Les projets connexes aux gares du Grand Paris Express sous maà®trise d'ouvrage de la Société du Grand Paris: Opportunités de valorisation foncière ou projets de valorisation urbaine ?( Télécharger le fichier original )par Pauline CHEMLA Université Paris-Sorbonne - Master 2 mention Géographie, aménagement, environnement et logistique des échanges (GAELE) 2018 |
PARTIE 1 : DEFINITION ET CONTEXTE DESPROJETS CONNEXES AUX GARES DU GRAND PARIS EXPRESS 20 CHAPITRE PREMIER : QU'EST-CE QU'UN PROJET CONNEXE ?Connexe (adj.), (latin connexus, de nectere, lier) : Qui est lié à quelque chose d'autre par des rapports étroits, par la similitude ou la dépendance. Définition du Larousse 2018 1. L'approche conceptuelle des projets connexes a. Le pôle-gare formé par le complexe gare/projet connexe Le projet connexe ou écrit [co]nnexe par la SGP est avant tout l'expression directe d'un lien de connexité : un objet A lié à un objet B, un projet urbain lié à une gare. Pour la SGP, « constitue un projet [co]nnexe l'opération de construction développée sur la parcelle de la gare, conçue et mise en oeuvre simultanément à la réalisation de celle-ci et en articulation avec elle ». Et comme le souligne très justement Ioannis Valougeorgis, directeur délégué à l'aménagement de la SGP7, « Il n'y a pas deux projets connexes similaires, chacun a sa logique, son fonctionnement. ». Chaque projet connexe est unique car le lien qui le relie à sa gare est lui-même unique. A l'inverse d'un projet urbain classique qui pourrait se trouver aux abords d'une gare, plusieurs éléments font qu'un projet connexe n'a pas lieu d'être sans la présence sa gare : le fait qu'il prenne place sur la même parcelle que celle dévolue à la gare, qu'il soit en articulation avec elle architecturalement et morphologiquement, et que sa réalisation soit concomitante à celle de la gare ; l'ensemble forme un complexe indissociable gare/projet connexe. 21 7 Entretien intégral disponible en annexe 2. 22 2 Schéma du pôle-gare - Crédit : SGP Le caractère unique du projet connexe est donc dû à la gare elle-même dépendante d'un contexte urbain local qui lui est propre. Cela se reflète dans la programmation du projet connexe qui est donc relative au potentiel de développement de chaque site ; réalisé par un maître d'ouvrage extérieur à la SGP, maître d'ouvrage de la gare, le projet connexe s'intègre à l'environnement urbain existant ou futur de chaque gare. Logements, bureaux, activités, commerces, équipements publics ou privés, tout est envisageable selon le contexte d'implantation du complexe gare/projet connexe. Afin d'aider à la mise en oeuvre des projets connexes par leur maître d'ouvrage, la SGP a élaboré un Cadre Conceptuel des projets connexes aux gares du Grand Paris dans lequel elle développe cette notion de coexistence entre la gare et le projet connexe, mais surtout entre le complexe gare/projet connexe et tout ce qui va interagir autour : [co]territoires : Le projet connexe s'inscrit dans des territoires aux caractéristiques et identités propres, à double dimension, actuelle et projetée, desquels il doit relever et valoriser les qualités, tout en y stimulant les dynamiques locales de projets. 23 [co]acteurs : Le projet connexe, à mi-chemin entre la gare et le territoire, fait lien. Ce lien se traduit par la collaboration entre de nombreux acteurs concernés, publics (collectivités, Etat) ou privés (opérateurs, entreprises) autour de la SGP. [co]programmes : Par une programmation enrichie, le projet connexe doit venir renforcer l'insertion de la gare nouvelle génération dans un contexte de ville compacte et dense, et lui offrir un rayonnement pour en faire une centralité structurante. [co]temporalités : La relation d'interaction entre la gare et son projet connexe leur impose une conception simultanée, ce qui s'en ressent sur le phasage global de l'opération de conception et de réalisation du pôle-gare. [co]design : Le projet connexe vient signaler la gare, que ce soit par son écriture architecturale ou sa volumétrie, formant alors un complexe esthétique et morphologique contextualisé. b. Les projets connexes : marqueurs de situations territoriales et interfaces urbaines Par leur interdépendance aux gares du Grand Paris, les projets connexes sont endémiques des territoires sur lesquels ils s'implantent et sont appelés à devenir des marqueurs de situations territoriales. Cet ancrage local confronte chaque projet à une situation contextuelle unique à laquelle il doit s'adapter : stratégies urbaines aux temporalités adaptées, dimensions urbaines et architecturale, dimension programmatiques et fonctionnelles etc. Comme la SGP l'évoque dans son Cadre Conceptuel, « les projets [co]nnexes génèrent une