enregistrées. L'année 2015 sera aussi décisive lorsque le 13 mai le Général Godefroy Nyombaré annonce la destitution du président Nkurunziza. Alors que tout porte à croire que c'est un coup d'Etat, le lendemain Nkurunziza monte au créneau pour dénoncer cette tentative manquée de coup d'Etat. Des arrestations, des affrontements et les mouvements des populations vont ouvrir une autre page noire de l'histoire de ce pays.

Le HCR a rendu public les informations relatives à la situation des réfugiés et des déplacés au Burundi à la suite de ce conflit : « Au moins 250 473 réfugiés ont fui vers la République Démocratique du Congo, le Rwanda, la Tanzanie, l`Ouganda et la Zambie depuis que le Président Pierre Nkurunziza avait annoncé sa candidature à un troisième mandat. Les tensions demeurent élevées au Burundi et le nombre de personnes ayant cherché refuge dans les pays voisins dépasse maintenant les 250 000, a annoncé le HCR, l`Agence des Nations Unies pour les réfugiés. Les civils continuent de fuir et que les chiffres pourraient encore augmenter. Selon les toutes dernières statistiques du HCR, quelque 250 473 personnes ont été enregistrées en tant que réfugiés en République Démocratique du Congo (21 186) ; au Rwanda (73 926) ; en Tanzanie (131 834) ; en Ouganda (22 330) et en Zambie (1197) depuis début avril 2015, quand le Président Pierre Nkurunziza avait annoncé son intention de se présenter pour un troisième mandat qu`il a obtenu peu après. ».⁴²⁴

Caritas Burundi et les Caritas du Rwanda, de la Tanzanie et du Congo apportent leur contribution à la situation des réfugiés et des déplacés. « 250.000 Burundais sur les routes et quasiment absents des médias. L`attention internationale est centrée sur les réfugiés syriens; alors que, semaine après semaine, nos collègues et partenaires locaux nous témoignent de l`agitation qui règne au Burundi. »⁴²⁵.

424 L. Dobbs; et T.Gaynor, « réfugiés burundais ont fui depuis avril 2015 », site du HCR | 4 mars 2016.

425 T.Devriendt, «L'année passée, 250.000 Burundais ont fui leur pays. Un exode qui s'est déroulé dans un silence presque total. », Caritas International Magazine, N° 232 mars 2016, p.8.

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Selon Jean Bosco Nintunze, Secrétaire général de Caritas Burundi, une aide alimentaire et les soins médicaux ont été accordés dans les camps de réfugiés de Nyarugusu et Nduta⁴²⁶. Grâce à l'appui de Caritas Amérique, Belgique et Suisse, Caritas Burundi a reçu une somme de 95.000 euros⁴²⁷ pour soutenir les actions des partenaires locaux. Avec le financement des projets octroyé par la Caritas Belgique en 2013, la Caritas Burundi a pu réaliser un projet portant sur « la protection et l'amélioration des conditions de vie des ménages rapatriés, déplacés et résidents à la frontière Burundo- Tanzanienne en commune Gisuru - Province Ruyigi (PAC- ménages) »⁴²⁸. L'expérience humanitaire de Caritas en matière de prise en charge des réfugiés est aussi visible au Mali.

2. LE CAS MALIEN

Sur le monde, souffle un vent violent qui n'épargne aucune Nation, c'est le terrorisme. Simultanément ou postérieurement à ce mouvement du temps, commencent des avalanches d'orages qui rappellent l'horreur d'une guerre où les habitants des villages ou des villes cherchent refuge hors de leurs frontières ou dans une autre partie du territoire. Caritas se mue en sapeurs-pompiers pour voler aux secours des habitants réfugiés ou déplacés mourants ou croulants qui ne savent à quel saint se vouer. Cette situation est vécue au Mali depuis 2012. Les événements connus par Kidal, Gao , Mopti et Tombouctou ont eu pour effet de nouveaux déplacements des populations et la résurgence des besoins humanitaires. On observe des déplacements vers les villes plus sûres ( Bamako, San, Koutatiala, Sikasso...) et vers les pays voisins notamment l'Algérie, le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger le Sénégal ... ci-dessous, quelques statistiques⁴²⁹ de ces mouvements sont proposées par le HCR dans la période de 2013 à 2016.

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Ce tableau démontre que le service humanitaire des réfugiés au Mali est important. C'est à partir de cela que Caritas s'engagera pour apporter son savoir-faire humanitaire. Ce savoir-faire a été rendu possible par la forte collaboration des Caritas du monde et des Caritas Mali, Burkina, Niger et même Sénégal. L'action sera concentrée dans les camps de réfugiés et des déplacés avec pour intérêt d'améliorer les conditions de vie des bénéficiaires. Caritas en partenariat avec le HCR posera de nombreuses actions dans le camp des réfugiés maliens de Goudebou et Mentao (Burkina-Faso)⁴³⁰ : la distribution des tonnes de vivres, des kits hygiène, du matériel de couchage, la réhabilitation des forages, la fourniture de l'énergie domestique aux réfugiés, la distribution du bois, des foyers améliorés métalliques et en banco... La Caritas Sahel a rendu public la réalisation d'un projet à la fois humanitaire et environnemental. Il s'est agi du projet de distribution d'énergies solaires et d'autres types d'énergies notamment les cuiseurs solaires dans les sites des camps à plus de 200 km. Cela a permis l'éclairage des camps en énergie solaire et par ricochet leur sécurisation.⁴³¹

Les précédents développements ont permis d'illustrer l'expérience humanitaire de Caritas. Une expérience qui permet à la Confédération d'enraciner dans les sociétés africaines des actions caritatives quotidiennes pour le bien-être des démunis et des personnes vulnérables. C'est une oeuvre sociale. Arrive l'intervention de la Confédération dans les questions d'urgence le temps d'une catastrophe naturelle avec la résilience ou le temps d'un conflit avec

430 D.Some, «La protection de l'environnement priorisée » et R.Gomis , « zoom sur : le camp des refugies maliens à Goudebou au Burkina Faso Plus de 10 000 personnes installées » - Périodique d` informations de Caritas au Sahel ,Février 2013-N°00, Pp.8-10.

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la prise en charge des réfugiés et des victimes des conflits. Il semble que l'action humanitaire de Caritas a la particularité d'être proche des politiques de développement à une échelle minimale ou moyenne. C'est une action humanitaire active, différente de l'action humanitaire passive. Elle aide le démuni en attendant du démuni une grande participation à son développement à court ou à long terme. Cette expérience humanitaire vient d'une initiative catholique mais les bénéficiaires ne sont pas exclusivement les adeptes de la doctrine du Vatican. La critique qui est à formuler à cette Confédération, c'est le manque de lisibilité et d'ouverture de ses actions ? Qui peut bénéficier de Caritas dans une société africaine ? Comment le faire ? Pourquoi les Caritas d'Afrique Subsaharienne attendent la manne qui vient des plus puissantes Caritas ?

