II. Comprendre les représentations des
pratiquants : une pratique unifiée ?
1. Des orientations variées de la pratique:
Diverses études scientifiques sur le karaté ont
été entreprises depuis les années 1980. Celles-ci
s'intéressent, par exemple, à la modification des
représentations des pratiquants. L'étude de Patrick Trabal et
Muriel Augustini34 sur l'évolution de l'image sous
l'effet de la pratique du karaté, met à jour l'existence d'une
évolution des représentations par le fait de pratiquer le
karaté. Plus précisément, le facteur de cette
transformation est le discours utilisé par les enseignants, discours
basé notamment sur le côté « philosophique
» voire « mystique » et «
ésotérique » du karaté. En effet, le
pratiquant se représente le karaté en référence
à l'ensemble des discours traditionnels, philosophiques, sportifs ou de
self défense. Dès lors, le pratiquant construit ses
représentation avec l'ensemble des images cinématographiques,
avec les propos des enseignants, de la fédération avec ce que le
karatéka voit, entend ou échange avec les autres pratiquants au
moment des stages et des entrainements. Etudier les représentations
revient à recomposer et synthétiser l'ensemble des
éléments propre à chaque individu. Ainsi,
s'intéresser aux représentations sociales d'un groupe de
karatékas permet de savoir en quoi elles sont « socialement
élaborés et partagées »35. Cependant,
les catégories élaborées par le chercheur pour l'analyse
des orientations de la pratique sont restrictives et ne prennent pas en compte
l'ensemble des possibilités. Donc, nous cherchons à construire
une typologie des pratiquants la plus réaliste possible.
Une étude de Ludovic Jeanne36 met
en évidence l'existence de différents «
idéals-types » en ce qui concerne la pratique du
karaté. L'auteur repère en effet des catégories telles que
le « karaté-sport », le « karaté-art
corporel traditionnel », le « karaté-technique
martiale ». Ces trois types idéaux ont marqué
l'évolution du karaté et la mondialisation de celui-ci. Selon
l'auteur, il semblerait en effet qu'il y ait eu au cours de l'histoire de cette
pratique en France une adaptation de la pratique d'un type « martial
» vers un type plus sportif avec une étape
intermédiaire proche des « arts corporels », que l'on
reconnaît comme étant la forme actuelle. L'idéal-type
« martial » semblerait aujourd'hui inactif, dans la
34 Augustini, M. & Trabal, P. (1998) les
représentations du karaté pour les cadres, les enseignants et les
pratiquants. Rapport de recherche, laboratoire de sociologie INSEP/FFKAMA,
Paris
35 Jodelet, D. (1993), Représentations
sociales : un domaine en expansion, in Jodelet, D., Les
représentations sociales, PUF, Paris
36 Jeanne, L. (2001) Les
géométries de corps, diffusion socio-spatiale et idéaux
types de pratiques du karaté : essai de modélisation,
Vème rencontre de Théo Quant, Université de Caen
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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mesure où aucune forme concrète de pratique ne
semble pouvoir être observée et rattachée à cette
dimension « originelle ». L'art martial ancien d'Okinawa,
qui se rapproche d'une forme de lutte de percussion pied/poing sans armes, se
serait éteint. A l'inverse, Ludovic Jeanne formule l'hypothèse
que des dimensions plus communautaires de la pratique du karaté sont
susceptibles d'apparaître, ce qui pourrait également faire
émerger une nouvelle façon de voir cette pratique. Dès
lors, la mulipication du sens accordé à la pratique
entraîne une modification de l'idéal que les pratiquants peuvent
avec de celle-ci. Ainsi, il serait possible de pratiquer le karaté dans
une forme propre à chacun en fonction de ses propres valeurs.
Concrètement, chaque pratiquant reçoit, interagit et pose les
propres bases de sa pratique. Aussi, les orientations de la pratique,
c'est-à-dire la direction et le sens que l'individu donne à sa
pratique, sont étroitement liées aux représentations que
les pratiquants ont de leur karaté. Maintenant, il est important de
savoir comment s'opère le choix d'une pratique telle que le
karaté.