intensification du tissu urbain par la succession de polarités que l'infrastructure génère tout au long de son tracé », et ces polarités sont aussi diverses que les situations territoriales dans lesquelles s'implantent les projets connexes. Nous pouvons distinguer trois « familles » de polarités créées ou renforcées par les projets connexes : les centralités restaurées dans lesquelles le projet connexe participe au remodelage et facilite la requalification des quartiers en renouvellement urbain ; les centres villes dont le projet connexe vient souligner la centralité et renforcer le dynamisme, et les nouvelles centralités desquelles le projet connexe doit venir accompagner le développement urbain en cours ou projeté. Si chaque projet connexe est unique puisque propre au territoire sur lequel il s'implante, le concept est unique lui aussi et constitue une interface d'expérimentation urbaine majeure : par la multiplicité de ses enjeux et de ses acteurs, le projet connexe se fait le support d'expérimentation de la co-conception et de la concertation. Il doit établir le dialogue entre la SGP qui est le maître d'ouvrage de la gare, les acteurs publics (Etat, Etablissements Publics d'Aménagement (EPA), collectivités etc.), les opérateurs de transport (STIF, RATP, SNCF, RFF), la population (usagers, habitants, salariés, touristes etc. et les opérateurs privés qui sont les maîtres d'ouvrage des projets connexes. Tous ces acteurs réunis autour du projet connexe doivent collaborer pour le bon fonctionnement du pôle-gare, bien que pour chacun d'eux le projet représente des enjeux différents. Ces enjeux sont notamment architecturaux, urbains, techniques, financiers, économiques et politique comme l'explicite ce schéma diffusé par la SGP dans son cadre conceptuel des projets connexes : 24 3 Le projet connexe comme interface urbaine- Crédit : SGP 25 On voit que les enjeux pour les différents metteurs en scène du projet connexe sont variés, qu'ils sont inévitablement liés mais parfois contradictoires ; en cela le projet connexe forme une interface urbaine qu'il est le lieu de confrontation des intérêts de tous les acteurs participant à sa mise en oeuvre. Le préfixe [co], ensemble, prend tout son sens quand on voit la complexité à faire émerger les projets connexes dans le cadre d'une démarche urbaine négociée et concertée. c. Les trois piliers du projet connexe La SGP a donc défini le projet connexe comme un « pivot urbain » faisant se rencontrer et interagir différentes dynamiques et acteurs autour de trois piliers : la gare sans laquelle il n'y aurait pas de projet connexe, le contexte urbain duquel il dépend ainsi que la gare et le mode opératoire induit ou subit par le projet connexe. Il est intéressant de voir que le projet se retrouve aux prises d'éléments sur lesquels elle n'a pas ou peu d'impact mais qu'à l'inverse beaucoup de facteurs la gouvernent. Ce schéma révèle surtout que l'existence du projet connexe est conditionnée par beaucoup de variables, et que sa nécessité nait de la synergie entre les besoins ou volontés affirmées positives de trois terrains, dits ici piliers, qui sont la gare, le contexte urbain et le mode opératoire. 4 Les trois piliers du projet connexe- Crédit : SGP 26 d. Les pôles-gare, marqueurs de l'identité métropolitaine Bien que les projets connexes soient tous différents et qu'ils dépendent d'une multitude de facteurs endémiques au territoire sur lesquels ils s'implantent, ils portent tous une seule et même signature. La SGP, notamment par la conceptualisation des projets connexes, prône une certaine forme d'unicité des pôles-gares formés par les complexes gare/projet connexe tout au long du tracé du GPE. Une unicité loin de signifier l'uniformité, au contraire : en répondant à des besoins locaux spécifiques, chaque gare et son projet connexe viendra faire partie de ce nouveau réseau de gares « nouvelle génération », humaines et urbaines, que souhaite devenir le Grand Paris Express. C'est-à-dire un réseau, mettant en évidence les qualités de chaque territoire, laissant s'exprimer les identités de chaque nouvelle « porte du Grand Paris » et ainsi fabriquer une nouvelle identité commune au territoire grand-parisien marquée par sa diversité. « Interprète de la nature particulière des cités, chaque gare participera d'un ensemble _ le réseau tout entier _ dont la caractéristique sera d'affirmer son unicité par la diversité de ses architectures. » (Ouvrage collectif, Grand Paris Express Manifeste de la création, 2017, p89). L'architecture est ce qui va donner son identité et son esthétique à une gare en la différenciant d'une autre, l'apport du projet connexe est fondamental dans cette idéologie de venir marquer le territoire tant il constitue un signal pour la gare et donc pour le quartier. Comme évoqué dans ce même ouvrage, « chacune (des gares) est conçue par un architecte qui doit exprimer un apport, une écriture singulière en vue d'appartenir à la ville d'implantation, à son histoire et à un quartier en même temps qu'un réseau. ». 