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CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

Comprendre l'action humanitaire en se limitant aux principes, aux théories, au droit, à l'éthique et aux débats de doctrine n'est qu'un aspect théorique. Cet aspect théorique est complété par un aspect pratique. L'action humanitaire est à mi-chemin entre les idées et les expériences. Bon nombre d'auteurs utilisent leurs expériences pour proposer une analyse théorique de l'action humanitaire. Cette partie de l'étude est venue complétée la première partie. Elle a consisté à étudier l'action humanitaire par le prisme de deux institutions bien connues du paysage international. MSF définit la politique humanitaire sur le paradigme urgence. Elle ne s'est pas satisfaite de la santé des seules victimes de guerre ou de catastrophes naturelles. Elle va à la rencontre de la population africaine pauvre qui a besoin de prise en charge. Malgré les réponses à de nombreuses questions humanitaires. On retient que garantir la santé est le principal enjeu humanitaire de MSF.

Caritas est une institution qui a la forme d`une toile d`araignée. Les Caritas d'Afrique Subsaharienne sont en partenariat stratégique avec les Caritas d'Europe et d'Amérique. Caritas agit dans les sociétés africaines. Venir en aide aux pauvres est une pratique de la confédération. Le démuni doit trouver les moyens de sortir de cette misère pour avoir une vie plus heureuse. L'action humanitaire de Caritas est visible dans les sociétés africaines. La confédération procède par des projets et des programmes qui bénéficient aux personnes nécessiteuses. Le pontificat du Pape François met la charité au centre des préoccupations. Son magistère recommande une prise en charge des nécessiteux en temps de guerre comme en temps de paix. Elle est permanente dans son intervention. Mais Caritas favorise aussi la consolation des victimes de guerre et autres catastrophes. L'alimentation est un volet essentiel de l'action de Caritas. La Caritas Cameroun est par exemple en plein démarrage du projet « Banque alimentaire »⁴³² et à l'initiative de la conférence épiscopale du Cameroun a été

432 Selon la Coordinatrice diocésaine de la Caritas de Yaoundé, il s'agit pour l'association de charité de récupérer les produits alimentaires dans les grandes surfaces commerciales de la ville. Ensuite de procéder à la distribution auprès des orphelins et des prisonniers. Les chiffres varient selon les quantités et les qualités des produits alimentaires. ( Lire le guide d'entretien).

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organisée au mois d'avril dernier, la première édition de la collecte de fonds en faveur des indigents⁴³³.

L'expérience de ces deux institutions démontre que l'engagement humanitaire se fonde sur les questions vitales à l'instar de la santé, de l'alimentation, de l'éducation, de l'affection... Ces expériences sont loin d'être parfaites et suffisantes. MSF pourrait limiter les prises de parole et Caritas en Afrique subsaharienne devrait professionnaliser son action. L'histoire et la pratique à MSF montre que cet organisme est plus éclaté dans son déploiement. Les MSF des différents Etats ont une autonomie poussée et ce qui peut conduire à avoir deux sons de cloches dans le même organisme. La nature de Caritas, propriété du Vatican peut susciter une réflexion, celle de savoir si Caritas organise plus ses activités humanitaires pour les seuls fidèles de l'église catholique romaine ou si elle embrasse toute la société.

433 Initiative de la fondation Caritas, l'opération débute par un dîner spectacle de charité aux « Cascades du Mfoundi » à Yaoundé, le samedi 29 avril 2017 à 18 heures. Les évêques catholiques veulent inculquer la culture de la générosité aux Camerounais, apprendre aux uns et aux autres à partager, et pas seulement à avoir de temps en temps un geste envers un pauvre. C'est but de la 1ère édition de Collecte de fonds en faveur des pauvres et personnes vulnérables, dont l'annonce a été dévoilée le 24 avril au cours d'un point de presse délivré à Yaoundé par le président de la fondation Caritas au Cameroun « L'action pastorale a aussi un aspect de solidarité. C'est de la nature de l'Eglise d'être au secours de l'Homme qui est en difficulté et dans la souffrance », a expliqué l'évêque. Et de renchérir : « Nous voulons faire du Cameroun un pays de paix et de solidarité. A travers la résurrection du Christ, nous pouvons aussi aujourd'hui ressusciter beaucoup de personnes désespérées, à travers notre générosité ». le programme de mise en oeuvre de cette 1ère Edition de Collecte de fonds en faveur des pauvres et personnes vulnérables était ainsi organisé : Samedi 29 avril 2017 à 18 heures : Dîner spectacle de Charité aux « Cascades du Mfoundi » à Yaoundé, Jeudi 04 mai 2017 à 18 heures : Campus de l'université catholique d'Ekounou (Yaoundé), Table ronde sur « Ecoute des pauvres : Défis du monde d'aujourd'hui » ; Vendredi 05 mai 2017 à 19 heures : Concert de musique religieuse de charité à la Basilique de Mvolyé ...

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CONCLUSION GENERALE

Aucun travail scientifique ne connait un terme mais le terme d'un travail scientifique peut être envisagé. L'analyse a permis de de comprendre la notion d'action humanitaire sous le prisme de deux critères souvent considérés comme les identités remarquables de l'action humanitaire : l'urgence et la permanence dans le contexte de l'Afrique Sub-saharienne. Le premier de ces critères plus répandu, l'urgence, a fait l'objet d'une étude théorique de l'action humanitaire à travers les traits caractéristiques qui permettent de parler de l'urgence. Il faut soulager les souffrances de façon immédiate, dans la célérité et avec un volume énorme de besoins, de matériels et de financement. Cette action humanitaire est celle des évènements classiques: les conflits armés, les catastrophes naturelles, les crises sanitaires... Le contexte de l'action est particulier et les conséquences sont visibles sur le théâtre des interventions. Les événements déclencheurs de cette forme d'humanitaire sont encadrés par des données juridiques prévues et des mécanismes institutionnels prêts à l'action. Cela dit, l'action humanitaire urgente est l'action de tous les dangers, l'action de la ponctualité, l'action de la réactivité mais aussi l'action la plus médiatisée.

Les deux images qui peuvent favoriser la compréhension de cette forme d'humanitaire : l'épreuve du cent mètres en athlétisme et l'image des pompiers qui prennent la route pour aller maîtriser les flammes d'un incendie domestique ou public . L'action humanitaire urgente est une course de grande vitesse et une action de secours de grande envergure. Le second critère, théorique est celui de la permanence. Un critère qui n'est pas nouveau dans l'action humanitaire mais qui est en perte de vitesse. Il s'agit de l'action humanitaire sociale, celle prévue pour les vulnérables, les misérables, les souffrances de nos sociétés. Il était question de déterminer les motivations de cette forme d'humanitaire. Pour orienter notre étude, il a paru nécessaire d'identifier et de proposer une structuration des programmes sociaux qui déterminent le coeur de l'humanitaire de tout le temps et de tous les instants. Qu'importe la société où on se trouve, qu'importe les époques, qu'importe le niveau de développement de ce pays, les vulnérables auront toujours besoin d'aide humanitaire, de protection sociale et de soutien réel. L'action humanitaire en permanence est à l'image d'une épreuve du cinq cent mille

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mètres mais aussi à l'image d'une pendule qui tourne à tout instant pour marquer l'évolution du temps. C'est l'action humanitaire des politiques sociales marquées par les valeurs humaines et matérialisées par des activités sociales généreuses.