2. Les déterminants sociologiques de la pratique du
karaté
Tout d'abord, nous savons que « les choix (et les
rejets) de sports sont d'abord et essentiellement soumis à la logique de
l'habitus »37 ; plus précisément «
la place que l'on occupe dans la société conditionne le type
de rapport que l'on entretient avec son corps et détermine grandement
les usages, notamment sportifs, que l'on en fait
»38. Aussi, nous pouvons dire que « les
dispositions à l'égard du corps, de la pratique sportive, sont
cohérentes avec les dispositions à l'égard d'autres
pratiques culturelles »39. Nous avons décidé
de nous appuyer sur les travaux de Pierre Bourdieu en raison de la sociologie
qu'il développe, construite autour d'une idée centrale : la
réalité du monde social ne repose ni sur les individus ni sur les
groupes mais sur les relations entretenues entre ses éléments.
Aussi, nous pouvons retenir la définition de l'habitus comme un «
ensemble de dispositions incorporées » mais aussi comme un
« principe générateur de pratiques
»40. Il s'agit de dispositions que nous
intériorisons et incorporons de façon durable qui
résistent au changement. L'habitus fonctionne comme un système de
dispositions unifiées qui constitue un élément
d'unité de la personne. Il renvoie à tout ce qu'un individu
possède et qui le constitue. Finalement, l'habitus désigne des
manières d'être, de penser et de faire communes,
37 Pociello, C. (1981) La force, l'énergie,
la grâce et les réflexes in Pociello, C. Sport et
sociétés, Vigot, Paris
38 Op. Cit. Pociello, C.
39 Op. Cit. Defrance, J.
40 Bourdieu, P. (1986) habitus, code et
codification, Actes de recherche en sciences sociales, n°64
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issues de l'incorporation non consciente des normes et
pratiques véhiculées par le groupe d'appartenance.
Dans Sociologie du sport41, Jacques
Defrance soulève une des questions posées par le programme de
recherche de Pierre Bourdieu. C'est Jean-Paul Clément qui traite alors
la question du lien entre la pratique sportive et les choix culturels du
même agent. Dans une enquête42 comparative de trois
sports de combats de préhension, la lutte, le judo et l'aïkido, il
met en évidence que la manière d'engager le corps dans le combat
n'est pas la même en fonction de la position sociale que l'on occupe dans
la société. En effet, dans chacune des disciplines se manifeste
une conception particulière de l'affrontement, avec des façons de
d'engager son corps et de s'affronter à l'adversaire qui différe
d'une pratique à une autre.
Par exemple, le lutteur privilégie un contact rugueux
des corps, travaillant sur des appuis solides, avec un effort soutenu.
L'étude de Jean-Paul Clément met en évidence que la lutte
« est un sport de prolo » et que les lutteurs sont dans leur
grande majorité d'origine ouvrière. En ce qui concerne le judo,
il s'agit d'une pratique ayant comme objectif de projeter et de maîtriser
au sol comme la lutte. L'élément qui permet de
différencier ces deux pratiques est le médiateur utilisé :
le kimono. Il a également été mis en évidence que
les pratiquants sont issus des couches moyennes, c'est-à-dire des cadres
moyens, employés ou encore techniciens. L'aïkidoka, quant à
lui, utilise une mobilité dans le déplacement à «
distance sociale »43. Il se prépare
silencieusement à l'entrainement, par des exercices de contrôle de
soi et de méditation. Dans ce cas, le kimono ne joue pas un rôle
essentiel contrairement au pantalon (hakama). Cette activité est
pratiquée par des cadres supérieurs avec une grande proportion de
professions « intellectuelles ». Finalement, le choix d'une
pratique de combat reconnues et légitime à un moment donné
est socialement et culturellement conditionné44.
En ce qui concerne la pratique du karaté, nous
pourrions donc dire que la manière dont nous pratiquons,
c'est-à-dire le type de rapport au corps, expliquerait la place que l'on
occupe dans la société. Aussi, le choix de la pratique du
karaté serait conditionné par l'habitus et que
41 Defrance, J. (1995) Sociologie du sport,
La découverte, Paris
42 Clément, JP. (1981) La force, la
souplesse et l'harmonie, in Pociello, C. Sport et sociétés,
Vigot, Paris
43 Hall, E. (1971) La dimension
cachée, Seuil, Paris
44 Op. Cit. Clément, JP.
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la forme de pratique ne sera pas la même en fonction du
statut social, des capitaux économiques et culturels dont le pratiquant
dispose.