2. Définition spatiale et morphologique des projets connexes On comprend donc que les pôles-gares sont conçus pour former un ensemble reconnaissable, marqueur du tracé du métro, et vecteur identitaire des territoires du Grand Paris. Bien que diversifiés, les complexes gare/projet connexe ont été bornés par un certain nombre de normes communes déterminées par la SGP elle-même, notamment au travers de l'élaboration du Cadre Conceptuel. Si comme nous l'avons vu précédemment, les projets connexes sont uniques en tant que marqueurs territoriaux et par les éléments qui concordent à leur émergence (gare, contexte urbain, mode opératoire), leurs différences, notamment morphologiques et d'implantation sont normalisées.
La première chose à savoir est qu'il n'y a pas obligatoirement de projet connexe sur les pôles-gare du GPE, ce sont les contextes territoriaux, actuels et projetés qui régissent l'existence du projet. Ces contextes territoriaux propres à chaque gare du Grand Paris modèlent en profondeur les caractéristiques du projet connexe et son insertion dans la ville : densité, forme urbaine, structure foncière et offre programmatique qui détermine sa 28 mutabilité. L'absence de projet connexe peut notamment relever de l'impossibilité de faire des projets en zone urbaine dense, à l'implantation de la gare dans une zone non-constructible car protégée à titre naturel et paysager dans les documents d'urbanisme. Cette impossibilité à venir compléter la gare par un projet connexe est estimée pour le moment par la SGP à environ 50% des gares du Grand Paris. Pour les 50% restant, La superficie du pôle-gare, c'est-à-dire de l'ensemble formé par le tunnel et les quais (en infrastructure), la gare et le projet connexe, le tout sur la parcelle détenue par la SGP, oscille entre quelques centaines et plusieurs milliers de m2. Cela dépend des caractéristiques de la gare, des opportunités foncières, des contraintes d'articulation entre l'infrastructure souterraine et l'émergence de la gare, des aménagements du parvis et des espaces publics nécessaires. Le projet connexe tire sa singularité de sa proximité immédiate et de son interdépendance avec la gare, en termes d'espaces mutualisés ou mitoyens, de flux séparés ou rassemblés, de programmation indépendante ou partagée. Les liens qui relient la gare et son projet connexe sont variables, ainsi on identifie quatre catégories de projets connexes : superposés (en surplomb de la gare), mitoyens (aux abords immédiats de la gare), associés (aux abords de la gare) et composites (aux abords immédiats de la gare et en surplomb). 5 Les différentes natures du projet connexe- Crédit : SGP Le projet connexe, peu importe sa nature vient donner corps au pôle-gare sur l'emprise de l'infrastructure de transport (station souterraine, gare parvis) et donc souligne ou complète la gare. L'enjeu du projet connexe réside donc dans sa capacité à conforter l'identité du pôle-gare en lui conférant une résonnance urbaine, cela passe notamment par la forme et l'écriture architecturale du projet qui doit participer à la visibilité de l'équipement gare. 29 c. Le projet connexe : de la simple superposition à son intégration dans les projets des villes Le projet connexe s'inscrit dans plusieurs périmètres d'action emboités : le périmètre connexe isolé dépendant du périmètre du pôle-gare et pouvant fluctuer selon les opportunités foncières ; le périmètre opérationnel du pôle-gare intégrant l'emprise nécessaire à la réalisation de la gare (creusement de la boite, émergence et parvis) ; le périmètre de projets plus larges et intégrant les emprises libres ou mutables dont la valorisation est liée à la création de la gare ; et enfin à plus grande échelle, le périmètre d'influence qui est l'aire de rayonnement de la gare influant sur les déplacements et les modes de vie. Développons ce lien entre le projet connexe et son périmètre de projets : Selon la SGP, le projet connexe s'inscrit au coeur des projets de ville et a vocation à devenir déclencheur ou accélérateur de projets urbains. Le pôle gare doit venir créer une dynamique de développement ou de renouvellement que les acteurs du territoire peuvent porter dans leurs opérations. Mais comment ce lien entre le projet connexe et le périmètre de projets qui lui est directement adjacent se traduit-il dans l'espace ? Le degré le plus faible d'intégration urbaine de la gare à son quartier peut être