Plus pratique, la deuxième partie de l'étude est un maillage institutionnel avec d'un côté, l'humanitaire médicale de MSF et d'un autre côté, 'action humanitaire caritative de Caritas, deux organismes bien connus des espaces humanitaires en général et dans le contexte de l'Afrique subsaharienne. Tous étaient présents pendant la guerre du Biafra et dans bon nombre d'évènements en Afrique Subsaharienne. MSF s'est défini dès le départ comme un instrument d'urgence, une spirale contre les souffrances lors des conflits et des catastrophes. Mais cette association humanitaire ne s'arrête pas là aujourd'hui, elle a un registre qui la met sous l'orbite des politiques sociales et des politiques de développement en Afrique. Promouvoir la santé dans les milieux précaires et accompagner les réfugiés dans leurs camps ou dans leurs zones de réinstallation. L'étude pratique s'achève sur l'expérience humanitaire de Caritas, une machine humanitaire de l'église catholique romaine. Cet oasis humanitaire accompagne les familles en détresse en apportant une aide humanitaire vitale : la nutrition et la scolarisation. Caritas n'est pas une absente des évènements urgents. Sa présence à l'occasion des catastrophes naturelles et des conflits est une preuve de son engagement humanitaire. Dans les deux cas de figures, il est à souligner qu'il reste beaucoup à faire. Caritas est une association connue mais les procédures, pour bénéficier de ses soins dans la société africaine, ne sont pas bien connues par les potentiels bénéficiaires. La neutralité de MSF de par ses prises de position peut toujours être remise en cause, quand on sait qu'il s'agit un principe cardinal de l'action humanitaire. Néanmoins, l'action humanitaire dans l'urgence comme dans la permanence, demeure l'action humanitaire.

Les ONG et d'autres associations remplissent l'audience pour les deux formes d'humanitaire : l'urgence et la permanence. Rien n'est négligé, tout dépend des moyens, des hommes et de la possibilité d'intervention. On sauve des vies dans l'immédiat et dans le long terme. L'urgence peut se mêler à la permanence et la permanence peut se mêler à l'urgence. Tout cela varie selon les situations. Ce travail signifie que l'action humanitaire prend la forme de la situation qui se présente. Pour certains auteurs : « Il est ainsi nécessaire de partir des situations réelles des populations et de déterminer comment les

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différentes actions peuvent se combiner. » 434 . On peut donc déduire que l'action humanitaire en général a deux formes ou deux conceptions. « Il existe deux conceptions de l`humanitaire : l`humanitaire de projection et l`humanitaire d`inclusion. Dans l`urgence, sont mobilisés dans les pays du Nord des ONG qui se projettent dans les pays du Sud. Pour sa part, l`humanitaire d`inclusion associe la société civile et se situe au plus proche des personnes vulnérables. »⁴³⁵.

Cette étude met en valeur de grands défis qui interpellent le monde et les humanitaires. De nouvelles formes de conflictualité avec le terrorisme qui secoue le monde et tout particulièrement l'Afrique, les terroristes n'ont pas prévu dans leur agenda une page humanitaire. Lors du conflit libyen en 2011, les humanitaires ont rencontré des obstacles pour mener leurs activités. Le cas syrien n'est pas différent. MSF avait titré en 2013 : « 2 ANS DE CONFLIT EN SYRIE L`AIDE HUMANITAIRE DANS L`IMPASSE »⁴³⁶. La situation conflictuelle du Mali connote la douleur à suivre ou à faire vivre les activités humanitaires dans le cadre d'un conflit asymétrique. Et le défi de l'action humanitaire devient plus important en Afrique parce que les conflits se suivent et la vulnérabilité est plus croissante. L'action humanitaire est une requête toujours pendante. La crise des migrants que connaissent le monde, l'Europe et même l'Afrique est un autre appel lancé à une action humanitaire en urgence mais aussi en permanence. Selon le Conseil économique, social et environnemental de la France : « les migrations internationales concernaient en 2013, selon les chiffres des Nations unies, 232 millions de personnes. » 437 . La question des migrations internationales montre que l'action humanitaire doit se muer et être prête à répondre à tous les défis de l'heure. Les Etats devraient désormais établir une politique humanitaire interne, bien structurée et efficace. Pour les acteurs humanitaires internationaux, il faut plus de professionnalisme dans les

434 Actes de la journée d'étude organisée par le Groupe initiatives le 9 février 2012, Sous la coordination de Christian Castellanet (Gret) et d'Aurélie Quentin (Gret), « Les ONG de développement face à l'urgence : enjeux et stratégies d'adaptation », les éditions du groupe initiatives gret - professionnels du développement solidaire n°37, p.26

436 MSF, « Urgence Syrie 2 ans de conflit. L'aide humanitaire dans l'impasse », Dossier de presse, mars 2013.

437 Les Avis du Conseil Economique Social et Environnemental, O.Kirsch « Migrations internationales : un enjeu planétaire », Journal Officiel de la République française, Mandature 2010-2015 - Séance du 27 octobre 2015, p.5.

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interventions et une culture humanitaire à l'africaine. Il faudrait des Dunant africains ou des Rony Brauman en Afrique. Le social doit gagner plus de terrain dans les politiques publiques. Les Etats de l'Afrique subsaharienne, le Cameroun notamment pourraient expérimenter un instrument nécessaire pour les politiques sociales, la protection civile et les situations humanitaires éventuelles : la carte humanitaire du Cameroun (CAHUC)⁴³⁸. Ce document doit permettre d'identifier les démunis dans les sociétés africaines, les comptabiliser et discipliner ce secteur. Il peut favoriser l'accueil des réfugiés et des blessées de guerre qui nécessitent un accueil et une prise en charge immédiate par les institutions humanitaires nationales et internationales ayant un siège au Cameroun.

C'est à se demander où l'action humanitaire trouvera la force et l'énergie pour aller de l'avant ? La réponse possible est qu'elle puisera tout cela dans la fidélité aux principes humanitaires traditionnels, d l'amélioration des performances humanitaires et la volonté à vivre et à agir avec les valeurs fondamentales de l'action humanitaire. Pouvant être considéré comme le spectre des principes humanitaires traditionnels, le CICR considère que lesdits principes sont comme le sous-sol de l'action humanitaire : « Exercer un mandat juridique est une chose, mettre en pratique les principes d`humanité, neutralité, indépendance et impartialité en est, bien sûr, une autre. Pour le CICR, cela exige essentiellement une approche basée sur les besoins ainsi qu`une proximité avec les bénéficiaires et l`établissement d`un dialogue avec toutes les parties prenantes. Cette approche permet à l`institution de gagner le maximum d`acceptation et de respect et, par ce biais, l`accès humanitaire le plus large possible »⁴³⁹.La question de l'efficacité de l'action humanitaire a connu un écho favorable dans les cercles associatifs humanitaires. C'est l'essentiel du contenu du projet Sphère ⁴⁴⁰ , une initiative à but non lucratif rassemblant un grand panorama d`agences humanitaires autour d'un objectif commun : améliorer la qualité de l'aide humanitaire ainsi que la recevabilité des acteurs humanitaires vis-à-vis de leurs mandants, de leurs bailleurs de fonds et des populations

438 Le CAHUC serait une forme de passeport utile aux nationaux et aux non-nationaux selon que nous soyons en situation d'urgence ou que nous soyons en situation sociale précaire. Sa validation pourrait avoir des conséquences aux plan juridique, institutionnel logistique et matériel.