Plus précisément, les orientations de la
pratique du karaté seraient socialement déterminées. Par
exemple le karaté-jutsu45 pourrait rassembler des individus
ayant les mêmes caractéristiques sociales à savoir un
emploi proche ou encore un niveau d'étude similaire. Dès lors, il
serait possible qu'au sein d'une même pratique identifiée
socialement comme étant du karaté, il puisse y avoir des logiques
d'habitus différents en raison de la multitude de formes, de styles donc
d'usages sociaux existants. Alors, se pose la question de la diversification
lors du développement de la pratique.
3. La diversification et modification de la structure
sociale
Les recherches de Jean-Paul Clément apportent un
éclairage intéressant quant aux raisons de la diversification
d'une pratique. En effet, dans son étude comparative de la lutte, du
judo et de l'aïkido, il explique que le judo occupe une place originale
dans le système des sports de combat en raison d'une grande
diversité de modalité de pratique, allant de la
compétition à l'esthétique, et donc différents
usages sociaux. Même si le judo moderne est plus orienté sur une
pratique sportive compétitive, il est possible de trouver un dojo
proposant une pratique du judo axée sur d'autres aspects comme le
taïso46. Jean-Paul Clément expose le fait que tout au
long de l'histoire le judo a élargi son éventail de pratiquants
et dès son implantation l'élite intellectuelle de Paris
fréquente les dojos. Ce fait aura pour conséquence une
modification de son public, en effet, « du grand public succède
les universitaires »47. Dès lors, le judo
connaît ses premiers conflits ayant comme raison la diversification et la
transformation de la structure sociale de la pratique. La notion de «
champ »48 est sous jacente ici. En effet, chaque champ
se caractérise par un rapport de forces entre dominants et
dominés où les agents sociaux s'affrontent pour conserver ou
transformer ces rapports de forces. Un certain nombre de traits invariants
peuvent être
45 Le karaté-jutsu est une forme de pratique
récente qui propose une synthèse de différentes pratiques
martiales. Concrètement, le karaté-justuka peut utiliser toutes
les techniques de karaté (coup de poing, coup de pied) mais
également certaines techniques issues du judo comme les projections ou
bien du jiu-jitsu comme les étranglements.
46 A l'origine, le Taïso nommait les
activités physiques complémentaires pratiquées par les
compétiteurs de judo ou de jujitsu dans le cadre de leur entrainement.
De nos jours cette discipline intéresse un public de plus en plus large,
sans limite d'âge, qui n'a pas forcément pratiqué de sport
auparavant et qui recherche un loisir axé sur la culture et l'entretien
physique.
47 Thibault, C. (2000) Entretien avec les
pionniers du Judo, édition- Broché, Paris
48 Bourdieu, P ; (1994) Raisons pratiques, sur la
théorie de l'action, Seuil, Paris
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discernés comme le degré d'autonomie,
l'opposition entre les positions les plus autonomes et les moins autonomes,
l'opposition actuelles entre dominants et dominés. Dès lors, ce
processus ne s'applique pas qu'au judo, mais d'après Jean-Paul
Clément, semble « caractériser tous les sports ayant
connu une forte expansion ». D'après Christian Pociello, il
existe un rapport entre la diversification de la pratique, qui peut aller
jusqu'à la modification de la logique interne, et l'usage social de
celle-ci49.
Contrairement au judo, la lutte n'aurait pas connu de
divergence de ce genre en ce qui concerne la conception de la pratique. La
raison invoquée serait que la pratique de la lutte ne semblerait pas
avoir été « un enjeu de lutte entre les
différents groupes sociaux ». C'est cette absence de
concurrence qui permettrait d'expliquer que cette pratique apparaisse comme la
« force rudimentaire » tandis que le judo à valoriser
la « souplesse », la « technique » ou
encore l' « esthétique ». Pour reprendre les mots de
Jean-Paul Clément, « chaque pratique se définit par
rapport et en opposition aux autres pratiques ».