défini par le projet connexe superposé au droit de l'émergence de la gare. A ce moment-là il n'existe pas d'intégration du pôle-gare dans un périmètre plus grand, que ce soit visuellement parlant, morphologiquement ou dans la mise en oeuvre du projet. Cependant, le pôle-gare peut se développer dans l'espace et donc faire le lien, du moins par sa stature, avec son environnement immédiat en comportant un projet connexe mitoyen, associé ou composé, toujours sur l'emprise de la gare. Le degré le plus élevé d'intégration du pôle gare au périmètre de projets se traduit par l'insertion du projet connexe et de sa gare au sein de projets d'aménagement plus larges portés par les villes et leurs aménageurs. Les opérations d'aménagement développées dans le périmètre de projets peuvent aller du macrolot8 à la zone d'aménagement. 8 Macrolot : Réalisation d'un îlot entier, mêlant des programmes hétérogènes et impliquant plusieurs maîtres d'ouvrage. (Définition de Jacques Lucan). 30 6 L'intégration des gares du Grand Paris dans les projets de ville- Crédit : SGP Bien que l'insertion urbaine des gares dans leur environnement ne soit pas une préoccupation nouvelle, les projets connexes marquent un nouveau mouvement de l'histoire des gares et des quartiers de gare. Partie intégrante du pôle-gare, le projet connexe se combine à des tissus urbains déjà plus ou moins constitués, afin d'y venir renforcer l'insertion et le rayonnement de la gare. Il devient alors le marqueur d'une certaine situation territoriale et une interface urbaine de projet mettant en synergie les intérêts de chaque acteur participant du projet : la SGP, les acteurs publics et privés ainsi que les opérateurs de transport, sans oublier les usagers et les habitants de ces futurs lieux de vie. Rayonnant à 31 l'échelle humaine et urbaine, le projet connexe a notamment vocation à faire du pôle gare une porte d'entrée du Grand Paris et donc à être un signal ponctuel de la métropole. Pour cela le projet connexe doit entrainer une dynamique de développement territorial en s'intégrant morphologiquement et urbainement aux périmètres de projets successifs de projets qui font son environnement local. Comment ces volontés affichées par la SGP se traduisent-elles dans la naissante mise en oeuvre des projets connexes ? 32 CHAPITRE 2 : DU CONCEPT A LA PRATIQUE, LA MISE EN OEUVRE DES PROJETS CONNEXES Les projets connexes dont l'implantation a été décidée par la SGP en sont essentiellement au stade de consultation ou attribués en ce qui concerne la ligne 15 Sud, mais aucun à ce jour n'est sorti de terre, la livraison des premières gares étant prévue pour 2024. Etudier la mise en oeuvre des projets connexes ne peut donc pas être évaluatif mais analytique sur la base des stratégies mises en oeuvre afin d'appliquer au mieux le concept vues précédemment, et prospectif, en se basant sur la mise en oeuvre opérationnelle des projets envisagée par la SGP. 1. Les stratégies programmatiques et morphologiques des projets connexes a. Intensifier le pôle-gare Afin que les projets connexes s'intègrent au mieux au territoire, leur programmation est déterminante, ils s'inscrivent en complémentarité avec la gare pour conforter le nouveau lieu de vie formé par le pôle-gare. Aussi le projet connexe participe de la mixité fonctionnelle du programme global, avec sa programmation de bureaux, de logements, de commerces, de services et d'équipements venant compléter celle de la gare il crée de nouveaux liens avec la ville. La mixité peut s'exprimer à différents degrés d'intensité : de la simple addition ou cohabitation à la mutualisation des usages, notamment celle de parkings, locaux, jardins partagés etc. Le projet connexe suit principalement deux axes d'orientation stratégique : s'inscrire en continuité du projet de ville et devenir une valeur ajoutée pour l'équipement gare. La typologie programmatique qui en résulte peut ensuite se décliner en actions territorialisées, selon les contextes locaux identifiés. La SGP a conceptualisé quatre stratégies programmatiques appliquées aux projets connexes comme suit : 33 7 Les stratégies programmatiques du projet connexe- Crédit : SGP b. Identifier le pôle-gare Si le projet connexe vient intensifier le pôle-gare par sa programmation mixte pour en faire un véritable lieu de vie, il doit également venir le signaler. Le projet connexe par sa forme et son écriture architecturale a donc aussi vocation à faire ressortir dans le paysage urbain la position de la gare et à en devenir la silhouette. En cela, le projet connexe contribue à augmenter la dimension urbaine de la gare qui devient un élément marquant du territoire. Comme le souligne la SGP dans le Cadre Conceptuel des projets connexes aux