439 Cl . Mc Goldrick, « L'avenir de l'action humanitaire : une perspective du CICR », op.cit, p.110.

440 Projet Sphère, La Charte humanitaire et les standards minimums de l'intervention humanitaire, op cit.

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nécessiteuses. La coordination Sud a produit un guide⁴⁴¹ qui présentait cinq pistes pour aboutir à une action humanitaire de qualité notamment l'éthique humanitaire, la gouvernance associative, la gestion des ressources humaines, le cycle de projet, la participation des populations. Tous ces cinq points sont essentiels, mais dans le contexte africain, ce qui urge c'est d'avoir une ressource humaine de qualité et de quantité. On a besoin d'avoir en Afrique des humanitaires exemplaires dans les conflits et dans les institutions étatiques à vocation humanitaire.

Pour les valeurs, elles sont nombreuses. Quelles sont les plus essentielles ? La responsabilité, si l'humanitaire est vue comme un métier, elle est simplifiée, elle est une vocation ou une mission salutaire, l'action humanitaire est une responsabilité majeure et historique. La joie est également fondamentale dans toute entreprise humanitaire surtout pour une action humanitaire continuelle. Au-delà du bien humanitaire, le sourire ou l'échange convivial avec une victime est un geste humanitaire fort. Les humanitaires doivent agir avec un coeur rempli de gaieté et transmettre cet esprit à chacun de leur passage. Aussi, l'action humanitaire même bien pensée et bien préparée demande de la créativité. Les humanitaires doivent être des acteurs créatifs, des artistes, plus efficaces et plus actifs. Il est difficile de tout avoir sur le terrain mais tout est possible quand on est créatif. Enfin, la dernière valeur est une vertu cardinale dans l'entreprise humanitaire. Elle a été proposée par une femme, victime du génocide rwandais, grièvement blessée, à un humanitaire⁴⁴² en pleine opération de secours et submergé par le nombre croissant de blessés. Cette femme parlait en langue locale rwandaise : Ummera, ummera - sha disait-elle. C'est une expression rwandaise qui signifie : "Courage, courage mon ami - trouve et laisse vivre ton courage. Il faut le courage dans l'action humanitaire, courage pour les bailleurs de fonds, courage pour les humanitaires, courage pour les victimes... La formule Ummera, ummera -sha pourrait devenir un slogan commun à tous les humanitaires et à toute action humanitaire.

441 Coordination Sud, Le guide Synergie Qualité « Propositions pour des actions humanitaires de qualité », 2005.

442 Cette expérience humanitaire est rapportée par le Docteur James Orbinski , président de MSF d'alors, lors de son discours prononcé à Oslo à l'occasion de la cérémonie de la remise du prix Nobel de la paix à MSF le 10 décembre 1999, p.4.

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BIBLIOGRAPHIE

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8.P. Fodere, Traité de droit international européen et américain, Paris 1885, t1

10.Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, Ladrange, Traduit de l'Allemand en français par Victor Delbos (1862-1916) à partir de l'édition de 1792, 73 P.

11. Kant, Idée d`une histoire universelle au point de vue cosmopolitique, in philosophie de

12.M. Neuman & F. Weissman, Secourir sans périr la sécurité humanitaire à l`ère de la gestion des risques, CNRS, mars 2016, 274 P.

13. Nietzsche, La volonté de puissance, Gallimard, tome 1. Septembre 1995, 462 P.

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14.M.A, Perouse De Monteclos, l`aide humanitaire, aide à la guerre ?, éditions complexe, bruxelles , 2001, 207 p.

15. D.Rieff , L`humanitaire en crise, Le serpent à plumes, Paris, octobre 2002, 300 P. 16.JJ. Rousseau , L`Etat de guerre, Gallimard, pléiade, tome III, 2000 réédition, 85 P.

B. Ouvrages spécialisés :

8.F. Bouchet-Saulnier et F. Dubuet, témoignage judiciaire ou humanitaire ? Historique des interactions entre MSF et les procédures d`enquêtes et de poursuites judiciaires, avril 2007 - CRASH/Fondation - Médecins Sans Frontières, 63 P.

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14.J-M. Ela, Afrique, l`irruption des pauvres sociétés. Contre ingérence, pouvoir et argent, Paris, Harmattan, 1994, 272 P.

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C. Mémoires et Thèses

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Conakry (Guinée) et Accra (Ghana). Géographie. Thèse, Université de de Poitiers, 2013, 652 P.

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16. A-D, Olinga, Contribution à l`étude du droit d`ingérence.( l`assistance humanitaire et

la protection des droits de l`homme face au principe de non-intervention en droit international contemporain), thèse, université de Montpelier I, 1993, 486 p.

D. Articles

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E. Conventions et législations

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30. Avis du Conseil Economique Social et Environnemental, O.Kirsch « Migrations

internationales : un enjeu planétaire », Journal Officiel de la République française, Mandature 2010-2015 - Séance du 27 octobre 2015.

F. Rapports et documents didactiques.

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G. Lexiques et dictionnaires

F. Entretiens et Discours

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INSTITUT DES RELATIONS
INTERNATIONALES DU CAMEROUN
B.P.: 1637 Yaoundé
Tel: 22 31 03 05
Fax: (237) 22 31 89 99
Site web : www.iricuy2.net

INTERNATIONAL RELATIONS INSTITUTE
OF CAMEROON
P.O Box: 1637 Yaoundé
Tel: 22 31 03 05
Fax: (237) 22 31 89 99
E-Mail: contact@iricuy2.net

PROJET DE FUNDRAINSING POUR SOIGNER 2 MALADES
PAR LES ETUDIANTS DE CA2D ACTION HUMANITAIRE
(FUND2M -CA2D)

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RAPPORT DE MISE EN OEUVRE
par le :
Groupe des volontaires CA2D/AH 5^ème PROMOTION
Yaoundé le 25 avril 2017.
CONTEXTE ET JUSTIFICATION DU PROJET

