2.4. Les jeux de la société d'en bas
Les jeux de la société d'en bas,
réinventés sous le vocable « ndjambo », sont à
la base des jeux traditionnels qui ne sont généralement pas
régis par une réglementation formelle. Autrement dit, leur
pratique n'obéit qu'aux seuls principes préétablis par les
acteurs eux-mêmes. Ces jeux véhiculent une certaine dimension
culturelle en référence à un champ essentiellement
ludique. Dans la plupart des cas, ce sont des jeux intellectuels qui font appel
à la réflexion, à l'adresse et à l'observation
selon qu'ils nécessitent un support de cartes, de dés, de billes,
etc. En milieu urbain, ces jeux transcendent leur dimension de gratuité
pour s'ériger en des pratiques lucratives. En réalité, la
monétarisation de ces jeux par les adeptes eux-mêmes, leur donne
l'impression d'une certaine mobilité dans la mesure où au terme
d'une partie, le temps consacré au jeu devrait être
récompensé par d'éventuels gains. Ceci est d'autant plus
pertinent que l'on entend souvent dire à Yaoundé, que « le
temps c'est de l'argent ! ». Dans cette configuration, on s'imagine moins
participer à un jeu sans qu'il y ait un véritable enjeu
financier, l'argent apparaissant comme la principale motivation sans laquelle
jouer serait une perte de temps.
C'est ainsi qu'au Ludo, au Damier, aux Billes ou à la
Carte, le montant des mises est préalablement fixé par les
joueurs eux-mêmes. Selon qu'il s'agisse du plus chanceux, du plus malin
ou du plus habile, le vainqueur bénéficie d'une rançon qui
correspond à l'ensemble des mises des autres participants. Chaque joueur
est alors tenu de déclarer la somme d'argent dont il dispose avant de
s'engager, d'autant plus qu'il n'y a ni temps imparti au jeu, ni
désertion : c'est la loi « du tout ou rien ! »,
c'est-à-dire la ruine totale du joueur. Le jeu ne prend fin que lorsque
la totalité des participants a entièrement été
dépossédée au profit d'un gagnant.
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En somme, il faut reconnaître que la typologie des jeux
d'argent présentée ici est loin d'épuiser la question
à ce niveau, car de nombreuses activités ludiques que nous
n'avons pas citées peuvent apparaître ubiquitaires, et peuvent
avoir en partage bon nombre de caractéristiques figurants dans une
catégorie distinguée. Il en existe même qui sont difficiles
à classifier de façon rigoureuse. Dans l'ensemble, qu'il s'agisse
des jeux d'argent légalisés ou des jeux clandestins, leur
pratique comporte d'importants risques sociaux, de santé, de
délinquance y compris de blanchiment d'argent. L'État camerounais
ayant pris conscience de cela, a légiféré afin que leur
pratique soit encadrée et garantisse une certaine cohérence (voir
annexe 6).
À présent, il est important d'infiltrer les
secteurs urbains dans lesquels se pratiquent les jeux d'argent afin d'en
extraire les informations sur ce qui est produit dans ces lieux.
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