gares du Grand Paris, pour que le projet s'exprime dans l'espace il compose « avec la forme architecturale (volume, hauteur), la forme urbaine (rapport plein/vide, minéral/végétal), le traitement de l'enveloppe (matériaux, ouvertures, toit), en étroite cohérence avec la charte d'architecture des gares du Grand Paris. ». Ainsi la typologie volumétrique et spatiale du projet connexe vient s'adapter au contexte urbain local, en termes de capacité d'implantation physique ou des volontés exprimées par la ville ou la SGP, pour déterminer ce à quoi devra ressembler le pôle-gare. La SGP a ainsi conceptualisé quatre stratégies morphologiques du projet connexe pour qu'il s'adapte aux enjeux locaux : 34 8 Les stratégies morphologiques du projet connexe- Crédit : SGP c. Le laboratoire d'expérimentation des projets connexes9 La SGP, dans l'élaboration du Cadre Conceptuel des projets connexes des gares du Grand Paris va même jusqu'à appliquer et tester les concepts et orientations identifiés et présentés précédemment en suivant trois thématiques : la silhouette, l'enveloppe et le socle du projet connexe, qu'elle développe en différents scénarios pour montrer la souplesse du cadre. La SGP illustre les différentes échelles de réflexion programmatique, morphologique, urbaine et humaine dans ce qu'elle appelle le « laboratoire » d'expérimentation du Cadre Conceptuel. La silhouette du projet renvoie à la morphologie du projet connexe et plus explicitement à son intégration dans le contexte urbain, à sa manière de contribuer à l'identification du pôle-gare par tous. L'enjeu des projets connexes est de signaler la présence des gares dans des contextes urbains uniques avec des qualités propres, par des stratégies adaptées. L'expression architecturale de cette ambition combine plusieurs paramètres : l'échelle et le 9 Le laboratoire des projets connexes est une partie intégrante du Cadre Conceptuel des projets connexes, à disposition donc des opérateurs qui les réaliseront. A travers l'élaboration de schémas, le laboratoire teste et illustre différentes mises en application des concepts programmatiques et morphologiques évoqués tout au long du Cadre Conceptuel. Il suit trois variables du projet définies comme suit : la silhouette, l'enveloppe et le socle du projet. C'est donc avant tout un outil de travail, une mise en perspective de ce à quoi pourront ressembler les projets connexes selon les contextes urbains variés du territoire métropolitain. 35 dimensionnement du projet connexe (hauteur, densité, compacité), sa forme urbaine et son inscription dans la parcelle et le quartier (plan-masse, alignement, plein/vide). De ce constat de diversité essentielle des formes du projet connexe, la SGP dégage trois silhouettes envisageables et applicables : intégrative, intensive et remarquable. 9 La silhouette du projet connexe- Crédit : SGP La silhouette dite intégrative affiche une hauteur et une densité modérées avec une forme urbaine contextualisée et une inscription urbaine connectée et équilibrée (pleins/vides). Appliquée au projet connexe elle permet d'obtenir un projet « fondu » dans son environnement, dont l'intégration passe par la forme. A l'extrême opposé, la silhouette remarquable est celle qui engage le projet connexe dans la version la plus radicale de la signalisation du pôle-gare. Elle se distingue par une hauteur et une densité élevées, par une forme innovante et une inscription urbaine volontariste. A mi-chemin entre la silhouette intégrative et la silhouette remarquable, la silhouette du projet connexe peut se faire intensive, c'est-à-dire avec une hauteur et une intensité maîtrisées mais une forme tout de même singulière soulignant la présence urbaine du pôle gare. Autre variable étudiée par la SGP dans son laboratoire : l'enveloppe. L'enveloppe du projet connexe se définit principalement par sa relation à la programmation, elle est ce qui lui confère sa dimension urbaine. L'enveloppe doit assurer au projet connexe sa fonction 36 d'interface entre la gare et le contexte urbain en en définissant son degré et ses modalités d'ouverture, de porosité ou, au contraire, d'imperméabilité. Dès lors, cette volonté de définir le pôle gare passe par une écriture architecturale combinant plusieurs paramètres : les matériaux, le principe de composition et les modalités d'interface, et, la gestion des ouvertures des vues, des saillies et des avancées. Le laboratoire expérimente alors trois enveloppes possibles : uniforme, différenciée et polymorphe. 