2. Problématique et hypothèses
émises
Dans l'intention d'étudier les projets connexes aux
gares du Grand Paris, il aurait été évident de se demander
en quoi réellement ces projets étaient porteurs d'urbanité
et s'intégraient aux pôles-gare apportant une plus-value aux
quartiers de gare. Pour autant, étant donné la réalisation
des projets connexe programmée postérieurement à cette
étude, nous sommes dans l'incapacité à mener une
quelconque analyse évaluative ou rétrospective à l'heure
actuelle. Nous pouvons tout de même nous interroger sur les
véritables motivations de la SGP à la valorisation des emprises
dédiées aux projets connexes des gares du Grand Paris et donc
à la manière dont elle s'approprie la compétence
d'aménageur dont elle a été dotée par la loi du 3
juin 2010.
Si la SGP ne se cache pas de vouloir valoriser ses emprises
foncières, ce n'est pas cet intérêt qu'elle met en avant
lorsqu'il s'agit d'expliquer ce que sont les projets connexes. « Catalyser
les projets en rénovation urbaine », « Révéler
les potentiels », « Articuler les échelles » «
Organiser l'intermodalité », « Requalifier les espaces publics
», « Densifier », « Valoriser les repères
métropolitains »4 etc. : voici les termes que la SGP
emploie pour qualifier son action en termes d'aménagement, qu'il soit
induit par le passage du GPE ou par l'implantation des projets connexes. Mais
que valent ces mots ?
3 Société du Grand Paris. Annexe 1.
« Cadre Conceptuel des projets connexes aux gares du Grand Paris »,
2014, volume 1, 63 pages.
4 Arguments tirés du Cadre Conceptuel des
projets connexes aux gares du Grand Paris.
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D'une part beaucoup d'éléments laissent à
penser que la cession foncière des emprises et des droits à
construire des projets connexes par la SGP à des opérateurs
privés sont dictées par un simple besoin de valorisation
foncière. Un Cadre Conceptuel qui ne laisse rien au hasard, des
consultations précises et restrictives, la création d'une
entreprise qui ne dit pas son nom etc. Tout cela nous pousse à nous
demander quels sont les intérêts de la SGP à travers la
mise en oeuvre de ces projets connexes et l'exercice de sa compétence
d'aménageur. Finalement les opérations connexes feraient-ils de
la SGP un simple aménageur opportuniste, ayant saisi cette occasion de
se délester de fonciers « en trop » pour faire rentrer dans
ses caisses de quoi compenser le coût du métro ?
D'autre part, les arguments avancés par la SGP quant
aux bénéfices urbains apportés par la future
infrastructure de transport sont nombreux : le GPE sera au service des
franciliens, du territoire métropolitain et des villes, pourquoi les
projets connexes ne s'inscriraient-ils pas dans cette démarche globale
de faire la ville de demain au service de ses usagers ? Si tel est le cas, les
projets connexes, par leur rôle dans le pôle-gare et donc par leur
rayonnement à l'échelle des quartiers, devraient participer de
cette fabrique de la ville et être l'expression d'un aménagement
convaincu et réfléchi de la part de la SGP.
Ainsi, la suite de ce mémoire s'attachera à
étudier la démarche de la SGP pour la mise en oeuvre des projets
connexes et l'exercice de sa compétence d'aménageur, depuis sa
création jusqu'à aujourd'hui, pour y déceler les
intentions initiales et actuelles de la SGP et répondre à la
problématique : les projets connexes aux gares du Grand Paris
représentent-ils l'opportunité d'une simple valorisation
foncière ou bien l'expression d'un véritable processus de
valorisation urbaine engagé par la SGP ?
Pour répondre à cette problématique
générale, nous définirons dans une première partie
ce que sont les projets connexes, en étudiant leur conception, leurs
caractéristiques spatiales et morphologiques, ainsi que leur mise en
pratique stratégique et opérationnelle. Enfin, nous nous
appuierons sur deux hypothèses constituant une deuxième et une
troisième partie de ce mémoire. La première consistera
à s'interroger sur les projets connexes comme opportunité de
valorisation foncière pour la SGP et la seconde sur l'implication de la
SGP dans l'aménagement urbain de la métropole au regard des
projets connexes.
La première hypothèse émise pour
répondre à la problématique est celle que les projets
connexes aux gares du Grand Paris représentent une opportunité de
valorisation foncière pour la SGP. Il s'agira de s'interroger sur la
mise en oeuvre des projets connexes comme prétexte de valorisation
foncière, aussi, nous devons comprendre successivement les liens
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entre SGP et aménagement territorial, le GPE et le
foncier du Grand Paris, et, valorisation foncière et projet connexe.