Au rang des exigences du Master CA2D, le « Project Work », véritable gage de la spécificité du parcours, mobilise les étudiants dans le sens de la conception et la rédaction d'un projet de développement. Il intervient en continuum des enseignements théoriques dispensés sur l'ingénierie des projets, et en constitue la partie pratique. De manière innovante, les étudiants de la cinquième promotion, inscrits en « Coopération au Développement et Action Humanitaire » obéissent à cet impératif académique par voie de mobilisation au sein d'un projet d'assistance aux malades de l'émission « Urgence » diffusée sur les antennes de la chaîne de télévision Canal 2 International. Cette initiative permet en l'occurrence de capitaliser les notions et connaissance théoriques acquises à travers plusieurs enseignements de spécialisation (Critique postcoloniale en Santé Publique et en Médecine Humanitaire ; Histoire, Architecture Organisationnelle et Gouvernance des ONG, etc.). En tant que point d'intersection entre Unités d'Enseignements, ce gigantesque projet répond parfaitement au besoin de mobilisation, d'assistance humanitaire et de mise en pratique des enseignements de l'UE : « Histoire, Architecture Organisationnelle et Gouvernance des ONG ». En effet, dans le cadre de cet enseignement, il est prévu que les étudiants mènent des oeuvres caritatives. D'où l'identification de deux cas de patients pris en charge par l'Emission « Urgence ». C'est ainsi que les 23 et 24 février 2016 elle a réalisé des visites auprès des personnes concernées, non point les mains vides, pour s'enquérir de leur situation et leur assurer son engagement pour leur cause. Il s'agissait là d'une descente importante qui a été diffusée dans l'émission « Urgence » de Canal 2 International, et témoigne ainsi de l'engagement effectif des étudiants. En droite ligne de cet engagement il est prévu que le collectif des étudiants mobilise des fonds destinés à couvrir les coûts des interventions chirurgicales des patients ciblés.

I. NOTE DE PRESENTATION DU PROJET

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Titre de l'action :	PROJET DE FUNDRAINSING POUR SOIGNER 2 MALADES PAR LES ETUDIANTS DE CA2D ACTION HUMANITAIRE (FUND2M -CA2D)
Lieu de l'action	Yaoundé
OBJECTIF de l'action	Objectif global : contribuer à l'amélioration des conditions de vie de deux jeunes Camerounais et l'amélioration de la formation en fundraising des étudiants de la 5ème promotion de CA2D. Objectifs spécifiques : Les objectifs spécifiques de ce projet se déclinent en trois tableaux : · Objectif spécifique 1 : Organiser une campagne de fundraising et mobiliser au moins un million trois cent mille (1.300.000) francs cfa ; · Objectif spécifique 2 : Pourvoir au financement des interventions chirurgicales de deux patients et favoriser leur réinsertion socio- professionnelle ; · Objectif spécifique 3 : Pratiquer et maîtriser au moins cinq techniques de fundraising par au moins 80% d'étudiants humanitaires.	Groupes cibles
Les populations de la ville de Yaoundé, les étudiants de CA2D 5^ème promotion, les Mairies, les familles des étudiants de CA2D, les malades, le personnels de l'IRIC, les ONG	Bénéficiaires finaux
· Les deux malades · Les étudiants de CA2D 5 AH · Les familles des malades	Résultats estimés
Au terme de ce projet, les résultats attendus se déclinent ainsi qu'il suit : 1. A court terme · Un montant d'au moins un million trois cent mille francs Cfa (1.300.000 Fcfa) est mobilisé à travers une campagne de fundraising ; · Deux patients sont opérés dans des formations hospitalières de la ville de Yaoundé ; · Au moins quatre techniques de fundraising sont pratiquées et maitrisées par au moins 80% des étudiants acteurs humanitaires. 2. A long terme · Les deux patients soignés réintègrent leur profession de couturier et restaurateur, ainsi sont financièrement indépendants ; · Une association des étudiants oeuvrant dans l'action humanitaire est créée
Activités principales	I. Analyse de l'environnement et choix des stratégies de fundraising Identification des problèmes majeurs par l'analyse des forces et faiblesses de la zone du projet ; identification des acteurs pouvant être partie prenantes du fundraising ; élaboration de la méthodologie de travail (formation des commissions) ; élaboration du planning d'activité ;...etc. II. Sensibilisation des différents acteurs du projet Elaboration élaboration des termes de références pour l'administration de l'IRIC ;

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obtention des différentes autorisations de l'administration de l'IRIC ; rencontre et sensibilisation des différents donateurs ; discussion avec les malades ; opération des malades ; suivi post opératoire des malades.

III. Suivi-évaluation et reporting

Participation aux réunions de brainstorming ; visite sur le terrain et rencontre avec les malades et les médecins pour apprécier l'évolution des activités d'opération chirurgicales ; identification des difficultés rencontrées par les étudiants dans la levée des fonds ; élaboration des rapports de suivis et d'évaluation des activités menées par les étudiants de 5^ème promotion CA2DAH et les partenaires (donateurs).

A. Les bénéficiaires

S'il est vrai que notre projet présente plusieurs bénéficiaires, il est indiqué de les présenter en deux sous-groupes, à savoir les bénéficiaires directs et les bénéficiaires indirects, tout comme l'impact possible et perceptible sur ces derniers.

? Les familles de ces patients et leur entourage. A titre d'illustration, Christophe

qui est un père de famille ne peut plus satisfaire à ses obligations de chef de famille. Ne pouvant plus exercer aucune activité rémunératrice, son épouse qui s'investit au quotidien au travail de femme de ménage est obligée d'abandonner cette activité pour s'occuper de son époux qui désormais ne se nourri plus qu'avec des aliments pâteux ou liquides. Le rétablissement de sa santé facilitera ainsi le redéploiement de cette femme dans ses activités quotidiennes. Il en est de même de Gustave, qui, ayant abandonné sa famille dans le septentrion à la recherche du travail, et vivant avec un ami à Yaoundé dans une

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maisonnette en matériel renouvelable, les planches, dans les profondeurs du quartier Bastos, et dont la condition physique et l'inactivité obligeraient ce dernier à supporter tout seul les coûts du loyer et de nutrition. Son recouvrement sanitaire soulagerait aussi bien cet ami qui est devenu responsable de son colocataire.

> Les étudiants du parcours de formation en Action Humanitaire que nous
sommes, constituent également des bénéficiaires indirects de ce projet. En effet, la mise en oeuvre de ce projet permettrait à coup sûr, à chacun des étudiants, de se doter des compétences en matière de fundraising pour mieux se préparer au monde de la recherche d'emploi, et de pouvoir contribuer à l'effort gouvernemental d'assurer le plein épanouissement des populations.

B. Les partenaires potentiels

Compte tenu du coût élevé des différentes opérations chirurgicales de ces patients, les partenaires suivants seront d'un apport incontestable à la mise en oeuvre effective et efficace de ce projet, selon qu'il s'agisse des partenaires associés ou des partenaires financiers :

C. LA CAPACITE DE MISE EN OEUVRE DU PROJET

La mise en oeuvre de ce projet bénéficie de la capacité des étudiants à mobiliser des fonds conséquents, de l'élaboration d'un schéma technique de mise en oeuvre des différentes phases du projet, et de l'accompagnement des différents partenaires.