En ce qui concerne le karaté, il existe aujourd'hui
plus d'une vingtaine de styles de karaté comme le Shotokan, l'Uechi ryu
ou encore le Kempo. Or, il y a très peu de styles qui se sont
implantés dans les années 1950 en France. Au sens où
l'entend Jean-Paul Clément, la diversification et la multiplication de
la pratique du karaté serait due aux conflits d'idéaux et de sens
entre les différents groupes sociaux qui composent la population de
karatéka. C'est pour cela qu'aujourd'hui d'autres formes de pratique se
développent comme le karaté-jutsu, le karaté-contact, le
karaté enfant ou le body-karaté. Dès lors, les
modalités de pratique ont beaucoup évolué et d'autres sont
apparues depuis plus de 60 ans. L'exemple du body-karaté démontre
bien la modification de l'usage social qui peut être fait du
karaté. Aussi cette forme de pratique, qui s'inscrit dans une logique
hygiéniste, utilise les techniques de karaté sur de la musique
afin de rechercher du plaisir et du bien-être50. Toute fois,
le body-karaté permet également d'orienter l'offre de la pratique
afin de toucher un public plus féminin.
Nous pouvons dire que le karaté a connu une forte
expansion ainsi qu'une modification de son public, ce qui a
entraîné une diversification des modalités de pratique
illustrée par le body-karaté. La diversité des publics au
sein de la pratique pourrait amener à la constitution de groupes sociaux
ayant chacun sa propre définition et conception du karaté. Il en
résulterait
49 Pociello, C. (1980) Eléments pour la
constitution d'une histoire des pratiques sportives. Travaux de recherche de
l'INSEP, n°6, édition spéciale histoire des sports
50 Gleyse, J. (1999) Yves TRAVAILLOT,
Sociologie des pratiques d'entretien du corps, Corps et
Culture, N° 4
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alors une transformation de la structure sociale en raison de la
variété des usages et des
logiques internes existantes. Toutefois, ce propos est à
nuancer car ce n'est pas strict.
Rappelons que « chaque pratique se définit par
rapport et en opposition aux autres pratiques »51, ce qui
nous laisse penser qu'au sein même de l'espace social du karaté il
puisse y avoir des enjeux de lutte afin que chaque groupe social puisse
défendre sa conception, ses valeurs ainsi que sa vision de pratique.
Autrement dit, accéder aux définitions, aux valeurs, aux
représentations des pratiquants nous permettra de faire émerger
les conflits entre les différentes conceptions du karaté. Puis
nous élaborerons une typologie des profils types de pratiquants. Il est
donc nécessaire de présenter le mécanisme de constitution
des représentations et des opinions afin de pouvoir proposer une
méthodologie pertinente.
4. L'opinion et les représentations comme construits
sociaux
L'opinion individuelle, définie par Jean Stoetzel comme
une « formule nuancée qui, sur une question
déterminée, reçoit l'adhésion sans réserve
d'un sujet »52, ne peut être convoquée sur le
champ par le questionnaire ou l'entretien comme s'il existait, toute
fabriquée, une opinion qui n'aurait jamais été
modifiée. Beaucoup d'études en ethnologie, linguistique ou
sociologie, convergent pour indiquer que le fruit des interactions entre
individus, comme une conversation dans le métro ou au travail, qui
permet de construire ou de rappeler à soi une opinion et de s'y tenir.
Cette construction varie selon les interlocuteurs ou plutôt selon la
valeur qu'ils prennent. Par exemple, une opinion exprimée devant un
supérieur n'entre pas dans la même stratégie qu'une opinion
formulée avec un collège, en privée ou en public, dans une
relation amoureuse ou autre. Ainsi, l'opinion est toujours un «
construit social »53dépendant de la situation
dans laquelle elle s'exprime. Nous pouvons également la
considérer comme une contrainte sociale ou politique qui pousse un
individu à se rallier à un discours sous peine de ne pas
être compris.