Pour vérifier cette hypothèse il nous faudra
dans un premier temps faire un saut dans le passé, revenir aux origines
de la création de la SGP et surtout à ce qui a participé
à ce qu'elle soit dotée de la compétence
d'aménageur. En d'autres termes se demander comment et pourquoi le
concepteur et réalisateur du réseau de transport du GPE s'est vu
attribué une mission, qui a priori sortait de son champ de
compétences, et qui est celle d'aménageur.
Les origines de la compétence d'aménageur
confiée à la SGP ainsi établies, nous devrons analyser
dans les faits ce qui laisse à penser que cet établissement
public aurait eu un intérêt avant tout économique dans la
mise en oeuvre des projets connexes ; cela en se détachant de l'image
communiquée par la SGP, garante d'un projet de développement
urbain sans précédent au service des franciliens. Pour ce faire,
nous nous pencherons sur l'impact du GPE sur les territoires traversés
en termes d'opportunités foncières dans la métropole et
les enjeux qu'ils représentent pour la SGP, à l'échelle
des quartiers de gare et plus particulièrement des projets connexes aux
gares. Il s'agit donc d'établir le rapport entre la compétence
d'aménageur dont dispose la SGP et les dynamiques foncières dans
le Grand Paris et plus précisément dans les quartiers de gare,
pour comprendre les intérêts de la SGP dans la captation des
plus-values immobilières à venir et dans la réalisation
des projets connexes. Enfin, il faudra définir la nature et la mesure
des projets connexes comme leviers de valorisation foncière pour la SGP
afin établir concrètement l'apport financier qu'ils peuvent
constituer en comparaison du coût du réseau de transport du GPE :
l'aménagement peut-il financer le transport ?
Vérifier cette première hypothèse des
projets connexes comme opportunité de valorisation foncière
reviendra donc à se demander dans quelle mesure la mission
d'aménageur de la SGP vient soutenir ou renforcer sa mission de
concepteur/réalisateur du réseau d'infrastructure de transport,
et donc faire de la SGP ce que l'on pourrait appeler un aménageur
opportuniste. Cette première hypothèse étudiée
conduira logiquement à une seconde et antagoniste hypothèse qui
consistera à dire que, non pas considérés comme de simples
opportunités de valorisation foncière, les projets connexes
s'inscrivent dans une démarche de valorisation urbaine de la part de la
SGP.
La deuxième hypothèse émise pour
répondre à la problématique est donc celle que les projets
connexes aux gares du Grand Paris sont essentiellement l'expression d'une
volonté de valorisation urbaine engagée par la SGP. En d'autres
termes, nous postulerons _ contrairement à ce que laissait entendre la
première hypothèse _ que la SGP exerce sa
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compétence d'aménageur sur les projets connexes
avant tout dans un objectif de plus-value urbaine, pour accompagner
l'arrivée du nouveau métro du GPE.
La démarche pour répondre à cette seconde
hypothèse prendra à revers le processus mis en place pour
répondre à la première hypothèse, puisqu'il s'agira
avant tout de partir du postulat inverse que les projets connexes sont avant
tout des outils d'urbanité pour la Société du Grand Paris.
Et, de là aborder d'une autre manière la compréhension des
liens entre le projet connexe et la valorisation urbaine, entre GPE et
urbanité, et, entre le domaine de l'aménagement et la SGP.
Pour vérifier cette seconde hypothèse, il
s'agira dans un premier temps de s'interroger sur la capacité de la SGP
à être à la fois un acteur du transport et un acteur de
l'urbain. Aussi nous nous attacherons à comprendre dans quelle mesure
les projets connexes viennent en complémentarité de la
réalisation du métro, être dans le discours de la SGP, un
vecteur d'urbanité. Ainsi, nous verrons en quoi le GPE est un
déclencheur de projets urbains et en quoi les projets connexes
s'inscrivent dans cette démarche de plus-value urbaine au service des
territoires du Grand Paris. Dans un second temps, et au vu des premières
réponses qui auront été apportées nous nous
interrogerons sur les conditions, les difficultés et les limites de la
mise en oeuvre des projets connexes pour la SGP. S'ils sont revendiqués
comme des moyens de valorisation foncière qu'en est-il des
réalités derrière leur maîtrise d'ouvrage ? A qui
faut-il attribuer cette création de plus-value urbaine que sont
censés générer les projets connexes : à
l'initiative de la SGP ou bien au contexte territorial métropolitain
?
Vérifier cette seconde hypothèse des projets
connexes comme projets de valorisation urbaine reviendra donc à se
demander en quoi la plus-value urbaine est plus forte ou bien a plus de sens
que la plus-value foncière lorsque l'on parle des projets connexes.
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