10 L'enveloppe du projet connexe- Crédit : SGP Dans l'enveloppe uniforme, l'écriture architecturale est homogène liée à une monoprogrammation ne traduisant pas de mixité fonctionnelle dans le projet connexe. A l'inverse l'enveloppe dite différenciée rappelle la mixité fonctionnelle du projet par une architecture différenciative. L'enveloppe polymorphe quant à elle, se traduit par une diversité des façades et donc une architecture qui peut tout à fait se libérer de la programmation. L'enveloppe peut donc être le biais par lequel se reflète la programmation du projet connexe, principalement dans l'écriture architecturale des façades, mais peut aussi s'en détacher totalement. 37 Dernière thématique objet des expérimentations du laboratoire des projets connexes : le socle10. Le solde du projet connexe renvoie aux usages ainsi qu'au statut donné aux espaces de transition liés à la multifonction du nouveau lieu de vie que sera le pôle-gare. Les enjeux liés à la réalisation du socle sont de garantir la lisibilité des usages et leur efficacité en un même lieu, ainsi que le confort des divers usagers, voyageurs, habitants, travailleurs et consommateurs de biens ou de services. La transcription architecturale de ces enjeux relève de la combinaison de différents paramètres : les accès et adressage11 des divers programmes, la configuration du parvis et la transition entre les espaces publics et privés qui constitueront le pôle-gare. 11 Le socle du projet connexe- Crédit : SGP Dans le socle sur rue, les accès de la gare et du projet connexe sont individualisés depuis l'espace public et sont singuliers. Dans la configuration du socle en atrium, l'accès au projet connexe et à la gare se fait depuis un espace commun qui peut être couvert tel un atrium comme une halle centrale. La distribution des deux est alors protégée et sécurisée. Dans le 10 Par le socle nous entendons la base physique délimitée dans l'espace sur laquelle repose un édifice. Dans le cas présent, le socle du projet connexe peut intégrer l'émergence de la gare, dite la boite gare. Dans le cas d'un projet connexe en surplomb de la gare, celle-ci constitue son socle. 11 L'adressage est une opération qui permet de localiser sur le terrain une parcelle ou une habitation, c'est-à-dire définir son adresse à partir d'un système de cartes et de panneaux mentionnant la numérotation ou la dénomination des rues et des constructions. Cette notion peut être étendue aux réseaux et services urbains, en donnant une adresse à des objets urbains ponctuels. C'est une base indispensable pour la gestion urbaine. 38 même esprit, le socle sous forme de passage individualise les accès de la gare et du projet connexe tout en créant un espace traversant distributif comme un passage public protégé. Afin d'intensifier et d'identifier le pôle-gare, le projet connexe peut donc adopter différentes stratégies adaptées à des contextes urbains singuliers. Dans un « laboratoire d'expérimentation » intégré au Cadre Conceptuel des projets connexes, la SGP donne à voir aux opérateurs qui les réaliseront, différentes applications des stratégies rapportées aux territoires du Grand Paris. Si la mise en oeuvre stratégique des projets a son cadre, qu'en est-il de leur mise en oeuvre opérationnelle ? 2. La mise en oeuvre opérationnelle des projets connexes a. De la maîtrise d'ouvrage publique à la maîtrise d'ouvrage privée Comme évoqué précédemment, le projet connexe est une opération de construction développée sur la parcelle de la gare, conçue et mise en oeuvre simultanément à la réalisation de celle-ci. La particularité du projet connexe est de faire partie d'un tout plus grand, le pôle-gare, appelant à la co-conception et à la co-construction urbaine (co-temporalité, co-programme, co-acteurs, co-design, co-territoires). Aussi la réalisation du projet connexe fait interagir la SGP, propriétaire de la parcelle et maître d'ouvrage de la gare, avec un opérateur privé qui sera lui maître d'ouvrage de la gare, et avec la ville d'accueil de la gare. 12 La montage opérationnel du pôle gare - Crédit : SGP 39 La transition de la maîtrise d'ouvrage publique à la maîtrise d'ouvrage privée se fait tout simplement par voie de cession foncière de la parcelle ou des droits à construire du projet connexe envisagé. Comme l'évoque Benoît Labat12, actuel directeur de la valorisation du patrimoine (DVP) à la SGP, les cessions foncières ne sont pas régies par les lois du marché public, elles pourraient très bien se faire en gré à gré13 mais pour une question d'image, la SGP procède à des consultations pour ses cessions foncières. Benoit Labat s'explique sur ce point, au nom de la SGP, « [...] les projets intéressaient beaucoup de maître d'ouvrages privés et [...] nous n'avions aucune raison d'en privilégier un plus qu'un autre mais nous en aurions eu le droit. ». A noter que les gares, soumises elles aussi à consultation, restent la propriété de la SGP après conception