1. L'expertise des acteurs du projet

L'élaboration et la mise en oeuvre de ce projet sont le fruit de l'ingéniosité des étudiants en fin de formation en relations internationales et plus spécifiquement en action humanitaire, dotés de compétences acquises lors des enseignements en fundraising.

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Constitués de professionnels de média et d'acteurs humanitaires, ces derniers présentent des dispositions favorisant la réussite de ce projet.

2. Le schéma de mise en oeuvre du projet

Pour asseoir une stratégie efficace de mise en oeuvre de ce projet, nous avons procéder à l'éclosion de notre effectif en commission d'activités avec des attributions bien spécifiques. Il s'agit de :

- De la définition de la politique d'orientation de l'ensemble des activités ;

- De la représentation des porteurs du projet auprès des différents partenaires ;

- De la définition de l'agenda des rencontres et de la définition de l'ordre du jour ;

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Avec à sa tête un chargé de la communication, la commission de la communication est chargée :

- De l'élaboration des différents supports de communication internes et externes autour

du projet (dépliants, demande d'aide, correspondances administratives ci-joints en

annexe), qu'elle soumet à l'assemblée lors des réunions pour débats et adoption ; - Des différentes communications avec les médias.

- De communiquer et de sensibiliser le public (étudiants, les membres de l'administration, les potentiels partenaires) autour du projet ;

- De distribuer des dépliants et des demandes d'aide auprès des différentes cibles (étudiants, fidèles des lieux de culte, clients des supers marchés, personnel administratif, autres groupes identifiés) du fundraising préalablement identifiées. La commission logistique

Avec à sa tête un responsable de la logistique, la commission de la logistique est chargée :

- De la mise à disposition des différents supports matériels (formats, T-Shirt et autres) ;

- De l'acquisition et de la mise à disposition des patients de certains médicaments ou accessoires médicaux non disponibles dans les formations sanitaires ;

- De l'acquisition et du transport du matériel de premières nécessités remis aux patients lors des premières visites de contact avec eux.

Avec à sa tête un responsable financier, la commission de recouvrement, de la trésorerie et des comptes a pour principales attributions :

- Le recouvrement des différentes contributions des étudiants humanitaires dont le taux est fixé à vingt-cinq mille francs ;

- Le recouvrement des différents coupons réponses des demandes d'aide et l'encaissement des fonds y afférents ;

- La comptabilité des différentes contributions dont elle rend compte à chaque réunion. La commission médicale

- La recherche des médecins pour la contre-expertise ; - L'aide du suivi des malades ;

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D. BILAN FINANCIER DU PROJET

Préalablement estimé à un coût total de 1.300.000 FCFA. Les principaux éléments constitutifs de notre budget sont entre autres :

? L'achat du matériel pour l'insertion socio- professionnelle des deux malades. 1. Recettes

Notre FUNDRAISING a permis de récolter des dons qui s'élèvent à une somme de 1872 000 FCFA. Il est rappelé que les ressources de notre Fundraising sont les suivantes :

Intitulé	Montants
Cotisation des étudiants de CA2D	750	000
Cotisation professeurs de l'IRIC	150	000
Cotisation des personnes de bonne volonté	672	000
Don mairie de Yaoundé IV	300	000
Total	1872	000

Intitulé	Montant
Opération chirurgicale Gustave	418	000
Opération chirurgicale Christophe	431	000
Contre -expertise du diagnostic de Gustave (2 éme opération)	65	000
Traitement post- opération jusqu'à cicatrisation complète (médicaments)	100	000
Rééducations (40 séances *2000 FCFA)	80	000
Transport pour rééducations au centre des handicapés (40 jours)	40	000
Transport pour traitement blessure hôpital d'Elig-Essono (50 jours)	50	000
Transport descente des étudiants	13	000
Transport suivi des opérations (présidente)	20	000
Téléphone	10	000
Confession des t-shirt pour sensibiliser (35* 4000)	120	000
Achat machine à coudre + matériaux (pour autonomiser Gustave)	100	000
2 Parasoleils pour Gustave et Christophe	20	000
Achat matériel cafétéria (pour autonomiser Christophe)	140	000

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Toutes les activités de notre Fundraising s'élève à la somme de 1.622 000FCFA.

Le total des recettes et des dépenses laisse apparaître un solde créditeur de notre trésorerie d'un montant de 250 000 FCA.

Ce résultat positif de « 250 000 FCFA » nous permettra de commencer les activités de lancement de notre association qui sera marqué par l'organisation de la première édition du « REPAS HUMANITAIRE »au profit de six orphelinats.

E. La description et la mise en oeuvre du Fundraising

1. Le Fundraising et techniques adoptées

Dans l'optique de mobiliser assez de financements et d'éviter de faire recours aux méthodes et techniques de fundraising qui violeraient le droit à la vie privée des bénéficiaires, plusieurs activités ont été préalablement envisagées. Il s'agissait entre autres de :

> Campagne de sensibilisation et de collecte de fonds à travers les médias sociaux ; > Campagne de sensibilisation dans les sites abritant les services administratifs ;

> Campagne de sensibilisation et de collecte de fonds au sein de l'IRIC : étudiants et personnels administratifs ;

> Campagne de sensibilisation et de collecte de fonds dans les supers marchés et autres lieux à forte concentration humaine ;

Mais, en raison de la délicatesse de l'activité de collecte des fonds liée à notre statut d'étudiants sous un régime académique bien encadré, il ne nous à pas été possible de déployer cette grosse machine de fundraising qui aurait sans doute favorisé l'explosion des contributions financières. Toutefois, sur la base de l'attestation de recherche n^o748/16/UYII/IRIC/CA2D du 23 juin 2016 (copie en annexe), délivrée sur sollicitation mais presque hors-délais de la clôture de nos activités, nous avons opté pour deux stratégies principales de fundraising que sont les contributions individuelles, le mailing et les subventions des collectivités décentralisées.

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Sachant que les différentes mairies oeuvrent pour de tel cas, nous nous sommes rapprochés de quatre mairies, seul la mairie de Yaoundé IV nous a accordé une subvention de trois cent mille (300 000) FCFA. La mairie de Yaoundé I était aussi favorable au projet, mais compte tenu de l'urgence de l'action nous n'avons pas fait le suivi.

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2. La prise en charge des patients

La prise en charge des patients a obéit à un processus préalablement établit, qui consistait en l'identification des malades suivant un ensemble de critères d'évaluation, l'identification des structures hospitalières d'accueil, les différentes interventions chirurgicales et l'accompagnement post-opératoire.

a. Identification des bénéficiaires directs.