Dès lors, nous considérons que l'étude
des pratiques sportives par les opinions nécessite de préciser la
construction des représentations sociales, au sens où en parle
Jean Claude Abric54, à savoir « un processus au
centre de tensions participantes à la prise d'opinions ». Ce
sont des « représentations construites dans le cadre des
pratiques quotidiennes et
51 Op. Cit. Clément, JP.
52 Stoetzel, J. (1943) La théorie des
opinions, P.U.F, Paris
53 Duclos, D. & Meynaud, HY. (1985) Les
sondages d'opinion, La découverte, Paris
54 Abric, JC. (2003) Méthodes
d'études des représentations sociales (dir.), Erès,
Ramonville
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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partagées par l'ensemble d'un groupe social
au-delà des particularités individuelles » pour Serge
Moscovici55. Les représentations sont des constructions
sociales qui aident à poser le réel, c'est-à-dire qu'elles
permettent « de donner un sens à ses conduites, et de
comprendre la réalité, à travers son propre système
de références, donc de s'y adapter, de s'y définir une
place »56, en fonction des expériences, des
émotions, donc de la réalité vécue par
l'individu.
Jean Corneloup, dans son enquête d'opinion sur
l'étude des pratiques sportives de montagne57, rappel que le
processus décisionnel permettant d'exprimer son opinion sur un sujet
renvoie à un jeu complexe. En effet, il propose de redonner de
l'importance à l'idée de co-production de la
représentation si l'individu est considéré comme
producteur de valeurs, tout en restant engagé dans des champs de force
multiples avec lesquels il doit composer. Il rappel également que
l'opinion n'est pas fixe et peut évoluer dans le temps comme l'ont
montrés les travaux de Vérène Chevalier en
équitation58. Donc, les karatéka produisent leurs
représentations sur la pratique en fonction des expériences, des
émotions et de leur réalité vécue, tout en
composant avec de multiples champs de forces. De plus, le karatéka
produira une opinion qui évoluera et se transformera dans le temps.
Ainsi, l'individu peut être pensé comme faisant
partie d'un champ de symboles au sein duquel il choisit ceux qui l'attirent et
ceux qu'il rejette. « Ce jeu d'attirance et de répulsion permet
à l'individu de se situer en composant son univers symbolique de
référence » pour Jean Corneloup. Toute fois, l'opinion
traduit une position sociale marquant la manière dont l'individu compose
sa relation avec le social. Donc, si nous souhaitons comprendre au mieux le
pratiquant nous devons prendre en compte tout un ensemble de facteurs. En
effet, nous avons vu qu'une opinion est un construit social qui résulte
d'une interaction et qu'elle dépendant de la situation dans laquelle
elle s'exprime. Aussi, la représentation est un processus au centre de
tensions participantes à la prise d'opinions.
55 Moscovici, S. (1989) Les représentations
sociales, P.U.F, .Paris
56 Abric, JC. (1994) Pratiques sociales et
représentations, P.U.F, Paris
57 Corneloup, J. (2008) L'enquête
d'opinion dans l'étude des pratiques sportives de montagne,
Bulletin de méthodologie sociologique
58 Chevalier, V. (1994) Démographie
sportive. Itinéraire et abandons dans les pratiques de
l'équitation, Thèse pour le Doctorat Histoire et
Civilisation des Sociétés Occidentales. Paris VII
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Nous avons vu que chaque individu oriente sa pratique en
fonction des valeurs et du sens qu'il donne au karaté, ce qui abouti a
différentes conceptions de la pratique (sportive, philosophique,
self-défense). Ces orientations sont étroitement liées aux
représentations que les pratiquants ont de leur pratique. Aussi, il
serait possible qu'au sein d'une même pratique il existe des orientations
complètement différentes en raison de la multitude de formes, de
styles donc d'usages sociaux. De plus, nous avons vu que qu'au sein même
de l'espace social du karaté émergent des tensions en raison
d'enjeux de lutte afin que chaque pratiquant puisse défendre sa
conception, ses valeurs ainsi que son orientation de pratique. Enfin, nous
avons vu que les représentations sont construites dans le cadre des
pratiques quotidiennes et partagées par l'ensemble d'une population.
Dès lors, acquérir les opinions du pratiquant par
l'intermédiaire de questions simples nous permettra de mettre à
jour les représentations ainsi que les enjeux existants dans l'espace de
la pratique.
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