par l'équipe ou le candidat lauréat. Les consultations lancées par la SGP sont également le moyen le plus évident pour s'assurer du respect des contraintes imposées par les interfaces entre le projet connexe et la gare, ainsi que des volontés exprimées pour les orientations architecturales et programmatiques. Par ce biais la SGP garde le contrôle sur le fond et la forme du projet connexe dans les limites du cahier des charges, cahier de prescriptions techniques et cahier des limites de prestations qu'elle élabore et impose. En présentant leur candidature et/ou leur offre, les candidats14 à la cession s'engagent au respect des contraintes imposées par le dossier de consultation, ce qui donne à la SGP et à la commune, une garantie sur le devenir du projet et son bon fonctionnement avec la gare. De plus, les propositions présentées par les candidats à la cession foncière permettent à la SGP et aux communes _ qui ont décidé conjointement des orientations du projet connexe _ de voir de manière très poussée ce à quoi ressemblera le projet connexe imaginé avec plus ou moins de liberté par l'équipe candidate. Enfin, il ne faut pas sous-estimer l'implication des villes dans le mécanisme de cession foncière relative au projet connexe. Déjà présentes lors de l'élaboration des orientations architecturales et programmatiques, elles font généralement partie des jurys de sélection des projets. Leurs directives sous-tendent également toute la mise en oeuvre du projet connexe, puisqu'à l'inverse de la gare régit par un permis Etat, ses autorisations dépendent d'un permis ville. L'acceptation du ou des permis de construire déposés par le candidat lauréat de la 12 Entretien intégral disponible en annexe 2. 13 Une vente en gré à gré implique que le vendeur et l'acheteur s'entendent librement sur les conditions de la vente. 14 Les candidats à ce type de cession foncière sont souvent des équipes candidates formées par des groupements de promoteur(s), architecte(s), foncière(s) accompagnées par des professionnels variés (BET (Bureaux d'Etudes Techniques), conseil en immobilier et immobilier commercial, conseil en environnement, entreprises innovantes pouvant apporter une plus-value au projet etc. 40 consultation et donc soumise à l'obtention des autorisations d'urbanisme de la part de la ville et donc du respect du PLU, des Orientations d'Aménagement et de Programmation (OAP) à travers le Projet d'Aménagement et de Développement Durable (PADD) etc. La mise en oeuvre du projet connexe est donc un amont un processus de réflexion quant aux directives données au projet, co-construit entre la ville et la SGP, puis un mécanisme de cession foncière après sélection, débouchant à nouveau sur un contrôle de la ville sur le futur maître d'ouvrage du projet connexe. Mais comment gérer cette interface entre la réalisation de la gare et du projet connexe puisque se voulant concomitante ? b. La co-temporalité des projets pour une gestion durable du pôle-gare Inhérent à la gare, le projet connexe partage avec elle toutes ses dimensions temporelles, de la conception à la construction puis du fonctionnement à la gestion. Une gare n'est pas conçue indépendamment de son projet connexe et leurs études de faisabilité intègrent les contraintes liées à leur interdépendance. Cette réflexion menée en amont sur l'intégralité du pôle gare est une nécessité urbaine comme l'explique Benoît Labat, « si ces projets connexes, au lieu de les faire dans 50 ans, on les imagine dès le départ, alors on imagine une urbanité beaucoup plus séduisante que la gare du XIXe siècle et on est capable [...] de déterminer en amont une programmation et ce que l'on veut sur telle ou telle gare. ». Penser le projet connexe dans sa gare et la gare pouvant accueillir son projet connexe, essentiellement lorsqu'il est en surplomb permet notamment d'éviter des reprises de charges15 de la construction très coûteuses. « Plus on prend le projet en amont plus on peut avoir quelque chose d'économique dans la conception avec des interfaces qualitatives et les moins coûteuses possibles. » (Benoît Labat). Si cette co-temporalité de conception est un atout économique indéniable et un atout urbain, c'est un travail compliqué entre les acteurs des deux projets, gare et connexe : les ingénieurs du métro étant éloignés de la problématique du projet connexe et leur maitrise d'oeuvre, et les architectes de la gare ne pouvant pas être ceux de l'opération connexe pour des raisons d'équité. La conception/réalisation du projet connexe dépend également d'un paramètre essentiel, qui engendre le pôle-gare et qui est l'infrastructure du réseau de transport lui- 15 Les charges représentent le poids d'une construction autosupporté par le système porteur de la structure et transmis vers les fondations. Une reprise de charge, dans le cas d'un projet en surplomb d'une gare est donc le fait de venir modifier la structure afin qu'elle en supporte le poids, c'est-à-dire qu'elle ait la capacité de charge nécessaire. 