En collaboration avec la chaîne de télévision CANAL 2 International, notamment son émission d'assistance sociale dénommée « Urgence », nous avons procédé à l'identification des bénéficiaires, laquelle s'est faite suivant plusieurs critères, sans distinction de sexe, de race ou encore de religion :

Les critères de sélection des bénéficiaires sur le plan économique sont les suivants :

- Etre financièrement pauvre, c'est-à-dire n'exerçant aucune activité économique

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- La condition physique ou encore l'état de santé du malade devrait avoir un impact dans son environnement, sa famille ;

Suivant le profil des acteurs humanitaires qui était avant tout celui d'étudiants d'une institution universitaire basée à Yaoundé, le critère de sélection s'est aussi fait suivant le positionnement géographique des bénéficiaires. Il fallait être un résident de la ville de Yaoundé, département du Mfoundi, Région du Centre. Ce qui faciliterait le suivi dans des formations sanitaires spécialisées et le contact physique permanent avec les bénéficiaires.

Ces différents critères ont permis de retenir les demandes d'assistance de deux résidents de la ville de Yaoundé, déposées auprès des services de Canal 2 International. Ces dossiers étaient constitués :

Né à Maroua en 1991, Gustave Bekaïro est âgé de 25 ans, cet originaire de la Région de l'Extrême-Nord souffre d'une blessure chronique au niveau du pied gauche depuis l'âge de 17 ans. A cette époque, de par sa condition physique sans cesse dégradante, il est obligé d'abandonner ses études en classe de première pour pouvoir travailler et se soigner. Orphelin de père, il est issu d'une famille extrêmement pauvre, qui ne peut l'assister dans sa prise en charge. N'ayant pas suffisamment de moyens pour subir les opérations chirurgicales nécessaires à son rétablissement, Gustave s'adonne malgré lui à des traitements à l'indigène qui ne feront qu'alimenter son mal et sa douleur.

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Après près de huit ans passées à rechercher un soulagement définitif pour son pied, Gustave décide de se rendre à Yaoundé pour continuer sa quête. Il est alors accueilli par un ami dans une petite chambre rudimentaire construite à base de planches dans les profondeurs du quartier Bastos à Yaoundé où il dort à même le sol. C'était au contraire un coup de tonnerre dans le ciel bleu des illusions de Gustave, quand il se rendit compte qu'il ne pouvait travailler, en raison du développement rapide de sa blessure qui l'obligeait à passer des journées interminables dans cette petite pièce. Nourrissant toujours l'espoir de retrouver la guérison un jour et de retourner à l'école, c'est grâce à son ami que son dossier a été déposé auprès des services de Canal 2 International.

Père d'une famille de quatre (04) enfants, Christophe gagne son pain grâce à la photographie dans la ville de Yaoundé. Son épouse, elle, gagne sa vie en travaillant comme

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femme de ménage chez un particulier, associé au petit commerce saisonnier de denrées alimentaires. C'est avec ces efforts conjugués qu'il pourvoit aux pressions financières de sa famille et offre une éducation à sa progéniture. Victime d'un accident de la circulation, Christophe a vu sa mâchoire prendre un sérieux coup. Bien qu'ayant effectué les premiers soins, il n'a pu subir cette opération qui lui rendrait l'activité normale de sa mâchoire. Contraint de rester désormais dans cette maison qu'il loue sous le regard affligé de son épouse et de ses enfants. Son épouse à son tour a été obligée de quitter ses activités pour s'occuper désormais de son mari qui ne peut mâcher des aliments ou même parler distinctement, et qui reste désormais allongé en longueur des journées, avec pour seul espoir d'être contacté par Canal 2 International auprès duquel il a déposé sa demande.

b. Les premières descentes sur le terrain

Dans le cadre de cette levée de fonds, les descentes sur le terrain avaient pour but de prendre connaissance de l'état des malades qui allaient bénéficier des fonds collectés.

Afin de s'assurer de l'effectivité du dossier consulté auprès de Canal 2 International par le biais du présentateur vedette de l'émission « Urgence », alors participant de notre projet, des descentes ont été effectuées dans les domiciles respectifs de ces malades, lesquelles visites ont également permis de constater l'urgence médicale exprimée et d'apporter à ces derniers quelques produits de premières nécessités constitués de denrées alimentaires, notamment du riz, de l'huile de cuisson, du lait, des pâtes alimentaires, des

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conserves et du sucre. C'est alors que les 23et 24 février 2016, chacun des patients a reçu une visite à domicile, du groupe de volontaires humanitaires du parcours professionnel CA2D.

F. SUIVI DES MALADES ET INSERTION SOCIO-PROFESSIONNEL a. Identification des structures sanitaires

En collaboration avec Canal 2 International, le choix a été porté sur deux formations hospitalières de la place : l'Hôpital BETHESDA et l'Hôpital Central de Yaoundé. Ces choix ont été faits sur la base de :

C'est alors qu'ayant identifié ces hôpitaux qui disposent toutes des spécialistes en chirurgie, des rendez-vous ont été pris pour des consultations, afin de faire le diagnostic réel et de déterminer les coûts exacts des différentes opérations chirurgicales.

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b. Le suivi de Gustave Bekaïro

Agé de 25 ans seulement, Gustave traine avec lui une blessure chronique qui dure depuis huit ans. Il faut dire qu'avant le lancement du projet, Gustave avait déjà reçu des traitements à l'indigène et dans les hôpitaux. Il avait même déjà subit une opération qui n'avait malheureusement pas été un succès.

Vue l'étendue et la gravité de la plaie, Gustave doit régulièrement effectuer des pansements afin de ne pas s'infecter davantage. Le centre hospitalier choisi pour ses soins médicaux est l'Hôpital Bethesda sis à la « Nouvelle route Bastos » à Yaoundé. Il a droit à deux ou trois pansements chaque semaine, pour 2500 FCFA le pansement, en attendant le jour même de l'opération. Ces frais sont couverts par les fonds déjà versés auprès de la trésorière du projet.

Après avoir renouvelé les pansements pendant quelques semaines, et suivant le taux des dons (financiers) perçus et disponibles auprès de la commission de recouvrement et de la Trésorerie à l'occasion de cette campagne de fundraising baptisée « agir pour guérir » ou encore « Act to heal », la première opération du pied de Gustave, a été programmée le 22 juin 2016.

L'HUMANITAIRE ENTRE URGENCE ET PERMANENCE : LES ACTIVITES DE MEDECINS SANS-FRONTIERE ET DE CARITAS EN AFRIQUE SUBSAHERIENNE

Gustave, le jour de son opération avec son carton de médicaments, en attente devant le

La collecte de fonds organisée par les étudiants d'Action Humanitaire a permis de réunir les cinq cent mille (500 000 Fcfa) et quelques nécessaires pour cette intervention chirurgicale à l'hôpital Bethesda de Yaoundé. Le médecin chargé de pratiquer cette opération est le docteur OBOMBIOCK. Elle se déroulera pendant environ 3 heures de temps sans complications véritables.

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L'opération de Gustave consistait à faire une greffe en retirant une partie de la peau de sa cuisse pour recouvrir sa plaie, puisque la peau à l'endroit de la plaie est déjà abimée et ne peut plus se reconstituer. Pour des raisons médicales, la peau au niveau de sa cuisse gauche est la mieux adaptée, d'après l'expertise du Dr. OBOMBIOCK.

