Conclusion de la deuxième partie
Le deuxième mouvement de notre travail porte sur ce que
nous avons nommé la métamorphose de la race. Le recours à
la notion bourdieusienne de l'habitus nous a permis d'observer
l'évolution du discours nationalitaire à travers de nouvelles
formes. L'hystérésis de l'habitus consacre le caractère
durable de l'ethnicité et sa transposition aussi dans les
activités sociales. L'histoire fait corps avec les
représentations sociales des acteurs.
Cette partie consiste aussi, en une double temporalité
; deux chapitres en effet, permettent de poursuivre notre analyse sur la
dynamique du discours nationalitaire.
Le chapitre troisième de notre travail, traite des
nationalismes, sous le prisme du multiculturalisme, c'est-à-dire, de la
construction du Gabon à l'aube des indépendances, dont l'enjeu
majeure consiste à intégrer les nationalités pour
ériger une Nation. « Gabon d'abord », le tiers symbolique et
manifeste patriotique des Pères de la nation, dont les discours
tantôt mal maitrisés, tantôt mal repris va reproduire, en
dépit de la volonté de construire un idéal commun, les
représentations ethniques, avec parfois des faits xénophobes
comme les évènements sanglants opposant, à Port-Gentil,
Gabonais et Togolais en 1953. Nationalisme de substitution donc, les
schèmes claniques précoloniaux, les idées reçues de
la race coloniale, sont convoqués pour donner lieu, à la fixation
d'un symbolisme, qui suppose l'éradication, de la présence au
Gabon des Africains de la sous-région.
L'histoire des nations humaines nous rappelle que
l'émergence d'une conscience citoyenne quelque peu cohérente ne
s'est faite, nulle part, sans beaucoup temps. La lutte pour le pouvoir d'Etat
va exhumer les logiques ethniques et la géopolitique du pluralisme
culturelle adoptée par le régime Bongo, va consacrer les
cristallisations et substantialiser les représentations nationalitaires,
que le gabonisme « Vas-y voir le ministre de chez toi », par
exemple ou encore, la mobilisation ethnique, le vote régional ou le
repli identitaire démontre.
Le quatrième et dernier chapitre de notre travail, est
consacré à ce que nous avons choisi, du fait d'une
référence à Boltanski et Chiapello, Le nouvel esprit de la
nationalité, pour évoquer telles les recompositions du
capitalisme, les survivances du discours ethnique dans le quotidien des
acteurs.
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Il s'est agi de questionner les représentations
sociales de la gabonité, par les acteurs gabonais dont les discours
établi une typologie qui distingue les Gabonais « légaux et
naturalisés » des gabonais « naturels et légitimes
». La légalité consiste surtout à conférer la
nationalité gabonaise, dans une optique plutôt citoyenne. C'est
dans cette optique que nous avons jugé opportun et important de
questionner la réalité de la logique métisse chère
à Amselle. La binationalité est au sens des
représentations sociales, une « anationalité ». C'est
pourquoi nous parlons d'apatridie de fait. L'intérêt porté
sur la gabonité dans son rapport à une mondialisation
supposée intégrative, permet de révéler les heurts,
les tumultes et tourments des individus logiquement ethno-situés, en mal
avec le multiculturalisme.
L'homo ethnicus demeure et l'ethnie, du fait des habitus
ethniste, continue de produire une vision ethnocentrée du monde social.
La différence est sujette à cristallisation dans la lutte pour le
pouvoir et autres capitaux.
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