41 même. Les projets connexes doivent s'adapter aux exigences du calendrier du réseau du Grand Paris, très volontariste et contraint. Ces échéances amènent à accélérer les projets urbains autour des gares ou à les modifier (programmation, budget, mise en oeuvre etc.). Enfin l'interdépendance du projet connexe et de la gare se répercute sur les usages du pôle-gare en termes de fonctionnement avec des interfaces à gérer : horaires d'ouverture de la gare, séparation des espaces publics et privés, programmation d'animation en RDC par des commerces et services, animation du parvis et des espaces publics etc. Comme le souligne le Cadre Conceptuel des projets connexes, « Construire aux abords et en surplomb d'une gare _ équipement éminemment symbolique et structurant _ implique la nécessaire qualité et flexibilité des constructions et usages associés. ». Cela implique notamment que des servitudes et des droits de passage doivent avoir été intégrés au projet connexe afin de permettre par exemple la bonne gestion et l'entretien de l'infrastructure gare. La mise en oeuvre du projet connexe et celle de la gare sont donc naturellement liées, présentant des interfaces depuis la conception jusque dans le fonctionnement du pôle-gare, mais comment cela se traduit-il dans le processus de construction ? c. Le processus de construction du pôle-gare La mise en oeuvre du projet connexe et celle de la gare font donc l'objet d'une série d'étapes conditionnant au global le pôle-gare, l'étape des études étant décisive pour le projet. Pour rappel la première étape consiste en l'acquisition foncière de la parcelle dédiée à la réalisation de l'infrastructure de transport, une étape procédurière où sont définis le statut des parcelles à acquérir, le calendrier, et où se déroulent les négociations. S'en suivent des études conjointes de la gare et du projet connexe : définition des périmètres opérationnels et des servitudes, esquisses urbaines et architecturales, programmation et mode de gestion, étude de faisabilité et phasage des opérations. Interviennent ensuite la construction de la gare et l'aménagement de ses abords c'est-à-dire le chantier de la gare (boîte souterraine, émergence et parvis), la gestion des trémies16, les dalles de répartition et les servitudes, puis le chantier du projet connexe et des espaces publics, la division en volume et l'adressage.
Ainsi les équipes de construction interviennent avant celles de la construction du projet connexe, une nécessité si le projet est en surplomb. Il peut y avoir une concomitance entre les deux chantiers, obligeant la SGP à définir les interfaces de chantiers et les servitudes pour une bonne collaboration entre les maîtrises d'oeuvre de la gare et du projet connexe. Enfin la gare est livrée et mise en service, concrètement, les espaces publics et les voieries sont rétrocédés aux collectivités après leur aménagement par la SGP, puis le projet connexe est livré et ses lots commercialisés. 42 13 Les étapes de la construction du pôle-gare- Crédit : SGP 43 Défini comme partie intégrante d'un pôle-gare, le projet connexe voit sa mise en oeuvre prévisionnelle, telle que le pressentait sa conception, fortement liée à son interdépendance avec la gare. Dans un premier temps il fait l'objet de réflexions stratégiques quant à sa programmation et à sa forme afin de venir signaler la gare et assoir sa position de lieu de vie, notamment par la mixité fonctionnelle qu'il lui permet. Ces différentes stratégies viennent même être expérimentées par la SGP dans son « laboratoire » et rendues consultables pour les futurs opérateurs des projets connexes, afin d'en donner à voir diverses applications selon les configurations de pôle-gare. Le Cadre Conceptuel des projets connexes se présente donc comme un guide à la disposition de la maîtrise d'ouvrage de l'opération connexe après cession de l'emprise de celle-ci par la SGP. Cette cession implique également la ville du projet avec laquelle la SGP élabore une consultation de cession afin que le projet connexe in fine soit l'expression des véritables besoins actuels ou projetés, identifiés par la commune pour inscrire le projet connexe dans une réalité locale et faire rayonner la gare. Ce lien conceptuel autant que physique à la gare, implique que la conception et la construction du projet connexe lui soient contemporaines pour une gestion durable du pôle-gare. 44 45 |
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