Après son opération, Gustave est interné pendant une semaine pour un suivi postopératoire. Il faut préciser que le coût des pansements effectués au cours de cette période était inclus dans la somme versée pour l'opération. Par contre, son alimentation pendant son séjour à l'hôpital est assurée par les acteurs du projet.

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Visite à la chambre d'hospitalisation de Gustave quelques jours après l'opération

Bien qu'ayant retrouvé son domicile après une semaine, ce dernier a continué de bénéficier de l'achat d'un antibiotique pour un montant de 5000 Fcfa à chaque épuisement pendant six mois.

Un deuxième redéploiement des étudiants s'est fait pour la deuxième opération de Gustave en janvier 2017, qui cette fois ci concernait sa cheville pour lui permettre de bien marcher. Ayant des étudiants du corps médical dans le groupe, ceux-ci ont trouvé cela délicat, et ont demandé de faire une contre-expertise de ce diagnostic. A la suite de leur idée, une commission médicale a été mise sur pied.

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Suite aux différentes actions menées, aux différents avis des spécialistes sur le cas de Gustave et au désir du patient lui-même la commission médicale créée le 23 janvier 2017 recommande ,de suivre l'avis des différents spécialistes rencontrés et d'opter pour l'option de la rééducation orthopédique pour Gustave ; en effet, cette option est plus sûre, moins invasive pour le malade.

C'est ainsi que Gustave a eu une prescription de faire quarante(40) séances de rééducation au Centre des Handicapés,par ricochet, l'intéressé devrait continuer à subir une assistance médicale qui consiste en l'extraction d'un liquide dans la plaie.

En plus, ce dernier a reçu un repos médical complet ( car il devait éviter de marcher avec ce pied)prescrit par le docteur de l'hôpital centrale, d'où son internement à l'hôpital de district d'Elig -Essono pendant quatorze jours pour le suivi-contrôle de la plaie.

Aujourd'hui Gustave a retrouvé la santé car la plaie a cicatrisé, les rééducations ont été faite, et le dernier rendez-vous avec le Docteur MANGA est prévu pour le 11 mai 2017.

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Un ultime objectif spécifique qui s'inscrit dans la logique de redonner le sourire à Gustave, celui de sa réinsertion socioprofessionnelle. En effet, après avoir discuté avec celui-ci, il nous a fait part de son projet de vie qui est celui de devenir un grand couturier. A cet effet, nous proposons de lui offrir une machine à coudre électrique neuve ainsi que les accessoires, de l'accompagner dans ces premiers pas de la vie professionnelle. Gustave, pour manger, fait des fois la manche devant la cathédrale. L'accompagner socialement, lui rendra ce sourire, car il deviendra autonome, capable d'assumer ses besoins essentiels et plus tard de fonder sa famille.

Pour lui permettre de commencer son activité de couturier, le Groupe des Volontaires a acheté une machine à coudre, un carton de bobine de fil, un fer à repasser et un parasol pour un montant de cent vingt-cinq mille (125 000) FCFA.

Si tel est l'état de santé actuelle de Gustave, qu'en est-il de Christophe Biwolé ? c. Le suivi de Christophe Biwolé

Pour la restauration de sa mâchoire, l'établissement hospitalier choisi pour ce patient est l'hôpital central de Yaoundé et le médecin en charge de son opération est le docteur EDOUMA. Après connaissance du cas, Christophe a été conduit vers ce spécialiste qui a évalué le coût de l'opération salvatrice à quatre cent trente un mille (431.000) FCFAà la suite de quelques analyses médicales. Avec les frais du projet, il a bénéficié des pansements avant l'opération et après l'opération. Cette dernière s'est déroulée le 29 août 2016 sous l'expertise du Docteur EDOUMA de l'hôpital Central.

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Christophe, avant son opération avec son carton de médicament dans sa chambre
d'hospitalisation

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Il espère reprendre très vite son activité de photographe pour subvenir à nouveau aux besoins de sa petite famille.

Lors d'une visite chez lui, le Groupe de Volontaire a décidé avec son accord de l'aider à réaliser un projet dont il avait à coeur : l'installation d'un restaurant parapluie.

Pour cela, avec le reste de fond en caisse, nous avons décidé de l'achat du matériel du restaurant (plaque à gaz, bouteille de gaz, 30 plats, 24 tasses, 30 culières/fourchettes/couteaux, 2 marmites, un thermos, une table plastique,2 paquets de verres,2 bassines, une poêle,10 gobelets, une glacière, 2 passoire, une friteuse, un porte plat,...) à raison de cent cinquante mille (150 000) FCFA.

d. Volet communication du projet

L'exigence de capitalisation du projet et l'obligation de compte rendu (une innovation) au donateur ont conduit à la diffusion de ces différentes opérations sur les antennes de la chaine de télévision Canal 2 International à l'émission « Urgence » ainsi que sur Vision4, à l'émission « Urgence Plus », à la CRTV à l'émission « bonjour le Cameroun, Bon weekend, Cameroun Magasine »

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Aussi, nous avons fais une communication pour présenter notre projet à PROMOTE 2017. Ce qui nous a valu des acclamations.

d. Difficultés rencontrées

La réalisation de ce projet ne s'est pas fait sans difficultés. La principale difficulté rencontrée a été d'ordre financier. En effet, la contribution financière personnelle n'a pas été respectée puisque certains étudiants ne se sont pas manifestés ou ne se sont que manifestés que très faiblement. C'est dire que le montant d'un million deux cent cinquante mille (1.250.000 FCFA), que devait réunir la cinquantaine d'étudiants n'a pas été atteint.

L'autre difficulté a été la lenteur administrative, le déboursement de fonds par les mairies. Pour entrer en possession de leur apport, il a fallu attendre un certain temps. A ces difficultés s'ajoutent l'insouciance, l'indifférence ou l'absence de certains étudiants d'Action Humanitaire.

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CONCLUSION

S'il est vrai que le niveau de vie au Cameroun ne permet pas toujours à sa population de pouvoir subvenir à leur besoin vital quand elle veut, il n'en demeure pas moins vrai que c'est une société caractérisée par un élan de solidarité sans précédent. C'est d'ailleurs le facteur qui a permis non seulement de récolter d'importantes sommes au sein du groupe même des volontaires humanitaires, mais aussi de pouvoir nous rapprocher de notre assiette budgétaire nécessaire pour redonner espoir à nos deux patients, qui à ce jour, ont retrouvé leur santé complète. Les stratégies adoptées, pas très nouvelles auprès du public camerounais (le mailing par exemple), ont tiré leur originalité dans la conception des dépliants avec des messages qui obéissaient à une exigence de respect tant de la vie privée des patients, que de celle du donateur.

Enfin pour clôturer avec ce projet, une émission sera faite pour la remise des dons de l'atelier de couture de Gustave et du restaurant de Christophe lors du Repas Humanitaire. L'Association des Volontaires en Actions Humanitaires (AVAH) sera aussi présentée ce jour de manière solennelle.

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